Laïques

Laïques

Laïcité

Devise de lÉtat français sur le tympan dune église.

La laïcité est un concept qui trouve ses racines dans les écrits des philosophes grecs et romains, tels que Marc-Aurèle et Epicure, ceux des penseurs des Lumières comme Denis Diderot, Voltaire, John Locke, les pères fondateurs des Etats-Unis tels James Madison, Thomas Jefferson, et Thomas Paine, en France à travers les lois de Jules Ferry, ainsi que dans les écrits de libres penseurs modernes, agnostiques et athées, tels que Bertrand Russell, Robert Ingersoll, Albert Einstein, et Sam Harris.

La laïcité désigne, au sens actuel, la séparation du civil et du religieux. Le principe de séparation des pouvoirs politique et administratif de lÉtat du pouvoir religieux en est une application. Au sens contemporain, elle est le principe d'unité qui rassemble les hommes d'opinions, religions ou de convictions diverses en une même communauté.

L'adjectif « laïque[1] », qui s'oppose d'abord à « clérical », peut aussi désigner l'indépendance par rapport à toute confession religieuse.

Sommaire

Origines

Étymologie

Le mot « laïc », apparu au XIIIe siècle et d'usage rare jusqu'au XVIe siècle, est issu du latin laicus « commun, du peuple (laos) » terme ecclésiastique repris au grec d'église λαϊκός, laikos, « commun, du peuple (laos) »[2], par opposition à κληρικός, klerikos (clerc)[3], désignant les institutions proprement religieuses. Le terme laicus est utilisé dans le vocabulaire des églises chrétiennes dès l'Antiquité tardive, pour désigner toute personne qui nest ni clerc, ni religieux, mais qui appartient cependant à l'Église (c'est-à-dire qui est baptisé, aucun incroyant n'étant considéré comme laïc), et peut même y exercer des fonctions importantes. L'abstrait désignant cette position a donné en français le terme « laïcat »[4]. Au Moyen Âge, le mot « laïque » distingue l'homme commun, qui doit être enseigné, de l'individu instruit consacré par son état religieux[5].

Le concept de laïcité, en tant que séparation du pouvoir ecclésiastique et du pouvoir séculier, est ancien, mais ne s'exprime pas d'emblée dans le champ lexical du laïcat. Au Ve  siècle, le pape Gélase Ier conçoit le premier dans une lettre à l'empereur Anastase, la distinction entre le pouvoir temporel (potestas) et de lautorité spirituelle (auctoritas)[6]. Cette lettre, préfigurant la doctrine médiévale[7] des deux glaives[8], devient à fin du XIe siècle lun des textes clefs invoqués pour soutenir la supériorité de lautorité pontificale sur la potestas impériale. Mais l'usage qui en est fait alors, dans l'optique de la séparation du regnum et du sacerdotium, provient de limportance excessive accordée à ce qui est en fait une citation altérée de la lettre de Gélase, qui mentionnait « deux augustes impératrices gouvernant le monde »[9]. La distinction entre potestas et auctoritas tente d'établir une hiérarchie : le pouvoir politique serait moralement soumis à l'autorité. Cette dichotomie entraîne des réactions qui se traduisent notamment par la lutte du sacerdoce et de l'Empire ou par les mouvements hérétiques des XIVe et XVe siècle qui contestent au clergé cette mainmise spirituelle[10][réfincomplète].

Les racines de la notion de laïcité

La notion moderne de laïcité, qui n'est plus hiérarchique, apparaît quand la théorie politique puis l'État deviennent capables d'une pensée autonome sur la question religieuse[11]. Dans un premier temps, les philosophes des Lumières, comme Voltaire, se sont mis à parler de prêtres ou de missionnaires laïques pour désigner la vocation morale hors du clergé et des doctrines religieuses[réfnécessaire]. Les termes « laïcité », « laïciser », « laïcisation », ne sont attestés qu'à partir de la chute du Second Empire, en 1870 : le terme « laïcité » est contemporain de la Commune de Paris qui vote en 1871 un décret de séparation de l'Église et de l'État[12]. Ils sont liés, sous la Troisième République, à la mise en place progressive d'un enseignement non religieux mais institué par l'État. Le substantif « la laïque », sans autre précision, désignait familièrement l'école républicaine. La laïcité sécularise alors la puissance publique et renvoie l'activité religieuse à la sphère privée.

Est désormais laïque (au sens de Laos « la population indivise ») « ce qui concerne tout le peuple, indépendamment des diverses croyances ou convictions qui le divisent[13] ». Cette définition contemporaine se rapproche de celle qu'avait retenue Ferdinand Buisson dans son Nouveau dictionnaire de pédagogie (1911)[14] :

« Les laïques, c'est le peuple, c'est la masse non mise à part, c'est tout le monde, les clercs exceptés, et l'esprit laïque, c'est l'ensemble des aspirations du peuple, du laos, c'est l'esprit démocratique et populaire. »

Selon Henri Pena-Ruiz, dans la cité grecque (et dans la cité latine pré-chrétienne postérieurement) la religion organise le lien social. Puis, la cité se faisant intégrante, des croyances multiples cohabitent. Chaque citoyen a ses dieux personnels, dans une cité qui a les siens propres (les dieux poliades) et dont la vocation est de préserver le salut commun. Progressivement, le conformisme religieux laisse la place à des lois communes, afin de favoriser la coexistence de tous. La religion de la cité aura alors une fonction civique dépourvue de dogmatisme théologique ; on admettra progressivement que la conscience reste maîtresse delle-même. Le droit romain développera cette distinction entre lois communes et pouvoir religieux en distinguant la res publica (la « chose publique ») de la chose privée. Ainsi sont réunis les composantes de la laïcité contemporaine : le respect de la conscience individuelle, la recherche de lintérêt général, la primauté de la loi sur les dogmes[15].

La laïcité contemporaine, principe d'unité

Aujourd'hui, une organisation commune fondée sur la laïcité permet de prendre en compte la diversité des hommes et la nécessité de les unir pour assurer leur coexistence.

« Elle le fait en conjuguant la liberté de conscience, qui permet aux options spirituelles de s'affirmer sans s'imposer, l'égalité de droits de tous les hommes sans distinction d'option spirituelle, et la définition d'une loi commune à tous visant le seul intérêt général, universellement partageable[13]. »

Jean Baubérot emploie une formule semblable en définissant la laïcité contemporaine sous trois aspects : lÉtat est sécularisé, la liberté de croyance et de culte est garantie, et les croyances sont égales entre elles.

