- Mouammar Kadhafi
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Mouammar Kadhafi
معمر القذافيMouammar Kadhafi, en février 2009.Mandats Dirigeant de fait de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste
(à partir de 1980, « Guide de la Révolution »)1er septembre 1969 – 23 août 2011
( 41 ans, 11 mois et 22 jours)Président Abdul Ati al-Obeidi
Muhammad az-Zaruq Rajab
Mifta al-Usta Umar
Abdul Razzaq as-Sawsa
Zentani Muhammad az-Zentani
Muftah Kaïba
Mubarak al-Shamikh
Mohamed Abou el-Kassim Zouaï7e président de l'Union africaine 2 février 2009 – 31 janvier 2010 Prédécesseur Jakaya Kikwete Successeur Bingu wa Mutharika Secrétaire général du Congrès général du peuple de la Jamahiriya arabe libyenne
(chef de l'État)2 mars 1977 – 2 mars 1979 Prédécesseur Lui-même
(en tant que président du Conseil de commandement de la révolution)Successeur Abdul Ati al-Obeidi Président du Conseil de commandement de la Révolution de la République arabe libyenne
(chef de l'État)1er septembre 1969 – 2 mars 1977 Premier ministre Mahmud Sulayman al-Maghribi
Lui-même
Abdessalam Jalloud
Abdul Ati al-ObeidiPrédécesseur Idris Ier
(roi de Libye)Successeur Lui-même
(en tant que Secrétaire général du Congrès général du peuple)13e Premier ministre libyen
(2e Premier ministre de la République arabe libyenne)16 janvier 1970 – 16 juillet 1972 Président Lui-même Prédécesseur Mahmud Sulayman al-Maghribi Successeur Abdessalam Jalloud Biographie Date de naissance 19 juin 1942 Lieu de naissance Qasr Abou Hadi (Libye italienne) Date de décès 20 octobre 2011 (à 69 ans) Lieu de décès Syrte (Libye) Nationalité Libyenne Parti politique Union socialiste arabe (1971-1977) Conjoints Safia Farkash Enfants Mohamed Kadhafi
Saïf al-Islam Kadhafi
Saadi Kadhafi
Moatessem Billah Kadhafi
Hannibal Kadhafi
Aïcha Kadhafi
Saïf al-Arab Kadhafi
Khamis KadhafiDiplômé de Université de Libye
Académie militaire de BenghaziProfession Militaire Religion Islam Signature
Chefs d'État libyens
Chefs du gouvernement libyenmodifier Mouammar Kadhafi[1] (en arabe : معمر القذافي audio, Muʿammar Al-Qadhāfy[2]), né le 19 juin 1942 à Qasr Abou Hadi et mort le 20 octobre 2011 à Syrte, communément appelé le colonel Kadhafi, est un militaire, homme d'État et idéologue politique libyen.
Officier de l'armée, il devient de facto le dirigeant de la Libye à la suite du coup d'État de 1969, qui renverse le régime monarchique de la dynastie al-Sanussi alors en place. En 1977, il réorganise les institutions politiques de la Libye en faisant du pays une Jamahiriya (littéralement un « État des masses »), théoriquement gouverné selon un système de démocratie directe. Même si, en 1979, il renonce au poste officiel de chef de l'État, il demeure aux commandes de la Libye avec le titre de « guide de la Révolution de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste » (ou plus simplement « guide de la Révolution » ou « frère guide »). Sur la scène internationale, il milite pour le panarabisme et le panafricanisme, n'hésitant pas à utiliser la manne pétrolière en finançant des organisations terroristes et autres mouvements de rébellion à travers la planète. Il est généralement considéré comme le responsable de l'attentat de Lockerbie en 1988 et de l'attentat contre le vol 772 UTA en 1989, qui ont coûté la vie à 440 personnes. Par la suite, il fait en sorte que son pays soit moins isolé sur le plan diplomatique.
À partir de février 2011, son pouvoir, en place depuis 41 ans, est menacé par le développement d'une contestation, que la répression transforme rapidement en insurrection armée, puis en guerre civile. Après la prise de Tripoli par les rebelles et l'arrivée au pouvoir du Conseil national de transition (CNT) en août 2011, Mouammar Kadhafi fuit la capitale. Il est tué le 20 octobre, dans la région de Syrte.
