Roumanie pendant la Seconde Guerre mondiale

Roumanie pendant la Seconde Guerre mondiale

Royaume de Roumanie

Royaume de Roumanie

Regatul României Roumain


1881 — 1947

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Drapeau Armoiries



Informations générales
 Statut Monarchie constitutionnelle, Dictature (militaire, puis communiste) entre 1940 et 1947
 Capitale Bucarest
 Langue(s) Roumain
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 Monnaie Leu roumain
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Population
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Superficie
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Histoire et événements
13 mars 1881
 10 mai 1881 Couronnement de Charles 1er
 16 juin 1913 Deuxième guerre balkanique
 10 août 1913 Traité de Bucarest
 4 juin 1920 Traité de Trianon
 4 septembre 1940 Coup d'État de Ion Antonescu et de la Garde de fer, qui proclament l'État national légionnaire
 24 août 1944 Le roi Michel 1er renverse Antonescu
 30 décembre 1947 Le roi Michel est forcé à l'abdication par les communistes; proclamation de la République
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Pouvoir exécutif
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Pouvoir législatif
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Entité précédente Entité suivante
Principautés unies de Moldavie et de Valachie Principautés unies de Moldavie et de Valachie
Roumanie communiste Roumanie communiste

Le Royaume de Roumanie était le régime politique de la Roumanie de 1881 à 1947. Né de la guerre d'indépendance de Roumanie, le Royaume disparaît lorsque le pays entre dans la sphère d'influence de l'Union soviétique, laissant place au régime communiste de la République populaire de Roumanie.

Sommaire

Histoire

Article détaillé : Histoire de la Roumanie.

La Roumanie est un État créé au cours du XIXe siècle à partir de la Valachie et de la Moldavie que se disputaient plus ou moins l'Empire ottoman et l' Empire de Russie, dans un processus analogue à l'unité italienne.

L'indépendance du pays est reconnue au Congrès de Berlin en 1878, en même temps que celle de la Bulgarie. Suite à la guerre d'indépendance contre les Ottomans, la Roumanie perd à nouveau le Boudjak mais acquiert les deux tiers de la Dobrogée ((ro) Dobrogea, (bg) Dobroudja) la Bulgarie recevant l'autre tiers. Sous l'impulsion du premier ministre Ion Brătianu, la Roumanie devient un Royaume, Carol étant couronné en mai 1881.

Le gouvernement de Brătianu, en place jusqu'en 1888, entreprend de moderniser le pays par une politique de grand travaux, établissant routes, canaux et chemins de fer. Le pays connaît néanmoins des débuts de troubles politiques avec le déclenchement, à partir de 1907, d'émeutes antisémites dans les campagnes.

Le roi Charles Ier conclut avec l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie une alliance secrète en 1883. Lors de la Première guerre balkanique, la Roumanie reste neutre, mais existe ensuite une rectification des frontières en Dobroudja. N'obtenant pas satisfaction, elle attaque le Royaume de Bulgarie au cours de la Deuxième guerre balkanique, et obtient la Dobroudja du sud par le traité de Bucarest.

Première Guerre mondiale

Au début de la Première Guerre mondiale, le gouvernement roumain s'oppose à Charles Ier et refuse de faire jouer l'alliance avec les puissances centrales. Le roi meurt quelques semaines plus tard, son fils Ferdinand Ier lui succédant. Ion I. C. Brătianu, chef du gouvernement, proclame d'abord la neutralité du Royaume, avant d'entamer des négociations qui aboutissent en 1916 à un ralliement à l'Entente, les Alliés, ayant promis au roi Ferdinand Ier la Transylvanie comme prix de son ralliement.

Le 27 août 1916, la Roumanie déclare la guerre à l'Autriche-Hongrie, mais est défaite militairement. L'armée allemand occupe Bucarest le 6 décembre. La révolution d'octobre qui prive la Roumanie du soutien de l'Empire russe, laissent la Roumanie dans une situation sans espoir : le 9 décembre 1917, un armistice séparé est conclu avec les Empires centraux, le traité de Bucarest de 1918 l'amputant d'une partie de son territoire. Dès le 31 octobre 1918, cependant, la Roumanie dénonce le traité et repart en guerre contre les Empires centraux, bénéficiant au final de la victoire des Alliés.

Entre-Deux-Guerres

Au printemps 1919, le gouvernement de la République soviétique hongroise engage les hostilités contre la Roumanie : les troupes roumaines pénètrent en Hongrie, et occupent bientôt Budapest, entraînant la fin du régime communiste de Bela Kun.

La défaite des Empires centraux et l'effondrement de l'Empire russe permet aux Roumains de Bessarabie, de Bucovine, de Transylvanie et de la moitié orientale du Banat de proclamer leur unité en 1918, unité qui sera reconnue par les traités de Saint-Germain-en-Laye en 1919 et de Trianon en 1920: c'est la Grande Roumanie, dont la population est de 18 millions d'habitants (dont 14,5 millions de Roumains) contre 8 millions avant-guerre.

Après la Première Guerre mondiale, la réforme agraire, les réformes démocratiques des années 1921-1923 et les débuts de l'exploitation du pétrole et de l'industrialisation, offrent à la Roumanie une situation économique relativement florissante (du moins par rapport aux pays voisins). La constitution de la Grande Roumanie constitue cependant une pierre d'achoppement dans les rapports avec l'Union soviétique, avec qui des relations diplomatiques ne sont liées qu'en 1934. En Transylvanie et dans le Banat, le royaume doit gérer le problème des minorités hongroises : la politique roumaine dans l'entre-deux-guerres est essentiellement guidée par la recherche du statu quo territorial. Pour garantir sa position dans la région et se prémunir de toute nouvelle menace hongroise, la Roumanie constitue en 1920 la Petite Entente avec la Tchécoslovaquie et le Royaume des Serbes, Croates et Slovènes (futur Royaume de Yougoslavie). Cette alliance est renforcée par le soutien de la France et de l'Italie.

