Histoire De La Sardaigne

Histoire De La Sardaigne

Histoire de la Sardaigne

Lhistoire de la Sardaigne est ancienne (depuis le Paléolithique inférieur) et particulièrement riche. Le peuplement initial de la Sardaigne résulte de mouvements de population qui se sont produits vers 6000 av. J.-C. en provenance de la péninsule italienne, de la péninsule ibérique et d'Afrique (voir carte ci-dessous). Mais il s'est poursuivi, au fil des invasions, pour donner le peuple sarde. Christophe de Chenay fait remarquer que :

« Les Sardes ont toujours surveiller les envahisseurs […], ainsi, de cachettes naturelles, puis de nuraghes en villages perchés, le peuple de Sardaigne assiégé a toujours su résister. Il en reste une méfiance à légard de létranger qui disparaît cependant bien vite.[1] »

On peut trouver deux types d'origines supposées du nom de lîle. En effet, la première, qui est plus de lordre du mythe, provient du terme Ichnusa qui dérive de la racine grecque qui signifie trace de pied. Ce terme fait référence à la forme de lîle, « par la ressemblance grossière que les anciens trouvaient entre sa forme et celle de lempreinte dun pied dhomme »[2]. Par la suite le nom change pour devenir Sardon également du grec, qui peut se traduire par sandale, ce qui confirmerait cette explication.

Mouvements de population à lorigine du peuplement de la Sardaigne vers -6000

Mais une seconde origine, plus probable, viendrait dun chef dAfrique du Nord (la Libye actuelle) appelé « Sardus, prétendu fils dHercule[3] », qui établit une colonie au sud de la Sardaigne. Sardus fut vénéré, à tel point qu'« on lui érigea des statues dans lîle, avec cette inscription, Sardus Pater[4] ». Une autre thèse alternative à cette dernière serait que les peuples Shirdana et Sikala se seraient joint aux phéniciens, d' dérive le nom de l'île[5].

Plus tard le nom changera de forme avec les Phéniciens (Shardan) qui écrivent les premiers ce nom, puis les Romains (Sardinia).

Sommaire

Préhistoire

Exemple de galet taillé de l'Acheuléen espagnol.

La découverte à Perfugas (province de Sassari), de galets taillés selon la méthode clactonienne a conduit certains archéologues à envisager une présence humaine en Sardaigne dès le Paléolithique inférieur (entre 400 000 ans av. J.-C. et 150 000 ans av. J.-C.). Cette découverte n'est toutefois pas acceptée de tous, car ces assemblages de pierres taillées sont caractéristiques des faciès d'acquisition de silex sur les gisements naturels et n'ont, de ce fait, aucune valeur chrono-culturelle : de tels assemblages existent à toutes les périodes, paléolithiques comme néolithiques[6]. Dès lors, les dates du premier peuplement humain varient suivant les sources[7].

Les fouilles réalisées dans la grotte de Corbeddu ont permis de mettre au jour des restes humains dans une couche datant du Paléolithique supérieur (entre 35 000 ans av. J.-C. et 10 000 ans av. J.-C.), mais les ossements n'ont pas été datés directement et de nombreux chercheurs les considèrent comme plus récents, datant du Mésolithique ou du Néolithique[8]. À l'heure actuelle, les premières traces attestées et acceptées de tous ne remontent guère au-delà de la période mésolithique, c'est-à-dire 8000 ans av. J.-C. Elles proviennent de deux sites : Porto-Leccio, fouillé par C. Tozzi (1996) et Su Coloru, fouillé par P. Fenu et ses collaborateurs (2000).

Protohistoire

Cest durant la Protohistoire que lon peut véritablement parler dinstallation humaine sur lîle, et non plus simplement de présence ou de fréquentations. Vraisemblablement, des populations dItalie, dAfrique[9] et de la péninsule ibérique se sont déplacées vers la Sardaigne. Pour Francesco Cesare Casula, « cest pour cela, si on peut dire, quen Sardaigne il ny eut jamais un unique peuple, mais plusieurs peuples[10] ». Ce peuplement initial est le fait de groupes d'agriculteurs qui, vers 6000 av. J.-C., importent dans l'île les animaux domestiques et le blé et qui s'installent durablement dans les plaines fertiles ils érigent les premiers villages.

La culture prénuragique

Article détaillé : Culture prénuragique.


Le pistachier lentisque était utilisé dans la fabrication dhuile

La culture prénuragique correspond à une longue période qui débute vers -6000, pour finir vers -1855. Plusieurs civilisations vont se succéder et l'apport de chacune va permettre l'émergence de la culture nuragique.

Les Sardes de cette époque pratiquent lagriculture et l'élevage. Les récoltes des fruits du pistachier lentisque, permettent par exemple la production d'huile[11]. Les techniques évoluent, notamment grâce aux autres peuples de la Méditerranée occidentale avec lesquels des échanges commerciaux, culturels et religieux vont peu à peu apparaître. Les sociétés sardes se spécialisent dans la production de certains biens qu'elles échangent avec les autres communautés méditerranéennes. L'une de ces spécialités est l'exploitation des gisements dobsidienne du Monte Arci, la production de lames en obsidienne et leur diffusion à travers tout le bassin occidental de la Méditerranée, en particulier durant le IVe millénaire av. J.-C.[12].

Domus de Janas de Lotzorai

L'inhumation des morts commence à être mise en place dans des tombes circulaires (cercles mégalithiques ou funéraires), mais ses modalités vont évoluer avec l'arrivée de divinités caractéristiques (les Déesses mère), des domus de janas qui vont peu à peu se complexifier, et enfin de dolmens.

Ainsi la vie sociale se développant, les Sardes vont se regrouper en petites tribus, pour ensuite construire les premiers villages fortifiés, placés sur les hauteurs, constitués de maisons circulaires en pierre. Des évolutions techniques suivront comme le montre la qualité des céramiques, mais aussi des outils.

Avec les dernières civilisations de cette période, on voit apparaître de véritables systèmes de défenses, et le développement darmes en métal. Une nouvelle classe sociale dominante est alors créée, celle des guerriers, ce qui témoigne du besoin que ce peuple a de se défendre.

Civilisation nuragique

Article détaillé : Culture nuragique.
Un nuraghe est un monument en forme de cône tronqué constitué de pierres

La civilisation nuragique est le pilier de la culture sarde proprement dite. Cest en effet durant cette ère, quune véritable société voit le jour.