Sommaire
Biographie
Enfance et jeunesse
Né le 19 juin 1942 à Qasr Abou Hadi[3], à 18 km au sud-est de Syrte, Mouammar Kadhafi est le plus jeune enfant d'une famille de Bédouins du clan des Ghous[4], qui appartient à la tribu des Kadhafa (al-Kadhafi n'est pas un patronyme mais un nom d'usage signifiant « de la tribu des Kadhafa »). Il grandit dans la région désertique de Syrte et reçoit une éducation primaire traditionnelle et religieuse. De 1956 à 1961, il suit les cours de l'école préparatoire de Sebha, dans le Fezzan, fief traditionnel de sa tribu[5], où il forme le noyau d'un groupe de militants révolutionnaires ayant pour but de s'emparer du pouvoir inspiré du général égyptien Gamal Abdel Nasser en prônant l'unité arabe. En 1961, il est exclu de l'école préparatoire de Sebha à cause de son activisme politique[5].
Il étudie le droit à l'université de Libye, puis entre à l'Académie militaire de Benghazi en 1963, où il organise, avec quelques militants, un mouvement secret dans le but de renverser la monarchie libyenne pro-occidentale[5]. Après l'obtention de son diplôme en 1965, il est envoyé au Royaume-Uni pour suivre un entraînement supplémentaire au British Army Staff College (ou Staff College, Camberley), et revient en 1966 en tant qu'officier dans le corps des transmissions[6].
Coup d'État militaire
Le 1er septembre 1969, à 27 ans, il mène avec un groupe d'officiers le coup d'État contre le roi Idris Ier, âgé alors de plus de 80 ans, alors que celui-ci est en Turquie pour un traitement médical. Son neveu, le prince Hassan Reda al-Sanussi, devait s'installer sur le trône le 2 septembre 1969, lorsque l'abdication du roi Idris, annoncée le 4 août, devait prendre effet[7]. Dans la journée du 1er septembre, la monarchie est abolie, la République est proclamée, et le prince mis en prison.
Mouammar Kadhafi s'octroie alors l'avancement du grade de capitaine au grade de colonel, qu'il a gardé jusqu'à sa mort, s'inspirant de son modèle égyptien Gamal Abdel Nasser. Il n'a jamais prétendu à un titre plus honorifique pour être conforme à sa rhétorique développée dans Le Livre vert d'un pouvoir au peuple[8].
Exercice du pouvoir
Article connexe : Jamahiriya arabe libyenne.Panarabisme
Mouammar Kadhafi, qui se réclame de Gamal Abdel Nasser, prône le passage à un socialisme arabe d'État teinté de panarabisme. Il nationalise certaines entreprises, notamment celles détenues par des ressortissants italiens. Peu après son arrivée au pouvoir, il demande à l'armée britannique de quitter la Libye, après treize ans de présence militaire. Il ordonne ensuite aux États-Unis d'évacuer ses bases militaires, dont Wheelus Air Base [9]. En septembre 1970, avec l'aide de son ami et conseiller Abdessalam Jalloud, il réussit à imposer pour la première fois une augmentation du prix du baril de pétrole, ouvrant la voie aux autres pays producteurs[10], et déséquilibrant la géopolitique du pétrole.
Partisan du panarabisme, Kadhafi propose l'unité de son pays et de l'Egypte à Nasser que le contexte international après la défaite de 1967 empêche d'accepter. En 1973-1974, il tente d'établir une union entre la Tunisie et la Libye, véritable fusion des deux pays. Après l'accord initial donné par le président Habib Bourguiba, rencontré au pied levé par Kadhafi, cette union ne se fait pas. Par la suite, les relations entre le Libye et la Tunisie deviennent mauvaises. Pratiquant une politique extérieure expansionniste, il annexe de facto, en 1973, la bande d'Aozou, au Tchad[11], ce qui lui vaut l'inimitié de la France. Durant la guerre ougando-tanzanienne en 1978-1979, il envoie 3 000 militaires pour soutenir Idi Amin Dada, en guerre contre la Tanzanie, qu'il essaye alors d'envahir. Mais ceux-ci ne parviendront pas à empêcher la défaite de l'armée ougandaise, qui entraîne le renversement du dictateur ougandais en avril 1979. L'année suivante, le président tchadien, Goukouni Oueddei, déclare à Tripoli la fusion de son pays et de la Libye, suscitant la réprobation de la France[12], le Tchad étant traditionnellement considéré comme un bastion de la « Françafrique ». Le conflit entre Paris et Tripoli, qui soutient toujours Oueddei, renversé par Hissène Habré en décembre 1981, persiste tout au long des années 1980-1990. Paris accuse en effet Kadhafi d'ingérence au Tchad, et envoie à deux reprises l'armée soutenir Habré contre l'avancée des forces de Oueddei, soutenues par l'armée libyenne (Opération Manta, lancée en 1983, puis Opération Épervier, lancée en 1986 et prorogée en 2004). La France a cependant toujours nié avoir été impliquée dans la tentative d'assassinat dont, selon le magistrat italien Rosario Priore et l'ex-président de la République Francesco Cossiga, Kadhafi est l'objet en juin 1980[13].
