Bretagne (Province Romaine)

Bretagne (Province Romaine)

Bretagne (province romaine)

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Histoire des Îles Britanniques

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La Bretagne dans l'Empire romain, vers 120

La Britannia désignait la province romaine qui couvrait l’Angleterre, le pays de Galles et le sud de l’Écosse du Ier siècle au début du Ve siècle. Pour les Romains, la Britannia constituait « la terre la plus écartée et le dernier boulevard de la liberté » ; d'après l'écrivain Tacite « Il n’y a plus de peuples au-delà, rien que des flots et des rochers. »

Sommaire

Avant la conquête romaine

Avant la conquête romaine, la Bretagne est habitée par des peuples celtes et belges. Des relations de longue date existent avec les civilisations méditerranéennes pour le commerce de chiens de chasse, d'esclaves et de métaux : initialement au départ des Cornouailles, les centres de commerce se sont progressivement déplacés vers l'ouest(??). Grâce au nombre de vestiges que le site a laissés, on estime qu'Hengistbury Head en constitua un pôle vers le IIIe siècle av. J.-C. Ce déplacement pourrait être en relation avec l'évolution de la situation sur le continent.

Les îles Britanniques, riches en minerais (or d'Irlande, étain de Cornouailles, ont entretenu des relations, avec Carthage notamment, car les ressources en étain étaient limitées dans le monde méditerranéen. L'existence de la Bretagne est mentionnée pour la première fois dans un périple marseillais du VIe siècle avant J.-C. sous les noms de Ierne (Eire, Irlande) et Alien (Grande-Bretagne)[réf. nécessaire]. Au IVe siècle av. J.-C., le navigateur marseillais Pythéas les désigne comme « îles Prétaniques » (le mot prétare signifie étain[réf. nécessaire]). Au IIe siècle av. J.-C., des itinéraires réguliers furent établis entre la Bretagne et la Méditerranée, des marchands gaulois, les Vénètes en particulier, servirent d'intermédiaires. Des passerelles commerciales existaient donc aussi avec la Gaule du nord. Les îles Britanniques sont peuplées d'envahisseurs celtiques surimposés aux vieilles populations de l'Âge du bronze, mais ces peuples sont assez différents d'une région à l'autre. En Irlande, en Écosse et dans l'île de Man, les Celtes sont des Gaëls alors qu'en Angleterre, au pays de Galles et en Cornouailles, ce sont des Brittons plutôt apparentés aux Armoricains.

La conquête romaine

Province romaine de Bretagne en 150, montrant les tribus autochtones, les villes, les routes principales et les légions romaines déployées.

La conquête romaine procéda par étape après la celle des Gaules.

  • En 55 av. J.-C., Jules César débarque au sud de l’île de Grande-Bretagne, alors appelée « Bretagne » ou Britannia (en latin) ; il réitère sa traversée en -54. Ces deux débarquements permirent l'établissement de premières relations de pouvoir entre Rome et les royaumes britanniques : de nombreux rois se rallient à César et lui envoient des otages (Trinovantes, Cantiaci, etc.). Il n’y eut cependant ni établissement de colonies, ni annexion. En revanche, un roi atrébate, Commios, fuit la Gaule pour s'établir en Bretagne. Ces faits militaires constituèrent donc un précédent et une voie à suivre pour les successeurs de César.
  • Au premier siècle de l’ère chrétienne, des marchands romains s’installent en Bretagne, avec l’accord de peuples brittoniques, tandis que de nombreux rois bretons sont reçus à Rome par Auguste et ses successeurs[1].
  • En 39, Caligula concentre des troupes près de Boulogne-sur-Mer et y fait édifier un phare monumental, puis renonce inexplicablement à tout débarquement.
  • En 43, l’empereur Claude souhaite neutraliser la religion druidique, susceptible d’être un ferment nationaliste en Gaule, et dont les bases subsistent en Bretagne. L'intérêt des commerçants romains a également pu influer sur sa décision, tandis qu'il se sert visiblement du roi Verica, spolié de son royaume par les Catuvellauni, comme prétexte à l'invasion. Il envoie en Bretagne quatre légions : les II Augusta, IX Hispana, XIV Gemina et la XX Valeria Victrix, commandées par Aulus Plautius, ancien gouverneur de la Pannonie, Flavius Vespasien, le futur empereur et Osidius Geta. Les historiens estiment à environ 40 000 hommes le corps de débarquement qui mena la conquête du sud de la Bretagne de 43 à 47. Claude fit même personnellement le trajet jusqu’en Bretagne, pour revenir célébrer son triomphe à Rome et prendre le titre de Britannicus, qu’il transmit à son fils.
  • En 60, Néron fait occuper l’île de Mona (Anglesey), et détruire le sanctuaire foyer de druidisme.
  • En 60 et 61, à la suite du legs à Rome de son royaume par le roi Prasutagos, les brutalités des commerçants et des administrateurs romains contre Boudicca, reine des Iceni, provoquent un soulèvement de tout son peuple. Ses troupes prirent plusieurs villes, massacrèrent les garnisons romaines et pillèrent Camulodunum, Verulamium et Londinium. Selon Suétone, Néron envisage d’évacuer l’île, mais Suetonius Paulinus mate la révolte. Les historiens romains annoncent un bilan terrible : 70 000 Romains massacrés au début de la révolte, et sûrement beaucoup plus du côté breton.

