Ponce Pilate

Ponce Pilate
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Ecce Homo (Voici l'homme !), tableau d'Antonio Ciseri montrant Ponce Pilate présentant Jésus de Nazareth aux habitants de Jérusalem

Ponce Pilate (en latin Pontius Pilatus[N 1]), est né vers 10 av. J.-C.. Son lieu de naissance est inconnu (Rome, la région des Abruzzes ou encore Lugdunum, c'est-à-dire Lyon)[N 2]. Membre de la classe équestre, il est nommé préfet (praefectus, ou ἔπαρχος / éparkhos) de la province romaine de Judée en 26[N 3] par l'empereur Tibère, probablement sur les conseils de Séjan. À la fin 36 ou au début 37[1], il est renvoyé à Rome par Lucius Vitellius pour qu'il s'explique auprès de l'empereur, il est disgracié. La légende veut qu'il ait été exilé et se serait suicidé[2] vers 39 apr. J.-C.[N 4]. Des traditions lui font trouver la mort à de nombreux endroits comme Rome[3], Vienne, Ponsas ou encore Lucerne où une montagne porte son nom. Comme préfet de Judée, il succède à Valerius Gratus et est remplacé par Marcellus[4].

Il est connu pour avoir, selon le Nouveau Testament, ordonné le crucifiement de Jésus. Ce qui lui a conféré une célébrité exceptionnelle pour un simple gouverneur d'une petite province. Jusqu'à 1961, on pensait que son titre était « procurateur de Judée » (Ἰουδαίοις ἐπίτροπος / Ioudaíois epítropos).

Les églises éthiopienne orthodoxe et les Églises coptes, tant orthodoxe que catholique, célèbrent Ponce Pilate comme saint ainsi que sa femme. L'Église orthodoxe honore seulement sa femme qui serait Claudia Procula.

Sommaire

Le procurateur

L'inscription de Césarée maritime sur laquelle figure partiellement le nom: [Pont]ius Pilatus (2e ligne).

Une inscription trouvée à Césarée en 1961[5] ainsi que les textes de Philon d'Alexandrie[6] et de Flavius Josèphe (Guerre des Juifs, livre II, IX.2-4 et Antiquités Judaïques, livre XVIII, IIs) attestent de son existence. Comme son prédécesseur Valerius Gratus, Ponce Pilate avait le titre de Préfet de Judée, ce que confirme l'inscription de Césarée.

L'entrée en scène de Pilate dans les Antiquités Judaïques de Flavius Josèphe confirme aussi qu'il était Préfet de Judée.

« [l'empereur Tibère] envoya comme préfet de Judée (Ἰουδαίοις ἔπαρχος) Valerius Gratus, [...] Gratus, après avoir fait cela, rentra à Rome ; il avait passé onze ans en Judée. Ponce Pilate lui succéda[7]. »

Pourtant les Evangiles de Matthieu et Luc, ainsi que Philon d'Alexandrie dans Légation à Caïus, une courte phrase chez Tacite, ainsi que Flavius Josèphe dans la Guerre des Juifs, lui donnent le titre de « Procurateur » (ἐπίτροπος). Il faut toutefois remarquer que l'évangile attribué à Marc, que certains chercheurs considèrent comme une possible base commune aux évangiles attribués à Matthieu et Luc, ne contient pas cette erreur, car il y est simplement appelé : Pilate. Il en est de même dans l'évangile attribué à Jean et dans celui attribué à Pierre.

Pour l'exégète et théologien Jean-Pierre Lémonon, le changement de titre de Préfet à Procurateur pour désigner les gouverneurs de province a eu lieu sous l'empereur Claude (41 - 54). Il « correspond à une évolution historique des gouverneurs de rang équestre », Claude prenant acte de la situation[8]. Tacite écrit en effet que vers 45, l'empereur Claude prit un sénatus-consulte qui renforça le pouvoir des Procurateurs et qu'il s'exprima à plusieurs reprise pour appuyer leur autorité[9]. Il indique aussi que « Claude [...] fit une province de la Judée, et en abandonna le gouvernement à des chevaliers ou à des affranchis[10]. »

Chez Flavius Josèphe c'est en effet vers 46 que les gouverneurs de Judée prennent le titre de « Procurateur ».

Il est peu probable que tous ces auteurs, issus de milieux culturels différents, écrivant dans des pays différents, voire dans des langues différentes, aient tous fait la même erreur. Le plus probable c'est que, pensant rectifier une erreur, les moines qui au fil des siècles ont recopié ces œuvres ont harmonisé le titre de Ponce Pilate en se basant sur l'œuvre de référence pour eux : les Évangiles[réf. nécessaire].

En qualité de Préfet, Ponce Pilate gouvernait donc une province où étaient stationnées des force militaires[11].

Le Préfet

Sommaire de la section

Les textes de Flavius Josèphe et de Philon d'Alexandrie rapportent que Ponce Pilate a réprimé de manière sanglante plusieurs mouvements de protestations juifs ou Samaritains (voir ci-dessous). Sa réflexion amère « Qu'est-ce que la vérité[12] ? » en fait pour certains auteurs, dont Ernest Renan, l'un des personnages les plus humains présentés dans les Évangiles, en raison de son doute sincère, alors que c'est plutôt la foi ou l'indifférence qui est décrite chez d'autres protagonistes. Les évangiles présentent en effet Pilate comme quelqu'un qui veut libérer Jésus, mais qui est contraint de le condamner par les autorités juives et la foule. Il se retrouve même piégé et doit libérer Barabas, un « brigand » inculpé pour émeute et meurtre[13], plutôt que de libérer Jésus dont il dit qu'il est innocent (voir ci-dessous: Pilate dans les Évangiles).

Pourtant les sources à notre disposition décrivent un tout autre personnage. Il semble bien que Ponce Pilate a été un gouverneur de Judée au moins aussi brutal que les autres. Dans Légation à Caïus, Philon d'Alexandrie raconte un épisode où les autorités juives menacent d'envoyer une supplique à l'empereur Tibère, ce qui ne fait qu'accroitre la colère de Pilate, car:

« Il craignait que, si on envoyait des députés on ne vînt à découvrir les autres méfaits de son gouvernement, ses vexations, ses rapines, ses injustices, ses outrages, les citoyens qu'il avait fait périr sans jugement, enfin son insupportable cruauté[14]. »

Des images à Jérusalem

Représentation de Flavius Josèphe dans un livre de La Guerre des Juifs de 1888.

Dès sa nomination, Pilate cherche à provoquer les Juifs en prenant l'initiative d'introduire de nuit à Jérusalem des enseignes et des effigies de l'Empereur, alors qu'aucun autre gouverneur romain n'avait fait cela avant lui[N 5] et que d'après Philon d'Alexandrie, cet interdit religieux avait été « jusqu'alors respecté par les Rois et les Empereurs[14] ».

« Le jour venu, […] les habitants présents furent frappés de stupeur, voyant là une violation de leurs lois, qui ne permettent d'élever aucune image dans leur ville[15]. »

Les habitants se précipitent alors à Césarée où les gouverneurs de Judée stationnaient.

« Les Juifs s'ameutèrent autour de Pilate, à Césarée, pour le supplier de retirer les enseignes de Jérusalem et de maintenir les lois de leurs ancêtres[15]. »

Si cet épisode est le même que celui rapporté par Philon, à ces députations se joignent « les quatre fils » d'Hérode le Grand et notamment Antipas le tétrarque de Galilée et celui de la trachonitide Hérode Philippe, « on leur adjoignit les autres membres de la famille royale et tout ce qu'il y avait de hauts personnages pour le prier de renoncer à cette innovation[14]. » Mais Pilate s'obstine. Alors les Juifs « se couchèrent autour de sa maison et y restèrent prosternés, sans mouvement, pendant cinq jours entiers et cinq nuits[15]. » Pilate convoque alors le peuple dans le grand stade sous prétexte de lui répondre:

« là, il donna aux soldats en armes le signal convenu de cerner les Juifs. Quand ils virent la troupe massée autour d'eux sur trois rangs, les Juifs restèrent muets devant ce spectacle imprévu. Pilate, après avoir déclaré qu'il les ferait égorger s'ils ne recevaient pas les images de César (l'empereur Tibère), fit signe aux soldats de tirer leurs épées. Mais les Juifs, comme d'un commun accord, se jetèrent à terre en rangs serrés et tendirent le cou, se déclarant prêts à mourir plutôt que de violer la loi[16]. »

Finalement, « frappé d'étonnement devant un zèle religieux aussi ardent », Pilate n'exécute pas sa menace. D'après Philon, Tibère ayant été saisi par les fils du roi Hérode et par les autres hauts personnages, l'empereur ordonne à Pilate de retirer les enseignes problématiques. Elles sont alors installées à Césarée dans le Temple consacré à Auguste[N 6].

