Authie (Fleuve)

Authie (Fleuve)

Authie (fleuve)

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l'Authie
Authie près de Maintenay.jpg
L'Authie près de Maintenay
Caractéristiques
Longueur 103 km
Bassin 1 304 km2
Bassin collecteur l'Authie
Débit moyen 10,8 m3⋅s-1 (Quend)
Régime pluvial océanique
Cours
Source près de la route D176E
 · Localisation Coigneux
 · Altitude 131 m
 · Coordonnées 50° 07′ 50″ N 2° 33′ 09″ E / 50.130556, 2.5525
Embouchure la Manche
 · Localisation entre Quend et Conchil-le-Temple
 · Altitude 0 m
 · Coordonnées 50°22′04″N 1°36′44″E / 50.36778, 1.61222
Géographie
Principaux affluents
 · Rive gauche Gézincourtoise
 · Rive droite Quilliene, Grouche, Fliers
Pays traversés France France
Régions traversées Nord-Pas-de-Calais, Picardie
Principales villes Nampont, Auxi-le-Château, Doullens

L’Authie est un fleuve côtier du nord de la France qui se jette dans la Manche après un cours long de 103 kilomètres [1] sis dans les départements de la Somme et du Pas-de-Calais, dans le bassin Artois-Picardie.

Son cours régulier, lié à la présence d'un puissant aquifère, a depuis longtemps attiré les hommes qui y ont développé une activité agricole encore dominante aujourd'hui. La vallée de l'Authie, occupée par de nombreux villages et de petites agglomérations, recèle un riche patrimoine architectural, abbayes et châteaux s'égrenant le long des rives du fleuve tandis que l'embouchure formant une vaste baie, comprise entre Fort-Mahon-Plage et Berck-sur-Mer, typique des estuaires picards, abrite une faune et une flore diversifiées attirant de nombreux visiteurs.

Sommaire

Étymologie

L'origine du nom Authie n'est pas établie avec certitude. La dénomination du fleuve, selon les sources, est à rattacher soit à l'hydronyme pré-celtique atur signifiant rivière[2] que l'on retrouve pour de nombreux cours d'eau comme l'Adour, soit au terme celte alt signifiant profond et qui fait ainsi référence au lit encaissé du fleuve[3][4].

Géographie

Le cours du fleuve

Localisation du cours de l'Authie.

L'Authie prend sa source à Coigneux au nord d'Acheux-en-Amiénois à 131 m d'altitude[5] (mais serait plutôt 104 m d'après IGN et géoportail), arrose la commune d'Authie et adopte une direction ouest - nord-ouest selon l'orientation tectonique générale des cours d'eau de cette région (Somme, Canche) recevant l'apport de son premier affluent notable, la Quilliene, à Thièvres. Le fleuve baigne ensuite Doullens où il conflue avec son principal tributaire (la Grouche), Auxi-le-Château, puis Argoules et Nampont au nord de la forêt de Crécy, avant de se jeter dans la Manche entre Fort-Mahon-Plage (poulier) et Berck (musoir). En pénétrant dans le Marquenterre, l'Authie incline, à cause de l'action de petits affluents, le Fliers en particulier, son cours vers le sud-est, puis forme, à Groffliers, un estuaire qui continue à se déplacer. Son cours sépare, peu après Auxi-le-Château, les départements de la Somme et du Pas-de-Calais, donc les régions Picardie et Nord-Pas-de-Calais.

L'Authie à Doullens.

L'Authie entaille le vaste plateau incliné vers l'ouest occupant l'Artois et le Ponthieu ; une couverture de limons peu épaisse recouvre l'argile à silex et le socle de craie. Ce dernier apparaît sur les versants de la vallée du fleuve côtier qui l'entaille, tandis que le fond de celle-ci est composé d'alluvions.