« La Sardaigne appartint au monde mégalithique qui sexprima à Malte ou à Stonehenge. […] elle évolua de manière originale pour donner naissance à cette civilisation nouragique qui reste encore largement mystérieuse. [13] »

— Roger Joussaume

Le terme nuragique (ou nouragique) est issu de lempreinte la plus marquante de cette société, les nuraghes, que lon peut trouver dans toute la Sardaigne. Il en reste aujourdhui 7000 environ et il est certain qu'ils étaient plus nombreux à l'époque. Cest vers -900, que cette civilisation commence à décliner lentement, avec larrivée de colonies phéniciennes, pour voir sa fin vers -238, avec larrivée du pouvoir romain.


Civilisation de Bonnanaro

Tombe de géant à façade Sa Ena eThomes.

Cette culture (de -1855 à -1200) marque le début de lâge nuragique et est reconnaissable « par les vases de pâte brune- claire avec des anses à coude »[14]. Cette céramique a été retrouvée dans les Domus de janas - qui ont été réutilisés -, les tombes de géants, et les dolmens de cette époque.

Puits sacré de Sardaigne
Détail du puits sacré

Bonnanaro est une civilisation guerrière, comme le montrent les armes en cuivre et en bronze et, bien sûr, les premiers nuraghes (proto nuraghe) construits. Elle se diffuse dans toute la Sardaigne. Cependant lîle est probablement divisée en territoires autonomes les uns des autres, qui commercent ensemble. On peut également penser quil y a des guerres entre tribus, ou en tous cas des altercations entre rois-bergers. Ces derniers règnent chacun sur une communauté patriarcale, de bergers ou cultivateurs guerriers, et habitent le nuraghe, tandis que le reste de la population se loge dans de petites huttes en pierre, placées autour de celui-ci.

Plus tard, vers -1490 les nuraghes en tholos, et les tombes de géants à façade font leur apparition, et expriment lapogée de cette civilisation. On constate lapparition darmes importées dOrient durant cette seconde période de la culture de Bonnanaro, ce qui montre lexistence dun commerce manifeste qui prend de lampleur, et rend la vie économique de bonne qualité. En effet, la Sardaigne de cette période fait partie d'un réseau d'îles (avec la crète, Chypre et la Sicile) « qui offrent des conditions particulièrement favorables aux échanges.[15] »

Culture de la céramique à peigne et protogéométrique

Les vases sont dorénavant finement décorés de cercles et de demi-cercles tracés au peigne. De plus, le développement du culte de leau, qui était sans doute préexistant, fait émerger les puits sacrés, véritables temples dédiés à cet élément, loffrande dobjets précieux nest pas rare. Ces temples semblent être des centres de réunion inter-tribus, ce qui révèle lhomogénéité de ce peuple, malgré les diverses coalitions. « Ce culte correspond à linfluence méditerranéenne, et […] aurait ici un caractère thérapeutique et magique ».[16]

La société nuragique se complexifiant, on trouve à présent deux structures importantes dans certains villages. La première est la salle du conseil (exemple du village nuragique de Barumini), qui sert à réunir les chefs de familles afin de régler les problèmes de la communauté. La seconde est la salle du conseil fédéral, qui a pour fonction de traiter les affaires qui concernaient lensemble du peuple nuragique, en réunissant les chefs des tribus.

Histoire

Cest vers 600 ans av. J.-C., que la Sardaigne découvre lécriture par lintermédiaire des Phéniciens. Cest cet apport qui fait passer lîle de lâge protohistorique à l'âge historique.


Antiquité

Statuette en bronze sarde, exposée au musée archeologique national de Cagliari

Lantiquité commence par la domination phénicienne. Elle est donc à cheval entre la fin de lâge nuragique, et la domination romaine. C'est durant cette période que les sardes auraient été initiés à l'extraction d'huile d'olive, à l'apiculture, et à cailler le lait de brebis[17].

Domination phénicienne

Les Phéniciens, peuple marchand, connaissent déjà bien la Sardaigne, vu que depuis au moins 100 ans, ils y accostent régulièrement pour passer la nuit, ou en cas davarie. En effet, la Sardaigne tient une position stratégique sur la route commerciale maritime de lEurope, et en particulier de la Bretagne (lactuelle Grande-Bretagne), de plus « la Sardaigne avait des ports nombreux et commodes, de vastes pâturages au bord de la mer »[18]. Au fur et à mesure des années, les phéniciens commencent à installer de véritables villes côtières, surtout dans le sud et louest de lîle, et ceci avec laval des tribus locales, qui profitent alors du commerce. Cest donc à partir de -900, date du début de cette domination, que les échanges commerciaux se multiplient, et le travail des métaux se développe. Cest dailleurs vers cette date que les petits bronzes font leur apparition. Ce sont les phéniciens et non les sardes qui profitaient des bienfaits de la mer comme la pêche du thon ou de la sardine (nom dérivé de Sardaigne).

Tant que ces commerçants restèrent sur le littoral, la cohabitation était bonne, mais les Phéniciens ont commencé à sintéresser aux ressources de lintérieur des terres, et ont envisagé de conquérir lîle dans son intégralité. Plus tard, dautres colonies venues de Libye, dirigées par Sardus, prennent « plus complètement possession du pays » [19]. Ce dernier a, très probablement, donné son nom à lîle, que les Phéniciens sont les premiers, à nommer, Shardan. Cependant, le peuple nuragique a opposé une telle résistance, que la Phénicie na pu faire autrement que de demander laide de Carthage. La relation quentretiennent les Phéniciens avec la Sardaigne est particulière, dans le sens que, la plupart du temps, ce peuple ne s'intéresse que très peu à l'intérieur de terres colonisées, par souci de sécurité que leur apporte la mer. Ainsi, l'île sarde est l'exception l'on voit apparaître des fortifications phéniciennes.

Domination carthaginoise

Hors cette région, la Sardaigne a été entièrement dominée par Carthage vers -523.

Les phéniciens sont à l'origine de la Civilisation carthaginoise, qui devient une cité très puissante. Cest alors en -545 que le général Carthaginois Malco tente de débarquer en Sardaigne, mais il se fait repousser violemment par le peuple nuragique, ce qui va marquer le début de nombreuses années de guerre. « Le jeu de Carthage fut donc de faire alliance avec les insulaires »[20] des côtes, cest-à-dire les Phéniciens appelés alors les Shardana. Il faut attendre 10 ans pour que lon parle dun réel début de domination carthaginoise, et en -523 on peut parler doccupation quasi complète. Seule la région montagneuse de lest de lîle résiste toujours. Dès lors, les ports phéniciens deviennent de véritables cités portuaires. De plus, les carthaginois développent lagriculture céréalière sur les terres fertiles de Sardaigne, en utilisant comme esclaves une part des populations locales, et en demandant des taxes importantes aux autres.