La monarchie roumaine est cependant secouée de troubles dynastiques. En 1925, le prince héritier ayant renoncé à ses droits à la couronne pour suivre sa maîtresse, son fils Michel est désigné comme futur roi et accède au trône deux ans plus tard, devenant Michel Ier (ou Mihai Ier), à l'âge de six ans.

La société roumaine demeure cependant assez inégalitaire, ce qui favorise l'apparition de mouvements visant à abolir l'ordre démocratique, tels que le Parti communiste roumain (en 1922, déclaré illégal en 1924) et la Garde de fer nationaliste et antisémite (en 1927). La vie politique est marquée par une certaine instabilité, le parti libéral de Ion I. C. Brătianu usant d'une loi électorale sur mesure pour contrer les progrès de l'opposition, menée par le parti paysan de Iuliu Maniu. En décembre 1928, Maniu obtient finalement un victoire électorale décisive et devient chef du gouvernement. En 1930, avec son soutien et contre l'avis du conseil de régence, le père du roi revient en Roumanie et obtient l'abrogation de son acte d'abdication, devenant le roi Charles II (ou Carol II), tandis que Michel redevient prince héritier.

Remportant ses premiers succès électoraux à partir de 1932, la Garde de fer multiplie les campagnes d'agitation. En décembre 1933, le premier ministre Ion Duca est assassiné. En 1937, la Garde de fer obtient 16% des voix. Le 28 décembre 1937, dans le but de priver la Garde de fer d'arguments électoraux, le roi nomme premier ministre l'antisémite Octavian Goga qui, durant son bref ministère (jusqu'au 10 février 1938), promulgue des lois raciales restreignant aux juifs l'accès à la citoyenneté roumaine.

La période carliste

La situation se détériore après l'Anschluss de mars 1938. L'influence dans la région de l'Allemagne nazie ne cesse de progresser : le parti nazi de la minorité allemande, dirigé par Andreas Schmidt, et la Garde de fer n'hésitent pas à commettre des pogroms et à assassiner des universitaires, des parlementaires et des ministres réputés juifs, franc-maçons ou simplement partisans de l'ordre démocratique[1].

Charles II (Carol II) se dote alors des pleins pouvoirs (période dite de la dictature carliste, mars 1938) et, tout en cherchant à apaiser l'Allemagne par une garantie de livraison du pétrole roumain, signe avec la France et le Royaume-Uni, le 13 mai 1939, un accord garantissent les frontières et indépendance de la Roumanie. Le roi lance la gendarmerie dans une véritable guerre civile contre les nazis et la Garde de fer, dont le fondateur, Corneliu Zelea Codreanu, est arrêté, emprisonné et exécuté [2].

Carol II refuse de participer au dépeçage de la Tchécoslovaquie alors que l'Axe lui offrait la Marmatie du nord ou Ruthénie, et, lorsqu'en application du Pacte germano-soviétique, l'Allemagne nazie et l'URSS envahissent la Pologne, la Roumanie, neutre, garantit le droit d'asile aux membres du gouvernement et aux divisions polonaises en fuite. Le Service maritime roumain les transporte à Alexandrie où ces forces rejoignent les forces britanniques. Le 21 septembre 1939, le premier ministre Armand Călinescu qui avait décapité en mai 1939 la Garde de fer en arrêtant plusieurs de ses dirigeants, est assassiné par des membres de la Garde aux ordres de Horia Sima, successeur de Codreanu. Armand Călinescu, francophile et anglophile tout comme le ministre des Affaires étrangères Grigore Gafencu, était soupçonné de vouloir engager la Roumanie dans la guerre aux côtés des Alliés. Le roi Charles II s'efforce de maintenir encore sa politique pendant quelques mois, mais la défaite militaire de la France et la situation très précaire de la Grande-Bretagne rendent très théoriques les assurances que ces deux pays avaient faites à la Roumanie[1].

A peine la France a-t-elle signé l'armistice, que l'URSS lance un ultimatum à la Roumanie le 26 juin 1940. Suivant le Pacte germano-soviétique, le gouvernement de Joseph Staline exige de l'ambassadeur roumain à Moscou, Gersh Davidescu, la cession de la Bessarabie et de la Bucovine du nord sous peine d'envahir la Roumanie, et l'ambassadeur allemand à Bucarest conseille vivement à Carol II d'obtempérer [3]. Le 28 juin 1940, l'URSS occupe la Bessarabie et la Bucovine du nord. Les deux tiers de la Bessarabie et une parcelle de territoires appartenant déjà à l'URSS forment alors la République socialiste soviétique de Moldavie. Le reste de la Bessarabie, à savoir la Bucovine du Nord et le Bougeac) sont incorporés à l'Ukraine.

La Roumanie en août 1940 avec en rouge les territoires cédés à l'URSS, en jaune ceux cédés à la Hongrie, et en vert à la Bulgarie.

Peu de temps après, le 30 août 1940, à l'occasion du "Deuxième arbitrage de Vienne", l'Allemagne et l'Italie imposent à la Roumanie de céder au Royaume de Hongrie la Transylvanie du nord. Enfin le 7 septembre 1940, la Roumanie signe les Accords de Craiova avec la Bulgarie à qui elle cède la Dobroudja du sud. Ces pertes territoriales représentent plus d'un tiers de la Grande Roumanie, mais Carol II estime que c'est le prix à payer pour ne pas subir le sort de la Pologne voisine, rayée de la carte de l'Europe. C'est aussi pour éviter un tel sort que le 4 juillet 1940 il avait remplacé ses ministres anglophiles et francophiles par le gouvernement d'Ion Gigurtu, sympathisant de Mussolini, comprenant un ministre de la Garde de fer : Horia Sima, qui avait repris le leadership du mouvement après l'exécution de Codreanu. Mais ce prix, payé pour la paix par Carol II, précipite sa chute : la Garde de fer de Horia Sima et le général Ion Antonescu s'unissent pour un coup d'état qui aboutit à l'abdication du roi au profit de son fils de 19 ans Mihai Ier, qui redevient donc roi, et à l'exil de Carol II.