Certains historiens estiment que les relations de Flavius Josèphe et de Philon d'Alexandrie parlent de deux événements distincts (Voir plus bas l'Incident des boucliers dorés).

Il pille le trésor du Temple et réprime brutalement les protestataires

Monnaie en bronze frappée sous Ponce Pilate.
Revers: Inscription en grec TIBEPIOY KAICAPOC (Tibère Empereur) an 16 (29/30).
Avers: Inscription en grec IOYLIA KAICAPOC (Julia, la mère de l'empereur).

« Un peu plus tard », il prend le prétexte de la construction d'un aqueduc, pour s'emparer de la totalité du trésor du Temple[N 7]. À cette nouvelle, le peuple s'indigne et proteste dans les rues de Jérusalem en convergeant vers le « tribunal de Pilate, qui se trouvait alors à Jérusalem ». Mais celui-ci avait prévu cette réaction et « avait pris soin de mêler à la multitude une troupe de soldats armés, mais vêtus d'habits civils »

« Tout en leur défendant de faire usage du glaive, [il] leur ordonna de frapper les manifestants avec des gourdins. Du haut de son tribunal il donna un signe convenu. Les Juifs périrent en grand nombre, les uns sous les coups, d'autres en s'écrasant mutuellement dans la fuite. La multitude, stupéfiée par ce massacre, retomba dans le silence.  »

— Flavius Josèphe, Guerre des Juifs, livre II, IX, 4

Incident des boucliers dorés

Philon d'Alexandrie rapporte aussi l'incident des boucliers dorés qui a pour particularité d'être décrit dans une lettre que le roi Agrippa Ier aurait écrite à l'empereur Caligula pour l'inciter à abandonner son projet de faire ériger sa statue dans le Temple de Jérusalem.

« Pilate, qui était procurateur de Judée, consacra à l’intérieur de Jérusalem, dans le palais d’Hérode, des boucliers d’or, moins pour honorer Tibère que pour déplaire au peuple. Ils ne portaient aucune image, ni rien qui fût expressément interdit, mais seulement une inscription contenant les noms de celui qui les avait dédiés et de celui auquel ils étaient consacrés[17]. »

Selon Jean-Pierre Lémonon, les termes grecs employés pour décrire ces boucliers montrent qu'il s'agissait d'objets consacrés religieusement et que certains pouvaient porter une dédicace à l'empereur Tibère, avec « pleins de sous-entendu religieux[18] » et notamment « son lien de filiation avec Auguste dont la divinité était alors affirmée[18]. »

À cette nouvelle « le peuple se rassembla et députa au procurateur les quatre fils du Roi (Hérode) qui, pour le rang et la dignité, ne le cédait en rien aux Rois ; on leur adjoignit les autres membres de la famille royale et tout ce qu'il y avait de hauts personnages pour le prier de renoncer à cette innovation[14]. »

Tibère saisi par les fils du roi Hérode et par les autres hauts personnages, ordonne à Pilate de retirer les enseignes problématiques. Elles sont alors installées à Césarée dans le Temple consacré à Auguste.

Cet incident est beaucoup moins grave que les répressions racontées par les deux auteurs juifs, puisque les boucliers ne comportaient pas d'image et que le peuple se contente de faire intervenir les grandes familles à ce sujet. Dans la lettre qui est rapportée par Philon d'Alexandrie, Agrippa veut montrer à Caligula combien Tibère, son père adoptif, a été sage en respectant les coutumes juives. Il met en parallèle l'attitude de Tibère à propos d'un incident bénin (puisque les boucliers ne comportaient pas d'image), avec ce que veut imposer Caligula (mettre sa statue dans le Temple), ce qui pour un juif est la pire des provocations. Plusieurs auteurs pensent donc que cet incident est le même que celui des enseignes raconté par Flavius Josèphe (voir ci-dessus Des images à Jérusalem). Pour parfaire sa démonstration, Agrippa en aurait simplement minoré la gravité. Toutefois, Jean-Pierre Lémonon et d'autres historiens estiment qu'il s'agit de deux événement distincts.

Répression des Samaritains

« Les Samaritains ne manquèrent pas non plus de troubles, car ils étaient excités par un homme qui ne considérait pas comme grave de mentir et qui combinait tout pour plaire au peuple. II leur ordonna de monter avec lui sur le mont Garizim, qu'ils jugent la plus sainte des montagnes, leur assurant avec force qu'une fois parvenus là il leur montrerait des vases sacrés enfouis par Moïse, qui les y avait mis en dépôt. Eux, croyant ses paroles véridiques, prirent les armes, et, s'étant installés dans un village nommé Tirathana, s'adjoignirent tous les gens qu'ils purent encore ramasser, de telle sorte qu'ils firent en foule l'ascension de la montagne. Mais Pilate se hâta d'occuper d'avance la route où ils devaient monter en y envoyant des cavaliers et des fantassins, et ceux-ci, fondant, sur les gens qui s'étaient rassemblés dans le village, tuèrent les uns dans la mêlée, mirent les autres en fuite et en emmenèrent en captivité beaucoup, dont les principaux furent mis à mort par Pilate, ainsi que les plus influents d'entre les fuyards.  »

— Flavius Josèphe, Antiquités judaïques, livre XVIII, IV, 1

Jean-Pierre Lémonon place ces deux derniers événements après la mort de Séjan (en 31). « Deux événements ont eu pour Pilate des suites plus ou moins graves: lors de l'affaire des boucliers dorés, il est désapprouvé par l'empereur ; le massacre des Samaritains lui coûte sa place. Même si nous ignorons la décision de Gaïus (Caligula) à l'égard de Pilate, le fait est là: à la suite de cet incident, Pilate quitte la Judée[19]. »

Renvoi à Rome par Vitellius

« Une fois ce trouble calmé, le conseil des Samaritains se rendit auprès de Vitellius (Lucius Vitellius), personnage consulaire, gouverneur de Syrie (plus précisément le légat de la province romaine de Syrie), et accusa Pilate d'avoir massacré les gens qui avaient péri ; car ce n'était pas pour se révolter contre les Romains, mais pour échapper à la violence de Pilate qu'ils s'étaient réunis à Tirathana. Après avoir envoyé un de ses amis, Marcellus, pour s'occuper des Juifs, Vitellius ordonna à Pilate, de rentrer à Rome pour renseigner l'empereur sur ce dont l'accusaient les Juifs. Pilate, après dix ans de séjour en Judée, se hâtait de gagner Rome par obéissance aux ordres de Vitellius auxquels il ne pouvait rien objecter; mais avant qu'il ne fût arrivé à Rome, survint la mort de Tibère (16 mars 37).  »

— Flavius Josèphe, Antiquités judaïques, livre XVIII, IV, 2

Pilate agissait-il pour le compte de Séjan ?

Pour nombre d'historiens, ces « provocations » ont lieu dans la première partie du gouvernorat de Ponce Pilate. À partir d'un moment qui semble coïncider avec la nomination de Lucius Vitellius comme légat de Syrie (en 34), celles-ci cessent. Ces historiens ont estimé que « les provocations » de Ponce Pilate étaient en fait effectuées pour complaire à Séjan à qui il serait redevable de sa nomination. Ce tout puissant préfet du prétoire aurait mené une politique anti-juive et aurait eu besoin d'une agitation juive, pour que Tibère lui concède de plus en plus de pouvoir[20]. C'est d'ailleurs ce qui se produit à partir de 29 où l'empereur s'isole encore plus et reste presque tout le temps réfugié sur son île de Capri[21]. L'essentiel de ces graves incidents ce seraient donc produit de 29 à 34[N 8]. Toutefois Séjan meurt en 31 et cela ne semble pas y mettre fin.

D'autres historiens, comme Jean-Pierre Lémonon estiment qu'il y a bien eu une politique anti-juive de Séjan à partir de 29, mais ils estiment qu'on ne peut s'appuyer sur le témoignage de Philon pour conclure que Pilate agissait ainsi « pour complaire à Séjan ». En effet, « aucun texte ne permet de prétendre que Pilate fut l'exécutant d'une politique hostile aux Juifs, pensée et voulue par Séjan[19] ». Jean-Pierre Lémonon estime aussi que rien ne prouve que les incidents ne se poursuivent pas au delà de 34, il place d'ailleurs la répression des Samaritains vers la fin 36.