L'ensemble du cours peut être divisé en plusieurs entités géographiques et paysagères[6] :

  • la haute vallée, entre la source sise à Coigneux et les communes d'Occoches et d'Outrebois en aval de Doullens, se caractérise par un habitat de fond de vallée et la présence d'un couvert boisé important.
  • la vallée moyenne, entre les villages cités et Dompierre-sur-Authie et Douriez, présente un paysage de peupleraies. L'habitat se localise le long du cours d'eau, mais également perpendiculairement à ce dernier dans les nombreux vallons secs aboutissant à la vallée principale.
  • la basse vallée, qui court de Dompierre-sur-Authie à la falaise morte près de Colline-Beaumont, est marquée par la présence de nombreux étangs, les villages s'écartant du fleuve pour se blottir au pied des coteaux.
  • les bas champs et la baie de l'Authie[7] s'ouvrent sur la Manche entre les pointes sableuses du Haut Banc et de Routhiauville, derrière lesquelles l'estuaire du fleuve s'amenuise depuis des siècles. Dans cet espace, des digues appelées renclotûres, mises en place par les paysans du Moyen Âge, ont fait avancer la rive gauche de près de 4 kilomètres. La rive droite a connu alternativement des épisodes d'érosion et d'accumulation au gré des divagations du chenal de l'Authie. Pour limiter celles-ci, une nouvelle digue fut édifiée en 1868, allongée une dizaine d'années plus tard, puis partiellement détruite par le cours d'eau avant d'être ensevelie sous les sables[8].

Hydrographie

Carte du bassin versant de l'Authie.

L'Authie bénéficie d'un bassin versant (de 1 304 km²)[6] extrêmement simple qui correspond à un val de l'Artois, où le fleuve, rectiligne, collecte un réseau symétrique d'affluents élémentaires ; la vallée présente toutefois un profil dissymétrique, au versant en pente douce de la rive droite s'oppose le versant raide de la rive gauche[9]. La dissymétrie de la vallée est issue de la sensibilité différente des versants exposés au sud aux phénomènes de cryoclastie liés à l’alternance de gel / dégel lors des périodes de glaciations du quaternaire. Les versants exposés au sud ou à l’est sont ainsi en pente forte et opposés aux versants nord ou ouest en pente douce[10]. En amont de Doullens, ce bassin s'étend cependant au-delà des anticlinaux bordant le val au détriment des bassins de la Somme et de la Canche. La largeur moyenne du petit fleuve est comprise entre 10 et 15 mètres dans la partie aval du cours. Sa pente moyenne naturelle est de un pour mille mais elle est compensée par la présence de 22 barrages[11].

L'ensemble de son bassin s'étend sur plusieurs pays : le Ponthieu et l'Amiénois au sud du cours du fleuve, le Pays de Montreuil et le Ternois au nord et recouvre totalement ou partiellement le territoire de 157 communes (74 dans la Somme, 83 dans le Pas-de-Calais) regroupant 75 200 habitants (28 500 dans la Somme, 46 700 dans le Pas-de-Calais[12]), soit une densité moyenne faible de 57 h/km² (plus élevée dans la vallée que sur les plateaux bordant celle-ci). Seules, six communes du bassin dépassent 2 000 habitants[13].

L'Authie à Frohen-le-Grand

L'Institution Interdépartementale Pas-de-Calais/Somme pour l'Aménagement de la Vallée de l'Authie a été fondée en 1993 et a la responsabilité de coordonner actions et projets concernant le fleuve côtier ainsi que de veiller à la qualité de ses eaux[6]. Devenue, le 7 juillet 2006[14], Établissement public territorial de bassin (EPTB), elle est désormais chargée d'élaborer un Schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE)[15] dont les objectifs principaux sont d'améliorer la qualité des eaux, de favoriser l'écoulement de celles-ci pour que perdure la richesse biologique du fleuve, mais également d'accompagner les mutations socio-économiques de la vallée en assurant la promotion d'une politique cohérente de développement du tourisme et des loisirs respectueuse de l'environnement[6].

Les affluents de l'Authie sont peu puissants et de faible longueur (d'amont en aval)[16] :

Hydrologie

Dans le cadre d'un régime pluvial océanique, l'Authie assure un débit régulier et relativement soutenu de 10,8 m³/s à l'exutoire[17]. L'ensemble du bassin versant est affecté par un climat océanique caractérisé par une température moyenne annuelle de 10°C, un faible nombre de jours de gel, des précipitations relativement élevées comprises entre 800 et 900 mm par an sauf à proximité de l'estuaire où elles s'abaissent brutalement à moins de 650 mm[18].