Les trois conceptions principales de la laïcité

On oppose aujourdhui trois conceptions de la laïcité.[réfsouhaitée]

La conception française

Article détaillé : Laïcité en France.

Principe

Mais le concept de laïcité est avant tout une histoire conflictuelle opposant tout au long du XIXe siècle deux visions de la France les catholiques et les révolutionnaires. La conception française est, dans son principe, la plus radicale des conceptions de la laïcité (comparativement), quoiquelle ne soit pas totale. La justification de ce principe est que, pour que lÉtat respecte toutes les croyances de manière égale, il ne devrait en reconnaître aucune. Selon ce principe, la croyance religieuse relève de lintimité de lindividu. De ce fait, lÉtat nintervient pas dans la religion du citoyen, pas plus que la religion nintervient dans le fonctionnement de lÉtat. La laïcité à la française pose comme fondement la neutralité religieuse de lÉtat. LÉtat nintervient pas dans le fonctionnement de la religion, sauf si la religion est persécutée (article 1 de la loi de 1905 : "lÉtat garantit lexercice des cultes.").

Ce principe a été énoncé essentiellement en deux temps :

  • dune part, sous la Révolution française, notamment dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 (qui fait cependant référence à un Être Suprême, voire supra) et qui est reprise par le préambule de la Constitution de 1958, dont larticle Ier rappelle que : La France est une République laïque ;
  • et dautre part, par la loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des Églises et de lÉtat, qui introduit les principes de non-ingérence et de séparation avec les institutions religieuses ; les institutions religieuses ne peuvent avoir dinfluence sur lÉtat et lÉtat ne peut avoir dinfluence sur les Églises ou leurs croyants sauf en tant que citoyen : la séparation est donc réciproque.

La conception française de laïcité, bien que dans son principe la plus radicale, a été extrêmement marquée dans son application pratique par le fait quil sagit dun long et périlleux combat anticlérical, consistant non pas à séparer le pouvoir politique du fait religieux en tant que tel, mais à réduire linfluence de lÉglise Catholique et des militants politiques chrétiens.

Les dispositions de la loi, dont il est question ici, ont donc fait lobjet dune négociation entre lÉglise Catholique et le législateur[réfnécessaire]. Il fallait pour lÉglise protéger ses privilèges, son patrimoine et ses réseaux et pour lÉtat composer avec le fait que bon nombre des parlementaires et hommes politiques étaient issus des milieux catholiques pratiquants. Les autres grandes religions monothéistes nont pas figuré à la table des négociations et leur influence était d'ailleurs marginale, d le déséquilibre de traitement qui existe jusquà nos jours entre les diverses religions.

Le principe de laïcité ne sest appliqué quaux citoyens et en France métropolitaine. Dans les colonies et même en Algérie (départementalisée), la population d'origine indigène n'avait pas la pleine citoyenneté et le droit qui s'appliquait faisait une large place aux coutumes locales, y compris en matière de place des cultes, des structures religieuses et de leurs ministres. De cette situation proviennent, dailleurs, les problèmes dintégration en France à partir des années 1960, lorsque les immigrés de ces colonies, qui pouvaient jusqualors publiquement exercer leur religion, sont arrivés en France il était dusage tacite de se confondre dans la population[16].

Énoncé en 1905, le principe de laïcité ne s'applique pas non plus en Alsace-Moselle, (qui ne fut réintégrée à la France qu'en 1918 et imposa cette condition à sa réintégration) pour ce qui concerne l'éducation - et le régime du concordat prévaut -, ni à Mayotte pour les principes du droit ( la loi islamique, la charia, sapplique selon le recueil de jurisprudence, le minhadj, même si l'on observe que le droit coutumier local opère un glissement vers le droit commun[17]) ou à Wallis-et-Futuna pour le système éducatif en primaire ( l'enseignement est concédé par l'État au diocèse catholique).

Aujourdhui, des propositions dinclusion de la notion de valeurs, ou de racines, chrétiennes ou même simplement "religieuses" dans la Constitution européenne suscitent une vigilance accrue de milieux attachés à la laïcité[18] : le mot "racines" n'étant pas suivi de l'adjectif "historiques" pourrait en effet être interprété par la suite comme "fondatrices".

Applications concrètes du principe

La première et plus importante traduction concrète de ce principe en France concerne létat civil, auparavant tenu par le curé de la paroisse qui enregistrait la naissance, le baptême, le mariage et la sépulture des personnes. Depuis 1792, il est désormais tenu par lofficier détat civil dans la commune (le maire) et tous les actes doivent être enregistrés devant lui (à lexception du baptême qui nest pas un acte enregistré).

Les cérémonies religieuses (mariage religieux, baptême, obsèques) nont plus de valeur légale et nont quun caractère optionnel. Elles sont même interdites avant l'équivalent civil, s'il existe  : par exemple, un mariage religieux ne pourra être effectué (si les participants le souhaitent) que postérieurement à un mariage civil. En dépit du principe affiché, l'État intervient donc dans le culte.[non neutre]

Par principe, la laïcité est un concept étroitement lié à celui de la liberté dexpression et dopinion. Il est permis à chacun de pratiquer la religion de son choix (ou de nen pas pratiquer du tout), tant que cette pratique ne va pas à lencontre des droits dautrui. Mais cette liberté est limitée dans certains cas. Cest le cas notamment des fonctionnaires en service qui nont pas le droit de porter de signe religieux. encore, il ne s'agit pas spécifiquement d'une application du principe de laïcité, le même interdit existant pour d'autres comportements (militantisme politique, etc.)

LÉtat ne doit ni poser des questions (dans le cadre d'un recensement), ni distinguer entre les personnes sur la base de critères religieux. Ce n'est toutefois pas une application du principe de laïcité, le même interdit existe pour d'autres catégorisations sensibles (origine ethnique, couleur de peau, appartenance politique ou syndicale, etc.). Au niveau collectif, le fait qu'une organisation soit ou non affiliée à une religion ne peut pas non plus entrer en considération : seules les activités cultuelles sont exclues, mais un club sportif dépendant d'une église peut obtenir des subventions aussi bien qu'un club laïc, dans la mesure il est aussi ouvert aux laïcs. De même, les écoles confessionnelles peuvent participer au "service public de l'éducation" (l'état en paye alors les professeurs et les collectivités territoriales peuvent contribuer à leur bonne marche), ce qui implique notamment qu'elles respectent les programmes officiels, et qu'elle doivent accueillir (service public oblige) tous les élèves qui le souhaitent indépendamment de leur religion et sans prosélytisme dans le cadre des cours. 90 % des écoles privées en France sont catholiques.