Vitellius, légat de Syrie

Pièce présentant Aulus Vitellius face à son père, Lucius Vitellius.
Article détaillé : Lucius Vitellius.

Vitellius est nommé légat de Syrie par Tibère en 34. L'empereur lui confie la délicate mission de gérer le conflit arméno-parthe et « de diriger toutes les révolutions qui se préparaient en Orient[22] ».

Selon Flavius Josèphe, Vitellius vient en Judée et à Jérusalem au moment de la Pâque 35:

« Reçu avec magnificence, il fit remise aux habitants de l'ensemble des impôts sur la vente des récoltes. II accorda aussi que le vêtement du grand-pontife et tous ses ornements fussent placés dans le Temple et gardés par les prêtres comme ils en avaient. jadis la prérogative[N 9] ; pour le moment, c'était dans la citadelle appelée l'Antonia (la forteresse de la garnison romaine à Jérusalem) qu'ils étaient déposés [...] Vitellius prit soin que le vêtement fût gardé conformément à nos coutumes nationales et enjoignit au commandant de la garnison de ne pas s'inquiéter du lieu où il était, ni du jour où on s'en servirait.  »

— Flavius Josèphe, Antiquités judaïques, livre XVIII, IV, 3

Ces mesures marquent une réelle volonté de conciliation et une nette inflexion de la politique précédente.

Selon Flavius Josèphe, Vitellius, vient une seconde fois à Jérusalem au printemps 37. Cette fois, il était accompagné de deux légions car Tibère lui avait donné l'ordre « de faire la guerre [au roi Arétas IV] et de le ramener enchaîné, s'il le prenait vivant, ou d'envoyer sa tête s'il était tué[23]. »

« Comme il se préparait à faire traverser la Judée par son armée, les principaux citoyens vinrent le trouver et essayèrent de le détourner de passer par leur pays, car il n'était pas conforme à leur tradition de laisser transporter des images ; or, il y en avait beaucoup sur les enseignes. Déférant à leur demande, il changea les résolutions qu'il avait prises à ce sujet. Ayant ordonné à ses troupes de marcher par la grande plaine, lui-même monta avec le tétrarque Hérode et ses amis à Jérusalem, pour sacrifier à Dieu pendant la fête nationale des Juifs (Pessah, la Pâque) qui y avait lieu. »

— Flavius Josèphe, Antiquités judaïques, livre XVIII, IV, 3

Comme pour le vêtement du grand-prêtre, Vitellius montre à nouveau son désir de conciliation dans une affaire d'enseignes (il faut dire que sur certaines de celles de la X° légion se trouvait un cochon). Vitellius était donc à Jérusalem lorsqu'il destitua Ponce Pilate.

Les spécialistes s'accordent sur un départ pour Rome de Pilate vers la fin de l'année 36 ou le début de l'année 37, au plus tard à la fin février[24].

Pilate dans les Évangiles

Fresques du procès de Jésus, église Saint-Jean-Baptiste de Iaroslavl
Pilate se lave les mains (Duccio)

Seul, l'Évangile de Luc (3,1) présente Ponce Pilate comme gouverneur de la Judée et le situe dans son environnement politique[25]. « Or, en la quinzième année du règne de Tibère César, Ponce Pilate étant gouverneur de la Judée, (...) la parole de Dieu vint à Jean (le Baptiste), le fils de Zacharie, au désert ».

Toutefois, cet effort de précision chronologique précis mais tardif, ne s'applique pas à Jésus, mais au début de la prédication de Jean le Baptiste, qui est donc situé vers 28 - 29[26].

Répression dans le Temple

L'Évangile attribué à Luc évoque aussi des « Galiléens, dont Pilate avait mêlé le sang à celui de leurs victimes[27] ». Les « victimes » dont il est question, sont les animaux qui étaient sacrifiés à Dieu dans le Temple de Jérusalem, une pratique qui existait dans la plupart des autres religions de l'Antiquité. Selon cette phrase trop brève, qui n'a d'écho ni chez Flavius Josèphe, ni chez Philon d'Alexandrie, Pilate aurait donc aussi réprimé un mouvement de protestation animé par des Galiléens à l'intérieur même du Temple. Ici, les Galiléens ne sont pas spécialement des habitants de Galilée, mais des membres du mouvement créé vers l'an 6, par Juda le Gaulanite (ou Judas le Galiléen)[N 10], qui prendra le nom de Zélote à une date indéterminée.

Arrestation et interrogatoire de Jésus

Les mentions ultérieures de Pilate dans le Nouveau Testament se réfèrent toutes à la comparution de Jésus devant lui[28].

Pilate est surtout connu comme juge au procès de Jésus. Les chapitres 27 de Matthieu, 15 de Marc, 23 de Luc et 18-19 de Jean[29] rapportent le renvoi de Jésus du Sanhédrin à Pilate, son interrogatoire, la pression de la foule, la libération de Barabbas :
Jésus est conduit devant Pilate par les responsables du Sanhédrin. La nuit précédente, il avait été arrêté à Gethsémani, par une foule armée de bâtons et de glaives, envoyée par les grands-prêtres[30]. Jésus avait été trahi par le baiser de Judas. On le traîne alors devant l'ancien grand-prêtre Anne, puis devant son gendre, le grand-prêtre Caïphe qui a convoqué de toute urgence le Grand Conseil ou Sanhédrin. On lui fait alors un procès autour d'une accusation de blasphème. Mais, le pays étant occupé par les Romains, il faut obtenir un autre jugement, cette fois devant le tribunal du préfet romain, Pilate, pour parvenir à une condamnation à mort, il est accusé d'être le « roi des Juifs ».

L'ayant interrogé, Pilate ne voit aucun motif de condamnation. Croyant sans doute avoir trouvé le moyen d'épargner Jésus, il propose à la foule (Ecce homo[31]) de libérer un prisonnier à l'occasion de la Pâque[32]. Mais, contrairement à ce qu'il attendait, la foule crie « Libérez Barabbas » (PâLaT bar Abbas), du nom de cet autre prévenu dont Pilate instruisait le procès au même moment, présenté comme un émeutier, un meurtrier et « un brigand » (c'est-à-dire un révolté Galiléen).

« Et Pilate, voyant qu'il ne gagnait rien, mais que plutôt il s'élevait un tumulte, prit de l'eau et se lava les mains devant la foule, disant : Je suis innocent du sang de ce juste ; vous, vous y aviserez[33]. »

Bien que reconnaissant l'innocence de Jésus, Pilate le livre pourtant au supplice de la croix ; il rédige le motif de la condamnation : le roi des Juifs ; les autorités juives protestent en disant marque plutôt: il a dit je suis le roi des Juifs ; Pilate refuse de changer ce qui est écrit; après la crucifixion,il accorde le cadavre de Jésus à Joseph d'Arimathie. Il délègue aux autorités juives la garde du tombeau[34].

Les différences entre les évangiles

La relation ci-dessus correspond plus au contenu des évangiles vu par la tradition chrétienne que ce qui est effectivement écrit dans les évangiles. En effet, les évangiles ont été écrits séparément et lors de leur composition (essentiellement dans la période 70 - 115) personne n'a envisagé que certains d'entre eux puissent être un jour regroupés dans un livre unique: le Nouveau Testament. Par simplification, cette histoire est en général racontée en effectuant une sélection des épisodes tour à tour dans l'un ou l'autre évangile particulier, alors que cet épisode ne figure pas dans les autres ou qu'il y est raconté différemment. Or cette sélection est elle aussi le résultat de la tradition ecclésiastique. Cette façon de faire, ne permet pas d'analyser ce que chacun des textes dit effectivement.

L'Évangile attribué à Luc est le seul, probablement avec celui attribué à Pierre, à contenir un épisode où Pilate envoie Jésus se faire juger par Hérode[35]. En suivant la tradition ecclésiastique, on estime que cet Hérode est Hérode Antipas qui est d'ailleurs mentionné pour avoir fait exécuter Jean le Baptiste auparavant. Toutefois, l'évangile attribué à Pierre parle de « Hérode le roi », ce qui place cet événement sous l'un des rois juifs qui ont régné de 37 à environ 92, Antipas n'étant pas roi, mais tétrarque de Galilée et ne pouvant d'ailleurs exercer aucune autorité à Jérusalem. Comme par ailleurs l'Évangile attribué à Matthieu parle de « Pilate le Procurateur », cela nous renvoie alors à après 46, date où pour la première fois un Procurateur gère la province de Judée.

