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Pays de Léon
Pour les articles homonymes, voir Leon.Bro Leon (Br)
(Léon)— Drapeau Écu Création de l'évêché de Léon 865 Capitale historique Saint-Pol-de-Léon Langue(s) Français - Breton léonard Religion Catholique Superficie 2 019 Km² Population 405 082 (1999) Devise {{{devise}}} Hymne Portail de la Bretagne Le Léon ou Léonais, appelé autrefois Loonois (bro Leon en breton), est une région de Bretagne, ancienne vicomté, évêché, baronnie, bailli et province fiscale à laquelle ses habitants s'identifient encore aujourd'hui très fortement[réf. nécessaire].
Elle est limitée à l'est par la rivière de Morlaix (Dosenn en breton, confluent des rivières Queffleut et Jarlot), frontière avec le Trégor, au sud par les contreforts des monts d'Arrée et par le fleuve de l'Élorn, frontière avec la Cornouaille et particulièrement au niveau du Pont de Rohan[note 1].
Ces frontières sont celles de l'ancien évêché de Léon, lequel regroupait trois pays érigés au XIIIe siècle en archidiaconnés : le Léon proprement dit, appelé aussi Haut Léon (Gourre Leoun); à l'ouest de l'Aber Wrac'h, le pays d'Ach, dont le nom s'écrit aujourd'hui Ac'h; et entre les deux le fief d'Illy (Kemenet Illi) centré sur Lesneven. Le Léon constituait au Haut Moyen Âge la partie la plus occidentale de la Domnonée. Administrativement (sénéchaussées, juridictions), les frontières étaient un peu plus étendues vers le sud où elles ont varié.
Outre une vicomté dirigé par un évêque, le Léon était une des sept baronnies des États de Bretagne, citée aux assises de Geoffroy en 1185. Comme le pouvoir local était exercé par l'évêque-comte, cette baronnie permettait à peu de frais à la même famille de Rohan, héritière de la vicomté de Léon au XIVe siècle et par ailleurs seigneur de la baronnie de Rohan dans le Vannetais, de cumuler les charges. Les Rohan usant du titre de prince, ils se sont honorés de celui de prince du Léon sans que le Léon n'ait pu jouir de celui de principauté.
Sommaire
Étymologie
Le nom de Léon, prononcé en léonard [leun] avec un "n" finale très nasal et évanescent, c'est-à-dire « léoun' » si on utilise l'orthographe française, était expliqué autrefois par les prêtres du diocèse comme venant du latin leonis, la bête christianisée par saint Pol Aurélien lors de son arrivée dans la ville déserte de son cousin Gwithur, identifiée à un lion[réf. nécessaire]. D'autres[1] ramenaient l'étymologie à un castellum legionensis, et, pour appuyer leur hypothèse, voyaient là la preuve qu'une légion romaine avait stationné à l'emplacement de l'actuelle commune de Saint-Pol-de-Léon. En fait aucun document ne corrobore ces étymologies. La mention la plus ancienne, soit ca. 1170, est celle du roman de Tristan et Iseut de Béroul[2], à savoir l'ancien français Loonois, sans rapport avec le lion ou la légion. Le problème est que le latin leo, ni même legio, n'était pas passé dans le vocabulaire de l'ancien breton, a fortiori pas sous sa forme du cas régime de l'ancien français se terminant par un « n ».
Un étymon plausible est l'ancien breton litau qui désignait le rivage continental aux bretons insulaires, qui a donné LLyddaw en gallois[3] et aurait donné en breton moyen Lezoun puis par une substitution qui s'observe plus souvent à l'initiale (v.g. Sabrina - Havren) Lehoun. L'absence de documents en breton moyen ne permettra jamais d'infirmer ou confirmer cette étymologie, ou une autre mais le strict respect des règles de l'étymologie bretonne appelle un ligau, non attesté, plutôt qu'un litau. Cependant on dispose de la mention, en latin, du terme de Letewicion[4] et surtout du terme Letavia[5] pour désigner l'ensemble de la Bretagne.
Il est possible que le sens de ce terme ait été réduit à la partie la plus anciennement colonisée au IVe siècle, le Léon, comme semble en garder le souvenir de la légende de Conan Meriadec localisée à Plougoulm, après que ce soit produit une seconde colonisation à l'origine de la Domnonée et de la Cornouaille. On sait en effet que le Léon ne faisait pas partie de la Domnonée lors de la création de celle ci. On aurait là avec le terme de Léon, une évolution un peu semblable à celui de France, qui désignait d'abord tout le territoire de la Gaule puis seulement un pays de quelques kilomètres carrés au nord de Paris. Là encore, l'étaiement de toute hypothèse restera toujours faible.
Si l'on veut remonter à un hypothétique ligau ou antérieurement ligan, plus conforme mais non attesté, les étymons possibles sont la province irlandaise de Laghain ou bien encore Lugdun, littéralement « forteresse de Lug », qui a effectivement donné, par extension du nom de la capitale Lyon, son nom à la Gaule celtique conquise, la Lyonnaise, et plus particulièrement à l'Armorique, la Lyonnaise III. Dans ce cas, le nom aurait subit la même réduction de sens de la province à une de ses parties la plus anciennement colonisée.[réf. nécessaire]
La forme ancienne française "Loonois", qui a donné en français moderne "Léonais", tendrait à supposer[réf. nécessaire] un "loones" issu de "Lodonesia", ancien nom du comté britonnique de Lodain. Il y aurait là une étymologie commune avec le royaume légendaire de Lyonesse localisé dans les îles Sorlingues mais il est possible que ce royaume englouti de Lyonesse soit un "Lyon enes", c'est-à-dire île de Léon, ce qui nous renvoie à notre point de départ.
Quelle que soit l'étymologie, le toponyme renvoie, comme beaucoup de toponymes bretons, à un lieu de Bretagne insulaire, en l'occurrence la presqu'île du Nord du Pays de Galles, Lleyn (cf. infra sub "Colonisations bretonnes"), dont l'étymologie est tout aussi problématique.
Géographie
Le Léon est baigné par la mer d'Iroise et la Manche, que sépare la pointe de Corsen. C'est un plateau granitique surélevé par rapport au niveau de la mer, ce qui donne à ses côtes envahies par la mer un relief marqué par des rias, appelées aber en breton, et deux baies d'un intérêt géographique de premier ordre, la rade de Brest et la baie de Morlaix. Ces deux baies se prolongent dans l'intérieur des terres par des vallées encaissées, celle de l'Elorn et et celle de l'Horn, qui constituent à elles deux la limite naturelle du plateau. Au-delà, montent les contreforts gagnés sur la lande des monts d'Arrée et dominés par un affleurement rocheux. Le plateau en revanche est aujourd'hui un damier très serré de bocage. Son avancée dans la mer lui permet de bénéficier de la douceur du climat marin, en des endroits abrités du vent jusqu'à l'illusion (cf. jardins exotiques de Roscoff et de l'île de Batz).