Débits mensuels de l'Authie sous la forme d'un histogramme

À Dompierre-sur-Authie, à une trentaine de kilomètres de son embouchure[19], le débit de l'Authie, observé sur 45 années (de 1963 à 2007), atteint en moyenne 7,9 m³/s pour un bassin versant de 784 km² (soit guère plus de 60 % de sa superficie totale). Le fleuve présente des variations limitées du module, la période des hautes eaux peut être enregistrée à la fin de l'hiver et au printemps avec une moyenne mensuelle de 9,32 m³/s, 9,36 m³/s et 8,91 m³/s atteinte respectivement en mars, avril et mai. Les basses eaux interviennent à la fin de l'été et durant l'automne avec des débits compris entre 6,39 m³/s et 6,73 m³/s de septembre à novembre (le mois d'octobre voyant le plus bas module de l'année). Les périodes d'étiage, tout comme les crues, sont limitées. La régularité du débit du fleuve s'explique par le puissant aquifère des niveaux crayeux du crétacé (Sénonien[20], Turonien et plus rarement Cénomanien) qui renferme une nappe puissante en communication directe avec les cours d’eau de la région[21]. Cette nappe contribue à 80 % du débit de l'Authie et joue un rôle régulateur. Pendant les mois de faibles précipitations (essentiellement en période estivale), la rivière est alimentée par la nappe, d’autant plus que son niveau est bas par rapport à celui de cette dernière, durant l'automne et l'hiver à plus importante pluviosité, ce sont les hautes eaux de la rivière qui contribuent à la recharge des nappes[22]. Malgré cette caractéristique, la vallée de l'Authie peut connaître des inondations, surtout dans la partie aval du cours entre Dompierre-sur-Authie et Quend sur une superficie estimée à 2 200 hectares. Les crues du fleuve peuvent être localement renforcées par la présence de moulins qui font obstacle à l'écoulement et, à proximité de l'estuaire, par l'influence des marées[23]

En établissant une comparaison entre le débit et le bassin versant, l'Authie présente un module relativement abondant ainsi que l'atteste une lame d'eau de 317 mm/an (bien inférieure à celle du bassin de la Canche de l'ordre de 427 mm mais largement supérieure à celle du bassin de la Somme qui atteint seulement 196 mm, la moyenne nationale étant de 300 mm)[24]. Son débit spécifique (ou Qsp) est de 10 litres par seconde et par kilomètre carré de bassin (9,5 l/s/km² pour l'ensemble des cours d'eau français, mais 13,5 l/s/km² dans le cas du bassin de la Canche et 6,9 pour celui de la Somme)[25].

Histoire

Une longue occupation humaine

Ne pouvant franchir avec ses troupes les bas champs inondés de l'Authie pour remonter vers le nord, Édouard III est contraint d'affronter l'armée du roi de France qu'il écrase à la bataille de Crécy.

Les premières traces d'occupation humaine de la vallée de l'Authie remontent à 200 à 300 000 années durant le Moustérien. De nombreux outils de l'époque néandertalienne ont été découverts[26] sans pour autant que les sites mis au jour revêtent l'importance de celui trouvé à Caours sur le Scardon à une quinzaine de kilomètres au sud. Si les hommes peuplent la vallée à l'époque gauloise (des bijoux, des armes et des monnaies ont été découverts dans un sanctuaire de l'époque pré-romaine à Dompierre-sur-Authie[27]), puis durant celle de la Belgique romaine, le cours de l'Authie reste à l'écart des grands courants de circulation. Les voies de communication ne suivent pas la vallée orientée d'est en ouest mais la traversent selon une direction nord-sud. Ainsi en va-t-il pour la route de l'étain reliant l'actuel port de Boulogne-sur-Mer au sud de la France avant la période d'occupation romaine[28] ainsi que pour les voies romaines assurant les liaisons entre Paris (Lutecia), Amiens (Samarobriva) et la mer de Bretagne par le port de Boulogne-sur-Mer (Gesoriacum)[28]. La vocation agricole de la vallée est déjà attestée car la prospection aérienne et les fouilles archéologiques ont permis de retrouver de nombreuses grandes exploitations gallo-romaines (villa rustica) notamment à Nampont[29] mais, en revanche, pas d'agglomérations possédant de vastes ensembles monumentaux.

