- Accusation de crime rituel contre les Juifs
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L'accusation de crime rituel à l'encontre des Juifs (hébreu : עלילת דם ’alilat dam « accusation de sang ») est une allégation antijuive ou antisémite selon laquelle les Juifs assassineraient des enfants non juifs à des fins rituelles (pour boire leur sang et confectionner des pains azymes (matzot) pour la Pâque) ou non.
Il s'agit de l'un des fantasmes antijuifs les plus anciens et les plus tenaces de l'Histoire : il y aurait en effet eu plus de 150 accusations et, probablement, des milliers de rumeurs[1].
Genèse d'une accusation
Le premier exemple connu d'accusation de ce type précède le christianisme, puisqu'il est fourni, selon Flavius Josèphe, par Apion, un écrivain égyptien hellénisé ayant vécu au Ier siècle.
Toutefois, et bien que le sénateur romain Cassiodore ait recommandé la traduction des œuvres de Josèphe en latin au VIe siècle, l'accusation ne fut jamais réitérée avant le XIIe siècle, y compris par les plus âpres adversaires du judaïsme, dont Agobard, l'évêque de Lyon (IXe siècle), le moine Rudolphe de Mayence (qui invectiva les Juifs en 1146, les qualifiant d'ennemis de la religion chrétienne), ni par Bernard de Clairvaux (1091-1153)[2] qui a pour sa part pris leur défense[3].
L'affaire de Guillaume de Norwich est le premier cas connu d'accusation de crime rituel lancée par un moine chrétien en 1144. Elle ne décrit que la torture et l'agonie de l'enfant, suggérant en outre que la mort de l'enfant n'a été recherchée que dans un seul but de vengeance. Il n'y est fait nulle mention du recueil du sang de Guillaume pour un dessein quelconque.
Après cette première affaire, les accusations se multiplient dans la Chrétienté. De nombreuses disparitions inexpliquées d'enfants et de nombreux meurtres sont expliqués par ce biais. Une explication théologique est même avancée par Thomas de Cantimpré (vers 1260), affirmant que le sang des chrétiens, particulièrement celui des enfants, est convoité par les Juifs pour ses propriétés curatives[4]. Selon lui, « il est tout à fait certain que les Juifs de chaque province tirent au sort annuellement quelle est la communauté ou ville qui enverra le sang chrétien aux autres communautés. »
Thomas ajoute qu'il s'entretient fréquemment avec un « Juif très instruit, qui s'est depuis converti à la foi chrétienne », peut-être Nicolas Donin de La Rochelle, qui initia en 1240 une disputation sur le Talmud avec Yehiel de Paris, laquelle aboutit à la crémation en 1242 d'un nombre important de manuscrits du Talmud à Paris. Ce converti lui laisse entendre qu'« un des leurs, jouissant de la réputation de prophète, vers la fin de sa vie » leur a prédit que les hémorragies (dont les Juifs sont censés souffrir depuis le temps où ils ont interpellé Ponce Pilate, « Que son sang soit sur nous, et sur nos enfants » : Matthieu 27:25), ne peut être soulagé que par le sang chrétien (« solo sanguine christiano »). Selon Thomas de Cantimpré toujours, les Juifs, « toujours aveugles et impies », ont donc pris les paroles de leur « prophète » à la lettre et institué la coutume de répandre chaque année du sang chrétien dans chaque province afin de guérir de leur maladie. Cependant, ajoute Thomas, ils ont mal compris son propos : par « solo sanguine Christiano », le « prophète » n'entendait pas le sang de chaque chrétien, mais de celui de Jésus le Christ ; le seul vrai remède pour toutes les souffrances physiques et spirituelles des Juifs serait donc la conversion au christianisme.
En 1255, le chroniqueur du meurtre rituel du Petit saint Hugues de Lincoln fait mention de rites de magie noire pratiqués sur le cadavre post mortem. En 1475, le rituel sacrificiel prétendument pratiqué sur Simon de Trente comporte l'ensemble de ces éléments, décrits de façon précise.
Les victimes prétendues, voire dans certains cas imaginaires, du sacrifice humain, qu'elles soient enfant ou adulte, font souvent l'objet d'un culte local comme martyr et sont, dans un petit nombre de cas, canonisées.
Les Juifs ont tant à craindre de ces accusations et de leurs retombées, que le Golem de Prague, l'une des grandes figures des légendes juives d'Europe centrale, aurait été créé par le Maharal de Prague, afin de protéger les Juifs des ghettos d'Europe centrale. L'humour juif en garde également quelques traces amères[5].
Les tenants et aboutissants des accusations évoluèrent dans le temps, et si les premières étaient motivées par le zèle religieux à châtier les Juifs qui persistaient dans leur « perfidie, » les suivantes se doublaient souvent d'une visée sous-jacente d'ordre politique.Au Moyen-Orient, ces accusations étaient largement inconnues, jusqu'à l'affaire de Damas en 1840. Elles se sont fortement répandues ensuite, dans les milieux arabes chrétiens et musulmans.
Bien que largement discréditées, ces accusations persistent de nos jours parmi une certaine frange de croyants chrétiens et musulmans.
