- Philippe de France (1640-1701)
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Philippe d'Orléans (1640–1701)
Pour les articles homonymes, voir Philippe de France.Philippe d'Orléans (né le 21 septembre 1640 à Saint-Germain-en-Laye, mort le 9 juin 1701 au château de Saint-Cloud), est un prince de France, fils de Louis XIII et frère de Louis XIV.
Il est connu sous son titre de duc d'Orléans ou comme Monsieur.
Ses descendants directs forment la branche d'Orléans.
Sommaire
Titres
Monsieur, frère unique du roi, Fils de France, duc d'Anjou (de sa naissance jusqu'en 1668) puis duc d'Orléans[1], duc de Chartres[1], de Valois[1], de Nemours[2] et de Montpensier[3], de Châtellerault[3], de Saint-Fargeau [3] et de Beaupréau[3], Pair de France[4].
Prince de Joinville[3], comte de Dourdan et de Romorantin[2], comte de Mortain[3], comte de Bar-sur-Seine[3], vicomte d'Auge et de Domfront[3], marquis de Coucy et de Folembray[2], marquis de Mézières[3], baron de Beaujolais[3], seigneur de Montargis[1], chevalier de l'Ordre du Saint-Esprit[5].
Biographie
Enfance et éducation
Philippe, second fils du roi Louis XIII de France et de Navarre, et de son épouse l'infante Anne d'Autriche, naquit deux ans après la naissance de son frère Louis. D'abord titré duc d'Anjou à la naissance, il est héritier présomptif du trône du couronnement de son frère à la naissance du Grand Dauphin (donc de 1643 à 1661).
Il sera surnommé le petit Monsieur pour le distinguer de son oncle Gaston de France qui est alors surnommé le grand Monsieur. À la mort de Gaston en 1660 et à l'avènement de Louis XIV, Philippe portera pleinement son titre de Monsieur, frère du roi, et récupérera comme apanage le duché d'Orléans.
Dès son enfance (dont une partie sous la Fronde), Philippe montra son originalité, son jeu préféré étant de porter des robes et de se poudrer. Son éducation est confiée au précepteur royal François de La Mothe Le Vayer[6].
Il subit des brimades diverses pour en faire un garçon efféminé et faible, à l'opposé total de son frère[7]. On l'amena régulièrement jouer avec un autre garçon de son âge, François-Timoléon de Choisy (futur abbé de Choisy), que la mère habillait aussi en robe sur ordre d'Anne d'Autriche dans le but de satisfaire le petit Monsieur[8]. Même si ce sujet peut être atténué par le fait que porter des robes était à l’époque normal pour les garçons en bas âge (jusqu’à l'âge de six ans environ), Philippe lui en portera occasionnellement même à l'âge adulte, se déguisant en femme et aimant déguiser des femmes de la cour.
Mazarin avait aussi emmené en France ses neveux et ses nièces (les Mancini). Selon certains historiens, ce serait Philippe Mancini qui aurait initié le jeune duc d'Anjou au vice italien[9], comme on appelait les pratiques homosexuelles et pédérastes à l'époque (la Princesse Palatine, sa deuxième épouse, utilisera quant à elle le terme de mal français).
Cette stratégie d'éducation des deux princes faillit toutefois jouer des tours à Mazarin et Anne d'Autriche lorsqu'en 1658 Louis XIV tomba gravement malade (suite à une intoxication alimentaire lors de la prise de Bergues). Des courtisans affluèrent alors autour de Philippe, premier dans l’ordre de succession. Néanmoins, Louis XIV survivra à cet épisode.
Mœurs
Par la suite, Philippe fut notoirement connu pour son libertinage, son homosexualité, ainsi que pour ses parures extravagantes et son train de vie dispendieux. Il aura plusieurs favoris dont le marquis de Châtillon, le comte de Guiche et surtout pendant trente ans le Chevalier de Lorraine. Ce dernier le manipulera jusqu'à sa mort, intriguant contre ses deux femmes (allant jusqu'à faire assassiner la première selon Saint-Simon[10]), et obtenant toute sorte de faveurs dont les meilleurs appartements dans chacune des demeures de Monsieur ou encore prélevant des pots-de-vin sur les accords que celui-ci avait pu passer[11].
