Jamahiriya arabe libyenne

Jamahiriya arabe libyenne

Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste
الجماهيرية العربية الليبية الشعبية الإشتراكية العظمى
Al-Jamāhīriyyah al-ʿArabiyyah al-Lībiyyah aš-Šaʿbiyyah al-Ištirākiyyah al-ʿUẓmā
ar

19692011

Drapeau
Blason

Drapeau et armoiries

Accéder aux informations sur cette image nommée LocationLibya.png.
Informations générales
Statut Jusqu'en 1977 : République ; à partir de 1971, régime à parti unique
À partir de 1977 : « État des masses », officiellement démocratie directe
Capitale Tripoli
Religion Islam
Monnaie Livre libyenne, puis à partir de 1971, Dinar libyen
Histoire et évènements
1er septembre 1969 Coup d'État de Kadhafi, proclamation de la République arabe libyenne
1er septembre 1971 Référendum sur l'union avec l'Égypte et la Syrie
2 mars 1977 Proclamation de la Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste
23 août 2011 Prise de Tripoli par les rebelles
20 octobre 2011 Prise de Syrte, décès de Mouammar Kadhafi
Dirigeant de fait[1]
1969-2011 Mouammar Kadhafi
Chef de l'État[2]
1er 1969-1979 Mouammar Kadhafi
1992-2008 Zentani Muhammad az-Zentani
Der 2010-2011 Mohamed Abou el-Kassim Zouaï
Chef du gouvernement[3]
1er1969-1970 Mahmud Sulayman al-Maghribi
1970-1972 Mouammar Kadhafi
1972-1977 Abdessalam Jalloud
Der 2006-2011 Baghdadi Mahmudi

Entités précédentes :

Entités suivantes :

La Jamahiriya arabe libyenne (arabe : الجماهيرية العربية الليبية, Al-Jamāhīriyyah al-ʿArabiyyah al-Lībiyyah)[4],[5],[6], en forme plus longue la Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste (الجماهيرية العربية الليبية الشعبية الإشتراكية, Al-Jamāhīriyyah al-ʿArabiyyah al-Lībiyyah aš-Šaʿbiyyah al-Ištirākiyyah), à partir de 1986 la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste[7], est le nom utilisé à partir de 1977 par le régime politique dirigé en Libye par le colonel Mouammar Kadhafi. Entre 1969 et 1977, le régime de Kadhafi porte le nom de République arabe libyenne (الجمهورية العربية الليبية, Al-Jumhūriyya al-ʿArabiyyah al-Lībiyyah).

Kadhafi arrive au pouvoir en 1969 lors du renversement de la monarchie libyenne, et institue un gouvernement fortement inspiré, dans ses premières années, du nassérisme égyptien. La Libye de Kadhafi se distingue par un positionnement tiers-mondiste, à la fois panarabe et panafricain, et entretient rapidement des relations conflictuelles, voire hostiles, avec une grande partie des pays d'Afrique, du monde arabe et du monde occidental.

En 1977, Kadhafi abandonne la forme républicaine de gouvernement pour faire de la Libye une « Jamahiriya », soit un « État des masses » officiellement gouverné par le biais de la démocratie directe, se réclamant à la fois du socialisme et de l'islam. Dans les faits, le régime fonctionne sur un mode à la fois arbitraire et répressif. Isolée sur le plan international dans les années 1980 et 1990 du fait de son soutien à de nombreuses rébellions et d'actes de terrorisme d'État, la Libye kadhafiste connaît un retour en grâce diplomatique dans les années 2000. En 2011 éclate cependant une insurrection contre le pouvoir en place qui aboutit, en août 2011, à la prise par les rebelles de la capitale et de l'essentiel du territoire libyen. Le Conseil national de transition, organe de direction des rebelles, est reconnu le mois suivant par l'ONU. Les combats contre les partisans de Kadhafi, qui tiennent encore plusieurs bastions, se poursuivent jusqu'en octobre 2011. Mouammar Kadhafi est tué le 20 octobre dans les environs de Syrte, et la « libération » de la Libye est proclamée trois jours plus tard.

Sommaire

La prise du pouvoir par Kadhafi

Le 1er septembre 1969, le roi Idris Ier est déposé lors d’un coup d’État mené presque sans effusion de sang. Le chef des conjurés - qui se désignent sous le nom d'« officiers unionistes libres » et se revendiquent fortement du nassérisme - est un jeune capitaine alors âgé de 27 ans, Mouammar Kadhafi, qui prend la tête du Conseil de commandement de la révolution (CCR), instance composée de 12 officiers, dont les noms ne sont connus du public que quatre mois après la prise de pouvoir. Le CCR fait office de véritable gouvernement du pays (le gouvernement en titre n'étant qu'un organe d'exécution) : son fonctionnement régulier n'est cependant jamais établi. Kadhafi, président du CCR, est clairement désigné comme le chef de la conjuration une semaine après sa prise du pouvoir quand, le 8 septembre, son nom est publiquement révélé et qu'il est nommé au grade de colonel, ainsi qu'au poste de commandant des forces armées[8]. Le 11 décembre, une « proclamation constitutionnelle », « destinée à fournir la base de l'organisation de l'État durant la phase d'achèvement de la révolution nationale et démocratique » jusqu'à la rédaction d'une constitution définitive, est publiée. La République arabe libyenne se place d'emblée dans une optique panarabe, l'article 1 proclamant : « La Libye est une république arabe, démocratique et libre, dans laquelle la souveraineté appartient au peuple. Le peuple libyen est une partie de la nation arabe. Son objectif est l'unité arabe totale. » L'article 6 précise : « L'objectif de l'État est la réalisation du socialisme par l'application de la justice sociale qui interdit toute forme d'exploitation[9] ». Le premier gouvernement est dirigé par Mahmud Sulayman al-Maghribi, un expert pétrolier d'origine palestinienne, puis, le 16 janvier 1970, Kadhafi devient lui-même Premier ministre, cumulant les postes de chef de l'État (en tant que président du CCR) et de chef du gouvernement. Cinq des membres du CCR sont nommés à des postes ministériels, mais Kadhafi semble avoir surtout visé à les isoler ainsi de l'armée, où se situent les vrais enjeux du pouvoir[10].

Mouammar Kadhafi en 1969, en compagnie du président égyptien Gamal Abdel Nasser.
Premier drapeau de la République arabe libyenne, adopté en 1969.

Les États-Unis sont d'abord rassurés par la promesse des conjurés de ne pas toucher aux intérêts occidentaux, et acceptent le non-renouvellement de leurs bases militaires (le dernier soldat américain quitte la Libye le 30 juin 1970 ; les bases britanniques sont également fermées). Ils acceptent également les exigences de Kadhafi en matière pétrolière (relèvement des royalties et de la fiscalité), d'autant que celles-ci leur apparaissent plutôt justifiées sur le fond. La ferveur religieuse de Kadhafi - la constitution provisoire multipliant les allusions à l'islam - le pose aux yeux des Américains comme un anticommuniste avec lequel il est possible de traiter. L'impression des observateurs étrangers est, tout d'abord, d'autant plus positive que Kadhafi introduit sur le plan de la politique intérieure de nombreuses mesures populaires, tels le doublement du salaire minimum ou le gel des loyers. Les palais royaux deviennent des bâtiments publics, et l'enseignement est arabisé[11]. Kadhafi s'emploie rapidement à récupérer les terres fertiles du pays, dont une partie demeure entre les mains d'anciens colons italiens : en octobre 1970, son gouvernement procède à l'expropriation et à l'expulsion d'environ 13 000 propriétaires agricoles italiens, dont les biens - environ 3000 fermes - sont nationalisés. L'État procède à une politique globale de nationalisation des banques étrangères et s'arroge le monopole du commerce extérieur. À l'occasion du premier choc pétrolier, le gouvernement prend le contrôle des compagnies pétrolières ; les majors sont, en novembre 1973 et contre de solides concessions financières, prises sous contrôle à concurrence de 51 %. L'envolée du prix du pétrole provoque une montée en flèche des rentrées de la rente pétrolière[12],[13],[14].

Le 11 juin 1971, un parti unique, l'Union socialiste arabe, calqué sur le parti égyptien du même nom, est créé, pour canaliser la « mobilisation révolutionnaire » souhaitée par le régime. La République arabe libyenne ne se conforme pas à un modèle parlementaire classique, et mise surtout sur la création d'organisations de masses comme l'Union des femmes ou une union syndicale. L'administration est modernisée, avec l'introduction de gouvernorats et de municipalités, afin de s'éloigner de la base tribale de l'ancien système. Si, par son arabisme, Kadhafi s'inspire, de manière revendiquée, de Gamal Abdel Nasser, il est également plus religieux que lui et, tout en s'opposant aux islamistes, manifeste volontiers une foi ardente et lie étroitement arabisme et islam. L'inspiration égyptienne est cependant la caractéristique dominante des trois premières années du régime de Kadhafi, qui ne manifeste aucune originalité sur le plan institutionnel. L'effort du régime se situe pour l'essentiel dans la concrétisation du panarabisme, via l'union des masses populaires arabes[15].

