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Louis XIV de France
« Louis XIV » redirige ici. Pour les autres significations, voir Louis XIV (homonymie). Louis XIV Roi de France Portrait de Louis XIV par Hyacinthe Rigaud (1701)Règne 14 mai 1643 - 1er septembre 1715
72 ans, 3 mois et 17 joursSacre 7 juin 1654, Reims Dynastie Maison de Bourbon Titre complet Roi de France et de Navarre
Coprince d'AndorrePrédécesseur Louis XIII Successeur Louis XV Héritier Louis de France (1661-1711)
Louis de France (1711-1712)
Louis de France (1711-1715)Autres fonctions Roi de Navarre Période
14 mai 1643 - 1er septembre 1715Président {{{président1}}} Président(s) de la République {{{président de la république1}}} Monarque Louis III Gouverneur général {{{gouverneur1}}} Prédécesseur Louis XIII Successeur Louis XV Coprince d'Andorre Période
14 mai 1643 - 1er septembre 1715Président {{{président2}}} Président(s) de la République {{{président de la république2}}} Monarque Louis XIV Gouverneur général {{{gouverneur2}}} Prédécesseur Louis XIII Successeur Louis XV {{{fonction3}}} Période
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{{{début fonction10}}} - {{{fin fonction10}}}Président {{{président10}}} Président(s) de la République {{{président de la république10}}} Monarque {{{monarque10}}} Gouverneur général {{{gouverneur10}}} Prédécesseur {{{prédécesseur10}}} Successeur {{{successeur10}}} Biographie Nom de naissance Louis-Dieudonné Naissance 5 septembre 1638 Saint-Germain-en-Laye Décès 1er septembre 1715 Château de Versailles, Versailles Père Louis XIII Mère Anne d'Autriche Conjoint(s) Marie-Thérèse d'Autriche
Mme de MaintenonDescendance Louis de France (1661-1711)
Anne-Elisabeth de France
Marie-Anne de France
Marie-Thérèse de France (1667-1672)
Philippe-Charles de France
Louis-François de FranceRésidence(s) Palais du Louvre
Château de VersaillesSignature Rois de France Louis XIV (Louis Quatorze, ou, jusqu'au XVIIe siècle inclus, Louis Quatorzième), prénommé à sa naissance Louis-Dieudonné et surnommé par la suite le Roi-Soleil ou Louis le Grand (Saint-Germain-en-Laye, 5 septembre 1638 – Versailles, 1er septembre 1715) est, du 14 mai 1643 jusqu’à sa mort, roi de France et de Navarre, le troisième de la maison de Bourbon de la dynastie capétienne. Louis XIV, a régné pendant 72 ans: il est le chef d'État qui a gouverné la France le plus longtemps et le monarque qui a régné le plus longtemps en Europe.
Louis XIV accède au trône quelques mois avant son cinquième anniversaire, mais, après une minorité très marquée par la révolte de la Fronde (1648-1653), il n’assume personnellement le contrôle du gouvernement qu’à partir de la mort de son ministre principal, le Cardinal Mazarin, en 1661. Il ne prend alors plus de ministre principal et accentue encore son rôle direct dans l'État après la mort de ses puissants ministres Colbert (1683) et Louvois (1691). Son règne marque l'apogée de la construction séculaire d'un absolutisme royal de droit divin. Son autorité absolue se déploie avec la fin des grandes révoltes nobiliaires, parlementaires, protestantes et paysannes, qui marquaient la vie du royaume depuis plus d'un siècle.
Louis XIV accroit le territoire de la France et sa puissance en Europe. Il mène la diplomatie et la guerre à son gré en combattant durant plusieurs séries de guerres européennes. Il fait fortifier les villes conquises par Vauban et entoure ainsi les nouvelles frontières de leur « ceinture de fer », dans le cadre d'une politique territoriale de « pré carré » qui redessine et rationalise les limites du pays.
Son gouvernement personnel coïncide également avec un effort de développement économique, commercial et colonial, mené notamment par son ministre Colbert, volet économique de la recherche de la prédominance française. Le prestige culturel s'affirme grâce à la présence de figures artistiques protégées par le mécénat royal, telles que Molière, Racine, Boileau, Lully, Le Brun et Le Nôtre. D'autres, plus indépendants, tels le poète La Fontaine, le philosophe Blaise Pascal, l'épistolaire Madame de Sévigné, le moraliste La Bruyère ou le mémorialiste Saint-Simon font également du règne l'apogée historique du classicisme français. Sous son règne, la France acquiert une prééminence européenne économique, politique et militaire, et le prestige de la France, de son peuple, de son langage parlé par les élites et dans toutes les cours d'Europe, et bien sûr de son roi permet, dès son vivant, de parler du « siècle de Louis XIV », sur le modèle des siècles de Périclès et d'Auguste, ou encore du « Grand Siècle ».
Le roi met aussi en place un État centralisé et absolutiste. Il le dirige après 1682 depuis le vaste château de Versailles, dont il a ordonné la construction. Ce dernier, modèle architectural de nombreux palais européens, est le cadre d'une étiquette très élaborée à laquelle il soumet la noblesse de cour, qu'il tient étroitement en main auprès de lui. Louis XIV réduit aussi le rôle des Parlements, réprime les révoltes antifiscales paysannes, entretient un très long bras de fer avec les jansénistes et prend la décision controversée de la révocation de l'édit de Nantes en 1685. La fin de son long règne est ternie par l'exode des protestants persécutés, par une série de revers militaires, par les famines très meurtrières de 1693 et de 1709, par la révolte engendrant la guerre des Camisards, et par de nombreux décès dans la famille royale. Mais la régence de son successeur, Louis XV, âgé de cinq ans à la mort de son arrière-grand-père, se déroule sans heurts, ce qui témoigne de la stabilité du royaume établie par le monarque.
Habité de l'idée de sa gloire et de son droit divin, soucieux d'accomplir en permanence son "métier de roi", Louis XIV est devenu l'archétype du monarque absolu.
La jeunesse
Louis Dieudonné
Fils de Louis XIII et d'Anne d'Autriche, Louis est le fruit d'unions politiques multi-culturelles puisque ses grands-parents paternels Henri IV et Marie de Médicis, étaient respectivement français et italien. Ses grands-parents maternels, Philippe III et Marguerite d'Autriche-Styrie étaient espagnol et autrichien, bien que tous deux Habsbourg, proches parents l'un de l'autre[1].
Au traditionnel titre de Dauphin de Viennois est ajouté à sa naissance celui de Premier fils de France. L’enfant est aussi prénommé Louis-Dieudonné, car, après presque vingt-trois ans de mariage sans enfant, plusieurs fausses couches de la reine et la mésentente du couple royal, la naissance inattendue de l’héritier du trône est considérée comme un don du Ciel. Certains y voient même un miracle[2].
La naissance de Louis est suivie, deux ans plus tard, par celle de Philippe, d'abord titré duc d'Anjou, puis duc d'Orléans à la mort de son oncle. Elle éloigne du trône le frère du roi régnant, Gaston d'Orléans, comploteur impénitent dont le cardinal de Richelieu, premier ministre de Louis XIII, craignait qu'il ne mène en cas d'accession au trône une politique favorable aux nobles et aux Habsbourg. La naissance tant espérée d'un dauphin est ainsi une victoire politique pour Richelieu.
À la mort de son père, l'enfant devient roi sous le nom de Louis XIV. Comme il n'a que quatre ans et demi, sa mère, Anne d'Autriche, devient régente. Elle choisit contre toute attente le cardinal Mazarin comme Premier ministre, en dépit de la désapprobation des cercles politiques français de l'époque dont beaucoup n'apprécient pas qu'un Italien, fidèle de Richelieu, dirige la France.
L'éducation du roi
En plus de ses fonctions ministérielles, Mazarin, parrain de Louis XIV, se voit attribuer par la reine en mars 1646 la responsabilité de l'éducation du jeune monarque et de son frère. Il devient donc « surintendant au gouvernement et à la conduite de la personne du roi et de celle de M. le duc d'Anjou ». Malgré les efforts des différents précepteurs engagés pour prodiguer cours de latin, histoire, mathématiques, italien et dessin, Louis n'est pas un élève très travailleur. Mais, suivant l'exemple du grand collectionneur d'art qu'est Mazarin, Louis XIV se montre très sensible à la peinture, à l'architecture, à la musique et surtout à la danse qui est, à l'époque, une composante essentielle de l'éducation d'un gentilhomme : on dit que le jeune Louis s'entraîne à danser environ deux heures par jour de l'âge de 7 à 27 ans.
Louis, le "miraculé"
Dans son enfance, Louis XIV échappe à plusieurs reprises à la mort :
- À 5 ans, il manque de se noyer dans un des bassins du jardin du Palais-Royal. Il est sauvé in extremis.
- À 9 ans, le 10 novembre 1647, il est atteint de la variole. Dix jours plus tard, les médecins n’ont plus aucun espoir mais le jeune Louis se remet "miraculeusement".
