- Palais du Louvre
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Le palais du Louvre est un ancien palais royal situé à Paris sur la rive droite de la Seine, entre le jardin des Tuileries et l'église Saint-Germain-l'Auxerrois. S'étendant sur une surface bâtie de plus de 135 000 m², le palais du Louvre est le plus grand palais européen, et le second plus grand bâtiment du continent après le Palais du Parlement roumain. Il abrite aujourd'hui l'un des plus riches musées d'art du monde : le Musée du Louvre.
La construction du Louvre est indissociable de l'histoire de la ville de Paris. Elle s'étend sur plus de 800 ans[1], bien que le plan général du palais ait été imaginé dès la Renaissance. Charles V y établit sa résidence, donnant au palais un statut qu'il a conservé jusqu'au règne de Louis XIV[2].
Origine du nom
La première forteresse du Louvre, sous Philippe Auguste, a été bâtie sur un lieu-dit nommé Lupara[3], dont l'étymologie est inconnue. Mais une hypothèse couramment admise est le rapprochement avec le latin lupus, qui laisserait supposer que le lieu-dit était habité par des loups.
Une autre hypothèse fait remonter l'origine du nom Louvre à l'ancien français lauer ou lower qui signifiait « tour de guet ». - conséquence directe de l'occupation des Francs saliens (ou Sicambres : Mérovée, Childéric, Clovis...), dont la langue est germanique et non latine - que Henri Sauval (historien français 1623-1676) déduit l'origine du mot « Louvre ». Dans cette langue, qui a déjà fourni l'étymologie de nombreux noms de lieux dans le pays du Parisis (Stains → Stein, Château du Mail : Mâhl, mot qui signifie « assemblée » dans la langue franque, Ermenonville : Ermenoldi Villa...), le mot « leovar, lovar, lover, leower ou lower » signifie château ou camp fortifié.
Au Ve siècle, les peuples germaniques, avec l'accord explicite de l'Empire romain, s'« emparent » du Nord de l'Europe occidentale. Ils s'y constituent en communautés chargées par l'Empire de le défendre d'une éventuelle attaque extérieure. C'est d'ailleurs en 463 que Childéric Ier et Ægidius ont repoussé les Wisigoths à Orléans.
Puis l'intégration se fait « racines ». La déliquescence inéluctable de l'Empire accélère le processus. Et lorsque de nouveaux Sicambres descendent avec Mérovée jusque dans les plaines du Parisis, les Francs fraternisent avec ceux de leur nation qui s'y trouvent déjà. Ils constituent alors un groupe assez puissant pour pousser jusqu'à Lutèce. S'ils ne parviennent à s'en emparer, ils bâtissent du moins sous ses murs mêmes le solide établissement dont nous parlons : un « lower », un camp fortifié. Ce « lower » devait déjà exister sur la rive droite de la Seine du temps de Mérovée et a dû représenter une menace constante durant les dix années de siège que connut la capitale du temps de sainte Geneviève.
Lutèce, armée et défendue, fut le premier obstacle sérieux que rencontra Clovis, car elle représentait pour lui la clef du reste du territoire. Le siège, faute de moyens pour une attaque de grande envergure, ne fut finalement qu'un blocus, qui prit fin avec la conversion de Clovis au christianisme.
On peut supposer l'importance pour les Mérovingiens d'un tel camp fortifié. Ce fameux « lower » leur permettait, même en n'y laissant que quelques troupes, de tenir la ville en respect, de lui couper les vivres et d'en faire un point d'appui lorsqu'ils voulaient tenter une attaque sérieuse.
Il y eut, à la suite de cette occupation persistante, deux villes face à face : la ville gallo-romaine d'une part et l'installation franque sans cesse renforcée d'autre part.
C'est donc très probablement ce même nom de « camp fortifié » que les Francs, de leowar ou lower (sa forme francique) firent évoluer en Luver, Luvre et enfin « Louvre », le mot actuel que nous trouvons déjà dans une charte de 1198. L'amalgame a été fait par la suite à cause de sa ressemblance avec « louvre », mot dérivé du latin vulgaire lupara, louve ou louverie. En effet, la forêt s'étendait alors jusqu'aux arrondissements périphériques de l'actuelle capitale et la présence dudit canidé à ses portes y est confirmée par de nombreuses sources.
Par la suite, Clovis et ses successeurs n'oublièrent pas que leur domination s'était d'abord exercée sur la rive Nord de la Seine. Alors qu'ils négligeaient le développement du Paris de l'« Autre Rive » qui leur avait si longtemps résisté, ils créèrent sur la rive droite une ville rivale : un nouveau Paris. Le professeur Nicolas Rodolphe Taranne (1795-1857), conservateur à la bibliothèque Mazarine et membre de la Société de l’histoire de France, dans ses notes de traduction du poème d'Abbon, De la guerre de Paris, mais plus connu sous le titre Histoire du siège de Paris par les Normands, en fait la remarque : « Paris, ville gallo-romaine, s'était accrue considérablement au midi; Paris, ville franque, s'étendit plus vers le nord ».