Sur le plan intérieur, en 1977, il déclare la « révolution du peuple », change le nom du pays de République arabe libyenne en Jamahiriya (« État des masses ») arabe libyenne populaire et socialiste, et met en place des « comités révolutionnaires » en lieu et place de partis. Dans le même temps, il réforme le système pénal en créant des « tribunaux du peuple », et met en place un système répressif. Kadhafi considérant que tout individu qui formerait un parti politique doit être puni de la peine de mort, des dizaines de pendaisons et de mutilations d'opposants, souvent retransmises à la télévision, ont lieu. Il réprime également ceux qu'il estime être des « ennemis de la révolution » (universitaires, étudiants, Frères musulmans, journalistes)[14].
Terrorisme et durcissement du régime
Mouammar Kadhafi est accusé de soutenir de nombreuses organisations armées menant des actes de terrorisme, dont l'IRA, l'ETA et les Brigades rouges[5]. Il fournit, entre autres, 300 tonnes d'armes et d'explosifs aux indépendantistes nord-irlandais et une autre cargaison de 120 tonnes, interceptée par la France[15]. Il est alors mis au ban de la « communauté internationale », en particulier en Occident, et est de plus accusé d'être directement impliqué dans plusieurs actes terroristes : attentat dans une discothèque berlinoise fréquentée par des militaires américains en 1986 (mort de deux militaires américains et d'une femme turque), attentat de Lockerbie en Écosse contre un avion de ligne civil américain, qui explose en plein vol en 1988 (270 morts), ou encore attentat dans le désert nigérien contre un avion français, le vol 772 de la compagnie française UTA, reliant Brazzaville à Paris, en 1989 (170 morts)[5]. Le 15 avril 1986, à la suite de l'interception d'un message de l'ambassade libyenne à Berlin-Est suggérant l'implication du gouvernement libyen dans l'attentat à la bombe d'une discothèque de Berlin-Ouest, Ronald Reagan ordonne un raid de bombardement (opération El Dorado Canyon) contre Tripoli et Benghazi. Quarante-cinq militaires et fonctionnaires sont tués, ainsi que quinze civils, dont la fille adoptive de Kadhafi, Hannah[16]. Le colonel Kadhafi est blessé lors du bombardement de sa résidence, bien que le président du Conseil des ministres italien, Bettino Craxi, l'ait prévenu du raid[17]. Le Conseil de sécurité des Nations unies adopte, en 1992, la résolution 748, qui considère que la Libye est un État terroriste et qui permet la mise en place d'un embargo militaire et aérien.
Au niveau intérieur, dans les années 1980 et 1990, son régime se durcit. Un coup d'État manqué entraîne, en 1984, l'emprisonnement de milliers de personnes, dont beaucoup sont exécutées[14]. En 1989, un an après une large amnistie, une nouvelle vague de répression a lieu. Amnesty International dénonce « des arrestations de masse, des disparitions et la torture systématique »[14]. Dans les années 1990, une seconde tentative de coup d'État pousse Kadhafi à éliminer tout rival possible. En juin 1996, en deux jours, plus d'un millier de détenus sont tués dans la prison d'Abou Salim par les forces du régime ; ce massacre est reconnu par Mouammar Kadhafi en 2004[14]. Dans le même temps, l'embargo international et la chute du prix du baril de pétrole ont de lourdes conséquences économiques sur la Libye (hausse du chômage, baisse du pouvoir d'achat, dégradation des infrastructures…).