Le nom de Pilate et sa notoriété

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Pilate (Pilatus en Latin) signifie que Ponce Pilate (Pontius Pilatus) avait été décoré d'un javelot d'honneur (du latin pilum)[N 11],[36].

Célébrité chez les Juifs et parodie anti-judaïque

S'il n'existe qu'un seul Ponce Pilate, le surnom Pilate a pour particularité de pouvoir être donné à beaucoup de gouverneurs, puisqu'un très grand nombre devaient porter cette décoration et étaient donc des « Pilatus ». Pourtant, pour désigner Ponce Pilate, les juifs semblent aimer utiliser ce seul surnom. C'est ce que font Philon d'Alexandrie et Flavius Josèphe[N 12], mais aussi les auteurs des évangiles, qui sont eux aussi juifs, puisque ces textes sont écrits avant que le « christianisme » et le judaïsme ne se séparent. À part l'exception tardive d'une seule mention dans l'Évangile selon Luc[N 13], tous les autres, y compris les apocryphes ont pour seul nom: Pilate.

Cette préférence des auteurs juifs tient-elle au fait qu'en Hébreu, dont l'alphabet ne comporte pas de voyelles, le nom Pilate évoque la racine « plt » qui signifie libérer[N 14] ? Pilate serait-il plus connu comme celui qui a été contraint de libérer Jésus Barabbas[N 15] par une quasi émeute des Juifs de Jérusalem, que comme celui qui a crucifié Jésus Christ ?[interprétation personnelle] Selon Jean-Pierre Lémonon, le témoignage de Philon, même s'il est peut être exagéré, n'en constitue pas moins « un témoignage valable sur le mauvais souvenir laissé en Judée par Pilate lors de son gouvernement[37] ». La célébrité qu'il semble avoir chez les Juifs pourrait venir du « mauvais souvenir laissé par Pilate ». À l'instar de ce que que fait Philon, les juifs profitaient peut-être de la sanction qui a frappé Ponce Pilate, pour critiquer sans risque, les agissements des romains et valoriser, en l'exagérant, la sagesse et la tolérance de Tibère (en fait celle de Vitellius). Cette célébrité de Pilate semble rejaillir sur le « fameux Barabbas » comme l'alter ego de Jésus est appelé dans l'Évangile selon Matthieu[38]. Surtout, que le prénom de ce prisonnier célèbre est aussi Jésus. Celui-ci semble avoir été enlevé de l'évangile attribué à Matthieu vers le IIIe ou IVe siècle car disait Origène, il ne convenait pas qu'un brigand porte le nom prestigieux de Jésus[N 15],[39]. Avant cette coupure, Pilate proposait à la foule cet étonnant dilemme: « Lequel voulez-vous que je vous relâche, Jésus Barabbas (Jésus fils du Père), ou Jésus que l'on appelle Christ[40] (surnommé Fils de l'Homme dans les évangiles)[39] ? ».

De même, la parodie que le vice-roi d'Egypte Flacchus, fait subir à Agrippa Ier[41], nouveau roi des juifs, à Alexandrie qui présente de nombreux points communs avec les récits de la Passion contenus dans les évangiles, peut signifier que l'humiliation que Pilate a fait subir au « fou », Jésus Barabbas, qui se prétendait roi des Juifs ou que l'on présentait comme tel, avait déjà fait le tour de la Méditerranée. Or, cette parodie a lieu en été 38, c'est-à-dire à peine 16 ou 18 mois après le renvoi de Pilate, même si le nom que l'on trouve aujourd'hui dans le texte de Philon d'Alexandrie n'est pas Barabbas mais Karabbas, un Kappa ayant très bien pu remplacer un Béta au fil des recopies.

Chez Flavius Josèphe et Tacite

Cette célébrité semble confirmée et toujours présente, lorsque Flavius Josèphe écrit la Guerre des Juifs et que pour tenter d'expliquer pourquoi la ville a été prise et le Temple de Jérusalem détruit, il raconte le sort qu'un Procurateur a fait subir à un Jésus (qu'il appelle Jésus d'Ananias), et les malédictions lancées par celui-ci sur Jérusalem pendant tout le temps où il est flagellé[42]. Comme pour Jésus Barabbas, après la flagellation, Jésus d'Ananias est libéré.

L'ambigüité résultant de l'usage du seul surnom Pilate, semble satisfaire les évangélistes, peut-être était-elle recherchée[N 16].

Il n'existe aucune trace de Ponce Pilate chez les romains (archives, chroniques, écrits littéraires ou historiques), alors qu'il semble avoir été très célèbre, puisque près de 80 ans après les faits, Tacite peut en parler à ses lecteurs sans avoir besoin de fournir la moindre précision[N 17].

Actes du procès de Pilate

Cette célébrité semble encore présente, lorsque vers 150, Justin de Naplouse écrit à « l'Empereur, au Sénat et à tout le peuple », une apologie des chrétiens dans laquelle il invite ses destinataires à se référer aux « Actes du procès de Pilate » qui, d'après lui, confirmeraient ses dires. Cela montre que ces faits sont encore connus plus d'un siècle après, puisque Justin se contente de renvoyer ses lecteurs à ce procès, sans donner plus d'explication. En 150, l'implantation des idées chrétiennes dans l'administration romaine, commence à peine, donc si Justin s'abstient d'expliquer c'est qu'il table sur un niveau de connaissance générale dans la société romaine de l'époque, qui ne peut exister que parce que les événements vécus par Ponce Pilate et/ou Jésus ont connu une certaine célébrité.

Encore au IVe siècle, pour transformer les mentalités, l'empereur Maximin Daïa aurait fait rédiger des « Actes » de Pilate dirigés contre les chrétiens[N 18]: Selon Eusèbe de Césarée, « Dans les écoles, durant toute la journée, les enfants avaient à la bouche jésus, Pilate et les Actes fabriqués par outrage[43],[44] ». D'après Jean-Pierre Lémonon, ce serait d'ailleurs en réponse à ces Actes, que les « Actes de Pilate » chrétiens auraient été rédigés.

Cela signifierait qu'il y a bien eu un procès de Pilate à Rome dont, à part les apocryphes chrétiens, plus aucun texte grec ou latin ne parle aujourd'hui. Il faut bien alors s'interroger sur le fait qu'il n'existe aucun texte d'auteurs païens parlant de Ponce Pilate qui soit parvenu jusqu'à nous. En particulier, on ne peut que constater que les Annales de Tacite nous ont été entiérement conservées, à l'exception des livres couvrant le règne de Caligula et le début du règne de Claude.

Parodie dans le Satyricon de Pétrone

Article détaillé : [[Satyricon et évangile selon Marc]].

Venant après d'autres, les recherches de littérature comparée du professeur italien Ilaria Ramelli montrent que le Satyricon de Petrone, écrit vers 64-65, contient une parodie flagrante de l'histoire de Jésus, en particulier de la scène que les chrétiens appellent souvent « l'onction de Béthanie »[45],[46]. Ilira Ramelli signale des éléments parodiques chez d'autres auteurs antiques, notamment chez Cariton d’Aphrodisie (déjà analysés par G. Bowersock ou C. P. Thiede)[N 19], chez Juvénal et probablement chez Apulée (IIe siècle), notamment dans les Métamorphoses souvent appelé « L'Âne d'Apulée »[N 20].

Ce ne serait alors plus seulement Pilate et Jésus Barabbas qui auraient été célèbres à l'époque, mais Jésus de Nazareth lui-même et donc probablement l'histoire de cette crucifixion.

Le nom de Pilate

Une mention au début de l'Évangile selon Luc, un passage des Antiquités judaïques de Flavius Josèphe[7] et une courte phrase de Tacite, dont l'authenticité est très contestée[N 21] sont les trois seuls textes qui nous permettent de savoir que le surnommé Pilate s'appelait « Pontius ». Ces trois seuls passages nous donnent donc le nom de Pontius, l'inscription retrouvée à Césarée en 1961 ne comportant que les deux dernières lettres du nom de ce Préfet (...VS PILATV[S]).

Pontius est son nom (nomen), Pilatus son surnom, on ignore son prénom (praenomen)[47].

