Gallois

Gallois
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Gallois
Cymraeg
Parlée au Drapeau : Royaume-Uni Royaume-Uni
Drapeau d'Argentine Argentine
Région Pays de Galles, Angleterre
Chubut
Nombre de locuteurs plus de 791 000
Typologie flexionnelle, VSO
Classification par famille
Statut officiel
Langue officielle du Drapeau du Pays de Galles Pays de Galles
Codes de langue
ISO 639-1 cy
ISO 639-2 wel, cym
ISO 639-3 cym
IETF cy
Échantillon
Article premier de la Déclaration des Droits de l'Homme (voir le texte en français)

Erthygl 1

Genir pawb yn rhydd ac yn gydradd â'i gilydd mewn urddas a hawliau. Fe'u cynysgaeddir â rheswm a chydwybod, a dylai pawb ymddwyn y naill at y llall mewn ysbryd cymodlon.

Le gallois est une langue du groupe celtique insulaire de la famille des langues indo-européennes, proche du cornique et du breton, avec lesquels il forme la branche dite brittonique des langues celtiques. Parlé principalement au Pays de Galles, mais aussi en Angleterre et en Argentine, le gallois est la langue celtique qui compte aujourd'hui le plus grand nombre de locuteurs. La langue emploie pour se désigner elle-même le terme de Cymraeg, d'où son ancienne dénomination alternative kymrique ou cymrique en français, dont l'origine serait le terme celtique combroges ou cumbrogi signifiant compatriotes (voir aussi Cambrie). Ne pas confondre avec Kimris aussi utilisé pour la dénomination des Cimbres et des Cimmériens. Un galloisant est celui qui parle le gallois.

Sommaire

Histoire

Article détaillé : Vieux gallois.

Classification et variétés

Le gallois forme avec le breton et le cornique la branche brittonique des langues celtiques, qui comprennent aussi les langues gaéliques (irlandais, écossais et mannois) ainsi que les langues celtiques continentales aujourd'hui éteintes. Au sein des langues brittoniques, le breton et le cornique sont plus proches entre eux que chacun ne l'est du gallois. Le groupe comportait jadis un quatrième membre, le cambrien, éteint au Moyen Âge et qui n'est connu que par quelques gloses.

Le gallois comporte diverses variétés, mais ses dialectes sont moins différenciés que ceux du breton. La division la plus importante sépare le gallois du nord de celui du sud, sur la base de quelques faits de prononciation, de différences lexicales et de tournures spécifiques.

Il existe par ailleurs une forte distinction de registre de langue entre le gallois courant (Cymraeg llafar) et le gallois littéraire (Cymraeg llenyddol) - les deux existant conjointement à l'écrit. Par rapport aux états anciens de la langue, ce dernier est beaucoup plus conservateur par sa syntaxe et sa morphologie nettement synthétique, alors que le gallois courant s'est développé dans un sens plus analytique. Le vocabulaire est également différent, le gallois littéraire préservant de nombreux mots sortis de l'usage actuel tandis que le gallois courant comporte de nombreux emprunts à l'anglais (plus ou moins bien acceptés). Aujourd'hui, en dehors de contextes artistiques, le gallois écrit se base pour l'essentiel sur la langue courante.

Situation actuelle de la langue

Pourcentage de galloisants par comté au Pays de Galles.

Répartition géographique

Le gallois est en usage en Grande-Bretagne, en grande majorité au pays de Galles mais également en Angleterre. Au Pays de Galles, il est pratiqué par environ 611 000 personnes, soit plus de 22% de la population ; dans certaines régions, principalement au Nord et l'Ouest, plus de 60% de la population parle le gallois. Il existe environ 150 000 gallophones en Angleterre, tant en raison de flux migratoires en direction des centres industriels anglais que du fait de l'existence de communautés locutrices indigènes, parfois longtemps majoritaires tel qu'à Oswestry, cité limitrophe de la Principauté (où l'hebdomadaire Y Cymro - le Gallois - fut longtemps publié).

Il existe également une petite communauté de langue galloise en Argentine, héritage d'un établissement gallois au XIXe siècle dans la vallée du Río Chubut, en particulier à Trelew et Puerto Madryn en Patagonie.