Retour à la voie diplomatique
À partir du milieu des années 1990, Mouammar Kadhafi œuvre pour que son pays retrouve une place moins inconfortable d'un point de vue diplomatique. Ainsi, en 1999, les agents des services secrets suspectés de l'attentat de Lockerbie sont livrés à la justice écossaise, ce qui provoque la suspension des sanctions de l'ONU envers le pays et le rétablissement des relations diplomatiques avec le Royaume-Uni. Par la suite, en 2003, la Libye reconnaît officiellement « la responsabilité de ses officiers » dans l'attentat de Lockerbie — ainsi que dans celui du vol 772 UTA —, et paie une indemnité de 2,16 milliards de dollars aux familles des 270 victimes de Lockerbie, ce qui a pour conséquence la levée définitive des sanctions de l'ONU et partielle des États-Unis à son encontre[5]. Le 23 février 2011, l'ancien ministre libyen de la Justice Mostafa Mohamad Abdeljalil, qui a démissionné de son poste deux jours plus tôt, affirme, concernant l'attentat de Lockerbie : « Kadhafi a donné personnellement ses instructions au Libyen Abdelbaset Ali Mohmed Al Megrahi », condamné par la justice écossaise pour sa participation à l'attentat de Lockerbie[18]. Parallèlement, Mouammar Kadhafi renonce à son programme d'armement nucléaire, et engage une lutte contre l'immigration clandestine vers l'Europe. Il instaure, par ailleurs, une politique d'assouplissement de la réglementation libyenne en matière économique, permettant l'ouverture du marché local aux entreprises internationales, ce qui aide à la survie du régime. Il parvient, par là même, à se rapprocher des puissances occidentales, et particulièrement de certains pays européens comme le Royaume-Uni, la France, l'Espagne et l'Italie. Ainsi, Kadhafi déclare désormais qu'il entend jouer un rôle majeur dans la pacification du monde et la création d'un Moyen-Orient sans armes de destruction massive.
En 2000, Kadhafi tente de convaincre les dirigeants des autres pays de créer des « États Unis d'Afrique ». Il considère, en effet, que c'est le meilleur moyen de développement pour le continent africain. Ce projet passerait par la création d'une monnaie unique et d'une seule armée formée de 2 000 000 de militaires. Kadhafi porte souvent un badge représentant l'Afrique sur son uniforme. En 2007, il se rend ainsi à Bamako, à Abidjan ou encore à Accra pour présenter son projet d'un gouvernement unique pour l'Afrique, un État fédéral. Le projet reste embryonnaire[19]. Le 2 février 2009, il est élu président de l'Union africaine pour un mandat d'un an, lors du sommet d'Addis-Abeba, en Éthiopie. Connu pour ses excentricités (entre autres, il reçoit et dort dans sa tente bédouine lors de déplacements à l'étranger, s'habille de façon extravagante, est protégé par une garde composée de quarante jeunes femmes), il demande alors à ses pairs d'être officiellement appelé « roi des rois traditionnels d'Afrique »[20].
Plusieurs prisonniers politiques sont libérés en Libye dans les années 2000, et des visites d'ONG dans les prisons sont autorisées. Dans le cadre d'un programme de réconciliation nationale de la Fondation Kadhafi, plus de 700 individus liés à des groupes islamistes sont libérés[14]. Cinq infirmières et un médecin anesthésiste bulgares, détenus et torturés pendant plusieurs années par les autorités libyennes pour la prétendue contamination d'enfants libyens par le virus du sida, sont libérés en 2007. Malgré tout, d'après Human Rights Watch, la torture et les procès expéditifs continuent[14].
En 2008, à la suite de l'arrestation d'Hannibal Kadhafi par la police genevoise pour cause de maltraitance et d'actes de torture sur ses propres employés dans un palace genevois, une crise diplomatique éclate entre la Libye et la Suisse. Deux citoyens sont retenus en otages par Tripoli depuis l'été 2008. Les deux conseillers fédéraux Suisses Micheline Calmy-Rey (affaires extérieures) et Hans-Rudolf Merz (finances) interviennent personnellement en vue d'obtenir la libération des otages, et vont voir le colonel Kadhafi à Tripoli à plusieurs reprises. Dans un premier temps, seul un otage est libéré, l'autre étant conduit en prison par la police libyenne pour une durée de quatre mois[21]. Ce dernier est finalement libéré de prison le 10 juin 2010, et peut quitter le pays trois jours plus tard en échange d'une rançon de 1,5 million de francs suisses[22]. Le 25 février 2010, à la suite de l'initiative populaire « Contre la construction de minarets », Mouammar Kadhafi appelle au djihad contre la Suisse[23].