- Le 30 juin 1658, le roi est victime d’une grave intoxication alimentaire lors de la prise de Bergues dans le Nord. Le lundi 8 juillet, on lui donne les derniers sacrements et on commence à préparer la succession mais Guénaut, le médecin d’Anne d’Autriche, lui donne un émétique à base d’antimoine et de vin qui guérit encore une fois "miraculeusement" le roi.
L'épreuve de la Fronde
Article détaillé : Fronde (histoire).Après avoir célébré sa première communion à l'église Saint-Eustache le 25 décembre 1649, Louis XIV, qui n'a alors que 12 ans, entre au conseil en 1650. C'est l'époque de la Fronde, une contestation de l'autorité royale par les parlements et la noblesse qui allait marquer durablement le monarque. En réaction à ces événements, Louis XIV s'appliqua plus tard à continuer le travail commencé par Richelieu : affaiblir les membres de la noblesse d'épée en les obligeant à servir comme membres de sa cour en transférant la réalité du pouvoir à une administration très centralisée et à la noblesse de robe.
En 1648, le parlement de Paris s'oppose fermement aux impôts levés par Mazarin pour continuer la guerre contre l'Espagne. La Journée des barricades contraint le roi à quitter Paris une première fois. S'il revient assez vite dans la capitale, les exigences des parlementaires, appuyés par le très populaire Jean-François Paul de Gondi, obligent Mazarin à envisager un coup de force. En pleine nuit et dans le plus grand secret, le roi et sa cour quittent la capitale dans le but de l'assiéger et de la remettre à obéissance. L'affaire se complique quand des personnalités de la haute noblesse apportent leur soutien à la fronde : le prince de Conti, frère de Condé, Beaufort, petit-fils d'Henri IV, et quelques autres veulent renverser Mazarin. Si après quelques mois de siège Paris se rend au roi, Mazarin ne parvient pas à imposer sa volonté aux parlementaires et le conflit politique demeure.
En 1650, une nouvelle fronde appelée Fronde des princes se construit autour du tumultueux prince de Condé. Les princes sont arrêtés sur l'ordre de Mazarin, ce qui aboutit à une nouvelle guerre civile relayée essentiellement dans les provinces (Bordeaux). En 1651, Gondi et Beaufort, leaders de la première fronde, s'allient à la fronde des princes, pour renverser Mazarin. L'appui du duc d'Orléans et une émeute parisienne obligent Mazarin à s'exiler. Le 8 février 1651, la reine et le jeune Louis essaient de s'enfuir de la capitale mais, alarmés, les Parisiens envahissent le palais royal où loge le roi, désormais prisonnier de la fronde.
Le 7 septembre 1651, le lit de justice déclare la majorité du roi. Tous les grands du royaume viennent lui rendre hommage sauf Condé qui, de Guyenne, lève une armée pour marcher sur Paris. Défait, Condé se jette dans Paris qui se soulève devant le retour d'exil de Mazarin. Le pouvoir royal doit de nouveau assiéger Paris. Le deuxième exil de Mazarin, les exactions des troupes de Condé, les troubles populaires et le ras-le-bol de la guerre mettent un terme à la fronde, devenue impopulaire. Si la plupart des grands font leur soumission, Condé trahit la France pour se mettre au service de l'Espagne qui a profité du désordre pour reprendre du terrain en Flandre. L'arrestation et l'exil de Gondi, éternel comploteur, permettent de mettre un terme définitif aux troubles.
Louis XIV est sacré officiellement roi le 7 juin 1654 à Reims mais il laisse les affaires politiques à Mazarin, tandis qu’il continue sa formation militaire auprès de Turenne.
Son mariage avec Marie-Thérèse d'Autriche
Pendant le voyage du jeune roi, le 7 novembre 1659, les Espagnols acceptent de signer le traité des Pyrénées qui fixe les frontières entre la France et l'Espagne. De son côté, Louis XIV accepte bon gré, mal gré de respecter une des clauses du traité : épouser l'infante Marie-Thérèse d'Autriche (1638-1683), fille de Philippe IV, roi d'Espagne, et d'Élisabeth de France. Les époux sont doublement cousins germains : la reine-mère Anne d'Autriche étant la sœur de Philippe IV, et Élisabeth de France la sœur de Louis XIII. Ce mariage a cependant pour but de rapprocher la France de l'Espagne. Il a lieu le 9 juin 1660 en l'église Saint-Jean-Baptiste de Saint-Jean-de-Luz.
Louis ne connaît sa femme que depuis trois jours, celle-ci ne parle pas un mot de français, mais le roi "l'honore" fougueusement et devant témoins dès la nuit de noce[3]. (Selon d'autres sources, cette nuit de noces, contrairement à l'usage, n'eut pas de témoin.) [4]
Politique
L'apogée de l'absolutisme
Également connu sous le nom de Roi soleil, Louis XIV renforce la monarchie qui devient monarchie absolue de droit divin. Le 13 avril 1655, le roi décrète 17 édits visant à renflouer les caisses de l’État. La légende raconte qu'à cette occasion, il aurait déclaré aux parlementaires réticents le célèbre mais contesté : « l’État c’est moi ! ». En fait, il ne l'a jamais déclaré. Il dit même le contraire sur son lit de mort, en 1715 : « Je m'en vais, mais l'État demeurera toujours ».[réf. nécessaire] Louis XIV se dissocie de l'État, dont il se définit lui-même comme, seulement, le premier serviteur.[réf. nécessaire]
L'élimination de Fouquet
À la mort de Mazarin, le 9 mars 1661, la première décision de Louis XIV est de supprimer la place de ministre principal et de prendre personnellement le contrôle du gouvernement mais l'entourage du roi n'est pas convaincu de sa stature d'homme d'État. Louis doit faire ses preuves et prouver son autorité.
Le roi avait été informé par Jean-Baptiste Colbert du délabrement des finances[5] après la guerre ruineuse contre la Maison d’Espagne et les 5 années de Fronde, de l’enrichissement personnel effréné de Mazarin, dont Colbert lui-même avait profité, et celui éhonté de Fouquet dont les pratiques spéculatives avaient fait leur temps. Six mois plus tard, le 5 septembre 1661, jour de ses 23 ans, le roi qui avait pu, jeune encore, constater le fort mécontentement des provinces contre la pression fiscale durant les 18 années de ministère du défunt cardinal, fait arrêter au grand jour, par d'Artagnan, Nicolas Fouquet dont il supprime par la même occasion le poste de surintendant des finances. Il crée une chambre de justice pour examiner les comptes des financiers. Même si Fouquet servit de bouc émissaire et qu’il avait pendant presque 9 ans, par son crédit personnel immense, bien rempli sa mission de pourvoyeur d’argent immédiat, il est communément admis aujourd’hui que le surintendant qui eut le malheur d’être le dernier représentant d’un système populairement détesté, avait fini par confondre sans scrupule sa comptabilité avec celle du Trésor. Le roi avait donc besoin de montrer qui dirige le pays et d'éliminer ainsi celui dont il subissait le trop grand ascendant.
Après trois ans d'un procès plein d'irrégularités et influencé par le roi, Fouquet est remplacé par Colbert en 1665. Le règne personnel du Roi-Soleil commence.
Les grandes réformes
- Création du Conseil royal des finances (12 septembre 1661)
La première partie du règne de Louis XIV est marquée par de grandes réformes administratives et surtout par une meilleure répartition de la fiscalité. Les douze premières années virent le pays en paix et le retour d'une relative prospérité[6]. Il va s'opérer le passage d'une monarchie judiciaire (où la principale fonction du roi est de rendre justice) à une monarchie administrative (le roi est à la tête de l'administration). Les finances, dirigées désormais par un contrôleur général, en l'occurrence Colbert, viendront supplanter la justice en tant que première préoccupation du Conseil d'en haut. Celui qui aurait normalement dû être en charge de la justice, le chancelier, qui, sous Louis XIV sera François-Michel Le Tellier, va lui-même délaisser la justice pour se consacrer essentiellement aux affaires de guerre.
Il crée le code Louis en 1667, sorte de code civil, le code criminel en 1670, le code forestier, l'édit sur les classes de la Marine en 1669, l'ordonnance de commerce en 1673.
Au fil du temps, deux clans vont se mettre en place à ses côtés et cohabiter tout en rivalisant l'un avec l'autre. Le clan Colbert va gérer tout ce qui touche à l'économie, la politique étrangère, la Marine et la culture alors que le clan Le Tellier-Louvois va avoir la mainmise sur la Défense. Le roi fait ainsi sienne la devise « diviser pour mieux régner ». En ayant deux clans rivaux sous ses ordres, il est certain qu'ils s'autocontrôleront et que cela empêchera toute dérive permettant à un de ses ministres de réussir un coup d'état contre lui.
Jusqu'en 1671, le clan Colbert domine mais, quand commencent les préparatifs de la guerre de Hollande, les réticences de Colbert, qui rechigne à se lancer à nouveau dans de grandes dépenses, commencent à le discréditer aux yeux du roi. De plus, l'écart d'âge entre Colbert (52 ans à l'époque) et le roi (33 ans) fait que le roi se rapproche naturellement de Louvois qui n'a que 30 ans et la même passion : la guerre. Jusqu'en 1685, c'est le clan Louvois qui est le plus influent.