Villes principales
- Brest
- Landerneau
- Landivisiau
- Morlaix
- Saint-Pol-de-Léon
- Roscoff
- Lesneven
- Saint-Renan
- Le Conquet
- Plouescat
Rivières du Léon
D'ouest en est (à compléter) :
Îles du Léon
D'ouest en est (à compléter) :
Histoire
Préhistoire
L'acidité des sols et l'absence d'abris naturels calcaires a empêché la conservation des ossements anciens. Si le profil culturel colombanien (du site éponyme de Saint Colomban en Carnac), qui a vu[6]« l'un des plus anciens feux entretenus par l'homme connus dans le monde à ce jour »[note 2], s'est développé en Léon comme il s'est développé à partir de -300 000 au Menez-Dregan en Plouhinec, en Cornouailles, et à Plestin-les-Grèves, en Trégor, ses traces restent à découvrir, peut être sous la mer.
Entre -250 000 à -40 000, au paléolithique moyen, le site aujourd'hui submergé de Treissény[7] en Kerlouan accueille un de ces groupes de chasseurs au gros gibier, a priori néanderthaliens (pas d'ossements humains retrouvés) venus depuis l'Afrique et le Sud de l'Europe ("hachereaux sur éclats"). Sédentaires, ils exploitaient, en tribu restreinte et isolée, un territoire de toundra d'une vingtaine de kilomètres autour d'abris naturels élevés. Ces abris servaient de poste d'observation dont l'occupation a duré des millénaires.
À partir de -40 000, au paléolithique supérieur, durant le devensien, le climat devient encore plus rigoureux, et vers -20 000 quasiment polaire[8]. Les sites de Kerlouan et de Brignogan, datés de -35 000, montrent une quasi disparition de la population. Ce sont de petits campements, sans doute saisonniers, dominant les vallées et présentant un outillage archaïque fait de mauvais silex.
L'épipaléolithique apparait, avec le réchauffement du climat et la diffusion de l'homme moderne, vers -10 000 à la grotte de Roc'h Toul en Guiclan et dans des cavernes côtières à Landéda. Les microlithes trouvés dans l'anse Berthaume sur la rive nord de la rade de Brest datent approximativement de cette époque[réf. nécessaire].
C'est sur la côte du Léon, à Guennoc, que commence le mésolithique breton, vers -8 000[9]. Le boréal, à partir de -7 000, voit l'industrie microlithique du type Bertheaume déjà répandue dans le Finistère évoluer en un type "nord breton" et se diffuser jusqu'au golfe de Saint-Malo et en particulier à des sites de chasse implantés dans les monts d'Arrée à Commana et à Saint-Nicolas-du-Pélem. Des silex originaires des cordons littoraux de galets et du fond de la vallée que formait encore La Manche étaient acheminés pour être taillés sur place[10]. Comme sur toute la côte atlantique de l'Europe, le réchauffement induit une sédentarisation autour de sites d'exploitation intense de l'estran qui ont laissé des traces sous formes d'amas de déchets coquillers, les kjoekkenmoedings, associés en Bretagne à l'homme de Téviec, ancêtre de la civilisation mégalithique locale. Un de ces amas se trouve dans l'anse de Pemprat, sur la côte entre Saint Pol de Léon et Roscoff[11].
Bien que voisin du site d'une des premières constructions monumentales de l'humanité, sinon la première, le tumulus de Barnenez (~-4700) en Plouezoch, le Léon présente relativement peu de vestiges des paysans, qui restaient avant tout des chasseurs et des pécheurs, de la civilisation mégalithique, centrée sur le Vannetais (Locmariaquer (~-4500)) puis Stonehenge (-2800))[note 3]. Localement, celle ci s'organise à partir de -5000 dans une zone extrême occidentale autour de l'enceinte mégalithique d'Ouessant en alignements dans ce qui deviendra, avec l'élévation du niveau de la mer, Molène, l'île Béniguet, la côte et l'arrière-pays du Talmézeau (menhirs de Kervignen et de Kerloas en Plouarzel). Un second site s'organise autour de la baie de Plounéour-Trez, avec un menhir en retrait de la pointe de Pontusval en Brignogan, un unique pilier d'un dolmen disparu au Goulven, deux allées couvertes en Plounévez, le dolmen de Brétouaré, le tumulus de Kerandevez et un petit cromlec'h redoublé à cause de la montée des eaux sur l'anse de Kernic en Plouescat. Un troisième pôle dont il ne restait que le tumulus de Kerestat[12] a du se développer sur la péninsule de Roscoff. On trouve aussi un tumulus au sud est de Plabennec. La relative importance des vestiges au sud du Léon, à Commana, Huelgoat et Brennilis, laisse penser que la pauvreté apparente du megalithisme léonard est un artefact dû à l'intensité de l'activité agricole, sinon au zèle des recteurs.[réf. nécessaire]
Protohistoire
Vers -2 400, la civilisation du Wessex, ancêtre des Osismes, s'implante, par la supériorité des armes en cuivre arsénié puis en bronze, dans des territoires préfigurant déjà le Léon et le Trégor, avant de se diffuser dans un second temps vers -2 100, alors que Stonehenge était reconstruit, au Cap (Cap Caval et Cap Sizun), puis le long de la côte sud[réf. nécessaire]. Ce sont des colonies minières (étain, plomb, argent, or) et commerciales dirigées par des princes dont il reste en Léon neuf tertres funéraires actuellement recensés, un à Saint Renan où les alluvions produisait de l'étain, et huit concentrés dans le Haut Léon (Cléder, Plouvorn, Saint-Vougay, Saint-Thégonnec). Cette répartition montre un peuplement nouveau, pas nécessairement allogène, dans le Haut Léon, alors apparemment laissé vierge par la civilisation mégalithique, et une domination des autochtones dans le Bas Léon. Les tombes « roturières » voisines des tumulus révèlent en effet un type physique autochtone.