Sous Vespasien, la conquête romaine reprend.

L'occupation romaine de l'île ne fut jamais complète, car elle ne s'étendait pas au nord du mur d'Hadrien (long de 95 km), qui sépare aujourd'hui l'Angleterre de l'Écosse (voir la carte de la Britannia); la Britannia ne comprenait ni l'Écosse du Nord (Caledonia) ni l'Irlande (Hibernia). La conquête des hautes terres de la Calédonie aurait exigé un effort militaire et financier disproportionné par rapport à l'intérêt de l'opération. On n'y trouvait pas de terres à cultiver, ni de vastes terrains d'élevage, seulement des tourbières et des marais, rien qui pût justifier pour Rome une guerre longue et coûteuse, car les populations locales (les Calédoniens) étaient très hostiles aux Romains.

La conquête romaine incomplète de l’île et la surveillance des peuples récemment soumis exigèrent le maintien de trois légions et de troupes auxiliaires, soit entre 20 000 et 30 000 hommes. La Britannia devint une province impériale, gouvernée depuis Camulodunum (Colchester), Eburacum (York) ou peut-être déjà Londinium (Londres), par un légat qui devait être un ancien consul, en raison des effectifs à commander.

Organisation de la Bretagne romaine

Les royaumes-clients du sud de l'île de Bretagne, précédant la conquête romaine.

Au cours des Ier et IIe siècles, la province de Bretagne est organisée en différentes zones :

  • la province proprement dite, répartie entre zone militarisée, suivant la ligne de front, et zone pacifiée, dans l'arrière-pays ;
  • des royaumes-clients, progressivement incorporés à la province au cours de la seconde moitié du Ier siècle (Togidumnus au sud, Prasutagus à l'ouest...).

Tandis que les royaumes-clients ont pu garder une forme d'autonomie, le reste du territoire a donc dû se fondre dans un schéma impérial. Pourtant, ce sont les tribus bretonnes pré-existantes qui en formeront le tissu administratif, comme en Gaule (Catuvellauni, Atrebates...). L'organisation de la Bretagne romaine est donc un phénomène hybride, avec d'une part un schéma impérial imposé par Rome, et d'autre part une composante de base proprement bretonne.

Urbanisation

À la suite des nouvelles conquêtes, de nouvelles cités romaines furent créées, sur la base des tribus existantes telles que les Atrebates, les Trinovantes, les Iceni, les Coritani, les Ordovices, les Demetae et les Brigantes : parfois, un centre urbain était déjà existant et l'agglomération romano-bretonne se fondait dessus (Calleva, Verulamium, Camulodunum...) tandis que d'autre fois, un nouveau centre était fondé par déplacement de population (Noviomagus, Durovernum, Corinium...). On ignore où se trouvait réellement la capitale provinciale à cette époque : certains auteurs penchent pour Londinium (Londres), sans doute fondée dans le courant du Ier siècle - d'autres avancent Camulodunum ou Eburacum.