Création d'un service de police moderne
Paris, état des lieux : « Le Paris du XVIIe siècle est quasiment invivable ». C’est d’abord une concentration dangereuse de populations : épidémies, incendies, inondations, hivers polaires, encombrements et désordres de tout genre. La ville attire des individus qui espèrent vivre mieux auprès des riches : escrocs, brigands, voleurs, mendiants, infirmes, hors-la-loi, paysans sans terre et autres déshérités. Il existe encore la Cour des miracles, le plus célèbre des ghettos incontrôlables (estimés sous Louis XIV à 30 000 individus, soit 6 % du peuplement). Paris sera le premier souci du roi qui n’a pas encore construit Versailles.[7]
Édit de fondation de l’hôpital général de Paris (27 avril 1656)
Cet édit (de Grand Renfermement) a pour objet d’éradiquer la mendicité, le vagabondage et la prostitution. Il est conçu sur le modèle de l’hôpital lyonnais (L’Hospice de la Charité établi en 1624) et s’attire à son service les membres de la compagnie du Saint-Sacrement. Il regroupe les trois établissements de la Salpêtrière, de Bicêtre et de Sainte-Pélagie. En dépit des peines et des expulsions prévues pour ceux qui ne regagnent pas l’hôpital, cette mesure, faute d’effectifs suffisants, sera un échec.
Ordonnance civile de Saint-Germain-en-Laye (3 avril 1667)
Dix ans plus tard, la situation mal maîtrisée a empiré et « on rapporte que le roi n’en dort plus la nuit »[8]. Les différentes factions de police sont disséminées et rivalisent entre elles. Colbert va s’efforcer de coordonner toutes ces autorités en un seul service. Pour atteindre ce but, il fait nommer le 15 mars 1667 La Reynie à la lieutenance générale de police qui vient d’être créée, un homme de son clan intègre et travailleur, qui a déjà participé au conseil de la réforme de la justice. Entre autres, sont annoncées une lieutenance séparée de celles civile et criminelle, la simplification et l’uniformisation des procédures de justice civile pour tout le royaume, et l’obligation de mieux tenir les registres paroissiaux. Les attributions de La Reynie sont étendues : maintien de l’ordre public, des bonnes mœurs, du bon ravitaillement, de la salubrité (ébouages, pavage des rues, fontaines d’eau, etc.), la sécurité (rondes, éclairage des rues par lanternes, lutte contre la délinquance et les incendies, liquidation des « zones de non-droit »[9], etc.). Dès 1674, La Reynie a le titre de lieutenant général de police (en somme, le premier préfet de police de France) et s’acquittera de cette tâche épuisante avec intelligence pendant 30 ans, jusqu’en 1697, année où il se retire.
La Reynie, par un travail de longue haleine, avait réussi à instaurer dans la place de Paris une « sécurité inconnue ». Quand le marquis d’Argenson lui succède en 1697, il hérite du relâchement des dernières années car la situation recommençait à se dégrader. Homme rigoureux et sévère, c’est avec beaucoup d’assiduité et d’intransigeance qu’il entreprend le redressement de la situation. Il va remplir sa fonction de lieutenance en s’appuyant principalement sur la répression, avec une escouade considérable d’espions. On peut dire qu’il instaura une sorte de police secrète d’État dont un des aspects marquant fut de complaire outre mesure aux puissants et d’accentuer le despotisme d’un règne vieillissant. Ses services talentueux et zélés lui valurent, en 1718, la place enviée de garde des Sceaux[10].
La politique étrangère
Louis XIV tend à affirmer la puissance de son Royaume. Il utilise les armes traditionnelles de la diplomatie (ambassade, traités, alliances, unions dynastiques, soutien aux opposants de ses ennemis). Mais c'est surtout par l'armée qu'il s'impose. Il poursuit d'abord la stratégie de ses prédécesseurs depuis François Ier pour dégager la France de l'encerclement hégémonique des Habsbourg en Europe par une guerre continuelle contre l'Espagne, en particulier sur le front des Flandres. Le "grand Roi" en profite pour rendre son "pré carré" par des guerres de conquêtes sur ses voisins. Pour assurer à son petit-fils la succession d'Espagne, il se lance dans une guerre contre toute l'Europe qui finit par épuiser les belligérants. A la fin de son règne, le roi a arraché un compromis: si les Bourbon dominent en France et Espagne, ils reconnaissent deux nouvelles puissances montantes : l'Angleterre protestante et les Habsbourg d'Autriche.
1643/1672 L'alliance traditionnelle contre les Habsbourg
Dans un premier temps, pour se dégager de l'encerclement des Habsbourg, le jeune Louis XIV fait alliance avec les principales puissances protestantes, reprenant ainsi la politique de ses deux prédécesseurs et des ministres Richelieu et Mazarin.
La guerre connaît quatre phases : quand le règne débute, la France soutient directement les puissances protestantes contre les Habsbourg, lors du dernier tiers de ce qu'on a appelé ensuite la guerre de Trente Ans, conclue en 1648 par les traités de Westphalie. Ensuite, lors de la Fronde, l'Espagne soutient la révolte militaire du Grand Condé contre le Roi. Dix ans plus tard, des victoires Françaises et une alliance avec les puritains anglais imposent à l'Espagne le traité des Pyrénées (doublé par un mariage entre Louis XIV et l'infante). Enfin, le conflit reprend à la mort du Roi d'Espagne pour la dévolution de villes frontalières du royaume de France en Flandre espagnole (au nom de l'héritage de son épouse).
À l'issue de cette première période, Louis XIV, jeune roi, est à la tête de ce qui est la première puissance militaire et diplomatique d'Europe s'imposant même au Pape. Il a agrandi son royaume vers le nord (Artois) et conservé au sud le Roussillon.
1672/1697 La puissance dominante mais isolée
Dans un second temps, à partir de 1672, sous l'influence de Louvois, le « Grand Roi » renonce à l'alliance protestante. Pour rendre son "pré carré", il s'isole diplomatiquement dans une politique belliqueuse de conquête qui l'oppose à toute l'Europe.
La poussée vers les Flandres d'un monarque absolu catholique provoque l'inquiétude de la République protestante des Pays-Bas. Dès lors, France et Pays Bas, anciens alliés, deviennent rivaux économiquement et politiquement. En 1672, Louis XIV les attaque. L'Espagne en profite pour tenter de récupérer les villes de Flandres perdues. Ce conflit isole diplomatiquement la France: opposée à la fois aux Habsbourg, au pape et aux protestants d'Europe, après le rapprochement entre les Provinces Unies des Pays Bas, les princes Allemands et le parlement Anglais, elle n'a plus comme allié protestante que la Suède. Sa puissance militaire lui permet toutefois d'imposer la paix sur le front Nord et de prendre le Franche-Comté à l'Espagne (1674, confirmé au traité de Nimègue, 1678). Louis XIV élargit ensuite ses ambitions aux possessions des villes conquises (politique des réunions). Cette politique d'expension territoriale provoque la ligue d'Augsbourg (1682), alliance défensive de l'ensemble des puissances Européenne, les Habsbourg et impériaux, d'une part, et les protestants de l'autre. De 1688 à 1697, plusieurs dures années de guerre s'ensuivent sur terre et sur mer : de l'Irlande où le roi soutient le prétendant catholique au trône de Grande Bretagne, à l'Allemagne, où il soutient la Princesse Palatine jusqu'à la Savoie, les guerres pèsent durement sur les finances royales. La paix négociée par la médiation de la Suède lui permet de prendre l'Alsace.
Le poids de la guerre et l'isolement diplomatique sont partiellement compensés par l'agrandissement du royaume. Le Roi a l'opportunité de devenir première puissance catholique au vu de l'affaiblissement Espagnol.
1697/1714 Le lourd prix du trône d'Espagne
À la fin de son règne, le « Roi très Chrétien » tente de préserver la succession d'Espagne pour son petit-fils ce qui conduit à une guerre qui épuise toute l'Europe.
La fragilité de la santé du roi espagnol Charles II de Habsbourg, sans enfant, pose le problème de sa succession. Louis XIV mène une active diplomatie pour faire hériter un de ses descendants (sa femme et sa mère étaient héritière d'Espagne). Placer un Bourbon sur le trône des Habsbourg ferait de sa famille la première puissance Européenne et même mondiale (au vu de l'empire colonial espagnol). Mais cela l'oppose à la branche Habsbourg d'Autriche, autre prétendante. Pour réussir, Louis XIV se réconcilie avec le pape, abandonnant définitivement le gallicanisme au profit du parti dévot, favorise l'Espagne par des gestes diplomatiques (Traité de Ryswick en 1697) et envisage même un partage complexe avec l'Autriche. Il finit, en 1700, par obtenir l'héritage de la totalité des possessions Espagnoles pour son petit-fils Philippe V d'Espagne. Mais seule la Bavière (de la mère de Philippe V) soutient ce legs. Toutes les autres puissances Européennes provoquent une violente guerre contre les Bourbons de France et d'Espagne qui dure pendant quatorze ans. Elles l'emportent d'abord. La France est prête à traiter (1708) mais les vainqueurs veulent contraindre Louis XIV à détrôner lui-même son petit fils, ce qui le conduit à reprendre des combats qui s'achèvent dans l'épuisement des adversaires, par une paix de compromis (1713): Philippe garde l'Espagne, mais les compensations diverses montrent la montée de la puissance Britannique dans les colonies, et de l'Autriche dans l'Europe centrale et dans les Flandres.