Exemple de statuette en terre cuite carthaginoise.

Les forces puniques se sont toujours efforcées de maintenir le peuple nuragique dans les régions montagneuses qui sont bien trop inaccessibles pour être annexées. Ainsi ils ont pu faire de la Sardaigne une véritable base militaire, stratégique de par sa position sur les routes du commerce maritime. Carthage a même réussi à négocier « avec les Romains, deux traités par lesquelles ceux-ci sinterdisaient daborder dans lîle, à moins dy être forcés par une bataille ou par une tempête »[21].

Un réseau routier est mis en place, des villes telles que Karalis (Cagliari) et Sulci (SantAntioco) sont créées[22], mais de nombreux monuments de la période nuragique sont détruits. Mais « en -259 -258, les romains exportent la guerre en Sardaigne et en Corse afin daffronter les garnisons carthaginoises et afin de piller ces îles. En -249, la Sardaigne est à nouveau pillée. Les romains manifestent de plus en plus dintérêt pour ces îles. »[23]

Le pouvoir romain, sous prétexte dune pseudo-préparation dinvasion du Latium par les Carthaginois, envoie ses troupes en Sardaigne. En fait, il profite de laffaiblissement de Carthage après sa défaite de la première guerre punique, mais surtout davoir « appris que les Mercenaires de la Sardaigne avaient crucifié leur général, saisi les places fortes et partout égorgé les hommes de la race chananéenne. Le peuple romain menaça la République dhostilités immédiates, si elle ne donnait douze cents talents avec lîle de Sardaigne tout entière »[24]. Cest alors que Carthage cède ce territoire à la république romaine en -238.

Domination romaine

Article détaillé : Corse-Sardaigne.

Les légions Romaines ont rapidement pénétré toutes les régions sardes, y compris celle de la Barbaria, qui a donné son nom à lactuelle Barbagia. Malgré la résistance du « peuple des montagnes », la civilisation nuragique séteint alors, sans pour autant constater une soumission totale des sardes. Ainsi, « Barbaria fut le terme dont Rome qualifia la Sardaigne profonde, car à ses yeux étaient barbares […] les montagnards sardes résolus à défendre leurs coutumes, qui lançaient des razzias dans la plaine jusquà ce que larmée romaine les repoussât[25] ». De nombreuses révoltes éclatent durant cette domination, mais elles sont toutes fortement réprimées.

Amphithéâtre romains de Cagliari

La révolte la plus importante est sans doute celle de -215, Sardes et Carthaginois se sont unis pour expulser les Romains de lîle. Cependant, le jour de la bataille, les Carthaginois, ayant essuyé une tempête, arrivent trop tard. Ainsi les Romains, en plus grand nombre, triomphent sur cette insurrection. Toutes les tentatives suivantes sont suivies dune vengeance sanglante des romains. On peut parler de fin des rebellions vers -31 (époque de lEmpire romain), cependant la Barbaria résiste encore et toujours.

Rome développe un réseau routier organisé en Sardaigne, facilitant le déplacement des troupes et des commerçants. Celui-ci a été dailleurs utilisé comme base au réseau actuel. Les romains utilisent abondamment les ressources de la « Sardaigne, inépuisable terre[26] », dont le « sol, fertile et parfaitement cultivé, fournissait jadis à Rome de si beaux blés et en telle quantité que la Sardaigne était alors le grenier dabondance de la capital de lempire romain[27] ». La ville de Nora, crée par les phéniciens, devient la ville la plus important de cette époque. Au-delà, des amphithéâtres sont bâtis, et la religion chrétienne est importée par le bannissement de milliers de dissidents juifs et chrétiens dans lîle, par vagues : « Cétait pour les Juifs une idolâtrie. […] Tibère avait eu raison den exiler quatre cents en Sardaigne[28] ». Cette croyance se diffuse et convertit de nombreux habitants. Aujourdhui encore la ferveur sarde est très présente. Cest en 227, que la Corse-Sardaigne devient une Province romaine (dans le sens statutaire). En même temps que lEmpire perd ses forces, il abandonne petit à petit lîle sarde.

Domination vandale

Articles détaillés : Vandales et Royaume vandale.
Emplacement approximatif de lempire vandale dAfrique vers 455.

Les vandales dAfrique, dorigine germanique, sont un peuple migrant vers le sud durant tout le Ve siècle . Ainsi, ils envahissent successivement la Gaule, l'Espagne, et enfin l'Afrique du nord, ils sétablissent et prennent Carthage en 439. Entre Rome et le royaume vandale, le conflit pour le contrôle de la méditerranée est omniprésent. Mais l'empire romain est mourant, et ainsi quand « en 442 l'établissement d'un nouveau traité aux termes duquel l'ex-Afrique romaine fut partagée entre l'Empire et le roi vandale »[29], ce dernier est alors en situation de débarquer et occuper la Sardaigne en 456, grâce à une véritable flotte de guerre qui inflige des razzias à répétition. Les Romains délaissent alors l'île sans résister. Ainsi, la Sardaigne est divisée au profit de capitaines Vandales, qui y règnent en maîtres absolus. Mais les Romains noublient pas cette terre stratégique pour autant, et tenteront de la reconquérir plusieurs fois, en faisant en sorte de « favoriser une révolte en Sardaigne »[30].

La Sardaigne reste une terre dexil à cette époque. On peut donner lexemple de Fulgence qui y fut exilé vers 523, pour avoir écrit ses Lettres ascétiques et morales. En 534 lempire byzantin prend le dessus sur lempire vandale, par lintermédiaire du général Bélisaire.

Moyen Âge

Carte médiévale arabe de la Sardaigne.
Les conquêtes de Justinien en jaune à partir de 529.

En Europe, « le Moyen Âge a connu, à vrai dire, une société largement seigneurialisée, non féodalisée : la Sardaigne[31] ». Cette période commence en 476 avec la chute de Romulus Augustule, le dernier empereur romain.