Article détaillé : Enseignement privé en France.

Dans le système éducatif français, la formation religieuse (dans le sens « enseignement de la foi ») ne fait pas partie du cursus des élèves ; néanmoins, une demi-journée par semaine est libre justement pour que cet enseignement puisse être assuré (le mercredi), et d'autre part les établissements peuvent disposer d'aumôneries et de groupes de pratiquants actifs, même dans le cadre d'un établissement public, et a fortiori dans les établissement privés : l'exercice du culte est libre même à l'intérieur des établissements publics, à condition de ne pas perturber le fonctionnement ni de se transformer en prosélytisme (impossible d'interrompre la classe pour une prière, d'exiger un menu spécifique à la cantine, ou de squatter la cour de récréation pour une messe, par contre on peut disposer d'une salle libre par ailleurs pour cela). De même, les signes religieux "ostentatoires" sont interdits dans les écoles publiques[19].

Il existe en outre des propositions pour que le fait religieux, un enseignement descriptif des caractéristiques des religions (dogmes, structures, histoire, etc.) soit inscrit aux programmes. Les rapports Debrey (2002) et Stasi (2003) conseillent d'aborder les faits religieux comme des faits sociologiques.

Exceptions

Pour des raisons historiques, il existe certaines exceptions locales : l'acte de naissance pratique du principe de laïcité est la loi de 1905 qui ne sappliquait alors pas outre-mer, ni en Alsace-Moselle alors annexés par l'Empire allemand suite à la défaite française de la Guerre franco-allemande de 1870.

Lors du rattachement de l'Alsace-Moselle au territoire national, après la victoire française de la Première Guerre mondiale, la question s'est posé de l'extension du corpus juridique français à ces régions, qui en avaient été séparé pendant plus de 40 ans. Suite à la demande unanime des députés locaux [réfnécessaire], subsistent diverses dispositions relevant du droit local : un statut scolaire particulier lenseignement religieux est obligatoire, un statut différent pour les associations et le maintien du Concordat[20].

Dans ces régions improprement appelées concordataires (le Concordat ne sapplique en principe quaux citoyens de confession catholique, les articles organiques régissant les autres cultes), les ministres des cultes sont rémunérés par lÉtat et réputés personnels de la fonction publique et lécole publique dispense des cours dinstruction religieuse (catholique, luthérienne, réformée ou israélite). Les cultes reconnus sont très encadrés (nomination des évêques par le ministre de lIntérieur...) ; les actes détat civil continuent dêtre du domaine de lÉtat. LIslam ny est pas un culte reconnu (il ny avait pas de musulmans en France en 1801), mais on lui applique les mêmes règles (construction de la mosquée de Strasbourg...).

À Mayotte (collectivité doutre-mer), demeure le principe des cultes reconnus. la religion musulmane constitue toujours la base du statut des personnes[20] : le préfet nomme un cadi qui applique la charia en matière matrimoniale et familiale. Cette exception est un reliquat du régime colonial.

En Guyane, l'ordonnance de Charles X du 27 août 1827 est toujours en vigueur, qui ne reconnaît que le culte catholique, celui-ci bénéficiant dun financement public[20].

À Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie subsiste un système dérivé des décrets Mandel de 1939[21], qui autorisent les missions religieuses à constituer des conseils dadministration afin de donner une situation juridique à la gestion des biens utiles à lexercice des cultes[20].

À Wallis-et-Futuna, le catholicisme-romain est religion établie[réfnécessaire].

La conception des États-Unis dAmérique

Les États-Unis apparaissent de nos jours comme une République fortement imprégnée par les valeurs chrétiennes (tradition puritaine pour la Nouvelle-Angleterre, mais aussi baptiste, méthodiste, et catholique). Pourtant, dès lépoque de la Révolution américaine, lidée de laïcité est un concept incontournable en Amérique, hérité des Lumières, et plus spécifiquement du philosophe anglais John Locke.

Ainsi, si la Déclaration d'indépendance américaine fut rédigée par des déistes, les Pères fondateurs étaient également dans leur majorité des laïcs attachés à la séparation de l'Eglise et de l'Etat. Ainsi, Thomas Jefferson, en 1776, s'il fait référence à un Dieu créateur qui légitime les droits de lHomme, était également farouchement attaché à cette idée, comme en témoigne ses écrits :

« Jai toujours considéré quil sagissait dune affaire entre lhomme et son créateur, dans laquelle personne dautre, et surtout pas le public, navait le droit dintervenir[22]. »

Dans lune de ses lettres, Jefferson évoque limpérieuse nécessité dun « mur de séparation » entre lÉtat et les Églises[23].

Dautres pères fondateurs des États-Unis se sont prononcés en faveur de la séparation des Églises et de lÉtat :

  • George Washington :
    «  Tous possèdent également la liberté de conscience et les protections de la citoyenneté. Le gouvernement des États-Unis napporte aucun soutien au sectarisme, ni aucune assistance à la persécution, et requiert seulement que tous ceux vivant sous sa protection se conduisent en bons citoyens [...] Les croyances religieuses dun homme ne le priveront pas de la protection des lois, ni du droit dobtenir et dexercer les plus hautes fonctions publiques existantes aux États-Unis[24]. »
  • James Madison :
    «  Le gouvernement na pas lombre dun droit de se mêler de religion. Sa plus petite interférence serait une usurpation flagrante[24]. »
  • John Adams :
    « Le gouvernement des États-Unis nest en aucune manière fondé sur la religion chrétienne ; il na aucune inimitié envers la loi, la religion ou la tranquillité des musulmans[25]. »
  • Thomas Paine :
    « De toutes les tyrannies qui frappent lhumanité, la pire est la tyrannie en matière de religion[26]. »
Les pères fondateurs américains en faveur de la laïcité

Officiellement, la religion est séparée de lÉtat par le premier amendement du 12 décembre 1791 de la constitution de 1787. Fait notable pour lépoque, ni la constitution ni la Déclaration des Droits (les dix premiers amendements), les deux textes fondateurs de la République américaine, ne font référence à Dieu ou à la Providence. Ainsi, depuis la fin du XVIIIe siècle siècle, il ny a pas de religion officielle dans ce pays.