Description d'un crime rituel supposé
Les comptes-rendus de crimes rituels supposés comportent des constantes remarquables, au point de constituer une véritable accumulation de stéréotypes :
- la victime est le plus souvent un jeune enfant, qui n'a pas encore atteint l'âge de la puberté. Il est enlevé (ou quelques fois acheté), conduit en un endroit secret mais connu de la communauté juive (la maison d'un membre important de la communauté juive, une synagogue, une cave, etc.), et y demeure séquestré jusqu'à sa mise à mort.
- la mise à mort survient au terme d'un cérémonial sacrificiel.
- le rite comprend des préparatifs, dont le rassemblement des différents participants (certains pouvant venir de très loin) et la fabrication ou la préparation d'instruments de torture.
- le meurtre se déroule généralement de nuit, assez souvent lors de la Pâque juive. La foule se rassemble au lieu du sacrifice et commence un simulacre de jugement. Sur demande du juge, l'enfant est présenté nu devant le tribunal et enchaîné. Pendant le "procès", des tortures sont infligées à l'enfant, dont beaucoup sont identiques à celles pratiquées par l'Inquisition sur les suspects d'hérésie. Après un long supplice, l'enfant à demi-mort est coiffé d'une couronne d'épines et crucifié.
- le sang s'écoulant des blessures de l'enfant est recueilli dans des coupes ou des verres. L'enfant est finalement tué par un coup de lance, d'épée ou de poignard dans le cœur.
- le corps de l'enfant est détaché de la croix et son corps caché. Quelques pratiques de magie noire peuvent être pratiquées sur lui.
Les faits derrière les fantasmes
À la question de savoir quel évènement a marqué les esprits chrétiens au point de ressortir une vieille fable qui n'avait jusque là trouvé aucun écho y compris parmi les détracteurs les plus incisifs du judaïsme, le professeur Israel Jacob Yuval de l'université hébraïque de Jérusalem répond dans un article publié en 1993, suggérant que les chrétiens pourraient avoir vu au XIIe siècle des Juifs égorger des enfants: les leurs propres, avant de mourir eux-mêmes en martyres, en sanctifiant le Nom divin lors des massacres des communautés rhénanes suite à l'appel à la première croisade. Cependant, si cette façon d'agir n'était pas inconnue de la tradition juive, les Zélotes s'étant suicidés en masse à Massada en 74 EC, et Rabbi Akiva ayant lui aussi choisi la voie du kiddoush hashem en 135 EC, tel que le perçoit le chroniqueur chrétien, « les Juifs, voyant les chrétiens s'armer en ennemis contre eux et leurs enfants, sans aucun respect pour la faiblesse de l'âge, s'armèrent de leur côté contre eux-mêmes, contre leurs coreligionnaires, contre leurs femmes et leurs enfants, leurs mères et leurs sœurs, et se massacrèrent entre eux. [...] Les mères [...] coupaient la gorge aux enfants qu'elles allaitaient, aimant mieux se détruire de leurs propres mains que de succomber sous les coups des incirconcis[6]. » Cependant, le professeur Yuval a estimé, en analysant les rapports chrétiens de ces évènements, qu'ils étaient déformés, et de nature à suggérer que si les Juifs peuvent tuer leurs propres enfants, ils peuvent aussi sans problème tuer des enfants chrétiens. Il rejette quant à lui la possibilité des histoires de crime rituel, en raison de la nature précaire de l'existence de la minorité juive dans l'Europe chrétienne, comme un pur fantasme chrétien[7],[8].
Le Shevet yehuda, une chronique du XVIe siècle rédigée en Italie par Salomon ibn Verga raconte une histoire permettant de comprendre les mécanismes d'accusation. Un jour, le roi de France reçut une plainte au sujet d'un juif accusé de crime rituel. On l'a torturé, il a avoué, tout est en ordre. Demandant à un ambassadeur musulman "si de telles choses arrivent dans son royaume", le roi s'attire alors une cinglante réplique : de "tels enfantillages sont dépourvus de tout fondement rationnel ou religieux". Le souverain s'emporte : "Mais quelle importance que ce soit irrationnel puisqu'il a avoué ?" Un témoin avance alors une autre explication au fait que les juifs ne s'adonnent pas aux crimes rituels en islam, explication dont la logique perverse est caractéristique de la passion antisémite : "Honorable seigneur, si cela n'arrive pas dans votre royaume, c'est que les juifs n'ont aucune raison d'en vouloir aux musulmans. Mais ils en ont pour en vouloir aux chrétiens, à cause de Jésus[9]".
Pratiques réelles du judaïsme concernant le sang et les sacrifices
Les descriptions de torture et de sacrifice humain dans les accusations antisémites de rituel sanglant vont à l'encontre de l'enseignement réel du judaïsme.
De la façon la plus évidente, les Dix Commandements dans la Torah interdisent le meurtre. De plus, l'utilisation du sang (humain ou autre) dans la cuisine est interdite par les règles alimentaires de la cacheroute. Le sang des animaux abattus ne doit pas être consommé. Il doit être vidé de l'animal et jeté aux ordures ou recouvert de sable (Lévitique 17:12-13). Selon Vayiqra, le Livre du Pentateuque qui décrit en détail les rituels sacrificiels, le sang obtenu des animaux sacrifiés peut uniquement être placé sur l'autel du Grand Temple de Jérusalem (qui n'existait déjà plus à l'époque des premières accusations de crimes rituels par les chrétiens). De plus, l'homme n'est pas considéré comme un animal cacher.