L'échec des tentatives d'union panarabes et panafricaines

Anouar el-Sadate, Mouammar Kadhafi et Hafez el-Assad signant l'accord de fédération de leurs trois pays en 1971.
Second drapeau de la République arabe libyenne, adopté en 1972 après la création de l'Union des républiques arabes.

Dès son arrivée au pouvoir, Kadhafi se distingue par un projet volontariste d'union de la « nation arabe », avec pour finalité d'effacer les traces de la domination occidentale, persistante même après la décolonisation. Le 27 décembre, la Libye signe avec l'Égypte de Nasser et le Soudan de Gaafar Nimeiry une « charte révolutionnaire », dite également « Pacte de Tripoli », qui lance un projet de fédération, défini comme une « alliance révolutionnaire dont le but est de déjouer les intrigues impérialistes et sionistes ». La mort de Nasser, en septembre 1970, ne ralentit pas le projet, et l'arrivée au pouvoir de Hafez el-Assad en Syrie amène l'adhésion de ce dernier pays au projet. Le Soudan est, par contre, rapidement écarté du projet d'union fédérale, du fait de sa situation intérieure instable. Le 17 avril 1971 est proclamée l'Union des Républiques arabes, regroupant l’Égypte, la Libye et la Syrie, approuvée par référendum dans les trois pays le 1er septembre de la même année, en hommage à la date anniversaire du coup d'État libyen. Le Soudan est écarté des projets d'union, du fait de son instabilité politique interne. Le 2 août 1972, une union totale entre l'Égypte et la Libye est proclamée : la Syrie n'est plus mentionnée dans cet aspect de l'accord[16]. Rapidement, le président égyptien Anouar el-Sadate, inquiet des surenchères de Kadhafi et dubitatif devant sa personnalité, choisit de s'éloigner de la fédération. La fusion, prévue en 1973, n'a finalement pas lieu et la situation débouche sur une crise des relations diplomatiques entre l'Égypte et la Libye. Kadhafi tente sans grand succès de poser des jalons unitaires avec l'Algérie de Houari Boumediene, puis entame une autre tentative de fusion, cette fois avec la Tunisie : mais le 12 janvier 1974, Habib Bourguiba, après avoir signé avec Kadhafi un traité d'union entre la Tunisie et la Libye au sein d'une « République arabe et islamique », se retire brutalement du projet de fusion. Les affronts subis de la part de Bourguiba et Sadate contribuent à convaincre Kadhafi que rien de sérieux ne peut être tenté avec l'ancienne génération des dirigeants arabes[17]. En novembre 1978, les accords internationaux entre l'Égypte et la Libye sont dénoncés[18]. En septembre 1980, un nouveau projet d'union est annoncé entre la Libye et la Syrie, mais ne se concrétise pas[19]. En 1981, un autre projet unissant la Libye et le Tchad tourne également court. En 1984, l'Égypte se retire définitivement de l'Union des Républiques arabes, qui était en sommeil depuis plusieurs années et cesse cette fois officiellement d'exister[20]. En août 1984, Kadhafi signe un « traité d'Union arabo-africaine » avec le Maroc, qui se traduit surtout par l'arrêt du soutien libyen au Front Polisario et par des échanges commerciaux entre les deux pays. Les ambitions unitaires de Kadhafi se retrouvent par la suite dans la participation de la Libye à des institutions comme l'Union du Maghreb arabe (qui n'apporte pas les résultats espérés, du fait de l'isolement libyen et de la tension née du regain islamiste et de la guerre du Golfe)[21], la Communauté des États sahélo-sahariens, ou des initiatives plus tardives comme la Ligue populaire et sociale des tribus du Grand Sahara. Lorsqu'il prend en 2009 la présidence tournante de l'Union africaine, le colonel Kadhafi en profite pour relancer le concept des États Unis d'Afrique, sans soulever l'enthousiasme des autres dirigeants africains[22].

De la République (Jumhuriya) à l'« État des masses » (Jamahiriya)

Portrait de Kadhafi à l'entrée du musée des antiquités romaines de Leptis Magna.

Au début de 1973, Mouammar Kadhafi est confronté à une situation d'échec : sur le plan régional, sa volonté d'unité se heurte à la méfiance des autres chefs d'État ; sur le plan intérieur, l'appareil administratif se montre peu coopératif et il doit faire face à une opposition au sein du Conseil de commandement de la révolution. À l'issue d'une séance orageuse du CCR durant laquelle ses options en matière d'armement sont désavouées, Kadhafi fait part aux autres membres du Conseil de sa volonté de démissionner, mais en révélant « personnellement la nouvelle au peuple ». Quelques jours plus tard, le 15 avril 1973, Kadhafi prononce à Zouara un discours dans lequel, à la surprise générale, il passe à la contre-offensive, rejetant la légitimité institutionnelle de l'appareil révolutionnaire et appelant les « masses populaires » à « monter à l'assaut de l'appareil administratif »[23]. La « subversion » interne et externe devient progressivement le mode d'action privilégié de Kadhafi. Au cours des années 1970, il lance un long processus d'« assaut » (zahf) des institutions, que les citoyens sont invités à contrôler, sans autres intermédiaires que des congrès et des comités théoriquement censés les représenter. En 1975, le parti unique, l'Union socialiste arabe, est déclarée « ouverte à tous », ce qui est le prélude à sa dissolution pure et simple[24],[25]. La même année, Kadhafi publie la première partie de son Livre vert, bref ouvrage doctrinal dans lequel il expose les principes d'une forme de démocratie directe dont il prône l'instauration en lieu et place de la démocratie parlementaire. Le 5 janvier 1976, un Congrès général du peuple est réuni pour une session durant jusqu'au 18, et nomme à son secrétariat général Abdessalam Jalloud, chef du gouvernement depuis 1972. Le Congrès général du peuple fixe le budget des ministères, réaffirme sa foi dans « l'expérience de démocratie populaire » de la République arabe libyenne, et son soutien aux « mouvements de libération nationale » à travers le monde[26].

Le 2 mars 1977, la dynamique lancée quatre ans plus tôt par le discours de Kadhafi à Zouara débouche sur l'instauration officielle d'un nouveau mode de gouvernement. Le Congrès général du peuple, réuni pour la seconde fois, proclame « l'avènement du Pouvoir du Peuple » par le biais d'un discours-programme lu par Abdessalam Jalloud, qui tient ensuite lieu de constitution à la Libye. Le nom du pays est changé en « Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste » : la Libye devient une Jamahiriya, néologisme inventé par Kadhafi[27] - signifiant État des masses ; le pays est désormais officiellement gouverné selon un système de démocratie directe par le biais de « comités populaires ». Le CCR est rebaptisé « Secrétariat général du Congrès général du peuple », Kadhafi lui-même prenant le titre officiel de « Secrétaire général du Secrétariat général du Congrès général du peuple » (abrégé ensuite en « Secrétaire général du Congrès général du peuple »)[28],[29]. Plus aucun parti politique n'est autorisé en Libye, où la vie politique se structure autour de trois slogans : « Pas de démocratie sans comités populaires ! », « Des comités populaires partout ! » et « Celui qui crée un parti trahit ! »[30].

Pour conserver son pouvoir, Kadhafi s'appuie sur plusieurs facteurs, dont la faible densité de population du pays, qui rend difficiles grèves, mouvements sociaux et émeutes urbaines. Les quelques manifestations estudiantines, notamment en avril 1984, sont très violemment réprimées. Le pouvoir déjoue également une série de tentatives de coups d'État venus de l'armée, dont le premier a lieu dès décembre 1969. Des exécutions, parfois massives, de conjurés réels ou supposés ont lieu avec régularité ; en novembre 1985, Kadhafi fait exécuter, ou exécute lui-même, son propre beau-frère, Hassan Ishkal, commandant de la région militaire de Syrte, soupçonné - peut-être à tort - de préparer un complot avec l'aide de l'Occident. Kadhafi joue des influences de l'armée, du Congrès général du peuple, et des Comités révolutionnaires qui noyautent les deux autres institutions. S'entremêlent à ces trois pôles d'influence les réseaux de solidarités tribales, sur lesquelles Kadhafi s'appuie parfois, tout en les court-circuitant à d'autres moments avec l'aide de l'armée. Les importantes ressources pétrolières du pays permettent en outre à Kadhafi, tout au long des années 1970, de susciter un consensus social grâce à des politiques sociales généreuses et des plans d'équipement efficaces[31]. Membre lui-même de la tribu Kadhafa, Mouammar Kadhafi parvient à maintenir un certain équilibre entre les tribus, dont il s'assure le soutien. Mais avec le temps, l'équilibre échoue à se maintenir, et le système avantage principalement le clan Kadhafi, et certaines des tribus comme la Makarha[32],[33].