Le régime Antonescu et l'entrée dans la Seconde guerre mondiale

La Garde de fer et Antonescu établissent un régime totalitaire désigné du nom d’État national légionnaire qui va inéluctablement pencher du coté de forces de l'Axe et de leur politique. Une fois au pouvoir, la Garde de fer renforce la législation antisémite et met également en place une autre législation dirigée contre les commerçants et hommes d'affaires grecs et arméniens qui sera surtout appliquée de façon à ce que les gens en place puissent continuer à toucher des pots-de-vin. Les syndicats et les associations ont été interdits à la fin de l'année 1940.

L'opinion n'est pas acquise au régime, et le 8 octobre 1940, officiellement à la demande de la Roumanie, les troupes allemandes franchissent la frontière roumaine. De fait, pas un seul coup de feu ne sera tiré et quelques semaines plus tard, en novembre 1940, la Roumanie adhère à l'Axe. Quant aux effectifs de la Wehrmacht stationnés en Roumanie, ils seront bientôt plus de 500 000, qui contrôlent le pétrole de Roumanie et se mettent à pied d'œuvre pour attaquer l'URSS [3]. Le 27 novembre 1940, les Légionnaires de la garde de fer assassinent une soixantaine d'anciens ministres, députés, intellectuels démocrates, franc-maçons connus et juifs, détenus à la prison de Jilava (près de Bucarest) pour venger l'assassinat de Codreanu. Parmi les victimes, l'historien et ancien premier ministre Nicolae Iorga et l'économiste Virgil Madgearu, ancien ministre de l'économie.

Frontières de la Roumanie entre entre 1941 et 1944).

Pour être en mesure de reconquérir la Bessarabie, Antonescu accepte d'engager son pays plus avant dans la collaboration avec le Reich. Mais après les assassinats et le pogrom du 27 novembre, la cohabitation entre la Garde de fer et Antonescu devient conflictuelle. Antonescu dissout le service d'ordre de la Garde de fer et fait juger et exécuter les assassins de Iorga. Le 20 janvier 1941, la Garde de fer tente de s'emparer du pouvoir par un coup d'état doublé d'un pogrom à Bucarest (130 victimes), mais Antonescu réplique, des coups de feu sont échangés, et au bout de quatre jours d'affrontements, la Garde, qui a perdu plusieurs centaines de membres, est contrainte de quitter le gouvernement. Sima et beaucoup d'autres légionnaires trouvent l'asile en Allemagne alors que 3.000 autres sont emprisonnés. En mars, Antonescu, qui s'auto-proclame Pétain roumain, se fait plébisciter et obtient 2 millions de oui contre 3.360 non[4].

Le terme de Régime Antonescu fait référence aussi bien à Ion Antonescu qu'à son vice-président du Conseil et ministre des affaires étrangères, Mihai Antonescu (homonyme sans lien de parenté).

L'entrée en guerre sur le front Est

Le 22 juin 1941, l'Allemagne attaque l'URSS sur un large front. Le nom de code de cette offensive est "opération Barbarossa". Dans cette offensive, le régime Antonescu est aux côtés de l'Allemagne, mais une division (la Division Vladimirescu), avec deux unités de la flotte et quelques aviateurs, combattront du côté Allié. Au total, 473 000 soldats roumains sont engagés contre l'URSS[4] au sein de la troisième et de la quatrième armée roumaine. Parmi les forces de l'Axe, il s'agit du contingent le plus fourni après celui de l'Allemagne. Les troupes roumaines traversent le Prut et, aux côtés des Allemands, récupèrent la Bessarabie puis prennent Odessa et Sébastopol [3]. Les Roumains prennent une part essentielle dans le siège d'Odessa qui se termine le 14 octobre 1941 par l'évacuation de la ville par l'Armée rouge. La Roumanie occupe la Podolie, territoire soviétique immédiatement à l'est du Dniestr, c'est-à-dire à l'est de la Moldavie, région appelée par les Roumains Transnistrie, et après la bataille d'Odessa, la ville d'Odessa est à son tour occupée. Cette région, que le régime Antonescu se prépare à annexer en cas de victoire, devient une terre de déportation pour les juifs, les roms, les résistants et les autres indésirables roumains, où l'armée se livre à des massacres qui s'ajoutent au froid et aux épidémies (dysenterie, typhus) : le nombre des victimes sera estimé, au procès d'Ion Antonescu, à 400 000 dont 293 000 juifs.

Les armées roumaines s'enfoncent plus profondément en URSS au cours des années 1941 et 1942 avant de subir aux côtés des Allemands, le désastre de la Bataille de Stalingrad. En novembre 1942, le général roumain le plus important de la période : Petre Dumitrescu, commandant de la Troisième Armée roumaine, bénéficie un moment de la mise à disposition par les Allemands de leur sixième armée pour lui permettre de résister à une offensive soviétique. Le gouvernement Antonescu considérait comme inévitable une guerre avec la Hongrie au sujet de la Transylvanie, mais en février 1943, l'armée roumaine est décimée à Stalingrad et doit se mettre en retraite aux côtés de son allié allemand [3].

Relations avec les Allemands et les Alliés

Antonescu avait rendu visite à Hitler le 22 novembre 1940, après son accession au pouvoir. Hitler l'avait alors informé de ses intentions vis-à-vis de l'URSS, ce qui explique l'état de préparation des troupes roumaines lors de l'opération Barbarossa. Lors d'une visite à Hitler, le 12 juin 1941, Antonescu avait déclaré qu'il pouvait compter sur l'appui de l'armée pour récupérer les territoires cédés par Carol II, et que l'Allemagne pourrait compter sur le Roumanie lorsqu'il s'agirait d'attaquer l'URSS. Ceci n'exprimait pas les sentiments de l'ensemble de la population, mais certainement ceux des dirigeants. En même temps, Antonescu espérait une guerre unilatérale contre l'URSS seule, et espérait ne pas rompre ses relations diplomatiques avec les Alliés.