Alors que le sacrifice animal était une pratique du judaïsme ancien, le Tanakh (l'Ancien Testament) et l'Halakha (l'ensemble des lois et prescriptions religieuses) interdisent formellement le sacrifice humain et le considèrent comme l'un des péchés qui différencient les païens de Canaan des Hébreux (Deutéronome 12:31), (2 Rois 16:3). Les Juifs avaient l'interdiction de pratiquer de tels rituels et étaient punis en cas de transgression (Exode 34:15), (Lévitique 20:2), (Deutéronome 18:12), (Jérémie 7:31). En plus, la pureté rituelle interdisait à un prêtre de se trouver dans la même pièce qu'un cadavre humain (Lévitique 21:11).
Les partisans des accusations de crimes rituels, comme le fasciste britannique Arnold Leese (auteur de : "Jewish Ritual Murder" 1938) et ses sympathisants contemporains, prétendent que la preuve des crimes rituels est contenue dans les textes sacrés. Le site néonazi www.JRBooksOnline.com mentionne le Psaume 137 comme preuve que les Juifs pratiquaient le meurtre rituel de jeunes enfants en citant de façon isolé le vers : « Heureux qui saisit tes petits enfants, et les écrase sur le roc ! ». Cependant, en se basant sur le contexte du reste du psaume 137, ce vers exprime un désir de vengeance à la suite des massacres babyloniens de Juifs. Si on reprend le vers dans son contexte, on comprend alors la véritable signification : « Fille de Babylone, la dévastée, heureux qui te rend la pareille, le mal que tu nous as fait ! Heureux qui saisit tes enfants, et les écrase sur le roc ! » (Psaumes 137:8).
Les accusations de crime rituel au cours de l'Histoire
Selon Walter Laqueur,
« En tout, environ 150 cas d'accusations de crimes rituels ont été répertoriés (sans compter les milliers de rumeurs) qui ont conduit à l'arrestation et au meurtre de Juifs, la plupart durant le Moyen Âge. Dans la majorité des cas, des Juifs étaient tués soit par la foule, soit après un procès précédé de tortures[1] »
Les exemples présentés ci-dessous ne reprennent que les accusations les plus connues, qui ont contribué à forger le mythe.
Premières mentions
On apprend de la polémique de Flavius Josèphe contre Apion[10] que celui-ci aurait accusé les Juifs d'engraisser chaque année un Grec dans leur temple, avant de le tuer afin de l'offrir en sacrifice, de manger ses organes internes et de prononcer un serment d'inimitié contre tous les Grecs. Cette accusation dans la Grèce ancienne, avant l'arrivée du christianisme, est généralement considérée comme un acte d'antisémitisme. Elle est peut-être la base de l'assertion d'un certain Démocrite selon laquelle les Juifs capturent un étranger tous les sept ans et l'offrent en sacrifice en lacérant sa chair[2].
Socrate le Scolastique rapporte dans son Historia Ecclesiastica (Constantinople, 415) que des Juifs ivres auraient accidentellement tué un enfant chrétien en le pendant à Pourim en dérision de Haman[2]. Selon une autre version, ils auraient attaché l'enfant sur une croix et flagellé à mort[11].
XIIe siècle
La première accusation de crime rituel contre les Juifs a lieu en Angleterre le 20 mars 1144, jour de la Pâque juive. Les Juifs de Norwich sont accusés à la fois de meurtre rituel et d'avoir saigné le jeune Guillaume après la découverte de son corps criblé de coups de couteau.
La légende se transforme en culte, Guillaume obtient le statut de martyr et des foules de pèlerins se pressent apportant richesse à l'église locale. En 1189, la députation juive venue pour le couronnement de Richard cœur de Lion est attaquée par la foule. Un pogrom s'ensuit à Londres et s'étend à travers toute l'Angleterre. Le 6 février 1190, tous les Juifs de Norwich sont massacrés dans leurs maisons, sauf quelques-uns qui réussissent à trouver refuge au château.
Un siècle plus tard (en 1290), les Juifs sont ensuite expulsés de toute l'Angleterre. Ils ne seront autorisés à y revenir qu'après 1655.En 1171, la ville de Blois en France, un valet chrétien affirme avoir vu un juif jeter le corps d'un enfant dans la Loire. Les autorités ne retrouvent aucun corps. Ceci n'empêche pas les quelques dizaines de juifs de Blois furent emprisonnés. Trente-huit juifs, dont dix-sept femmes, sont brûlés vifs (40 selon d'autres écrits)[12],[13].
XIIIe siècle
En 1250, un enfant de Saragosse, en Espagne, Dominique del Val, ou Dominguito, aurait été enlevé et crucifié par des Juifs. Son cœur arraché et jeté dans la rivière avec une hostie consacrée aurait permis d'empoisonner tous les chrétiens qui boiraient de son eau. Le Juif qui tentait de voler l'hostie fut trahi par les rayons lumineux qui s'échappaient du livre où il tentait de la cacher. Il dénonça ses complices, qui furent tous exécutés, et lui fut enchaîné à vie. Dominguito, canonisé, est fêté le 31 août.
En 1255 se produit le cas du Petit Saint-Hugues de Lincoln, qui nous est parvenu par la mention qu'en fait Chaucer: un enfant de 8 ans, dénommé Hugues, fils d'une femme nommée Béatrice, disparaît le 31 juillet à Lincoln. Son corps est retrouvé le 29 août, couvert d'immondices, dans une fosse ou un puits appartenant à un Juif dénommé Copin ou Koppin.
