- Vengeur du Peuple
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Le Marseillois
Maquette du Marseillois (Vengeur-du-Peuple) au Musée de la Marine de Marseille.Autres noms le Vengeur-du-Peuple Histoire A servi dans Marine royale française
Marine de la RépubliqueQuille posée février 1762 Lancement 16 juillet 1766 Caractéristiques techniques Type vaisseau de ligne Longueur 55 mètres Maître-bau 14 mètres Propulsion voile Caractéristiques militaires Armement 74 canons modifier Le Vengeur-du-Peuple ou Marseillois est un navire de guerre français en service de 1766 à 1794. C'est un vaisseau de ligne de troisième rang portant 74 canons sur deux ponts.
Il est connu pour avoir coulé sous la Révolution dans des circonstances que la propagande a glorifiées.
Sommaire
Marseillois
Après les défaites navales françaises de la Guerre de Sept Ans (batailles de Lagos & des Cardinaux), le secrétaire d'État à la Marine Choiseul proposa de faire financer la construction de nouveaux vaisseaux de guerre grâce à des dons volontaires, dans le cadre de ce qui fut appelé le don des vaisseaux. La Chambre de commerce de Marseille regroupa assez d'argent pour financer la construction d'un vaisseau portant le nom de sa ville : le Marseillois.
Article détaillé : don des vaisseaux.Construit à l'arsenal de Toulon, il s'agissait d'un vaisseau de 74 canons, faisant 55 mètres de long pour 14 de large. La quille est posée en février 1762 (début de la construction) et le vaisseau est lancé le 16 juillet 1766 (fin de la construction de la coque). Il portait :
- 28 canons de 36 livres dans sa première batterie ;
- 30 canons de 18 livres dans sa seconde batterie ;
- 16 canons de 8 livres sur les gaillards.
Poids total d'une bordée : 838 livres, soit 410 kg de boulets en fonte.
Guerre d'Amérique
La Guerre d'Amérique (1778-1783) a été préparée comme une vengeance française de la défaite contre la Royal Navy britannique lors de la Guerre de Sept Ans (1756-1763) : une escadre de douze vaisseaux est armée à Toulon sous les ordres du comte d'Estaing avant l'entrée en guerre du Royaume de France, avec pour principale mission d'attaquer les Britanniques « là où il pourrait leur nuire d’avantage et où il le jugerait le plus utile aux intérêts de Sa Majesté et à la gloire de ses armes ».
Le Marseillois fait partie de cette escadre qui appareille de Toulon le 13 avril 1778 (les relations diplomatiques sont rompues entre la France et le Royaume-Uni depuis le 16 mars, mais la guerre ne sera ouverte que le 17 juin). Arrivée en rade de New York en début juillet 1778, l'escadre est dispersée par une tempête le 11 août. Isolé, le Marseillois va affronter à cette occasion le HMS Preston, un vaisseau britannique de 50 canons, en un duel non décisif.
La campagne en Amérique du Marseillois au sein de l'escadre du vice-amiral d'Estaing sera ensuite marquée par la participation à la bataille de la Grenade, le 6 juillet 1779 contre la flotte britannique de Byron, là encore peu décisive. En octobre, après l'échec du siège de Savannah, l'escadre prend le chemin du retour à Brest.
Après les réparations nécessaires suite à une longue campagne outre-Atlantique, une nouvelle escadre est armée, commandée par l'amiral de Grasse, escadre dont le Marseillois fait de nouveau partie.
Le 5 septembre 1781, à la sortie de la baie de la Chesapeake, l'escadre française de Grasse affronte celle britannique de Graves. Le Marseillois va notamment se mesurer lors de cette bataille rangée au HMS Intrepid (un vaisseau de 64 canons). Les Britanniques finissent par se retirer.
Article détaillé : bataille de la baie de Chesapeake.La croisière de l'escadre se termine le 12 avril 1782 aux Antilles, au large des Saintes. Le commandant du Marseillois n'engage presque pas son vaisseau, le ramenant à Brest avec les autres rescapés de la bataille.