La ville s'agrandissait donc chaque jour dans cette partie nord lorsqu'elle se trouva sous la menace d'autres conquérants. Les Normands, qui pouvaient sans obstacle remonter la Seine, firent de Paris pendant au moins cinquante ans leur principale destination de conquête. Pour donner un point d'appui à leurs attaques – et profitant de ce que les Parisiens n'avaient pas repris pour se défendre l'endroit dont on s'était déjà servi pour les attaquer – c'est sur l'emplacement de l'ancien camp de Clovis (et autour de Saint-Germain-le-Rond, actuel Saint-Germain-l'Auxerrois), que les Normands s'établirent. Ses remparts constituaient un solide abri. Il s'agissait d'une véritable forteresse défendue par de larges palissades, un rempart de pierres et de larges fossés. En octobre 886, l'arrivée de l'empereur[Qui ?] avec une armée considérable n'y changea rien. Au lieu d'en finir par une attaque décisive, Charles le Gros traita avec les Normands et leur versa un tribut incommensurable en échange de leur départ. Mais pendant vingt ans encore ils revinrent, jusqu'à ce que soit cédé à Rollon, leur chef, le territoire appelé aujourd'hui Normandie (911 - traité de Saint-Clair-sur-Epte).
Plus tard, près de l'endroit où avait campé Clovis, se trouvait l'un des fours les plus connus de Paris : « Furnus de Lovres », comme il est appelé dans le « Livre Noir », à la date de 1203. Il se trouvait dans une grande rue parallèle à la Seine, qui traversait tout le Paris de la rive droite, en se prolongeant à l'ouest vers la ville nouvelle, où elle prit le nom de rue Saint-Honoré.
Après le passage dévastateur des Normands, il fallut reconstruire. Et c'est par la paroisse de Saint-Germain l'Auxerrois que l'on commença. Cet édifice est actuellement situé face à la colonnade du Louvre. Il est symétriquement opposé à l'actuelle mairie du premier arrondissement qui le jouxte, avec, au centre, un campanile de style gothique flamboyant, images parmi tant d'autres du « Pastiche » du XIXe siècle.
Le roi Robert reconstruisit cette basilique, dont on avait fort mal réparé les ruines. Le quartier dont Saint-Germain était le centre était devenu une sorte de Paris nouveau attaché aux flancs de l'ancien.
C'est à son départ pour les croisades en compagnie de Richard Cœur de Lion, que Philippe Auguste entreprend en 1190 de protéger sa cité de toute attaque extérieure - et notamment de celles de ses parents et néanmoins rivaux prétendants au trône de France : les Plantagenêt. La nouvelle enceinte, dont la construction dure près de vingt ans, en vient à entourer le Paris ancien et moderne d'alors et se prolonge jusqu'à l'emplacement du camp dont Clovis et les Normands avaient déjà fait leur fief. La consonance du mot resta dans les mémoires et le lieu devint l'ancien « luver » ou « luvre » défini précédemment. C'est donc tout naturellement à la lisière de cette muraille que Philippe Auguste décide d'édifier ce qui deviendra la forteresse parisienne par excellence, et plus tard un des plus prestigieux palais du monde.
Selon Geneviève Bresc-Bautier (Le Louvre, une histoire de palais, Musée du Louvre édition), Louvre pourrait être un hydronyme portant le suffixe celtique ara. Louvre désignerait alors le nom d'un cours d'eau.
Histoire
Le Louvre médiéval
Situation
Le Louvre médiéval, de Philippe Auguste à Henri IV, occupait le quart de la zone du carré actuel. Si l'on divise la cour carrée en quatre carrés et que l'on entre dans celle-ci par le pavillon de Sully (ou le pavillon de l'Horloge), le Louvre médiéval occupait le premier carré (ou quart) de droite.
La forteresse
C'est donc en voulant renforcer la défense de la ville de Paris, afin d'en faire le centre politique et religieux du royaume, que Philippe Auguste fait construire une grande enceinte entourant la ville. Le Louvre, situé à l'ouest de la muraille, est alors un donjon puissamment fortifié, haut de 31 mètres et large de 19 mètres qui n'a qu'une vocation strictement défensive. Celui-ci est compris au centre une enceinte carrée d'environ 70 à 80 mètres de côté, renforcée de dix tours de défense que l'on franchit par deux portes avec pont-levis situés respectivement au sud et à l'est. Deux bâtiments sont accolés au mur d'enceinte, à l'ouest et sud de la cour centrale. Au centre, le donjon de 15 mètres de diamètre domine le quartier du haut de ses 30 mètres avec une épaisseur de mur de 4,20 mètres à sa base. Les travaux finissent en 1202.