Suite à la promesse faite à Copin par le juge Jean de Lexington, de lui laisser la vie sauve, Copin confesse que le garçon a été crucifié par les Juifs, qui se sont rassemblés à Lincoln dans ce but. Le roi Henri III, arrivé à Lincoln 5 semaines plus tard, refuse de respecter la promesse faite par Jean de Lexington, et fait exécuter Copin. 99 juifs de Lincoln sont arrêtés et envoyés à Londres, où 18 d'entre eux sont exécutés. Les autres doivent leur pardon à l'intercession des franciscains[14].En 1267, le corps d'une fillette de sept ans est découvert à Pforzheim, pays de Bade, dans une rivière par un pécheur. Les Juifs sont suspectés. Lorsqu'ils sont conduits devant le corps de la fillette, on raconte que le sang commence à couler des blessures; conduits une seconde fois devant le corps, le visage de l'enfant se met à rougir, et ses deux bras s'élèvent. Outre ces "miracles", la fille d'une "méchante femme" témoigne que sa mère aurait vendu l'enfant aux Juifs.
Il n'y a pas eu de procès équitable et il est fort probable que la "méchante femme" ait été la meurtrière. Il est évident qu'un meurtre judiciaire a alors été commis à l'encontre des Juifs suite à cette accusation, de la façon dont est relaté cet évènement dans le "Memorbuch" de Nuremberg et les poèmes de la synagogue[15].En 1270, un autre "miracle" sera retenu comme preuve de la culpabilité des Juifs à Wissembourg (Alsace) : selon l'accusation, les Juifs auraient suspendu par les pieds un enfant (dont le corps a été retrouvé dans la Lauter), et ouvert chacune de ses artères afin de recueillir tout son sang. Les blessures de l'enfant auraient cependant continué à saigner pendant cinq jours.
En 1287, à Oberwesel (Allemagne), d'autres "miracles" accusent les Juifs: le corps du petit Werner, âgé de seize ans, aurait flotté sur le Rhin à contre-courant jusqu'à Bacharach, émettant un rayonnement, et doué de pouvoirs de guérison. Pour cette raison, les Juifs d'Oberwesel et de nombreuses autres localités voisines sont sévèrement persécutés pendant les années 1286-1289. L'empereur Rodolphe Ier à qui les Juifs ont fait appel pour leur protection, publie une proclamation publique affirmant qu'un grand tort a été commis à l'encontre des Juifs, et que le corps de Werner doit être brûlé et ses cendres dispersées au vent.
À Troyes, en Champagne, en 1288, les juifs sont accusés d'un crime rituel, pour sauver les juifs de la cité 15 membres d’une famille juive se sacrifient en s’accusant d’un délit qu’ils n’ont pas commis, ils sont brûlés[16].
Konrad Justinger dans sa "Chronique" de 1423 affirme qu'à Berne en 1294, les Juifs ont torturé et assassiné un enfant appelé Rodolphe. L'impossibilité historique de cette histoire largement accréditée fut démontrée par Jakob Stammler, un pasteur de Berne, en 1888[17].
Les accusations de meurtres rituels semblent avoir été si nombreuses au XIIIe siècle dans l'Europe chrétienne, bien que peu d'informations ne nous soient parvenues, que le Duc Boleslas V le Pudique en 1264, dans la Charte de Kalisz, chargée de protéger les Juifs de Pologne, ait été obligé de mentionner texto dans l'article 31 de cette charte::
Le Memorbuch de Nuremberg est écrit à la fin du XIIIe siècle. Il raconte entre autres qu'en 1285, la communauté juive de Munich a été accusée de crime rituel. 180 juifs, hommes, femmes, enfants furent alors enfermés dans la synagogue et brûlés avec[18]
« Il est strictement interdit d'accuser les Juifs de boire du sang humain. Cependant, si un Juif est accusé du meurtre d'un enfant chrétien, cette accusation devra être prouvée par le témoignage de trois Chrétiens et de trois Juifs avant que la condamnation du Juif puisse être prononcée. Néanmoins, si ces témoins prouvent l'innocence du Juif, le dénonciateur subira le châtiment qu'eut subi le Juif. »
XVe et XVIe siècles
À Rinn, près d'Innsbruck dans le Tyrol, un garçon du nom d'Andreas Oxner (connu aussi sous le nom d'Anderl von Rinn) aurait été acheté par des marchands juifs et assassiné avec cruauté dans une forêt proche de la cité en 1462; son sang aurait été soigneusement recueilli dans des bassines (l'accusation d'avoir vidé l'enfant de son sang n'est faite qu'au début du XVIIe siècle, lors de l'établissement du culte). L'inscription la plus ancienne dans l'église de Rinn, datant de 1575, est altérée par des embellissements fabuleux; comme, par exemple, que l'argent qui servit à acheter le garçon à son parrain s'était transformé en feuilles, ou qu'un lis avait fleuri sur sa tombe. Le culte continua jusqu'à ce qu'il soit officiellement interdit en 1994 par l'évêque d'Innsbruck[19].