Domination byzantine et invasions sarrasines

En 533, après avoir sécurisé ses frontières, l'Empire s'empare du royaume vandale. Cest donc en 534 que Byzance, essayant de retrouver ses frontières occidentales, prend le pouvoir en Sardaigne. Ceci permettra dès 535 à Byzance d'entamer la reconquête de l'Italie.

À l'image des préoccupations byzantines, on constate que le fait le plus marquant de cette domination, est la conversion quasi complète des Sardes au christianisme. Ceci est l'apport le plus profond que l'on constate dans la Sardaigne de cette époque.

Seuls les habitants de la Barbaria conservent les anciennes croyances et coutumes. Cependant, partout ailleurs, on peut observer la construction déglises basées sur le modèle de Sainte Sophie (Hagia Sophia) à Constantinople. Ainsi, on constate lintroduction dans lîle de rites byzantins.

Dailleurs, aujourdhui encore à Sedilo, on peut voir la chevauchée dite de sArdìa, qui rappelle les courses des hippodromes de Byzance. Petit à petit, la culture byzantine exerce son influence sur la culture, et en particulier sur lart, insulaire.

La Sardaigne fait partie de la préfecture dAfrique, lon trouve un chef civil qui réside à Cagliari, et un chef militaire qui réside au Fordongianus qui est, depuis les romains, un rempart fortifié contre les habitants de la Barbaria. On trouve le long de cette frontière des forteresses comme celles dAustis, Samugheo, Nuragus et Armungia. Les populations sont brimées avec différentes contributions auxquelles sajoute les suffragia, taxations additionnelles avec lesquelles les officiels tâchent de récupérer les sommes quils ont dépensées pour obtenir leur fonction.

Cest durant la période iconoclaste de l'histoire byzantine, cest-à-dire au cours du VIIIe siècle, que lempire rentre en crise, et que les Arabes prennent, petit à petit, le contrôle de la Méditerranée. Ainsi la Sardaigne ne bénéficie plus de la protection de Byzance, et est donc forcée dorganiser sa défense contre les envahisseurs arabes, qui a commencé le 27 octobre 710[32]. Bien quils restent presque 70 ans en position de domination, les Arabes doivent en 778[33], faire face à une révolte populaire qui les chasse rapidement de lîle. Une nouvelle et dernière tentative de conquête arabe échoue en 821.

Les Judicats

Article détaillé : Judicat.

On ne connaît pas précisément la date de création des Judicats, qui sont quatre régions autonomes, mais leur présence est attestée en 851, même sil est probable que leur naissance soit antérieure à cette date. Chacun des Judicats (Logudoro, Gallura, Arborée et Calaris) sont gouvernés pas des rois ou Giudici, qui sont élus par le parlement sarde appelé Corona de Logu. En effet, « en Sardaigne, des dynasties de chefs indigènes avaient découpé lîle en judicatures »[34].

Éléonore dArborée.

Les Judicats sont alors composés d'un territoire dit logu, divisé en curatorie dirigés par les curatore (autorités surtout judiciaire), formées de plusieurs villages appelés des ville. Les curatore nomment le maiore (le maire) c'est-à-dire le chef du village. Celui- ci est compétent en terme d'investigations judiciaires. Les Judicats sont également subdivisés en districts administrifs, électoraux et juridictionnels qui s'appellent les curadorìas ou curatorìas (curatorie), dirigées par des curadore qui sont soit nommés, soit, pour le moins, approuvés du Giudici. Le curatore est un fonctionnaire du Judicat, dont le mandat est limité dans le temps de façon fixe. Il a autorité sur les perceptions fiscales, sur l'action judiciaire pénale et civile, sur les organes de police et sur l'enrôlement dans l'armée.

Les quatre Judicats Sardes.

La taille de ces districts est définie pour faire en sorte que la population résidant dans chaque curatoria soit approximativement égale. Par conséquent on constate des mouvements frontaliers dus au changement des taux locaux de croissance démographique. Les hommes libres de chaque curatoria se réunissent périodiquement en assemblée afin d'élire leur représentant auprès de la couronne de logu. Les centres d'habitation sont les sas biddas, les villages. On en compte 900 et plus jusqu'en 1300 environ, mais dont le nombre se réduit à 380 environ, suite à la peste, la guerre et la répression aragonaise après la conquête de l'île. Ceci est un système enraciné et extrêmement efficace de gestion du territoire, mais qui disparaît petit à petit au cours du XIVe et surtout du XVe siècle, par la mise en place du système féodal Aragonais. La période des Judicats est celle se développe la langue sarde qui devient la langue la plus parlée. Léglise byzantine orthodoxe, avec lœuvre du pape Grégoire I, est remplacée par le catholicisme. Ce dernier se répand alors dans toute lîle, à lexception de la grande partie de la Barbagia (lancienne Barbaria).

Mieszko Ier de Pologne faisait référence à la lointaine Sardaigne.

Cest à partir de 1100 environ, quon observe la seconde poussée du christianisme sur lîle (après celle de Byzance), caractérisée par de nombreuses constructions religieuses. Cest également à partir de que la mentalité féodale est importée dans lîle par la fin de lisolement que connaissait la Sardaigne jusqualors. En effet, jusque lisolement de la Sardaigne la protégeait de larrivée de seigneurs plus ou moins riches et puissants, qui souhaitaient obtenir du pouvoir, en concurrençant, pour ainsi dire, le pouvoir en place. Ainsi, les châteaux et autres forteresses font leur apparition, au profit des « seigneurs féodaux venus du continent, les Malaspina et les Doria en particulier »[35].

Cest à partir de cette période que la Sardaigne joue un rôle important dans la politique européenne, comme le montrent les multiples contacts avec les régnants dEurope et, en particulier, le judicat dArborée, ce dernier étant le plus influent et celui qui reste en place le plus longtemps, jusquau 29 mars 1410, date de sa capitulation. Un document de cette période, écrit par Mieszko Ier de Pologne et destiné au pape Jean XV, prouve que les judicats étaient connus de la « lointaine Pologne et quils devaient donc avoir un rôle de grand prestige dans lEurope médiévale »[36].

Eléonore dArborée qui est à la tête du judicat dArborée, va mettre en place le premier code civil de ce type en Europe, la Carta de Logu (La charte du lieu). Cette loi dont la « date de promulgation est incertaine, [a été faite] certainement avant 1392 »[37], et reste en vigueur jusquen 1827. Cet acte en fait lun des personnages politiques sardes majeurs de cette époque.