Le renvoi de Ponce Pilate

Sommaire de la section

Sur ordre du légat de Syrie Lucius Vitellius auprès duquel se multiplient les plaintes venues tant des Juifs que des Samaritains[48] Ponce Pilate est obligé de quitter la Judée pour s'expliquer auprès de l'empereur « sur ce dont l'accusaient les Juifs ». La décision du légat de Syrie qui est aussi consul semble sans appel, Ponce Pilate « se hâte » même de gagner Rome « pour obéïr aux ordres de Vitellius auxquels il ne pouvait rien objecter[49] ».

Ponce Pilate est renvoyé vers la fin 36 ou au début 37[1]. Dès sa nomination comme légat de Syrie (en 34), Vitellius avait fait preuve d'une toute autre attitude que celle qui ressortait des provocations de Pilate et réussit à rétablir l'ordre par une politique conciliante à l'égard des traditions juives. Ces provocations semblent même s'être arrêtées avec la prise de fonction de Vitellius. Il démet le grand prêtre Caïphe, par trop lié à Pilate, et rend aux prêtres du temple la supervision des cérémonies des grandes fêtes cultuelles juive en leur restituant les habits sacerdotaux que s'était arrogé le pouvoir romain[48].

Un désaveu total

Un tel renvoi d'un gouverneur romain de Judée est exceptionnel et même unique chez Flavius Josèphe. Il existe d'autres épisodes où des procurateurs ou des préfets sont envoyés à Rome pour s'expliquer sur plainte de la population, mais à chaque fois il est procédé tout à fait autrement. Dans un premier temps des délégués juifs ou samaritains sont envoyés à Rome, ceux-ci étant pris parmi des personnalités importantes porteuses de ces doléances[N 22] et seulement ensuite le gouverneur les rejoint pour l'audience auprès de l'empereur. Cette fois-ci, seul Ponce Pilate est envoyé à Rome sans qu'aucun des membres du « conseil des Samaritains » qui se sont « rendus auprès de Vitellius » ne l'accompagne ou ne le précède.

Ce désaveu de Ponce Pilate est d'autant plus étonnant que Flavius Josèphe précise bien que « croyant véridiques les paroles [d'un prédicateur, les Samaritains] prirent les armes », et se regroupèrent en masse « dans un village nommé Tirathana ». D'un point de vue romain, si des samaritains se sont regroupés en armes, l'intervention de Pilate est non seulement légitime mais c'est, au contraire, s'il n'était pas intervenu qu'il aurait dû être sanctionné. Rien donc qui justifie une sanction et encore moins la procédure exceptionnelle qu'a choisie Vitellius.

Ce qui est étonnant aussi c'est que Flavius Josèphe semble confondre les samaritains et les juifs. Flavius Josèphe est lui même juif, pharisien d'une grande famille de prêtre au Temple, ayant été lui même un des grand-prêtres, il a en outre été un général ayant dirigé la Galilée pendant la révolte de 66 - 70, il est quasiment impossible qu'il puisse associer la phrase « ce que lui reprochaient les juifs » avec le fait que ce sont des Samaritains qui se sont révoltés et l'affirmation que c'est « le conseil des samaritains » qui s'est rendu auprès de Vitellius pour se plaindre.

Quand a eu lieu le renvoi de Pilate ?

Si Flavius Josèphe respecte l'ordre chronologique, cette révolte a lieu avant 34, puisque par exemple la mort d'Hérode Philippe, les événements qui s'y rapportent et plusieurs événements prenant place entre 34 et la mort de Tibère sont racontés ensuite. Pourtant, c'est à ce moment que le texte place le départ de Pilate et ce dernier disparaît du texte ensuite. C'est uniquement si l'on connaît précisément la date de la mort de Tibère et la date des événements qui suivent que l'on peut se rendre compte que la narration du départ de Pilate est très anticipée[50]. Il est évident que de telles connaissances et qu'une telle attention ne sont pas à la portée de n'importe quel lecteur et que pendant des siècles personne n'a parlé de cet étrangeté du texte de Flavius Josèphe.

On remarque que tous les événements qui sont racontés après cette révolte et la mention du départ de Ponce Pilate, prennent place entre 34 et la pâque 37. Or c'est une dizaine d'événements majeurs, avec des développements, qui sont racontés en sept chapitres entre l'annonce du départ de Pilate et son départ réel entre la fin 36 et mars-avril 37[N 23][interprétation personnelle].

Article détaillé : Testimonium flavianum.

Il arrive que pour des commodités de rédaction, Flavius Josèphe anticipe ou retarde une narration, mais en ce cas il le signale, ce qui non seulement n'est pas le cas ici, mais s'accompagne de faits très troublants: un désaveu public et quasiment sans appel d'un préfet qui est intervenu contre un important rassemblement armé, une sanction exceptionnelle et une confusion vraiment étrange pour un grand-prêtre pharisien entre juifs et samaritains. Plusieurs auteurs ont donc envisagé que ce passage avait été remanié. Il faut dire qu'il se trouve à proximité de quatre autres passages qui sont eux aussi soupçonnés d'avoir été remaniés ou interpolés, dont le célèbre Testimonium flavianum.

Pour Jean-Pierre Lémonon, Pilate part à Rome entre décembre 36 et février 37 et son arrivée à Rome après la mort de Tibère s'explique par le fait qu'il s'y est rendu par voie terrestre. (La navigation était suspendue en hiver, toutefois celle-ci reprenait le 5 mars, par exemple à Misène avec la fête dite « Isidis Navigium ».)

Tout le monde s'accorde de toute façon, sur le fait que ce départ est intervenu bien après 34 où pourtant le texte de Flavius Josèphe semble le situer.

Quel est le motif du renvoi de Pilate ?

Ces interrogations sur le texte de Flavius Josèphe conduiraient naturellement à essayer de trouver ces informations chez d'autres auteurs antiques et notamment chez Tacite qui fait une relation précise de tout ce qui se passe à Rome. Puisque Ponce Pilate a été renvoyé à Rome « pour renseigner l'empereur sur ce dont l'accusaient les Juifs », la relation de cette explication a vraisemblablement été faite par Tacite. Malheureusement, les livres des Annales de Tacite qui couvrent la période des empereurs Caligula et Claude ne nous ont pas été conservés, ses livres s'interrompent justement avec la mort de Tibère, pour ne reprendre qu'après Claude[N 24]. Cela conforte l'opinion de ceux qui pensent que chez Flavius Josèphe, le départ de Pilate a été déplacé et le motif de ce départ changé car ce renvoi avait un rapport avec les événements relatés par les Évangiles.

Toutefois, « P. L. Maier a cru pouvoir affirmer qu'il n'y eu probablement pas de procès contre Pilate en raison de la mort de Tibère[51]. » Dans ce cas, le manque des textes de Tacite, s'expliquerait pour de toutes autres raisons. Il appuie son opinion sur des textes de Suétone et Dion Cassius, qui font allusion à une amnistie générale au début du règne de Caligula.

Y a-t-il eu un procès de Pilate ?

Selon Jean-Pierre Lémonon: « Les textes avancés par P. L. Maier ne manquent pas de pertinence, ils ne permettent pas cependant de définir avec certitude le sort de Pilate d'autant plus que la violence de la lettre d'Agrippa, rapportée par Philon [...] invite à nuancer les propos de P. L. Maier. Philon utiliserait-il des propos aussi violents à l'adresse d'un fonctionnaire romain si celui-ci n'avait pas été officiellement blâmé pour son comportement en Judée[51] ? » Les propos d'Agrippa sous la plume de Philon d'Alexandrie sont en effet sans équivoque, parlant de Pilate ; il écrit entre autres:

« Il craignait que, si on envoyait des députés on ne vînt à découvrir les autres méfaits de son gouvernement, ses vexations, ses rapines, ses injustices, ses outrages, les citoyens qu'il avait fait périr sans jugement, enfin son insupportable cruauté[14]. »

Peut-on imaginer qu'un auteur juif d'Alexandrie ait pu prendre un tel risque en s'exprimant sur un haut responsable romain, « membre de la classe équestre » et ancien Préfet, si celui-ci n'avait pas été disgracié ?

Pilate, les traditions chrétiennes, la légende

Malgré son apparente célébrité, aucun texte d'auteurs romains qui parlait de Ponce Pilate n'a été conservé. Seuls des textes d'auteurs juifs parlent de lui, mais Flavius Josèphe s'arrête à son arrivée à Rome. Ensuite, ce sont les auteurs chrétiens qui prennent le relais. Le théologien catholique Jean-Pierre Lémonon estime que « dès son arrivée à Rome, Pilate échappe à l'historien[51]».