Si, au début du règne, la grande puissance était l'Espagne, la France domine seule vers 1690/1700. En 1715, c'est le Royaume-Uni, et en particulier l'Angleterre, qui est devenu le concurrent le plus redoutable, surtout parce que malgré les efforts de Colbert, le Roi s'est désintéressé de la question coloniale.
Louis XIV, l'homme de guerre
Article détaillé : Guerres de Louis XIV.Louis XIV a ainsi consacré 32 années sur 54 à faire la guerre. Sur son lit de mort, il confesse au futur Louis XV « j'ai trop aimé la guerre ».
Marqué par le modèle et l'éducation de son père, puis fasciné, enfant par la prestance du jeune Condé, Louis XIV assiste enfant à plusieurs combats lors de la Fronde. Il reçoit une formation militaire poussée par Turenne. Jeune, il dirige l'armée. Le 23 juin 1658 à Dunkerque, les Français récemment alliés aux Anglais (gouvernés à l'époque par Lord protecteur Oliver Cromwell) remportent une victoire importante contre Condé et l'Espagne lors de la bataille des Dunes. Ce fut une des premières grandes victoires du jeune Louis qui n'a que 20 ans à l'époque. Il fait célébrer ses victoires à Versailles (galerie des batailles), par des statues et des poèmes de circonstances.
Le Roi, après avoir réorganisé les finances avec Colbert, réorganise avec l'aide de Michel Le Tellier puis du marquis de Louvois, l'armée : unification des soldes, création de l’hôtel des Invalides en 1670, réforme du recrutement. Cette nouvelle impulsion politique limite la désertion et augmente le niveau de vie de la gent militaire. Il demande à Vauban de construire une ceinture de fortifications autour du territoire (politique du pré carré). Il dispose alors d'une armée de 300 000 hommes ce qui en fait de loin la première armée d'Europe, capable de tenir tête à des coalitions rassemblant de nombreux pays européens. Pour renforcer le pouvoir de la France dans le monde, Louis XIV engage le royaume dans une multitude de guerres et batailles :
- de 1667 à 1668, la guerre de Dévolution ;
- de 1672 à 1678, la guerre de Hollande qui se conclut par le fameux traité de Nimègue ;
- de 1683 à 1684, la Guerre des Réunions;
- de 1688 à 1697, la guerre de la Ligue d'Augsbourg (également appelée guerre de Neuf Ans) ;
- de 1701 à 1713, la guerre de Succession d'Espagne.
Ces guerres agrandissent considérablement le territoire français. Sous le règne de Louis XIV, la France conquiert la Haute-Alsace, Metz, Toul, Verdun, le Roussillon, l'Artois, la Flandre française, Cambrai, la Franche-Comté, la Sarre, le Hainaut et la Basse-Alsace. Ces acquisitions consacrent l'hégémonie française en Europe et ceux qui, comme le doge de Gênes, se risquent à défier le Roi, ne tardent pas à en payer les conséquences.
Cependant, l'état de guerre permanent mène l'État au bord de la banqueroute, le forçant à lever de lourds impôts sur le peuple, mais aussi sur la noblesse (impôts de la Capitation, du Dixième). Même la famille royale doit payer des impôts.
La Marine
À la mort de Mazarin, en 1661, la Marine royale, ses ports et ses arsenaux sont en piteux état. Seule une dizaine de vaisseaux de ligne est en état de fonctionnement correct. À la même période, la marine anglaise comptait 157 vaisseaux (dont la moitié sont des vaisseaux importants, embarquant de 30 à 100 canons), soit un rapport de 1 à 8 avec la Marine française. Les flottes de la république des Provinces-Unies en comportent 84.
Contrairement à une idée très répandue, Louis XIV s’intéressa personnellement et contribua avec Colbert à l’essor de la marine de guerre française. Dès 1662, il crée le corps des galères, qui a l'avantage de constituer une flotte à la fois militaire et commerciale. Il préside une fois par semaine le conseil de la Marine et suit avec le plus grand soin les détails de la mobilisation des ressources, fixant chaque année l’ampleur des armements, nommant en personne tous les officiers de vaisseau ou encore choisissant le nom de chaque vaisseau fabriqué.
Le roi souhaite que son armée de mer devienne aussi puissante et redoutée que son armée de terre, non tant pour combattre que pour disposer d'un instrument de dissuasion permettant de ne pas combattre.
Le 7 mars 1669, il crée le titre de secrétaire d’État à la Marine et nomme officiellement Colbert premier titulaire du poste. Dès lors, Colbert et son fils vont mobiliser des ressources humaines, financières et logistiques sans précédent qui ont permis, pratiquement ex-nihilo, de faire de la France une puissance militaire navale de premier rang.
L’objectif fixé par Colbert était d’atteindre une flotte de 120 vaisseaux dont 72 d’au moins 50 canons. À sa mort en 1683, la Royale comptait 117 vaisseaux, 1 200 officiers et 53 000 matelots. De 1661 à la mort de Louis XIV en 1715, 381 vaisseaux et frégates furent construits.
L'économie louis-quatorzienne
La politique économique de Louis XIV est simple : le roi dépense à la guerre tout l'argent que Mazarin puis Colbert s'évertuent à faire rentrer dans les caisses de l'État.
Sous Mazarin, cette pression fiscale est à l'origine de nombreuses rébellions aussi bien au niveau de l'aristocratie (la Fronde) que du peuple (les jacqueries) :
- La révolte des sabotiers de Sologne (d'avril à août 1658).
- La révolte du Boulonnais en mai 1662 (aussi appelée « Révolte des Lustucru »).
Après Mazarin, Colbert a lui aussi multiplié les initiatives économiques :
- Il invente sa propre version du mercantilisme qu'on appelle ensuite le colbertisme. Son concept se résume en quelques mots : augmenter les exportations et réduire les importations.
- Il crée les manufactures qui peuvent être d'État (tapisseries de Beauvais, des Gobelins) ou privées (Saint-Gobain). Pour faire rentrer des devises, Colbert favorise l'exportation par des aides d'État et limite les importations en instaurant un protectionnisme fort. Il incite les meilleurs artisans d'Europe à venir travailler en France pour disposer des produits de la meilleure qualité possible et donc plus faciles à vendre.
- Pour faciliter le commerce, il améliore les infrastructures en créant des routes. Avec l'aide de son fils, Jean-Baptiste Colbert de Seignelay, il développe la marine marchande pour vendre les produits et la « marine royale » (militaire) pour protéger les convois.
- Il favorise le développement des colonies et la création des compagnies commerciales : Compagnie des Indes Orientales (Océan indien), Compagnie des Indes Occidentales (Amériques), Compagnie du Levant (Méditerranée et Empire ottoman) et Compagnie du Sénégal (Afrique) pour promouvoir le commerce triangulaire des esclaves.
Le développement des colonies
- En 1654, la Nouvelle-France (l'Acadie et le Canada) est colonisée pour ses ressources naturelles, surtout les pelleteries. Elle est gérée par la Compagnie de la Nouvelle-France.
- En 1659, un premier comptoir français, nommé « Saint-Louis » en hommage au roi, est installé sur l'île de Ndar au Sénégal. Le pays fut cédé à la Compagnie du Sénégal en 1673 pour transférer des esclaves noirs aux Antilles.
- En 1664, sur ordre du roi, Joseph-Antoine Le Febvre de La Barre reprend la Guyane française aux Néerlandais alors même que la France leur est alliée.
- En 1665, Louis XIV crée la Compagnie française des Indes orientales basée initialement à Madagascar. La même année, Colbert rachète la Guadeloupe à Charles Houel du Petit Pré, ancien directeur de la Compagnie des îles d'Amérique, et l'île de la Martinique à Jacques Dyel Duparquet. Tous ces territoires sont confiés en gestion à la Compagnie des Indes qui fit faillite en 1674, date à laquelle ces territoires sont rattachés au domaine royal.
- En 1682, La Salle fonde à l'embouchure du Mississippi une nouvelle colonie française qui est nommée Louisiane (Nouvelle-France) en l'honneur du roi Louis.
- En 1697, le traité de Ryswick attribue la moitié ouest de l'île de Saint-Domingue, (aujourd'hui Haïti) à la France.