Domination de Pise et de Gênes

Les nombreuses églises de style roman pisan (ici la basilique de Saccargia) témoignent de l'influence de Pise au Moyen Âge

Alors que Mujāhid al-‘Āmirī dit Museto (ou Mugetto) sempare de la Sardaigne en 1015, cest en 1017 qu’ « il abandonne cette conquête, dès quil apprend larrivée des chrétiens avec une flotte puissante »[38], menée par Pise et Gênes, qui, sollicités par le pape, sallient pour chasser les troupes Arabes.

Suite à cela, les deux libérateurs sintéressent à lîle et interfèrent dans son gouvernement. Cest durant cette période que Pise monte en puissance dans son rôle de port principal de la mer Tyrrhénienne et de centre des échanges commerciaux grâce, entre autres, à lemplacement idéal de la Sardaigne.

Lingérence politique de Pise et de Gênes sur les rois juges dura du XIe au XIVe siècle , en se transformant lentement en protectorat, pour aboutir en domination. Ces deux puissances maritimes ne cessent pas de sopposer afin de « tenir la Sardaigne constamment divisée, afin de dominer seul. La politique des papes était dopposer toujours les Génois aux Pisans, dappuyer toujours la partie la plus faible, contre la partie la plus forte »[39]. Les familles des deux cités se disputent alors soit les territoires, soit les places de Juge des différents Judicats. En 1258, le judicat de Cagliari disparaît, pris par les Pisans. Ainsi, en 1265, Mariano de Serra est « lunique Sarde investi dune charge de gouvernement dans une île tombée entièrement au pouvoir détrangers »[40].

Le Règne d'Arborée, plus fort et mieux organisé que les autres, reste indépendant. Il défend en effet avec force son indépendance, et en 1323, l'Arborée s'allie à Jacques II d'Aragon pour une campagne militaire contre Pise et Gênes qui aura pour fin de créer le royaume de Sardaigne.

Domination aragonaise


Le judicat dArborée face à la couronne dAragon avant 1410.

Avec la conquête des Judicats de Cagliari et de Gallura, le pape Boniface VIII crée le Royaume de Sardaigne et de Corse quil avait voulu dès le 4 avril 1297, afin de pacifier les conflits en Sicile entre la couronne dAragon et la Maison dAnjou. La Paix de Caltabellotta , est donc signée le 19 août 1302. Fort de lappui du pape, la force Aragonaise commence les opérations militaires contre les Pisans de Cagliari et de Gallura, le 18 avril 1323 dans la campagne de Sainte Catherine entre Villanovaforru et Sanluri. Cest le 20 juillet 1324, avec la prise du château de Cagliari, que le royaume de Sardaigne et de Corse est définitivement instauré. Cest alors que la commune de Sassari, le 21 juillet 1325, se rebelle face au nouveau pouvoir, et réussi à devenir indépendante pendant une année. Le 26 septembre 1329, une seconde révolte éclate et est sauvagement réprimée.

En 1354, cest au tour dAlghero de devenir Aragonaise, qui reste encore aujourdhui fortement catalane. Entre février et avril 1355 le premier Cortès (parlement) est réuni, ce qui aboutit en Juillet à la paix de Sanluri entre les deux parties. La défaite des autres Judicats, et le retrait partiel du roi dAragon permet au Judicat dArborée, encore autonome, de connaître une expansion importante, et réunit quasiment toute la Sardaigne (voir carte ci-contre).

Tableau dun maitre dart Sarde, le Maestro di Castelsardo, du XVIe siècle

Mais en 1383, « les insulaires ne pouvant plus supporter la domination tyrannique du juge dArboréa »[41] assassinent Hugues III dArborée. « La mort en janvier 1387 du Cérémonieux implique une pause forcée de réflexions […], on avance vers la paix entre Catalans et Arboréens »[42]. Ainsi en 1388 la paix sarde est signée entre les deux parties. Cependant cette paix est courte, et le 30 juin 1409 le judicat dArborée est vaincu à Sanluri par les troupes de Martin Ier dAragon, ce qui implique la capitulation de Guillaume II, alors juge du Judicat, et lunification totale de la Sardaigne sous la bannière du roi dAragon.

La Sardaigne a un statut spécial dans le royaume Aragonais, et dépend directement du roi, ce qui lui confère une certaine autonomie. Lîle sorganise politiquement sous forme dun parlement, les Cortès, «  les trois ordres de la nation avaient chacun leur représentation »[43], ecclésiastique, militaire et royal. Ce dernier correspond aux représentants des villes. Les couleurs de la couronne dAragon restent présentes en Sardaigne, jusquà ce que Ferdinand II dAragon, en 1479, créé la couronne dEspagne.

La présence catalano-aragonaise, va fortement influencer les coutumes sardes. La langue sarde en est un exemple, car le catalan devient la langue officielle de Sardaigne et ainsi laisse des traces qui « restent intactes encore aujourdhui »[44], notamment à Alghero, port du nord-ouest de l'île. On a dailleurs retrouvé plusieurs documents en espagnols qui ont permis de faire apparaître certaines mœurs de l'époque. On peut prendre comme exemple un document de 1678 qui relate un procès pour « faits de sorcellerie et de mauvaise moralité »[45].

Époque moderne et contemporaine


La couronne dAragon, et donc la Sardaigne, passe au XVIe siècle, aux mains de Charles Quint, mais reste tout de même indépendante. La guerre de Succession dEspagne fait passer en 1708 la Sardaigne sous la domination de la maison dAutriche, mais est rapidement récupérée en 1717 par Philippe V dEspagne.

Cest à cette époque que les destins sarde et italien se rejoignent définitivement. Mais la Sardaigne reste au cœur de la politique italienne et européenne, par son rôle dans lunification italienne, et sa relation internationale, en particulier celle quelle entretient avec la France.

Le Royaume de Sardaigne

Le royaume de Sardaigne et son contexte géopolitique en 1812.

Cest à la signature du traité de Londres en 1718, que Victor-Amédée II de Savoie échange la Sicile à la Sardaigne. Cet accord prenant effet en 1720, cest à cette date que lon peut parler effectivement de la naissance du royaume de Sardaigne, qui comprend les États de Savoie, le Piémont, le Comté de Nice et bien sûr lîle sarde. Plus tard, après lannexion du Piémont par la France en 1802, il est récupéré en 1815 ainsi que Gênes.