Guerre civile de 2011
Articles détaillés : Guerre civile libyenne de 2011, Intervention militaire de 2011 en Libye et Printemps arabe.En février 2011, en plein Printemps arabe, il doit faire face à une révolte populaire, qu'il tente de réprimer par des tirs à balles réelles et des bombardements aériens sur la population. Mouammar Kadhafi est alors le chef d'État ou de gouvernement le plus ancien du monde arabe[24].
Le 22 février, Mouammar Kadhafi prononce un discours télévisé dans lequel il promet de réprimer la contestation, qu'il attribue à des « mercenaires », des « bandes criminelles » et des « drogués », et se dit prêt à mourir en « martyr »[25]. Malgré tout, le mouvement de contestation prend de l'ampleur, et se mue en véritable révolte armée. Kadhafi est lâché par une partie de l'armée, par plusieurs membres de son gouvernement et par des diplomates en poste à l'étranger, qui demandent sa condamnation par la Cour pénale internationale en raison de la répression sanglante, son pouvoir s'effrite de jour en jour, au point de ne plus guère contrôler, le 26 février, que Tripoli, la capitale libyenne, Syrte, sa ville natale, et Sebha, capitale du Fezzan, fief de la tribu Kadhafa, dont il est issu. Alors que la capitale libyenne est encerclée et que certains quartiers sont aux mains des insurgés, Mouammar Kadhafi déclare, lors d'une interview accordée à la chaîne américaine ABC le 28 février 2011 : « Mon peuple m'adore. Il mourrait pour me protéger »[26].
Le 3 mars 2011, la Cour pénale internationale annonce l'ouverture d'une enquête visant Mouammar Kadhafi et son entourage : « Il s'agit de Mouammar Kadhafi, de son cercle rapproché y compris ses fils, qui avaient un pouvoir de facto […] Mais nous avons également identifié des individus qui jouissent d'une autorité formelle »[27]. Interpol, le même jour, diffuse une alerte orange à l'encontre de Mouammar Kadhafi et quinze membres de son entourage[28].
Au mois de mars, les troupes fidèles à Kadhafi réalisent une contre-offensive, et reprennent une grande partie des territoires conquis par l'insurrection[29],[30]. Le 17 mars 2011, le Conseil de sécurité de l'ONU autorise le recours à la force contre les troupes gouvernementales libyennes[31]. Kadhafi annonce alors un cessez-le-feu, mais celui-ci n'est pas respecté. Le 19 mars, les opérations militaires devant créer une zone d'exclusion aérienne au dessus du territoire libyen débutent, et amènent à une internationalisation du conflit.
Le 16 mai 2011, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) demande un mandat d'arrêt contre le leader libyen, Mouammar Kadhafi, ainsi qu'un de ses fils, pour crime contre l'humanité[32]. Ce mandat est accepté par les juges, et lancé le 27 juin 2011[33].
Devant la progression des rebelles, qu'il appelle les « rats », Mouammar Kadhafi assure, à plusieurs reprises, qu'il ne quittera jamais son pays. Des pourparlers secrets entre les rebelles et les représentants du régime auraient eu lieu, notamment à Djerba (en Tunisie) en août 2011.
Le 14 août 2011, les rebelles font une grande avancée dans l'Ouest. Alors que Mouammar Kadhafi exhorte ses partisans à « marcher par millions » pour « libérer les villes détruites », les rebelles encerclent la capitale, Tripoli, dans laquelle ils pénètrent le 21 août. Introuvable, Kadhafi déclare dans un message sonore avoir effectué un retrait « tactique » de sa résidence de Bab al-Azizia, et appelle ses partisans à poursuivre le combat[34]. Son pouvoir est, dès lors, fortement réduit, puisqu'il n'est plus que le « guide » d'une Jamahiriya dont les représentants officiels sont soit en fuite, soit emprisonnés. Le Conseil national de transition (CNT), présidé par Moustafa Abdel Jalil, prend de facto les rênes du pouvoir de la nouvelle République libyenne.
Le 24 août 2011, le CNT annonce que des hommes d'affaires offrent deux millions de dinars libyens (soit 1,2 million d'euros) à qui ramènera le colonel Kadhafi mort ou vif[35]. La prime est assortie d'une amnistie et d'un pardon général, quels que soient les crimes commis, si le colonel Kadhafi est arrêté ou tué par l'un de ses proches.