Pourtant, les références à Dieu sont omniprésentes dans la pratique politique : George Washington, fut le premier président à introduire le serment sur la Bible, alors que la constitution ne prévoyait quun simple serment[27]. On note également le In God we trust sur les billets (En Dieu, nous avons confiance) qui est devenu une devise officielle des États-Unis le 30 juillet 1956 (plus tard quon le croit, donc), sur linitiative dun député de Floride (Charles E. Bennett) ou le serment des présidents américains sur la Bible lors de linvestiture, etc. Dans les États , à l'occasion d'un procès (ou de la prise de fonction d'un gouverneur ou d'un sheriff par exemple), les témoins doivent jurer de dire la vérité sur un « document sacré », le choix est possible entre tous les « documents » disponibles : Bible chrétienne sans apocryphes, Bible chrétienne avec écrits intertestamentaires, Torah, Coran, Avesta, etc.

Contrairement à la France, cependant, dans le système éducatif américain, lÉtat fédéral ne subventionne aucune école religieuse. Enfin, il ne faut pas oublier que le premier amendement fait partie de la première constitution à garantir la non-ingérence de lÉtat dans les religions et la liberté de culte. En 1875, James Blaine, président de la chambre des représentants, proposa un amendement constitutionnel interdisant les subventions publiques pour tout projet à vocation religieuse. Cet amendement Blaine, bien que rejeté par le sénat, fut adopté par 37 états américains, qui donc ne subventionnent aucune école privée. L'arrivée du chèque éducation a remis en cause cette avancée.

La définition du Dieu auquel se réfère lÉtat américain est pensée et vécue comme le point commun à toutes les religions ; il ne sagit donc pas dun Dieu précis, attaché à un culte défini. Dune manière différente de la France, lÉtat rassemble par son indifférence aux cultes, lÉtat américain rassemble en créant un point commun qui est le fait de croire. Cest la conséquence étonnante dune laïcité tolérante : en se refusant toute ingérence étatique dans la vie religieuse des citoyens, les fondateurs des États-Unis ont attiré dans leur pays de nombreux immigrants très religieux, parfois brimés dans leurs pays dorigine : mennonites, baptistes, anabaptistes, amishs, quakers, juifs, etc. La forte religiosité américaine, qui connaît son pic pendant la guerre froide, nest donc pas le vœu des fondateurs du pays mais la conséquence des conditions dans lesquelles le pays sest construit.

La religion est considérée aux États-Unis dans un sens proche de létymologie (religio : créer un lien social). Dans ce cadre, agnostiques et athées sont mal conceptualisés dans le système, car toute personne se rattache par principe à une religion. Une étude de luniversité du Minnesota publiée en 2006 montre dailleurs que la « communauté » qui inspire la méfiance la plus grande aux États-Unis est non pas celle des immigrants récents, celle des homosexuels ou celle des musulmans, mais bien celle des athées[28]. Néanmoins, la méfiance quinspirent les athées aux États-Unis dépend énormément du lieu de résidence des populations étudiées : les habitants de la côte ouest autant que ceux de la côte est, cest-à-dire une majorité daméricains, acceptent bien mieux lathéisme que ne le font ceux qui habitent au centre du pays.

La conception turque

Article détaillé : Laïcité en Turquie.

La Turquie est actuellement un État laïque de par sa constitution, et ce depuis le 10 novembre 1937. La Constitution du 20 janvier 1921, ne mentionne ni une religion ni la laïcité ; la loi constitutionnelle du 29 octobre 1923 en modifie larticle 2 en indiquant que « la religion de lÉtat turc est lislam » (Türkiye Devletinin dini, Dîn-i İslâmdır). Cette mention est conservée dans la constitution du 20 avril 1924 (dont larticle 75 proclame pourtant la liberté de conscience et de culte - à condition quelles ne sopposent pas aux lois), supprimée le 11 avril 1928 et remplacée le 10 décembre 1937 par « lÉtat turc est républicain, nationaliste, populiste, étatiste, laïque et réformateur » (Türkiye Devleti, Cumhûriyetçi, Milliyetçi, Hâlkçı, Devletçi, Laik ve İnkılâpçıdır), les « six principes dAtatürk ».

La Turquie est un des quelques pays majoritairement musulman, comme certains États africains ou de l'ex-URSS, à être laïc. Cependant, la séparation entre les Églises et lÉtat nest pas réciproque comme en France: la laïcité s'accommode d'une mise sous tutelle de la religion par l'Etat, qui finance et forme des prêtres et des écoles religieuses. Par ailleurs, elle est juridiquement considérée comme étant liée à l'ordre public, ce qui a été -affirmé par la Cour européenne des droits de lhomme (CEDH) dans laffaire Leyla Sahin contre Turquie (en) (2004-2005) [réfnécessaire], dans laquelle la CEDH a soutenu l'interdiction du voile dans certains cas.

Aujourdhui

Le principe de laïcité donne lieu à des débats car il doit pouvoir se concilier avec lexercice du culte, c'est-à-dire éviter les ingérences tout en garantissant la liberté de conscience.

Au niveau législatif

La loi ne tire pas sa légitimité dune conformité à des préceptes religieux (pour autant, la loi peut contenir des articles qui peuvent être mis en correspondance avec tel ou tel précepte religieux).

Les États laïques sont plus ou moins éloignés des prescriptions religieuses selon la conception quils ont de cette laïcité. Ils défendent les droits de chaque citoyen contre déventuelles règles religieuses qui seraient en contradiction avec lordre public, particulièrement avec les droits et les libertés de chacun.

Au niveau judiciaire

Le citoyen est jugé indépendamment de ses convictions religieuses.

Au niveau exécutif

Lexercice du pouvoir politique nest conditionné ni par le respect de prescriptions religieuses ni par lappartenance à un groupe religieux.

Laïcité par pays

Article détaillé : État séculier.
Carte des pays séculiers (cliquez sur la carte)

À partir du moment la liberté de culte est assurée, on saperçoit que linfluence des Églises nest pas directement corrélée à leur statut juridique. Par exemple la Suède, pays reconnaissant lÉglise évangélique luthérienne comme religion dÉtat jusquau 1er janvier 2000, est certainement lun des pays les moins religieux dEurope car en un siècle lÉglise de Suède est devenue, comme la monarchie, un simple folklore pour la plupart des habitants.

Au contraire, des pays de constitution laïque comme la France ou le Portugal ont une tradition catholique toujours vivace. Le classement suivant repose donc uniquement sur le statut juridique des Églises, sans présumer de leur poids politique effectif.

