Union pour la Méditerranée

Union pour la Méditerranée
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Union pour la Méditerranée
Région Méditerranéenne
EU27-2008-Union for the Mediterranean.svg
Membres de l'Union pour la Méditerranée

          Membres de l'UE et de l'UPM           Autres membres de l'UPM           Pays observateur


Création 13 juillet 2008
Type Organisation politique et économique à vocation régionale
Siège Barcelone, Drapeau d'Espagne Espagne
Membre(s) 44 membres (dont les 27 membres de l'UE)
Coprésidence de l'Union Nicolas Sarkozy (Drapeau de France France) ; Youssef Amrani (Drapeau du Maroc Maroc)

L'Union pour la Méditerranée (UPM), officiellement dénommée « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée », est une organisation internationale intergouvernementale à vocation régionale. Fondée à l'initiative du président de la République française Nicolas Sarkozy, le 13 juillet 2008, dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne, l'organisation est destinée à donner un nouveau souffle au processus de Barcelone, partenariat liant l'Europe aux pays riverains de la Méditerranée.

L'UPM, dont le siège est hébergé à Barcelone, rassemble des États riverains de la mer Méditerranée et l'ensemble des États membres de l'Union européenne (UE). Elle compte ainsi 44 membres : aux 27 membres de l'Union européenne s'ajoutent l'Albanie, l'Algérie, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, l'Égypte, Israël, la Jordanie, le Liban, le Maroc, la Mauritanie, Monaco, le Monténégro, l'Autorité palestinienne, la Syrie, la Tunisie, la Turquie et la Ligue arabe (en tant que telle).

Les principaux buts de l'organisation sont d'ordre énergétique et environnemental : l'eau, l'énergie (notamment solaire), l'environnement — tout particulièrement la dépollution de la Méditerranée — et l'autoroute de la mer comptent parmi les enjeux au cœur du projet. À l'inverse, des sujets moins consensuels comme l'immigration, la nature des régimes politiques des États membres ou le conflit israélo-palestinien ont été écartés.

Sommaire

Sommet fondateur de Paris

Le sommet fondateur de l'Union pour la Méditerranée s'est déroule le 13 juillet 2008 à Paris à l'invitation de la France et de l'Égypte. Les pays riverains de la Méditerranée et de l'UE sont représentés à ce sommet au plus haut niveau de l'État. La Libye assiste au sommet au titre d'observateur et est représentée par son ministre des affaires étrangères. La France, qui assure la présidence du Conseil de l'Union européenne, invite également les chefs d'État et de gouvernement de l'UPM à assister au défilé militaire du 14 juillet.

La déclaration commune des 43 États

La nouvelle institution doit prendre son essor sur six projets mobilisateurs : la dépollution de la Méditerranée, les autoroutes maritimes et terrestres, la protection civile pour répondre aux catastrophes naturelles, une université euro-méditerranéenne, l’énergie solaire et une « initiative méditerranéenne de développement des affaires »[1]. L'omission de toute référence à la démocratie et aux droits de l'homme dans la déclaration marque une régression par rapport aux objectifs du Processus de Barcelone.

Son organisation est fondée sur une coprésidence entre un dirigeant de la rive nord, désigné selon les mécanismes de représentation en vigueur au sein de l'UE, et un dirigeant de la rive sud, désigné par consensus dans les États concernés. Le président égyptien et le président français sont les deux premiers coprésidents malgré les débats autour de la décision[2].

Le budget de l'organisation doit être assuré par le lancement du fonds Inframed par la Caisse des dépôts française et la Cassa depositi e prestiti italienne, qui a pour objectif d'atteindre un montant global de 600 millions d'euros[3]. Les riches États du Golfe sont considérés comme des bailleurs de fonds potentiels[4].

Malgré ces manques, ce sommet marque un succès diplomatique pour la France[5], notamment en offrant un cadre favorisant la paix au Proche-Orient. La présence au sein de la même enceinte des chefs d'État ou de gouvernement d'Israël, de la Syrie, du Liban et de l’Autorité palestinienne marque en effet une volonté de dialogue pour résoudre les conflits au Proche-Orient. Le 12 juillet 2008, le président syrien Bachar el-Assad et le président libanais Michel Sleimane annoncent chacun au palais de l'Élysée leur intention de normaliser leur relations diplomatiques en ouvrant une représentation diplomatique respectivement à Beyrouth et à Damas[6].

La Cour des Comptes a plus tard « épinglé » ce sommet dans un rapport en faisant remarquer le prix jugé exorbitant de cette journée (16,6 millions d'euros), qui inclut notamment un dîner des chefs d’États pour un coût de 5 050 euros par personne[7].