Mode de gouvernement

La Jamahiriya, également retranscrit Jamahiriyya, Jamâhîriyya, Al-Ja-mahiriya ou Djamâhiriyyah (arabe جماهيرية), « État des masses » (jamâhîr, pl. de jumhûr, « le public ») en arabe moderne, est officiellement une forme de démocratie directe, appliquée à l'échelle d'un pays, avec comme bases une idéologie de type socialiste et les valeurs de l'islam. Le terme de « République » n'apparait plus nulle part dans les textes officiels, bien que l'expression de « République des masses » soit parfois utilisée pour traduire Jamahiriya[34]. Le terme de « Jamahiriya », créé par Mouammar Kadhafi dans son Livre vert, souligne le caractère nouveau et unique de cette forme de gouvernement, ainsi que son identité arabe.

La base législative une proclamation, la « Déclaration sur l'avènement du Pouvoir du Peuple », stipule dans son article 2 : « Le Saint Coran est la Constitution de la Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste »[35].

Bien que la démocratie directe soit officiellement appliquée en Libye, celle-ci est largement fictive : le pays est généralement considéré comme étant dans les faits comme une dictature sous le contrôle du colonel Kadhafi et de son entourage[36].

François Burgat et André Laronde, auteurs d'un Que sais-je ? sur la Libye, considèrent le régime de Kadhafi d'« anarcho-léninisme », situé « entre anarchie et dictature », et soulignent la rapide dérive autoritaire du système de la Jamahiriya : « Derrière la façade de la démocratie directe, la limitation des pouvoirs du prince par le droit, l'émergence d'une quelconque « société civile » ou celle d'une opposition politique efficace sont moins perceptibles que partout ailleurs au Maghreb »[37].

Définition officielle

La Jamahiriya arabe libyenne est officiellement une démocratie directe sans partis politiques, censée être gouvernée par sa population par le biais de conseils locaux. La proclamation constitutionnelle stipule : « Le peuple arabe libyen (...) croyant en la mise en place du système de démocratie directe annoncé par la Grande Révolution de Septembre qu'il considère comme la solution absolue et décisive au problème de la démocratie (...) déclare adhérer au socialisme en tant que moyen de parvenir à la propriété du peuple (...) soutient la marche de la Révolution vers un pouvoir total du peuple et la consolidation de la société populaire où le peuple seul contrôle la direction, le pouvoir, les ressources et les armes pour réaliser une Société de Liberté. (...) La démocratie populaire directe est la base du système politique de la Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste, dans laquelle le pouvoir est entre les mains du peuple seul. Le peuple exerce son pouvoir par l'intermédiaire des Congrès populaires, des Comités populaires et des syndicats professionnels. Les règles des congrès, des comités et des syndicats professionnels, ainsi que les dates de leurs réunions, sont déterminées par la loi. (...) Le pouvoir du peuple est exercé par les organes suivants : les Congrès populaires ; les Comités populaires ; les syndicats professionnels ; le Congrès général du peuple (...). Le Congrès général du peuple est la conférence nationale des comités populaires et des syndicats professionnels. Le Congrès général du peuple dispose d'un secrétariat général pour exécuter la politique générale de l'État définie par les Congrès populaires. Le secrétariat général prépare les sessions du congrès général du peuple et dresse l'ordre du jour du congrès général du peuple. Il exécute ses résolutions et ses recommandations. Le secrétariat général est composé d'un secrétaire général et d'un certain nombre de secrétaires ; chacun dirige l'un des secteurs d'activités de l'État. (...) Les expressions « Conseil des ministres », « premier ministre » et « ministre » sont remplacées par « secrétariat général du Congrès général du peuple », « secrétaire général » et « secrétaire »[35] ».

Organisation

Zentani Muhammad az-Zentani, Secrétaire général du Congrès général du peuple - soit chef de l'État officiel de la Libye - de 1992 à 2008.

La vie institutionnelle de la Jamahiriya s'organise autour des Congrès populaires, qui remplacent les anciennes cellules de parti de l'ancienne Union socialiste arabe, réunis sur une base territoriale (quartiers et municipalités) ou sectorielle (par activités). Les instances exécutives des Congrès populaires sont les Comités populaires, dont les membres ne sont pas élus, mais « délégués », le système de la Jamahiriya allant à l'encontre du mandat représentatif. Les seules attributions officielles des Comités sont de transmettre les décisions des échelons de base aux instances supérieures de coordination. Selon le discours officiel, les ministères et tous les corps constitués ont vocation à disparaître, l'armée et la police devant être à terme remplacées par un « peuple en armes ». Le Congrès général du peuple, instance législative suprême, se réunit une fois par an : les membres de son Secrétariat général font office de ministres et font partie du Comité populaire général, qui tient le rôle du gouvernement. La fonction de premier ministre est remplacée par celle de Secrétaire général du Comité populaire général, tandis que la fonction équivalente à celle de chef de l'État est dévolue au Secrétaire général du Congrès général du peuple[29].

Les congrès populaires sont, en théorie, les maîtres absolus de toute décision politique. L'échelon supérieur, et notamment le Congrès général du peuple, n'est censé faire œuvre que de coordination, de mise en cohérente et de régulation financière. Dans la pratique, l'autonomie de décision des congrès de base s'avère vite assez largement fictive. Le 2 novembre 1977 apparaissent les Comités révolutionnaires, organisés par Abdessalam Jalloud[38], qui ont officiellement pour objet d'accélérer la mise en œuvre du nouveau système, mais fonctionnent rapidement comme une sorte de milice. Très vite, les Comités révolutionnaires prennent en main le fonctionnement des Comités populaires dont ils « animent » les séances et, à partir de 1979, sélectionnent les délégués. Ils s'implantent en partie dans l'armée et contrôlent les moyens d'information en publiant leur propre hebdomadaire, Az-Zahf al-Akhdar, et en supervisant le reste de la presse. Les Comités révolutionnaires disposent enfin de leur appareil judiciaire propre, la Cour révolutionnaire, qui opère à partir des années 1980 dans des conditions très arbitraires[39].

Façade de Bab al-Azizia, la résidence fortifiée de Kadhafi à Tripoli.

Officiellement, aucun lien institutionnel n'existe entre les Comités populaires (qui représentent le « pouvoir gestionnaire ») et les Comités révolutionnaires (le « pouvoir révolutionnaire »). Dans la réalité, les membres des Comités révolutionnaires sont souvent membres des instances dirigeants des congrès de base, et des Comités populaires. N'ayant aucune existence légale, les Comités révolutionnaires agissent de manière informelle et s'emploient à ce que les mots d'ordre de Kadhafi deviennent des décisions politiques légitimées par les instances officielles. Les Comités révolutionnaires, souvent composés de personnes issues de couches très populaires et par là-même très sensibles à l'idéologie de Kadhafi, agissent comme des « portiers du système », sélectionnant les membres les plus « compétents » techniquement et idéologiquement pour diriger les congrès de base, et servent également de courroie de transmission entre Kadhafi et les instances populaires. Les pressions des Comités révolutionnaires se traduisent par une baisse de la fréquentation populaire des instances de base, conséquence que Kadhafi lui-même déplore. L'action des comités comme gardiens de la révolution semble être l'une des raisons de la faible participation des Libyens aux instances jamahiriyennes censées incarner la démocratie directe en Libye. À partir de 1988, Kadhafi s'emploie à réduire le pouvoir des Comités révolutionnaires. Ceux-ci conservent cependant dans les faits une forte influence. Le flou juridique qui entoure l'action des Comités révolutionnaires - dont les effectifs exacts et la composition du bureau de direction ne sont pas connus[40] - constitue l'un des principaux facteurs à la fois du maintien au pouvoir de Kadhafi et du caractère illusoire de la démocratie directe libyenne[41].

Mouammar Kadhafi, qui a abandonné en 1979 le poste de Secrétaire général du Congrès général du peuple et, en 1980, s'est officiellement autoproclamé Guide de la révolution, affecte pour sa part ostensiblement d'être étranger au pouvoir exécutif. Dans les faits, il garde la haute main sur les mécanismes de cooptation des membres des comités révolutionnaires[42]. Il assiste régulièrement aux séances du Congrès, dont il suggère l'ordre du jour et oriente les débats. Le 27 janvier 1990, il déclare ouvertement devant un Congrès populaire que son pouvoir n'est encadré par aucune règle, affirmant : « Je ne suis responsable devant aucun de vous car celui qui a fait la révolution sans l'aide de personne détient une légitimité qui lui confère tous les droits et personne ne peut la lui ôter. (...) Nous, les auteurs de la révolution, nous ne sommes responsables que devant notre conscience[43] ».

Malgré le caractère trompeur de sa façade démocratique, le système de la Jamahiriya se traduit, dans des nombre de secteurs d'activités considérés comme non vitaux, par des formes d'autonomie et de décentralisation. Les Comités populaires jouissent ainsi d'une certaine liberté en matière d'urbanisme local. Les sessions du Congrès général du peuple permettent parfois à des résistances de s'exprimer : en 1984, le Congrès confirme ainsi, malgré les recommandations de Kadhafi, le rejet par une majorité de congrès de bases de plusieurs textes de loi touchant à la politique familiale[44].