Statut officiel

Depuis le Deddf Iaith Gymraeg (loi sur la langue galloise) en 1993, la place du gallois s’est accrue dans les institutions : les administrations sont tenues de pouvoir offrir leurs services dans les deux langues.

La signalisation routière bilingue est normalisée au pays de Galles, et le gallois est reconnu en tant que langue régionale selon la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

Enseignement

Dans l’enseignement, le gallois possède une place remarquable, puisque 20% environ des enfants du Pays de Galles sont scolarisés en gallois langue première et que l’étude en est obligatoire jusqu’à seize ans pour tous les écoliers. Conséquence logique, c’est dans les classes d’âge les plus jeunes que l’on trouve le plus de galloisants.

Littérature

Article détaillé : Littérature celtique galloise.

C’est la poésie galloise qui reste au plus près du cœur des gallois et ce depuis le Moyen Âge. Lors de l’Eisteddfod nationale (Eisteddfod Genedlaethol Cymru), grand concours annuel, festival de la langue et vitrine de la culture galloise, c’est au poète gagnant le grand prix que le trône bardique est décerné. Les formes strictes de la poésie galloise exigent une allitération formelle au cœur des vers, principe appelé cynghanedd.

Une des contributions galloises les plus célèbres à la littérature occidentale est le Mabinogion (un mot clairement dérivé du gallois mab, « fils »), une collection de contes relatifs à la mythologie celtique.

Médias

Il existe une radio nationale en gallois : Radio Cymru, qui émet en FM et sur Internet. Il y a aussi de nombreuses chaînes régionales.

Il existe aussi une télévision en gallois : Sianel Pedwar Cymru (chaîne quatre Pays de Galles en traduction, S4C de logogramme). Son émission la plus populaire est un feuilleton-fleuve qui dure depuis plus de 20 ans : Pobol y Cwm (Les gens de la vallée).

On peut regretter que l’image du gallois dans les médias soit un peu trop associée à la campagne et au passé alors que désormais, et sans doute de plus en plus, le galloisant est et sera un jeune urbain.

Écriture et prononciation

Accent tonique

Le gallois est une langue à accent tonique, lequel frappe habituellement l'avant-dernière syllabe des polysyllabes et l'unique syllabe des monosyllabes lexicaux. Toutefois, il existe un certain nombre de mots polysyllabiques accentués sur la dernière syllabe - parmi lesquels le nom même de la langue, Cymraeg. Le gallois familier a tendance à éliminer les voyelles initiales inaccentuées dans la prononciation (aphérèse)[1] : des mots comme afalau « pommes », esgidiau « chaussures », yfory « demain » se prononcent alors ['vɑːlɛ], ['skɪʤɛ], ['voːrɪ][2].

Consonnes

Le gallois possède les consonnes suivantes, transcrites dans l'alphabet phonétique international ; les graphèmes correspondants de l'alphabet gallois suivent en gras.

  Labiale Dentale Alvéolaire Post-alvéolaire Palatale Vélaire Glottale
bilabiale labio-dentale labio-vélaire centrale latérale
Occlusive p p b b       t t d d       k c g g  
Nasale mh m m       nh n n       ŋ̊ ngh ŋ ng  
Affriquée             (ʧ) tsi, tsh, ts (ʤ) j      
Fricative   f f, ph v f   θ th ð dd s s ɬ ll ʃ si, sh, s   x ch h h
Roulée         rh r r          
Spirante     w w     l l   j i    

Remarques :

  • Les occlusives et nasales sourdes sont réalisées aspirées, et les occlusives sonores tendent à s'assourdir en fin de mot et après s dans les combinaisons sb et sg.
  • Les nasales sourdes apparaissent surtout comme résultats de la mutation par nasalisation des occlusives sourdes.
  • Le son [ʃ] apparaît normalement devant voyelle où il s'écrit si : ex. siarad [ʃɑːrad) « parler », siop [ʃɔp] « boutique » ; dans les autres positions, la transcription sh s'utilise pour les emprunts ou les usages dialectaux. En gallois du sud, s est chuinté en [ʃ] au contact de i : par exemple mis « mois » ou sir « comté » s'y prononcent [miːʃ] et [ʃiːr] (contre [miːs] et [siːr] au nord).
  • Les affriquées [ʧ] et [ʤ] se rencontrent dans les mots empruntés à l'anglais ; la transcription n'est pas tout à fait fixée, et certains usages y substituent le son [ʃ]. Dialectalement, ces affriquées existent aussi dans les mots indigènes comme développements des combinaisons [tj] et [dj] (écrites ti et di).
  • Dans les emprunts non assimilés, on peut rencontrer le son [z], auquel est souvent substitué [s].
  • La consonne fricative latérale alvéolaire sourde écrite ll est souvent décrite comme particulièrement typique de la langue galloise ; les anglophones en font souvent une approximation par thl ou fl dans les noms d'origine galloise comme Lloyd (de llwyd « gris, brun »), ainsi qu'en témoigne la variante Floyd.