En 1470, à Endingen en Alsace, les paroissiens découvrent lors de travaux dans l'ossuaire de l'église, le corps d'un homme et d'une femme ainsi que les restes de deux enfants décapités. Aussitôt, ils sont identifiés par la rumeur publique à une famille pauvre, disparue huit ans plus tôt après avoir été vue pour la dernière fois entrant dans la maison d'un Juif. Un procès pour crime rituel s'en suit. Malgré l'absence de preuves, les Juifs de la ville sont condamnés et exécutés[20].
En 1475, Simon de Trente, âgé de deux ans, disparaît. Son père affirme qu'il a été enlevé et assassiné par la communauté juive locale. Quinze Juifs sont condamnés à mort et brûlés. Simon fut canonisé par le pape Sixte V en 1588. Il est déchu de son statut de saint en 1965 par le pape Paul VI. Son meurtre est cependant toujours considéré par certains comme le fait d'une poignée d'extrémistes.
En 1491, Christophe ou Cristóbal de Tolède, un enfant chrétien de quatre ans dont deux Juifs et trois conversos (Juifs convertis au christianisme) sont accusées du meurtre. Au total, huit personnes sont exécutées. L'affaire du Saint Enfant de La Guardia est une première dans l'Inquisition espagnole, qui ne s'en prend plus uniquement à des convertis, mais aux Juifs eux-mêmes. On sait de nos jours qu'elle forgea ce procès de toute pièce afin de faciliter l'expulsion des Juifs d'Espagne en 1492. Quant à l'enfant, il fut canonisé par le pape Pie VII en 1805, puis retiré du canon, bien que, là aussi, une poignée d'individus revendique la validité du procès.
En 1494, il se produisit une autre accusation de meurtre rituel à Tyrnau (Nagyszombat, aujourd'hui Trnava, Slovaquie) dont on ne sait pas grand-chose. Cependant, l'absurdité, et même l'impossibilité, des aveux obtenus sous la torture de femmes et d'enfants démontrent que les accusés préfèrent la mort comme moyen d'échapper à la torture, et admettent tout ce qu'on veut leur faire dire. Ils ont entre autres confirmé que les hommes juifs ont des règles, et qu'ils doivent boire du sang de chrétiens comme remède.
À Bösing en Hongrie (Bazin, aujourd'hui Pezinok, Slovaquie), les Juifs sont accusés en 1529 d'avoir infligé des tortures atroces et saigné à mort un jeune garçon de neuf ans. Trente Juifs avouent leur crime et sont brûlés en place publique. La vérité sera connue plus tard, lorsqu'on retrouve le jeune garçon, vivant, à Vienne. Son rapt avait été organisé par l'accusateur, le comte Wolf de Bazin, afin de se débarrasser de ses créanciers juifs. En 1543, à Wurtzbourg, cinq Juifs accusés de meurtre rituel ont été emprisonnés et torturés. Après avoir personnellement intercédé en faveur de ces prisonniers, Josel de Rosheim à la fin obtient leur pardon de l'empereur Charles Quint.
XVIIe siècle
Dans la République des Deux Nations en 1690, Gavriil Belostoksky, le seul enfant saint de l'Église orthodoxe russe âgé de six ans est, selon la légende soutenue par l'église, kidnappé chez lui pendant la Pâque juive, alors que ses parents sont absents.
Shutko, un Juif de Białystok, est accusé d'avoir emmené l'enfant à Białystok, de l'avoir transpercé avec des objets pointus, de l'avoir saigné pendant neuf jours, puis d'avoir ramené le corps à Zverki et l'avoir jeté dans un champ du village. Un culte se développe encouragé par l'église, et l'enfant est canonisé en 1820. Ses reliques font encore l'objet de pèlerinages. Le 27 juillet 1997, la télévision étatique biélorusse a diffusé un film alléguant que l'histoire est véridique[21]. La relance de ce culte en Biélorussie est considérée comme une dangereuse expression d'antisémitisme dans les rapports internationaux sur les droits de l'homme et les libertés religieuses[22],[23],[24],[25],[26] qui ont été transmis au HCR[27].Le mercredi 25 septembre 1669, Raphaël Lévy, un paisible marchand de bestiaux de Boulay, se rend à Metz acheter un shofar. Ce même jour, le fils de Mangeotte Villemin, habitant un village entre Boulay et Metz, disparait. Raphaël Levy est rapidement accusé d'avoir enlevé l'enfant. Lors de son procès à Metz, de nombreux témoins défilent. si la plupart témoignent à charge, certains mettent en avant les incohérence des accusations. Le petit garçon était encore vivant à 15 heures alors que Levy avait déjà entamé le chemin de retour. La couleur de son cheval n'est pas celle décrite par les accusés. Rien n'y fait. Des villages alentours, des gens viennent dénoncer d'autres crimes rituels, des profanations d'osties. D'autre Juifs sont ainsi jetés en prison. Malgré les effroyables tortures auxquelles il est soumis, Raphaël Levy continue de proclamer son innocence et la fidélité à sa foi. Il est brulé vif le 17 janvier 1670[28]. Ceci n'empêche pas Louis XIV d'accorder à 96 familles juives l'autorisation de s'installer à Metz[29].
XIXe siècle
La première accusation de crime rituel au Moyen-Orient fut également le fait d'un chrétien d'Europe. En 1840, lorsque le frère Tomasso et son serviteur sont retrouvés assassinés, le consul de France à Damas en accuse les Juifs. Les suspects, dont les confessions sont, là aussi, obtenues sous la torture, seront libérés suite à l'intercession de Méhémet Ali, par l'entregent d'une délégation juive. Cette affaire, ainsi que l'affaire Mortara sont à l'origine de la création de l'Alliance israélite universelle.