À partir de -1 500, le règne de près de mille ans de l'aristocratie maritime et guerrière cède, peut être à cause de l'enrichissement de marchands importateurs de lingots de cuivre ibérique et cymrique nécessaire à l'alliage du bronze, à une société plus intégrée et très prospère où la métallurgie, devenue industrielle grâce au bois des forêts défrichées dans l'intérieur, est au service, non plus du prestige et de la domination (poignards et épées cloutés et décorés, parures), mais de l'agriculture (haches, marteaux, ciseaux) et du commerce international (ateliers de fonderie). Les zones originelles du Léon, du Trégor et de la Basse Cornouaille paraissent à cette époque intégrées à l'ensemble d'un territoire qui s'est étendu par essor démographique, défrichage et conquête agricole et qui préfigure l'actuelle Bretagne (style des haches à douilles), lui-même en relation commerciale avec les futures Gaule et Bretagne insulaire, jusqu'à l'Irlande, les côtes en face d'Heligoland et la route de l'ambre.
Vers -1 200, la métallurgie se développe vers l'accumulation de trésors à vocation religieuse (sacrifices de coupes, armes etc. aux rivières) et à vocation bancaire. Les haches à douille « type breton », impropres à un usage d'outil en raison de leur fort taux de plomb, telles les neuf cents exemplaires découverts à Guesman en Le Tréhou, servent, stockées dans des silos souterrains, de garantie monétaire[13].
A partir de -1 000, la culture du cheval domestique, inconnu auparavant, se diffuse à l'ouest du Rhin, et dans le Léon en particulier, comme en témoignent les pièces de harnachement et les mors en bronze, renforçant une classe guerrière, armée d'épées "langue de carpe", peut être enrichie par la traite des esclaves, principal butin des guerres et principal facteur du brassage des populations. Jusqu'au Bas Moyen Âge, le cheval était réservé à la guerre et sa possession, jusqu'au XIXe siècle en Basse Bretagne, un signe d'élévation au-dessus de la condition paysanne.[réf. nécessaire]
Dès -900, l'émergence des civilisations celtique au Nord des Alpes (cf. Hallstatt) et étrusque au Sud de celles ci (Cf. Villanova) assèchent le trafic du cuivre et relèguent peu à peu l'Armorique, plus encore le Léon, en position de bout de monde. La prééminence des descendants des princes du premier âge du bronze est transférée à des sites continentaux comme celui de Vix.
Vers -800, le site de Guisseny voit l'invention de l'industrie de briquetage, technique de fabrication de pains de sel, destinés à l'exportation, par chauffage de saumure d'eau de mer. Il est possible que cette industrialisation de la production de sel soit la marque d'une tentative de reconversion.
En -700, l'invention du fer, consécutive à la pénurie de cuivre, achève de déclasser l'Armorique.[réf. nécessaire] Le centre du commerce se déplace irréversiblement de la Manche à la Méditerranée. Le Léon reste cependant à l'écart des bouleversements.[réf. nécessaire]
Antiquité
Vers -500, le Carthaginois Himilcon double le promontoire Oestrymnis[14], première mention des Osismes, habitants du Finistère actuel. L'amiral mentionne le trafic avec la colonie phénicienne de Tartessos (possible origine d'un mythe de la déesse phénicienne Ishtar dont le culte, sous la forme d'Isis, nom qui rappelle celui d'Iseult, Esselt en breton, est attesté en Bretagne à l'époque romaine).
Vers -320, le massaliote Pythéas[15] navigue au large de l'île d'Uxisama, l'actuelle Ouessant, qui semble jouer un rôle de métropole commerciale régionale[16].
Vers -100, le territoire est conquis par les Celtes, voisins des Armoricains, (à moins que ce ne soit des Belges) qui fondent la ville de Vorganon, future Vorganium au lieu dit Kerilien en Plounéventer. Les gisements alluvionnaires d'étain en l'actuel Saint-Renan sont toujours exploités et constituent, comme pour les explorateurs précités, le principal centre d'intérêt des conquérants.
De -57 à -37, la conquête romaine ruine l'Armorique. Les navires du commerce trans Manche sont détruits et la production de sel est interdite.
En -37 est crée la cité stipendiaire des Osismes autour d'une ville nouvelle, Vorgium, en l'actuelle Carhaix. Le futur Léon en constitue la partie la plus peuplée mais la ville principale Vorganium est déchue de son statut de capitale. La convention de Narbonne rattache en -27 la cité à la Lyonnaise.
De 41 à 180, Pax Romana. Vorganium est au carrefour d'une route reliant un port de l'Aber Wrac'h, peut être la légendaire Occismor, au chef-lieu Vorgium, et au-delà à Darioritum chez les Vénètes puis à Condevicnum, port des Namnètes, et d'une autre route reliant Gesocribate (probablement le Conquet) à Fanum Martis (Corseul), capitale de la cité des Coriosolites. Au-delà, ce dernier axe reliait d'une part la cité des Cénomans (Le Mans) et d'autre part, par Condate (Rennes), celle des Andécaves (Angers).
De 180 à 190, une révolte des Armoricains, soutenus par des bretons insulaires, est conduit par Maternus et écrasée par L. Artorius Castus (possible origine de la légende du roi Arthur).
La prospérité revient jusqu'en 240, date à laquelle s'ouvre une période de décadence liée à des épidémies et aux pirates bretons et irlandais.
Bas Empire
De 258 à 274, l'Empire des Gaules fait sécession. La cité des Osismes est rattachée, au sein de cet empire, à une province armoricaine dont la capitale est, d'après l'importance du matériel archéologique daté de cette période, Riedones, future Rennes.
De 274 à 282, une difficile reconquête romaine s'achève par le transfert de la capitale vers Osismis, futur Brest où sont construites six tours espacées de vingt et un mètres et reliées par une muraille de quatre mètres d'épaisseur. La Bretagne insulaire reste indépendante.
De 283 à 286, les révoltes paysannes des Bagaudes conduites par Aelianus et Amandus éclatent dans toute l'Armorique. Sous l'autorité de Carausius est créée la province militaire du Tractus Armoricanus en parallèle au Tractus Nervicanus et en complément du Litus Saxonicum, véritables limes navals composés d'un chapelet de garnisons côtières, vraisemblablement chargées d'enrôler et de fixer les candidats à l'immigration et au pillage. C'est cette politique qui est à l'origine des foederati et des lètes et qui finira par un transfert, en Léon comme ailleurs sur le limes, de l'autorité à des colons militaires installés avec leurs familles et même à un changement de population. Une légion des Mauri Osismiaci, environ mille hommes, stationne désormais dans la forteresse d'Osismis avec pour mission de dissuader les pirates d'aborder les côtes et de remonter les rivières.