La France avait cédé les parts que le gouvernement français détenait dans l'industrie pétrolière roumaine aux Allemands pour payer sa dette de guerre[5]. Antonescu proposa aux Alliés de racheter leurs parts, et par l'intermédiaire de son ami d'enfance Wilhelm Filderman (président des confédérations juives de Roumanie) il proposa aussi de laisser partir les juifs roumains moyennant un dollar par personne[3][6].

Mais le véritable pouvoir appartenait à l'ambassadeur allemand à Bucarest, Manfred Von Killinger et au représentant du RSHA Gustav Richter. La plupart des produits livrés à l'Allemagne n'ont reçu aucune compensation financière. Il s'ensuit une inflation spectaculaire. De plus, la guerre unilatérale espérée par Antonescu ne dura que six mois, car le 12 décembre 1941 les Alliés occidentaux déclarèrent la guerre à la Roumanie. A partir de cette date, Antonescu chargea son ambassadeur Frederic Nanu à Stockholm, de maintenir le contact avec les Anglo-Américains, mais ceux-ci ne répondirent pas à ses avances. De son côté, l'opposition démocratique chargea secrètement le prince Barbu Ştirbei d'une semblable mission à Ankara, sans plus de succès.

Le bombardement de la Roumanie

Citernes de pétrole en feu à Ploieşti après un bombardement de l'U.S. Air Force.

Depuis l'accord économique signé par Carol II en mars 1939, la Roumanie avait été un important fournisseur de pétrole du Troisième Reich, ainsi que de céréales et de produits manufacturés. C'est la raison pour laquelle elle devient à partir de 1943 la cible de bombardements aériens de la part des Alliés. D'après Geoffrey Regan [7], l'opération Tidal Wave (Raz-de-Marée), en août 1943 est l'une des plus importante jamais menée par l'USAAF, ancêtre de l'US Air Force : le 1er août 1943, 178 bombardiers B-24 Liberators décollent de Benghazi en Libye pour effectuer une rotation de 3800 kilomètres et attaquer les raffineries construites près des champs de pétrole de Ploieşti. Les Allemands ayant réussi depuis plusieurs semaines à intercepter et à décoder des messages relatifs à cette opération, les bombardiers ont à faire face à une riposte vigoureuse de la part de la Luftwaffe et seuls 88 bombardiers peuvent regagner leur base. Les dégâts causés peuvent être réparés rapidement et la production pétrolière retrouve en quelques semaines son niveau antérieur. Les nombreux aviateurs américains abattus seront en partie sauvés par la résistance et exfiltrés vers la Turquie, grâce aux efforts coordonnés du capitaine d'aviation Bâzu Cantacuzène et du colonel américain Gunn.

Il faudra attendre 1944 pour que des bombardements massifs menés à partir de l'Italie (Foggia) endommagent sérieusement le complexe pétrolier roumain. Bucarest, également, est sévèrement bombardé les 14 et 15 avril 1944 à la fois par l'USAAF et le Royal Air Force.

Persécution et extermination des Juifs en Roumanie

Vue d'ensemble

En décembre 1930, un recensement dénombrait 756 930 Juifs. Parmi eux, 420 000 habitent des régions qui sont cédés en 1940 à l'URSS, à la Hongrie ou à la Bulgarie, alors que 329 000 habitent des régions qui sont conservées par la Roumanie à cette date [8].

La Roumanie présente le cas d'un État, qui s'est impliqué directement aux côtés des Allemands, dans des massacres particulièrement barbares et dans l'organisation de camps de concentration, provoquant la destruction de 47 % de la population juive d'avant-guerre et qui pourtant se désolidarise finalement du projet d'extermination nazi et refuse en 1942 de participer à la déportation des Juifs roumains vers les camps d'extermination allemands, ce qui explique que 53% de la population juive a survécu à la période de la guerre. D'après la Commission Wiesel [9], l'État roumain a tué, de différentes façons, entre 280 000 et 380 000 juifs dans la région de la Bessarabie, de la Bucovine et de la Transnistrie [10]

Situation des juifs avant l'alliance avec l'Allemagne

Avant que la Roumanie ne devienne officiellement alliée de l’Allemagne nazie et ne tombe dans sa sphère, la société roumaine (comme d'autres sociétés européennes contemporaines) comportait un grand nombre de juifs intégrés (y compris dans les sphères politiques, économiques et universitaires) ainsi qu'une minorité de traditionnalistes vivant en communautés repliées sur elles-mêmes (surtout dans le nord et l'est du pays), et était agitée de courants violemment antisémites portés par des partis nationalistes comme celui du premier ministre Octavian Goga (qui prend les premières mesures de numerus clausus dans les universités et les professions libérales en 1937) ou comme la Garde de fer. L'opinion est partagée, mais ces partis de droite bénéficient d'un fort soutien populaire et jouissent d'un certain soutien officiel lorsqu'ils demandent que les Juifs de Roumanie soient exclus de postes d’influence ou carrément expulsés du pays[11]. En effet, la base électorale de ces partis se recrute parmi les ouvriers et les ruraux pauvres, qui étaient marginalisés sous les régimes impériaux austro-hongrois et russe, et qui imaginent les juifs en agents de l'impérialisme soviétique ou hongrois, ou encore du capitalisme occidental corrompu, illustré par les frasques de Carol II et de sa maîtresse (d'origine juive) Elena Lupescu.

Les premières mesures d'exclusion datent de décembre 1937, lorsque le gouvernement Goga retire la nationalité roumaine à 120 000 Juifs; certains des successeurs de Goga continuent sur la même ligne et prononcent des interdictions professionnelles qui ne touchent encore que les personnes de religion juive [12]. Le 8 août 1940, de nouvelles interdictions professionnelles ne touchent plus seulement les juifs de confession juive, mais aussi les marranes calotesques (chrétiens d'origine juive). Les mariages mixtes sont interdits. Ces diverses discriminations s'appliquent tout particulièrement (mais pas exclusivement) aux juifs dont la naturalisation est postérieure à 1918. A partir de l'automne 1940, alors que les mesures d'interdictions professionnelles se durcissent encore, plusieurs milliers de juifs par mois quittent la Roumanie pour la Palestine[13]. Tous n'y parviendront pas, surtout après la déclaration de guerre des Alliés à la Roumanie (décembre 1941) qui en fait des citoyens d'un pays ennemi[14] auxquels on n'accorde plus de visas pour la Palestine, comme en témoigne la tragédie du Struma (entre autres).