Les récits chrétiens sur Ponce Pilate sont très nombreux, comme les autres écrits, y compris les Évangiles, la plupart revêtent des caractères légendaires évidents.

Les Actes de Pilate

Une série de textes fait référence à des Actes de Pilate qui ont donné lieu à des écrits chrétiens connus sous le même nom ou sous celui d'Évangile de Nicodème. L'apparition de ces textes chrétiens (vers le VIe siècle) a une histoire.

Les Actes de Pilate chez Justin de Naplouse

Le premier auteur chrétien à parler d'Actes de Pilate, est saint Justin de Naplouse (appelé aussi Justin Martyr) qui vers 150 écrit à « l'Empereur, au Sénat et à tout le peuple[N 25] »,, la première de ses deux apologies du christianisme. Il s'agit de prouver que les membres de l'Église n'ont rien à voir avec les juifs messianistes pour lesquels les romains ont inventé le nom de chrétiens, qui à cette époque sonne comme une « qualification criminelle ». Les romains rendent en effet responsable ces chrétiens des révoltes extrêmement sanglantes qui ont lieu depuis un siècle parmi les juifs de la diaspora et en particulier la révolte des exilés qui a embrasé la méditerranée de 115 à 117.

Dans cette apologie, Justin fait référence à deux reprises à des « Actes de Pilate » qui ne sont bien sûr pas le futur texte chrétien, mais « des minutes du procès, conservées dans les archives romaines[52]. » Dans ces deux passages, l'auteur renvoie ses lecteurs à ces Actes pour prouver la véracité de ses dires. « En consultant les Actes de Pilate, les romains auquel Justin destine son œuvre, pourront vérifier la réalisation des prophéties dans les événements qui ont marqué la passion du Christ[53]. » écrit Jean-Pierre Lémonon. Il se range à l'avis d'autres auteurs pour dire que « les Actes de Pilate auxquels Justin renvoie sont à recevoir comme une supposition de Justin : il conjecture que les romains disposent d'archives qui leur permettent de contrôler l'exactitude de ces affirmations[53]. » Si cette hypothèse est recevable, d'autres auteurs font remarquer que Justin suppose que ses interlocuteurs (dont font partie la plus haute administration de l'empire et le Sénat) sont au courant de l'existence d'un procès de Pilate ayant concerné un Jésus, sinon ses arguments seraient complètement inopérants. Justin n'a probablement pas eu entre ses mains les actes du procès de Pilate, mais il pourrait tout autant faire référence à la version de ces Actes publiée par des historiens comme Tacite dont les livres des Annales qui couvrent justement cette période, ne nous ont malheureusement pas été conservés.

Eusèbe de Césarée et les Actes dirigés contre les chrétiens

Au début du IVe siècle, Eusèbe de Césarée connaît un rapport de Pilate à Tibère, sans que l'on puisse déterminer s'il s'agit du même que celui auquel faisait référence Tertullien dans son Apologétique (écrit vers 197). Mais pour Eusèbe, Pilate « se fait le simple écho de ce qui s'est passé et se dit dans la province dont il a la charge[44] », alors que conformément aux Évangiles, Tertullien faisait de Pilate un « chrétien de cœur[54],[55] ». Au contraire pour Eusèbe, « Pilate ne prend pas en compte ce qu'il rapporte[44]. » Pour Jean-Pierre Lémonon, les écrits d'Eusèbe concernant « le rapport de Pilate » sont dépendants de l' Apologétique de Tertullien dont il donne d'ailleurs la référence explicite. Toutefois, Eusèbe « ne fait pas mention du texte de l' Apologétique qui présente Pilate comme un chrétien de cœur car il est également l'écho d'une tradition qui met en valeur le châtiment de Pilate[44]. » En effet dans son Histoire Ecclésiastique, Eusèbe de césarée s'appuie sur « les écrivains grecs qui nous ont laissé la suite des olympiades avec les événements survenus à leur date » pour mentionner que Ponce Pilate n'aurait pas survécu longtemps à sa disgrâce et se serait donné la mort alors que Caligula était empereur (37 - 41)[56].

Mais Eusèbe ne parle pas seulement d'un rapport de Pilate à l'empereur, il mentionne aussi l'existence d'Actes anti-chrétiens qu'il appelle « Actes de Pilate et de notre Sauveur[57] ». Pour transformer les mentalités, l'empereur Maximin Daïa aurait fait rédiger des « Actes » de Pilate dirigés contre les chrétiens: « Dans les écoles, durant toute la journée, les enfants avaient à la bouche jésus, Pilate et les Actes fabriqués par outrage[43],[44] ». « On y retrouvait des thèmes classiques empruntés parfois aux polémiques entre chrétiens et juifs. Plusieurs attaques sont liées à la naissance de jésus: Jésus serait né hors des liens du mariage, il serait un fruit de la débauche; ses parents ont fui en Égypte en raison de leur honte ; si Jésus était fils de Dieu, celui-ci n'aurait pas laissé massacrer des innocents lors de la naissance de son fils[58] ». Les miracles de Jésus « étaient des actes de magie. Sa prétention à la royauté et son activité de malfaiteur l'ont conduit à la mort. La résurrection y était ramené à une affirmation subjective, car comme déjà Celse l'affirmait, il n'était pas convenable que « le Ressuscité » ne se manifeste pas au plus grand nombre, en particulier à ses ennemis[58]. »

Les Actes de Pilate de la tradition chrétienne

Vers la fin du IVe siècle apparaissent les Actes de Pilate chrétiens qui donneront naissance à l'Évangile de Nicodème dans une Homélie sur la date de Pâques datant de 387 et dans un passage du Panarion d'Épiphane de Salamine.

Selon des traditions divergentes, Pilate se serait ensuite converti et serait mort martyr, ou aurait été puni par Tibère et exécuté. Un document nommé actes de Pilate (ou Évangile de Nicodème), quoique considéré dès les origines comme apocryphe, a fortement influencé la culture occidentale.

La légende d'Abgar

Légendes diverses

De nombreux autres récits existent. Selon le Mors Pilati (« Mort de Pilate »), son corps fut d'abord jeté dans le Tibre. Les eaux réagirent si vivement aux esprits malins, que son cadavre fut conduit à Vienne et jeté dans le Rhône. Ici aussi les eaux réagirent et son corps dut être noyé dans le Léman à Lausanne. Selon cette tradition, le corps décomposé fut en dernier lieu enterré au pied du Pilatus qui domine Lucerne et le lac des Quatre Cantons.

La légende veut que chaque Vendredi saint, le corps émerge des eaux du lac et se lave les mains.

D'autres récits racontent qu'il se serait suicidé dans le Rhône à Vienne. Un monument de la ville, la « tombe de Pilate », en fait un monument marquant le centre du cirque romain, évoquerait ce récit. D'autres attribuent aussi le nom du massif du Pilat, qui commence à Vienne, à cette origine.

Culte

Les églises éthiopienne orthodoxe et copte orthodoxe célèbrent Ponce Pilate comme saint. Selon cette tradition, il se serait converti en secret au christianisme, sous l'influence de sa femme Claudia Procula (ou Claudia Procla). Ils sont tous les deux fêtés le 25 juin.

L'Église orthodoxe honore seulement Claudia, le 27 octobre.

Postérité

Anatole France (1844–1924), Prix Nobel de Littérature en 1921.

Le personnage de Ponce Pilate a inspiré beaucoup d'œuvres. On peut citer L'Évangile selon Pilate d'Éric-Emmanuel Schmitt, Le Procurateur de Judée d'Anatole France ou Ponce Pilate de Roger Caillois, uchronie dans laquelle l'auteur imagine que Pilate gracie Jésus et transforme ainsi l'histoire du monde.

De même, le personnage de Ponce Pilate est l'une des figures centrales du roman Le Maître et Marguerite de Mikhaïl Boulgakov, où c'est un personnage triste, profondément humain, accablé par sa charge et laissant crucifier Jésus à contre-cœur qui est décrit.