Différentes villes de la province de Bretagne (noms latins) :

Un important réseau de routes couvrait alors le pays, tandis qu'une hiérarchie de fonctionnaires assurait l'administration et que l'armée faisait régner l'ordre. Les liaisons avec le continent s’opéraient par Douvres et Boulogne-sur-Mer et depuis la Cornouailles par Nantes et Bordeaux. L’activité et l'exportation minière restait importante : mines de plomb argentifère, d’or, de cuivre, d’étain, et même de fer et de charbon.

Romanisation

Le latin servait de langue véhiculaire pour les Romains et les populations locales, estimées à un million d'habitants.

Cependant, la romanisation (ou latinisation) des habitants de l'île (tous appelés Brettones (ou Bretons) par les Romains) resta plutôt superficielle et semble avoir surtout concerné le bassin de Londres, tandis que les vieux fonds celtique et belge perdurèrent, du moins dans les campagnes et particulièrement au pays de Galles, où les Romains s'implantèrent peu. Autrement dit, les « Bretons » continuèrent à parler leurs langues celtiques et peut-être germanique pour ce qui est des Belges[2], sauf pour les élites locales, généralement bilingues, pour qui la romanisation obtint un franc succès. Voici ce qu'écrit l'historien Tacite :

« En fait, les populations locales et rurales ne furent pas assimilés par les occupants. La langue latine resta une langue étrangère, sans doute nécessaire pour les relations avec les Romains. La latinisation des villes fut plus importante, mais pas au point de faire changer de langue les habitants. »

— Tacite, Vie d'Agricola.

Certains mots anglais ont toutefois une origine qui date vraisemblablement de l'occupation romaine :

  • Aménagement :
  • Street de strata (chaussée),
  • Wall de vallum (palissade, mur),
  • suffixe -chester et -cester dans des noms de localité pour castra (fort),
  • suffixe -coln dans Lincoln, pour colonia (colonie)
  • Vie citadine : dish, de discus (disque), wine de vinum (vin), cheese de caseus (fromage), cheap de caupo (aubergiste), church de ecclesium (église).

Défense de la province

Entre 119 et 122, puis en 142, des soulèvements de Brigantes soutenus par les tribus insoumises de Calédonie (Écosse) se produisirent sur la frontière nord de la Bretagne, obligeant à un renforcement du limes (fortification sur la frontière extérieure de l'empire) :

  • C’est au cours du voyage que l'empereur Hadrien (117-138) effectua en Calédonie en 121-122 que la construction du mur d'Hadrien (Hadrian's Wall) commença pour se terminer en 128. Ce mur était entouré de fossés, jalonné de fortins, de casernes, de toute une infrastructure militaire qui fut efficace pendant plus de trois siècles. Il s’agissait pour l'Empire romain de soulager les forces armées de la pression des Pictes, qui se faisait de plus en plus forte ; certains historiens parlent davantage d’une «ligne de démarcation» que d’une ligne de fortification.
  • En 142, l'empereur Antonin le Pieux fit construire un autre mur, entre le Forth et la Clide, qui «doublait» au nord la fortification déjà édifiée par son père adoptif Hadrien.

La Bretagne aux IIIe et IVe siècles

Au cours du IIIe siècle, les troupes romaines de Bretagne participent aux troubles politiques de l’Empire romain et font face à des attaques venues du nord et de la mer, mais qui n’ont pas la gravité des assauts germaniques sur le Rhin ou le Danube.