Voyelles

Le gallois moderne possède six ou sept monophtongues de base, variables en quantité, ainsi que de nombreuses diphtongues. La quantité des monophtongues est en grande partie liée à l'environnement phonétique et l'accentuation, selon des règles assez complexes, mais il existe des oppositions de longueurs dans quelques positions, qui différencient certains mots (ex. car « voiture » / câr « ami, parent », ton « vague » / tôn « mélodie »). La quantité a une influence sur le timbre : les voyelles longues sont globalement prononcées plus fermées que les brèves. John Morris-Jones décrit au début du XXe siècle trois quantités (brève, mi-longue, longue), selon le système suivant[3] :

  • toutes les voyelles inaccentuées sont brèves.
  • en dernière syllabe, les voyelles sont longues quand elles sont accentuées et suivies des seules consonnes [b], [d], [g], [f], [s], [x], [v], [ð], ou d'aucune consonne. Suivies de [l], [r], [m], [n], elles peuvent être brèves ou longues. Suivies de [ɬ], elles sont longues au sud mais brèves au nord du Pays de Galles. Suivies d'une autre consonne ou d'un groupe de consonne, elles sont brèves.
  • en avant-dernière syllabe, les voyelles sont mi-longues quand elles sont accentuées et suivies des mêmes seules consonnes que les longues en syllabe finale - sauf [s] et [ɬ]. Autrement, elles sont brèves.

Des descriptions plus récentes n'indiquent que deux degrés de longueur : en simplifiant, les mi-longues décrites par Morris-Jones y correspondent à des longues au sud du Pays de Galles, mais à des brèves au nord ; la voyelle [ə] est généralement brève partout.[réf. nécessaire]. Le gallois du nord ne conserve donc de voyelles longues que dans les monosyllabes accentués ; il étend cette longueur aux monosyllabes terminés par un groupe de consonnes dont la première est [s] ou [ɬ][réf. nécessaire].

Les mots d'emprunt récents peuvent faire exception à ces règles.

Formants des voyelles galloises.
Tableau des monophtongues en gallois du nord
Monophtongues Antérieure Centrale Postérieure
Fermée iː i ɨː u, y uː w
Pré-fermée ɪ i ɨ u, y ʊ w
Mi-fermée eː e ə y oː o
Mi-ouverte ɛ e ɔ o
Ouverte a a   ɑː a
Tableau des diphtongues en gallois du nord
Diphtongues Second élément
Premier élément antérieur central postérieur
fermé   ʊɨ wy ɪu iw ɨu uw, yw
moyen əi ei ɔi oi əɨ eu, ey ɔɨ oe, ou ɛu ew əu yw
ouvert ai ai aɨ au ɑːɨ ae au aw

Le gallois du sud ignore les voyelles [ɨ] et [ɨː], et les réalise comme [ɪ] et [] respectivement. Cela vaut aussi lorsque ces voyelles forment un élément de diphtongue. Il confond également la réalisation des diphtongues ae et au en [ai] (le gallois du nord ne différencie ces diphtongues qu'en syllabe finale). D'autres réductions du système vocalique existent dialectalement.

Orthographe

Article détaillé : Alphabet gallois.