Article détaillé : bataille des Saintes.Bataille de Prairial
Le Marseillois est rebaptisé le Vengeur-du-Peuple au début de l'année 1794, échangeant au passage son pavillon blanc (symbole de la monarchie française) pour un tricolore. Le vaisseau et son équipage deviennent célèbres après la bataille du 13 prairial an II (le 1er juin 1794), pendant laquelle la flotte française de l'amiral Villaret de Joyeuse va affronter celle britannique de Howe. Le Vengeur-du-Peuple, au centre de la ligne, se retrouve bord à bord avec le HMS Brunswick (un 74 canons commandé par John Harvey) en un duel rapproché au canon et au fusil. Ils sont bientôt rejoints par le français l’Achille (rapidement démâté) puis par le britannique HMS Ramillies (un 74 commandé par Henry Harvey, le frère de John).
Si le vaisseau britannique finit le combat avec à son bord 45 morts (dont son capitaine) et 114 blessés (soit 159 hommes perdus sur 600), le Vengeur-du-Peuple perd deux de ses mâts, a le tiers de son équipage hors de combat et de l'eau qui commence à monter dangereusement dans ses cales. Le capitaine de vaisseau Renaudin, commandant du Vengeur, fait hisser le pavillon britannique en signe de reddition et de demande d'aide, puis monte à bord du HMS Culloden. Mais le vaisseau vaincu a la coque tellement percée qu'il va rapidement sombrer. Sur environ 600 membres d'équipage, 367 marins et 7 officiers sont sauvés par les navires britanniques à proximité (HMS Culloden, HMS Alfred et HMS Rattler). La bataille se termine par la perte de sept vaisseaux français (un coulé et six capturés), auxquels il faut rajouter les 5 000 morts et blessés côté français (contre 1 148 chez les Britanniques) et les 4 000 prisonniers.
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Nicholas Pocock, Le HMS Brunswick entre l’Achille et le Vengeur-du-Peuple, 1795, Musée de Greenwich.
Propagande
La propagande républicaine va chercher à transformer cette défaite militaire en victoire morale. La bataille est présentée à la tribune de la Convention par Barère, le rapporteur du Comité de Salut public (de la fin 1793 au début 1794). Son discours prétend que les marins du Vengeur ont refusé de se rendre à l'ennemi, et sont tous morts quand le vaisseau a sombré, en criant « Vive la Patrie, vive la République » et en chantant la Marseillaise.
De nombreux artistes se sont emparés du thème, tels Ponce-Denis Écouchard-Lebrun[1] ou Marie-Joseph Chénier[2].
Le retour en France du commandant Renaudin et des marins prisonniers en Angleterre fut une surprise. Bréard se chargea d'annoncer cette embarrassante nouvelle à la Convention : « Je suis bien aise d'apprendre à la Convention que tout l'équipage du Vengeur n'a pas péri ».
Néanmoins, la légende conserva son crédit dans l'imagerie populaire, la chanson et le théâtre. Rouget de Lisle, Dorat-Cubières, Parny l'exaltèrent en des vers vibrants. Lamartine lui a consacré une page lyrique où l'on voit le commandant Renaudin coupé en deux par un boulet. Des historiens reprirent la version de Barère.
Thiers lui-même écrivit « Le vaisseau le Vengeur, démâté, à moitié détruit, et près de couler, refusa d'amener son pavillon, au risque de s'abîmer sous les flots ».
Notes et références
- Ponce-Denis Écouchard-Lebrun, dans son Ode sur le vaisseau le Vengeur :
Trahi par le Sort infidèle,
Comme un Lion pressé de nombreux Léopards,
Seul au milieu de tous, sa fureur étincelle ;
Il les combat de toutes parts.
L’airain lui déclare la Guerre ;
Le Fer, l’Onde, la Flamme entourent ses Héros.
Sans doute ils triomphaient ! mais leur dernier Tonnerre
Vient de s’éteindre sous les Flots.
Captifs !... la Vie est un outrage :
Ils préfèrent le Gouffre à ce bienfait honteux.
L’Anglais, en frémissant, admire leur Courage ;
Albion pâlit devant eux.
Plus fiers d’une Mort infaillible,
Sans peur, sans désespoir, calmes dans leurs combats,.
De ces Républicains l’Ame n’est plus sensible
Qu’à l’ivresse d’un beau Trépas. Lève-toi, sors des mers profondes,
Cadavre fumant du Vengeur !
Toi qui vis les Français vainqueurs
Des Anglais, des feux et des ondes !
D'où partent ces cris déchirants ?
Quelles sont ces voix magnanimes ?
Ce sont les braves expirants
Qui chantent au fond des abîmes :
Gloire au peuple français !
Marie-Joseph Chénier :
Voir aussi
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