Décès
Article détaillé : Mort de Mouammar Kadhafi.Le 20 octobre 2011, alors qu'il quitte Syrte, dernier bastion tenu par ses partisans, son convoi est arrêté par des tirs de missiles d'un drone Predator américain et par un bombardement d'un Mirage 2000D français. Selon les premières informations, il est capturé vivant[36], mais sa mort est finalement annoncée par un haut responsable militaire du CNT un peu plus tard dans la journée[37]. Selon Mahmoud Jibril, numéro deux du CNT, il a été mortellement blessé lors d'échanges de tirs[38]. Les corps de Mouammar Kadhafi et de son fils Moatassem, qui semble également avoir été abattu, sont exposés le 21 octobre à Misrata[39].
Dans son ensemble, la communauté internationale salue la mort de Kadhafi[40]. Mais le déroulement exact des circonstances de son décès, qui reste confus, donne lieu à une polémique, ce qui conduit le président du CNT, Moustafa Abdel Jalil, à annoncer le 24 octobre l'ouverture d'une enquête sur sa mort[41].
Le 25 octobre 2011, à l'aube, Mouammar Kadhafi et son fils Moatassem sont inhumés dans le désert libyen, dans un lieu tenu secret[42].
Famille
Kadhafi a eu neuf enfants (dont une fille adoptive) issus de deux mariages différents :
- Avec Fatiha al-Nuri (divorcé en 1970)
- Mohamed Kadhafi (né en 1970), fils unique du premier mariage, président de l'organisme libyen des télécommunications et du Comité olympique national libyen[43]. Il est réfugié en Algérie depuis le 29 août 2011[44].
- Avec Safia Farkash (1970), dont la sœur épouse Abdallah Senoussi (1949-2011). Actuellement réfugié en Algérie depuis le 29 août 2011[44].
- Saïf al-Islam Kadhafi (Saïf al-Islam signifie « sabre de l'Islam »), né le 25 juin 1972 : architecte-urbaniste de profession, il est le plus impliqué sur le plan politique. Il est surtout connu pour son rôle dans l'indemnisation des familles des victimes de l'attentat de Lockerbie et du DC-10 d'UTA abattu par des Libyens en 1989. Il dirige la Fondation internationale Kadhafi pour la charité et le développement (FKD)[45]. Le 20 octobre, peu après la mort de son père, un ministre du CNT annonce que Saïf al-Islam Kadhafi, blessé et capturé, est détenu dans un hôpital[46] mais le lendemain, le fils de l'ancien dirigeant est donné en fuite vers le Niger[47]. Il est finalement arrêté par le gouvernement libyen le 19 novembre 2011[48].
- Saadi Kadhafi, né le 25 mai 1973 : ancien footballeur professionnel (attaquant du club de Pérouse, Italie, condamné en 2003 pour dopage[49]). Actionnaire de la Juventus, il a réussi en 2002 à faire jouer la Supercoupe d'Italie à Tripoli (capitale de la Libye)[43]. Il a fait carrière dans l'armée et a ensuite dirigé une unité d'élite. Il est, depuis septembre 2011, réfugié au Niger, qui lui a accordé l'asile[50].
- Moatassem Billah Kadhafi (1975-2011) : colonel de l'armée, il préside en 2007 le conseil de sécurité nationale dont il est écarté ensuite. Il y retourne en tant que conseiller en 2010. Le 20 octobre 2011, son cadavre est retrouvé à Syrte, mais les circonstances de sa mort restent floues. D'aucuns évoquent qu'il a été capturé vivant, puis abattu. La famille a demandé une enquête[51].
- Hannibal Kadhafi, né en 1976 : médecin et militaire de formation, il fait régulièrement parler de lui dans la rubrique des faits divers des journaux occidentaux[43]. Actuellement réfugié en Algérie depuis le 29 août 2011[44].
- Aïcha Kadhafi : fille du colonel, née en 1976, elle est avocate et préside la fondation caritative Waatassimou[43]. Surnommée « la Claudia Schiffer du désert » dans la presse italienne[52]. Actuellement réfugié en Algérie depuis le 29 août 2011[44].
- Saïf al-Arab Kadhafi (Saïf al-Arab signifie « sabre des Arabes »), (1982-2011). Il est tué à Tripoli le soir du 30 avril 2011 avec plusieurs proches et membres de la famille, après un raid de l'OTAN, information toutefois démentie par Berlusconi[53],[54],[55],[56],[57].