La résidence royale
Sous Louis IX, le château connaît un important agrandissement, de nouvelles salles étant construites sans réel but défensif, comme la salle Saint-Louis (1230-1240). On y transfère également le trésor royal, donnant un nouveau caractère à la forteresse.
Cependant, c'est sous Charles V, dans la deuxième moitié du XIVe siècle, que le palais devient résidence royale. Après avoir réprimé la révolte du prévôt des marchands Étienne Marcel, il achève un nouveau rempart pour protéger la ville qui s'est alors considérablement développée extra-muros. Le Louvre, auparavant situé à l'extérieur de la muraille de Philippe-Auguste, est inclus dans ce nouveau système défensif. Le château prend alors une double fonction : en plus de son rôle protecteur, il devient l'une des résidences du roi et de la cour, avec le château de Vincennes, l'hôtel Saint-Pol dans le Marais et le palais de l'île de la Cité dont la fonction est plus "administrative" et notamment judiciaire avec l'installation du Parlement de Paris.
Architecturalement, des nouveautés apparaissent, notamment un grand escalier hélicoïdal, dû à Raymond du Temple : engagé dans le mur du donjon, dit « la grande vis », il est décoré d'effigies de la famille royale. Drouet de Dammartin, plus tard responsable du chantier de la Chartreuse de Champmol, fait ici ses premières armes de sculpteur et d'architecte.La bibliothèque
Le Louvre s'ouvre sur la ville qui devient à cette période un important centre de luxe, et Charles V, grand amateur d'art, y transfère une partie de sa bibliothèque. Selon un inventaire de 1373, celle-ci ne comportait pas moins de neuf cents manuscrits[4] et se divisait en trois pièces : l'une consacrée aux traités de gouvernements, une autre aux romans, et la dernière aux livres religieux. Une autre partie de la bibliothèque de Charles V se trouvait à Vincennes.
Charles V est le premier monarque qui songea à constituer une bibliothèque royale. Il fit déposer à cet effet tous les livres qu'il put réunir dans une tour du Louvre qui fut appelée tour de la Librairie. Les livres y occupaient trois étages, et y étaient rangés avec autant de soin que de propreté. Pour les conserver précieusement, Charles V voulut qu'on fermât de barreaux de fer, de fil de laiton et de vitres peintes toutes les fenêtres de sa bibliothèque ; et, afin que l'on pût y travailler à toute heure, on pendit par son ordre à la voûte trente petits chandeliers et une lampe d'argent qui étaient allumés toutes les nuits. Les lambris des murs étaient de bois d'Irlande, la voûte était lambrissée de bois de cyprès, et tous ces lambris étaient embellis de sculptures en bas-relief. C'est Gilles Mallet, pour lors valet de chambre puis maître d'hôtel du roi qui fut chargé de la garde de cette bibliothèque ou librairie. On y trouvait des livres de toutes espèces. Les plus considérables étaient des bibles latines ou françaises. Il y avait aussi une grande quantité de livres d'église, comme des missels, des bréviaires, des psautiers, des livres d'heures et des Offices particuliers. La plupart de ces livres étaient recouverts de riches étoffes et enluminés avec grand soin. Parmi les livres profanes on trouvait des traités d'astrologie, de géomancie, de chiromancie[5].
Symbole de l'autorité royale
Le château a également une importance capitale en tant que symbole de l’autorité royale. Jusqu’à la Révolution, tous les fiefs dépendant directement du roi sont dits relever de la grosse tour du Louvre, même après la destruction de celle-ci au XVIe siècle, sous François Ier. Le Louvre apparaît donc comme le siège de l’autorité féodale du roi, alors que le palais royal de la Cité, devenu le palais de justice, est le siège de l’aspect souverain de son autorité, dans sa fonction la plus éminente : la justice.
Le Louvre à la Renaissance
Le Louvre de François Ier
À son retour de captivité en Espagne, François Ier est prié par les États généraux de résider plus souvent à Paris. Le roi ordonne donc aux échevins du Louvre de restaurer le palais de Charles V ruiné pendant la guerre de Cent Ans. Cette demande ne sera cependant suivie d'actes concrets que sur un long terme. François Ier accède au désir des États sans cependant sacrifier son goût pour la chasse : à proximité de la capitale mais disposant de domaines boisés, il privilégie le château de Madrid et celui de Fontainebleau. La rénovation du Louvre est un signe fort dans ce rapprochement vers Paris.