Économie

Billet de 50 Dinars à l'effigie du colonel Kadhafi.
Article connexe : Économie de la Libye.

La Libye bénéficie dans les années 1970 d'une augmentation substantielle des revenus pétroliers, due notamment à l'offensive commerciale de Kadhafi : le colonel obtient le relèvement des royalties et de la fiscalité, et augmente fortement les prix. Les revenus du pétrole sont multipliés par huit entre 1969 et 1974, et doublent au cours de la décennie 1970. La tendance s'inverse ensuite brutalement, la Libye souffrant en outre des conséquences d'un boycott américain. Entre 1980 et 1982, les recettes sont quasiment divisées par deux, puis sont à nouveau réduites de moitié du fait de la chute du cours du dollar américain en 1985 et 1986. Elles se stabilisent en 1987 pour connaître ensuite, à partir de 1990 et du fait de la guerre du Golfe, une nouvelle embellie. La rente pétrolière permet de financer de très importants plans d'équipement : les routes (le réseau routier libyen passe de 6000 kilomètres à 25000 km en 1981), les infrastructures hospitalières et les instituts de formation se multiplient au cours des années 1970. Kadhafi s'emploie également à développer l'industrie libyenne, encore embryonnaire en 1969, mais les résultats sont relativement décevants et ne permettent en tout cas pas de résoudre le problème de la dépendance au pétrole[45].

Après les nationalisations dans les premières années et le tournant constitutionnel de 1977, le projet « jamahiriyen » s'étend au domaine économique. Le régime s'applique à mettre en œuvre une « redistribution interne de la richesse ». Le salariat est supprimé, toute personne devant devenir associée de son entreprise. La maison doit revenir « à celui qui l'habite », la terre « à celui qui la travaille », les entreprises industrielles à l'État ou « à ceux qui y travaillent ». Le secteur immobilier fait l'objet d'une nationalisation partielle. Tout au long de l'année 1978, les entreprises privées passent sous le contrôle de comités élus. En décembre, l'abolition du petit commerce est annoncée : à partir de 1981, les centaines de boutiques du bazar de Tripoli sont remplacées par des « marchés jamahiriyens », soit de vastes unités publiques de distribution construites sur le modèle de la consommation de masse. Les professions libérales, jugées incompatibles avec le nouveau système économique, doivent se reconvertir. En 1985, Kadhafi annonce comme précepte la rotation des professions, tous les Libyens devant échanger leurs situations : les ouvriers sont censés devenir soldats, les soldats ouvriers, les étudiants employés et les employés ouvriers. L'interventionnisme du régime contribue à mettre un terme au relatif état de grâce dont, grâce à sa marge financière due au pétrole, il jouissait jusque-là au sein de la population : la suppression du petit commerce, hautement impopulaire, coïncide avec l'effondrement des recettes pétrolières et les premiers plans d'austérité. La population libyenne, après des années de prospérité, découvre des situations de pénurie dans la décennie 1980. Le 26 mars 1987, Kadhafi préconise dans un discours de faire une lecture plus souple de la doctrine économique jamahiriyenne. Si le salariat demeure aboli, la main-d'œuvre peut être embauchée dans des secteurs réduits à l'inactivité par l'expulsion des étrangers. Le petit commerce est à nouveau autorisé, et l'artisanat encouragé. Le secteur privé peut à nouveau se développer, et Kadhafi prône une forme de privatisation des PMI au bénéfice de leurs employés. Un statut proche de celui des coopératives est progressivement étendu à l'ancien secteur public. Certaines professions libérales sont à nouveau tolérées. Si le retour à un certain libéralisme économique, notamment en matière commerciale, améliore l'image du régime, des difficultés continuent de s'accumuler dans les années 1990. Les prix des denrées alimentaires augmentent régulièrement (celui du lait augmente ainsi de 100 % en 1990) et, dans les dernières années du XXe siècle, le malaise social va grandissant. Fonctionnaires et militaires, dont les salaires sont gelés, sont parfois payés avec des mois de retard. La persistance des interventions « idéologiques » de Kadhafi ne facilite pas non plus la réconciliation entre le régime et l'entreprise privée : une usine produisant du Pepsi-Cola, implantée en Libye, est ainsi brutalement fermée à la suite d'une déclaration du dirigeant, qui affirme que la boisson contient « du foie de porc »[46].

Chantier de la Grande Rivière Artificielle, en 1988.

La Libye continue par ailleurs sous Kadhafi d'attirer une forte immigration de travailleurs étrangers, originaires des pays arabes limitrophes, mais également d'Afrique subsaharienne. Bien que les immigrés soient régulièrement frappés par des vagues d'expulsion, leur rôle demeure essentiel, notamment dans le secteur privé après la résurgence de celui-ci. Dans les années 1980, les étrangers représentent plus de la moitié de la population active en Libye[47]. Au moment de la chute des cours du pétrole, le gouvernement réalise sa dépendance vis-à-vis des travailleurs étrangers et tente de limiter les entrées de migrants sur son territoire, sans y parvenir du fait notamment des réseaux migratoires clandestins[48]. En septembre 2000, des « encouragements » du Congrès général du peuple, qui réclame l'arrêt de l'immigration africaine, provoque une flambée de violence contre les immigrés, causant plusieurs dizaines de morts[49]

Armée

Article connexe : Forces armées libyennes.
Batterie de missiles sol-air de fabrication soviétique, photographiée en 1988.

Si l'armée compte parmi les forces sur lesquelles s'appuie Kadhafi, c'est également de ses rangs que viennent les premières tentatives de coup d'État contre le régime. L'armée, suspectée, se voit vite interdire l'accès à ses propres arsenaux, réservé à un petit nombre de fidèles. Les chars sont même parfois dépouillés de leurs chenilles[50]. L'armée libyenne est « dissoute » en 1977 lors du passage au système de Jamahiriya, pour être remplacée par le principe du « peuple en armes », qui relève largement de la fiction : dans les faits, les Comités révolutionnaires continuent de contrôler les forces armées. Malgré cette apparente marginalisation politique, les cadres militaires trouvent des compensations dans des moyens financiers importants et un arsenal qui demeure, jusqu'à l'embargo, le plus important du Maghreb et du Machrek réunis. Dans les faits, et jusqu'à l'époque de l'embargo, le pouvoir demeure concentré dans les mains d'un petit groupe de fidèles de Kadhafi, dont l'une des principales figures est Abdessalam Jalloud[51].

Le pouvoir de Kadhafi s'appuie également sur des « milices populaires », dont l'effectif est estimé à environ 45000 effectifs. En 1984, la Libye institue un système de « conscription militaire universelle » concernant tous les citoyens, hommes ou femmes[52]. Vers 1980, Kadhafi constitue une Légion islamique pan-africaine, composée d'environ 7000 mercenaires venus de divers pays musulmans, et qui participe au conflit tchadien[53].

La famille de Kadhafi tient, avec les années, un rôle croissant dans l'armée, où pusieurs de ses fils sont officiers. Moatassem Kadhafi est un temps président du Conseil de sécurité nationale ; il dirige également son propre bataillon privé, comme ses frères Saadi et Khamis, eux-mêmes officiers supérieurs de l'armée libyenne[54],[55].

Questions de société

Mouammar Kadhafi accompagné d'une « amazone » en 2009.

Kadhafi, musulman à la foi « sourcilleuse », se montre d'un réformisme parfois hardi sur le plan social et religieux. Il se fait notamment un ardent défenseur du rôle des femmes et multiplie les symboles, comme la création d'une garde exclusivement féminine, les « Gardes jamahiriyennes » (surnommées les « amazones »), dont il s'entoure lors de ses déplacements, d'un corps de « religieuses révolutionnaires », et d'une Académie militaire réservée aux femmes. Kadhafi s'oppose personnellement à la polygamie et tente, parfois sans succès, de faire réformer les règles traditionnelles du mariage et de la transmission des biens[56]. Une loi libyenne, adoptée en 1984, conditionne la polygamie à l'accord de la première épouse[57].

En matière religieuse, Kadhafi prend dès la fin des années 1970, à une époque où le Livre vert, bréviaire de la Jamahiriya, est en cours d'achèvement, des positions originales quant à la foi musulmane : émettant des doutes sur la fiabilité des hadith, le dirigeant libyen considère en outre le fiqh - qu'il désigne du nom de charia - comme un droit positif et non comme une législation sacrée, et veut donner au Coran un pouvoir normatif absolu. Ces prises de position, au-delà de leur audace théologique, visent également à priver les Oulémas de leur monopole normatif en matière religieuse, en leur contestant le droit d'interpréter le Coran. La position du dirigeant libyen est ainsi proche d'une forme de néo-salafisme. Ses déclarations et réformes valent à Kadhafi d'être qualifié d'« apostat » par certaines institutions - notamment saoudiennes - de l'islam orthodoxe[58],[59].