Malgré tout, les colonies sont plus une priorité pour Colbert que pour le roi. On a besoin de chair à canon pour mener les guerres en Europe et on n'envoie que très peu de gens aux colonies : les engagées et les jeunes orphelines surnommées « les filles du roi » au Canada (Nouvelle-France). Colbert entrevoit, lui, les ressources potentielles dans le développement des colonies mais dans sa correspondance avec les intendants de la Nouvelle-France, il est strict : les colonies servent au royaume et ne doivent pas se développer au détriment de l'industrie française. Pour favoriser l'accroissement naturel, il crée des amendes pour les colons masculins célibataires de plus de 20 ans et les filles de plus de 16 ans non mariées. En outre, il alloue la somme de 300 livres aux familles de plus de dix enfants.
Le Code noir
Dans le contexte de la codification absolutiste du Royaume, de la religion, et de l'économie, Louis XIV, en mars 1685, promulgue le « Code noir »: ce texte, qui expulse les Juifs des Antilles définit les règles de métissage et régularise le plein usage des esclaves dans les colonies auquel il donne un cadre juridique. Ses détracteurs y dénoncent une institutionnalisation de l'esclavage et de ses sévices (amputations par exemple en cas de fuite...); il pose toutefois certaines limites à l'arbitraire des propriétaires (une obligation de soins et de nourriture suffisante) et il est reconnu aux esclaves un droit limité à certaines formes de droits religieux, juridiques, de propriété et de retraite. Mais même ces rares dispositions furent toutefois mal appliquées du fait de la pression des colons sur la justice.
Une politique de contrôle religieux
Louis XIV est catholique, mais, dans le domaine religieux comme dans les autres il vise à contrôler l'ensemble de ses sujets. C'est pourquoi il est partisan du gallicanisme, dans une France catholique unifiée mais indépendante du pape. Il s'oppose ainsi successivement au parti dévot, aux jansénistes, aux libertins et aux protestants, avant d'évoluer vers un catholicisme traditionnel proche du pape, à la fin de son regne.
Du libertinage au gallicanisme
Le jeune Roi choque d'abord le parti dévot et Bossuet par ses plaisirs et sa politique étrangère d'alliance avec les protestants et les Turcs. La querelle du Tartuffe dont les dévots demandent l'interdiction marque cette période. Le roi élabore toutefois rapidement une politique religieuse qui vise à l'affirmation de son autorité.
Ses réformes gallicanes affirment donc l'indépendance du clergé français par rapport au pape (donc aux jésuites). Alexandre VII est même menacé de guerre en 1662 car il voulait réduire l'extraterritorialité de l'ambassade de France à Rome (pour raisons diplomatiques et de police). Avignon est occupé.
La politique religieuse royale vise en outre à la soumission des fractions religieuses catholiques du royaume dans une unité d'obéissance. Elle encourage ainsi les conversions de la noblesse protestante au catholicisme. En outre, le 13 décembre 1660, le roi fait savoir au Parlement qu’il a décidé d’éradiquer le jansénisme et en 1664 il dissout les congrégations secrètes (ce qui vise la compagnie du Saint-Sacrement). Il finit par affirmer son droit de régale sur l'ensemble des évêchés français (malgré les protestations du pape mais aussi des évêques jansénistes de Pamiers et d'Alet lors de l'affaire de la régale).
De la paix de l'église au rapprochement avec les Dévots
Vers 1672, après s'être opposé et imposé aux différents courants catholiques du royaume, le roi réunit autour de lui toute l'église de France, dans le contexte de sa rupture avec les puissances protestantes et de l'évolution de la cour. Il choisit Simon Arnauld de Pomponne, un ancien proche des jansénistes pour secrétaire d'État, (1671), nomme Bossuet le plus grand orateur des dévots, précepteur du dauphin, et se rapproche du pape Clément et de ses jésuites (comme Bourdaloue). Le pape se réconsilie avec les jansénistes. C'est la Paix de l'Église. L'ensemble des courants catholiques est en apparence réunifié autour du Roi.
Mais la politique étrangère de Louis XIV entraîne une nouvelle rupture avec le pape (refus d'adhérer à l'alliance anti-ottomane, soutien du pape aux Habsbourg d'Autriche). Louis XIV favorise alors le regain d'un gallicanisme constitué autour de Bossuet. A l'assemblée du clergé de 1682, à l'occasion des démêlés entre le roi et le pape, la déclaration sur les libertés de l'Église gallicane fixe les limites du pouvoir du Pape par les déclaration des Quatre articles. Ils sont brulés par le pape.
Avec le décès de la reine Marie-Thérèse, celui de Colbert en 1683 et avec l'affaire des poisons qui choque le Roi, c'est un entourage différent qui domine la cour: l'influence de Madame de Maintenon l'épouse secrète du monarque, celle de Bossuet poussent le roi à assurer l'unité politico religieuse du Royaume autour d'un gallicanisme dévot. Le Roi, désormais en rupture avec les puissances protestantes, entame une politique de conversions forcées des protestants, que le remplacement de Colbert par les Le Tellier amplifie, en prélude à la révocation de l'édit de Nantes.
Révocation de l'Édit de Nantes
Les Protestants avant la révocation
Le protestantisme était, à l'époque de Louis XIV, minoritaire en France, où il n'avait jamais constitué plus de 10 % de la population y compris lors des guerres de religion du XVIe siècle. L'édit, signé à Nantes le13 avril 1598 par le roi de France Henri IV, était un compromis qui laissait la liberté de culte aux protestants dans certaines limites, et la possession de certaines places fortes militaires. Cette possibilité de conserver des places fortes avait été révoquée sous le règne de Louis XIII lors de la paix d'Alès en 1629.
A la cour, le parti nobiliaire protestant avait disparu. La conversion d'Henri IV et l'édit d'Alés l'avait affaibli, et Louis XIV, en "domestiquant" la noblesse, « domestiqua » aussi la religion: bon nombre de nobles protestants, pour y acquérir une charge durent se convertir à la religion du roi, le catholicisme. Sur le plan symbolique, le maintien du protestantisme contredisait ce qu'Élisabeth Labrousse a bien formulé dans son ouvrage portant sur la révocation: le royaume de France ne devait être que sous le règne de l'Unique « un roi, une foi, une loi ». La révocation de l'édit de Nantes ne fut donc pas un coup de tête soudain du monarque, mais le coup final porté au parti protestant en France qui, sans chefs et polémistes charismatiques, ne put résister à la propagande et aux moyens mis en place par les catholiques, qu'ils soient dévots, gallicans ou même jansénistes.
Au plan local et par des arrêts du Conseil, Louis XIV restreignit petit à petit les libertés accordées aux protestants par l'application rigide de l'édit de Nantes, jusqu’à vider le texte de sa substance. La logique fut rapidement que ce qui n'était pas autorisé par l'édit était interdit. Cela conduisit à l'interdiction de tout prosélytisme et de certains métiers pour les membres de la RPR. Avec l'arrivée au pouvoir de Le Tellier, la pression sur les protestant s'aggrava par le moyen des logements de troupes. Les protestants les plus pauvres furent soumis à partir de 1679 aux dragonnades. La radicalisation de cette politique accélèra des conversions contraintes.
La révocation
C'est donc le versant religieux de l'édit de Nantes fut révoqué par Louis XIV le 17 octobre 1685[11] (Édit de Fontainebleau)[12], contresigné par le chancelier Michel Le Tellier. Le protestantisme est dès lors interdit sur le territoire français. Cette révocation entraîne l'exil de beaucoup de huguenots vers des pays protestants : l'Angleterre, les États protestants d'Allemagne, les cantons protestants de Suisse, les Provinces-Unies et ses colonies, comme celle du Cap. On estime à environ 200 000 le nombre d'exilés, dont beaucoup d'artisans ou de membres de la bourgeoisie. Si les récents travaux de Michel Morrineau et de Janine Garrisson ont nuancé les conséquences économiques de la révocation, l'économie ne s'effondrant pas en 1686, et la formation d'une diaspora française en Europe favorisant l'exportation, ou l'essor européen de la langue française, les conséquences humaines et religieuses sont sensibles.
La révocation de l'édit de Nantes rétablit le Royaume comme exclusivement catholique, les temples sont transformés en églises ; mais chez beaucoup des protestants, l'adhésion au catholicisme reste superficielle, comme le montrent des soulèvements de protestants dans le Languedoc dont la guerre des Camisards constitue le paroxysme.
La politique de Louis XIV vis-à-vis du judaïsme
Paradoxalement, si Louis XIV fut hostile à l'Église réformée, il fut moins hostile que ses prédécesseurs aux Juifs. Son règne marque en effet un tournant dans la politique du pouvoir royal vis-à-vis du judaïsme. En 1648, les traités de Westphalie attribuent les Trois-Évêchés et l'Alsace à la France. Les Juifs qui y habitent ne sont pas exclus du royaume bien que l'édit de 1394 expulsant les Juifs de France soit encore théoriquement applicable. En outre, en 1657, Louis XIV est reçu solennellement avec son frère à la synagogue de Metz. Sa politique, peut-être parce que Colbert voit dans les Juifs une population favorisant l'activité économique, permet le développement de la communauté juive lorraine qui croît sensiblement durant son règne. De même, les Juifs portugais, dits Nouveaux Chrétiens, qui vivent à Bordeaux ou dans la région de Bayonne, connaissent une paix relative.