En 1793 a lieu une tentative dinvasion de la Sardaigne par les Français, qui échoue grâce à la mobilisation presque spontanée des Sardes. Les Français, en réalité, visent limportance militairement stratégique de lîle. Peu après, la classe dirigeante de lîle, en grande partie ancrée dans une mentalité féodale et des coutumes espagnoles, accepte de se révolter, suite au refus de Victor-Amédée III de prendre en considération les propositions statutaires des états généraux sardes (les Stamenti).

Le 28 avril 1794 une révolution républicaine éclate donc, dirigée par Giovanni Maria Angioy, qui a dabord pour conséquence dexpulser les Piémontais. Alors que larrivée des troupes françaises au Piémont en 1796, fait apparaître une révolte Piémontaise républicaine, le soulèvement sarde prend fin, avec la défaite dinsurgés prés dOristano.

Palais royal de Turin.

« Les révolutionnaires français, échaudés par ce fiasco [de 1793], refusèrent alors daider le révolutionnaire sarde Giovanni Maria Angioy, qui dut sexiler à Paris »[46]. Suite à larmistice de Cherasco le 26 avril de la même année, la Maison de Savoie reprend alors en quelques mois le contrôle de lîle, et réprime très durement la population.

Ainsi, à la création de la République piémontaise, le 3 mars 1799, le roi Charles-Emmanuel IV arrive à Cagliari. Le 4 juin 1802, Charles-Emmanuel IV cède son trône à Victor-Emmanuel Ier, et le 11 septembre « Le Piémont fut formellement réuni à la France »[47]. Cest « le décret du 30 novembre 1847, qui prononça lunion et lassimilation de la Sardaigne avec les États continentaux »[48] (le Piémont, la Savoie et la Ligurie), et qui fait suivre le déplacement des instances dirigeantes au palais royal de Turin. Ainsi débute, en 1848, la guerre dindépendance voulue par le roi de Sardaigne, dans un but unificateur pour lItalie, le risorgimento. Dans cette perspective les Sardes participent à la guerre de Crimée en 1855.

Le royaume dItalie

Articles détaillés : Liste des rois d'Italie et risorgimento.
Rencontre entre Garibaldi et Victor-Emmanuel II en 1860.

La misère grandissante en Sardaigne à l'effort de guerre du risorgimento, fait accueillir lunification italienne très positivement par les Sardes, qui pensent quelle va améliorer la situation. Dès le début du risorgimento, ont peut entendre au sein des manifestation le soutenant : « vive la ligue italienne et les nouvelles réformes »[49]. Après le Traité de Turin (1860) initié par Camillo Cavour, et lexpédition des Mille mené par Giuseppe Garibaldi, il faut attendre 1861 pour que le royaume dItalie soit proclamé par le roi de Sardaigne. Lîle est à partir de mise au second plan de la scène politique internationale. Alors que la situation économique de lîle a de lourdes difficultés, on voit quelques améliorations (exploitation de mines, réseau routier...) qui ont cependant des effets limités. D'ailleurs, « les différents gouvernements qui se sont succédé depuis la réalisation de lunité italienne, ont été confrontés à des situations explosives dans le Mezzogiorno et, au fur et à mesure que progressait lindustrialisation, dans le nord[50] ». Ainsi, l'unification « laissait un grand nombre de problèmes non résolus, comme les profondes inégalités sociales et la fracture des mentalités et des économies entre le Nord et le Midi[51] ». Également, « la Sardaigne [a un] nombre de suicides insignifiants en 1864-1876, si bien qu'on peut négliger [son] rang dans cette

période[52] », tandis qu'on constate une nette progression de ce taux en 1894-1914, ce qui révèle le mal être de l'avant guerre.

Défilé de la brigade Sassari chantant dimonios le 2 juin 2006.

Au début de la Première Guerre mondiale, le royaume dItalie est neutre, ne souhaitant pas l'entrée en guerre du pays. Ce n'est que le 23 mai 1915 qu'elle s'engage dans le conflit. Dès cette date on trouve de nombreux soldats sardes au combat, dont on note le symbole incontestablement le plus marquant de cette force militaire, la brigade « Sassari ». On dénombre « 13 602 victimes Sardes de la première guerre mondiale »[53]. À la fin de la guerre, lItalie annexe des territoires autrichiens, et les Sardes, comme le reste des italiens, sont déçus de ce peu de bénéfice qu'a engendré la victoire, et ceci en comparaison des pertes humaines. « On a pu dire avec raison des familles sardes que bien peu étaient celles ne figurât un ou plusieurs morts au champ d'honneur »[54].

Benito Mussolini.

La Sardaigne est donc d'autant plus amère lorsqu'elle constate que « rien ou presque »[54] n'est fait pour son développement économique. C'est ainsi que l'idée autonomiste fait chemin, et que durant lentre deux guerres, le parti sarde d'action est créé afin de faire valoir les intérêts autonomistes de la Sardaigne, en prenant appui sur les combattants de la brigade « Sassari », qui ont lexpérience dautres régions italiennes.

Alors quau début des années 1920 Antonio Gramsci, à Ales, est lun des créateurs du Parti Communiste Italien, la Sardaigne vit toujours une situation économique précaire. Et ce nest pas la période fasciste qui suit qui va améliorer les choses. En effet, de part la monté du communisme et la déception de la première guerre mondiale, Mussolini créé le parti fasciste en 1919 qui aura un fort poids politique dès les années 20. Mussolini accède au pouvoir en 1922 après la marche sur Rome, et même s'il veut alors développer la production minière sarde, et y réussit, il en résulte également une exploitation encore plus intense de son peuple.

Bien que la Sardaigne soit relativement protégée des heurts de la Seconde Guerre mondiale, de cette dernière « restent seulement les effrayantes blessures infligées par les bombardements alliés à Cagliari et dans dautres villes de lîle »[55] de 1943[56], qui ont comme but de déloger de lîle les garnisons nazies. Laprès-guerre va donc être, comme dans le reste de lEurope, une période de reconstruction économique.

La république italienne et lautonomie sarde

Article détaillé : Présidents de la Sardaigne.
Les provinces sardes sappliquant à partir de 2005.

