Pélardon

Pélardon
Pélardon
Pelardon.jpg

Pays d’origine France
Région, ville Languedoc-Roussillon, Cévennes
Lait de chèvre
Pâte molle à croûte naturelle
Appellation, depuis AOC, août 2000

AOP, décembre 2001[1]

Autrefois appelé paraldon, pélardou ou encore péraudou, le pélardon est un fromage français de la région Languedoc-Roussillon. C'est un fromage traditionnel qui bénéficie d'une AOC depuis août 2000. C'est un petit fromage à base de lait de chèvre, à pâte molle à croûte naturelle, d'un poids moyen de 60 grammes.

Sommaire

Histoire

S'il est vrai que, déjà au Ier siècle, Pline l'Ancien rapportait dans son Histoire naturelle que « Le fromage le plus estimé à Rome, où l'on juge en présence l'une à l'autre les productions de tous les pays, est, parmi les fromages des provinces, celui qui provient de la contrée de Nîmes, de la Lozère et du Gévaudan »[2],[3], il n'est cependant pas établi que c'est du pélardon dont parlait le naturaliste romain. En effet, roquefort et laguiole prétendent également être à la source de la phrase de Pline. Sans toutefois que la question soit tranchée de façon définitive, l'hypothèse la plus vraisemblable serait plutôt celle d'une tomme de pays au lait de vache[4].

Si l'existence du pélardon dès l'Antiquité n'est pas avérée, on le retrouve en revanche, indéniablement au XVIIIe siècle, puisque mentionné en 1756 dans le Dictionnaire languedocien-françois d'un autre naturaliste, l'abbé Boissier de Sauvages. Le péraldou (ou péraldon) y est décrit comme étant un « petit fromage rond & plat qu'on fait dans les Cevennes & auquel on donne un goût piquant & poivré en le frottant ou en le lavant avec de la viorne à feuilles étroites »[5]. En 1785, dans une nouvelle édition de son dictionnaire, il précise l'étymologie du péraldon, ce « petit fromage de lait de chèvre sec & piquant, propre aux Cevennes »[6], qui dériverait, en raison de son goût piquant, du mot pebre, c'est-à-dire le poivre[7].

Et fin XIXe, c'est en tant que « petit fromage rond, de lait de chèvre, d'un goût sec et piquant, et propre aux Cévennes » que l'écrivain occitan Frédéric Mistral définit le pelardou (ou pelaudoun, peraudou, peraldou, pelaudou, ou bien encore pelalhou) dans son dictionnaire provençal-français Lou Tresor dóu Felibrige[8].

L'AOC Pélardon

Logo du Pélardon AOC

Selon le décret du 25 août 2000 relatif à l'obtention de son appellation d'origine contrôlée, le pélardon est défini comme un fromage à pâte molle, à base de lait de chèvre cru et entier, qui se présente sous la forme d'un petit palet à bords arrondis. Onze jours après l'emprésurage, les dimensions du fromage sont comprises entre 60 et 70 mm de diamètre, et entre 22 et 27 mm de hauteur, pour un poids supérieur à 60 grammes. Après complète dessiccation, la teneur en matière grasse du pélardon doit être au minimum de 45 % et celle en matière sèche de 40 %. Sa croûte est fine, couverte en partie ou en totalité de moisissures jaunes pâles, blanches ou bleues. Quant à sa pâte, de couleur blanche à ivoire, elle est de texture homogène et d'aspect lisse à la coupe, et devient cassante lorsque l'affinage se prolonge.

Afin de bénéficier de l'AOC Pélardon, la filière de production des fromages — depuis l'élevage des chèvres produisant le lait jusqu'au conditionnement des produits finis — se doit de respecter un certain nombre d'exigences, à commencer par avoir lieu au sein d'une zone géographique bien définie.

Définition de l'aire géographique AOC Pélardon

L'aire géographique de l'AOC Pélardon correspond aux Cévennes et aux Garrigues de la Lozère, du Gard et de l'Hérault jusqu'à la Montagne Noire et les Hautes Corbières de l'Aude. Elle englobe environ 500 communes (dont une quarantaine partiellement) et s'étend principalement sur les départements du Gard et de l'Hérault et de manière plus réduite sur ceux de l'Aude et de la Lozère[9].