Apanage et finances
Côté financier, l'apanage de Monsieur faisait de lui un des personnages les plus riches du royaume. Il récupère entre autres les duchés d'Orléans et de Chartres, qui lui assurent de vivre à la hauteur de son rang, mais son frère lui refusera toutefois le Comté de Blois (et donc le Château de Chambord) et le Languedoc qui auraient aussi dû lui échoir à la mort de son oncle Gaston. Philippe recevra en plus une importante rente du roi et tirera aussi plus tard des revenus de la construction du canal d'Orléans.
Ces revenus lui ont donc permis de vivre dans un faste équivalent à celui de la cour et d'être un grand mécène. Il fut par exemple le protecteur de Molière et de sa troupe, c'est grâce à lui que Molière se produira devant le roi[12]. De plus, Philippe accueille l'académie de musique et l'académie de danse au Palais Royal. Il collectionnera aussi des centaines de tableaux de maîtres, et il amassera bijoux et pierreries.
Il a deux principales résidences :
- le Palais-Royal qu'il a reçu en apanage et qu'il aménage à grands frais. Il y organise des fêtes et des jeux. Son favori y possède bien sûr ses appartements.
- Il aménage ensuite le Château de Saint-Cloud qui lui est offert par son frère en 1658 (on suppose dans l'optique de le ruiner) dans lequel il entreprend encore de nombreux travaux, en particulier la construction de grands jardins à la française et celle d'un trianon.
Article détaillé : Biens de la maison d'Orléans.À l'écart du pouvoir
Malgré un courage indéniable au combat, Louis XIV ne lui laissa aucune marge de manœuvre ni aucun pouvoir. Philippe remporte des victoires de la guerre de Hollande (bataille de la Peene à Noordpeene en 1677) contre le prince d'Orange, ses troupes et les parisiens l'acclament. Par jalousie (ou par précaution), son frère lui enlève à partir de ce jour tout commandement militaire majeur. Cette bataille de la Peene sera donc son seul fait d'armes.
Monsieur restera toute sa vie écarté du pouvoir par le roi Soleil et se contentera de veiller sur l'étiquette à la cour. Ce culte de l'étiquette était presque maladif selon ses contemporains. Il se bat avec les autres personnages de la cour pour que les titres précis de chacun soient respectés ; par exemple, il se dispute avec les Condé pour être le seul à porter le titre de « Monsieur le Prince » (voir Appellations des princes du sang).
Mariages
Il se maria deux fois, deux mariages imposés par Louis XIV. Le premier, avec la princesse Henriette-Anne d'Angleterre devait resserrer les liens des deux pays. Cette dernière ne vivra que de fêtes et aura plusieurs amants, dont (selon les historiens) Louis XIV lui-même, ce qui irritera Philippe. De son côté, Henriette ne supporte pas les favoris de Monsieur. Ils auront tout de même trois enfants.
Alors qu'elle venait d'obtenir du roi l'exil du chevalier de Lorraine, Henriette meurt de façon plutôt mystérieuse à seulement 26 ans (des rumeurs d'empoisonnement par les favoris de Monsieur circulent aussitôt). Cette mort soudaine de Madame vaudra à Bossuet la célèbre oraison funèbre : « Madame se meurt, Madame est morte ».
Monsieur se marie ensuite le 19 novembre 1671 en la cathédrale de Châlons-en-Champagne avec la princesse Palatine qui se convertit rapidement au catholicisme pour l'occasion. Philippe ne s'intéresse pas beaucoup à elle (si ce n'est pour obtenir un héritier mâle). Il n'y a pas d'amour entre eux mais un respect mutuel, Philippe étant un mari plutôt conciliant. Ils auront trois enfants dont le duc de Chartres, futur régent et Mademoiselle de Chartres, future duchesse de Lorraine et de Bar, elle aussi régente. Après avoir eu ces trois enfants, ils se mettent d'accord pour s'épargner réciproquement le devoir conjugal.
Mort
Philippe de France meurt à Saint-Cloud le 9 juin 1701 d'une crise d'apoplexie, après une dispute avec le roi au sujet du mariage de leurs enfants.
En effet, le duc de Chartres (futur régent) avait été contraint d'épouser Mademoiselle de Blois sa cousine, bâtarde légitimée de Louis XIV, en l'échange de charges qu'il n'avait jamais reçues. Monsieur et son frère le roi se disputèrent donc des semaines au sujet de ces charges, et ces disputes aggravèrent la santé de Monsieur qui en mourut.