Allée de circulation d'une muche

La vallée de l'Authie devient, à partir de la guerre de Cent Ans et de la bataille de Crécy, un lieu d'affrontement et un enjeu primordial dans les combats que se livrent les grandes entités politiques. Au XVIe siècle, au cours de la lutte entre la France et les Habsbourgs d'Autriche et d'Espagne, l'Authie devient la frontière entre les Français qui restent maîtres de la Picardie et les Espagnols présents en Artois après la signature du traité de Madrid le 14 janvier 1526 et du second traité de Cateau-Cambrésis le 3 avril 1559[3]. Le cours du fleuve se couvre de puissantes forteresses, françaises au sud, espagnoles au nord. Dans la première moitié du XVIIe siècle, la région sert à nouveau de champ de bataille dans le cadre de la guerre de Trente Ans jusqu'en 1648, puis de la guerre qui oppose la France à l'Espagne jusqu'en 1659. À l'issue de cette dernière, le traité des Pyrénées, signé le 7 novembre 1659, redonne l'Artois à la France et fait perdre à l'Authie son statut frontalier[3]. Les nombreux combats se déroulant dans la vallée, les exactions de la soldatesque entraînent la ruine de nombreux édifices et villages et conduisent les habitants à aménager des muches, souterrains-refuges, établies à proximité ou plus souvent sous leur village où ils peuvent se réfugier en cas de danger avec leurs biens et leur bétail. Il arrive souvent que l'entrée soit localisée dans l'église, la muche se situant sous la place du village, comportant allées de circulation et chambres pour abriter les familles avec animaux, victuailles et toutes les richesses que chacune possédait[30]. Plusieurs dizaines ont été répertoriées dans la Somme et dans le Pas-de-Calais[31], notamment autour de Dompierre-sur-Authie.

L'Artois revenu à la France, l'Authie n'en constitue pas moins une limite administrative entre des provinces au statut fiscal différent. Au nord du fleuve, différentes impositions ne sont pas appliquées comme la gabelle, la taille, les aides et le timbre, ce qui entraîne une contrebande de part et d'autre du cours de la part de Picards cherchant à acheter du sel à moindre coût[3]. Ce problème de délimitation de territoire ne se termine pas avec la fin de l'Ancien Régime et l'établissement des départements par la Révolution, Auxi-le-Château reste ainsi pendant un an, en 1790-1791, divisée en deux, une partie de la commune dans la Somme, l'autre dans le Pas-de-Calais avant de revenir à ce dernier[3].

Comme cela avait été le cas à des époques antérieures, les moyens de communication nouveaux comme le chemin de fer au XIXe siècle évitent la vallée de l'Authie. Aucune voie ferrée, même d'intérêt local, ne s'installe le long du fleuve. Les grands axes ferroviaires se contentent de franchir perpendiculairement l'Authie tout comme les voies routières d'importance. Seules des routes départementales longent le cours d'eau, la D 319 au nord, la D 224 au sud et encore s'en éloignent-elles à proximité de l'estuaire. La vallée présente une faible densité de réseaux de transport si on la compare avec ses homologues septentrionales, en particulier l'Aa[32]

Même si quelques navires de faible tonnage ont remonté le cours de l'Authie dans sa basse vallée à diverses époques de l'histoire, l'Authie n'a jamais été aménagée pour la navigation. Pourtant, en 1272, il est envisagé, par le comte de Ponthieu, Jean de Nesle, le creusement d'un canal de la baie de l'Authie à Rue dont le port commence à s'ensabler, cette voie d'eau devant être alimentée par les eaux de l'Authie. Face aux difficultés techniques, les travaux ne sont pas engagés et l'idée de canal est abandonnée dès 1277[33]. Au XVIIIe siècle, un projet, resté à l'état embryonnaire, de rendre l'Authie navigable de l'embouchure à Doullens a également été établi[6].