Positionnement international

Dans les années 1970, le régime de Kadhafi adopte un positionnement tiers-mondiste et radical, s'appuyant dans les premières années sur la manne financière que représentent les rentrées pétrolières. Comme l'Égypte de Nasser et l'Iran de Khomeini, la Libye de Kadhafi acquiert un temps une réelle popularité auprès de certaines populations du Tiers-monde, auprès desquelles il fait figure de porte-parole. Le colonel Kadhafi multiplie les diatribes, parfois injurieuses contre l'Occident, et plus encore contre Israël, qualifié d'« ennemi absolu » ; il ne se prive pas non plus d'apostropher, voire d'insulter, les chefs d'État et de gouvernement du monde arabe et du Tiers-monde. Si la virulence des positions de la Libye lui permet parfois d'infléchir certaines politiques régionales, le pays le paie d'une longue série de ruptures ou de gel des relations diplomatiques, avec d'autres États, parmi lesquels on peut citer de manière non exhaustive le Maroc (1971), la Jordanie (1972), l'Égypte (1973 et 1977), le Liban (1978), le Royaume-Uni (1984), l'Arabie Saoudite (1980) ou les Émirats arabes unis (1987). S'y ajoutent une longue suite de crises récurrentes, qui voient un nombre conséquent de diplomates libyens être expulsés de nombreux pays au cours des années 1980[60]. En 1985, la Libye interdit aux égyptiens de travailler sur son sol en réponse à une mesure similaire prise par l'Égypte envers les Libyens ; les travailleurs tunisiens sont également expulsés - ce qui entraîne une rupture des relations diplomatiques avec la Tunisie - de même que les Maliens, Mauritaniens, Syriens et Nigériens, officiellement en raison d'une volonté d'autosuffisance[20].

La Libye se livre également à un interventionnisme et religieux sur divers continents. Sur le plan religieux, l'État libyen sponsorise l'association missionnaire Da'Wa Islamiyya, qui pratique le prosélytisme sur le continent africain, notamment en Afrique subsaharienne. Sur un registre profane, le régime anime de 1980 jusqu'à leur dissolution en 1992 des Mathabas (« camps de base », dirigés par Moussa Koussa, et qui oeuvrent pour exporter la doctrine politique de la Jamahiriya. Un « Congrès populaire arabe » est créé pour faire figure d'extrapolation régionale du Congrès général du peuple et mobiliser des soutiens à la Libye dans le monde arabe : il semble ne jamais avoir obtenu de résultats très probants, et disparaît également en 1992[61].

Le régime de Kadhafi soutient également l'ensemble des mouvements de « résistance » à l'ordre occidental et apporte, avec plus ou moins de continuité, une aide à des groupes indépendantistes ou rebelles, à des guérillas et à des organisations classées comme terroristes par leur pays ou par les instances internationales. Bénéficient à un moment ou à un autre de l'aide libyenne toutes les guérillas nationalistes du Tiers-monde, mais également des mouvements de minorités ethniques américaines (indiennes ou noires), l'IRA, la Fraction armée rouge, des indépendantistes Kanaks, la République arabe sahraouie démocratique du Front Polisario, ainsi que la quasi-totalité des organisations pour l'indépendance de la Palestine[62]. Kadhafi apporte également son soutien à l'ANC dans son combat contre l'Apartheid en Afrique du Sud[63].

Dans le contexte de la guerre froide, Kadhafi cherche dans un premier temps à maintenir une politique de non-alignement face aux États-Unis et à l'URSS. Le dirigeant libyen a peu de goût pour le matérialisme marxiste mais, face à la détérioration des rapports avec les Américains, il se tourne dès mai 1974 vers les Soviétiques, qui lui fournissent des armes à défaut d'avoir avec lui une véritable proximité idéologique. Deux ans plus tard, Kadhafi se rend en visite à Moscou; il consacre son rapprochement avec l'URSS en reconnaissant plusieurs États du bloc de l'est, et en apportant notamment son soutien aux régimes angolais et éthiopien, liés à la présence soviétique dans la région. Des accords de coopération économique sont signés au cours des années 1980 avec la Corée du Nord, la Bulgarie, la Roumanie et la Pologne[64].

Conflits et interventionnisme en Afrique

Localisation de la bande d'Aozou et zone de conflit entre la Libye et le Tchad.

Dès la seconde moitié de la décennie 1970, la Libye kadhafiste fait face à des secousses externes, qui ont sur l'évolution du régime un effet notable. A l'été 1973, la Libye envahit le territoire tchadien, et occupe militairement la bande d'Aozou, dont elle revendique la possession. Kadhafi se pose également en médiateur dans la guerre civile tchadienne, prenant sous son aile Goukouni Oueddei, contre l'autre chef rebelle Hissène Habré, qu'il qualifie de « viscéralement anti-arabe ». Une certaine collaboration se développe, dans le contexte de la guerre civile tchadienne, entre la France et la Libye, Georges Pompidou tentant d'associer Kadhafi à la stabilisation du conflit. Kadhafi joue par la suite un rôle dans la libération de l'otage française Françoise Claustre. Valéry Giscard d'Estaing, cependant, tente de marginaliser la Libye, en jouant la réconciliation entre le pouvoir central et l'aile anti-libyenne de la rébellion, dirigée par Hissène Habré : Kadhafi, de son côté, dénonce la « trahison » de la France. En avril 1976, la Libye soutient une tentative d’assassinat du président tchadien Félix Malloum[65] ; la même année, des troupes libyennes réalisent des incursions dans le centre du pays, avec les forces du FROLINAT de Goukouni Oueddei[66].

En juillet 1977, un conflit frontalier débute avec l'Égypte, alors que les deux pays s'affrontent par le biais d'une propagande radiophonique virulente : l'Égypte accuse notamment la Libye de soutenir ses opposants islamistes et d'être une base de pénétration soviétique en Afrique. Le 21 juillet, une colonne égyptienne pénètre en territoire libyen : l'attaque égyptienne est coordonnée avec une action du SDECE, le services secret français, qui tente de déstabiliser la Libye en soutenant la formation au Caire d'un gouvernement d'opposition libyen, dirigé par l'ancien premier ministre Mahmud Sulayman al-Maghribi, passé à la dissidence. Les hostilités égypto-libyennes cessent au bout de trois jours grâce aux bons offices de Yasser Arafat et de Houari Boumediene. Les accords entre l’Égypte et la Libye sont définitivement dénoncés l’année suivante[67],[68],[69].

Entre le début des années 1970 et le milieu des années 1980, plus de dix pays africains font l'objet de tentatives de déstabilisation par la Libye, directement ou par opposants interposés : outre le Tchad, Kadhafi agit à l'encontre du Burkina Faso (en 1983), de la Gambie (1981), du Niger (1976 et 1982), du Mali (1982), du Soudan, de la Somalie, du Zaïre, de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert[70]. La Libye apporte également son soutien logistique au Front Polisario lors de la guerre du Sahara occidental et intervient militairement dans la guerre ougando-tanzanienne pour soutenir le régime ougandais d'Idi Amin Dada.

Au Tchad, l’aide libyenne à Oueddei s’accroît, et en 1977, Félix Malloum et Hissène Habré s’allient contre les rebelles pro-libyens[71]. Soutenu par les « volontaires » de la « Légion islamique » créée par Kadhafi, et parvenu au pouvoir en 1979, Oueddei annonce en janvier 1981 la fusion entre le Tchad et la Libye[72]. Mais ses relations avec Kadhafi se détériorent et, en décembre de la même année, les troupes libyennes se retirent du Tchad[73] . Hissène Habré prend le pouvoir peu après, et les troupes de Kadhafi reprennent l’offensive au Tchad, pour soutenir la coalition militaire de Oueddei. En août 1983, la France déclenche l’opération Manta, envoyant un détachement de parachutistes pour soutenir Hissène Habré. Dans les années suivantes, le conflit tchadien tourne à la déroute pour la Libye : le 5 septembre 1987, les troupes de Hissène Habré réalisent une incursion en territoire libyen, et détruisent la base aérienne de Maaten Es-Sahra. 2000 hommes de troupe libyens y trouvent la mort, et les pertes matérielles sont très importantes. Le 11 septembre, sur le conseil de François Mitterrand, Hissène Habré conclut un accord de paix avec Kadhafi, mettant un terme à l'implication de la Libye dans le conflit tchadien[74],[75].