En 286, après douze ans d'une campagne de reconquête militaire pour le compte de Rome, Marcus A. V. Carausius restaure à son profit, depuis la Bretagne insulaire, l'Empire des Gaules des deux côtés de la Manche (possible origine du mythe du roi Marc). Pour le Léon, le bouleversement est profond. Après le transfert de la capitale à Osisimis, le réseau routier est décentré de Vorganium, qui sera abandonné un siècle plus tard, pour une rocade miltaire en retrait du littoral reliant Osismis à la future Plougoulm, et au-delà, par le gué de Morlaix et le futur Saint Brieuc, à la garnison suivante d'Alet.
En 293, Constance Chlore, César de Maximien, lequel règne depuis Trèves en tant qu'Auguste sur la part d'Occident de l'Empire, vainc Allectus, usurpateur et successeur de Carausius et soustrait l'Armorique à l'autorité de la Bretagne insulaire. Quatre ans plus tard, il reconquiert cette dernière.
Le siècle de ses successeurs, qu'ils soient héréditaires (Constantin, premier empereur chrétien, en 306; Constantin II, César des Gaules en 337; Constant Ier, son frère, en 340; Constance II vainqueur de Magnence en 353) ou qu'ils soient proclamés Augustes par leurs légions (Magnence en 350; Julien en 361 après avoir été nommé par l'empereur en 355; Jovien en 363; Valentinien en 364), voit l'agriculture, et la population, régresser comme l'attestent les études polliniques, vraisemblablement pour des raisons climatiques.
Colonisations bretonnes
En 367, le général Théodose repousse au nom du dauphin Gratien, fils de Valentinien, l'invasion des provinces romaines de la Bretagne par les Scots (les irlandais), les Pictes (les écossais des Lollands) et les Attacots[17] (calédoniens d'Inverness). Un "comes maritimi tractus", peut être à l'origine de la figure légendaire de Conan Mériadec, défend l'Armorique. Il répartit la garnison des Mauri Osismiaci le long des routes dans des fermes[18]. De militaires cantonnés, ils deviennent colons astreints au service militaire. Ces colons, probablement chassés de la Bretagne insulaire envahie à moins qu'ils ne furent les envahisseurs eux-mêmes amadoués de cette façon, sont peut être les premiers nouveaux habitants à l'origine de la Bretagne moderne[19].
De 383 à 388, l'Empire des Gaules est restauré par l'espagnol Maxime, Macsen Wledig en breton, grâce à une armée de bretons insulaires. La légende rapporte que cette armée est financée par la femme de Maxime, Hélène[20], Elen en breton, fille du roi de Segontium, Octavius, Eudwy en gallois, et dirigée par le neveu du roi, Conan Meriadec[21], héritier du trône selon les lois locales. Celui ci prendrait le gouvernement de l'Armorique et y installerait cent trente mil colons bretons insulaires (chiffre extravagant sauf à y inclure des autochtones enrôlés), devenant souverain impétrant possessionné sur les deux rives de la Manche. Le siège de l'autorité locale serait transféré à Castel Meriadec en Plougoulm[22]. L'archéologie confirme l'abandon du site de Vorganium[23]. Sachant que Segontium, l'actuelle Caernarfon, devenue alors la cité de l'impératrice, est la principale ville de la péninsule de Lleyn, il est raisonnable de conjecturer que c'est à cette époque que le Léon a acquis son nom. C'est sous le règne de Maxime et Hélène, qui a introduit au Pays de Galles la règle monastique de Saint Martin qu'elle avait fréquenté[24] à Trèves, que ce dernier, devenu en 371 métropolite de Tours, a exercé, théoriquement du moins, son autorité sur le Léon dans un contexte de conversion et d'élaboration d'un gouvernement chrétien.
Selon la tradition de Saint Gildas[25], qui écrivait à un peu plus d'un siècle de distance, Conan Meriadec continue, après la défaite en 388 de Maxime, d'exercer l'autorité, Théodose régnant à Milan. En 407, les légions de l'île de Bretagne, confrontées à l'impéritie de Rome face au franchissement par les germains du Rhin gelé et craignant une invasion de l'île[26], proclament l'usurpateur Constantin III, qui est selon la légende le fils d'Hélène[27]. Il périra quatre ans plus tard au terme d'une nouvelle expédition continentale. En 409, Conan Meriadec reçoit, à Nantes, des Bagaudes soulevées de nouveau, le titre de roi. L'historien Zozime confirme[28], sans nommer Conan Meriadec, qu'en 410, alors qu'Honorius, fils de Théodose, devenu premier empereur d'Occident, entérine l'abandon de la Bretagne insulaire, l'Armorique devient indépendante. La même année, un chef breton, Ivomadus, fonde avec mille hommes à lui, plus en amont sur la Loire la garnison de Blois.
En 417, le préfet du prétoire des Gaules Exuperantius, à la tête de l'armée romaine, reconquiert sur les Bagaudes et pacifie[29] ce territoire au nord de la Loire mais en 423, deux ans après la mort de Conan Mériadec, Honorius est tout de même amener à reconnaitre l'indépendance de l'Armorique. Son beau frère Constance III lui succède.
Dans les années 420 puis 440, les missions de saint Germain d'Auxerre et de son diacre Palladius, le fils d'Exuperantius, attestent que l'Armorique est convertie au pélagianisme, c'est-à-dire que le clergé et l'aristocratie sont culturellement intégrés à la Bretagne insulaire, christianisée depuis le IIIe siècle. Il est difficile d'interpréter ce pélagianisme autrement que comme une volonté politique, exercée sur l'Église, de s'opposer ou du moins de résister à Rome, à une époque où le christianisme britannique, en cela héritier du druidisme, est un phénomène essentiellement aristocratique et militaire, c'est-à-dire l'expression du gouvernement, en l'occurrence celui du supposé Conan Meriadec. Cette opposition se traduit par une ultime révolte des Bagaudes en 435 puis par le mandat donné en 445 aux Alains, installés dans l'Orléanais sous le commandement de Goar, par le patrice Aetius, régent pendant la minorité de Valentinien III, d'écraser les Bagaudes armoricaines.
L'avènement en 450 du règne, des deux côtés de la Manche[30], d'Ambroise Aurélien, qui serait le fils puiné de Constantin III[31], donc originaire du Lleyn par sa grand-mère, la pieuse impératrice Hélène, semble marqué un renversement d'alliances, peut être consécutif aux démarches de Saint Germain d'Auxerre, puisqu'en 451, les armoricains envoient des troupes pour soutenir Aetius dans la bataille des Champs Catalauniques et qu'en 468, le chef breton Riothamus soutient, avec douze mil hommes, l'empereur Anthémius dans sa campagne contre les Wisigoths.