- Khamis Kadhafi (1983-2011), son plus jeune fils, commande une unité des forces spéciales[58]. Il est tué dans les combats à Tarhouna, fin août 2011, et enterré sur place[59].
- Hana Kadhafi (née le 11 novembre 1985), présentée comme fille adoptive du colonel Kadhafi, prétendument tuée à l'âge de deux ans lors d'un raid américain nommé opération El Dorado Canyon contre Tripoli et Benghazi en représailles à l'attentat dans une boîte de nuit de Berlin fréquentée par des militaires américains, qui a coûté la vie à une femme de nationalité turque et à deux soldats américains. Aucun journaliste n'a jamais entendu parler de celle-ci avant ce bombardement[60],[61]. Cependant, au mois d'août 2011, le quotidien allemand Die Welt révèle dans un article repris en anglais par Worldcrunch que Hannah Kadhafi serait en fait toujours vivante. Âgée désormais d'une vingtaine d'années, la jeune fille aurait passé quelques années à Londres, puis aurait étudié à la faculté de médecine de Tripoli. Devenue médecin, elle occuperait aujourd'hui un poste au ministère de la Santé dans la capitale libyenne[62],[63],[64],[65]. Le 28 août 2011, lors de l’émission Mise au point, diffusée sur la télévision suisse romande, l’hypothèse — selon laquelle Hannah Kadhafi serait encore en vie — est implicitement évoquée par Faiza Mazeg[66], qui parle d’un « secret de Polichinelle »[16].
Écriture de son nom
Articles connexes : Écriture de l'arabe et Transcription des langues sémitiques.Le nom arabe de Mouammar Kadhafi est معمر القذافي. Comme il n'existe pas de romanisation complète et officielle pour l'arabe, on rencontre 112 façons différentes de l'écrire en français[67].
Bien que l'orthographe d'un mot en arabe ne varie pas, sa prononciation peut changer suivant les différentes dialectes arabes, suggérant des romanisations différentes. En arabe littéral, le nom مُعَمَّر القَذَّافِي peut se prononcer /muˈʕammaru lqaðˈðaːfiː/. Les consonnes géminées peuvent être simplifiées. En arabe libyen, /q/ (ق) est remplacé par [g], et /ð/ (ذ) est remplacé par [d]. La voyelle [u] alterne souvent avec [o] dans la prononciation d'autres régions. Ainsi, /muˈʕammar alqaðˈðaːfiː/ est généralement prononcé en arabe libyen [muˈʕæmmɑrˤ əlɡædˈdæːfi]. L'article défini al- (ال) est souvent omis.
Le schéma ci-dessous représente les différentes formes possibles pour l'orthographe de son nom :
Toutes ces formes ne respectent pas les standards les plus fréquents et toutes ne sont d'ailleurs pas possibles, certaines alternatives étant plus fréquemment combinées avec d'autres, voires impossibles avec certaines (par exemple, la simplification de la gémination /mm/ impliques généralement la simplification de /aː/).
Idéologie
Il a écrit Le Livre vert (en référence au Petit Livre rouge écrit par Mao Zedong), manifeste politique dans lequel il developpe la « troisième théorie universelle ». Il y explique de manière succincte ses solutions aux problèmes posés par la démocratie et l'économie. Il y fait l'apologie de la démocratie directe, y ôte toute légitimité aux autorités religieuses et y prône l'exclusion de l'usage des hadiths et de la sunna pour le droit musulman, consacrant ainsi le Coran comme son unique source[68]. En plus de provoquer un conflit entre lui et les milieux traditionalistes libyens, ces pensées lui ont valu d'être déclaré « hérétique » (kafir) par les oulémas d'al-Azhar et d'Arabie saoudite[68]. Il est adhérent au mouvement religieux Sénoussi[69].