En 1840 également, mais à Rhodes, alors partie de l'empire ottoman, les Juifs sont accusés du meurtre d'un garçon chrétien. Les accusations sont soutenues par le gouverneur local et par les consuls européens en poste à Rhodes.
Plusieurs Juifs sont arrêtés et torturés. Le quartier juif est bouclé pendant douze jours.
Une enquête menée par le gouvernement central ottoman démontre l'innocence des Juifs.En 1882, à Tiszaeszlár (Hongrie), suite à la disparition d'Eszter Solymosi, une jeune chrétienne de 14 ans, des Juifs sont accusés et jugés pour crime rituel. L'affaire de Tiszaeszlár provoque une vague d'agitation antisémite dans tout le pays, qui redoublera après l'annonce du verdict d'acquittement. Le héros national Lajos Kossuth, exilé à Turin, critique violemment le gouvernement hongrois pour son implication dans ces troubles antisémites, les considérant comme indigne d'une nation civilisée.
En Bohême, en 1899, Léopold Hilsner, un vagabond juif est accusé d'avoir tué une jeune femme chrétienne de dix-neuf ans, Anežka Hrůzová, en lui tailladant la gorge. En dépit de l'absurdité de l'accusation et de la nature relativement progressiste de la société austro-hongroise, Hilsner est déclaré coupable et condamné à mort. Il est même reconnu coupable ultérieurement du meurtre jusqu'alors non élucidé, d'une autre femme chrétienne. En 1901, sa sentence est commuée en prison à vie. Tomáš Masaryk, célèbre professeur de philosophie austro-tchèque et futur président de la Tchécoslovaquie, organise la défense d'Hilsner. Les médias lui en feront plus tard le reproche.
En mars 1918, Hilsner est gracié par l'empereur d'Autriche Charles Ier. Il n'a cependant jamais été disculpé, et les véritables coupables n'ont jamais été découverts.XXe siècle
En 1910, le pogrom de Chiraz en Iran contre les Juifs de la ville, fait suite à une première accusation de crime rituel, dont les accusateurs et la victime supposée sont musulmans. Tout le quartier juif est pillé et le pogrom fait 12 morts et plus de 50 blessés parmi la population juive.
En 1911, le surintendant juif d'une fabrique de briques de Kiev en Ukraine, Mendel Beilis, est accusé du meurtre d'un enfant chrétien et de l'avoir saigné pour préparer des matzot (pains azymes) avec son sang. Il est acquitté en 1913 par un jury entièrement composé de chrétiens, après un procès à sensation.
Deux ans plus tard, en 1913, Leo Frank, le directeur juif d'une fabrique de crayons d'Atlanta (en Géorgie, États-Unis) est accusé de viol et de meurtre sur la jeune Mary Phagan âgée de 12 ans. Bien que l'aspect rituel soit absent de l'accusation, y compris dans la presse à scandale, une violente campagne le décrit comme pervers et sadique. Lorsque Frank est gracié par le gouverneur en 1915, c'est aux cris de « Hang the Jew » qu'il est lynché par un groupe se faisant appeler les Chevaliers de Mary Phagan, qui deviendra plus tard le noyau central du second Ku Klux Klan[réf. nécessaire], le premier ayant été dissous par le gouvernement fédéral depuis les années 1870. Le lynchage de Leo Frank est aussi lié aux tensions racistes et politiques en Géorgie, où de nombreuses autres personnes ont été lynchées.
Cette affaire, révélatrice du climat d'antisémitisme qui régnait alors aux États-Unis, mena à la création de l'Anti-Defamation League[30].En 1946, des Juifs de Kielce, en Pologne, ayant survécu à la Shoah demandent à leurs voisins non-Juifs de leur restituer leurs terres et leurs biens spoliés au cours de la guerre. La réponse ne se fait pas attendre : sur base d'une accusation de meurtre rituel lancée pour le principe, les Polonais déclenchent le pogrom de Kielce afin de régler la question à leur façon.
Accusations contemporaines de crime rituel
Dans les pays arabes et musulmans
Des accusations de crime rituel apparaissent dans certains médias arabo-musulmans contrôlés, dont les programmes télévisés, les sites internet et les livres :
- "La Matza de Sion" a été écrit par le ministre syrien de la défense, Moustafa Tlas en 1986. Le livre se concentre sur deux sujets : rappeler les accusations de meurtre rituel contre les Juifs dans l'affaire de Damas de 1840, et les Protocoles des Sages de Sion[31].
- Le 21 octobre 2002, le journal en langue arabe basé à Londres, Al-Hayat rapporte que le livre a fait l'objet de huit réimpressions et est en train d'être traduit en anglais, français et italien.
- En 2001 un studio de production égyptien produit et diffuse un film appelé Un cavalier sans cheval, basé en partie sur le livre de Tlas.
- Le livre est cité à une conférence des Nations unies par le délégué syrien en 1991.