Toutefois, 1685, année de la révocation de l'Édit de Nantes, est aussi une année noire pour les Juifs. Huit d'entre eux sont brûlés vifs à Toulouse et le Code noir publié par le roi décrète dans son premier article l'expulsion des Juifs des Antilles françaises.
A la fin du règne, le rapprochement avec Rome
La politique religieuse du roi dans les dernières années de son regne est marquée par sa politique exterieure. Son rapprochement avec l'Espagne pour influencer la succession d'un Bourbon au trône d'Espagne le fait se rapprocher de Rome.
La Culture et les Arts
Louis le Bâtisseur
Dans l'esprit du roi, la grandeur d'un royaume doit aussi se mesurer par son embellissement. Sur les conseils de Colbert, un des premiers chantiers du roi sera la restauration du palais et du jardin des Tuileries confiée à Louis Le Vau et à André Le Nôtre. Les décors intérieurs sont confiés à Charles Le Brun et aux peintres de la brillante Académie royale de peinture et de sculpture.
Outre le château de Versailles que Louis XIV fait agrandir petit à petit tout au long de son règne, il fait aussi construire le château de Marly afin d'inviter ses intimes. Dans ces deux châteaux, tout comme à Saint-Germain, le château qui vit le début de son règne, il confia la restauration des jardins à Le Nôtre.
Dans Paris, on lui doit aussi, entre autres, le Pont Royal (financé sur ses propres deniers), l'observatoire, les Champs-Élysées, les Invalides, la place Vendôme, mais aussi la place des Victoires qui commémore la victoire sur l'Espagne, l'Empire, le Brandebourg et la Hollande. Deux arcs de triomphe, la porte Saint-Denis et la porte Saint-Martin, célèbrent les victoires du Roi-Soleil lors de ses guerres européennes.
Il fait modifier aussi profondément la structure de villes françaises telles que Lille, Besançon, Belfort, Briançon en les fortifiant grâce aux travaux de Vauban. Certaines villes, telles que Versailles pour la cour ou Neuf-Brisach pour défendre les acquisitions d'Alsace, sont crées ou développées.
Pour faciliter le développement de la Royale, il développe les ports et arsenaux de Brest et de Toulon, crée un port de guerre à Rochefort, des ports de commerce à Lorient et Sète et fait construire le port franc et l'arsenal des galères à Marseille.
- En 1680, création de la Comédie-Française.
- En 1681, ouverture du canal du Midi, qui relie l'Atlantique à la Méditerranée, en passant par Toulouse.
- En novembre 1682, le roi place le collège royal Louis le Grand à Paris sous son haut patronage.
- En 1702, Paris est divisée en vingt quartiers. Création de l'éclairage public et d'une police dans les rues de la capitale.
Louis XIV, Patron des Arts
Après l'arrestation de Fouquet, le roi semble vouloir imiter sa vie fastueuse. Il se montre extrêmement dépensier en allouant des sommes immenses aux frais de la cour royale. Il se comporte en mécène et patron des arts en finançant les grandes figures culturelles de l'époque tels que Molière (en signe d'amitié, le roi accepta d'être le parrain de son premier enfant), le musicien Jean-Baptiste Lully ou le décorateur Charles Le Brun ainsi que le jardinier André Le Nôtre. Il place l'Académie française sous son contrôle et devient son "protecteur". Il dépense aussi d'importantes sommes dans l'amélioration du Louvre avant de finalement choisir le château de Versailles comme résidence royale. Il y emménagea en 1682 après plus de vingt ans de travaux.
Fin de règne et succession
Des problèmes de succession et la santé dégradée du roi assombrissent la fin de son règne. En 1711, son fils Louis de France (le Grand Dauphin) meurt de la variole à 49 ans. L'année suivante, son petit-fils (et premier fils du Grand Dauphin), le duc de Bourgogne (29 ans), devenu à son tour dauphin, et le deuxième fils de celui-ci (5 ans) meurent lors d'une épidémie de rougeole. Ayant déjà perdu son fils aîné en 1705, à sa mort, en 1712, le seul de ses enfants à survivre est son troisième et dernier fils, un petit garçon de deux ans, le futur Louis XV (arrière-petit-fils donc de Louis XIV).
Branche espagnole
Le deuxième fils du Grand Dauphin devient roi d'Espagne en 1700 sous le nom de Philippe V. Il renonce à ses droits à la succession au trône de France à l'issue de la guerre de Succession d'Espagne, par le traité d'Utrecht. Louis XIV réalise ainsi son rêve de mettre un membre de la dynastie des Bourbons (son petit-fils en l'occurrence) sur le trône d'Espagne. Malgré de nombreux renversements suivis de restauration, la Maison de Bourbon conserve la couronne d'Espagne jusqu’à notre époque. L'actuel roi d'Espagne, Juan Carlos Ier, est ainsi un descendant de Louis XIV.
Branche française
Quant au troisième fils du Grand Dauphin, le duc de Berry, il meurt en 1714 des suites d'une chute de cheval. Hormis le roi d'Espagne, le seul descendant mâle légitime de Louis XIV est alors le duc d'Anjou, le plus jeune des fils du duc de Bourgogne et son arrière-petit-fils. Né en 1710, c'est un petit garçon de santé fragile. Comme il ne reste qu'un petit nombre de princes du sang dans d'autres branches, Louis XIV décide de renforcer la maison royale en accordant par un édit du 29 juillet 1714 le droit de succession, à défaut de tous les princes de sang royal[13] au duc du Maine et au comte de Toulouse, deux fils bâtards légitimés qu'il avait eus de Madame de Montespan. Cette décision violait les lois fondamentales du royaume, qui avaient toujours écarté du trône les enfants bâtards, et rencontra une incompréhension souvent scandalisée. Il semble que le roi ait en fait été prêt à contredire les vieilles lois de succession pour écarter du trône son neveu Philippe d'Orléans, successeur potentiel et dont il se méfiait beaucoup. Mais c'est finalement son arrière-petit-fils "officiel" et petit-fils du Grand Dauphin, le duc d'Anjou, âgé de cinq ans, qui devient roi sous le nom de Louis XV, la régence étant exercée, durant sa minorité, par le duc d'Orléans, neveu et gendre de Louis XIV.
Les derniers jours
Article détaillé : Mort de Louis XIV.Le 9 août 1715, au retour de Marly, le roi apparaît brusquement très abattu.
Le 10, il se plaint d’une douleur à la jambe gauche que son premier médecin Fagon, attribue à une sciatique et pour laquelle il préconise une médecine. Les jours passent, les nuits sont agitées, il se nourrit de moins en moins et il paraît à tous, de plus en plus affaibli.
Le 21 août, il accepte la consultation collective de quatre docteurs de la faculté de médecine de Paris qui confirment la sciatique alors que la fièvre mine le malade et que la pourriture de la jambe devient apparente.
Le samedi 24, la situation s’aggrave : la prétendue sciatique se révèle une gangrène sénile à la jambe contre laquelle les médecins sont impuissants.
Le 26, après avoir pris son dîner au lit, qu’il ne quitte plus, il fait entrer son arrière-petit-fils, le petit dauphin, le futur roi Louis XV, âgé de 5 ans et demi. Il lui adresse un discours dont les termes diffèrent selon que l’on se rapporte au marquis de Dangeau ou à Saint-Simon. Ses derniers conseils furent de ne pas l'imiter dans son goût pour les bâtiments, de soulager la misère de ses peuples, « ce que j'ai le regret de ne pas avoir fait », et de vivre en paix avec ses voisins. Il avoua même : « J'ai trop aimé la guerre ». Sur son lit de mort, il déclare aussi : « Je m'en vais, mais l'État demeurera toujours ».
La journée du 30 se passe dans une somnolence quasi constante.
Le samedi 31, la nuit et la journée sont détestables. Il n’a que de rares instants de connaissance. La gangrène gagne le genou et toute la cuisse. On lui donne du remède que sa belle-fille, la duchesse du Maine, a apporté et qui est excellent pour la petite vérole.
Mais le lendemain, 1er septembre 1715, Louis XIV meurt à 8h15 du matin, entouré de ses courtisans, après cette agonie de plusieurs jours. Son règne aura duré 72 ans et 100 jours (54 années de règne effectif si on retire la période de la régence de 1643 à 1661). Il est enterré, muni des Sacrements de l'église catholique, comme se doit de l'être le Roi Très Chrétien, dans la basilique Saint-Denis.Sa disparition ne semble pas avoir soulevé beaucoup d'émotion parmi les courtisans ni parmi le peuple, lassés d'un long règne à la fin assombrie.[réf. nécessaire] Le Parlement de Paris cassa son testament dès le 4 septembre, ouvrant une ère de retour en force des nobles et des parlementaires. Pour la plupart de ses sujets, le souverain vieillissant était devenu une figure de plus en plus lointaine. Le cortège funèbre de Louis XIV fut même hué ou raillé sur la route de Saint-Denis. Cependant, de nombreuses cours étrangères, même traditionnellement ennemies de la France, eurent conscience de la disparition d'un monarque d'exception : l'Électeur de Saxe n'eut besoin d'aucune précision de nom lorsqu'il annonça solennellement à ses ministres : « Messieurs, le Roi est mort ».
