- Politique de la Libye sous Mouammar Kadhafi
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Article principal : Jamahiriya arabe libyenne.
Sous le régime de Mouammar Kadhafi (1969-2011), la Libye connaît plusieurs évolutions politiques sensibles quant à sa forme de gouvernement, la période ayant pour fil directeur la présence au pouvoir ininterrompue de Kadhafi, en tant que dirigeant de droit, puis de fait.
Après le renversement en septembre 1969 de la monarchie libyenne, la Libye, rebaptisée République arabe libyenne, est gouvernée selon les principes du nationalisme arabe et du socialisme arabe nassériste. L'exécutif est composé des douze membres du Conseil de commandement de la révolution (CCR), Kadhafi étant chef de l'État en tant que président du CCR. En 1971 est créé un parti unique, l'Union socialiste arabe, sur le modèle égyptien nassériste.
A partir de 1977, le système politique de la Libye subit une évolution sensible et se base officiellement sur Le Livre vert de Kadhafi, qui combine des théories socialistes et islamiques et rejette la démocratie parlementaire ainsi que les partis politiques. La Libye applique officiellement la démocratie directe sous le contrôle théorique des « masses populaires » et devient une Jamahiriya, néologisme arabe signifiant « État des masses ». Le Conseil de commandement de la révolution est remplacé par le Secrétariat général du Congrès général du peuple, ce dernier corps étant l'assemblée législative libyenne. Le rôle de chef de l'État revient au Secrétaire général du CGP.
A partir de 1979, Mouammar Kadhafi cesse d'exercer la fonction de Secrétaire général du Congrès général du peuple, et n'exerce plus aucune fonction définie d'un point de vue constitutionnel. Dans les faits, il demeure aux commandes de l'État sans que ses pouvoirs ne soient encadrés par aucun texte; à partir de 1980, il utilise le titre de « Guide de la révolution ». La Libye est dotée d’une structure gouvernementale dualiste. Le secteur révolutionnaire comprend le guide de la révolution, Mouammar Kadhafi, et les comités révolutionnaires. De facto, Kadhafi exerce un pouvoir presque sans limites sur le gouvernement. Le leader de la révolution n’est pas élu et ne peut pas être destitué légalement. Le secteur révolutionnaire définit le pouvoir de décision du second secteur, le secteur de la Jamahiriya. Le secteur de la Jamahiriya constitue le secteur législatif du gouvernement. Il est divisé en trois niveaux, communal, régional et national. À chaque corps législatif correspond un comité exécutif.
L'article 2 de la constitution de 1977 (dite Déclaration sur l'avènement du Pouvoir du Peuple) stipule que « Le Saint Coran est la Constitution de la Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste » et l'article 3, « La démocratie populaire directe est la base du système politique de la Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste, dans laquelle le pouvoir est entre les mains du peuple seul »[1].
Le système connaît avec le temps diverses réformes, parfois présentées sans souci apparent de cohérence entre elles. Le chercheur Antoine Basbous résume la stratégie de politique intérieure de Kadhafi par une volonté d'« instaurer un maquis institutionnel indéchiffrable pour l'étranger et lui permettant de verrouiller le système et de privatiser pour l'éternité la Libye à son seul profit »[2].
Sommaire
Le Colonel Kadhafi au pouvoir
En 1969, après le renversement de la monarchie, la Libye adopta une nouvelle constitution se réclamant du socialisme et de l'islam, et le nom officiel de République arabe libyenne[3]. En 1971, un parti unique, l'Union socialiste arabe, calqué sur le parti égyptien du même nom, fut créé[4]. En 1973, quatre ans après la prise du pouvoir, le colonel Kadhafi annonça le début d’une révolution culturelle dans les écoles, les entreprises, les industries et les institutions publiques. En 1975, l'Union socialiste arabe cessa d'exister[5]. Avec douze de ses officiers, formant le Conseil de la révolution, Kadhafi réorganisa l’entier du système politique, social et économique de la Libye. Le 3 mars 1977, Kadhafi proclama la Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste et investit, du moins théoriquement, le Congrès général du peuple (CGP) au pouvoir. Le système de gouvernement libyen, la Jamahiriya (soit littéralement l'État des masses), est officiellement basé sur un principe de démocratie directe, sans aucun parti politique autorisé. Kadhafi resta cependant de facto le chef de l’État et secrétaire général du CGP jusqu’à sa démission en 1980. Bien que n’étant plus investi d’une fonction particulière autre que son titre, officiellement honorifique, de « Guide de la révolution », il contrôle toujours tous les aspects du gouvernement libyen à travers les comités révolutionnaires.