- Plusieurs administrations syriennes, y compris les services de police de Damas, le département des antiquités et des musées, le ministère de la sécurité, le ministère de la culture ont participé à la création d'une série télévisée antisémite appelée Ash-Shatat ("La Diaspora"). Cette série a été initialement diffusée en Syrie et au Liban fin 2003 par la chaîne satellitaire Al-Manar, propriété du Hezbollah. Cette série télé, basée sur le faux antisémite les Protocoles des Sages de Sion, montre le peuple juif se lançant dans une conspiration afin de dominer le monde, et présente les Juifs comme des gens qui tuent les enfants chrétiens, les saignent et utilisent leur sang pour cuire la matza[32],[33],[34]
- Le 20 décembre 2005, lors d'une discussion télévisée entre analystes politiques iraniens diffusée par la chaîne iranienne Jaam-e Jam 2, le collaborateur du Times de Téhéran et auteur du livre "L'histoire des Juifs", le Dr. Hasan Hanizadeh prétend que les Juifs sont coupables de deux "faits horribles" en Europe au XIXe siècle:
« En 1883, environ 150 enfants français sont assassinés de façon horrible dans les faubourgs de Paris, avant la Pâque juive. L'enquête a montré que les Juifs avaient tué les enfants pour recueillir leur sang… Un fait similaire s'est déroulé à Londres où beaucoup d'enfants ont été égorgés par des rabbins juifs…[35],[36] »
- Le roi Fayçal d'Arabie saoudite profère des accusations contre les Juifs parisiens les accusant de crimes rituels[37].
- Dans une variante par rapport à l'accusation que les Juifs utilisent du sang pour la confection de la matza, le pain azyme de Pessa'h, un journal saoudien affirme en 2002[38] que les Juifs utilisent du sang pour préparer les oreilles d'Aman, un biscuit triangulaire mangé lors de la fête juive de Pourim. L'histoire célébrée à Pourim, relatée dans le Livre d'Esther, se passe dans l'ancienne Perse (de nos jours l'Iran).
- Une histoire publiée en Iran en 2004 raconte que les docteurs juifs prélèvent les organes des enfants palestiniens dans les hôpitaux israéliens[39].
Quelques écrivains arabes ont condamné ces accusations de meurtre rituel. Le journal égyptien Al-Ahram a publié une série d'articles de Osam Al-Baz, un conseiller du président égyptien Hosni Moubarak. Osam Al-Baz explique entre autres les origines de ces accusations portées contre les Juifs. Il dit que les Arabes et les musulmans n'ont jamais été antisémites, en tant que groupe, mais ont accepté que quelques écrivains et personnalités des médias attaquent les Juifs "sur la base des raisonnements et des mythes racistes originaires d'Europe". Il conseille vivement de ne pas succomber à des mythes comme ceux des crimes rituels[40].
En Russie
Début janvier 2005, quelque 20 membres de la Douma d'État russe accusent publiquement les Juifs de crimes rituels. Ils demandent au procureur général « d'interdire toutes les organisations juives ». Ils accusent les groupes juifs d'être extrémistes et d'être « antichrétiens et inhumains avec des pratiques allant jusqu'au meurtre rituel ».
En faisant allusion à des décrets antisémites anciens des tribunaux russes qui accusaient les Juifs de meurtre rituel, ils écrivent que : « de nombreux faits de cet extrémisme religieux ont été prouvés devant la cour ». Les accusations reprennent les traditionnelles rengaines antisémites telles que « la totalité du monde démocratique actuel est sous la domination politique et financière de la Juiverie internationale. Et nous ne voulons pas que la Russie fasse partie de ces pays asservis ».
Cette demande est publiée en tant que lettre ouverte au procureur général dans Rus Pravoslavnaïa (Russie orthodoxe), un journal conservateur d'extrême droite. Ce groupe de députés se compose de membres du Parti démocratique libéral ultranationaliste, de membres du Parti communiste de la Fédération de Russie et de membres du parti nationaliste Rodina (Patrie), avec quelque 500 supporters. Parmi leurs supporteurs, plusieurs éditeurs et journalistes de journaux nationalistes. Fin janvier, devant les nombreuses critiques virulentes contre leur démarche, le groupe retire sa demande.
En mars 2008, « des centaines de posters antisémites ont été placardés dans la ville de Novossibirsk dans le sud-ouest de la Sibérie (Russie). Ils mettent en garde les parents contre les Juifs qui trempent les matzot dans le sang d’enfants[41] ».
Position de l’Église catholique
La position de l'Église catholique envers ces accusations et les cultes vénérant des enfants supposément tués par des Juifs, varie selon le lieu et l'époque.
Le pape Innocent IV interdit de porter contre des Juifs l'accusation de meurtre rituel dans une lettre à l'archevêque de Vienne datée du 28 mai 1247 puis dans la bulle pontificale du 25 septembre 1253[42]. Grégoire X réitère l'interdiction, sous peine d'excommunication, dans la bulle du 7 octobre 1272[43] et publie une lettre rejetant les accusations de crime rituel portées contre les Juifs[44]. Martin V réitère l'interdiction à son tour à l'intention des prédicateurs dans la bulle du 20 février 1422. Elle est encore renouvelée par Paul III avec la bulle du 12 mai 1540[45].
Le pape Benoît XIV a permis dans la bulle Beatus Andreas la poursuite du culte d'Anderl von Rinn en tant que culte local, mais refusa sa canonisation. L'Église catholique n'a néanmoins jamais condamné l'idée de crimes rituels juifs, mais a condamné l'utilisation abusive de l'accusation.
