- Vide
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Le vide est ordinairement défini comme l'absence de matière dans une zone spatiale.
Sommaire
Au quotidien
Dans le sens commun, lorsque l'on dit qu'un contenant est vide, il est en fait rempli d'air. Un verre vide, une bouteille vide, un carton vide… contiennent en fait environ 2·1015 molécules par millimètre cube. Un vide très poussé, un milliardième de l'atmosphère par exemple, laisse encore plusieurs millions de molécules par millimètre cube.
En philosophie
La notion de vide est intimement liée à la notion d'être. Le vide est l'absence de matière, l'absence d'être. Mais peut-on parler du vide comme d'une entité en soi, ou uniquement comme une absence ? Parménide disait « l'être est, le non-être n'est pas » ; le vide était pour lui un non-être, et ne pouvait donc exister.
Leucippe et Démocrite, contre Parménide, admirent l'existence du vide et en firent avec l'atome le principe de toute chose ; le vide, lieu dépourvu de matière, a donc reçu une certaine forme d'être et devint le doublet indispensable et inséparable de l'être.
Aristote, dans sa Physique, au livre IV, nie l'existence du vide et affirme son incompatibilité avec le mouvement. C'est une conception de l'univers comme d'un « espace clos », organisé, ordonné et harmonique.
Descartes niait l'existence de l'atome comme celle du vide, concepts auxquels il opposait les théories géométriques, réduisant l'espace à une pure et simple étendue, la matière n'étant qu'une modification de la forme. Gassendi l'a lourdement contredit sur ce point (5e objection des Méditations métaphysiques). En effet, le vide et l'atome composent bel et bien la matière, et ces caractéristiques lui confèrent une nature intrinsèquement différente de l'étendue.
La découverte, ou plutôt l'admission du vide dans la nature est une étape décisive de l'histoire des sciences, la polémique agita fortement les milieux savants durant la révolution scientifique du XVIIe siècle. Les expériences sur le vide sont rendues difficiles par l'absence de tubes en verre de dimension suffisante pour voir si un vivant peut y vivre. Mersenne par ailleurs a tenté l'expérience sur des petits animaux, souris et mouches dont la survie était compromise par l'utilisation de classiques tubes en verre remplis de mercure. En 1660, Robert Boyle est l'un des premiers à pouvoir réaliser une expérience de ce type[1]. Torricelli met en évidence la pression atmosphérique en faisant une expérience hydraulique, travaux que Pascal complète. La découverte de la pression atmosphérique vient balayer l'idée que si l'eau monte lorsqu'elle est pompée, c'est que « la nature a horreur du vide »[2].
Ainsi, lorsque quelqu'un voit un verre, il voit d'abord la matière, sa forme ; un taoïste y verrait d'abord le vide qui le rend utile (qui permet d'être rempli).
Le vide taoïste est conçu comme un potentiel, quelque chose qui attend d'être rempli, et par extension d'être réalisé : c'est l'esprit vide de pensée dans lequel peuvent naître les idées, c'est le blanc de la feuille qui attend d'être dessiné (voir Taoïsme : Plénitude du vide et autres paradoxes).
Dans le bouddhisme, le vide désigne l'absence de nature propre de toute chose, la vacuité.
En physique
Définition
En physique, le vide est un concept qui recèle des propriétés tout à fait surprenantes et néanmoins fondamentales.
Ce n'est pas le rien (l'absence de tout). La physique moderne nous indique d'ailleurs qu'il est tout à fait pertinent de discuter de l'énergie du vide. Ce n'est pas non plus un éther, un fluide particulier, suivant les époques, mouvant ou fixe et indépendant de tout référentiel, imaginé, par exemple, comme support des ondes électromagnétiques. Il a été prouvé que ce dernier n'était pas observable dans la réalité physique (par Michelson et Morley), on en a donc abandonné l'idée.
On peut dans une première approche dire que le vide est un espace dans lequel les molécules sont fortement raréfiées. Ainsi, pour « faire le vide », on prend une enceinte étanche et on pompe l'air avec une pompe à vide ; on définit la qualité du vide par la pression d'air résiduelle, exprimée en pascals (Pa, unité du système international), ou plus souvent dans le milieu industriel en millibars (mbar) ou torrs (mm de mercure). On ne peut atteindre ainsi qu'un vide partiel, quelle que soit la température.
Un vide d'air considéré comme très poussé, « ultravide », correspond à une pression de l'ordre de 10-8 Pa ; on y dénombre encore 2 millions de molécules par centimètre cube[3]. Par comparaison, la densité au sein des gaz interstellaires est de l'ordre de 1 atome par centimètre cube.Le vide absolu est donc un milieu statistiquement sans particules élémentaires. La physique quantique, qui définit le vide comme l'état d'énergie minimale de la théorie, montre qu'il reste néanmoins le siège de matérialisations spontanées et fugaces de particules et de leur antiparticules associées, on parle de particules virtuelles, qui s'annihilent presque immédiatement après leur création. Ces fluctuations quantiques sont une conséquence directe du principe d'incertitude qui affirme qu'il n'est jamais possible de connaître avec une certitude absolue la valeur précise de l'énergie. On appelle ce phénomène les « fluctuations quantiques du vide »[4].
