- Entier naturel
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En mathématiques, un entier naturel est un nombre positif ou nul permettant fondamentalement de dénombrer des objets comptant chacun pour un. Un tel nombre entier peut s'écrire avec une suite finie de chiffres en notation décimale positionnelle, sans signe et sans partie fractionnaire, c'est-à-dire sans chiffre « après la virgule ».
Les entiers naturels sont donc, outre zéro, ceux que l'on commence à énumérer avec la comptine numérique : un, deux, trois, quatre… Mais la liste des entiers naturels est infinie, car chacun d'entre eux a un successeur, c'est-à-dire un entier qui lui est immédiatement supérieur.
L'étude des entiers naturels et de leurs relations, avec les opérations d'addition et de multiplication notamment, constitue dès l'Antiquité grecque une branche des mathématiques appelée « arithmétique ».
L'ensemble des entiers naturels[1] a été axiomatisé pour la première fois par Peano et Dedekind au XIXe siècle. Il peut être construit de diverses manières, la plus classique étant la méthode de Von Neumann.
Articles détaillés : Axiomes de Peano et Construction des entiers naturels.Cet ensemble est noté « N », lettre capitale grasse dans les textes dactylographiés, le premier trait vertical étant doublé en écriture manuscrite (notamment au tableau). Le choix pour la police d'écriture blackboard gras a été de doubler plutôt le trait diagonal : . La notation « N* » désigne l'ensemble des entiers naturels non nuls. Ceci en abréviation de l'italien naturale (naturel), de Giuseppe Peano (1858-1932)[2].
Les entiers naturels s'identifient aux entiers relatifs positifs, aux nombres rationnels positifs pouvant s'écrire sous la forme d'une fraction de dénominateur 1 et plus généralement aux réels positifs de partie fractionnaire nulle.
Sommaire
Conception
De l'énumération à l'abstraction
La notion d'entier naturel, occupant d'abord (et jusqu'au XVIIe siècle[3]) toute l'idée[4] de nombre, est probablement issue de la notion de collection. Certains objets ou animaux, tout en étant distincts les uns des autres, peuvent admettre une désignation commune, du fait de leur ressemblance ou d'une autre caractéristique partagée. Leur rassemblement constitue une collection, tel un troupeau de vaches, un collier de perles, un tas de pierres.
Le nombre est en germe dans l'énumération d'une collection, c'est-à-dire le fait de faire défiler tous ses éléments, un à un et sans répétition. Il prend consistance dans le constat que deux énumérations simultanées (d'un troupeau vers un enclos et de cailloux dans un sac, par exemple) se terminent soit toujours en même temps, soit toujours en décalage. Le nombre est enfin représenté lorsque le sac de cailloux ou le bâton à encoches est utilisé pour indiquer une quantité.
Cependant, le concept d'entier ne naît véritablement que lorsqu'il est départi de son représentant, c'est-à-dire lorsqu'il ne représente plus ni cailloux, ni encoches, ni vache. Ce processus mental est connu sous le nom d'abstraction : il est fait abstraction de la qualité de l'objet pour s'intéresser uniquement à la quantité.
Euclide donne au Livre VII des Éléments la définition suivante : « L'unité est ce relativement à quoi tout objet est appelé Un. » Cette abstraction lui permet de définir ensuite le nombre (entier naturel) comme collection d'unités[5] ».
Représentation des premiers entiers naturels non nuls par des collections de points. 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Article connexe : Nombre figuré.Définition par les cardinaux
Les entiers naturels peuvent aussi être définis par abstraction sans passer par la notion d'unité, comme l'a fait Frege (Fondements de l'arithmétique, 1884). Une collection A (ou concept selon sa terminologie) et une collection B sont dites équinumériques si on peut définir une correspondance biunivoque entre les objets de A et les objets de B, c'est-à-dire une correspondance qui associe à tout objet de A un unique objet de B, et à tout objet de B un unique objet de A. Un nombre est alors défini par abstraction des collections équinumériques entre elles, indépendamment de la nature de ces collections.
Construction par les ordinaux
La méthode de Von Neumann propose de définir les entiers naturels comme des ordinaux, c'est-à-dire comme des ensembles bien ordonnés tous comparables par inclusion.
Désignation
Énonciation
La désignation des entiers dans le langage n'est pas la même d'une langue à l'autre, même si elle se fonde en général sur quelques méthodes simples.
Les premiers entiers ont un nom spécifique sans lien les uns avec les autres. En français, il s'agit des entiers de un à dix (les noms des entiers de onze à seize sont en fait des déformations de noms composés). Certaines langues n'ont pas de mot spécifique au-delà de deux[6].