  • 193 : le légat Clodius Albinus s’insurge contre l’assassinat de l’empereur Pertinax. En 197, il débarque en Gaule pour affronter Septime Sévère, et se fait battre à Lyon.
  • de 208 à 211 : Septime Sévère combat les incursions des Calédoniens. Il divise la Bretagne en deux provinces, Bretagne supérieure (capitale Deva) et Bretagne inférieure (capitale Eburacum/York). Septime Sévère décède à Eburacum en 211.
  • Vers l'an 250, des Frisons s'installent dans le Kent, peut-être avec l'accord des autorités romaines.
  • de 259 à 274, la Bretagne soutient les empereurs gaulois et fait partie de l'empire des Gaules
  • 286 : usurpation du général Carausius en Bretagne, qui contrôle avec sa flotte la côte de la Gaule de l’Escaut à la Seine. L’auguste Maximien Hercule accaparé par la défense contre les Germains ne parvient pas le réduire
  • 293 : le César Constance Chlore oblige Carausius à quitter ses positions en Gaule. Allectus, fonctionnaire soutenu par les marchands de Londres, assassine Carausius, se proclame empereur à son tour et ramène ses légions en Bretagne.
  • 296 : Constance Chlore débarque en Bretagne. Allectus est tué dans les combats et l’Empire reprend le contrôle de la province.
  • Au IVe siècle, après les grandes réformes de Dioclétien, la province de la Britannia est divisée en plusieurs provinces, du nord au sud :
    • Valentia, au nord
    • Maxima Caesariensis (Chaîne pennine), capitale Eburacum (York)
    • Flavia Caesariensis (région au nord de la Tamise, entre la mer et le pays de Galles), capitale Londinium (Londres)
    • Bretagne II (pays de Galles)
    • Bretagne I (Cornouaille et régions au sud de la Tamise), capitale Corinium Dobunnorum (Cirencester),

le tout formant le diocèse de Bretagne, rattachée à la préfecture du prétoire des Gaules.

  • À la même époque, Londres devient un atelier monétaire impérial
  • 306 : Constance Chlore décède à Eburacum (York), alors qu’il s’apprétait à marcher contre les Pictes révoltés
  • Le christianisme touche lentement l’île, et trois évêques bretons participent au concile d’Arles en 314.
  • 368-370 : Théodose l'Ancien repousse les incursions des Pictes, des Scots et des pirates Saxons
  • En 383, le comte Maxime se fait proclamer empereur après sa victoire contre les Pictes et les Scots. Il passe en Gaule avec une partie de son armée et l’armée du Rhin puis celle de Rhétie se rallient à lui. La Bretagne est dégarnie, les troupes restantes ne peuvent plus défendre le mur d’Hadrien contre les nouvelles attaques des Pictes et les Scots et abandonnent cette ligne de défense.

Fin de la Bretagne romaine

  • 407 : Les troupes romaines repoussent des tentatives de débarquement des peuples germaniques qui viennent d'envahir la Gaule et proclament empereur leurs généraux Marcus, puis Gratien, puis Constantin III. Celui-ci transfère ses troupes en Gaule et laisse l’île sans défenseurs.
  • après 407, la Bretagne dégarnie de troupes se défend comme elle peut contre les attaques des Saxons, des Angles, des Jutes, des Pictes et des Scots. Les forces romaines en Gaule sont impuissantes à lui apporter de l’aide.
  • En 429, Saint Germain d’Auxerre va en Bretagne lutter contre le pélagianisme, une doctrine chrétienne considérée comme hérétique, et aide les Bretons à lutter contre les envahisseurs.

Les sources sur cette période sont rares et parfois légendaires. La résistance des Bretons est attribuée à divers personnages : Ambrosius Aurelianus entre 460 et 480, qui conduit des réfugiés en Armorique, Vortigern, président (et non roi parce que élu) du conseil à Londres vers 425 ou vers 450. L'est de l'île tombe sous l'autorité des Anglo-Saxons. Cette région se referme sur elle-même et perd par exemple le contact avec l'Église catholique à Rome. De cette époque trouble naîtra la légende du roi Arthur.

Sites archéologiques romains

  • Bath, vestige des thermes romains
  • Mur d'Hadrien, dont le fort de Vindolanda, où l'on a découvert d'exceptionnels restes de correspondances des soldats stationnés dans ce fort.
  • Théâtre de Verulamium à St Albans

Notes et références

  1. Dion Cassius, ou les Res Gestae Augusti
  2. Stephen Oppenheimer, The origins of the British (2006)

Bibliographie

  • Histoire générale de l’Empire romain de Paul Petit, 1974, édition du Seuil
  • MILLETT, M., The Romanization of Britain. An essay in archaeological interpretation, Cambridge, 1990.
  • MACREADY, S., & THOMPSON, F.H., Cross-Channel Trade between Gaul and Britain in the pre-Roman Iron Age, London, 1984.
  • WACHER, J. (ed), The Civitas Capitals of Roman Britain, Leicester, 1975.
  • TODD, M. (ed), A companion to Roman Britain, London, 2004.

Voir aussi

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