Pays constitutionnellement laïques

  • France : article 1 de la constitution de 1958. (Voir aussi larticle détaillé : Laïcité en France; mais concordat pour l'Alsace-Moselle)
  • Inde : 42e amendement à sa Constitution de 1947, le Constitution Act (1976) a permis dinclure le mot secular devant les mots « Democratic Republic » dans son préambule.
  • Japon : article 20 de la Constitution de 1947. Durant la première moitié du XXe siècle, et particulièrement durant les années 1930, les régimes militaristes qui gouvernèrent le Japon avaient imposé le « shintoïsme dÉtat », forme exacerbée et instrumentalisée du shintoïsme traditionnel. Élaborée et adoptée durant lOccupation américaine (1945-1952), la Constitution actuelle intègre les conceptions occidentales de laïcité et de séparation de l'Église et de l'État.
  • Mexique : article 3 de la Constitution mexicaine de 1917.
  • Uruguay : article 3 de la constitution de 1964 (Tous les cultes sont libres en Uruguay. LÉtat ne soutient aucune religion.)
  • Éthiopie: article 11 de la constitution de 1994: "1. L'Etat et la religion sont séparés."[29]
  • Bolivie, depuis le 26 janvier 2009
  • Etats-Unis d'Amérique: l'Etat fédéral est officiellement laïc (1er amendement de la Constitution) mais certains Etats financent certaines religions[réfnécessaire]. La Cour suprême a accepté de se saisir d'une affaire, la Cour d'appel pour le neuvième circuit avait jugée, le 14 mai 2008 inconstitutionnelle la présence d'une croix dans un mémorial commémorant la guerre de 1914-18 sur un terrain fédéral dans le désert du Mojave (le Mojave National Preserve (en)) [30],[31].
  • Turquie: dans la constitution, 10 décembre 1937 par « lÉtat turc est républicain, nationaliste, populiste, étatiste, laïque et réformateur » (Türkiye Devleti, Cumhûriyetçi, Milliyetçi, Hâlkçı, Devletçi, Laik ve İnkılâpçıdır), les « six principes dAtatürk ». Cependant l'Etat turc finance la formation des prêtres musulmans et la création d'écoles coraniques[réfnécessaire].
  • Portugal : larticle 41, paragraphe 4 de la constitution de 1976, établit que lÉtat est laïque. Toutefois, il sagit dune laïcité seulement théorique, car le concordat de 1940 avec le Saint-Siège est resté en vigueur, de même que la loi no 4 du 21 août 1971, souvent qualifiée de loi relative à la liberté religieuse, qui affirme également le statut spécial de lÉglise catholique. Cette spécificité a été encore confirmée en 2004, lorsque le Portugal a signé avec le Saint-Siège un nouveau concordat, permettant dactualiser lancien dont certaines dispositions, en particulier relatives aux activités missionnaires dans les anciennes colonies portugaises, étaient obsolètes. Le nouveau concordat reconnaît certes la liberté religieuse, mais « garantit le caractère exceptionnel des relations entre le Portugal et lÉglise catholique sans que rien nentre en contradiction avec lordre juridique portugais », et montre bien que le principe constitutionnel de laïcité nest que purement formel.

Pays athées

  • Cuba : depuis 1959, cependant, depuis 1998 les pratiques religieuses sont autorisées mais sévèrement contrôlées par l'État.

Pays séculiers

Pays reconnaissant aux Églises un statut spécial par rapport aux autres associations ou dont la constitution fait référence à Dieu. La constitution de ces pays établit la séparation de lÉglise (ou plutôt des religions, au pluriel) et de lÉtat.