Au cours des années 1980, des conflits germèrent entre le gouvernement, la hiérarchie militaire et les comités révolutionnaires. En mai 1984, un coup d’État manqué, apparemment préparé par des Libyens en exil bénéficiant de soutiens internes, aboutit à une brève période de terreur avec l’emprisonnement de milliers de personnes et l’exécution d’un nombre indéterminé d’entre elles. Kadhafi eut recours aux comités révolutionnaires pour rechercher des opposants à l’intérieur du système, ce qui accéléra la montée en grade des éléments les plus radicaux.
En 1988, devant l’insatisfaction grandissante face à des pénuries de biens de consommation et à des défaites dans la guerre contre le Tchad, Kadhafi limita le pouvoir des comités révolutionnaires et entreprit quelques réformes. Le régime libéra de nombreux prisonniers politiques et assouplit les restrictions de sortie du territoire pour les nationaux. L’économie privée fut réhabilitée. Kadhafi commença également à traquer les mouvement islamistes, voyant le fondamentalisme comme un relais potentiel pour les opposants au régime.
Les dissensions continuèrent et les forces de sécurités lancèrent une attaque préventive contre des militaires soupçonnés de préparer un coup d’État et parmi les Warfallah en octobre 1993. De nombreuses arrestations et exécutions s’ensuivirent, accompagnées d’«aveux» publics d’opposants. L’armée, qui constituait auparavant le plus proche allié de Kadhafi, était devenue une menace. Il commença une série de purges, éliminant ses rivaux pour les remplacer par ses partisans.
Le 22 août 2011, les insurgés libyens occupent la capitale Tripoli et recherchent Mouammar Kadhafi.
Pouvoir exécutif
Tous les quatre ans, Les membres des congrès locaux élisent par acclamation un leader et un secrétaire auprès des comités populaires. Les leaders des congrès locaux représentent ces derniers au congrès du niveau supérieur, avec un mandat impératif. Les membres du Congrès général du peuple élisent les membres du Comité général du peuple par acclamation, lors du meeting annuel. Dans les faits, seuls les membres approuvés par le commandement révolutionnaire sont élus et le gouvernement est tenu de s’en tenir strictement aux directives du commandement, qui dispose d’un droit de veto absolu.
Pouvoir législatif
Le Congrès général du peuple est constitué de 2'700 représentants. Il interagit avec le Comité général du peuple, dont les membres sont les secrétaires des ministres et qui fait office d’intermédiaire entre le peuple et le pouvoir. Le pouvoir législatif etait avant la revolte de 2011.
Partis politiques et élections
Les partis politiques sont interdits depuis 1977. Les ONG sont autorisées mais leur activité doit être jugée conforme aux buts de la révolution. En comparaison avec les pays voisins, le nombre d’ONG établies en Libye est faible. Les syndicats sont inexistants mais de nombreuses associations professionnelles sont intégrées à la structure étatique comme un troisième pilier aux côtés du Congrès du peuple et des comités. Elles élisent des délégués au Congrès, avec un mandat représentatif.
Pouvoir judiciaire
Le système judiciaire libyen comprend quatre niveaux: des cours sommaires, qui traitent de cas de peu d’importance, les cours de première instance, les cours d’appel et la Cour suprême qui constitue la dernière instance de recours. Le Congrès général populaire nomme les juges de la Cour suprême. Deux types de tribunaux spéciaux, les cours révolutionnaires et les cours militaires, évoluent en dehors du système ordinaire et jugent des délits politiques et crimes contre l’État. L’ensemble des tribunaux applique en principe la Charia.
Armée et forces de l’ordre
Article détaillé : Forces armées libyennes.L'Allemagne aurait participé à la formation de forces de sécurité libyennes à Tripoli entre fin 2005 et fin 2006. En effet, l'ancien chancelier fédéral Gerhard Schröder aurait envoyé une trentaine de policiers, soldats et agents des unités antiterroristes GSG-9 à Tripoli, en échange de sa médiation dans la libération des Wallert, une famille allemande retenue en otage sur l'île philippine de Jolo en 2000[6].