Années 1980-1990 : l'isolement international

Les années 1980 sont marquées par une confrontation entre le régime en place et la communauté internationale, et tout spécialement les États-Unis et le Royaume-Uni. Avec les États-Unis, les rapports passent par plusieurs phases. Dans un premier temps, les Américains voient d'un bon œil le nouveau pouvoir, considéré comme anticommuniste ; Kadhafi semble avoir été prévenu par leurs services de tentatives de coup d'État. Les relations se détériorent ensuite sensiblement à partir de 1973, mais les deux pays conservent des intérêts pétroliers communs. L'antagonisme demeure à un niveau essentiellement verbal - avec des épisodes plus agités comme le saccage de l'ambassade américaine à Tripoli en 1980 - et reste prudent sur le terrain économique : des compagnies pétrolières à participation américaine demeurent actives en Libye. Les navires américains, au début des années 1980, sillonnent régulièrement le golfe de Syrte décrété « mer intérieure libyenne » par Kadhafi : en août 1981, les manoeuvres américaines conduisent à un incident, au cours duquel deux avions de chasse libyens sont détruits en vol. En 1982, les États-Unis décrètent un boycott de la Libye, accusée de soutenir le terrorisme international[76]

En 1984, le Royaume-Uni rompt toute relation avec la Libye suite à la mort d’une policière britannique, tuée par un tir venu de l'ambassade libyenne à Londres alors qu'elle surveillait une manifestation anti-Kadhafi[77]. En 1986, durant le deuxième mandat de Ronald Reagan, les relations américano-libyennes se détériorent de manière spectaculaire. Le 19 janvier, les navires de l'US Navy pénètrent à nouveau dans le golfe de Syrte, et essuient des tirs de missile : leur riposte coule cinq vedettes et détruit un poste de défense aérienne. Le regain de tension entre les États-Unis et la Libye semble avoir été notamment causé par l'activisme africain de Kadhafi : l'administration américaine, mal remise de la crise en Iran, semble avoir également fait preuve d'une susceptibilité accrue face à la montée des acteurs internationaux « secondaires »[64].

En 1986, déclarant agir en représailles d’un attentat dans une discothèque berlinoise fréquentée par des militaires américains, et à la suite d'accrochages aériens dans le golfe de Syrte, les États-Unis bombardent des complexes militaires libyens, ainsi que des zones résidentielles de Tripoli et de Benghazi, tuant 101 civils et ratant de peu Kadhafi lui-même[76],[78]. Le gouvernement libyen annonce que la fille adoptive de Kadhafi, Hana, âgée de deux ans, a été tuée dans le raid[79]. Kadhafi semble avoir été fortement éprouvé par l'épisode, d'autant plus que la mobilisation populaire attendue autour de sa personne et de son régime a été décevante. Revendiquant une « grande » victoire contre les États-Unis qui ont échoué à le tuer, Kadhafi fait ajouter l'adjectif « Grande » au nom officiel de son régime, qui devient donc la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste[80]. Le raid américain est suivi d'une reprise en main de l'appareil administratif. Kadhafi recherche également un dérivatif intérieur avec le conflit tchadien, qui se termine encore plus difficilement pour la Libye l'année suivante[81]. Au plus fort de son isolement international, la Libye maintient néanmoins des relations commerciales et politiques fortes avec l'Italie[82].

En 1988, et 1989, durant la période où Kadhafi entame une légère libéralisation économique de son pays, les services secrets libyens sont accusés d’avoir provoqué l’explosion en plein vol d’un avion de ligne américain au-dessus de la ville écossaise de Lockerbie et celui du Vol 772 UTA au Niger. Le 30 mai 1990 deux commandos du Front de libération de la Palestine arrivés à bord d'un canot pneumatique largué en haute mer par un navire en provenance de Libye[83]. tentèrent de commettre un raid sur une plage de Tel-Aviv. En 1992, le Conseil de sécurité des Nations unies met en place des sanctions à l’égard de la Libye afin d'obtenir que celle-ci livre les deux agents secrets suspectés de l’attentat de Lockerbie.

Ouverture politique avortée et tentatives de réorganisation

La Jamahiriya connaît à partir de 1987, au moment du processus de libéralisation économique, une brève période d'ouverture sur le plan de la politique intérieure. Des contacts sont pris avec les représentants de l'opposition en exil, mais Kadhafi ne propose aux opposants que de prendre un rôle actif au sein d'un système qu'il se refuse à réformer. Après avoir semblé prêt à faire des concessions pour limiter l'activité des Comités révolutionnaires, dont les opposants réclament la suppression, Kadhafi fait ensuite machine arrière.

Les frontières du pays sont rouvertes, et le pays bénéficie du retour à un certain libéralisme en matière commerciale. Le 2 mars 1988, plusieurs centaines de prisonniers politiques libyens et étrangers sont libérés : Kadhafi défonce lui-même le mur d'enceinte de la prison aux commandes d'un bulldozer. Le 12 juin, Kadhafi fait adopter une « Charte verte de la liberté et des droits de l'homme en Libye ». Un Prix Kadhafi des droits de l'homme est créé. Mais la politique d'ouverture ne dure pas et les prisons sont vite regarnies par de nouveaux prisonniers politiques. Au début de 1989, plus de trois mille activistes islamistes sont emprisonnés à la suite d'affrontement en Cyrénaïque : plusieurs dizaines semblent avoir été exécutés sans aucun procès. Kadhafi lance dans le courant de l'année un appel à l'élimination physique des militants de diverses organisations islamistes, qu'il qualifie d'« athées ». Le 26 septembre 1989, Kadhafi réunit plusieurs dizaines de dirigeants islamistes modérés, qu'il constitue en une « Direction de la révolution islamique mondiale », pour reprendre en main le prêche religieux.

En 1993, Kadhafi décrète la division du territoire national en 1500 unités administratives de base (mahallate), dotées d'une large autonomie. La réforme, combattue sur le terrain par de multiples fusions entre trop petites communes, s'avère inapplicable[84].

En 1994, pour anticiper la contestation de son régime au nom de l'islam, Kadhafi proclame l'application de la charia en Libye. En janvier 2000, il annonce l'abolition du Congrès populaire général et la disparition du gouvernement - 14 ministres sur 21 étant immédiatement remerciés - au profit d'une administration du pays par les communes, et les « Commandements populaires et sociaux », censés renforcer le « pouvoir des masses »[85]. Dans les années qui suivent, le Congrès populaire général continue cependant d'exister, et les Commandements populaires et sociaux demeurent en sommeil jusqu'à leur réactivation en 2009, quand est annoncée la nomination de Saïf al-Islam Kadhafi à leur tête[86].

Retour en grâce sur la scène internationale

Mouammar Kadhafi et le président russe Vladimir Poutine, en avril 2008.

Dès la fin des années 1980, la Jamahiriya tente de sortir de son isolement : en 1989, la Libye normalise ses relations avec la Tunisie, puis avec l'Égypte et le Tchad. Le 17 février 1989 est signé le traité de l'Union du Maghreb arabe, qui marque la normalisation des relations de la Libye avec les autres pays maghrébins[87].

En 1997, le fils du colonel Kadhafi, Saïf al-Islam Kadhafi, prend la tête de la Fondation internationale Kadhafi pour la charité et le développement, qui permet au régime de s'engager de manière visible dans des causes humanitaires et d'aider au règlement de crises internationales[88].

Le 4 février 1998 est fondée à Tripoli la Communauté des États sahélo-sahariens, regroupant 28 États : cette organisation permet notamment à Kadhafi de briser l'isolement régional de la Libye. Le dirigeant libyen, par le biais d'une importante politique d'investissements, apporte un financement considérable à des gouvernements d'Afrique subsaharienne, se constituant au passage une clientèle d'obligés[89].

Les agents responsables de l'attentat de Lockerbie sont finalement extradés en 1999[90], ce qui provoque la suspension des sanctions et le rétablissement des relations diplomatiques avec le Royaume-Uni[77]. Le régime joue même, via la Fondation Kadhafi, un rôle d’intermédiaire dans plusieurs libérations d’otages, comme à Jolo en 2000 et au Sahara occidental en 2003[88]. En août 2003, la Libye endosse formellement la responsabilité pour l’attentat de Lockerbie et signe un contrat de compensation avec les familles des victimes ce qui lui vaut en septembre 2003 la levée définitive des sanctions de la part du Conseil de sécurité des Nations unies[91].

En parallèle, Kadhafi opère après les attentats du 11 septembre 2001 un changement dans sa politique étrangère, probablement pour éviter une fin violente « à l’irakienne », pour lui et son régime. Dès janvier 2002, il entame des discussions avec les États-Unis sur la question du terrorisme islamiste. Après avoir été dénoncé comme un financier du terrorisme international, Kadhafi devient un partenaire stratégique dans la lutte contre celui-ci[92]; la vieille hostilité du colonel envers les islamistes donne à sa participation à la « guerre contre le terrorisme »[93]. Par la suite, en conséquence de négociations diplomatiques tenues pendant toute l’année 2003 entre responsables libyens, britanniques et américains, Kadhafi annonce en décembre de cette année qu’il renonce officiellement à ses programmes secrets d'armes de destruction massive, dont il reconnaît à cette occasion l'existence après l'avoir longtemps niée[94],[95]. Enfin, en mars 2004, il signe le protocole additionnel du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP)[96].