Si ce renversement de parti en Bretagne insulaire en faveur des fils de Constantin III contre le beau fils[32] de Maxime allié à Conan Meriadec, Vortigern, correspond bien à un rejet du pélagianisme, la mission d'un parent d'Ambroise Aurélien[33], Paul Aurélien, fils de Porphyre Aurélien et précisément formé par le disciple de Saint Germain, Iltud, prend tout son sens. Il débarque, raconte sa légende[34], mandaté par le diocèse de Guicastel, aujourd'hui Winchester, en 517 avec ses gens, douze disciples et douze neveux ou cousins, soit une petite colonie de cent à deux cent personnes, à Porz Ejein sur l'île d'Ouessant.
Haut Moyen Âge
- 530, annexion de la partie de la cité osisme qui forme le Léon, par Deroch, fils de Riwal (515-520), roi de Domnonée de 520 à 535.
- 550, règne sur les deux rives de la Manche de Conomor. C'est vers cette époque que Procope de Césarée désigne[35] pour la première fois l'Armorique sous le nom de Bretagne, "Britannia". Le règne légendaire de Tristan sur le Léon, règne légendaire mais résonnant sur un fond historique, daterait aussi de cette période, puisque la stèle funéraire du héros le donne pour beau fils de Conomor[36].
- 560, bataille du Relec en Plounéour-Ménez par laquelle ses sujets révoltés après sa défaite contre Clotaire Ier tuent Conober, roi de Bretagne.
Au IXe siècle, l'église de Saint-Paul, en l'île de Batz est reconstruite. C'est alors l'église principale de la région.
En 848, dans les frontières du Léon est érigé un diocèse épiscopale confié à Libéralis. Quelques années plus tard, l'île de Batz étant occupée par des envahisseurs normands, l'évèque Marbo, transfert les reliques de Saint Pol à l'abbaye de Fleury[37].
Bas Moyen Age: de la société féodale à un état épiscopal
Hervé Ier de Léon, vicomte de Léon, fonde le prieuré de Saint-Martin de Morlaix, il suit son père en Terre Sainte en 1096. Avec d'autres seigneurs bretons, ils ont l'honneur d'entrer les premiers à Jérusalem, lorsque Baudouin en fait la conquête[38].
En 1163, son petit-fils, Hervé II de Léon, seul membre de sa maison à s'intituler "comte", et son fils Guyomarch IV de Léon sont faits prisonniers par le vicomte du Faou et libérés par une expédition montée par le frère de Guyomarch de Léon, l'évêque du Léon Hamon, et appuyée par le roi de Bretagne Conan le Petit.
Le 28 janvier 1172, Guyomarch, précédemment défait, grâce à l'aide de Conan, dans sa tentative de le chasser, fait assassiné son frère Hamon à la fin de l'homélie sur le parvis de la cathédrale. L'année suivante, il fonde en expiation l'abbaye de Daoulas. Cet épisode illustre un conflit général en Bretagne à cette époque entre pouvoir séculier et pouvoir religieux.
En 1179, Geoffroi Plantagénêt confisque la vicomté. Les fils de Guyomarch ne se virent restituer qu'une partie, le duc s'arrogeant les meilleures paroisses. Le roi Jean le Roux, tranchant définitivement contre ses vassaux en faveur des évêques, entérine le dépeçage en transférant le titre de comte à l'évêque et en créant un titre inédit d'"évêque-comte". Les léonards échappaient ainsi précocement au régime féodal pour entrer dans un société organisée peu à peu autour d'institutions religieuses : chapelles, pardons, fêtes fériées, hôpitaux, ossuaires, canonicats anoblisants ou prébendés, chapellenies et confréries, abbayes, couvents de femmes, monastères urbains, écoles presbytérales... Au XIIIe siècle, le diocèse s'organise en trois archidiaconés, un à Brest pour le pays d'Ach, un à Lesneven pour le Quéméné d'Illy, un à Saint-Pol pour le Léon, ce qui était une façon d'ajouter une structure ecclésiastique irrévocable sauf à obtenir l'accord du Pape.
Vers 1250, Mgr Derrien, d'après la tradition, inaugure la construction de la cathédrale actuelle. Après avoir récupéré, grâce à une enquête ordonnée par le pape Jean XXII, la part confisquée par le duc Jean des modestes six cent livres tournois qui constituaient le revenu de l'évêché, Msg. Guillaume de Kersauson, son successeur de 1292 à 1327, continue les travaux mais c'est à Msg. Pierre Benoît, doyen de Châteaubriand, qu'il reviendra de la consacrer en 1334. Entretemps Guillaume de Kersauson, en 1296, fait libérer par la Curie romaine le diocèse, qui bénéficiait déjà de la loi de l'alternative[note 4], de la contrainte imposée par le métropolite de Tours d'un coadjuteur.
En 1325, Even de Kerobert, archidiacre de Léon, fonde à Paris, en un emplacement occupé aujourd'hui par le collège de France, le collège de Léon, voisin du collège de Tréguier, pour accueillir les futurs clercs les plus prometteurs du diocèse, lesquels avaient auparavant quelques places réservées au Collège du Plessis (annexé ultérieurement par le collège de Clermont qui est devenu le lycée Louis-le-Grand).
Les routiers de la guerre de Cent Ans incendient en 1371 le couvent des dominicains à Morlaix et détruisent l'année suivante l'hôpital Saint-Julien à Landerneau. Cette année-là, en 1372, Alain VIII de Rohan hérite au décès de sa mère, Jeanne de Léon fille de Hervé VIII de Léon (à ne pas confondre avec son homonyme), du vicomté de Léon. Le Léon entre dans une stratégie familiale européenne. En 1375, Saint-Pol-de-Léon est prise par les anglais, la population massacrée et le Kreisker brûlé. Les déprédations continuent jusqu'en 1376 à l'abbaye du Relecq et au couvent des Carmes de Saint-Pol-de-Léon.
Au cours des années 1420, le seigneur-évêque Philippe de Coëquis instaure grâce à une donation d'Alain de Rohan le pardon marial à la chapelle de Notre-Dame du Folgoët, construite en 1409. Ce pardon finit par détrôner le culte plus ancien de Notre Dame de Pont Christ en Plounévez. Ce pardon est resté longtemps un moment majeur de la vie léonaise. Le Léon est alors une terre à blé et à lin. Les foires à bétails et à chevaux très prisés par l'armée y font des fortunes.