Au cinéma, Ponce Pilate a fait l'objet de nombreuses incarnations dans des films sur la passion de Jésus : Jean Gabin dans Golgotha, Rod Steiger dans Jésus de Nazareth de Franco Zefirelli, David Bowie dans La Dernière Tentation du Christ de Martin Scorsese, Hristo Chopov dans La Passion du Christ de Mel Gibson ou Michael Palin dans La Vie de Brian de Monty Python. En 1962, Gian Paolo Callegari réalisa Ponzio Pilato évoquant la vie de Pilate avec Jean Marais dans le rôle du préfet de Judée.

Dans le livre le Frère de sang d'Éric Giacometti, et Jacques Ravenne, les auteurs se moquent des fantasmes de complot judéo-maçonnique en brodant sur le fait que Pilate est présenté comme un franc-maçon qui a comploté avec les Juifs pour crucifier le Christ.

Notes

  1. De « pilatus », « titulaire d'un javelot d'honneur », d'un pilum).
  2. Félix Benoit, dans son ouvrage Lyon secret, se fait l'écho d'historiens et autres érudits lyonnais du XIXe siècle pour évoquer le lieu de naissance de Ponce Pilate. Il serait né en -19 dans le quartier de Fourvière à Lugdunum, aujourd'hui Lyon, où son père aurait occupé un poste de haut-fonctionnaire romain. Toutefois aucun historien ne reprend cette information.
  3. « Pour l'arrivée de Pilate en Judée, Eusèbe de Césarée donne deux dates différentes. Dans l'Histoire ecclésiastique, il parle de la douzième année de Tibère (25 - 26), dans sa Chronique de la treizième annéee (26 - 27). » cf. Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, pp.  122.
  4. Pour l'écrivain chrétien Eusèbe de Césarée (Histoire ecclésiastique, Livre II, § VII), Ponce Pilate n'aurait pas survécu longtemps à sa disgrâce et se serait donné la mort alors que Caligula était empereur (37 - 41).
  5. C'est tout au moins ce que dit Flavius Josèphe et ce qui ressort des textes antiques à notre disposition.
  6. Flavius Josèphe donne une version différente et dit que c'est Pilate lui-même qui donna cet ordre.
  7. Un peu plus tard il souleva une nouvelle émeute en épuisant, pour la construction d'un aqueduc, le trésor sacré qu'on appelle Korbónas ; l'eau fut emmenée d'une distance de 400 stades. Flavius Josèphe, Guerre des Juifs, livre II, IX, 4
  8. Ces graves incidents ce seraient donc produit de 29 à 34, excepté au moins, l'incident des images à Jérusalem que tout le monde considère comme s'étant produit dès l'arrivée de Pilate en Judée.
  9. Dans une digression du XV° livre des Antiquités judaïques de Flavius Josèphe, Vitellius ne prend cette décision qu'après avoir écrit à Tibère et que celui-ci ait formulé son assentiment.
  10. Appelé aussi « quatrième philosophie » par Flavius Josèphe.
  11. Dans la Guerre des Juifs de Flavius Josèphe, après la prise de Jérusalem (70), on voit Titus distribuer à ses soldats et ses officiers des décorations dont des javelots d'or et d'argent.
  12. Flavius Josèphe parle une seule fois de Pilate en disant Ponce Pilate (Antiquités Judaïques, XVIII, II, 2).
  13. Ce passage qui parle du Procurateur Ponce Pilate a souvent été considéré comme une insertion tardive, car il reprend mot à mot le prologue de l'évangile de Marcion, apporté par ce même Marcion vers 140 à Rome.
  14. Aux premiers siècles, la population juive (pas seulement les scribes ou les docteurs) aimait faire des jeux de mots sur le nom des personnages publics. En hébreu, le mot qui se prononce PâLaT signifie « libérer », « délivrer », « sauver ». Comme l'hébreu ne comporte pas de voyelle, « Pilate » et « libérer » s'écrivent de la même manière. Les jeux de mots sont d'ailleurs un procédé constant du midrash.
  15. a et b Certains manuscrits anciens montrent que le prénom de Barabbas est Jésus. Par exemple le verset Matthieu 27:16. (Barabbas Article de Jean-Paul Michaud, 2003, sur le site Interbible). Un passage de l'auteur chrétien Origène laisse penser que le prénom de Barabbas a été enlevé vers le IIIe siècle car disait Origène, il ne convenait pas qu'un brigand porte le nom prestigieux de Jésus.
  16. Lorsque l'auteur de l'évangile attribué à Matthieu veut un tout petit peu sortir de cette ambigüité, il écrit « Pilate, le Procurateur », ce qui renvoie la mort de Jésus Christ après 45, moment où le titre de certains gouverneurs de provinces romaines devient: Procurateur.
  17. Décrivant, vers 115, la répression de juifs messianistes, accusés par Néron d'avoir incendié Rome (en 64), Tacite semble un des premiers auteurs à utiliser le terme de Chrétien. Pour expliquer ce terme, il écrit: « Ce nom leur vient de Christ, qui, sous Tibère, fut livré au supplice par le procurateur Pontius Pilatus. » Plusieurs auteurs mettent en doute l'authenticité de cette phrase. Ils font remarquer que Tacite fait comme si tout le monde savait qui était Ponce Pilate plus de 80 ans après sa disgrâce et bien avant que le mouvement chrétien soit suffisamment important pour que ses traditions soient connues. Pour eux, si Tacite était l'auteur de cette phrase, il aurait fourni quelques explications à ses lecteurs et la seule mention de la Judée dans la phrase suivante ne suffit pas. Leurs arguments semblent logiques, à moins que la célébrité de la confrontation entre Jésus Barabbas et Pilate soit venue d'écrits très populaires qui auraient été encore en circulation vers 115.
  18. Eusèbe de Césarée mentionne l'existence d'Actes anti-chrétiens qu'il appelle « Actes de Pilate et de notre Sauveur; cfEusèbe de Césarée, Histoire Ecclésiastique, Livre IX, § V, 1s
  19. « Cariton d’Aphrodisie, qui, chronologiquement, se place tout près de Pétrone, présente des scènes de crucifixion, de vol de cadavre et de résurrection, toutes apparentes : spécialement à propos de la résurrection ». cf Ilaria Ramelli, op. cit.
  20. Ilaria Ramelli sort de cette étude avec « l’assurance, indubitable dans certains cas, probable dans d’autres, que les romanciers grecs et latins connaissaient le Christianisme, et le connaissaient aussi dans les siècles postérieurs au Ier siècle. » cf Ilaria Ramelli, op. cit.
  21. Outre l'argument exposé dans la note ci-dessus, les auteurs qui contestent l'authenticité de la phrase de Tacite font remarquer que ce texte qui évoque la participation des chrétiens dans l'incendie de Rome était inconnu avant le XVe siècle et que celui qui l'a découvert est l'humaniste italien Le Pogge qui était secrétaire particulier du Pape Eugène IV. Ils font aussi remarquer que le titre exact de Ponce Pilate est « Préfet » et pas « Procurateur » et que jamais Tacite n'aurait pu se tromper à ce sujet. Toutefois, s'il est possible que des copistes chrétiens aient harmonisé cette appellation avec celle des évangiles lors des recopies, cela n'invalide pas la phrase entière.
  22. Le fait d'être choisi comme délégué comportait une certaine dose de risque. Par exemple, dans un conflit qui mettait en cause le procurateur Antonius Felix, le grand prêtre Ananias sera ensuite retenu à Rome, l'obligeant à démissionner de sa fonction de grand-prêtre, alors même que l'empereur a semblé donner raison aux plaignants.
  23. Outre la mort d'Hérode Philippe, il en est ainsi de:
  24. Aucun livre d'auteur latin ou grec parvenu jusqu'à nous ne parle de Ponce Pilate. Au Ier siècle, seuls des livres d'auteurs juifs en parlent. À partir de 150 seuls des auteurs chrétiens en parlent. La phrase de tacite qui mentionne Ponce Pilate, ne nous apprend rien sur le point de vue romain à son sujet.
  25. « À l'empereur Titus Aélius Hadrien Antonin le Pieux, Auguste, César, et à Vérissimus (Marc Aurèle), César, fils d'Auguste, philosophe et à Lucius, philosophe, fils de César selon la nature et d'Antonin le pieux par l'adoption, ami de la culture, au sacré Sénat et à tout le peuple romain, en faveur des hommes de toute origine, injustement haïs et persécutés, moi l'un d'eux, Justin [...] originaire de Flavia Neapolis, cité de Syrie-Palestine, j'adresse ce discours et cette pétition. »