Le massacre des juifs dans les régions cédées

Dans les régions cédées à la Hongrie (Transylvanie du nord), le régime de l'Amiral Horthy déportera 120 000 juifs, soit 80 % de la population juive de ce territoire(150 000 personnes). Dans celles cédées à l'URSS (Bucovine du nord et Bessarabie), les juifs ne seront pas inquiétés en tant que tels par les autorités soviétiques, mais ceux d'entre eux qui étaient commerçants perdront leurs biens (nationalisés) et ceux d'entre eux qui avaient été fonctionnaires de l'état roumain seront déportés au Kazakhstan en tant que laquais d'une puissance exploitatrice. Pour eux, c'est l'entrée en guerre de la Roumanie d'Antonescu lors de l'opération Barbarossa, le 22 juin 1941, qui signifie le début d'une phase de persécution particulièrement féroce et meurtrière.

En effet, le régime Antonescu les considère indistinctement comme des suppôts du bolchévisme. La plupart des massacres ont été perpétrés par les troupes roumaines dans les zones de guerre, souvent en collaboration avec les Einsatzgruppen allemands, mais beaucoup de persécutions se sont également produites à l'arrière. Très peu de temps après le 22 juin, un incident impliquant des déserteurs qui avaient tiré sur l'armée déclenche le pogrom de Iaşi : 12 000 juifs sont massacrés ou enfermés dans des trains où ils meurent lentement, de soif ou de faim. A la fin du mois de juillet, les Roumains refoulent de 25 000 à 30 000 juifs de Bessarabie à l'est du Dniestr, en Podolie (Transnistrie), où ils sont massacrés par les Allemands. Par la suite, les Roumains se voient octroyer la Transnistrie, et ils peuvent y envoyer 160 000 Juifs dans des conditions tellement précaires que seuls 135 000 sont encore vivants à l'arrivée [15]. La moitié des 320 000 juifs de Bessarabie, de Bucovine, et du district de Dorohoi ont été assassinés dans les mois qui ont suivi l'entrée en guerre de la Roumanie. Après les premiers massacres, ils sont encore victimes de pogroms, rassemblés dans des ghettos avant d'être envoyés en Transnistrie dans une quinzaine de camps de concentration.

Les massacres d'Odessa

Six jours après l'entrée des troupes roumaines à Odessa, un attentat des partisans tue le général Glogojanu, commandant d'Odessa et 40 autres militaires[16]. Le soir même, le gouvernement roumain ordonne des représailles implacables. Aussitôt, le nouveau commandant d'Odessa, le général Trestioreanu annonce qu'il va prendre des mesures pour pendre les Juifs et les communistes sur les places publiques. Durant la nuit 5000 personnes sont exécutées. Le 23 octobre, 19 000 Juifs sont exécutés et leurs cadavres arrosés d'essence et brûlés[17]. Des milliers d'autres sont emprisonnés comme otages. Le 24 octobre, les Juifs emprisonnés sont transportés en-dehors de la ville et fusillés devant des fossés anti-chars par groupe de 40 ou 50. L'opération se révélant trop lente, les 5000 juifs restants sont enfermés dans trois entrepots, mitraillés puis les entrepots sont incendiés. 40.000 Juifs sont ainsi tués ce jour là[18]. Le 24 au soir,le maréchal Antonescu demande que les otages qui sont encore en vie connaissent les mêmes souffrances que les Roumains morts dans l'explosion. Les victimes sont aménées dans un entrepôt qui est dynamité le 25 octobre, jour de l'enterrement des Roumains victimes de l'attentat du 22 octobre[19]. Le premier novembre, la ville ne compte plus que 33.885 juifs, essentiellement des femmes et des enfants qui vivent terrorisés dans le quartier de Moldoveanca[20]. Les Juifs d'Odessa et de sa région sont ensuite déportés en Podolie (Transnistrie) sous occupation roumaine, à Bogdanovka, Domanevka et Akhmetchetka. Ils y sont logés dans des conditions déplorables, entassés dans d'anciens kolkhozes ruinés, dans des étables et des porcheries. Ils souffrent de nombreuses maladies avant d'être massacrés à partir du mois de décembre[21]. Les massacres d'Odessa, en automne 1941 ont fait en tout 100 000 morts. Pendant cette période Ion Antonescu reste en relation avec son ami d'enfance Wilhelm Filderman, président de la confédération des communautés juives. Le 19 octobre 1941, il se justifie ainsi auprès de lui: "A Odessa, les Juifs avaient poussé les troupes soviétiques à une résistance inutilement prolongée, simplement pour nous infliger plus de pertes "[22].

La situation des juifs en Roumanie restante

En Roumanie même, la corruption se nourrit de la spoliation des juifs sous toutes ses formes. Même après la chute de la Garde de fer, le régime Antonescu, toujours allié de l'Allemagne nazie, poursuit la politique de persécution et de massacre des juifs et, dans une moindre mesure, des roms. A partir de 1943 on met en place le travail forcé, imposé aux juifs dans la voirie et les terrassements. 40 000 hommes sont affectés à des travaux journaliers près de leur résidence. Ils doivent se présenter le matin avec pelles et pioches et souvent, apporter leur déjeuner. 26 000 juifs peuvent acheter leur exemption [23].