Bien que les conventions en soient parfois surprenantes pour un francophone, l'orthographe du gallois indique assez fidèlement la prononciation. Les principales divergences sont les suivantes :

  • le y a deux valeurs possibles, [ɨ] en syllabe finale (« clair ») et [ə] ailleurs (« sombre »)[4]
  • u a aujourd'hui la même valeur que le « y clair ». Il existait cependant une différence en gallois médiéval : u se prononçait alors [ʉ][5], timbre plus proche du u français ou breton (mais articulé plus en arrière).
  • i et w notent à la fois des voyelles et des spirantes, ce qui peut créer des ambiguïtés, en particulier dans le groupe wy. A noter que w vaut souvent [w] dans les combinaisons initiales gwl-, gwn-, gwr- ; des mots comme gwlad « pays », gwneud « faire », gwraig « femme, épouse » sont monosyllabiques : ['gwlɑːd], ['gwnəɨd], ['gwraig].
  • dans les monosyllabes, un r ou un l final après consonne développe une voyelle d'appui dont le timbre fait écho à celui de la dernière voyelle du mot écrit : llyfr « livre » se prononce ['ɬɨvɨr], pobl « gens » se prononce ['pɔbɔl]. En style familier, cette voyelle peut s'écrire dans certains mots : pobl devient ainsi pobol. En revanche, dans les polysyllabes, r ou l dans ces positions tend à tomber : ffenestr « fenêtre » devient ['feːnɛst], perygl « danger » devient ['peːrɨg][6].
  • le -f final tombe souvent dans la prononciation courante : tref « ville » se prononce alors [treː]. Là aussi, le style familier peut noter ce changement dans l'orthographe et écrire tre.
  • la langue courante tend à réduire les diphtongues en syllabe finale inaccentuée, avec des résultats variables selon le dialecte. En particulier, la terminaison fréquente de pluriel -au devient [a] au Nord, [ɛ] au Sud.
  • quelques mots grammaticaux ont des prononciations irrégulières.

Grammaire

Article détaillé : Grammaire galloise.

La grammaire galloise partage de nombreux traits communs avec celle des autres langues celtiques insulaires :

Il existe quelques divergences grammaticales entre dialectes du Nord ou du Sud : des détails de morphologie et quelques constructions spécifiques, notamment celle pour « avoir ». Cependant, ces différences sont négligeables par rapport à celles beaucoup plus tranchées qui séparent le gallois courant du gallois littéraire :

Texte bilingue gallois / anglais sur une plaque commémorative.
  • le système des mutations consonantiques à l'initiale est plus strictement appliqué en gallois littéraire, plus fluide en gallois courant où certaines mutations disparaissent ou sont remplacées par la plus fréquente d'entre elles, la lénition
  • le système verbal est nettement différent : le gallois courant a simplifié la conjugaison, réduit le nombre de temps, et certains ont changé de valeur ; en parallèle, le rôle des temps périphrastiques s'est accru
  • le gallois littéraire possède un subjonctif que le gallois courant ne conserve que dans des expressions figées
  • le gallois courant a développé une périphrase spéciale d'interdiction, alors que le gallois littéraire se sert de la négation de l'impératif. Ex. : littéraire Na chysgwch! ~ courant Peidiwch â chysgy! / Peidiwch cysgu! « Ne dormez pas ! »
  • le gallois littéraire utilise des particules en début de phrase pour exprimer l'interrogation et la négation, que le gallois courant élide (tout en conservant les mutations consonantiques qu'elles déclenchent) ; en parallèle, le gallois courant a développé une nouvelle particule de négation placée après le verbe. Ex. : littéraire Ni chysgaf ~ courant Chysga / Gysga i ddim « je ne dormirai pas ».
  • le gallois littéraire n'emploie de pronoms personnels sujets que pour insister, tandis que le gallois courant les exprime généralement. Ex. : littéraire Cysgaf ~ courant Cysga i « Je dormirai »
  • de même, le gallois courant exprime les pronoms personnels sujets après une préposition conjuguée, ce que ne fait pas le gallois littéraire. Ex. : littéraire arnaf ~ courant arna i « sur moi »
  • le gallois courant ignore certaines formes pronominales archaïques de la langue littéraire.