Le statut spécial de la Sardaigne est concomitant à la naissance de la république en 1948. On y trouve en effet cinq régions du même type qui « ont été créées dans le but de prévenir tout séparatisme[57]. »

Cette nécessité découle de la faiblesse de l'État italien d'après guerre qui doit conserver l'unité nationale. « Aussi lItalie prend-elle en compte aussi bien la volonté dunification centralisatrice administrative (la monarchie piémontaise dabord, influencée par le modèle français, puis ladministration mussolinienne) que la définition dun modèle démocratique composite, ménageant le rôle des corps intermédiaires et des minorités, avec des éléments qui se rapprochent des conceptions communautaristes actuelles »[58].

La loi constitutionnelle no 3, du 26 février 1948 permet ainsi un transfert du pouvoir national au régional, mais en sintégrant dans lunité de la nation : « La Sardaigne avec ses îles est constituée en région autonome [...] qui entre dans lunité politique de la république italienne, une et indivisible »[59]. Ainsi dès 1948, la région sorganise autour de trois provinces (Cagliari, Nuoro et Sassari auxquelles vient sajouter plus tard celle dOristano) et trois organes des pouvoirs régionaux. Lexécutif est administré par la Junte régionale, le pouvoir législatif par le conseil régional, et enfin le Haut Commissaire (rapidement renommé en président de la Junte ou commission régionale) élu par le conseil pour devenir le représentant de la région sarde. Ce dernier est renommé en 2004 en président de la région.

Le droit de légiférer au sein de la république italienne est limité à des domaines qui concernent exclusivement la région (notamment lorganisation des administrations locales par exemple), ou des domaines plus vastes mais qui doivent alors respecter les « principes établis par la loi de lÉtat »[60] (exemple de lassistance publique). En 2001, la loi régionale n°9 ajoute quatre nouvelles provinces à celles préexistantes. Ainsi les provinces dOlbia-Tempio, de lOgliastra, de Carbonia-Iglesias, et du Medio Campidano prennent effet en mai 2005.

Costume de carnaval d'Ottana, Sardaigne

La loi initiale de 1948 va être revue à plusieurs reprises. En 1972[61] (le conseil régional est élu pour cinq ans au lieu de quatre), en 1983[62] (une série de changement sur les « règles pour la coordination de la finance de la région »), en 1986[63] (précise larticle 16 en donnant le nombre de conseillers régionaux), en 1989[64] (détermine la durée dinstallation des conseils régionaux), 1993[65] (intégrations aux statuts spéciaux), 2001[66] (dispositions concernant lélection directe du Président de la région).

Ainsi la région de Sardaigne essaie dallier son identité propre en maintenant sa culture et en gardant en mémoire sa longue histoire, tout en conservant son attachement à la nation italienne, à laquelle elle se sent réellement liée. On ne peut pas dire que les Sardes souhaitent une indépendance totale, comme le souhaiteraient certains Corses par exemple, cependant ils sont très attachés à leur autonomie actuelle, ce qui leur permet de maintenir leur identité propre. On peut imager cet attachement à la présence importante de la langue (ou plutôt les langues) Sarde. En effet, environ 85 % des habitants de la Sardaigne comprennent le sarde, dont 8 à 9 % qui ne parlent pas litalien, sachant que lîle est peuplée à 81,2% de Sarde[67]. Sa relation avec le reste de lItalie sinscrit dans une problématique plus générale, dans la scission entre le nord et le sud. Ce dernier, plus pauvre, est parfois négligé par des régions plus riches, la ligue du Nord allant jusquà prôner lindépendance de la partie septentrionale de lItalie, afin que celle ci ne soit pas handicapée économiquement par le Sud.

Voir aussi

Articles connexes

Sources et bibliographie

Certains paragraphes sont issus de la traduction dune partie darticles provenant de Storia della Sardegna du Wikipédia Italie. Vous pouvez consulter leurs auteurs en consultant les historiques.

  • (it) Maria Luisa Cojana, Daniela Fadda, Giuseppe Murru, Roberto Pili, Almanacco scolostico della Sardegna, Ed. EdiSar, Cagliari, 1992. (ISBN 8886004117);
  • (it) Francesco Cesare Casula, Sintesi de La storia di Sardegna, Ed. C. Delfino, 2002. Sassari. (ISBN 8871383249);
  • (it) Pietro Martini, Storia delle invasioni degli Arabi e delle piraterie dei barbeschi in Sardegna, A. Timon, Cagliari, 1861;
  • (it) Bruno Anatra, La Sardegna dallunificazione Aragonese ai Savoia, Utet Libreria, Turin, 1987. (ISBN 887750174X);
  • Fernand Hayward et Jean Imbert, Sardaigne terre de lumière, Nouvelles éditions latines, 1956, Paris. (ISBN 272331099X);
  • Auguste Boullier, LÎle de Sardaigne : description, histoire, statistique, mœurs, état social, E. Dentu, Paris, 1865;
  • Jean-François Mimaut, Histoire de Sardaigne, ou La Sardaigne ancienne et moderne, considérée dans ses lois, sa topographie, ses productions et ses mœurs, 1825.