On commence tout d'abord par aménager les abords du Louvre en liaison avec le pont au Change, afin d'ouvrir la capitale vers l'ouest. En 1528 a lieu la destruction du donjon central, qui fait entrer le vieux château médiéval dans la renaissance. Toutefois, les travaux de réaménagements des ailes prendront du temps. En 1539, à l'occasion du passage de Charles Quint à Paris, celui-ci ne peut être logé au Louvre, ce qui donne à François Ier davantage de motivation pour construire réellement un palais moderne.
C'est en 1546 que le projet de l'architecte Pierre Lescot, moins ambitieux, mais plus concret que ceux présentés par les autres candidats, est adopté. Le plan consiste en une cour quadrangulaire épousant les contours de l'enceinte médiévale (le quart sud-ouest de l'actuelle cour carrée), autour de laquelle est projeté un ensemble en forme U permettant d'obtenir un grand corps ouvert à l'est avec deux ailes en retour. L'aile principale située donc à l'ouest doit être séparée en deux par un escalier monumental au centre, alors que les deux ailes au nord et au sud ne doivent comporter qu'un seul étage. De décembre 1546 à mars 1549 a lieu la démolition de la partie ouest de l'enceinte de Philippe-Auguste. Cependant, la mort de François Ier (en 1547) interrompt les travaux.
Le Louvre de Henri II
L'avènement d'Henri II voit le plan changer quelque peu : Pierre Lescot est maintenu à la tête du chantier, mais l'escalier (actuel escalier Henri II) est repoussé au nord de l'aile, permettant la conception d'une grande salle au rez-de-chaussée pouvant abriter les fastes de la cour (salle des Caryatides). En 1553 est ordonnée la démolition de l'aile méridionale et la tour d'angle sud-ouest de la forteresse, afin d'y construire le pavillon du roi. À la mort d'Henri II en 1559, le quartier autour du Louvre s'est considérablement densifié, mais le château reste encore très médiéval, ne possédant qu'une aile de style Renaissance.
Catherine de Médicis et la construction des Tuileries
Catherine de Médicis reprend ensuite en main la restauration du palais, permettant la création d'importants jardins, et du palais des Tuileries. Celui-ci est commencé en 1564, en dehors de l'enceinte de Charles V, un an à peine après le rachat du terrain aux tuiliers qui l'occupaient, d'où son nom. L'architecte Philibert Delorme commence le projet; il est remplacé après sa mort en 1570 par Jean Bullant, également concepteur du château d'Écouen, au nord de Paris. Celui-ci crée un grand pavillon d'angle (l'actuel pavillon de Flore) et la petite galerie.
Pendant les guerres de religion qui marquent le dernier tiers du XVIe siècle, le palais sert de lieu de résidence à la famille royale quand elle vient à Paris, notamment lors des noces de Marguerite de Valois (qui débouchèrent sur le massacre de la Saint-Barthélemy) en 1572. À partir du règne d'Henri III, qui débute en 1574, il devient la demeure principale du roi de France et le restera jusqu'à l'installation de Louis XIV à Versailles en 1682.
Henri IV et le Louvre : la naissance du Grand Dessein
Arrivé à la tête d'un pays ruiné en 1589, Henri IV, aidé de son ministre Sully, prend des mesures immédiates pour apaiser le conflit religieux qui ensanglante la France. En reprenant en main les affaires politiques, le nouveau souverain donne du même coup un nouvel élan au chantier du Louvre, dans sa volonté de relance économique par de grands travaux édilitaires. Cette volonté d'agrandir le Louvre, qui prend le nom de Grand Dessein s'accompagne d'ailleurs d'un assainissement du quartier environnant.
Le Grand Dessein poursuit plusieurs objectifs :
- la suppression des vestiges du Louvre médiéval
- la construction d'une cour carrée sur la base de l'aile Lescot déjà édifiée (surface multipliée par quatre par rapport à celle de la cour médiévale)
- la réunion du Louvre aux Tuileries
- l'expropriation des quartiers entre les deux palais.
Un ambitieux chantier se met alors en place entre 1594 et 1610 ; cette dernière année voyant l'achèvement de la grande galerie ou galerie du bord de l'eau qui réalise la jonction entre Louvre et Tuileries. Longue de 450 mètres et large de 13, cette réalisation s'élève sur deux niveaux, et est l'œuvre de plusieurs architectes, comme Jacques II Androuet du Cerceau. Si le gros œuvre est achevé dès 1600, ce n'est pas le cas du décor, qui se conjugue autour des effigies des rois de France depuis Pharamond jusqu'à Henri IV, selon un programme d'Antoine de Laval. Au rez-de-chaussée, des boutiques ouvrent au nord, tandis que les logements sont situés à l'entresol, un passage au premier étage. C'est également sous le règne d'Henri IV qu'est terminée la petite galerie. Cependant, la mort de celui-ci porte un coup d'arrêt aux travaux, alors que le quartier s'est encore densifié. Les parties Nord et Est du Louvre médiéval restent en place.