Grâce à cela et une politique d’assouplissement de sa réglementation en matière économique permettant l’ouverture du marché local aux entreprises internationales, le régime de Kadhafi assure sa survie et se rapproche des puissances occidentales et particulièrement de certains pays européens, comme le Royaume-Uni, la France, l’Espagne et l’Italie. Mouammar Kadhafi déclare désormais qu’il entend jouer un rôle majeur dans la pacification du monde et la création d’un Moyen-Orient sans armes de destruction massive[97]. La Libye dispose également, pour traiter avec les gouvernements de l’Union européenne, de l'argument du combat contre l’immigration illégale : le gouvernement libyen s'engage notamment à contribuer à l'effort italien en interceptant les navires de clandestins, contre les 5 milliards de dollars de dédommagement versés par l'Italie en réparation de la période coloniale[98].

Le 10 avril, 2006, Kadhafi lance la Ligue populaire et sociale des tribus du Grand Sahara, un groupement ambitionnant de représenter l'ensemble des tribus de la zone saharienne, avec pour but proclamé de réunir le Sahara en un seul État.

En 2007, l'affaire des infirmières bulgares, en cours depuis 1999, est réglée grâce notamment à une médiation entre la France, l'Union européenne, et la Fondation Kadhafi. En décembre de la même année, Mouammar Kadhafi est reçu lors d'une visite officielle en France par Nicolas Sarkozy, la rencontre marquant la normalisation des relations entre la France et la Libye. Des contrats de plusieurs dizaines de milliers d'euros sont annoncés[99]. En 2008, l'Italie et la Libye signent un accord soldant le passif de la période coloniale, le gouvernement de Silvio Berlusconi s'engageant à verser 5 milliards de dollars de dédommagement à son ancienne colonie. L'Italie est en 2011 le premier partenaire commercial de la Libye[100].

Le 2 février 2009, Mouammar Kadhafi est élu pour un an à la présidence de l'Union africaine[101]. Le 23 septembre de la même année, le dirigeant libyen s'exprime à la tribune de l'ONU, et en profite pour prononcer un discours fleuve dénonçant les grandes puissances et le Conseil de sécurité des Nations unies[102]. Le 13 mai 2010, la Jamahiriya arabe libyenne est admise au Conseil des droits de l'homme des Nations unies, malgré les protestations de diverses ONG[103].

Situation politique intérieure dans les années 2000

Les gains spectaculaires enregistrés par le régime libyen au plan diplomatique ne se traduisent cependant pas par un relâchement du système politique au plan intérieur. Selon le Département d'État des États-Unis, le réseau d'informateurs des Comités révolutionnaires inclut entre 10 et 20% de la population libyenne[104]. Au début des années 2000, la Libye n'a toujours pas de représentants librement élus, ni de véritable constitution, ni d'instrument de contrôle de l'utilisation des fonds publics, et encore moins de mécanisme juridictionnel de recours ou de protection contre les abus des services de sécurité. Les réconciliations avec des opposants extérieurs sont rares, l'exception la plus notable étant Abdel-Moneim Al-Huni, ancien membre du Conseil de commandement de la révolution, rentré en dissidence durant vingt ans, qui devient en 2000 représentant de la Libye à la Ligue arabe.

La montée en visibilité de Saïf al-Islam Kadhafi, à la tête de la Fondation Kadhafi, semble augurer d'une possible transmission héréditaire du pouvoir[105], bien que le fils de Kadhafi soit décrit comme en compétition sur ce point avec son frère Moatassem et que ses volontés réformatrices ne soient pas toujours couronnées de succès[106]. Sur le plan économique notamment, le camp réformateur mené par Saïf al-Islam Kadhafi se heurte à la « vieille garde » menée par le chef du gouvernement Baghdadi Mahmoudi[107].

Les contacts occidentaux du régime semblent l'avoir aidé à renforcer la répression et l'espionnage de la population libyenne : en 2011, un militaire français retraité déclare que trois ans plus tôt, des ingénieurs de Bull et d'anciens cadres de la Direction du renseignement militaire ont aidé les services de renseignements libyens à mettre en place la surveillance de la totalité du réseau internet du pays[108].

Rôle de la famille Kadhafi

Membre de la tribu Kadhafa, Mouammar Kadhafi s'appuie sur des solidarités tribales, mais aussi familiales. Le rôle de ses enfants, nés entre le début des années 1970 et le début des années 1980, va croissant avec les années. Les membres de sa famille jouissent dans la marche des affaires libyennes d'une influence variable en fonction du temps et de leur rapports personnels avec le Guide, beaucoup connaissant des périodes de disgrâce plus ou moins longue. L'un des beaux-frères de Kadhafi, Hassan Ishkal, est exécuté en 1985 sur l'accusation de complot. Un autre beau-frère, Moncef Ouannès, un temps bras droit de Kadhafi, est incarcéré durant des années pour ne pas avoir dénoncé des dissidents[109]. Un troisième beau-frère, Abdallah Senoussi, est responsable des services secrets, et impliqué dans l'attentat contre le Vol 772 UTA[110].

Les enfants de Kadhafi, dont plusieurs sont en compétition pour l'hypothétique succession de leur père, connaissent également des fortunes politiques variables. Tenant des rôles dans la vie politique intérieure du régime comme dans sa communication extérieure, ils sont également connus pour leur vie privée et publique parfois agitée. Le fils aîné du Guide, Mohamed Kadhafi, né de son premier mariage, dirige l'organisme libyen des télécommunications et le Comité olympique national, organisant également des rencontres de football. Moatassem Kadhafi, proche des Comités révolutionnaires et classé parmi « les durs » du régime, occupe différents postes dans la hiérarchie militaire et dirige sa propre brigade. Saadi Kadhafi, militaire, organise comme Mohamed des rencontres de football et dirige un temps la Fédération de Libye de football; il tente lui-même une carrière de joueur en Libye comme en Italie, où il est actionnaire de la Juventus de Turin : de retour en Libye, il prend la tête d'une unité d'élite de l'armée et se lance dans les affaires, annonçant d'ambitieux projets d'investissement et de développement. Khamis Kadhafi, militaire, dirige sa propre unité d'élite, la « Brigade Khamis » ; un autre fils, Saïf-al-Arab Kadhafi, plus discret, est également militaire. Aïcha Kadhafi, avocate, s'illustre en défendant Saddam Hussein et préside sa propre ONG humanitaire. Hannibal Kadhafi lui, se distingue surtout par son implication dans des faits divers, dont l'un occasionne une crise diplomatique en 2008 entre la Libye et la Suisse[54]

Saïf al-Islam Kadhafi s'illustre tout particulièrement par une activité politique et diplomatique qui en fait à la fois l'un des membres les plus en vue de la famille, et le visage le plus « moderne et avenant » du régime. Au plan international, il mène de nombreuses négociations délicates, dont plusieurs, comme l'indemnisation des familles des victimes de l'attentat de Lockerbie, permettent de dénouer des crises provoquées par son père[111]. Sur le plan intérieur, il se fait l'avocat de la modernisation du régime, engageant une équipe de juristes étrangers pour travailler sur un projet de constitution[111] ; il annonce en 2007 un projet de modernisation du régime libyen, relançant les spéculations sur son possible rôle en tant qu'héritier, et lance en août de la même année les premiers médias privés du pays. Mais le processus de réformes connaît des revers ; Saïf al-Islam Kadhafi annonce en 2008 son retrait de la vie politique. En octobre 2009, il fait son retours aux affaires en étant nommé au poste de « coordinateur général des Commandements populaires et sociaux », position analysée comme étant celle de « numéro deux du régime » et qui renforce son image de successeur potentiel[86],[112]. Il ne prend cependant pas ses fonctions dans les mois qui suivent, apparemment du fait de la résistance des conservateurs du régime[113]. Sa Fondation annonce en 2010 ne plus se destiner qu'à l'action de bienfaisance à l'étranger, au détriment de la politique locale[114].

2011 : révolte contre Kadhafi, guerre civile et chute du régime

Article détaillé : Guerre civile libyenne de 2011.
Carte des hostilités en Libye, en mars 2011.

Au début de 2011, la Libye est à son tour touchée par le « Printemps arabe ». Le 15 février 2011, la police disperse par la force un sit-in contre le pouvoir à Benghazi. Les protestations s'amplifient dans les jours qui suivent, l'armée tirant cette fois à balles réelles, puis à l'arme lourde[115]. Le 20 février, Saïf al-Islam Kadhafi intervient à la télévision, promettant des réformes mais menaçant également les manifestants d'un « bain de sang »[116]. Des bombardements aériens meurtriers ont lieu à Tripoli, tandis que plusieurs dignitaires lâchent le régime. L'est du pays semble échapper au gouvernement de la Jamahiriya. Le 22 février, Mouammar Kadhafi lui-même s'exprime à la télévision, affirmant qu'il se battra jusqu'à la mort et appelant ses partisans à le soutenir[115],[117]. Le 27 février est proclamé à Benghazi un gouvernement rebelle, le Conseil national de transition (CNT) dont Moustafa Abdel Jalil, ancien ministre de la justice de Kadhafi, prend la présidence le 5 mars. Des personnalités du régime, comme le représentant à la Ligue arabe Abdel-Moneim Al-Huni[118], le ministre des affaires étrangères Moussa Koussa[119], ou le président de la National Oil Corporation et ancien chef du gouvernement Choukri Ghanem[120], font défection. Abdessalam Jalloud, ancien n°2 du régime, fuit également le pays[121]. Le 1er mars, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU exclut la Libye[122]. L'armée de Kadhafi contre-attaque bientôt et reprend le contrôle d'une partie des villes libyennes, avançant sur Benghazi[123], dont Saïf al-Islam Kadhafi annonce la « libération » prochaine[124]. Dans le même temps, le 10 mars 2011, la France est le premier pays à recevoir des représentant du CNT et à reconnaître celui-ci comme interlocuteur légitime[125]. Le 17 mars est votée la Résolution 1973 du Conseil de sécurité des Nations unies, qui ouvre la voie à une intervention militaire multinationale et empêche les forces de Kadhafi de reprendre Benghazi. Le 27 juin, la Cour pénale internationale délivre un mandat d'arrêt pour crimes contre l'humanité contre Mouammar Kadhafi, ainsi que contre son fils et « premier ministre de facto » Saïf al-Islam Kadhafi, et contre son chef des services secrets Abdallah Senoussi[126].