Notes et références

  1. Christophe de Chenay, « Maquis sarde et vallées oubliées », dans Le Monde, article du 29/09/2005, [lire en ligne];
  2. Conrad Malte-Brun, Précis de la géographie universelle, Paris, Bureau des publications illustrées, 1843, p. 311;
  3. Il est question ici de Macéride, lHercule des Égyptiens.
  4. André de Claustre, revue et corrigé par François Richer, Dictionnaire portatif de mythologie, Briasson, 1765, p. 410.
  5. Clio la muse, Les Peuples de la mer, [lire en ligne]
  6. Laurent-Jacques Costa, 2006, Questions d'économie préhistorique, CRDP, Corse
  7. (it) Une des publications officielles sur le sujet reste la chronologie des cultures préhistoriques que lon trouve dans le livre du professeur Giovanni Lilliu, La civiltà dei Sardi, Torino, éd. Eri, 1988, 3e édition (ISBN 8886109733)
  8. Laurent-Jacques Costa, 2004, « Nouvelles données sur le Mésolithique des îles tyrrhéniennes », Gallia Préhistoire, CNRS Editions, p.211-230
  9. Diversité de lADN mitochondrial et histoire du peuplement des îles San Pietro et San Antioco (Sardaigne), L. Giovannoni, A. Falchi, G. Vona, L. Varesi, 2005, vol. 20, n°2-3, pp.107-121. Revue Human evolution (ISSN 0393-9375) [présentation en ligne].
  10. (it) Francesco Cesare Casula, La storia di Sardegna, p.8.
  11. La fabrication dhuile de lentisque (Listincu ou chessa) en Sardaigne, Francois De Lanfranchi, Maï Bui Thi, Michel Girard, JATBA, 1999, vol. 41, no2, pp.81-100. [présentation en ligne];
  12. Laurent-Jacques Costa, 2007, L'obsidienne, un marqueur d'échanges en Méditerranée préhistorique, éditions Errance, Paris;
  13. Roger Joussaume dans Clio Italie, p.26 [lire en ligne] [pdf]
  14. (it) Fulvia Lo Schiavo, Il museo archeologico di Sassari G. A. Sanna, p.18, ed. Carlo Delfino, 1991, Sassari, (ISBN 871380312), [lire en ligne] [pdf]);
  15. Bietti Sestieri A. M., Un modèle sur les mécanismes d'échanges et de circulation entre le monde égéen et la Méditerranée occidentale au deuxième millénaire av. J.-C. un cadre essentiel pour la compréhension de la métallurgie, Collection de l'Ecole française de Rome, 2004, vol. 332. [présentation en ligne]
  16. José María Blázquez, Le culte des eaux dans la Péninsule Ibérique, p.233, [lire en ligne];
  17. Jean-François Mimaut, Histoire de Sardaigne, p.12 [lire en ligne];
  18. Auguste Boullier, LÎle de Sardaigne : description, histoire, statistique, mœurs, état social, 1865, p. 52, [lire en ligne];
  19. Auguste Boullier, LÎle de Sardaigne, p. 53, [lire en ligne];
  20. Fernand Hayward et Jean Imbert, Sardaigne terre de lumière, p. 30;
  21. Auguste Boullier, LÎle de Sardaigne, p. 60, [lire en ligne];
  22. Pausanias, Description de la Grèce [détail des éditions] [lire en ligne], XVIII, 8.
  23. J.-M. Roddaz, La République Romaine, Université Michel de Montaigne, octobre-décembre 2005, p. 14 [lire en ligne] [pdf];
  24. Gustave Flaubert, Salammbô, 1862. [lire en ligne];
  25. Patricia Bourcillier, SardegnaMadre, Flying Publisher, chap.5, [lire en ligne].
  26. Horace, Odes, Ode I.31 - À Apollon [lire en ligne].
  27. Emmanuel Domenech, Bergers et bandits, souvenirs dun voyage en Sardaigne, 1867. [lire en ligne].
  28. Gustave Flaubert, Trois contes, Hérodias, 1877. [lire en ligne].
  29. Serge Lancel, L'Afrique vandale, parue dans Clio en mars 2002. [lire en ligne];
  30. Christian Soucy, Flavius Belisarius et la reconquête de lempire romain, article parut dans PHARE BEACONBAGOTVILLE en février 2005, p.6. [lire en ligne] [pdf];
  31. Marc Bloch, La société féodale, p. 238. [lire en ligne].
  32. (it) Pietro Martini, Storia delle invasioni degli Arabi e delle piraterie dei barbeschi in Sardegna, p.60;
  33. Auguste Boullier, LÎle de Sardaigne, p. 76;
  34. Marc Bloch, La société féodale, 1940, p. 373;
  35. Fernand Hayward et Jean Imbert, Sardaigne terre de lumière, p. 43;
  36. (it) Almanacco scolastico della Sardegna, p. 101;
  37. (it) Almanacco scolastico della Sardegna, p. 91;
  38. (it) Pietro Martini, Storia delle invasioni degli Arabi e delle piraterie dei barbeschi in Sardegna, A. Timon, 1861, p. 118;
  39. Auguste Boullier, LÎle de Sardaigne, p. 79. [lire en ligne];
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  41. Juan de Ferreras, Histoire général dEspagne,Chez Gissey, 1751, P. 497;
  42. Bruno Anatra, La Sardegna dallunificazione Aragonese ai Savoia, p. 101;
  43. Auguste Boullier, LÎle de Sardaigne, p. 91. [lire en ligne];
  44. (it) Almanacco scolactico della Sardegna, p. 237;
  45. Fois Graziano, (it) Processo ad una Zingara in Sardegnax (sec. XVII), in Lacio drom, 1999, vol. 35, no6, pp. 11-17;
  46. Emmanuel Bernabéu-Casanova, Un «destin corso-sarde » dans le cadre de lUnion européenne ?, dans la revue Hérodote N°1032001/4, p. 157. [lire en ligne] [pdf]);
  47. Antoine-Henri de Jomini, Vie politique et militaire de Napoléon, 1827, p. 530;
  48. Auguste Boullier, LÎle de Sardaigne, p. 115. [lire en ligne];
  49. (it) Almanacco scolastico della Sardegna, p. 153;
  50. Aperçu de la crise Italienne, socialisme.free.fr, le 21 novembre 1992[lire en ligne].
  51. Paul Guichonnet, Le sentiment national italien, revue Clio, Juillet 2002 [lire en ligne].
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  53. Almanacco scolastico della Sardegna, p. 229;
  54. a et b Fernand Hayward et Jean Imbert, Sardaigne terre de lumière, 1956, p.340;
  55. Sardegna, Touring Editore, 1984, p. 90, (ISBN 8836500234);
  56. Les premières frappes ont lieux le 16 février 1943.
  57. Annie CHEMLA-LAFAY, Randhir AULUCK, Céline CHOL, Brigitte COUÉ, Marie-Thérèse DELEPLACE, Brigitte DENGLER, Michel MARÉCHAL, 25 ans de réforme de la gestion publique dans les pays de l'OCDE, Convergence et systémique, Institut de la gestion publique et du développement économique, Mai 2006, p.33. [lire en ligne] [pdf]
  58. Jean-Pierre Darnis, France-Italie: relations bilatérales, stratégies européennes, Istituto affari internazionali, IAI QUADERNI n°23, mars 2005, p.64. [lire en ligne] [pdf];
  59. (it) Titre I, art. 1; [lire en ligne] [pdf];
  60. (it) Site officiel de la région Sarde. [lire en ligne];
  61. Texte officiel de 1972. [lire en ligne] [pdf];
  62. Texte officiel de 1983. [lire en ligne] [pdf];
  63. Texte officiel de 1986. [lire en ligne] [pdf];
  64. Texte officiel de 1989. [lire en ligne] [pdf];
  65. Texte officiel de 1993. [lire en ligne] [pdf];
  66. Texte officiel de 2001. [lire en ligne] [pdf];
  67. Site du trésor de la langue française au Québec. [lire en ligne].

Liens externes

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