Le règne de Louis XIII (1610-1643)
L'absence de travaux sous la régence de Marie de Médicis de 1610 à 1617 permet l'installation dans le quartier des hôtels particuliers des grands du royaume, alignés sur des rues structurées, comprenant chacun une entrée sur rue et un jardin. Aussi, lorsque Louis XIII reprend l'idée du Grand Dessein, il semble difficile de poursuivre exactement l'idée d'Henri IV. Il fait néanmoins démolir la partie nord de l'enceinte médiévale afin de prolonger l'aile Lescot dans cette direction en symétrie parfaite avec les mêmes détails de décor.
C'est l'architecte Jacques Lemercier qui est alors chargé de la modernisation du vieux Louvre. Il fait tout d'abord poursuivre la cour carrée, tout en respectant le style initial de Lescot, et en donnant un rôle important aux pavillons. Ainsi, au nord de l'aile Lescot, Lemercier fait construire le Pavillon de l'Horloge, qu'il prolonge d'une autre aile identique à celle de Lescot afin de garder une symétrie harmonieuse. Les sculpteurs Jacques Sarazin, Gilles Guérin, Philippe de Brister exécutent la décoration des nouveaux corps de bâtiment. Quant au décor de la galerie du bord de l'eau, c'est à Poussin qu'il est fait appel, afin d'exécuter un programme assez traditionnel imaginé par Lemercier, autour des villes de France. Toutefois, le peintre regagne Rome en 1642, une année après avoir entamé son travail, qu'il laisse largement inachevé. Louis XIII décède un an plus tard sans qu'aucune nouvelle décision n'ait été prise.
Le Louvre sous Louis XIV
Avec Anne d'Autriche et Mazarin, de nombreux artistes arrivent d'Italie, et donnent à la capitale française un nouveau style d'influence italienne. Deux nouveaux architectes commencent à émerger : Louis Le Vau et Guérin, mais aucune grande construction n'est entreprise dans le palais du Louvre. Il faut simplement signaler au rez-de-chaussée de la petite galerie l'installation des appartements d'été d'Anne d'Autriche, qui sont redécorés entre 1655 et 1658.
Il faut attendre une ordonnance royale du 31 octobre 1660 pour qu'une nouvelle fois, le grand dessein soit repris, avec pour architecte principal Louis le Vau. Non seulement le projet intérieur est repris pour la cour carrée, mais une extension vers le sud est prévue (pont et collège des Quatre-Nations), qui donne une nouvelle dimension politique à l'affaire, le Collège des Quatre-Nations servant au recrutement de l'administration royale. Cependant, entre 1660 et 1664, seul le début du pont de la paix est réellement réalisé.
En 1664, Colbert prend en main la surintendance des bâtiments du roi : le Louvre et les arts doivent désormais jouer un rôle déterminant dans la tentative d'instituer un gouvernement centralisé autour de la personne du roi. Le projet de Le Vau est arrêté, et dès 1664, celui-ci doit engager le prolongement des Tuileries, tandis que des jardins à la française sont aménagés par André Le Nôtre. Colbert cherche aussi à donner un accès témoignant de l'importance du projet urbain, avec à l'est un grand accès à partir de la place royale.
Plusieurs projets, d'architectes français et italiens, sont proposés, dont trois par Le Bernin lui-même venu exprès d'Italie. Il pose la première pierre en 1665, mais s'enfuit rapidement, victime de cabales. Colbert écrira au sujet de ses projets : « [...] M. le cavalier Bernin n'a bien pensé qu'à la façade de ce magnifique palais [sous-entendu pas du tout à sa fonctionnalité], laquelle est assurément superbe et magnifique, à l'exception de l'ovale qui s'élève en couronne [...] » Un nouveau projet, monumental et tout à fait classique, proposé par un petit conseil composé de Le Vau, Charles Le Brun et Claude Perrault, est alors proposé et entamé. Cependant, l'abandon du Louvre pour Versailles en 1682 le laissera inachevé.
La réalisation de la colonnade n'est toutefois pas la seule modification qui aura lieu au Louvre durant le règne personnel de Louis XIV. L'incendie de la petite galerie en 1661 induit sa reconstruction par Le Vau (fin 1664), puis son doublement en hauteur (galerie d'Apollon, initiatrice du classicisme français) en 1665. La cour carrée est réaménagée, tout comme les Tuileries, qui subissent le déménagement de la cour, entre 1664 et 1668.