Descendance
Louis XIV a de nombreux enfants légitimes et illégitimes.
De sa femme, Marie-Thérèse d'Autriche, le roi a six enfants (3 filles et 3 garçons) dont un seul survécut à l'enfance :
Nom Naissance Décès Louis de France, fils de France, le Grand Dauphin 1er novembre 1661 14 avril 1711 Anne-Élisabeth de France, fille de France 18 novembre 1662 30 décembre 1662 Marie-Anne de France, fille de France 16 novembre 1664 26 décembre 1664 Marie-Thérèse de France, fille de France, la Petite Madame 2 janvier 1667 1er mars 1672 Philippe-Charles de France, fils de France, duc d'Anjou 5 août 1668 10 juillet 1671 Louis-François de France, fils de France, duc d'Anjou 14 juin 1672 4 novembre 1672 De ses deux principales maîtresses, il eut 11 enfants légitimés [14]:
De l'union du roi avec Louise de La Vallière naissent :
- Charles (1663-1672)
- Philippe (1665-1666)
- Marie-Anne, mademoiselle de Blois (1666-1739), mariée au prince de Conti ;
- Louis, comte de Vermandois (1667-1683).
De Madame de Montespan naissent :
- Louise-Françoise (1669-1672)
- Louis-Auguste, duc du Maine (1670-1736) ;
- Louis César, comte de Vexin (1672-1683) ;
- Louise-Françoise, mademoiselle de Nantes (1673-1743), mariée au duc de Bourbon ;
- Louise-Marie, mademoiselle de Tours (1674-1681).
- Françoise-Marie, mademoiselle de Blois (1677-1749), mariée à Philippe d'Orléans, le futur régent ;
- Louis-Alexandre, comte de Toulouse (1678-1737).
En 1679, l'affaire des poisons consomme la disgrâce dans laquelle Madame de Montespan, ex-favorite du roi était tombée quelques mois auparavant.
Le roi aurait eu d'autres enfants mais non reconnus dont :
Personnalité du Roi-Soleil
Le soleil comme emblème
Article détaillé : Us et coutumes à la cour de Versailles.Louis XIV choisit pour emblème le soleil. C'est l'astre qui donne vie à toute chose, mais c'est aussi le symbole de l'ordre et de la régularité. Il régna en soleil sur la cour, les courtisans et la France. En effet, les courtisans assistaient à la journée du roi comme à la course journalière du soleil. Il apparaît même déguisé en soleil lors d'une fête donnée à la cour[15].
Le Roi-Soleil domestiqua définitivement tous ceux qui lui contestaient le pouvoir en faisant de sa vie de monarque un théâtre perpétuel où tout, de son coucher à son lever, de ses repas à ses frasques amoureuses, de ses vêtements à ses animaux de compagnie, de ses divertissements à ses plaisirs intimes, était suivi par des courtisans anxieux.
Sa devise Nec pluribus impar
Voltaire rappelle dans son Histoire du siècle de Louis XIV l’épisode de la célèbre devise du Roi-Soleil. Louis Douvrier, un médailliste « antiquaire » [16], eut l’idée en prévision du prochain carrousel de 1662, d’attribuer un emblème et une devise à Louis XIV qui n’en avait pas. Cet ensemble ne plut pas au roi qui le trouva ostentatoire et prétentieux. Douvrier, pour assurer malgré tout le succès de sa production, la promut discrètement auprès de la Cour qui s’enthousiasma de cette trouvaille et y vit l’occasion de montrer son éternel esprit de flatterie. Le blason comportait un globe éclairé par un soleil étincelant, et la devise : Nec Pluribus Impar (latin). Les héraldistes contemporains furent prompts à y voir un plagiat d’un ancien blason ayant appartenu à Philippe II d'Espagne qui signifiait pour la circonstance : « Suffisant à toutes les étendues »[17]. On fit alors remarquer que ce roi d’Espagne possédait encore à cette époque un empire où le soleil ne se couchait jamais. On détourna donc le sens de cette devise vers la personnalité du roi qui n’en demandait pas tant. Cela lui fit tort car elle lui attribua une attitude hautaine, distante et orgueilleuse qu’il n’avait pas. D’ailleurs, Louis XIV refusa toujours de s’en parer et ne la porta jamais dans les carrousels. Il semble que par la suite il ne fit que la tolérer pour ne pas décevoir ses courtisans.
Traduire la devise par « non inférieur à plusieurs » paraît d’abord un mot à mot plutôt indigent[18] et n’a pas beaucoup de sens si elle s’adresse au soleil. La formule latine trop abrupte (et construite en litote) permet ainsi toutes les traductions. Charles Rozan rapporte dans un ouvrage[19] la parole que Louvois adressa au roi quand celui-ci déplorait le sort de Jacques II d'Angleterre chassé de son pays : « Si jamais devise a été juste à tous égards, c’est celle qui a été faite pour votre Majesté : Seul contre tous ». De fait, le roi dut déclarer la guerre à l’Angleterre, la Hollande, l’Espagne et le Saint-Empire, avec l’espoir de rétablir son cousin sur le trône.
Enfin, la ville de Neuf-Brisach qui doit tant au Roi-Soleil, arbora à cette époque la devise du souverain : Nec pluribus impar, avec le sous-titre inattendu de « sans pareille ». Faisant abstraction du symbole solaire, on peut dire également que Louis XIV fut un roi « sans pareil ». Napoléon Ier en dictant ses mémoires jugeait de son côté : « Le soleil lui-même n’a-t-il pas de taches ? Louis XIV fut un grand roi. C’est lui qui a élevé la France au premier rang des nations. Depuis Charlemagne, quel est le roi de France qu’on puisse comparer à Louis XIV sous toutes ses faces. »
Louis XIV, une force de la nature
On dit du roi qu'il n'était pas grand – 1,61 m – mais qu'il était d'une grande élégance et en imposait par sa prestance, sa beauté et sa superbe. Il fut un amateur fervent de la danse, du spectacle de ballets et du jeu de paume et comme presque tous ses ancêtres, un passionné de chasse et d’équitation. Cela fut surtout vrai pour sa jeunesse car s’il a pu paraître robuste et insensible à la fatigue, ne se plaignant ni du chaud ni du froid, ni de la pluie ni de la grêle, et feignait de s’étonner qu’on puisse en souffrir, Louis XIV fut avant tout un homme d’une grande endurance physique et morale. Et s’il eut un règne d’une longueur exceptionnelle, il fut paradoxalement toute sa vie d’une santé déficiente et maintes fois mise en péril.
La lecture du journal de santé de ce monarque, minutieusement entretenu, est édifiante : il se passe peu de jours sans que le souverain ne soit pas l’objet d’une purgation, d’un lavement, d’un emplâtre, d’une pommade ou d’une saignée[20]. On y trouve entre autres consignés :
- Troubles gastriques et dysenteries : ce sont des indispositions pénibles et chroniques chez ce monarque, réputé gros mangeur.
- Tumeurs : tétin droit cautérisé en janvier 1653...
- Blennorragie : tenue secrète, cette maladie le tenaille régulièrement depuis sa jeunesse (depuis mai 1655, époque de ses premières liaisons).
- Vapeurs et douleurs dorsales fréquentes : certaines (novembre 1647) attribuées à une attaque de petite vérole ; avec pustules sur tout le visage et d’autres parties du corps , suivie d'un début de « gangrène » des doigts de pied...
- Langueurs et fièvres variées : fièvres de fin 1655; fièvre typhoïde de juin 1658...
- Maux de dents : en 1685, toute sa dentition supérieure côté gauche est « arrachée » avec le voile du palais qui sera cautérisé plusieurs fois aux pointes de feu (les liquides lui ressortent parfois par le nez).
- Fistule anale : cette malformation handicapante lui fera finalement subir une opération expérimentale la plus douloureuse qui soit (par le chirurgien Félix) en novembre 1686.
- Ennuis urinaires : accompagnés de probables calculs (mictions accompagnées de « pelotons de sable »)...
- La goutte : des attaques insupportables au pied droit et à la cheville gauche qui le tiennent longtemps immobilisé ou gênent sa marche. Ses dernières années tiendront du supplice.
Un amant fougueux
Louis XIV a de très nombreuses maîtresses, parmi lesquelles Louise de La Vallière, Marie Angélique de Fontanges, Madame de Montespan, Madame de Maintenon (qu'il épousa secrètement après la mort de la Reine, sans doute dans la nuit du 9 au 10 octobre 1683, en présence du Père de La Chaise qui donna la bénédiction nuptiale). Adolescent, il fait la rencontre d'une nièce de Mazarin, Marie Mancini. S'en suivra entre eux une grande passion, contrariée par le cardinal qui, conscient des intérêts de la France et des siens, préfère lui faire épouser l'infante d'Espagne. En 1670, Jean Racine s'inspira de l'histoire du roi et de Marie Mancini pour écrire "Bérénice".