  • Allemagne : Le préambule de la constitution fait référence à Dieu : « Conscient de sa responsabilité devant Dieu et devant les hommes, ... ». LÉtat récolte des impôts ecclésiastiques ensemble avec les impôts sur le revenu (prélevés à la source, raison pour laquelle lappartenance religieuse est révélée à lemployeur qui doit faire les calculs nécessaires). Il existe une instruction religieuse dans les écoles publiques, dispensée aux adhérents dun culte sauf décision contraire des parents (ou de lélève plus âgé, généralement à partir de 14 ans) ; un cours d’« éthique » (ou de « philosophie pratique », « valeurs et normes ») doit souvent être suivi par ceux qui ne suivent pas un cours de religion.
  • Autriche : Le pays prélève, comme en Allemagne, un impôt au profit des Églises catholique et protestante. L'impôt est appelé « Kirchenbeitrag », traduit « contribution cléricale ». Dans d'autres domaines également, la foi chrétienne jouit de privilèges : on a des crucifix au tribunal, à l'école, à l'hôpital ; l'enseignement religieux est obligatoire pour toutes les religions reconnues par la République d'Autriche. La confession est à indiquer lors de recensements, de l'entrée en Autriche, à l'hôpital (pour savoir quel religieux envoyer si le patient désire en voir un), devant un tribunal et lors de l'embauche. De plus, le prêtre effectue les démarches administratives nécessaires lors du mariage ; le couple ne doit pas passer par la mairie. La constitution autrichienne garantit à chacun de pouvoir exercer son culte en public.
  • Belgique : Depuis la fondation du royaume en 1830, les membres du clergé des confessions reconnues par lÉtat sont rémunérés par lui. Actuellement, six religions sont reconnues : le catholicisme (qui jouit toujours dune position dominante dans le royaume), le protestantisme, langlicanisme, lorthodoxie, le judaïsme et lislam, auxquelles vient sajouter une communauté philosophique non confessionnelle (organisée autour des associations dites laïques ou de libre pensée) dont les délégués (collaborateurs salariés) bénéficient également de rémunérations de lÉtat. Cette communauté, également appelée « laïcité organisée », fédérée par le CAL et par lUVV (http://www.laicite.be), offre aussi une assistance morale et organise des cérémonies dites de « passage » telles le parrainage laïque, la fête de la jeunesse laïque, le mariage laïque ou les funérailles laïques selon une conception philosophique non confessionnelle, alternative à lassistance des cultes et aux cérémonies religieuses. Actuellement, la reconnaissance du bouddhisme est discutée, non pas en tant que culte, mais en tant que « communauté philosophique non confessionnelle ».
  • Canada : Le droit canadien ne connaît pas nommément le concept de laïcité. Une jurisprudence ancienne rappelait quil ny a « pas de religion dÉtat » au Canada (affaire Chaput c. Romain, Cour suprême, 1955). Il peut paraître étonnant qu'aujourd'hui le préambule de la Charte canadienne des droits et libertés (1982) commence par lénoncé suivant : « Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit... ». Mais cette référence à Dieu na vraisemblablement quune portée symbolique car, en droit canadien, les rapports entre lÉtat et les religions sont subordonnés à un cadre juridique les libertés fondamentales de conscience et de religion occupent une place prééminente du fait de leur caractère constitutionnel. Or, la liberté de religion comporte aussi bien la liberté de croire et de professer ses croyances, que le fait de ne pas être forcé dagir contrairement à sa conscience ou à ses croyances (J. Woerhling). Comme en France, elle implique pour lÉtat une certaine obligation de neutralité religieuse. Cest pourquoi une loi qui reprend à son compte les préceptes dune religion, par exemple en créant une infraction pénale sur la base dune interdiction religieuse, pourra être déclarée inopérante par les tribunaux dans le cadre du contrôle de la constitutionnalité des lois (affaire Big M Drug Mart, Cour suprême, 1985, à propos dune loi qui interdisait de travailler le dimanche). De même, la récitation dune prière à louverture des séances dun conseil municipal est susceptible de porter atteinte, de façon discriminatoire, à la liberté de conscience et de religion des citoyens qui ne partagent pas le même point de vue religieux ([2] jugement du Tribunal des droits de la personne du Québec). En revanche, léquilibre entre la neutralité de lÉtat et le respect de la liberté religieuse nest pas le même quen France. En effet, le droit canadien, y compris le droit québécois, se montre nettement plus « ouvert » à lexpression individuelle des appartenances religieuses et ce, même au sein de la sphère publique. Par exemple, on autorise les agents sikhs de la Gendarmerie royale du Canada à porter le turban plutôt que le couvre-chef réglementaire (affaire Grant, Cour dappel fédérale, 1995) et les élèves sikhs à porter le kirpan, dans la mesure celui-ci est porté dans des conditions sécuritaires (affaire Multani, Cour suprême, 2006). De même, le port du foulard islamique est toléré dans les écoles publiques, au nom du principe daccommodement raisonnable([3]avis de la Commission des droits de la personne du Québec, 1995). En 2008, dans son rapport (http://www.accommodements.qc.ca), la Commission de consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences culturelles (Commission Bouchard-Taylor) décrit le modèle québécois de laïcité comme une laïcité ouverte et recommande le maintien de ce modèle. En ce qui concerne lenseignement religieux à lécole publique, la situation au Canada est en principe susceptible de varier dune province à lautre. En pratique, elle tend partout vers une déconfessionnalisation de lenseignement. De plus en plus, celui-ci se caractérise par une lecture culturelle, sociologique et éthique du fait religieux. Cest ainsi que le 1er juillet 2008, le Québec a remplacé lenseignement confessionnel catholique et protestant, jusque dispensé dans ses écoles publiques, par un programme déthique et de culture multireligieuse. Dernier vestige, peut-être, du confessionnalisme scolaire, certains États-membres de la fédération canadienne (comme lOntario) sont tenus par la constitution de 1867 de financer un réseau séparé décoles catholiques.
  • Espagne : Après la mort du dictateur Francisco Franco, les gouvernements socialistes qui lui succédèrent dès le rétablissement de la royauté, firent passer laccord de 1979 qui stipulait : « À la lumière du principe de la liberté religieuse, laction éducative respectera le droit fondamental des parents sur léducation morale et religieuse de leurs enfants dans le milieu scolaire. En tous les cas, léducation diffusée dans les centres denseignement public sera respectueuse des valeurs de léthique chrétienne ». Mais, à la demande du cardinal Antonio María Rouco, le 26 février 2002, le gouvernement de José Maria Aznar rétablit une disposition datant de la dictature, du Concordat de 1953. Selon cette disposition, larticle 27 de ce concordat est remis, pour partie, en vigueur en décembre 2003. Il stipule : « LÉtat garantit lenseignement de la Religion Catholique comme matière ordinaire et obligatoire dans tous les centres denseignement, quils soient publics ou privés, quels quen soit la nature et le niveau ». Le catholicisme devint donc une matière comptant aux examens, les autres religions nayant droit quà un enseignement de morale civique les religions autres que catholique sont qualifiées dhérésies. Cette disposition fut abolie en 2004, dès les élections. Le 22 juillet 2005, le gouvernement socialiste a rendu public un projet de loi qui rendrait les cours de religion catholique facultatifs à lécole publique. Revenant sur des dispositions instaurées par José Maria Aznar, le projet prévoit aussi que les notes obtenues par les élèves dans cette matière ne compteront plus pour obtenir des bourses, aller à luniversité ou passer en classe supérieure. Aujourd'hui, depuis la promulgation de la Loi organique d'éducation[32], linstruction « religieuse » est une matière facultative proposée aux élèves[33]. Ceux-ci peuvent opter pour une version confessionnelle de l'option (catholique, évangélique, islamique ou juive) ou pour une version aconfessionnelle ; ils peuvent aussi simplement renoncer à cette option. Si 82,4 % des Espagnols se déclarent catholiques et 47,7 % dentre eux pratiquants, les nouvelles mesures semblent soutenues par une majorité de la population.
  • Italie : Le pays est sous régime concordataire depuis les accords du Latran (1929), qui stipulaient que le catholicisme était religion dÉtat en Italie, et ont été incorporés dans la constitution actuelle, de 1948, qui affirme dans son article 7 lindépendance et la souveraineté de lÉtat et de lÉglise catholique, « chacun dans son ordre propre ». Suite à des problèmes juridiques posés par la contradiction entre les accords du Latran et la constitution de 1948, en particulier en matière matrimoniale, un nouveau Concordat fut négocié en 1984. Si celui-ci abandonne le statut de religion dÉtat de lÉglise catholique, il affirme en revanche que « les principes du catholicisme font partie du patrimoine historique du peuple italien » et maintient lenseignement de la religion catholique dans les écoles.
  • Irlande : Bien que nétant pas sous régime concordataire, le pays est fortement marqué par sa tradition catholique. La constitution fait référence à la Très Sainte Trinité, et un statut particulier est accordé à lÉglise catholique, qui joue un rôle important dans le pays.
  • Russie : La constitution de 1993 pose les principes de la laïcité dans la fédération de Russie. Pourtant, depuis la chute du régime communiste, le pays connaît un renouveau de la religion orthodoxe et une progression de lislam. En 2006, dans quatre régions, les cours de civilisation orthodoxe sont obligatoires dans les écoles[34]. Ailleurs, ils restent facultatifs. Le patriarche de Moscou est présent aux cérémonies officielles. Lislam est enseigné dans les républiques du Caucase.
  • Suisse : Le préambule de la constitution fédérale de 1999 commence par une invocation de la puissance divine : « Au nom de Dieu tout-puissant ! »[35] Les situations cantonales sont diverses, certains cantons reconnaissant la prééminence de certaines Églises (catholicisme, protestantisme, vieux-catholiques et/ou judaïsme), dautres respectant le principe de séparation entre Église et État.