Einstein consacre l'annexe 5 de son livre Relativité - Théories spéciale et générale (Relativity - The Special and the General Theory, traduction de Robert Lawson, 1961) à la relativité et [au] problème de l'espace. Il y cite Descartes et Kant et donne raison au premier contre le second, en niant l'existence du vide, c'est-à-dire, précise-t-il, l'existence d'un espace vide de champ. Il note dans sa préface à la 9e édition du livre : « les objets physiques ne sont pas dans l'espace, mais ces objets ont une étendue spatiale. De la sorte, le concept d' « espace vide » perd son sens. »[5]
Qualité du vide
Le vide « parfait » n'existe pas, il s'agit en fait d'une très faible pression ; un vide considéré comme excellent (10-8 Pa) contient encore 2,4 millions de molécules par centimètre cube à 294 K.
Il existe différents types de pompes à vide, pour atteindre différentes gammes de pression. Pour décrire la qualité du vide, on distingue 4 domaines qui caractérisent la quantité de matière restante par rapport à un volume. À chacun de ces domaines correspond une gamme d'appareils.
Le vide est mesuré en pascals (Pa, unité du système international) ou plus couramment dans l'industrie en millibars (mbar ; 1 mbar = 100 Pa), ou en torrs.
Domaine de vide Pression en mbars
(en pascals)Molécules par cm³ Libre parcours moyen d'une molécule Vide primaire ou industriel 1 000 - 1
(105 - 100)1019 - 1016 0,1 - 100 μm Vide moyen 1 - 10-3
(100 – 0,1)1016 - 1013 0,1 - 100 mm Vide poussé ou vide secondaire 10-3 - 10-7
(0,1 - 10-5)1013 - 109 10 cm - 1 km Ultravide 10-7 - 10-12
(10-5 - 10-10)109 - 104 1 km - 105 km Ultra-ultravide <10-12
(<10-10)<104 >105 km La pression du vide
Article détaillé : Effet Casimir.Une des propriétés les plus curieuses du vide quantique est mise en évidence par l'effet Casimir : lorsque le vide est réalisé entre deux plaques conductrices, et en l'absence de toute contrainte mécanique externe, une pression est exercée sur les plaques dont la valeur dépend de la géométrie particulière du système. Cet effet est expliqué dans le cadre de la théorie quantique des champs qui affirme que la notion de vide dépend de la géométrie. Ainsi le vide enfermé entre les deux plaques conductrices possède une densité d'énergie différente du vide extérieur à l'enceinte. Cette différence de densité d'énergie a pour conséquence directe l'apparition d'une force mécanique exercée sur l'interface séparant les deux milieux.
Propriétés physiques du vide
Perméabilité magnétique du vide μ0
- μ0≡ 4π×10-7 kg·m/A²s² (ou H/m)
Conductance du vide
= 1/119,916 983 2·π S ≈ 2,654 418 729 438 07×10-3 A²s³/kg·m² ≡ 1/μ0c
Permittivité du vide ε0
= 1/35 950 207 149·π F/m ≈ 8,854 187 817 620 39×10-12 A²s⁴/kg·m³ ≡ 1/μ0c²
Impédance (résistance électrique) caractéristique du vide Z0
= 119,916 983 2·π Ω ≈ 376,730 313 461 770 68 kg·m²/A²s³ ≡ μ0c
Applications industrielles
Le vide est requis pour certaines applications très exigeantes comme en électronique, en recherche, pour le dépôt sous vide, etc. Pour répondre à cette exigence, des gammes complètes existent :
- unité de vide
- générateur de vide
- filtre d'aspiration
- ventouse
- séparateurs de condensats pour systèmes de vide
- vérin universel
En mathématiques
Article détaillé : ensemble vide.Petite histoire du vide
- Platon affirmait que le vide n'existait qu'à l'extérieur de l'Être, l'Être serait plein[réf. nécessaire].
- Épicure (-342 à -270) affirmait l'existence du vide qui serait nécessaire au déplacement des atomes[réf. nécessaire].
- 1644 : découverte de la notion physique du vide par Torricelli
- 1646 : Pascal confirme et affine cette théorie
- 1654 : Otto von Guericke fabrique la première pompe à vide
- 1855 : Heinrich Geissler fabrique la première pompe à vide à déplacement de mercure. Le vide obtenu est proche de 0,1 Torr (= 0,1 mmHg ou 0,133 mbar)
- 1865 : Sprengel invente la trompe à mercure
- 1905 : Gaede crée la pompe à vide rotative à mercure
- 1910 : Gaede invente la pompe à palettes (principe inchangé à nos jours)
- 1913 : Gaede invente la pompe turbomoléculaire, puis, dans la foulée, la pompe à diffusion, qui sera perfectionnée par la suite par Langmuir.
Notes et références
- Simone Mazauric, "Les expériences sur le vide et le statut de l'expérience", in CLÉRO Jean-Pierre (éd.), Les Pascal à Rouen, 1640-1648, Colloque de l'Université de Rouen, p.179-195.
- Éther (physique) > L'éther dans l'Antiquité, Baromètre > Les origines, Isaac Beeckman, Evangelista Torricelli > Origine du problème, Liste de controverses scientifiques > Blaise Pascal contre le père Noël Natura abhorret a vacuo, voir
- zéro absolu. Ces expériences sont menées à très basse température, proche du
- antiparticules deviennent réelles et non virtuelles comme elles l'étaient avant. Cette polarisation se produit lorsque le vide reçoit un champ magnétique. Il se peut que le vide soit polarisé, c’est-à-dire que les particules et les
- Introduction à la physique quantique sur Futura science
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- Edgard Gunzig & Simon Diner (eds.) ; Le vide : univers du tout et du rien, Revue de l'université de Bruxelles, Éditions Complexe (1998), (ISBN 2-87027-736-9)
- Michel Cassé Du vide et de la création, 2001, Odile Jacob, (ISBN 2-7381-0976-4)
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