Le 5 juillet 1455, Guillaume Ferron, brillantissime évèque du Léon de 1439 à 1472, fonde, dans la capitale, une psalette, qui deviendra très vite, grâce au zèle de l'archidiacre de Quéménédilly Alain de Penmarc'h, une école de musique et de grammaire obligatoire pour les futurs clercs sacrés et ouverte à tous les enfants, qui y étaient logés, nourris, peignés et blanchis mais séparés définitivement, ne serait ce que par leurs soutanes rouges et leurs bonnets carrés, des autres enfants. Leur voie angélique répondait au chœur des chanoines au cours des antiennes apprises « par chœur ».
Temps modernes: le diocèse pilote de la Contre Réforme
C'est de la capitale du Léon, par l'entremise de son sénéchal, député, au titre des quarante trois "bonnes villes de Bretagne", aux États de Bretagne dont il obtint en 1577 le soutien pour envoyer une délégation au roi de France, que partit la protestation contre la levée par celui ci d'impôts directs.
En 1585, Mgr Roland de Neufville charge le précepteur prébendé Jean Prigent de fonder à la chapelle de Bonne Nouvelle, Kelou Mad en breton, au lieu dit Prat Cuic, l'École du Léon.
En 1590, alors que le Duc de Mercoeur est sur le point d'ôter au roi « hérétique » Henri IV la souveraineté de la Bretagne, la Ligue, menée par les seigneurs du Rusquec, de Crémeur et de Kerven, appuyée par la foule des paysans, fait tiré avec un canon, après jours plusieurs de siège, sur le château de Kerouzéré que Pierre de Boiséon, chef du parti royal, avait transformé en forteresse. Ayant obtenu une capitulation, les assiégeants, très inférieurs en nombre, s'enfuirent avant l'arrivée du régiment des Royaux. En 1592, les protestants, probablement ménés par La Fontenelle, pillèrent Saint-Pol et ravagèrent pendant cinq ans le pays, qu'une épidémie décima. La chapelle de Saint Roch et Saint Sébastien fut érigé à Roscoff en 1598 pour ensevelir les victimes de la contagion et célébrer, comme un martyre, la paix établie par l'édit de Nantes.
En 1630, alors que la question de l'éducation avait été au cœur des guerres de religion, Mgr René de Rieux, qui avait succédé à Mgr Roland de Neufville en 1619, par une constitution synodale dans l'esprit de la Contre-Réforme, pérennise un programme voué à "la science et la piété" de formation à l'excellence des clercs en s'appuyant sur les congrégations, en particulier des carmes, installés depuis 1353 à Saint-Pol, des capucins arrivés en 1621, des minimes, en 1622, des ursulines en 1629. Pour palier aux difficultés de fonctionnement et d'organisation de l'École du Léon consécutives aux guerres de religion, il confie un séminaire au sein du prieuré de Notre-Dame du Creisker au recteur de Lannilis, Alain Madec, et aux prêtres François Méar et Jean Brochec. Dans l'esprit de ne pas nuire au travail par la religion, ni à celle ci par l'amour des vacances, il réduit à quarante quatre par année le nombre de fêtes chômées. Le Léon, voué à la Vierge, est alors une sorte de république monastique, dirigée par la curie diocésaine pour ce qui n'est pas du ressort de la cour séculière de première instance de Lesneven, des municipalités ou de l'Amirauté, à laquelle tous les foyers participent au moins par un cousin et qui compte mil deux cents prêtres pour moins de cent paroisses ou trèves[39]. Les confréries et leurs abbés laïques régentent les corporations, des tailleurs, des mariniers, des forgerons, des cordonniers, des laboureurs...
Son remplacement provisoire de 1640 à 1648, obtenu de la Curie romaine à la suite de manœuvres de Richelieu qui n'avait pas supporté son soutien à la Reine mère, par un homme de ce dernier, Mgr Robert Cupif, vit éclore les manifestations d'exaltation populaire autour des prédications de Michel Le Nobletz, des stigmates de la voyante Marie-Amice Picard, et des missions du père Maunoir et du père Eudes, qui furent encouragées jusqu'après 1652 par Mgr Henri de Laval de Boisdauphin.
Entre 1671 et 1701, Mgr Pierre Le Nebous de la Brosse, œuvra à la scolarisation des filles en appelant les congrégations des Dames de la Retraite à Saint Pol et des Filles du Sacré-Cœur à Brest. En octobre et novembre 1673, la mission organisée pour le père Maunoir par monsieur de Trémaria prêche l'oraison du cœur à dix mille communiants venus de toute la Bretagne. En 1681 le collège du Léon de Kelou Mad est transféré dans de nouveaux locaux construits autour du Creisker dotés d'une librairie et d'une imprimerie. En 1738, Mgr Jean Louis de La Bourdonnaye fonde l'association des Dames de la Charité à laquelle participent toutes les quarante dames de la haute noblesse en tant qu'assistantes d'un chirurgien.
À partir de 1772, Mgr Jean-François de La Marche introduit, avec l'aide des recteurs et des exonérations fiscales, la culture maraichère. C'est ce colbertisme engagé qui est à l'origine de la situation agricole actuelle du Léon, principale zone primeure de France. "L'évêque des patates"[40] finance en outre avec soixante dix mille livres de sa fortune personnelle et le fruit de quêtes un petit séminaire.
En 1790, à Landerneau, et donc au Léon, est préféré Quimper pour être le chef-lieu du nouveau département du Finistère. Le 3 novembre, à la suite du décès de l'évêque de Cornouaille et de l'exil à Londres de Mgr de La Marche d'où il organisait l'émigration, l'élection du nouvel évêque, Louis-Alexandre Expilly de La Poipe, recteur de Saint-Martin-des-Champs et député du Léon, se fait, selon la constitution civile du clergé élaborée par une commission présidée à l'Assemblée nationale par le même, par département : l'évêché de Léon fusionne avec celui de Quimper.
Chronologie
- Acte d'indépendance "Communes Petitiones Britonum" en 1235.
- Les princes de Rohan.
- Guerre d'indépendance bretonne (1465-1532)
- La Cordelière.
- Exil de Marie Stuart.
- La bataille de Kergiduff.
- Les Johnnies.
- Le Bleun Brug.
- L'affaire Seznec.
- Le bombardement de Brest.
Capitales
La capitale religieuse du Léon est Saint-Pol-de-Léon, célèbre pour sa cathédrale et le clocher de la chapelle du Kreisker (centre-ville en breton parce qu'elle servait de salle de conseil municipal). Aujourd'hui, l'influence de cette ville a diminué, elle n'est plus qu'un chef-lieu de canton de 7 000 habitants mais son importance historique et religieuse fait que les Léonards la considèrent comme la réelle capitale du Finistère-Nord, aux dépens de Brest.