Département Nombre de communes Principales communes de l'aire AOC Pélardon
Gard 229
(dont 22 partiellement)
Anduze, Barjac, Bessèges, Euzet, Génolhac, La Grand-Combe, Lasalle, Méjannes-le-Clap, Nîmes, Quissac, Saint-Hippolyte-du-Fort, Saint-Jean-du-Gard, Sauve, Uzès, Valleraugue, Vers-Pont-du-Gard, Le Vigan, Villeneuve-lès-Avignon, Vissec.
Hérault 163
(dont 10 partiellement)
Avène, Bédarieux, Clermont-l'Hérault, Fraisse-sur-Agout, Ganges, Lodève, Minerve, Murviel-lès-Montpellier, Neffiès, Olargues, Pégairolles-de-l'Escalette, Saint-Chinian, Saint-Guilhem-le-Désert, Saint-Martin-de-Londres, Saint-Mathieu-de-Tréviers, Saint-Pons-de-Thomières, Villeveyrac.
Aude 62 Bize-Minervois, Bugarach, Caunes-Minervois, Cucugnan, Lairière, Mouthoumet, Soulatgé, Villerouge-Termenès.
Lozère 46
(dont 9 partiellement)
La Bastide-Puylaurent, Florac, Meyrueis, Moissac-Vallée-Française, Le Pont-de-Montvert, Quézac, Saint-Étienne-du-Valdonnez, Saint-Laurent-de-Trèves, Villefort.
Tarn 1
(partiellement)
Murat-sur-Vèbre.

Conditions d'élevage des troupeaux

L'AOC impose que les chèvres, dont on utilise le lait pour la fabrication du pélardon, soient des races suivantes :

les croisements entre ces trois races demeurant autorisés.

Tout enfermement permanent des animaux dans des bâtiments d'élevage est formellement proscrit. En effet, afin de respecter au plus près la tradition pastorale, les troupeaux doivent pâturer régulièrement dans la zone géographique et trouver leur alimentation sur le parcours, dans les garrigues, les landes ou sous les châtaigniers des Cévennes.

Les éleveurs sont donc astreints au respect d'un cahier des charges stipulant les conditions d'élevage de leurs troupeaux. Selon l'altitude à laquelle se situe l'élevage, un nombre de jours minimum de sortie en extérieur des animaux :

  • 210 jours par an si l'élevage est situé à moins de 800 m d'altitude,
  • 180 jours par an si l'élevage est situé à une altitude supérieure[10].

En outre, une surface minimale de patûrage de 0,2 hectare (2 000 m2) par chèvre est requise. Des compléments d'alimentation peuvent être dispensés aux chèvres (foin, céréales, tourteaux). Concernant la traite des animaux, qui intervient, chez la plupart des éleveurs, deux fois par jour, le décret n'impose aucune restriction[11]. En revanche, le lait ainsi collecté doit être totalement dépourvu d'additifs (lait concentré, lait en poudre, arômes ou colorants), ni se voir appliquer un quelconque traitement de filtration industrielle.

Fabrication

Le lait obtenu après la traite est ensuite ensemencé grâce aux ferments naturels présents dans le petit-lait (lactosérum) issu de la journée précédente. Ensuite, c'est l'étape d'emprésurage, l'adjonction de présure (pas plus d'1 mL pour 10 litres de lait, soit 0,01 % du volume) destinée à provoquer le caillage le lait, c'est-à-dire sa coagulation. Le lait cru est alors laissé à cailler pendant un minimum de 18 heures[12].

Le caillé frais est ensuite moulé manuellement[13] en faisselle. Ce caillé va progressivement et spontanément évacuer son petit-lait à travers les trous de la faisselle. Cet égouttage va permettre sa réduction, et au terme d'un séjour dans la faisselle d'environ deux jours, son passage de l'état de lait caillé à celui de pélardon à proprement parler. Durant cette phase, le fromage sera salé sur une de ses faces puis retourné afin d'être salé sur son autre face. Ce salage doit être opéré exclusivement à l'aide de sel sec, autrement dit, par salaison et en aucun cas par l'utilisation de saumure.

Les fromages subissent ensuite un ressuyage (une nouvelle phase d'égouttage) entre 18 °C et 22 °C pendant une durée de 18 à 24 heures, avant d'être placés dans un hâloir, où il sèchent entre 24 et 48 heures[14].

Puis, intervient l'affinage, dernière étape de la fabrication, qui se déroule sous une température de 8 °C à 16 °C avec une hygrométrie de 85 à 95 %. D'une durée de onze jours minimum, durant laquelle les fromages devront être tournés tous les jours, l'affinage va permettre l'obtention d'une texture onctueuse. Si l'affinage est plus long, la pâte se fait plus ferme, jusqu'à en devenir cassante, et sa croûte s'assombrit.

Production

En 2004, la production de pélardons s'élevait à 220 tonnes[15] et en 2005, à 217 tonnes[16].