Parallèlement à la politique du régime Antonescu envers la population juive, les nazis vont exercer des pressions pour que cette politique soit conforme aux grandes lignes de la Solution finale, c'est-à-dire, clairement, à partir de 1942, l'extermination systématique des Juifs. Mais la le régime Antonescu qui avait massacré par lui-même tant de juifs en Bessarabie, en Bucovine et en Transnistrie, fait alors preuve de réticences. A la fin de l'année 1941, le SS Gustav Richter, et Radu Leca, plénipotentiaire roumain pour les affaires juives, avaient obtenu de Mihai Antonescu la création d'un conseil juif fantoche : Centrala Evreilor din Romania ("Centrale des juifs de Roumanie"), mais parallèlement, Filderman et la confédération continuent d'exercer leurs activités et organisent des secours pour les juifs de Transnistrie[24].

En novembre 1941, l'ambassade allemande à Bucarest obtient que la Roumanie se désintéresse du sort des juifs roumains en Allemagne, mais dans le « protektorat » de Bohême-Moravie et dans les autres pays conquis, les consuls roumains continuent d'élever des protestations et d'intervenir lorsque les juifs de nationalité roumaine sont menacés. En juillet 1942, l'ambassade roumaine à Berlin fait remarquer que les Juifs hongrois d'Allemagne ne sont pas déportés, et que la Roumanie peut difficilement accepter que les Juifs roumains soient plus mal traités que ceux de la Hongrie. [25]. Toujours en juillet 1942, à la grande joie d'Adolf Eichmann, chef du RSHA, les nazis semblent avoir obtenu tous les accords pour procéder à la déportation des Juifs roumains présents dans le district de Lublin en Pologne occupée, et en août, Radu Leca est à Berlin pour parapher l'accord, mais il est mal reçu et va dès lors s'employer à retarder l'opération. Peut-être aussi a-t-il été soudoyé pour cela[26].

Le caractère définitif du revirement roumain n'apparait aux Allemands qu'à partir de décembre 1942 quand ils apprennent qu'Antonescu envisage d'autoriser de 75 000 à 80 000 juifs à émigrer en Palestine moyennant une forte indemnité [27]. Contrairement aux autres pays de l'Europe du centre et de l'Est où une grande partie des juifs ont été dirigés vers les camps d'extermination, 53 % des juifs roumains survivront donc à la guerre, malgré les diverses persécutions auxquelles ils sont soumis : travail forcé, spoliation et lois d'exclusion. La commission Wiesel résume ainsi cette situation complexe: " De tous les alliés de l'Allemagne nazie, la Roumanie avait la plus forte communauté juive et porte la responsabilité de la mort de plus de juifs que n'importe quel pays autre que l'Allemagne elle-même... Iasi, Odessa, Bogdanovka, Domanovka et Petchora par exemple comptent parmi les massacres les plus hideux commis contre les juifs au cours de la Shoah. La Roumanie a commis un génocide contre les Juifs. Le fait que des juifs aient survécu dans certaines parties de la Roumanie ne doit pas masquer cette réalité."

Il existe aujourd'hui trois interprétations de ces faits. Les auteurs décrivent tous les mêmes faits, mais ceux qui les ont eux-mêmes vécus, tels Matatias Carp[28], Raul Hilberg[29], Marius Mircu[30] ou Raul Rubsel[31] les décrivent comme un hiatus d'inhumanité, une paranthèse monstrueuse dans l'histoire du peuple roumain. A l'encontre de cette position, les historiens Carol Iancu (français, Université de Montpellier) et Radu Ioanid (américain)[32] parmi quelques autres, affirment que les courants xénophobes et antisémites qui ont abouti aux crimes, font partie intégrante de l'identité roumaine. Enfin Florin Constantiniu dans son Histoire sincère de la Roumanie et le rapport final de la Commission internationale sur le Shoah en Roumanie validé le 11 novembre 2004 par le parlement roumain, ne se prononcent pas sur cette question, mais soulignent que la disparition de la démocratie et la légitimation de la violence ont rendu ces crimes possibles, et que la violence ainsi déchaînée d'abord contre les juifs et les roms, a sévi ensuite, sous un autre régime, jusqu'au 22 décembre 1989 au détriment de l'ensemble du peuple roumain.

La guerre sur le sol roumain

Les maquis de la résistance en Roumanie (Musée national d'Histoire, Bucarest)

A partir de février 1943 et de la vaste contre-offensive soviétique qui débute à Stalingrad, il devient clair que le vent a tourné aux dépens des Forces de l'Axe. En 1944, à la suite des dépenses de guerre et des bombardements alliés, l'économie roumaine est au plus mal. Les ressentiments contre la lourdeur de l'occupation allemande vont en grandissant, remplissent les maquis et sont partagés même par ceux qui avaient été les plus chauds partisans de l'alliance avec l'Allemagne et de l'entrée en guerre.

En mars 1944, l'Armée Rouge parvient sur le Dniestr, pénètre en Roumanie et le front se stabilise devant Iaşi et Chişinău. En mai 1944, la bataille de Târgu Frumos, en Moldavie, laisse présager un désastre militaire.

Le renversement d'Antonescu

Le 23 août 1944, le roi Mihai 1er et le Conseil national de la résistance, formé par les anciens parlementaires et ministres démocrates et par les communistes, renversent les deux Antonescu et en un premier temps, proposent à l'ambassadeur allemand Manfred von Killinger que les forces allemandes présentes sur le sol Roumain se retirent sans combats. Von Killinger refuse et la Roumanie déclare la guerre à l'Axe, engageant 397 000 hommes contre l'Allemagne et la Hongrie. Parmi les forces alliées, il s'agit du quatrième contingent le plus fourni après ceux de l'URSS, des États-Unis et du Royaume-Uni. Du moins, sur le front (qui se déplace de 1000 km vers l'ouest en deux semaines), car dans les chancelleries, les réponses de l'URSS, des États-Unis et du Royaume-Uni se font attendre jusqu'au 12 septembre 1944, et les Alliés continuent à considérer la Roumanie comme un pays ennemi. Pendant la durée des négociations (trois semaines), la Wehrmacht comme l'Armée rouge se considèrent en terrain ennemi ou en territoire occupé, et pratiquent le pillage et le viol systématiques. Bucarest et Ploieşti subissent des bombardements tantôt allemands, tantôt américains. Durant ces trois semaines, 140 000 soldats roumains, qui combattaient contre la Wehrmacht, sont faits prisonniers par l'Armée Rouge. Environ 80.000 s'enrôlent dans l' Armée Vladimirescu, intégrée dans l'Armée Rouge, les autres sont emmenés en Sibérie (d'où environ 28.000 reviendront après la guerre).