Le roi fut très affecté de sa disparition et en pleura beaucoup les jours suivants selon les chroniqueurs de l'époque[13]. Malgré les vexations constantes qu'il avait fait subir à son frère, Louis XIV se serait, dit-on, senti coupable de sa mort[14]. Cette tristesse ne fut partagée ni par le chevalier de Lorraine, ni par la Palatine dont la seule pensée fut de savoir comment ne pas finir au couvent ou retirée (comme la tradition et son contrat de mariage le lui imposaient) mais qui secrètement brûla elle-même les lettres écrites au duc par ses mignons afin de ne pas salir la mémoire de son époux.
Descendance
Avec Henriette d'Angleterre
Il se marie le 31 mars 1661 avec sa cousine germaine Henriette d'Angleterre avec qui il eut :
- Marie Louise d'Orléans (°27 mars 1662 †12 février 1689), devient reine des Espagnes et des Indes en épousant Charles II de Habsbourg. Ils n'eurent pas de descendance à cause de l'état de Charles.
- Philippe Charles d'Orléans, duc de Valois (°16 juillet 1664 †8 décembre 1666), mort en bas âge.
- Anne Marie d'Orléans (°27 août 1669 †26 août 1728) épouse le 10 avril 1684 Victor-Amédée II de Savoie et devient ainsi reine de Sardaigne. Elle hérita par sa mère de l'aînesse de la succession royale britannique (succession jacobine), qu'elle transmit à sa descendance dans la maison de Savoie. De cette ligne sont donc issus nombre de princes italiens et espagnols.
Avec la Palatine
Son second mariage, le 21 décembre 1671 avec la princesse Palatine, Élisabeth Charlotte Wittelsbach von Pfalz, avec qui il eut :
- Alexandre Louis d'Orléans, duc de Valois (°1673 †1676), mort en bas âge.
- Philippe d'Orléans (°2 août 1674 †1723), duc de Chartres, puis, ayant hérité des titres de son père, duc d'Orléans, et régent de France à la mort de son oncle Louis XIV.
De cette ligne sont issus (entre autres) Philippe Égalité, le roi Louis-Philippe et tous les prétendants orléanistes au trône de France. - Élisabeth Charlotte d'Orléans (°13 septembre 1676 †1744), devint duchesse de Lorraine et de Bar en épousant le duc Léopold Ier puis régente des deux duchés de 1729 à 1737. Ils furent les parents de François Ier, empereur du Saint-Empire, et donc les grands-parents paternels de la reine Marie-Antoinette (°1755 †1793). De cette ligne sont aussi issu Napoléon II, fils de Napoléon Ier et de l'archiduchesse Marie-Louise d'Autriche ainsi que tous les Habsbourg-Lorraine.
Portraits contemporains
Saint-Simon fit un portrait de Monsieur dans ses mémoires (Tome 3 - Chapitre IX)[15]:
« Du reste Monsieur, qui avec beaucoup de valeur avait gagné la bataille de Cassel, et qui en avait toujours montré une fort naturelle en tous les sièges où il s'était trouvé, n'avait d'ailleurs que les mauvaises qualités des femmes. Avec plus de monde que d'esprit, et nulle lecture, quoique avec une connaissance étendue et juste des maisons, des naissances et des alliances, il n'était capable de rien. »« Personne de si mou de corps et d'esprit, de plus faible, de plus timide, de plus trompé, de plus gouverné, ni de plus méprisé par ses favoris, et très souvent de plus malmené par eux. Tracassier et incapable de garder aucun secret, soupçonneux, défiant, semant des noises dans sa cour pour brouiller, pour savoir, souvent aussi pour s'amuser, et redisant des uns aux autres.(...) »« C'était un petit homme ventru, monté sur des échasses tant ses souliers étaient hauts, toujours paré comme une femme, plein de bagues, de bracelets et de pierreries partout, avec une longue perruque toute étalée devant, noire et poudrée et des rubans partout où il pouvait mettre, plein de sortes de parfums et en toutes choses la propreté même. »« On l'accusait de mettre imperceptiblement du rouge. Le nez fort long, la bouche et les yeux beaux, le visage plein mais fort long. Tous ses portraits lui ressemblent. J'étais piqué à le voir qu'il fit souvenir qu'il était fils de Louis XIII à ceux de ce grand prince, duquel, à la valeur près, il était si complètement dissemblable. »La princesse Palatine décrira son mari par ces termes :
« Tandis que le roi aimait la chasse, la musique et la comédie, mon époux n’aimait que le jeu, la table et la parure. Assurément il dansait bien, mais à la manière des femmes. Il ne pouvait danser comme un homme à cause de ses souliers à talons hauts. »Portraits fictionnels
- Dans le film Vatel de Roland Joffé, film sur le maître d'hôtel François Vatel, Monsieur est représenté comme un homme excentrique ouvertement homosexuel. Tôt dans le film, il fait demander à Vatel qu'il lui apporte un de ses commis de cuisine (un jeune garçon) afin qu'il devienne son page. Vatel refuse.