Le Louvre de Louis XIV à la Révolution
Abandonné par Louis XIV au profit de Versailles, le Louvre est rapidement déserté, occupé seulement occasionnellement lors de visites royales ou de conseils. Le Grand Dessein et les travaux de Colbert sont abandonnés alors que la cour carrée n'est pas achevée, que la colonnade est dépourvue de toiture et qu'un quartier dense est installé entre le Louvre et Tuileries. L'aristocratie désertant le lieu, une nouvelle population plus pauvre s'y installe.
Dès 1692, le Louvre est investi par des Académies : celle de peinture et de sculpture emménage à cette date dans le grand salon et les salles voisines, et celle d'architecture, toujours cette même année, envahit les appartements de la reine. L'année 1697 marque l'arrivée de l'Académie de politique, qui déploie ses cartes en relief dans la grande galerie, et 1699 celle de l'académie des sciences. L'Imprimerie royale prend également ses quartiers dans le palais.
Outre les Académies qui y siégeaient, le Louvre était le logement d'artistes qui y emménageaient en toute liberté, et s'y décrétaient des droits entraînant la dégradation progressive des locaux. Le Louvre se détériore donc peu à peu, provoquant bientôt des réactions de la part des penseurs contemporains. La plus célèbre est sans doute celle de Voltaire, à travers ce quatrain fameux :
- Louvre, palais pompeux dont la France s'honore,
- Sois digne de Louis, ton maître et ton appui
- Sors de l'état honteux où l'univers t'abhorre
- Et dans tout ton éclat montre-toi : comme lui
Toutefois, d'autres intellectuels n'hésitent à publier des pamphlets mettant en cause l'état du palais, et par delà la politique de Louis XV en termes de construction. Ainsi, en 1752, Lafont de Saint-Yenne publie un petit ouvrage intitulé L'Ombre du grand Colbert, dialogue entre le Louvre et Paris qui fera grand bruit.
Il ne faut pas croire cependant que le surintendant des bâtiments du roi, le marquis de Marigny, frère de la marquise de Pompadour, reste inactif. Malgré un budget des plus limités, il parvient à faire achever la cour carrée, par Jacques-Germain Soufflot et Gabriel, bien qu'il ne soit plus question du Grand Dessein.
En 1779, avec l'accession à la surintendance de D'Angivillers, le Louvre retrouve une certaine fortune. L'idée d'y constituer un musée à partir de collections royales, déjà avancée par Marigny, fut reprise par le nouveau surintendant qui voulait procéder à des aménagements appropriés à l'intérieur du palais. Se posa alors le problème de la Grande Galerie, à propos de laquelle une réflexion fut commandée à Soufflot. Elle aboutit à plusieurs idées :
- la suppression du décor inachevé de Poussin
- la construction d'une voûte en brique pour améliorer la protection contre les incendies
- le renforcement des planchers
- l'amélioration de l'éclairage par le creusement de fenêtres et d'oculi à la naissance des voûtes.
Celles-ci n'eurent toutefois pas le temps d'être mises en pratique.
Le Louvre sous la Révolution : naissance du musée
Article détaillé : Musée du Louvre.Le Louvre avait perdu peu à peu sa dimension symbolique. Il est épargné par la haine des foules révolutionnaires. S'il n'appartenait plus au fonctionnement du rite monarchique, il n'appartenait pas encore au peuple. Ce sera bientôt le cas, par l'intermédiaire du musée qu'il va devenir.
En 1789, D'Angivillers émet déjà un projet de musée situé dans le Louvre. Contraint à démissionner, il le confie aux États Généraux, qui, le 21 juin, adoptent l'idée, d'autant que les collections nationales s'enrichissent bientôt brusquement grâce à la confiscation des biens du clergé (2 novembre 1789) et des biens des émigrés (8 août 1792) et à la suppression des académies (8 août 1792). Dès 1790, l'Assemblée nationale prend réellement conscience de la nécessité de conserver les œuvres, et de stopper les destructions massives, aussi crée-t-elle le 1er décembre 1790 une commission chargée d'inventorier les monuments et les œuvres d'art nationalisés.
Des dépôts sont rassemblés dans d'anciens couvents, regroupant des statues de bronze pour la fonte, et d'autres pièces pour la vente. Le 6 juin 1791, Alexandre Lenoir, un peintre, est nommé directeur de celui des Petits-Augustins. Il est l'un des personnages qui contribueront à la naissance de la notion de patrimoine. On lui doit le musée du Moyen Âge dans les anciennes thermes de Cluny.