Le 10 octobre 1944 à Moscou, Winston Churchill et Staline s'entendent sur le devenir des pays balkaniques après la chute du Troisième Reich allemand : la Roumanie, ainsi que la Bulgarie (où les communistes étaient très peu nombreux, quelques milliers) font partie de la zone d'influence soviétique, alors que la Grèce (où l'ELAS était largement majoritaire et d'ailleurs avait libéré le pays) fait partie de la zone d'influence britannique [33]. En octobre 1944, les armées roumaines combattaient déjà contre les Allemands en Hongrie et Slovaquie.

Le roi Mihai I, avec son Conseil national de la Résistance, ne parvient pas, comme il l'espérait, à suivre l'exemple de De Gaulle ni à faire oublier le régime Antonescu (pourtant parvenu au pouvoir par un coup d'état, et non par un vote du parlement) : l'accord d’armistice du 12 septembre 1944 traite clairement la Roumanie en ennemie. Si son article 14 prévoit que ce seront des tribunaux roumains qui jugeront les criminels de guerre, son article 18, lui, stipule que " Le gouvernement roumain devra se soumettre à la commission de contrôle alliée..."... en pratique Soviétique.

C'est pourtant aux côtés de l'Armée rouge contre les Allemands que l'armée roumaine termine la guerre en se battant en Transylvanie, en Hongrie et en Tchécoslovaquie. Elle subit de lourdes pertes.

Les conséquences de la guerre en Bessarabie

La Bessarabie, ayant changé de mains trois fois au cours de la guerre, et où le front s'est trouvé de mars à août 1944, est la région qui en a démographiquement le plus souffert. Selon les rapports des ministres Krouglov et Béria à Staline, exhumés par l'historien Nikolai Bougai[34], et selon les données des recensements, de 1940 à 1950 la région a perdu un tiers de sa population, passant de 3.200.000 personnes selon le recensement roumain de 1938, à 2.229.000 selon le recensement soviétique de 1950.

Donc 971.000 personnes ont disparu en 10 ans :

  • 140.000 Allemands de Bessarabie ont été déportés en juillet 1940 vers l'Allemagne en application du Pacte germano-soviétique
  • 120.000 Moldaves (en majorité roumanophones, mais aussi des "Russes blancs") ont été déportés par les soviétiques entre le 28 juin 1940 et le 22 juin 1941 (dans la seule nuit du 13 juin 1941 - 13.470 familles, comprenant 22.648 personnes, dont approximativement 2/3 de femmes et enfants)[35];
  • 230.000 Juifs ont été soit massacrés par le régime du maréchal Ion Antonescu, soit ont fui vers l'URSS et ne sont jamais revenus, qu'ils s'y soient établis ou qu'ils y aient été rattrapés par la Wehrmacht et tués par les Einsatzgruppen;
  • 250.000 Moldaves roumanophones ont été déportés par les soviétiques entre 1944 et 1948 ;
  • 150.000 personnes sont mortes entre 1946 et 1947 suite à la famine provoquée par les réquisitions soviétiques alors qu'on était en période de mauvaises récoltes (politique déjà appliquée en Ukraine voisine dans les années 1920-1930 (Holodomor).
  • 11.324 familles sont déplacées de force hors de Moldavie le 6 juillet 1949 (environ 81.000 personnes), en majorité sur critère religieux ("vieux-croyants", églises néo-protestantes, catholiques).

En 1950 de tous ces "indésirables" ou "nuisibles" déportés hors du pays, 49.000 étaient encore en vie sur les lieux de leur déportation (toujours dans Bougaï)[36].

Les conséquences de la guerre

Carte de la Roumanie après la Seconde Guerre mondiale avec indications des territoires perdus.

Les deux Antonescu sont jugés et exécutés en 1946. L'ambassadeur allemand von Killinger s'est, pour sa part, suicidé en 1944.

En 1947, le traité de Paris non seulement ne compte pas la Roumanie (comme la France) parmi les vainqueurs, mais ne lui ne reconnaît même pas le statut de "co-belligérant" accordé à des pays comme la Turquie ou le Vénézuela, qui ne sont intervenus contre l'Allemagne qu'à un mois ou 15 jours de la fin. Toutefois, sa contribution du côté Allié (et le fait que l'État hongrois de Ferenc Szálasi soit resté fidèle à l'Axe) lui vaut le retour de la Transylvanie du nord. A l'est, par contre, la Bessarabie et la Bucovine du nord sont évidemment attribuées à l'URSS. La Roumanie sort ainsi de la guerre diminuée de près de 60.000 km² et de 4 millions d'habitants, dont 3 devenus citoyens soviétiques ou bulgares, et 1 million morts (y compris les 320.000 à 360.000 juifs).

La prise de pouvoir par les communistes et la fin de la monarchie

Dans ce qui reste de la Roumanie, l'occupation soviétique conduit à un coup d'état communiste le 6 mars 1945. Le gouvernement militaire intérimaire est remplacé, sous la pression de l'Union soviétique, par un gouvernement de coalition dirigé par le sympathisant commmuniste Petru Groza. Le 19 novembre 1946, les élections donnent la majorité à la coalition gouvernementale. Dans le nouveau gouvernement Groza, les communistes se voient attribuer la plupart des postes-clés. Dans les mois qui suivent, le Parti communiste roumain s'emploie à diviser les sociaux-démocrates, puis à liquider l'opposition. Le Parti national paysan est interdit en juillet et son chef, l'ancien premier ministre Iuliu Maniu, emprisonné. Le pays devient dans les faits une « monarchie communiste », jusqu'à l'abdication du roi Mihai Ier le 30 décembre 1947 et à la proclamation de la République populaire roumaine.