Études récentes
En 2007, le professeur Ariel Toaff, fils de l'ancien Grand Rabbin de Rome, publie en Italie une nouvelle étude historique sur ce sujet, Pasque di sangue: Ebrei d'Europa e omicidi rituali (Pâques sanglantes : Juifs d'Europe et meurtres rituels). Dans ce livre, il avance la thèse que la communauté juive de Trente aurait pu réellement commettre le crime rituel contre Simon de Trente dont elle était accusée, revenant ainsi sur les conclusions de tous les historiens du XXe siècle pour qui les meurtres rituels attribués aux Juifs étaient sans fondement.
Toaff ne pense pas que le crime rituel était une pratique généralisée mais que, dans les communautés ashkénazes hantées par le souvenir des massacres des croisades et de la peste noire, des Juifs auraient pu pratiquer ce genre de crime comme une vengeance antichrétienne au moment de la Pâque[46]. À l'appui de sa thèse, il présente les réponses des suspects telles que les minutes des procès les rapportent : selon lui, même si le plus gros des déclarations était dicté par des juges instruisant à charge, ce qui reste (le discours "autonome" des inculpés) suffit à établir une forte présomption de culpabilité. Le problème est alors de savoir ce qui est librement exprimé... question que Toaff oublie de poser.
Le livre soulève un tel émoi aussi bien dans le monde des historiens, qui mettent en évidence de graves erreurs de méthode et d'analyse, que dans la communauté juive, qu'il est rapidement retiré de la vente. En février 2008, une nouvelle version en est enfin disponible. Dans certaines parties, poussé par de nombreuses pressions subies, l'auteur remplace l'indicatif par le conditionnel et certaines pages sont purement et simplement supprimées. Dans la postface, reniant ses premières positions, l'auteur déclare que : "L'homicide rituel est et demeure un stéréotype relevant de la calomnie"[47].
Notes et références
- Walter Laqueur (2006) : The Changing Face of Antisemitism : From Ancient Times to the Present Day, Oxford University Press, ISBN 978-0-19-530429-9, p. 56 (en) :
- Jewish Encyclopedia – Blood accusation, par Richard Gottheil, Hermann L. Strack, Joseph Jacobs (en):
- Saint Bernard de Clervaux et les Juifs. cf.
- De puella a Iudeis crudelissimie occisa / Cur Iudaei Christianum sanguinem effundant quotannis sur le site de l'Université de Trèves) Thomas de Cantimpré, Bonum universale de apibus, liber II, cap. xxix, §§ 22-23 (
- Jewish Humor. « Grand émoi dans ce village, une jeune fille a été découverte assassinée, les Juifs seront surement suspectés de l'avoir assassinée. Soudain, le rabbin sort radieux : “Bonne nouvelle, la victime est juive !” » -
- Cité par Josy Eisenberg, Une histoire des Juifs, p. 292, éd. Le Livre de Poche
- Et si ce n'était pas bon pour les Juifs? by Lily Galili; Ha'aretz du 18 février 2007 (en):
- (en): Deux nations dans votre sein: Perceptions des Juifs et des Chrétiens dans l'antiquité tardive et le Moyen=Âge by Israel J. Yuval; traduit en anglais par Barbara Harshav et Jonathan Chipman, University of California Press, 2006)
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- Giovanni Miccoli, p. 8
- Giovanni Miccoli, p. 10
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Blood libel against Jews » (voir la liste des auteurs)
Voir aussi
Bibliographie
- Joseph Reinach, Raphaël Lévy : une erreur judiciaire sous Louis XIV, Paris, Ch. Delagrave, 1898 [lire en ligne].
- Mark Cohen, Sous le croissant et sous la croix. Les juifs au Moyen Age, Seuil, 2008
- Joanna Tokarska-Bakir, Legendy o krwi, antropologia przesądu (Légendes du sang. Anthropologie d’une croyance), Varsovie recension de Jean-Yves Potel, « Les croyances antisémites dans la Pologne contemporaine », La Vie des idées, 18 juin 2009.
- (en): R. Po-chia Hsia, "Le mythe des meurtres rituels: les Juifs et la magie dans l'Allemagne réformée" (New Haven: Yale UP, 1988). ISBN 978-0-300-04120-0 (cloth), ISBN 978-0-300-04746-2 (pbk.).
- (en) Alan (en): Dundes, Légende de crime rituel: un dossier dans le folklore antisémite, Madison, University of Wisconsin Press, 1991, poche (ISBN 978-0-299-13114-2) (LCCN 91012592)
- (en): Ezekiel Leikin, Les documents Beilis. Le procès antisémite qui choqua le monde, ISBN 978-0-87668-179-4
Articles connexes
- Histoire des Juifs en Allemagne
- Persécution des Juifs pendant la première croisade
- Accusation d'empoisonnement des puits contre les Juifs
Liens externes
- (en) Article Blood libel de la Jewish Encyclopedia"
- (en) Resources > Medieval Jewish History > Blood Libels Centre de ressources historiques juives, projet du Centre Dinur pour la Recherche en Histoire Juive, Université Hébraïque de Jérusalem
- (en) Page de référence des légendes urbaines : religion (fête du sang)
- (it) La Repubblica.it, 15 février 2007 : Entretien avec le grand rabbin émérite de Rome, Elio Toaff, sur les fausses légendes
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