Patrimoine

Sur une centaine de kilomètres, l'Authie déroule son cours, le long duquel des abbayes, de nombreux châteaux rappellent son riche passé, mais également les nombreuses guerres et ravages que subit cette région.

L'abbaye et les jardins de Valloires

Près des sources du fleuve, Authie garde le souvenir, outre son prieuré, édifié dès le VIIe siècle, dépendant de l'abbaye de Corbie, des tisseurs de velours installés au bord d'une retenue d'eau de 1824 à 1957, et de Louis Dewailly, riche négociant amiénois occupant le château et dont l'action en faveur de la commune et de ses habitants a marqué l'histoire locale[4]. Plus en aval, Doullens possède une des citadelles les plus vastes de France, édifiée au XVIe siècle par Robert Mailly sur l'ordre de François Ier pour défendre la ville menacée par les Habsbourgs, maîtres de l'Artois voisin[34]. En suivant le cours du fleuve, on ne s'éloigne guère des réalités guerrières, car Auxi-le-Château garde les vestiges de son ouvrage fortifié, élevé en 1178 par Philippe d'Alsace, comte de Flandre et ruiné durant la guerre de Trente Ans en 1637[35]. À Dompierre-sur-Authie, le donjon d'aspect médiéval ne date que du XVIe siècle et jouxte le manoir du XVIIe siècle, édifié en pierre et en briques, par Charles de Rambures, celui qui, précisément, prit et détruisit la forteresse d'Auxi-le-Château[36]. L'abbaye de Dommartin, située sur la rive opposée, rappelle que la vallée fut également une terre de foi. Fondée en 1125 par les chanoines réguliers de Prémontré, quelques années seulement après la fondation de l'ordre par Saint Norbert de Xanten, elle fut reconstruite au XVIIIe siècle[36].

Le moulin de Maintenay

Cet édifice religieux précède le plus célèbre des monuments de la vallée : l'abbaye de Valloires et ses jardins. Érigée, à partir de 1137, par Guy II, comte de Ponthieu, cette abbaye cistercienne connut deux siècles de prospérité avant d'être ravagée par la Guerre de cent ans, puis celle de trente ans[37]. Reconstruite au XVIIIe siècle, de 1741 à 1756, préservée des destructions lors de la Révolution, elle offre une grande unité architecturale. Depuis 1989, les jardins abritent une collection de 4 000 espèces de végétaux et variétés d'arbustes dans quatre espaces différents ; au centre du parc, une roseraie (qui abrite 2 000 rosiers dont beaucoup de variétés anciennes) respecte l'esprit cistercien en laissant dominer le blanc et le rose pâle[37]. Les autres lieux patrimoniaux de la basse vallée de l'Authie répondent à un registre plus profane : château Renaissance du XVIe siècle à Argoules[38], forteresse du XVe siècle de Nampont, construite sur une île de l'Authie et rare vestige de la série d'ouvrages militaires défendant la frontière du royaume[36].

Plus près de l'estuaire, le moulin de Maintenay, dont les fondations remontent à la fin du XIIe siècle, offre le meilleur exemple de l'ancienne activité meunière de la vallée. Propriété de l'abbaye de Valloires depuis 1197, il a été utilisé par les moines jusqu'au XVIIIe siècle. Revendu à des particuliers, il reste moulin à farine jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, puis est transformé en scierie qui arrête ses activités dans les années 1970 avant d'être restauré et transformé en écomusée[39]. Au XIXe siècle, la vallée de l'Authie a compté jusqu'à une cinquantaine de moulins[40] (un tous les deux kilomètres, ce qui montre le faible peuplement de la vallée lorsqu'on compare cette statistique avec les 60 moulins de la Durdent concentrés sur les 24 km de cours de ce petit fleuve côtier de Seine-Maritime) dont les meules broyaient les céréales, le colza, le lin, l'œillette ou la cameline[41] pour en extraire la farine ou l'huile.