L'accolement de deux noms peut désigner le résultat de l'addition (comme dans « dix-sept ») ou de la multiplication (comme dans « quatre-vingts ») des entiers correspondants. D'autres procédés existent utilisant la soustraction, la division ou la protraction.
Article connexe : Système de numération.Certains « grands » nombres reçoivent également un nom spécifique, en général certains puissances d'une base particulière. La base dix est la plus répandue aujourd'hui, mais la désignation des entiers en français par exemple conserve la trace d'un usage partiel de la base vingt. Des conventions internationales contradictoires proposent des désignations standardisées pour les cent premières puissances de mille ou du million.
Article connexe : Échelles longue et courte.Au-delà des limites imposées par le vocabulaire, la langue ne peut que proposer des désignations par accolement : « mille milliards de milliards… »
Écriture chiffrée
Si l'écriture des entiers a beaucoup varié dans l'histoire des civilisations, elle est aujourd'hui presque partout fondée sur un même système de notation décimale positionnelle, même si la graphie des chiffres peut subir des variations plus ou moins importantes d'un pays à l'autre.
Chaque entier naturel se décompose de façon unique en une somme de multiples de puissances de dix, de façon à ce que chaque coefficient multiplicateur soit strictement inférieur à dix, donc représenté par l'un des dix chiffres arabes de 0 à 9. L'écriture de ce nombre se fait alors en accolant ces chiffres rangés par ordre décroissant des puissances de dix correspondantes.
L'intérêt majeur de cette écriture est la simplicité conjointe des algorithmes de calcul pour les quatre opérations arithmétiques élémentaires.
Codage
La pratique du calcul a pu s'appuyer sur la manipulation de cailloux[7] ou d'autres symboles concrets, d'abord pour symboliser une unité par caillou, puis en différenciant la valeur des symboles (un coquillage dénotant par exemple dix cailloux).
La notation positionnelle a permis de différencier les valeurs des symboles en fonction de leur position et non plus leur nature, ce qui s'est traduit par le développement de l'abaque et du boulier. Ce principe est toujours en vigueur dans les calculatrices et ordinateurs.
Arithmétique
Article détaillé : Arithmétique.Représentation des opérations
En représentant chaque entier par une collection d'objets (des cailloux ou des jetons par exemple), l'opération d'addition est représentée par la réunion de deux collections, tandis que la soustraction revient à retirer une collection d'une autre. Cette représentation montre bien l'impossibilité de soustraire (dans les entiers naturels[8]) un nombre à un autre strictement plus petit.
La multiplication de deux entiers naturels correspond au remplissage d'un rectangle dont deux côtés adjacents représentent chacun l'un des facteurs.
La division euclidienne d'un entier (appelé dividende) par un autre (appelé diviseur et nécessairement non nul) est illustrée par le rangement de la collection représentant le dividende en un rectangle dont un côté représente le diviseur. Le nombre de rangées complètes représente alors le quotient tandis que l'éventuelle rangée incomplète représente le reste, nécessairement inférieur strictement au diviseur.
Multiple et diviseur
Étant donné un entier naturel non nul, l’ensemble de ses multiples est infini mais régulièrement réparti et facile à décrire par une suite arithmétique. Par exemple, les multiples de 2 sont les nombres pairs, qui sont alternés avec les nombres impairs parmi tous les entiers.
Au contraire, l’ensemble des diviseurs d’un entier non nul est toujours fini et sa répartition n’a pas du tout le même genre de régularité. Il contient certes toujours le nombre à diviser et le nombre 1, les éventuels autres diviseurs se situant entre ces deux extrêmes. Mais il est en général difficile de lister ces autres diviseurs à partir d’une écriture du nombre dans une base donnée.
Ce problème est lié en partie à la rareté de critères simples pour déterminer sans calcul si un nombre est divisible par un autre. Dans un système de numération positionnelle décimale, plusieurs critères de divisibilité sont connus pour de petits diviseurs (surtout pour 2, 3, 5, 9 et 10), mais en dehors de ces quelques cas, c’est essentiellement la division euclidienne qui permet de répondre à cette question.
Article détaillé : Divisibilité.Nombre premier
Hormis le nombre 1, qui est son seul diviseur, tout nombre admet donc au moins deux diviseurs distincts. Ceux qui en admettent exactement deux sont appelés nombres premiers. Ils sont les seuls à pouvoir réduire d’autres nombres par division, sans être eux-mêmes décomposables en produit de nombres strictement plus petits. Il en existe une infinité et chaque nombre se décompose de manière unique en un produit de nombres premiers. Cette décomposition permet entre autres de comprendre la structure de l’ensemble des diviseurs.