On dit souvent que Mademoiselle Catherine de Beauvais, surnommée Cateau La Borgnesse, déniaisa le roi, mais les historiens en doutent fortement. Cependant, cette femme "issue de peu" eut l'extrême honneur de recevoir un cadeau étonnant d'Anne d'Autriche (la reine-mère) : elle est payée en pierres précieuses, prévues initialement pour les travaux du Louvre, avec lesquelles elle s’est construit un hôtel particulier à Paris, aujourd’hui situé au 68, rue François-Miron, l'hôtel de Beauvais.
Plus tard, le roi fait aménager des escaliers secrets dans Versailles pour rejoindre ses différentes maîtresses[réf. nécessaire]. Ces liaisons irritent la compagnie du Saint-Sacrement, un parti de dévots. Bossuet, comme Madame de Maintenon, tentent de ramener le roi à plus de vertu.
Ses maîtresses et favorites
- Louise Françoise de La Baume Le Blanc, duchesse de La Vallière et de Vaujours (1644+1710),
- Françoise-Athénaïs de Rochechouart de Mortemart, marquise de Montespan (1668),
- Bonne de Pons Marquise d'Heudicourt (1665 ou 1666),
- Françoise d'Aubigné, marquise de Maintenon, veuve du poète Scarron dite "la belle indienne" qu'il épousera en secret après le décès de la reine,
- Marie Mancini, nièce du cardinal de Mazarin qui deviendra Madame la Connétable de Colonna,
- Olympe Mancini, comtesse de Soissons (1655), sœur de la précédente,
- Louise de Nesles, comtesse de Mailly (+1751),
- Lucie de La Motte-Argencourt (1657),
- Marie-Elisabeth de Ludres (1676 à 1677),
- Anne-Julie de Rohan-Chabot, princesse de Soubise (1674 à 1676),
- Mademoiselle de Thianges (1683)
- Lydie de Rochefort-Théobon
- Marie Angélique de Scoraille de Roussille, marquise puis duchesse de Fontanges (+1681), dite « Mademoiselle de Fontanges »
- Henriette Anne Stuart d'Angleterre, sa belle-sœur,
- Claude de Vin des Œillets, dite « mademoiselle des Œillets »
- Anne-Lucie de La Mothe-Houdancourt
- Catherine-Charlotte de Gramont, princesse de Monaco, épouse du prince de Monaco.
Notes et références
- ↑ C. Carretier a calculé que sur huit générations, le sang de Louis XIV avait des origines espagnoles (36 %), françaises (28 %), germanique (11 %) et italien (8 %), le reste étant slave, anglais, savoyard et lorrain (in F. Bluche, Louis XIV, Paris, Fayard, p. 33).
- ↑ Irrité de voir tant de courtisans parler de "miracle", Louis XIII aurait répliqué que « ce n'était point là si grand miracle qu'un mari couchât avec sa femme et lui fasse un enfant » (Claude Dulong, Anne d'Autriche, Gallimard).
- ↑ Jean-Christian Petitfils, Louis XIV, Perrin, 2002
- ↑ Georges Bordonove , "Les Rois qui ont fait la France, Louis XIV, Roi Soleil", Pygmalion, 1983
- ↑ Y.M. Bercé (v. bibliographie) parle même d’«impuissance fiscale » à son arrivée au pouvoir et de « terrorisme fiscal » infligé par le surintendant.
- ↑ F. Lebrun, section Louis XIV, Journal de la France (Gallimard, 2001)
- ↑ Françoise Labalette ; Historia n°737.
- ↑ Historia n°737.
- ↑ voir la Cour des miracles
- ↑ Histoire de Paris, Dulaure, T7, 1829, p155.
- ↑ Bernard Pujo - Vauban - page 128
- ↑ À cette époque, ce resserrement politico-religieux n'est pas propre à la France. L'Angleterre, après l'exécution de Charles Ier, que Louis XIV connut à l'âge de 11 ans en même temps que la Fronde, imposa, en 1673, le Test Act qui interdit jusqu'en 1829 aux Catholiques l'accès aux fonctions publiques et aux Chambres des Lords et des Communes.
- ↑ François Lebrun, in Journal de la France..., Quarto Gallimard, (2001)
- ↑ liste selon Y.M. Bercé, qui ajoute que le roi était attentif à sa progéniture extra-conjugale qu'il aimait beaucoup. Chacun fut reconnu par lettres patentes, et ceux qui survécurent reçurent le nom de Bourbon, furent titrés et dotés. Cela concerne les maîtresses de longue date. Les enfants illégitimes, s'il y en eut, ont par nature une origine problématique.
- ↑ MPB © Site Lully, « Le Ballet de la Nuit », 1653, Site Lully. Consulté le 6 avril 2009 (parues dans La Gazette de France en 1653)
- ↑ le mot désignait un spécialiste des monnaies antiques.
- ↑ ou : à tous les mondes, voire : à plusieurs mondes... La concision de la formule latine admet de nombreux compléments sous-entendus.
- ↑ Le philologue des langues anciennes J. Saunier (1873-1949) indique, dans son Vocabulaire latin, (1927), que le mot latin « par » a le sens premier d'« être capable », dans le sens d’être à la hauteur d’une tâche, de tenir tête à... et plures (pluribus) a le sens de « plus nombreux que » ; « plusieurs » se traduisant plutôt en latin classique par « multi, nonnulli… ».
- ↑ Petites ignorances historiques et littéraires, 1888.
- ↑ Vallot, D’Aquin et Fagon, Journal de la santé de Louis XIV, édité par J.A. Le Roi, aux éditions A. Durand, en 1862 ; ouvrage réédité par Stanis Perez aux éditions Millon, en 2004. Un article s’y référant en a été fait dans l’hebdomadaire Le Point du 18-25 décembre 2008 (Louis XIV « pourri de la tête aux pieds »)
Bibliographie
- Biographies
- Yves Marie Bercé, Louis XIV, Cavalier Bleu coll Idées reçues, 2005 (ISBN 2846701229)
- Lucien Bély, Louis XIV : le plus grand roi du monde, Gisserot, coll. Histoire, 2005 (ISBN 287747772X)
- François Bluche, Louis XIV, Hachette, coll. « Pluriel », 1999 (1re édition 1986) (ISBN 2012789870)
- Vincent Cronin, Louis XIV, Perrin, 1967 (ASIN B0014XDEK0)
- Max Gallo, Louis XIV (2 tomes : Le Roi Soleil (1638-1682) et L'Hiver du grand roi (1683-1715))
- Jean-Christian Petitfils, Louis XIV, Perrin, 2002 (ISBN 2235023142)
- Gérard Sabatier, Versailles ou la figure du roi, Albin Michel, coll. « Bibliothèque des idées », 1999 (ISBN 978-2226104724)
- Béatrix Saule, La journée de Louis XIV, 16 novembre 1700, Actes Sud, 2003
- Synthèse
- Le siècle de Louis XIV par Voltaire - 1751
- François Bluche, Le Temps de Louis XIV, Hachette, coll Vie quotidienne, 1994 (ISBN 2012351050)
- Olivier Chaline, Le Règne de Louis XIV, Flammarion, 2005 (ISBN 2082105180)
- Joël Cornette, Chronique du règne de Louis XIV , SEDES, coll. Regards sur l'Histoire, 1997 (ISBN 2718190116)
- André Corvisier, La France de Louis XIV Ordre intérieur et place en Europe SEDES, coll. Regards sur l'Histoire, 1994 (ISBN 2718136766)
- Pierre Goubert, Le Siècle de Louis XIV, Livre de Poche, coll. « Référence », 1998 (ISBN 2253905453)
- Ragnhild Hatton, L’Époque de Louis XIV, Flammarion, 1992 (1re édition 1969) (ISBN 978-2080609908)
- Robert Mandrou, Louis XIV en son temps, PUF, coll Peuples et Civilisations, 1990 (ISBN 2130358640)
- Hubert Methivier, Le Siècle de Louis XIV , PUF, coll. Que sais-je, 1995 (ISBN 2253905453)
- Monographies
- Faruk Bilici, Louis XIV et son projet de conquête d’Istanbul, Turk Tarih Kurumu, 2004 (ISBN 9751617014)
- Peter Burke, Louis XIV : les stratégies de la gloire, Seuil, 2007 (1re édition 1995) (ISBN 978-2757802946)
- Daniel Dessert, 1661, Louis XIV prend le pouvoir. Naissance d’un mythe ?, Complexe, coll poche, 2000 (ISBN 287027792X)
- Pierre Goubert, Louis XIV et vingt millions de français, Hachette, coll. « Pluriel », 1998 (1re édition 1970) (ISBN 201278870X)
- Hervé Hasquin, Louis XIV face à l’Europe du Nord, Racines, coll. Racines de l'Histoire, 1995 (ISBN 2873863900)
- Jean Meyer, 1638, La Naissance de Louis XIV, Complexe, coll. Mémoire des siècles, 1989 (ISBN 2870273037)
Voir aussi
Articles connexes
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- Louis XIV, ascendance sur trois degrés
- Descendance de Louis XIV (ébauche de tableau de descendance)
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- Homme au masque de fer
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