La résidence du prince de Léon à l'époque ducale, le duc de Rohan, était Landerneau, même s'il entretenait un hôtel à Saint-Pol. La capitale administrative et judiciaire du Léon à l'époque ducale comme sous l’Ancien Régime était Lesneven, chef-lieu de baillie et châtellenie ducale.
En dehors de Brest, Le Conquet, Landerneau et Morlaix en étaient les ports les plus actifs. Le Conquet eut son heure de gloire au XVIe siècle avec une école de cartographie. La position de port de fond d'estuaire de Landerneau et Morlaix leur assura une longue prospérité basée sur l'exportation des créés du Léon.
Culture
Identité locale
Il existe une rivalité ancestrale et toujours vive entre les Léonards (Leonad, Leoniz en breton) et leurs voisins du Trégor et de la Cornouaille : « un Léonard n'est pas un Cornouaillais, lequel ne se confond pas avec un Trégorrois, même si tous trois sont finistériens »[41]. Le Léonard est réputé très religieux, conservateur et doué d'un bon esprit d'entreprise, ce qui n'est pas le cas de ses voisins réputés plus laxistes et bons vivants. À l'époque moderne, sur le plan politique, le Léonard était réputé voter traditionnellement à droite, tandis que les Trégorrois et les Cornouaillais étaient plutôt attirés par la gauche[42].
Ces rivalités tendent à disparaitre avec les nouvelles générations, même si, historiquement, elles font souvent l'objet des boutades qui font partie de la culture bretonne locale.[réf. nécessaire] Elles restent toutefois profondes parce qu'ancrées dans la géographie. Les terres léonardes sont des terres agricoles riches, dont les riches laboureurs étaient qualifiés de Julots, expression d'admiration tout autant que d'ironie, alors que Cornouaille et Trégor se sont orientés vers la pêche.
Les léonards, entre eux, aiment à se distinguer. C'est ainsi que les habitants du Haut Léon, proches de l'évêché, regardent comme des païens les habitants du Bas Léon qu'ils qualifient de pays pagan. À leur tour bon nombre des habitants du pays pagan, jusqu'à nos jours, tire gloire de ce qualificatif. Heredia a célébré ces fiertés de clochers[43]. De là est né un esprit d'humour à demi mots mais féroce et parfois surréaliste, très vivant autrefois, moins aujourd'hui, visant à surmonter la timidité inculquée par la crainte de Dieu.
Cet orgueil austère se traduisait autrefois dans le costume masculin de couleur noir [44]. Un habitant de Plougastel, dans la Cornouaille voisine, dont la guise était certainement une des plus belles et des plus colorées de Bretagne, était sûr, au cours de ses visites à Landerneau, de recevoir une réflexion désagréable, peut être sur sa virilité. Un léonard ne conduisait son charriot à chevaux que debout. Le comble de la fierté était la boucle en or massif sur le chapeau[45].
La coiffe portée par les femmes du Minihi, appelée chikolodenn, était un bonnet de mousseline garni de deux larges barbes qui pouvaient soit pendre nonchalamment sur le devant des épaules soit être élégamment ramenées sur le bonnet. En pays pagan, les femmes portaient la cornette évoquant les hénins d'autrefois, avec un châle richement brodé et un tablier coloré. Du côté de Landvisiau et des monts d'Arrée, on portait la modeste tintaman, presque réduite à un bonnet de chignon en dentelle, alors que plus bas dans la vallée de l'Elorn, la coiffe en bonnet perdait sa modestie et gagnait de longues barbes formant un nœud dans le dos, tandis que le costume s'embourgeoisait d'un châle uni. À Ouessant, les femmes, comme à Sein, portaient le noir jusque sur la coiffe, garnie d'un grand nœud haut placé.
Tradition religieuse
La Bretagne a une tradition religieuse qui remonte au néolithique mais le Léon a spécifiquement une très ancienne tradition mystique qui remonte à la création de l'évêché au VIe siècle par Paul Aurélien et s'est développée à partir de la confiscation des biens du vicomte de Léon Guiomarch par Geoffroi Plantagenêt en 1179. En effet, dès lors, le Léon est devenu un territoire gouverné de fait par « l'évêque-comte », titre officialisé au XIIIe siècle par le duc Jean le Roux. Le pouvoir des évêques-comtes, nommés par le pape, s'autonomisait en se prévalant de Rome, instance judiciaire de dernier recours[46]. Cette abolition précoce du régime féodal, en libérant bien avant la Révolution les paysans de la condition de sujets d'un seigneur, a instauré un régime où l'autorité locale est détenue par le recteur seul. Elle est à l'origine d'une solidarité spontanée toujours vivante et d'une exigence morale très pesante qui laissait souvent les individus les plus fragiles s'effondrer quand ils étaient extraits de leur contexte, lors d'une émigration vers la ville par exemple.[non neutre]
Le pays a fourni les bataillons du clergé catholique pendant plusieurs centaines d'années, et la puissance de ce clergé a fait parler de théocratie. Ce clergé était formé dans les institutions locales mises en place par la Contre-Réforme, et les disciples étaient envoyés évangéliser la Basse Bretagne. Au fur et à mesure du développement du colonialisme français ces institutions ont alimenté dans des proportions impressionnantes les missions de l'Indochine et de l'Afrique en moines, prêtres ou évêques.[non neutre]
La danse, malgré l'interdiction légendaire de Saint Goulven, n'était pourtant pas totalement proscrite. Cependant, on avait conservé en Léon ("dans Leon") ainsi qu'en Trégor des danses où les hommes et les femmes dansaient face à face en rang, afin de préserver les règles de la décence, ce qu'on n'a pas observé ailleurs en Bretagne[47]. Danser le jabadao, danse étrangère venue de la montagne sauvage, en revanche exposait à l'excommunication.
Légendes
Le Léon est la patrie de Tristan de Loonois et du légendaire comte Gwithur (ou Withur, Wizur).
Les légendes tournent principalement autour de Paul Aurélien (ou Pol Aurélien selon l'orthographe bretonne), l'histoire de sa cloche Hirglaz ramenée de la mer par un poisson, celle du monstre écailleux qui terrorisait la région, celle du héros Nuz (cf. Nuada) dont on visite le château en ruine à Kergounadeac'h.
D'autres légendes tournent autour des naufrageurs du pays Pagan ou de la vierge, ou sorcière, on ne sait trop, Gwarc'h, qui a donné son nom à l'aber, à une île et son phare, ou encore d'Azenor, la vertueuse fille de comte Elorn, ou le chevalier rançonneur Morvan, qui a laissé son nom à La Roche Maurice, et bien sûr l'Ankou et les "Anaons".