Activités

La vallée de l'Authie, un espace tourné vers l'agriculture et le tourisme vert

L'économie de la vallée de l'Authie et des plateaux qui l'encadrent est dominée par l'agriculture, les terres agricoles (surface agricole utile) représentant 80 % de la superficie du bassin versant[42]. La polyculture (céréales, betterave à sucre, colza, pomme de terre) occupe les plateaux aux terres fertiles recouvertes de limons, l'élevage (essentiellement bovin) est localisé dans la vallée où se pratiquent également la culture du tabac et la sylviculture, tout particulièrement la populiculture en plein essor. Globalement, depuis une trentaine d'années, l'élevage (sauf dans la vallée) régresse face à la mise en cultures des terres[12]. Ainsi soumise à d'importantes pressions agricoles, l'Authie présente une mauvaise qualité de l'eau liée à de fortes concentrations en nitrates, matières organiques et matières en suspension[43]. Toutefois sur les terres les moins fertiles, on assiste à une déprise agricole, ainsi les coteaux abrupts, domaine des larris, pelouses calcicoles piquetées de rares arbustes, autrefois occupés par l'élevage des moutons, ont été abandonnés, retrouvant un couvert forestier[40]. L'activité piscicole est encore peu présente avec seulement deux lieux d'élevage à Beauvoir-Wavans et à Douriez[44].

L'activité industrielle est peu représentée en dehors des petites agglomérations de Doullens (industrie agro-alimentaire avec Cofranlait, industrie chimique avec Rosenlew dans la commune voisine de Beauval)[45], d'Auxi-le-Château (présence d'un équipementier automobile dépendant du groupe Thyssen-Krupp[46]) et de l'exploitation de ballastières au niveau de l'estuaire. Des activités traditionnelles comme l'industrie textile à Doullens avec la filature de coton Julien Thiriez père et fils et l'émaillerie à Auxi-le-Château (usine Aubecq) dans la haute vallée ont aujourd'hui disparu. Il subsiste toutefois, sous une forme artisanale, une activité de vannerie, héritière d'une longue tradition, au Boisle[47].

La vallée de l'Authie, peu urbanisée, riche en sites patrimoniaux, a su développer l'activité touristique en multipliant les possibilités d'hébergement (gîtes ruraux, terrains de camping) et les activités (randonnée, cyclotourisme, sports nautiques, canoë-kayak)[48]. Ce tourisme vert, auquel on peut adjoindre les activités de découverte du patrimoine naturel de la baie de l'Authie, vient s'ajouter aux activités balnéaires plus anciennes présentes sur le littoral dans les stations de Fort-Mahon-Plage et de Berck-sur-Mer[42]. La pêche de loisirs, pratiquée sur la quasi totalité du cours ainsi que dans les nombreux étangs artificiels liés à la présence de l’eau et à son captage aisé en fond de vallée, et la chasse, plus présente dans la partie aval et l'estuaire (nombreux gabions), peuvent être considérées comme des activités touristiques à part entière[40].

Environnement

La baie de l'Authie

Article détaillé : Baie d'Authie.
L'estuaire de l'Authie, la pointe du Haut Banc et Berck en arrière-plan