- Dans le film Louis, enfant roi de Roger Planchon, Philippe est représenté enfant, brimé par sa mère et par la relation avec son frère, voulant porter des robes, et se cachant avec des garçons.
- Dans la comédie musicale Le Roi Soleil de Kamel Ouali, Monsieur est aussi représenté en homosexuel extraverti joué par Christophe Maé.
- Monsieur est aussi un personnage secondaire dans Le Vicomte de Bragelonne d'Alexandre Dumas.
Voir aussi
Références
- ↑ a , b , c et d En 1661 reviennent à Philippe les apanages de Gaston d'Orléans mort en 1660.
- ↑ a , b et c En 1672, Louis XIV ajoute à l'apanage le duché de Nemours, les comtés de Dourdan et de Romorantin, les marquisats de Coucy et de Folembray.
- ↑ a , b , c , d , e , f , g , h , i et j En 1693 La Grande Mademoiselle meurt et une partie de ses titres reviennent à Monsieur.
- ↑ web.genealogie
- ↑ Liste des chevaliers de l'Ordre du Saint-Esprit
- ↑ LES BOURBONS
- ↑ '+'
- ↑ Abbé de Choisy, Mémoires de l’abbé de Choisy habillé en femme
- ↑ Christian Bouyer, dans l'émission 2000 ans d'Histoire du 8 juin 2004, France Inter [1]
- ↑ Saint-Simon, Mémoires, Tome III, Chapitre IX, description de l'exil du chevalier de Lorraine et de la mort de Madame, extrait : « Madame n'a-t-elle pas été empoisonnée? — Oui, sire, lui répondit-il. — Et qui l'a empoisonnée, dit le roi, et comment l'a-t-on fait? » Il répondit que c'était le chevalier de Lorraine qui avait envoyé le poison à Beuvron et à d'Effiat, et lui conta ce que je viens d'écrire. »
- ↑ Saint-Simon, Mémoires, Tome III, extrait : « Le chevalier de Lorraine et Châtillon y avaient fait une grande fortune par leur figure, dont Monsieur s'était entêté plus que de pas une autre. Le dernier, qui n'avait ni pain, ni sens, ni esprit, s'y releva, et y acquit du bien. L'autre prit la chose en guisard qui ne rougit de rien pourvu qu'il arrive, et mena Monsieur le bâton haut toute sa vie, fut comblé d'argent et de bénéfices, fit pour sa maison ce qu'il voulut, demeura toujours publiquement le maître chez Monsieur.(...) Outre les bénéfices que Monsieur lui avait donnés, l'argent manuel qu'il en tirait tant qu'il voulait, les pots-devin qu'il taxait et qu'il prenait avec autorité sur tous les marchés qui se faisaient chez Monsieur, il en avait une pension de dix mille écus, et le plus beau logement du Palais-Royal et de Saint-Cloud. »
- ↑ Philippe, duc d'Orléans (1640-1701)
- ↑ LES BOURBONS
- ↑ Saint Simon, Mémoires, tome III
- ↑ Mémoires de Saint-Simon - texte intégral
Bibliographie
- Christian Bouyer, Le Duc d’Orléans, frère de Louis XIV, Pygmalion (ISBN 2-85704-828-9)
- Philippe Erlanger, Monsieur, frère de Louis XIV, Hachette, 1953 (prix des Neuf 1954)
- Saint-Simon, Mémoires, 1691-1723
- Dirk Van der Cruysse, Madame Palatine, princesse européenne, Fayard, 1988
- (en) Nancy Nichols Barker, Brother to the Sun King: Philippe, Duke of Orléans, 1989
- Philippe Cougrand, Madame, Monsieur ou l'Impromptu de Saint-Cloud, Théâtre, Pleine Page Editeur, 2008, ISBN 978-2-91-3406-85-8
Liens internes
- Liste des seigneurs puis princes de Joinville
- Liste des comtes et ducs de Chartres
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