Vocabulaire

Éléments du lexique

Le fonds du vocabulaire gallois est d'origine celtique, apparenté de près à celui des autres langues brittoniques, de façon plus distante à celui des langues gaéliques, ce qu'illustre le tableau ci-dessous qui présente une série de mots apparentés en gallois et breton[7] (brittoniques) ainsi qu'en irlandais (gaélique).

sens gallois breton irlandais sens gallois breton irlandais
tête pen penn ceann haut uchel uhel uasal « noble »
maison ti teach bas isel izel íseal
fils mab mab mac grand mawr meur mór
frère brawd breur bráthair petit bach, bychan bihan beag
sœur chwaer c'hoar siúr blanc gwyn gwenn fionn « blond »
homme, personne dyn den duine noir du du dubh
berger bugail bugel « enfant » buachaill « garçon » vivant byw bev beo
chien ci ki mort marw marv marbh
été haf hañv samhradh large llydan ledan leathan
hiver gaeaf goañv geimhreadh vieux hen hen « ancien » sean
feu tân tan tine jeune ieuanc, ifanc yaouank óg
fer haearn houarn iarann nouveau newydd nevez nua
feuille dalen delienn duille entendre clywed klevet cluin
mer môr mor muir nager nofio neuñviñ, neuiñ[8] snámh
rivière afon aven (obsolète) abhainn chanter canu kanañ, kaniñ can

Malgré la parenté évidente avec le breton, la séparation séculaire entre les deux langues a abouti à des divergences sensibles jusque dans le vocabulaire fondamental : par exemple, dans les parties du corps, les mots gallois trwyn, clust, llaw « nez, oreille, main » ne se retrouvent pas en breton qui emploie à la place fri, skouarn, dorn. Ce dernier mot illustre un autre type de divergence, les faux-amis, dus à des évolutions de sens différentes chez des mots apparentés  : le gallois connaît en effet le mot dwrn mais au sens de « poing, poignée ».

Le gallois partage avec les autres langues brittoniques un ensemble nombreux d'emprunts lexicaux anciens au latin. Cela concerne beaucoup de mots courants passés dans le vocabulaire à l'époque de la Bretagne romaine, par ex. mur « mur » (de mūrus), ffenestr « fenêtre » (fenestra), pont « pont » (pōns, génitif pontis), fynnon « fontaine, source » (fontāna), cannwyll « chandelle » (candēla), ffrwyth « fruit » (frūctus), ffa « haricot » (faba), pysgod « poissons » (piscātum), gwin « vin » (vīnum), caws « fromage » (cāseum), llaeth « lait » (lac, génitif lactis), carchar « prison » (carcer), saeth « flèche » (sagitta), perygl « danger » (periculum), parod « prêt » (parātus). D'autres sont d'un caractère plus livresque, à mettre en rapport avec le rôle considérable du latin dans l'enseignement au Moyen Âge : llyfr « livre » (liber), llythyr « lettre » (littera), gramadeg « grammaire » (grammatica), erthygl « article » (articulum), ysgrifennu « écrire » (scrībere), dysgu « apprendre » (discere). De même, le vocabulaire religieux est naturellement latin : eglwys « église » (ecclēsia), mynach « moine » (monachus), pregeth « sermon, prêche » (praedicātiō), pechod « péché » (peccātum), uffern « enfer » (infernus). Le sens de certains mots a pu nettement évoluer : ainsi mynwent, de monumenta « monuments », signifie « cimetière », et swydd, de sēdēs « siège », a aujourd'hui pour sens « poste, fonction, emploi ».

Plus tard, le gallois a emprunté divers mots aux langues des Îles Britanniques comme le vieil irlandais (cnocc → gallois cnwc « butte », dorus → gallois drws « porte »), le vieux norrois (garðr → gallois gardd « jardin, » jarl → gallois iarll « comte, earl »), mais avant tout l'anglais, dont l'influence est constante depuis la conquête anglo-saxonne de l’Angleterre, et auquel le gallois a emprunté et continue d' emprunter un nombre considérable de mots.

Panneau indicateur avec deux emprunts à l'anglais : lifft « ascenseur » et platfform « quai » et un calque : ffordd allan « sortie ».