La baie de l'Authie (voir sa géographie ci-dessus), dont une partie du territoire a été acquise, entre 1986 et 2003, par le Conservatoire du littoral, abrite un milieu naturel diversifié. Le paysage, au nord de l'estuaire du fleuve et à proximité de la pointe de Routhiauville au sud, est fortement marqué par la présence dunaire : dunes blanches, dunes boisées, prairies arrières-dunaires… soumises aux attaques incessantes de la mer[49]. De multiples espèces végétales s'y rencontrent comme le rare iris fétide, l'oyat, le panicaut des dunes et l'élyme des sables ou seigle de mer[50]. L'avifaune, dont la diversité n'égale pas, certes, celle de la baie de Somme voisine, ne manque pas d'intérêt avec la présence, permanente ou temporaire, de l'aigrette garzette, de la spatule blanche, du faucon pèlerin, de l'épervier d'Europe, du pic épeichette, du cochevis huppé et même de quelques cigognes. Le milieu dunaire abrite des espaces humides, les pannes, mares temporaires en général à sec durant la période estivale[51]. Ces pannes se sont formées au début du XIXe siècle lorsque l'estran recouvrait, lors des grandes marées, des dépressions sableuses. Progressivement ces dernières furent isolées du milieu marin par la mise en place de cordons de dunes mais furent toujours alimentées en eau par les précipitations et les nappes phréatiques. Aujourd'hui, les pannes abritent des espèces végétales comme la menthe aquatique ou encore l'orchis incarnat et des espèces animales variées tels le crapaud calamite, le héron cendré, le grèbe huppé ainsi que de nombreuses grenouilles et libellules[51]. Dans la partie méridionale de la baie dominent les polders, conquis sur la mer grâce à l'édification des renclôtures, domaine des cultures et des pâturages. Ces espaces humides, entrecoupés de canaux de drainage, de fossés, de mares et d'étangs, abritent de nombreuses espèces de Joncs, de Roseaux et d'autres végétaux aquatiques[49].

Pour préserver ce milieu fragile fréquenté par près de 500 000 visiteurs par an, le Conservatoire du littoral envisage de restaurer le pâturage ovin extensif pour entretenir le milieu dunaire[52], mais également d'améliorer l'accueil des touristes par des aménagements mieux adaptés à la problématique environnementale actuelle : parkings intégrés au paysage, sentiers de découverte balisés[53]

Le fleuve et la vallée

Un triton crêté

L'Authie est un cours d'eau d'une grande richesse halieutique dont tout le cours est classé en première catégorie. Elle est, avec la Bresle, l'un des rares cours d'eau de la Seine au Danemark à encore accueillir le saumon atlantique, poisson migrateur considéré comme un bon bioindicateur de la qualité de l'eau[54]. Celle-ci est globalement bonne, les rejets industriels et urbains étant faibles et plutôt en diminution. Subsiste toutefois la pollution d'origine agricole. L'érosion et le ruissellement liés aux pratiques d'agriculture intensive et à l'augmentation des terres labourables au détriment des surfaces en herbe sont à l'origine de fortes concentrations de matières en suspension et d'une pollution par les nitrates[42]. Cette érosion combinée à l'effet des ouvrages implantés en travers du lit du cours d’eau provoque aussi l'envasement de sections du fleuve et le colmatage de frayères de salmonidés qui nécessitent un substrat de type gravier pour permettre l'oxygénation des œufs[55].

D'autres poissons migrateurs ou sédentaires, tels que la la truite fario, (qui devient truite de mer le cas échéant), la lamproie fluviatile, la lamproie de Planer et le chabot, sont également présents. Classée cours d’eau à salmonidés depuis 1987[56], l'Authie (ainsi que ses affluents) est soumise au nom du Code de l'environnement (arrêté du 18/04/1997) à l’obligation de libre circulation des poissons migrateurs. 22 barrages sont recensés sur l'Authie ; pour faciliter ou permettre le passage des poissons et notamment leur montaison jusqu'en amont du cours d'eau ou dans ses tributaires, l'ouverture définitive des barrages ou à défaut leur aménagement sont progressivement mis en œuvre[57]. Une part de ces barrages sont encore infranchissables ou posent problème, notamment à Tollent en partie aval du fleuve[58].

La vallée du fleuve est considérée, par le réseau Natura 2000, comme un des couloirs fluviatiles essentiels du nord de la France en raison de ses prairies et marais tourbeux qui abritent de nombreuses espèces animales et végétales[59]. Sur le seul plan floristique, on trouve dans la vallée 16 espèces protégées parmi lesquelles des fougères, la parnassie des marais, seule représentante en France du genre Parnassia, des orchidées comme l'orchis grenouille ou la spiranthe d'automne. Quant à la faune amphibie, les rives de fleuve côtier rassemblent une population importante de tritons crêtés, espèce fortement menacée dans de nombreuses régions par la destruction de son habitat liée aux activités humaines[54]. L'Authie est représentative des hydrosystèmes fluviatiles nord-atlantiques en raison de la diversité de son ichtyofaune, de ses habitats aquatiques rhéophiles (terme s'appliquant aux espèces animales ou végétales capables de vivre dans des eaux animées par de forts courants) et lentiques (vocabulaire désignant les organismes qui vivent dans les lacs, les étangs, les marais, les eaux stagnantes ou tout autre hydrosystème traversé par des courants très faibles à nuls)[54].