Articles détaillés : Nombre premier et Théorème fondamental de l'arithmétique.Ensemble des entiers naturels
Notations
La notation historique de l'ensemble des entiers naturels en imprimerie est « N », lettre capitale grasse. En écriture manuscrite (et particulièrement au tableau noir), ce caractère a été distingué du symbole de variable « N » par le doublement de la première barre verticale. Cette notation est rentrée dans l'usage dactylographique malgré les oppositions de mathématiciens de renom. La police blackboard gras propose un doublement de la barre oblique.
NPour lever l'ambiguïté au sujet de la prise en compte de zéro comme entier naturel, l'ensemble est parfois noté « N0 ». L'indice 1 dénote alors au contraire l'exclusion de zéro. Mais l'usage consacre plus souvent pour cette restriction l'ajout d'un astérisque en exposant.
Dans le cadre de la théorie des ordinaux, l'ensemble des entiers naturels est un ordinal limite noté par la lettre minuscule grecque ω (oméga), voire ω0 avec l'indice 0 comme pour le premier cardinal infini ℵ0.
Propriétés
Les opérations d'addition et de multiplication étant associatives, commutatives, munies de neutres et satisfaisant une propriété de distributivité, l'ensemble des entiers naturels est un semi-anneau.
Il est ordonné pour la relation d'ordre usuelle induite par l'addition, qui lui donne une structure de bon ordre, c'est-à-dire que toute partie non vide admet un plus petit élément. Cette propriété est à la base du raisonnement par récurrence.
L'ensemble est également muni de la relation de divisibilité qui est un ordre partiel.
Son cardinal est le plus petit nombre cardinal infini, noté ℵ0 (aleph zéro), définissant ainsi la notion de dénombrabilité. En effet, on dit d'un ensemble quelconque qu'il est dénombrable s'il existe une bijection de cet ensemble dans celui des entiers naturels. On se contente parfois d'une injection pour englober aussi les ensembles finis.
Axiomatique de Peano
Article détaillé : Axiomes de Peano.Quelle que soit la façon d'introduire les entiers naturels, ceux-ci ont les mêmes propriétés fondamentales à partir desquelles on développe l'arithmétique. Les axiomes de Peano sont un ensemble d'axiomes de second ordre proposés par Giuseppe Peano pour définir l'arithmétique. Ils sont au nombre de cinq :
- l'élément appelé zéro et noté: 0, est un entier naturel[9].
- Tout entier naturel n a un unique successeur, noté s(n) ou Sn.
- Aucun entier naturel n'a 0 pour successeur.
- Deux entiers naturels ayant même successeur sont égaux.
- Si un ensemble d'entiers naturels contient 0 et contient le successeur de chacun de ses éléments, alors cet ensemble est égal à N.
Le premier axiome permet de poser que l'ensemble des entiers naturels n'est pas vide, le troisième qu'il possède un premier élément et le cinquième qu'il vérifie le principe de récurrence.
Axiomatique de Presburger
Article détaillé : Arithmétique de Presburger.L'axiomatique de Presburger permet également de définir les entiers naturels, mais en couvre beaucoup moins de propriétés. Son principal intérêt par rapport à l'axiomatique de Peano est que celle de Presburger est complète et décidable.
Elle comporte les axiomes suivants :
- ¬(0 = x + 1)
- x + 1 = y + 1 → x = y
- x + 0 = x
- (x + y) + 1 = x + (y + 1)
- Soit P(x) une formule logique du premier ordre avec comme variable libre x (mais éventuellement d'autres variables libres). Alors la formule suivante est un axiome :
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- (P(0) ∧ ∀x(P(x) → P(x + 1))) → P(y).
Notes
- Le zéro est initialement absent, mais sa prise en compte ne change pas fondamentalement l'axiomatisation.
- http://zerbiberic.unblog.fr/tag/culture/
- Christian Houzel, « Qu'est-ce qu'un nombre ? », Histoire des nombres, Tallandier 2007.
- Des nombres non entiers sont manipulés dès le IIIe millénaire avant notre ère dans la civilisation mésopotamienne, mais ils n'ont pas le statut théorique de nombre.
- zéro, une collection ne comprenant aucune unité. Cette définition peut rétrospectivement être appliquée au nombre
- Georges Ifrah, introduction à Histoire universelle des chiffres, tome 1, édition Robert Laffont (1994), p. 9, § Les premiers tâtonnements.
- Le mot « calcul » est apparenté au mot « caillou ».
- entiers relatifs. La soustraction est toujours possible dans les
- Peano utilise en fait 1 (un). Le nombre effectif est totalement arbitraire. Le choix moderne permet simplement d'enchaîner sur la définition de l'addition et de la multiplication.
Voir aussi
Articles connexes
Lien externe
Nombres : curiosités, théorie et usages, site de G. Villemin
Catégorie :- Type de nombre
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