Proche de l'île de Lampedusa, la Libye sert en outre de fort-avancé de l'Espace Schengen concernant la politique d'immigration de l'UE [7]. L'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a d'ailleurs ouvert un bureau d'assistance aux immigrés, en provenance d'Afrique noire, en Libye[8].
Droits de l'homme
Article détaillé : Droits de l'homme en Libye.Relations étrangères
Article détaillé : Relations étrangères de la Libye.Références
- Déclaration sur l'avènement du Pouvoir du Peuple, site de l'université de Perpignan
- Antoine Basbous, Le Tsunami arabe, Fayard, 2011, page 200
- Proclamation constitutionnelle de 1969, site de l'université de Perpignan]
- René Otayek, La politique africaine de la Libye: 1969-1985, Karthala, 1986, page 19
- Moncef Djaziri , État et société en Libye: islam, politique et modernité, L'Harmattan, 1996, pages 148, 160-163
- Schröder aurait conclu un accord secret avec Kadhafi, Le Figaro, 7 avril 2008 Cécile de Corbière,
- Un arrière-goût bulgare; Europe / Libye : négocier l’immigration, Vacarme n°41, automne 2007 Claire Rodier,
- 11 mars - Libye : L’OIM ouvre un bureau d'assistance aux immigrés, Radio des Nations unies
Voir aussi
- Affaire des infirmières bulgares
- Incident du Golfe de Syrte (1989)
- Attentat de Lockerbie (1988)
- Histoire de la Libye
- Politique de l'immigration de l'Union européenne
- Guerre civile libyenne de 2011
Bibliographie
- (en) Luis Martinez, The Libyan paradox (trad. John King), Columbia University Press, New York ; en association avec le Centre d'études et de recherches internationales, Paris, 2007, 182 p. (ISBN 978-0-231-70021-4)
- (en) Yehudit Ronen, Qaddafi’s Libya in world politics, Lynne Rienner Publishers, Boulder, Colo. ; London, 2008, 243 p. (ISBN 978-1-58826-585-2)
- (en) Ronald Bruce St John, Libya : continuity and change, Oxon, Abingdon ; Routledge, New York, 2011, 178 p. (ISBN 978-0-415-77977-7)
- (en) Dirk Vandewalle (dir.), Libya since 1969 : Qadhafi’s revolution revisited, Palgrave Macmillan, Basingstoke ; New York, 2008, 267 p. (ISBN 978-0-230-60765-1)
- (fr) Moncef Djaziri, État et société en Libye : Islam, politique et modernité, L'Harmattan, Paris, 1996, 284 p. (ISBN 2-7384-4111-4)
- (fr) El-Mehdi Dogman, Impact de la globalisation sur les fonctions de l'État en Libye, Université d'Amiens, 2008, 446 p. (thèse de Sociologie)
- (fr) Patrick Haimzadeh, Au cœur de la Libye de Kadhafi, JC Lattès, Paris, 2011, 186 p. (ISBN 978-2-7096-3785-5)
- (fr) René Naba, Libye : la révolution comme alibi, Éd. du Cygne, Paris, 2008, 107 p. (ISBN 978-2-84924-094-6)
- (fr) Moncef Ouannes, Militaires, élites et modernisation dans la Libye contemporaine, L'Harmattan, Paris, 2009, 446 p. (ISBN 978-2-296-09113-9)
Fonction Nom Depuis Guide de la révolution Mouammar Kadhafi 8 septembre 1969 Secrétaire général du Congrès général du peuple (chef de l'État) Mohamed Abou el-Kassim Zouaï 26 janvier 2010 Secrétaire du Comité général du peuple (chef du gouvernement) Baghdadi Mahmudi 5 mars 2006 États non reconnus internationalement République arabe sahraouie démocratique • Somaliland Dépendances et territoires à souveraineté spéciale * Îles Canaries / Ceuta / Melilla / Plazas de soberanía (Espagne) - Madère (Portugal)
- Mayotte / La Réunion (France)
- Sainte-Hélène, Ascension et Tristan da Cunha (Royaume-Uni)
- Sahara occidental
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