Départements et communes traversés

L'Authie traverse deux départements, 45 communes [1] dont :

Toponymes

L'hydronyme Authie se retrouve dans les sept toponymes suivants : Authie, Authieule, Dompierre-sur-Authie, Raye-sur-Authie, Saint-Léger-lès-Authie, Villers-sur-Authie, Vitz-sur-Authie.

Bibliographie

  • Gérard Bacquet, Val d'Authie, Éd. Château, Auxi-le-Château, 1975 (ASIN B0000DP6VS)
  • Eric Alibert, La Côte d'Opale, Carnet du Littoral, Gallimard - Conservatoire du littoral, 1998 (ISBN 2070514676)

Notes et références

  1. a  et b SANDRE, « Fiche authie (E5500570) ». Consulté le 11 juin 2008.
  2. L'origine du nom de l'Authie sur crehangec.free.fr. Consulté le 11 juin 2008.
  3. a , b , c , d  et e L'Authie : une vallée, des paysages, Un peu d'histoire sur cpie-authie.club.fr Lire en ligne. Consulté le 11 juin 2008.
  4. a  et b Histoire de la commune d'Authie sur le site de la ville. Consulté le 11 juin 2008.
  5. La source de l'Authie sur le site de l'Agence de l'eau Artois-Picardie. Consulté le 11 juin 2008.
  6. a , b , c , d  et e Le bassin versant de l'Authie, Étude monographique des fleuves et grandes rivières de France, 2003, p. 2 Lire en ligne. Consulté le 11 juin 2008.
  7. Appelée également baie d'Authie
  8. La baie de l'Authie sur baiedesomme.org. Consulté le 11 juin 2008.
  9. Article de Pierre-Jean Thumerelle in Guide des merveilles naturelles de France, Sélection du Reader's Digest, 1973, p. 69.
  10. Rapport de la fédération Nord Nature sur l'environnement des zones traversées par la future A 24, p. 4 Lire en ligne. Consulté le 11 juin 2008.
  11. Les barrages sur l'Authie sur eau-artois-picardie.fr. Consulté le 11 juin 2008.
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  13. Conférence locale sur l'eau, op. cit., p. 5.
  14. L'institution devient EPTB en juillet 2006 sur eau-artois-picardie.fr. Consulté le 11 juin 2008.
  15. Le SAGE Authie sur gesteau.eaufrance.fr. Consulté le 11 juin 2008.
  16. Données recueillies sur le site du SANDRE. Tapez le nom du cours d'eau. Consulté le 11 juin 2008.
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  18. Carte de Météo France sur Le Ponthieu et le Vimeu, document émanant du ministère de l'agriculture Lire en ligne. Consulté le 11 juin 2008.
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  20. Le Sénonien est l'ancienne appellation du dernier étage du Mésozoïque, aujourd'hui subdivisé en 4 étages : Coniacien, Santonien, Campanien et Maestrichtien.
  21. Rapport de la fédération Nord Nature sur l'environnement des zones traversées par la future A 24, p. 9 Lire en ligne. Consulté le 11 juin 2008.
  22. Eau : reconquête et nouveaux défis, Club de la presse, Lille, 29 juin 2004 Lire en ligne. Consulté le 11 juin 2008.
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  24. Les chiffres délivrés pour le bassin versant de la Canche correspondent aux données enregistrées à la station hydrologique de Brimeux, code : E5400310. Consulté le 11 juin 2008.
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  59. Prairies et marais tourbeux de la basse vallée de l'Authie, fiche du réseau Natura 2000. Consulté le 11 juin 2008.

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