Le confessionalisme, exception libanaise

Article détaillé : Confessionalisme.

Pays le pouvoir est réparti entre différentes communautés religieuses de manière à assurer la stabilité politique.

  • Liban : un citoyen Libanais est censé appartenir à une des 18 communautés religieuses reconnues par l'État. Son statut juridique dépend ainsi de sa confession. Par ailleurs, les différentes communautés se partagent constitutionnellement le pouvoir.

Pays avec religion dÉtat

Pays une religion est déclarée comme dominante par la Constitution et jouit dun statut privilégié, sans pour autant constituer un « État religieux » au sens le pouvoir ny est pas exercé « au nom de Dieu » :

États bouddhistes

États chrétiens

État juif

Israël

Fondé comme lÉtat pour les juifs, il devint LÉtat juif, à la suite dun accord entre David Ben Gourion et la minorité orthodoxe dans le but dobtenir son soutien dans la guerre dindépendance contre la Grande-Bretagne. Aujourdhui, la situation israélienne est complexe.

  • Létat civil est régi par la loi religieuse de chaque communauté du pays (pour tout citoyen, même non juif).
  • Les conversions obtenues à létranger auprès de rabbins libéraux nétaient pas reconnues jusquau 20 février 2002, date la Cour Suprême a rendu un verdict obligeant le ministère de lIntérieur à inscrire comme juifs 24 personnes converties par des rabbins massortis et libéraux.
  • Les mariages sur le territoire national doivent être effectués par des rabbins orthodoxes, mais les mariages massortis (conservateurs) effectués à l'étranger sont reconnus. Le divorce peut être demandé par les femmes comme par les hommes, uniquement auprès de lautorité religieuse (ou civile pour les étrangers résidents). Cependant, pour les femmes demandant un divorce religieux, selon la version orthodoxe du judaïsme, leur mari peut leur refuser indéfiniment le divorce sans encourir de sanction religieuse ; il doit alors donner la totalité de son salaire à son épouse, ce qui lincite à accepter la demande de divorce de sa femme.
  • Deux consistoires représentent lautorité religieuse : un ashkenaze et un séfarade ; ceux qui ne se réclament ni des uns ni des autres, comme les falashas, sont donc défavorisés.
  • LÉtat a pris des mesures pour favoriser le financement des congrégations massorti (conservateur sur la foi, moderne sur la théologie morale et la laïcité) et libérales (moderne sur tous les points), mais en pratique les orthodoxes continuent dêtre favorisés dans lattribution des subsides et locaux de culte.
  • Seuls les citoyens juifs (laïcs) et les citoyens druzes doivent effectuer le service militaire. Les citoyens chrétiens ou musulmans peuvent individuellement en faire la demande. Par ailleurs, les non-juifs servent dans une unité spéciale, dite unité des minorités, et n'ont pas les mêmes opportunités de carrière.
  • La mention « juif », « druze », « arabe » est précisée sur la carte didentité.

États musulmans

Qatar, Bahreïn, Oman, Émirats arabes unis, Yémen, Jordanie, Irak, Algérie, Tunisie, Maroc, Libye, Mauritanie, Somalie, Soudan, Afghanistan, Pakistan, Bengladesh, Malaisie.

Pays théocratiques

Gouvernements dans lesquels les clercs ou leurs représentants exercent lautorité au nom de Dieu.

Voir larticle dédié : Liste de théocraties.

Un cas particulier : lUnion européenne

LUnion européenne regroupe des États ayant des conceptions différentes de la laïcité. Pour tenter de gommer ces divergences, le Projet de traité instituant une Constitution pour lEurope (juin 2003) consacrait larticle 51 de sa première partie au statut des Églises et des organisations non confessionnelles :

  • 51-1 : LUnion respecte et ne préjuge pas du statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les Églises et les associations ou communautés religieuses dans les États membres.
  • 51-2 : LUnion respecte également le statut des organisations philosophiques et non confessionnelles.
  • 51-3 : Reconnaissant leur identité et leur contribution spécifique, lUnion maintient un dialogue ouvert, transparent et régulier, avec ces Églises et organisations.

Beaucoup en France se sont élevés contre lalinéa 3, estimant quil accordait aux Églises des privilèges incompatibles avec une constitution laïque. Cet alinéa faisait de toute façon double emploi avec larticle 46(-2: « Les institutions de lUnion entretiennent un dialogue ouvert, transparent et régulier avec les associations représentatives et la société civile. »

En revanche, dautres ont regretté quil ne soit pas fait référence, non pas à la religion, mais à la culture chrétienne comme socle commun des peuples européens. Mais, il sagissait dune référence implicite aux fondements judéo-chrétiens dune partie seulement de nos systèmes moraux, juridiques et politiques, qui impliquait aussi, de facto, une prise de position sur lentrée des Balkans et de la Turquie. (sur ce sujet, cf. J-P. Willaime, Europe et religion, les enjeux du XXIe siècle, Fayard, 2004.)

Le Conseil de l'Europe exhorte quant à lui ses États membres à refuser le relativisme culturel et rappelle la primauté de la séparation des Églises et de lÉtat et des droits de lHomme. Il les exhorte notamment à veiller à ce que la liberté de religion ne soit pas acceptée comme un prétexte à la justification des violations des droits des femmes et condamne toute coutume ou politique fondée sur ou attribuée à la religion qui irait à son encontre, citant les mariages forcés, les mutilations génitales, les oppositions au divorce ou à lavortement, limposition de code vestimentaire aux mineures (Résolution 1464 (2005) - Femmes et religion en Europe).