Ion Antonescu pendant son procès.

Rois de Roumanie

Sources de l'article

Les sections de cet article consacrés à la Seconde guerre mondiale sont en partie une traduction de l'article de la Wikipedia en langue anglaise Romania during World War II.

Bibliographie

  • Winston Churchill, The second world war, Bantam Books, New-York 1977 ;
  • Documents on German foreign policy 1938-1945, Her Majesty’s stationary office, Londres 1956 ;
  • Catherine Durandin, Histoire des Roumains, Fayard, 1995 ;
  • Grigore Gafenco, Préliminaires de la guerre à l'Est, Paris, Egloff, 1944 ;
  • Nicolette Frank, La Roumanie dans l’engrenage, Elsevier-Sequoia, Paris 1977 ;
  • Ştefan Lache & Gheorghe Ţuţui, La Roumanie à la Conférence de la Paix, 1946. Dacia, Cluj 1978 ;
  • Paul Quinlan, Clash over Romania : British and American policies toward Romania 1938-1947, American-Romanian Academy of Arts and Sciences, Oakland 1977.

Notes et références

  1. a  et b Antonin Snejdarek, Casimira Mazurowa-Château, La nouvelle Europe Centrale, Imprimerie nationale, 1986, p.41-46
  2. Robert Philippot, article "Roumanie" in Encyclopedia Universalis", édition 2002
  3. a , b , c , d  et e Ronald D. Bachman, Romania: A Country Study. Washington: GPO for the Library of Congress, 1989. en:La Roumanie pendant la seconde guerre mondiale
  4. a  et b Quid, édition 2000
  5. Werner Rings, Life with the ennemy, 1979, traduit en anglais 1982, ed. Weidenfeld and Nicholson, p.39
  6. Ceausescu aussi reprendra cette politique, en exigeant d'Israël, de l'Allemagne et de la Grèce des "indemnités" pour laisser partir les roumains d'origine juive, allemande ou grecque ; il fera également payer les adoptants occidentaux d'orphelins roumains.
  7. Geoffrey Regan, The Guinness Book of Flying BlundersGuinness Books, 1996 ISBN 0-85112-607-3
  8. Raul Hilberg, La Destruction des Juifs d'Europe, Gallimard, collection Folio, 2006, TII, p.1408
  9. En 2003, le président de la Roumanie Ion Iliescu a mis sur pied une commission d'enquête présidée par Elie Wiesel pour faire le jour sur l'histoire de la persécution et l'extermination des juifs sous le régime Antonescu
  10. en: International Commission on the Holocaust in Romania (Commission Wiesel), Final Report of the International Commission on the Holocaust in Romania,Yad Vashem (The Holocaust Martyrs' and Heroes' Remembrance Authority), 2004, [1]
  11. Encyclopédie multimédia de la Shoah : Roumanie
  12. Hilberg, TII, p.1410
  13. Hilberg, TII, p.1411 à 1468
  14. Déclaration de Harold McMichael après le torpillage du Struma
  15. Hilberg, TII, p.1439
  16. Raul Hilberg, T. 1, p 545
  17. Raul Hilberg, T. 1, p 546
  18. Raul Hilberg, T. 1, p 547
  19. Raul Hilberg, T. 1, p 548
  20. Raul Hilberg, T. 1, p 549
  21. Raul Hilberg, T. 1, p 676
  22. Hilberg, TII, p.1437
  23. Hilberg, TII, p.1449
  24. Hilberg, TII, p.1453-55
  25. Hilberg, TII, p.1457-58
  26. Hilberg, TII, p.1460-65
  27. Hilberg, TII, p.1468
  28. Matatias Carp, Le livre noir, Bucarest, 1948
  29. Raul Hilberg, La Destruction des Juifs d'Europe, Gallimard, collection Folio, 2006
  30. Marius Mircu, Ce qui est arrivé aux juifs de Roumanie, Glob, Bat Yam et Papyrus, Holon 1996
  31. Raul Rubsel, Enfer sur Terre, Paris 1951
  32. Radu Ioanid, La Roumanie et la Shoah, MMSH Paris 2002, ISBN 2-7351-0921-6
  33. André Larané, Projet de partage des Balkans sur Herodote.net
  34. Nikolaï Théodorovitch Bougaï: Informations des rapports de Béria et de Krouglov à Staline, éd. de l'Acad. de sciences de Moldavie nr. 1, Chişinău, 1991 (Н.Ф. Бугай «Выселение произвести по распоряжению Берии…» О депортации населения из Молдавской ССР в 40-50- е годы – Исторические науки в Молдавии. № 1. Кишинев, 1991. 1.0), Déportation des peuples de Biélorussie, Ukraine et Moldavie, éd. Dittmar Dahlmann et Gerhard Hirschfeld, Essen, Allemagne, 1999, p. 567-581 (Депортация народов из Украины, Белоруссии и Молдавии : Лагеря, принудительный труд и депортация. Германия. Эссен. 1999. 1.3)
  35. Nikolaï Th. Bougaï: K voprosu o deportacii narodov SSSR v 30-40ch godach. - ISSSR (1989)
  36. Nikolaï Théodorovitch Bougaï: Informations des rapports de Béria et de Krouglov à Staline, éd. de l'Acad. de sciences de Moldavie nr. 1, Chişinău, 1991 (Н.Ф. Бугай «Выселение произвести по распоряжению Берии…» О депортации населения из Молдавской ССР в 40-50- е годы – Исторические науки в Молдавии. № 1. Кишинев, 1991. 1.0), Déportation des peuples de Biélorussie, Ukraine et Moldavie, éd. Dittmar Dahlmann et Gerhard Hirschfeld, Essen, Allemagne, 1999, p. 567-581 (Депортация народов из Украины, Белоруссии и Молдавии : Лагеря, принудительный труд и депортация. Германия. Эссен. 1999. 1.3)

Bibliographie

Voir aussi

Liens externes

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