Kadhafi a une conception essentialiste de la femme[70], plus récemment il se focalise sur les pays arabes et à majorité musulmane[71]. Son interprétation personnelle de l'islam, contraire à la vision traditionnelle, le pousse à interdire, sauf dans des cas particuliers, la polygamie, et à permettre la création d'une académie militaire pour femmes, dont la première classe est promue en 1983[70]. Il entretient une garde personnelle constituée exclusivement de femmes, ses « Amazones ». Certains progrès existent, tels que la condamnation des mariages arrangés et la possibilité d'accéder à l'éducation pour les femmes[69]. Selon certains témoignages, il n'aurait cependant pas appliqué ces préceptes à lui-même : à sa mort, des femmes l'accusent d'avoir disposé d'un grand nombre d'esclaves sexuelles enlevées à leur famille, dont les « Amazones »[72],[73],[74]. En 2007, la journaliste Memona Hintermann-Afféjee l'avait également accusé d'avoir tenté de la violer lors d'une interview en 1984[75].
Kadhafi reprit à son compte la portée nationaliste du nassérisme en souhaitant d'abord la réunification du monde arabe, fragmenté par les colonisations occidentales, selon lui. François Burgat estime qu'il est préoccupé et obsédé de « laver l'affront de la présence coloniale en terre arabe ». De ce fait, il a toujours jugé illégitime l'existence d'Israël, dans laquelle il voit une réminiscence des occupations coloniales.
À la suite des échecs successifs de toutes les formes d'associations qu'il a proposées (avec l'Égypte, la Syrie ou la Tunisie), Kadhafi prône le concept encore plus ambitieux d'Union africaine (UA) sous forme fédérale. Élu par ses pairs à la tête de l'organisation panafricaine, il s'est aussitôt autoproclamé « roi des rois traditionnels d'Afrique ».
Selon l'organisation Human Rights Watch, « des dizaines de personnes se trouvent en prison pour s'être livrées à une activité politique pacifique, et certaines ont « disparu ». La loi 71 interdit toute activité politique indépendante, et les contrevenants sont passibles de la peine de mort ». « Au fil des ans, les autorités libyennes ont emprisonné des centaines de personnes pour violation de cette loi, et certaines ont été condamnées à mort »[76].
Fortune personnelle
Mouammar Kadhafi était un des hommes les plus riches au monde. Sa fortune, provenant de l'extraction du pétrole et du gaz, était estimée à 144 milliards d'euros.
Il les aurait sortis de Libye durant les trente années précédant sa chute[77]. L'administration américaine a découvert que le régime libyen possédait près de 27 milliards d'euros sur des comptes et des investissements aux États-Unis ; ils ont depuis été gelés. En Europe, prés de 27 milliards d'euros ont été saisis par les gouvernements français, italien, britannique et allemand[77]. Kadhafi investissait dans des entreprises comme Total, Alsthom, Fiat, dans les secteurs des médias (Financial Time) ou du sport (Juventus de Turin). En France, il possède, par exemple, le bâtiment parisien qui abrite la Fnac des Ternes dans le 17e arrondissement de Paris[78].
Plusieurs enquêtes menées par des responsables américains, européens et libyens ont révélé que Kadhafi investissait massivement dans de nombreux pays du Moyen-Orient et de l'Asie du Sud-Est. La plupart de ces fonds étaient placés dans des institutions gouvernementales libyennes comme la Banque Centrale de Libye, la Compagnie pétrolière libyenne, la Banque extérieure de Libye, ainsi que des compagnies d'investissements telle que la Libya African Investment Portfolio[77].
Bibliographie
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Notes et références
- Également retranscrit Kadafi, Kaddafi, al-Kadhafi, Algathafi, al-Gaddafi, Al Qadafi, Qadhafi, Gaddafi, Gueddafi, Ghatafi, Gheddafi, ou El-Gueddafi.
- Translittération ALA-LC 1997
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- Genève depuis 42 ans, est la fille de l’ex-Premier ministre lié à l’ancien régime ayant prévalu jusqu’au coup d’État du 1er septembre 1969. En outre, l’ex-mari de Faiza Mazeg était le bras droit du roi Idris Ier. Faiza Mazeg, exilée à
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- Kadhafi en France, site Internet d'Human Rights Watch.
- http://www.lejdd.fr/International/Afrique/Actualite/Kadhafi-aurait-fait-sortir-pres-de-144-milliards-d-euros-de-Libye-410863/?from=headlines
- http://www.menly.fr/buzz/news/34132-mort-de-kadhafi-une-fortune-de-plusieurs-milliards/
Voir aussi
Articles connexes
- Le Livre vert
- Fondation internationale Kadhafi pour la charité et le développement
- Prix Kadhafi des droits de l'homme
- Sommet de la Ligue arabe 2005
- Guerre civile libyenne de 2011
Liens externes
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