Dégustation

Un plateau de pélardons coulants
Pélardons coulants

Sa période de dégustation optimale s'étale de mai à septembre après un affinage de 3 semaines, mais il est aussi excellent de mars à novembre. Il est caractérisé par une pâte assez compacte et un petit goût de noisette qui lui confère une personnalité reconnue. Il peut se déguster aussi bien sur le plateau qu'en salade.

Le pélardon peut être nature mais également cendré ou à mariné à l'huile d'olive et aux herbes de Provence.

Une recette consiste à paner le pélardon, le faire frire puis le déguster chaud sur un lit de salade, de pissenlit de préférence, accompagné de croûtons grillés.

En Cévennes, le caillé frais est servi en dessert avec de la confiture de myrtilles ou du miel de bruyère ou de châtaignier.

À l'occasion des 10 ans de l'AOP, le syndicat des producteurs de pélardon a fait éditer Le Pélardon revu et inspiré, un livre de recettes auquel dix-huit chefs réputés de la région Languedoc-Roussillon ont apporté leur contribution, notamment Michel Kayser et Jérôme Nutile[17].

Folklore autour du pélardon

Depuis 2000, la « Fête du pélardon » se déroule chaque année à la mi-mai à Sainte-Croix-Vallée-Française en Lozère, à l'initiative de l'office de tourisme du village[18],[19]. À peu près à la même période, au Vigan (Gard), le « Printemps du pélardon » est organisé depuis 2008 par l'office de tourisme des Cévennes méridionales, le syndicat des producteurs de pélardon ainsi que la communauté de communes du Pays viganais[20],[21].

Notes et références

  1. cf le règlement du 4 décembre 2001 sur le site du droit de l'Union européenne
  2. « Laus caseo Romæae, ubi omnium gentium bona cominus judicantur, e provinciis, Nemausensi præcipua, Lesuræ Gabalicique pagi : sed brevis, ac musteo tantum commendatio. » in Pline l'Ancien, L'Histoire naturelle, livre XI, § xcvii
  3. La traduction française est anachronique car c'est plutôt au mont Lozère et au pays gabale (« Lesuræ Gabalicique pagi ») auxquels se réfère Pline, le département de la Lozère n'ayant été créé qu'en 1790.
  4. Félix Buffière, Ce tant rude Gévaudan [détail des éditions], tome I, p. 143
  5. cf « PËRALDOU » in Pierre Augustin Boissier de Sauvages, Dictionnaire languedocien-françois, ou Choix des mots languedociens les plus difficiles à rendre en françois, 1756 [lire en ligne], p. 355 
  6. cf « PËRALDOU » in Pierre Augustin Boissier de Sauvages, Dictionnaire languedocien-françois, vol. 2, 1785 [lire en ligne], p. 155 
  7. cf « pebre » sur le dictionnaire occitan-français en ligne panoccitan.org
  8. cf « PELAUDOUN » in Frédéric Mistral, Lou Tresor dóu Felibrige, ou Dictionnaire provençal-français embrassant les divers dialectes de la langue d'oc moderne, vol. 2 [lire en ligne], p. 528 
  9. [PDF] Carte de la zone géographique AOC Pélardon
  10. les jours de sortie des animaux sont contrôlés au moyen d'un calendrier de patûrage, tenu à jour par l'éleveur.
  11. La traite des chèvres
  12. ce qui a pour effet de faire descendre son pH autour de 4,5.
  13. le décret interdisant toute forme de moulage mécanique
  14. Dans le hâloir, la température est de l'ordre de 12 °C à 18 °C pour un degré d'hygrométrie de 65 à 80 %.
  15. « AOC pélardon, émergence d’une filière » sur le site de l'INRA
  16. Carte d'identité du Pélardon
  17. Annonce sur le site du syndicat des producteurs de pélardon. Consulté le 22 juin 2011
  18. Luc Crespon-Lhérisson, « Les Cévennes font la fête pour célébrer leur pélardon », dans Midi libre, 15 mai 2011 [texte intégral (page consultée le 21 juin 2011)] 
  19. Thierry Levesque, « Toute la Vallée Française a célébré son pélardon », dans Midi libre, 16 mai 2011 [texte intégral (page consultée le 21 juin 2011)] 
  20. « Une ferme géante pour le Printemps du pélardon », dans Midi libre, 20 mai 2011 [texte intégral (page consultée le 21 juin 2011)] 
  21. « Un Printemps du pélardon plein de saveurs ! », dans Midi libre, 24 mai 2011 [texte intégral (page consultée le 21 juin 2011)] 

Voir aussi

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