Voir aussi

Bibliographie

Ouvrages
  • Comptes rendus d'ouvrages portant sur la laïcité sur le site de l'Institut européen en sciences des religions
  • Jean Baubérot, Vers un nouveau pacte laïque, Paris, Le Seuil, 1990.
    • Religions et laïcité en Europe (direction), Paris, Éditions Syros, 1994.
    • Histoire de la laïcité en France, PUF, collection Que sais-je ?, 2003.
    • Laïcité 1905-2005, entre passion et raison, Le Seuil, 2004.
    • Les Laïcités dans le monde, PUF, collection Que sais-je ?, 2007.
  • Guy Coq, Laïcité et république, éditions du Félin, 2003.
  • Gérard Delfau, Marc Halpern (dir.), La laïcité : ciment de la République, valeur universelle, actes du colloque du 18 décembre 2003 au Sénat à Paris, Paris, Éditions maçonniques de France, 2004 (ISBN 2-84721-051-2).
  • Gérard Delfau, Du principe de laïcité : un combat pour la République, Paris, les Éditions de Paris, 2005 (ISBN 2-84621-072-1)
  • Jean-Michel Ducomte :
    • Regards sur la laïcité, Edimaf, 2000.
    • La laïcité, Les Essentiels Milan, 2001.
    • La loi de 1905 : quand lÉtat se séparait des Églises, Les Essentiels Milan, 2005.
  • Jaid Javad, Être croyant dans une société laïque (thèse sous la direction de Michel Maffesoli), Université Paris V René Descartes, 2005.
  • Francis Messner, Pierre-Henri Prélot, Jean-Marie Woehrling (dir.), Traité de droit français des religions, Paris, Litec, 2003 (ISBN 2-7111-3514-4).
  • Micheline Milot, Laïcité dans le nouveau monde : le cas du Québec, Turnhout (Belgique), Brepols, 2002, (ISBN 2-503-52205-).
    • La laïcité, Montréal, Novalis, 2008, (ISBN 978-2-89507-956-9).
  • Henri Pena-Ruiz, républicain favorable à une laïcité sans modification :
    • Histoire de la laïcité : genèse dun idéal, Découvertes Gallimard, 2005, (ISBN 2-07-030038-2).
    • La laïcité, GF Flammarion (ISBN 2-08-073067-3).
  • Odon Vallet, Petit lexique des idées fausses sur les religions, Albin Michel, 2002 (ISBN 2226130934).
Articles
  • Pierre Bréchon, Institution de la laïcité et déchristianisation de la société française, in Cemoti no 19 - Laïcité(s) en France et en Turquie, mai 2006, en ligne
  • Pierre Bosset, « Le droit et la régulation de la diversité religieuse en France et au Québec : une même problématique, deux approches », in Bulletin dhistoire politique, vol. 13, no  3, printemps 2005, p. 79-95.
Rapports
  • Rapport à Monsieur le Président de la République par la Commission de réflexion sur lapplication du principe de laïcité dans la République, Paris 2003.
  • José Woehrling, « Lobligation daccommodement raisonnable et ladaptation de la société canadienne à la diversité religieuse », in Revue de droit de McGill, vol. 43, 1998, p. 321 et alii.

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. L'orthographe « laïc » est également possible au masculin.
  2. ou encore « non clerc, illettré » et spécialement « non militaire », « non séculier », « vulgaire »
  3. Alain Rey (dir.), Dictionnaire historique de la langue française, éd. Le Robert, 1998, p. 1961.
  4. Yves Congar, Sacerdoce et laïcat, 1962.
  5. P. Segur, « Aux sources de la conception occidentale de la laïcité », in Champs Libres, études interdisciplinaires : Justice et religion, Université de Toulon et du Var, éd. L'Harmattan, 2000, p. 31 et suiv. article en ligne
  6. Walter Ullmann, A History of Political Thought : The Middle Ages, 1965, p. 40 et suivantes.
  7. Bulle pontificale Unam Sanctam de 1302
  8. Gélase ne parlait que de deux « pouvoirs », cf. Lettre 12, à l'empereur Anastase, édition Thiel.
  9. Mayke de Jong, Sacrum palatium et ecclesia Lautorité religieuse royale sous les Carolingiens (790-840), in Annales 2003/6, 58e année, p. 1243-1269 article en ligne ([pdf])
  10. P. Segur, Aux sources de la conception occidentale de la laïcité, op. cit.
  11. C. Lefort, Permanence su théologico-religieux, éd. Gallimard, 1981, pp. 13 à 60, cité par P. Segur, op. cit.
  12. P. Segur, Aux sources de la conception occidentale de la laïcité, op. cit.
  13. a et b Henri Pena-Ruiz, Histoire de la laïcité : genèse dun idéal
  14. Ferdinand Buisson, « Nouveau dictionnaire de pédagogie », 1911. Consulté le 8 octobre 2008
  15. Henri Pena-Ruiz, Histoire de la laïcité, genèse d'un idéal, Gallimard, coll. « Découvertes / Histoire », 2005 (ISBN 2-07-030038-2), « 2 - Dieu et César : une liaison dangereuse » 
  16. Michaël Waltzer, Essai sur la tolérance, Presse de lUniversité Yale, 1997.[réfincomplète]
  17. Radio-France Outremer - L'islam à Mayotte par Marie Sawiat
  18. Protestation sur le site Riposte laïque
  19. la Loi ne définit pas clairement ce qui est ostentatoire ou non, ni même ce qui est ou non un signe religieux, mais cette interdiction récente, conçu pour endigué un mouvement de prosélytisme traditionaliste musulman, semble avoir atteint son but
  20. a, b, c et d Pierre Tournemire, Un combat historique, in TDC n° 903, novembre 2006, article en ligne
  21. texte du décret-loi du 16 janvier 1939 : Institution aux colonies de conseils d'administration des missions religieuses.
  22. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de lAmérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.96
  23. Guy Haarscher, La laïcité, Paris, PUF, que sais-je ? 3e édition, 2004, ISBN 2130539157, p.102
  24. a et b Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de lAmérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.99
  25. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de lAmérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.99-100
  26. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de lAmérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.87
  27. Nicole Bacharan, Faut-il avoir peur de lAmérique ? , Paris, éditions du Seuil, 2005, ISBN 2020799502, p.100
  28. (en) Une étude de Penny Edgell (sociologue) [1]. Référence : Atheists asOther: Moral Boundaries and Cultural Membership in American Society, Penny Edgell, en collaboration avec Joseph Gerteis et Douglas Hartmann. 2006. in American Sociological Review #71 (avril 2006)
  29. Constitution éthiopienne sur le site du Conseil de la Fédération
  30. Robert Barnes, Court Wades Shallowly Into Church and State, Washington Post, 8 octobre 2009
  31. A Cross in the Wilderness, Washington Post (éditorial), 8 octobre 2009
  32. Ley orgánica de educación (4 mai 2006)
  33. (es)Texte de la loi organique d'éducation d'Espagne - document à télécharger
  34. Fabrice Nodé-Langlois, « LÉglise sinvite dans les écoles russes », dans Le Figaro du 02/09/2006, [lire en ligne]
  35. http://www.admin.ch/ch/f/rs/101/ani1.html
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