Langue bretonne
Le léonard est une variante de la langue bretonne (le L de KLT). Il se distingue du breton du reste de la péninsule par la prononciation des syllabes finales des mots (ez prononcé « é » en Cornouaille, Trégor et vannetais et « èze » en Léon), qui n'ont plus qu'une orthographe étymologique ailleurs. Le léonard plus encore que le trégorrois ferme extrêmement les "e" et les "o" parfois au point de faire entendre un "i" ou un "ou" comme en gallois (v.g. le poing se dit en cornouaillais "dorn", en léonard "dourn", en gallois "dwrn"). Ainsi on trouve des villages en "plou" en Léon et Trégor, en "plo" en Bretagne méridionale. De même le léonard substitue parfois à la diphtongue "ae" un "ea" (v.g. "meaz" pour "maes", "champ", issu de "magos"). Les variations locales étaient autrefois importantes. C'est le dialecte le moins contaminé par les francismes, pour des raisons géographiques tout simplement[48]. Selon le parti pris du linguiste, celui ci qualifie le léonard de dialecte de référence, "plus pur", ou bien de dialecte conservateur. Cette querelle, sur fond politique voire religieux, s'est traduit par l'abandon pour le breton d'une orthographe puriste léonarde prônée entre les deux guerres par le Bleun Brug pour l'orthographe universitaire syncrétique élaborée après guerre, actuellement la plus diffusée, dite KLT.
Auteurs léonards
- XVIIe siècle
- Michel Le Nobletz, auteur de cantiques
- Albert Le Grand
- XIXe siècle
- XXe siècle
- Xavier Grall
- Gwenc'hlan Le Scouëzec
- Louis Priser
- XXIe siècle
Le Léon de nos jours
Économie
Composé de 112 communes (sur la base des communes actuelles), le Léon comptait (au dernier recensement de 1999) 405 082 habitants pour une superficie totale de 2 019 km².
Le Léon est surtout connu pour son activité agricole. La région entourant Saint Pol-de-Léon est appelée la Ceinture Dorée, zone de terres sablonneuses, une sorte de loess glaciaire pouvant atteindre jusqu'à huit mètres de profondeur[49], à la productivité agricole record, équivalente ou supérieure à celles qu'on trouve aux Pays-Bas. C'est là que se trouve une bonne partie de la production maraichère française connue principalement par les artichauts (no 1 en France), les choux-fleurs, les tomates ou les oignons roses AOC de Roscoff. C'est là qu'ont été autrefois inventées les techniques d'amendement par le goémon. C'est là aussi qu'ont été inventées les techniques de maraichage modernes où le tracteur remplace le cheval. C'est là aussi que les coopératives avec vente au cadran ont été initiées sous l'impulsion du syndicaliste Alexis Gourvennec. La fortune agricole du Léon tient tant au soin de la terre qu'au dynamisme commercial, en particulier à l'export.
La pêche, l'aquaculture et l'industrie agro-alimentaire, liée à celles ci aussi bien qu'à la production agricole, sont aussi bien développées. Au milieu de l'(aber Wrac'h sont élevées les huitres de Prat ar Coum. La baie de Morlaix sert de naissain aux belons. On trouve aussi des viviers à Roscoff. Les principaux ports de pêche sont Le Conquet (Konk Leon), Portsall et Moguieriec, port spécialisé dans la pêche au homard, rentable à l'extrême.
Le Léon a subi plusieurs marées noires, dont celle de l'Amoco Cadiz. Marées noires et dégazages ont amené la préfecture maritime à mettre en place le rail d'Ouessant, géré par le Cross Corsen à partir de Brest.
Tourisme
Le Léon est une région touristique structurée en quatre pôles. Le circuit des enclos paroissiaux présente des chefs d'œuvres d'un art naïf du XVIe siècle. À Brest, Océanopolis, les fêtes de vieux gréements ou de courses transatlantiques sont les principales attractions touristiques. La région des abers est un espace de randonnée. Le port de Roscoff et les communes alentour accueillent les yachtmen, pas seulement britanniques, lassés de Saint-Malo mais également, depuis que la thalassothérapie y a été inventé, les familles de grands malades (Centre héliomarin) aussi bien que celles des citadins avides de l'air le plus revigorant d'Europe. En effet le vent s'y lave dans des eaux qui bénéficient de la plus grande richesse en algues de la côte atlantique.
Infrastructures
Le Léon est traversé d'est en ouest par la route express qui tient lieu d'autoroute. L'aéroport de Guipavas, à l'est de Brest, est un petit aéroport à vocation régionale, desservi par la filiale bretonne d'Air France Brit Air, dont le siège et le centre de formation et de maintenance, se trouvent à Morlaix. Le TGV s'arrête à Morlaix et à Brest. Ce dernier port reste un centre de trafic marchand important, un centre de recherche océanographique majeur, le CNEXO devenu Ifremer, et bien sûr le cœur de la Royale. Roscoff s'est doté d'un port en eau profonde qui lui permet, via les Brittany Ferries fondés par Alexis Gourvennec, d'assurer des liaisons de passagers et de voitures régulières avec Cork et Plymouth.
Annexes
Notes
- ↑ On dit d'ailleurs en breton : « War pont Landerne e vezer ar penn e Leon hag ar revr e Kerne », c’est-à-dire : « Sur le pont de Landerneau, on a la tête en Léon et le cul en Cornouaille ».[réf. nécessaire]
- ↑ Cf. la note rédigée par l'inventeur sur le site en ligne de la commune de Plozevet "Fouilles à Plouhinec" si celui-ci est toujours maintenu.
- ↑ En même temps que Stonehenge devient le centre de cette civilisation, elle se diffuse dans presque tout le Midi, principalement dans le bassin du Lot.
- ↑ La loi de l'alternative propre aux évêchés bretons règle un partage des revenus, et des nominations, des cures directement entre le Saint Siège et le diocèse, la collation de huit mois sur douze, puis à partir du XVe siècle d'un mois sur deux revenant directement à celui là.
Références
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- ↑ Tristan
- ↑ Fond français 22329, B.N.
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- Waquet, H. et Saint Jouan, R. de, Histoire de la Bretagne, PUF, "Que sais je" no 147, 1975.
Articles connexes
- Diocèse de Léon
- Liste des évêques de Léon (jusqu'à 1802)
- Liste des évêques de Quimper et de Léon (depuis 1802)
Lien externe
- Portail de la Bretagne
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