Les plus anciens emprunts à l'anglais remontent dès les premiers temps de la présence anglo-saxonne, comme en témoignent certains mots qui préservent des formes caractéristiques du vieil anglais : ex. cusan « un baiser » (vieil anglais cyssan, moderne kiss), crefft « métier » (v. a. cræft, moderne craft), betws « chapelle » (v. a. bédhús). Les emprunts concernent tous les sujets et tous les registres ; beaucoup sont évidents, bien que l'écriture les masque quelque peu en leur appliquant systématiquement les conventions de l'orthographe galloise. Ils subissent cependant assez souvent des altérations en se lexicalisant, qui peuvent concerner leur prononciation (ex. cwpwrdd « placard », de cupboard ; siaced « veste », de jacket) ou leur sens (ex. tocyn « ticket », de token qui a le sens plus général de « marque » ; smwddio « repasser (un vêtement) », de smoothe qui veut dire « lisser »).

Dans la langue orale, les emprunts à l'anglais peuvent être faits au coup par coup, sans qu'ils soient lexicalisés : il s'agit d'une forme d'alternance de code linguistique. La langue écrite tend vers davantage de purisme et s'efforce d'éviter les anglicismes trop voyants par divers moyens :

  • des calques, qui consistent à reprendre une structure étrangère avec des éléments locaux : ex. rhan « part » + amser « temps » → rhan amser « temps partiel » (cf. l'anglais part-time) ; pêl « balle, ballon » + troed « pied » → peldroed « football » ; arch- « super- » + marchnad « marché » → archfarchnad « supermarché »
  • des néologismes : ex. cyfrifiadur « ordinateur », de cyfrif « compte » ; cymdeithaseg « sociologie », de cymdeithas « société » ; peiriannydd « ingénieur » de peiriant « machine »
  • en donnant simplement aux emprunts une forme galloise : ex. bywgraffiad « biographie », (d'après byw « vivant ») ; teledu « télévision » ; twristiaeth « tourisme » (avec le suffixe abstrait -aeth).

Formation des mots

Les procédés de formation des mots sont comparables à ceux du français et des autres langues européennes :

  • conversion : un mot change de nature sans changer de forme ; il s'agit surtout de substantivation d'adjectifs et de verbes (ex. drwg « mauvais » → y drwg « le mal », gwyrdd « vert » → y gwyrdd « la verdure », dechrau « commencer » → y dechrau « le début »)
  • dérivation par affixes : suffixes (ex. iach « sain, bien-portant » → iechyd « santé », dyn « homme » → dynol « humain », cwsg « sommeil » → cysgu « dormir ») ou préfixes (calon « cœur » → digalon « découragé », pwys « poids » → gwrthpwys « contrepoids », lladd « tuer » → ymladd « combattre »)
Exemple de locution avec nom et épithètes : man « lieu » + cadw « garder » + troliau « chariots » = « dépôt des chariots »
  • composition : les mots composés sont moyennement fréquents. Il est d'usage en grammaire galloise de distinguer composés propres, construits selon l'ordre déterminant + déterminé, généralement avec mutation consonantique à l'initiale du second élément (ex. dŵr « eau » + ci « chien » → dwrgi « loutre », llyfr « livre » + cell « cabinet » → llyfrgell « bibliothèque », uchel « haut » + gŵr « homme, mari » → uchelwr « noble, gentleman »), et composés impropres, dans l'ordre syntaxique habituel déterminé + déterminant et sans mutation, qui sont en fait de simples locutions condensées en un seul mot (ex. gŵr « homme, mari » + cath « chat » → gwrcath « matou », pen « tête, bout » + tir « terre, terrain » → pentir « promontoire »). Les composés impropres sont particulièrement représentés dans les noms de lieux : Aberystwyth « embouchure de l'Ystwyth », Cwmtwrch « combe du sanglier », Pentraeth « bout de la plage ».

Le gallois crée également de nombreuses locutions lexicales sur le modèle nom + épithète. Exemples : tŷ bach « toilettes » ( « maison » + bach « petit »), safle bws « arrêt de bus » (safle « position, station, poste » + bws « bus »), peiriant golchi llestri « lave-vaisselle » (peiriant « machine » + golchi « laver » + llestri [pl.] « plats, vaisselle »), cyllell boced « canif » (cyllell « couteau » + poced « poche »), ystafell gysgu « dortoir » (ystafell « salle, chambre » + cysgu « dormir »).

Variations dialectales

En dehors des différences de prononciation évoquées plus haut, il existe un certain nombre de différences lexicales dans le vocabulaire de base entre dialectes gallois. Le tableau ci-dessous donne quelques exemples de divergences typiques entre Nord et Sud.