Références

  1. a et b Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, pp.  223-225, extrait en ligne
  2. Cette légende, qui suit la tradition rapportée par Eusèbe de Césarée, est le calque de l'exil d'Hérode Archélaos, fils d'Hérode le Grand exilé à Vienne ; cf. Jean-Pierre Lémonon, op. cit. pp.  253-254, note 140, note en ligne
  3. Bertrand Westphal,Roman & évangile: transposition de l'évangile dans le roman européen, éd. Presses universitaires de Limoges, 2002, pp.  44-73, extraits en ligne
  4. Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, p.  264, extrait en ligne
  5. Guy Couturier (professeur émérite de la faculté de théologie de l'Université de Montréal), « L'inscription de Ponce Pilate », interbible.org, 16 mars 2007.
  6. Ferdinand Delaunay Écrits historiques de Philon d'Alexandrie (1867)
  7. a et b Flavius Josèphe, Antiquités Judaïques, XVIII, II, 2.
  8. Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, pp. 52-53.
  9. « dans le cours de cette année (vers 45), on entendit Claude répéter souvent que les jugements de ses procurateurs devaient avoir la même force que si c'était lui qui les eût prononcés., cf. Tacite, Annales, XII, 60. »
  10. cf.Tacite, Histoires, Livre V, 9.
  11. Michel Dubuisson, Le « Procurateur » de Judée, p. 133.
  12. Evangile attribué à Jean, 18:38
  13. Rien ne permet d'affirmer, comme l'on fait certains auteurs, que Barabas était membre du parti zélote auquel les auteurs des évangiles, écrits après la révolte juive de 66-70 dont ce parti fut le moteur, ont pu le rapprocher ; cf. Raymond E. Brown, La mort du Messie, éd. Bayard, 2005, pp.  766-768, cité par Jean Zumstein, L'évangile selon saint Jean (13-21), vol. 2, éd. Labor et Fides, 2007, p.  229, extrait en ligne
  14. a, b, c, d et e Philon d'Alexandrie, « Légation à Caïus » sur remacle.org
  15. a, b et c Flavius Josèphe, Guerre des Juifs, livre II, IX, 2
  16. Flavius Josèphe, Guerre des Juifs, livre II, IX, 3.
  17. Philon d'Alexandrie, Légation à Caïus, § 288 (du texte Grec), sur remacle.org
  18. a et b Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, ed. Atelier, Paris, 2007, ISBN 978-2-7082-3918-0, p. 197 extraits en ligne sur books.google.fr.
  19. a et b Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, p. 257.
  20. Voir à ce sujet: E. Stauffer, Jesus, Gestalt und Geschichte, Berne, 1957, pp. 99-101; E. Bammel, RCGR 5, 1961, col. 383; E. Bammel, Syrian Coinage and Pilate, pp.  108-110; E. Bammel, Philos tou Kaisaros, dans ThLZ 77, 1952, pp. 205-210; P. L. Maïer, The episode of the Golden Roman Shields at Jerusalem, pp. 114-115; M. Grant, The Jews in the Roman World, p. 94 et 99.
  21. « Selon [Philon d'Alexandrie] (Légation à Caïus 159-161), c'est peu avant sa mort, survenue en 31, que Séjan projeta ses attaques radicales contre les Juifs, toutefois la mort l'empêcha de réaliser l'ensemble de ses projets. » Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, pp.  201-202.
  22. Tibère « charge Vitellius de diriger toutes les révolutions qui se préparaient en Orient. » c.f. Tacite, Annales, Livre VI, § XXXII
  23. Flavius Josèphe, Antiquités Judaïques, Livre XVIII, V, 1.
  24. Pour voir les débats sur ces dates, cf. Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, pp.  223-225, extrait en ligne
  25. Lc 3. 1
  26. Le règne de Tibère va de 14 à 37.
  27. Évangile attribué à Luc, Bible de Jérusalem, Lc 13. 1
  28. Voir par exemple1Ti 6. 13, Ac 3. 13, Ac 4. 27, Ac 13. 28
  29. Mt 27. 1-2 puis Mt 27. 11-26, Mc 15. 1-15, Lc 23. 1-24, Jn 18. 28 puis Jn 19. 4-31
  30. Evangile attribué à Matthieu, Mt 26. 47.
  31. Jn 19. 5
  32. La Bible de Jérusalem, Jean, chapitre 18"Je ne trouve en lui aucun motif de condamnation. Mais c'est pour vous une coutume que je vous relâche quelqu'un à la Pâque. Voulez-vous que je vous relâche le roi des Juifs ? "
  33. Mt 27. 24
  34. Mt 27. 62-65
  35. Lc 23. 11-12
  36. Voir à ce sujet: Flavius Josèphe, Guerre des Juifs, Livre VII.
  37. Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, pp. 204-205, extrait en ligne
  38. Évangile selon Matthieu, 27:16, « On avait alors un prisonnier fameux, nommé Barabbas », d'après la Bible de Jérusalem, Éd. du Cerf.
  39. a et b Jérôme Prieur, Gérard Mordillat, Jésus contre Jésus, Éd. du Seuil, 2008.
  40. Nouveau Testament, Évangile selon Matthieu, Bible de Jérusalem, Éd. du Cerf. 27, 17.
  41. Philon d'Alexandrie, Contre Flaccus.
  42. Flavius Josèphe, Guerre des Juifs, Livre VI, V, 3.
  43. a et b Eusèbe de Césarée, Histoire Ecclésiastique, Livre IX, § V
  44. a, b, c, d et e Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, p. 235, extrait en ligne
  45. Ilaria Ramelli, Indices de la connaissance du Nouveau Testament chez les romanciers de l’Antiquité et autres auteurs païens du Ier siècle, Intervention au congrès sur « La Contribution des Sciences Historiques à l’Étude du Nouveau Testament », (Rome, 2-6 octobre 2002), traduction: Nouvelles de l’Association Jean Carmignac.
  46. (en) Ilaria Ramelli, « The Ancient Novels and the New Testament: Possible Contacts », dans Ancient narrative, vol. 5, 2007, p. 41-68 (ISBN 978-90-77922-26-2) .
  47. Selon Pierre Vidal-Naquet, l'usage était les tria nomina, les trois noms du citoyen romain, Les deux premiers étaient le praenomen et le nomen. cf Pierre Vidal-Naquet, Du bon usage de la trahison, préface de la Guerre des Juifs de Flavius Josèphe, traduit par Pierre Savinel, Éd. de Minuit, Paris, 1977, pp. 24-25.
  48. a et b Mireille Hadas-Lebel, Rome, la Judée et les Juifs, éd. Picard, 2009, p.  74
  49. Flavius Josèphe, Antiquités judaïques, livre XVIII, IV, 2
  50. Constatant que ce qu'ils appellent les « provocations » de Pilate se déroulent au début de son gouvenorat pour cesser ensuite, plusieurs auteurs ont expliqué que Pilate aurait été nommé par Séjan pour faire ces « provocations » anti-juive. Ils placent donc ces « provocations » encore plus tôt que 34. Toutefois, « l'explication Séjan » n'est qu'une hypothèse qui souffre de n'être directement supportée par aucun texte, car Philon d'Alexandrie ne dit pas des choses aussi précises. Ainsi Jean-Pierre Lémonon écrit: « Des auteurs aussi importants que E. Stauffer, E. Bammel, P.L. Maier ou M. Grant ont voulu distinguer dans la carrière de Pilate un « avant » et un « après » Séjan. Ils ont cru pouvoir expliquer les attitudes de Pilate en fonction de ce critère: Séjan aurait été l'inspirateur de la politique de Pilate. [...] Depuis quelques années, une réaction salutaire se dessine, Séjan n'est plus présenté comme le protecteur de Pilate ». Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, p. 257.
  51. a, b et c Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, p. 225, extrait en ligne
  52. J. D. Dubois, La figure de Pilate: Introduction aux textes relatifs à Pilate dans Pierre Geoltrain et Jean-Daniel Kaestli (éds.), Écrits apocryphes chrétiens Tome II, Paris, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 2005, p. 245.
  53. a et b Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, pp. 232-233, extrait en ligne
  54. Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, p. 233.
  55. Tertullien, Apologétique, V, 1-2.
  56. Eusèbe de Césarée, Histoire Ecclésiastique, Livre II, § VII
  57. Eusèbe de Césarée, Histoire Ecclésiastique, Livre IX, § V, 1s
  58. a et b Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, p. 236, extrait en ligne

Bibliographie

Histoire

Essais et littérature

Liens externes



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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Ponce Pilate de Wikipédia en français (auteurs)

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