En 1794, l'abbé Grégoire publie un mémoire sur le vandalisme, condamnant les destructions, et encourageant la mise en place d'une « mémoire collective ». D'autres groupes de pression, à l'instigation d'artistes, se réunissent, poussant les instances dirigeantes à la décision de créer un musée. Mais lequel, et où ?
Des réponses avaient été apportées durant ces dernières années : ainsi avait-on vu publier à quelques mois d'intervalle les Considérations sur les arts du dessin (26 janvier 1791) et les Deuxièmes considérations sur l'art du dessin (18 mai 1791). Leur auteur, Quatremère de Quincy, y demandait le regroupement d'antiques, la possibilité que tous accèdent aux œuvres (alors que le peintre Jacques-Louis David militait pour un lieu réservé aux artistes), préconisait l'utilisation du Louvre comme lieu de regroupement et d'exposition et développait une vision encyclopédique de l'art, héritée du XVIIIe siècle. Ces ouvrages menèrent l'Assemblée constituante à voter l'installation d'un muséum au Louvre dans la lignée du projet proposé deux ans plus tôt par D'Angivillers, le 26 mai 1791. Le 19 septembre 1792, un décret officiel plaçait les collections nationales sous la protection du Louvre et le premier octobre de cette même année, une « commission du muséum » réunissant six personnalités était mise en place.
La conception révolutionnaire de l'idée de musée comprenait une vue pédagogique et l'idée d'un lieu ouvert à tous, mais la commission devait concrétiser ces idéaux tout en respectant les artistes comme l'influent David qui insistaient pour avoir un accès réservé aux collections, afin de pouvoir les étudier à loisir. De nouveaux personnages, comme le marchand Jean-Baptiste Pierre Lebrun, entrèrent dans la réflexion. Ainsi, dans ses Réflexions sur le muséum national, celui-ci réclamait un spécialiste historien de l'art à la tête du muséum, et demandait un classement par école, initiant une réflexion des plus importantes sur la professionnalisation du musée. Après une première ouverture, pour quelques semaines, le 19 novembre 1793, de nombreux critiques s'engagèrent contre les responsables du muséum, jugés incapables. Un catalogue, Objets contenus dans les galeries du muséum français avait été rédigé.
La réouverture eut lieu en février 1794, alors qu'un afflux d'œuvres provenant des saisies révolutionnaires encombrait le musée. Un conservatoire, dirigé par Jacques-Louis David, fut mis sur pied, avec pour mission la protection, la sélection, l'exposition, la rédaction d'un catalogue raisonné et le marquage des œuvres. Cependant, David fut entraîné dans la chute de Robespierre, et le conservatoire dut se poursuivre à cinq membres.
Le travail du conservatoire ne cessa d'être critiqué, notamment par Lebrun, qui débuta l'ancêtre d'un travail muséographique, préconisant la division en neuf sections, la nécessité d'un catalogue plus scientifique et des travaux dans la grande galerie.
Le Louvre, palais des rois, grand lieu du passé de la France, devenait, par la volonté de la Révolution, une leçon ouverte de civisme par l'image, et l'instigateur d'une nouvelle réflexion sur les notions d'histoire de l'art et de muséographie.
Napoléon III et le Louvre : l'achèvement du Grand Dessein
Sous la direction des architectes Lefuel et Visconti furent menés les grands travaux parachevant l'œuvre des siècles précédents ; l'aile de la rue de Rivoli, ébauchée sous Napoléon Ier, fut édifiée en symétrique de la galerie du bord de l'eau, elle-même modifiée et abritant désormais le grand escalier d'honneur, accès principal aux galeries du musée jusqu'aux transformations de la fin du XXe siècle. Furent édifiés également les pavillons enserrant l'actuelle cour de la pyramide et délimitant quatre cours intérieures.
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Passage entre la rue de Rivoli et la cour du Louvre
La Troisième République et la destruction des Tuileries
Après les évènements tragiques de la Commune qui aboutirent à l’incendie des Tuileries édifié sous Catherine de Médicis au XVIe siècle et de l’aile nord du Louvre, le nouveau gouvernement républicain chargea Lefuel de reconstruire le pavillon de Marsan sur le modèle de ce qu’il avait déjà réalisé au pavillon de Flore, ainsi qu’une partie de l’aile Rohan. Ces travaux s’étalèrent de 1874 à 1880, mais le manque d’argent empêcha Lefuel de construire le pendant du pavillon des Sessions, qui devait abriter un théâtre, ainsi que les grands guichets au nord, semblables à ceux déjà construits au sud.
Les Tuileries restèrent en ruine durant douze années. Mais dès 1874, en marge de la reconstruction du pavillon de Marsan, on avait déjà rasé les deux ailes latérales des Tuileries. La partie centrale entre le pavillon de la Chapelle (ancien pavillon du théâtre) et le pavillon Bullant resta en l’état. Malgré un excellent état de conservation des ruines, la Troisième République préféra annihiler ce symbole du pouvoir des régimes déchus en occultant délibérément le rôle primordial des Tuileries dans l’histoire de la Première République.