Le 23 août 2011, au bout de six mois de conflit, les forces du CNT s'emparent de la capitale, Tripoli. Les bunkers, dont le complexe de Bab al-Azizia, et les opulentes demeures de Kadhafi et de sa famille sont investis par les rebelles[127],[128],[129]. Une partie des proches de Kadhafi se réfugie en Algérie[130] ou au Niger[131]. Kadhafi lui-même demeure introuvable[132] et continue dans les semaines qui suivent à s'exprimer par des messages audio, appelant ses partisans à la résistance et dénonçant comme illégitime tout autre pouvoir que « celui du peuple et des comités populaires »[133],[134]. Le porte-parole de Kadhafi, Moussa Ibrahim, diffuse des messages affirmant que ce dernier organise la « défense » de la Libye[135]. Le 9 septembre, à la demande de la CPI, Interpol émet un mandat d'arrêt contre Mouammar Kadhafi, Saïf al-Islam Kadhafi, et Abdallah al-Senoussi[136]. Mohamed Abou el-Kassim Zouaï, chef de l'État en titre de la Jamahiriya, se livre aux nouvelles autorités[137]. Baghdadi Mahmoudi, chef du gouvernement, se réfugie en Tunisie[138]. Le 16 septembre, le CNT, qui a fait l'objet au cours des mois précédents d'une reconnaissance internationale accrue, se voit attribuer le siège de la Libye à l'ONU par l'Assemblée générale[139]. Les combats continuent dans les bastions kadhafistes, notamment Syrte et Bani Walid. Le 17 octobre, les forces du CNT prennent Bani Walid, abandonnée par les troupes kadhafistes[140],[141] tandis que de violents combats se poursuivent à Syrte[142]. Le 20 octobre, Mouammar Kadhafi est capturé et tué alors qu'il fuyait Syrte[143]; Syrte, dernier bastion kadhafiste, est déclarée « libérée »[144],[145]. Toujours le 20 octobre, Moatassem Kadhafi est retrouvé mort à Syrte[146], de même que le chef d'État-major Abou Bakr Younès Jaber[147]. La capture du porte-parole Moussa Ibrahim est également annoncée le même jour[148]. Le 23 octobre, le CNT proclame la « libération » de la Libye[149]. Après plus d'un mois de cavale, Saïf al-Islam Kadhafi est arrêté le 19 novembre[150]. Le politologue Riadh Sidaoui considère en octobre 2011 que Kadhafi « a créé un grand vide pendant son exercice du pouvoir : il n'y a ni institution, ni armée, ni tradition électorale dans le pays », ce qui risque d'entraîner une période de transition difficile en Libye[151].

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • François Burgat, André Laronde, La Libye, Presses universitaires de France, 2003
  • Moncef Djaziri, État et société en Libye : islam, politique et modernité, L'Harmattan, 1996
  • Pierre Pinta, La Libye, Karthala, 2006
  • René Otayek, La politique africaine de la Libye, Karthala, 1986
  • Olivier Pliez, La nouvelle Libye: sociétés, espaces et géopolitique au lendemain de l'embargo, Karthala, 2004

Notes et références

  1. Chef de l'État en titre jusqu'en 1979, également chef du gouvernement de 1970 à 1972; porte à partir de 1980 le titre de « Guide de la révolution », fonction qui n'apparaît nulle part dans la Déclaration sur l'avènement du Pouvoir du Peuple qui fait office de constitution, et dont les pouvoirs ne sont codifiés par aucun texte de loi.
  2. De 1969 à 1977, Président du Conseil de commandement de la révolution; ensuite, Secrétaire général du Congrès général du peuple.
  3. De 1969 à 1977, Premier ministre; ensuite, Secrétaire général du Comité populaire général
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  5. Loi de mise en oeuvre du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires , site du ministère de la justice du Canada
  6. Questions relatives à la Jamahiriya arabe libyenne, site de l'ONU
  7. L'Arrêté français du 4 novembre 1993 relatif à la terminologie des noms d'États et de capitales indique, page 1291, Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste, mais par ailleurs d'autres textes officiels français utilisent alternativement la forme Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste, sans la conjonction « et »
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  9. Proclamation constitutionnelle de 1969, site de l'université de Perpignan
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  11. François Burgat, André Laronde, La Libye, Presses universitaires de France, 2003, pages 60-61
  12. Pierre Pinta, La Libye, Karthala, 2006, pages 79, 238
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  118. Libya’s representative to the Arab League resigns, Ahram online, 22 février 2011
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  122. La Libye exclue du Conseil des droits de l'homme, Tsr.ch, 1er mars 2011
  123. L'armée de Kadhafi reprend Zaoura et poursuit son offensive sur tous les fronts, radio-canada.ca, 15 mars 2011
  124. "Nous arrivons", menace l'un des fils de Mouammar Kadhafi, Le Monde, 10 mars 2011
  125. France Becomes First Country to Recognize Libyan Rebels, The New York Times, 10 mars 2011
  126. Kadhafi frappé par un mandat d'arrêt international, Le Figaro, 27 juin 2006
  127. Dans les ruines du bunker de Kadhafi à Tripoli, Le Point, 24 août 2011
  128. « Les maisons des Khadhafi racontent » - Article du DNA du 29 août 2011
  129. Libye: le bunker secret de Mouatassim Kadhafi à Tripoli, La Dépêche du midi, 30 août 2011
  130. Libye: trois enfants de Kadhafi en Algérie, L'Express, 29 août 2011
  131. Des proches de Kadhafi fuient au Niger, Libération, 6 septembre 2011
  132. Le quartier général de Kadhafi est tombé, Libération, 23 août 2011
  133. Kadhafi lance un appel à la résistance, Radio-Canada.ca, 1er septembre 2011
  134. Dans un message audio, Kadhafi affirme que son régime n'est pas tombé, france24.com, 20 septembre 2011
  135. Spéculations sur le sort de Kadhafi toujours introuvable, Libération, 6 septembre 2011
  136. Interpol émet un mandat d'arrêt contre Mouammar Kadhafi , France 24, 9 septembre 2011
  137. Blog d'Al Jazeera, 8 septembre 2011
  138. Tunisie: l'ex-Premier ministre de Kadhafi acquitté par la justice, L'Express, 27 septembre 2011
  139. L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE PERMET AU CONSEIL NATIONAL DE TRANSITION (CNT) LIBYEN D’OCCUPER LE SIÈGE DE LA LIBYE, Nations Unies, Soixante-sixième session, 2e séance plénière], 16 septembre 2011
  140. Le CNT célèbre la prise de Bani Walid, bastion de Kadhafi , Le Nouvel observateur, 17 octobre 2011
  141. Dans Bani Walid "libre", ville fantôme, Libération, 17 octobre 2011
  142. L'interminable bataille de Syrte, France24.com, 17 octobre 2011
  143. Ce que l'on sait de la mort de Kadhafi, Le Figaro, 21 octobre 2011
  144. Le CNT annonce que la ville de Syrte a été "libérée", Le Monde, 20 octobre 2011
  145. Kadhafi mort, Syrte libérée... Et demain?, L'Express, 20 octobre 2011
  146. Muatassim Kadhafi tombe aussi à Syrte, Le Figaro, 20 octobre 2011
  147. Mouatassim, un des fils Kadhafi, retrouvé mort à Syrte, RTL, 20 octobre 2011
  148. Gaddafi spokesman Moussa Ibrahim captured --NTC, Reuters Africa, 20 octobre 2011
  149. Le CNT proclame officiellement la "libération" de la Libye, Le Monde, 23 octobre 2011
  150. Saïf al-Islam capturé dans le sud de la Libye, Le Nouvel observateur, 19 novembre 2011
  151. « Libye: “Mouammar Kadhafi avait choisi la voie suicidaire dès février” », 20 minutes, 20 octobre 2011.

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Jamahiriya arabe libyenne de Wikipédia en français (auteurs)

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