Signification Gallois du Nord Gallois du Sud
grand-père taid tad-cu
grand-mère nain mam-gu
femme dynes benyw
lait llefrith llaeth
table bwrdd bord
dehors allan i maes
maintenant rŵan nawr
vouloir eisiau moyn
ressembler edrych yn debyg disgwyl yn debyg
il o, fo e, fe
avec gan, efo gyda
J'ai une voiture. Mae gen i gar. Mae car 'da fi.

Parfois, il s'agit plutôt de différences dans l'extension sémantique de certains mots : ainsi le gallois du Sud emploie merch pour « fille (par opposition à fils) » et « fille (par opposition à garçon) », tandis que le gallois du Nord a geneth dans ce dernier sens ; inversement, le gallois du Nord emploie agoriad « ouverture » au sens de « clé » alors que le gallois du Sud dispose pour cela du mot spécifique allwedd.

Exemples

Mot Traduction Prononciation standard dans l'API Équivalent breton[7]
terre daear, tir ['daiar] (S) / ['daɨar] (N), ['tiːr] douar
ciel awyr, wybr ['ɑːwɪr] (S) / ['awɨr] (N), ['ʊibɪr] (S) / ['ʊɨbɨr] (N) oabl
eau dŵr ['duːr] dour
feu tân ['tɑːn] tan
homme dyn, gŵr ['diːn] (S) / ['dɨːn] (N), ['guːr] den, gour
femme menyw, gwraig ['meːnɪu] (S) / ['mɛnɨu] (N), ['gwraig] maouez, gwreg
manger bwyta ['bʊita] (S) / ['bʊɨta] (N) debriñ
boire yfed ['əvɛd] evet, evañ
grand mawr ['maur] meur, bras
petit bach, bychan ['bɑːx], ['bəxan] bihan
nuit nos ['noːs] noz
jour dydd ['diːð] (S) / ['dɨːð] (N) deiz
  • Bore da → Bonjour (le matin)
  • Da boch chi (formelle), Hwyl (familière) → Au revoir
  • Os gwelwch yn dda → S’il vous plaît (litt. si vous le voyez bien)
  • Diolch → Merci
  • Iechyd da! → À votre santé !
  • Shwmae? → Ça va ?
  • Da iawn, diolch. → Très bien, merci.
  • Cymru → Pays de Galles

Annexes

Notes et références

  1. Ball & Fife 2002, p. 302
  2. Prononciation du sud ; le nord aurait plutôt ['vala], ['skɪʤa], ['vɔrɨ].
  3. Morris-Jones 1955, p. 65
  4. Quelques monosyllabes grammaticaux font exception et ont un y sombre : y(r) « le, la, les », dy « ton, ta », yn « en, dans ».
  5. Ball & Fife 2002, p. 295 & 297-8
  6. Morris-Jones 1955, p. 17-18
  7. a et b En orthographe unifiée (peurunvan).
  8. Variantes neuñvial, neuial.

Bibliographie

Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article : Ouvrage utilisé comme source pour la rédaction de cet article

  • (en) Martin J. Ball (éd.), James Fife (éd.), The Celtic Languages, London, New York, Routledge, coll. « Routledge Language Family Descriptions », 2002 (réimpr. 2005), broché, XI-682 p. (ISBN 0-415-28080-X), chap. 7 & 12 (« Welsh & The sociolinguistics of Welsh »), p. 289-348 & 536-605.
    Ouvrage de synthèse sur les langues celtiques dans leur ensemble. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
     
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    Grammaire détaillée basée sur la langue littéraire, avec des aperçus sur la langue courante. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
     
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    Histoire des langues brittoniques et phonétique historique du vieux et du moyen gallois. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
     
  • (en) John Morris-Jones, A Welsh grammar, historical and comparative. Phonology and accidence, Oxford, Clarendon press, 1955, XXVIII-478 p.
    Grammaire historique du gallois (phonologie et morphologie). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
     
  • Alain Rouveret, Syntaxe du gallois : principes généraux et typologie, Paris, CNRS éditions, coll. « Sciences du langage », 1994, broché, 460 p. (ISBN 2-271-05216-5).
    Approche typologique du gallois parmi les langues SVO, dans une optique générative.
     

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