Bien sûr, il était prévu de reconstruire un édifice qui rappellerait les proportions du palais disparu afin d’y installer un musée d’art moderne, mais l’instabilité politique perdura et ajourna toute décision. En effet sur ces douze années d’indécision, il ne fallut pas moins de trois présidences et dix-sept ministères pour détruire l’œuvre nationale.
Il n’est pas trop fort de parler de destruction de l'esprit du Grand Dessein : la raison même qui lui avait donné naissance était la réunion du vieux Louvre au palais des Tuileries.
Un Comité national pour la reconstruction des Tuileries propose de reconstruire les Tuileries à l'identique, afin de rétablir l'harmonie d'ensemble tout en considérant l'avantage que serait un agrandissement du musée du Louvre qui manque de place.
Le palais et ses alentours sont protégés au titre des monuments historiques[6] : L'arc du Carrousel du Louvre fait l'objet d'un classement par arrêté du 10 septembre 1888, le palais du Louvre fait l'objet d'un classement en 1889 et le jardin des Tuileries fait l'objet d'un classement par article du journal officiel du 18 avril 1914.
Création des fossés de la colonnade
En 1963, le ministre de la Culture, André Malraux décide la recréation des fossés orientaux du Louvre devant la colonnade de Perrault, de raser les jardins et de déposer les grilles. Ce projet ne correspond pas à un projet historique et contribue à détacher le palais de la ville, pour le mettre en valeur. L'architecte en chef des Monuments historiques Jean Marie Trouvelot en est le maitre d’œuvre, et les travaux commencent à partir de 1963 sans réel contrôle des archéologues, mais avec le soutien des militaires du génie[7]. On découvre les fondations de la façade projetée par Le Vau et la restauration invente un nouvel état en construisant un pont pour enjamber le fossé. On construit un grand mur de contrescarpe et les découvertes sont arasées, pour créer des douves qui n'ont jamais existé de l'aveu même de l'inspecteur général Chauvel, qui défend le principe selon lequel Mansart avait envisagé une telle solution[8].
Le palais aujourd'hui
De 1981 à 1999, le palais fait l'objet d'importants travaux de modernisation désignés sous le nom de Grand Louvre et rentrant dans le cadre des « Grands Travaux » définis par le président de la République François Mitterrand. Ses aménagements consistant à rendre la totalité du palais à sa fonction de musée (jusqu'en 1989, une partie de celui-ci abritait également le ministère des Finances), sont caractérisés par la construction de la pyramide de verre (inaugurée le 30 mars 1989), située au milieu de la cour Napoléon, œuvre de l'architecte sino-américain Ieoh Ming Pei et qui mène à un grand hall d'accueil souterrain. Une copie en plomb de la statue de la Statue équestre de Louis XIV sous les traits de Marcus Curtius par Le Bernin et Girardon est alors ajoutée.
Le palais accueille aujourd'hui :
- le Musée du Louvre,
- l'Union centrale des arts décoratifs (UCAD) et ses collections (arts décoratifs, mode et textile et, dans un musée (Musée de la Publicité) situé juste à côté, leurs collections de publicités) ainsi que sa bibliothèque et les « ateliers du Carrousel »,
- l'École du Louvre (sites Rohan et Flore),
- le Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF) : laboratoire du Carrousel et ateliers de Flore,
- les galeries commerciales du Carrousel du Louvre : 16 000 mètres carrés, plus de 50 boutiques,
- les espaces d'exposition « Carrousel du Louvre » de Paris Expo : 7 100 mètres carrés, 4 salles destinées à accueillir des manifestations de prestige.
-
le Louvre vu de la coupole de l'Institut de France
Notes et références
- Philippe Auguste à nos jours de
- Geneviève Bresc, Mémoires du Louvre, Paris, Gallimard, « Découvertes », p. 21 et s.
- J.Bourciez, Phonétique française, Éditions Klincksieck, Poitiers, 1982, p. 89, remarque I.
- Connaître la BNF sur BNF. Consulté le 12 février 2010
- E. Werdet - à Paris, chez Dentu, MDCCLXI Histoire du livre en France depuis les temps les plus reculés jusqu'en 1789 par
- Notice no PA00085992, sur la base Mérimée, ministère de la Culture
- http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lha_1627-4970_2002_num_3_1_902
- http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rvart_0035-1326_1987_num_78_1_347665
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- (fr) L'histoire du Louvre sur le site officiel du musée du Louvre
- (fr) Une visite au Louvre Ina Archives Télé
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