Les États représentés au sommet de Paris

États Organisations Population Régimes politiques
Drapeau d'Albanie Albanie ALECE 03 619 778 République parlementaire
Drapeau d'Algérie Algérie UA, UMA, Ligue arabe, Barcelone 34 800 000 République parlementaire
Drapeau d'Allemagne Allemagne UE, Barcelone 82 314 906 République fédérale
Drapeau d'Autriche Autriche UE, Barcelone 08 316 487 République fédérale
Drapeau de Belgique Belgique UE, Barcelone 10 584 534 Monarchie constitutionnelle
Drapeau de Bosnie-Herzégovine Bosnie-Herzégovine ALECE 04 400 126 République fédérale
Drapeau de Bulgarie Bulgarie UE, Barcelone 07 679 290 République parlementaire
Drapeau de Chypre Chypre UE, Barcelone 00766 400 République présidentielle
Drapeau de Croatie Croatie ALECE 04 437 460 République parlementaire
Drapeau du Danemark Danemark UE, Barcelone 05 457 415 Monarchie constitutionnelle
Drapeau d'Égypte Égypte UA, Ligue arabe, Barcelone 80 355 036 République présidentielle
Drapeau d'Espagne Espagne UE, Barcelone 45 116 894 Monarchie constitutionnelle
Drapeau d'Estonie Estonie UE, Barcelone 01 342 409 République parlementaire
Drapeau de Finlande Finlande UE, Barcelone 05 289 128 République parlementaire
Drapeau de France France UE, Barcelone 63 392 140 République semi-présidentielle
Drapeau de Grèce Grèce UE, Barcelone 11 125 179 République parlementaire
Drapeau de Hongrie Hongrie UE, Barcelone 10 066 158 République parlementaire
Drapeau d'Irlande Irlande UE, Barcelone 04 239 848 République parlementaire
Drapeau d'Israël Israël Barcelone 07 184 000 République parlementaire
Drapeau d'Italie Italie UE, Barcelone 59 131 287 République parlementaire
Drapeau de Jordanie Jordanie Ligue arabe, Barcelone 05 924 000 Monarchie constitutionnelle
Drapeau de Lettonie Lettonie UE, Barcelone 02 281 305 République parlementaire
Drapeau du Liban Liban Ligue arabe, Barcelone 04 099 000 République parlementaire
Drapeau de Lituanie Lituanie UE, Barcelone 03 373 991 République parlementaire
Drapeau du Luxembourg Luxembourg UE, Barcelone 00476 200 Monarchie constitutionnelle
Drapeau de Malte Malte UE, Barcelone 00404 962 République parlementaire
Drapeau du Maroc Maroc Ligue arabe, UMA, Barcelone 33 757 175 Monarchie constitutionnelle
Drapeau de Mauritanie Mauritanie UA, UMA, Ligue arabe 03 086 859 République fédérale
Drapeau de Monaco Monaco 00032 020 Monarchie constitutionnelle
Drapeau du Monténégro Monténégro ALECE 00622 000 République parlementaire
Drapeau : Pays-Bas Pays-Bas UE, Barcelone 16 372 715 Monarchie constitutionnelle
Flag of Palestine.svg Autorité palestinienne Ligue arabe, Barcelone 04 018 332 Entité gouvernementale parlementaire
Drapeau de Pologne Pologne UE, Barcelone 38 116 486 République parlementaire
Drapeau du Portugal Portugal UE, Barcelone 10 945 870 République parlementaire
Drapeau de Roumanie Roumanie UE, Barcelone 21 565 119 République parlementaire
Drapeau : Royaume-Uni Royaume-Uni UE, Barcelone 60 587 300 Monarchie constitutionnelle
Drapeau de Slovaquie Slovaquie UE, Barcelone 05 396 168 République parlementaire
Drapeau de Slovénie Slovénie UE, Barcelone 02 013 597 République parlementaire
Drapeau de Suède Suède UE, Barcelone 09 103 551 Monarchie constitutionnelle
Drapeau de Syrie Syrie Ligue arabe, Barcelone 20 314 747 République présidentielle
Drapeau de République tchèque République tchèque UE, Barcelone 10 306 709 République parlementaire
Drapeau de Tunisie Tunisie UA, UMA, Ligue arabe, Barcelone 10 102 000 République semi-présidentielle
Drapeau de Turquie Turquie Barcelone 75 158 647 République parlementaire

Les institutions de l'UPM

Drapeaux des pays membres de l'UPM, dans le Palais de Pedralbes, Barcelone

Début novembre 2008 se tint une réunion ministérielle à Marseille. De celle-ci, fut dégagé un consensus selon lequel le siège de l'UPM serait à Barcelone, donc en Espagne. En contre-partie de la présence du siège dans un pays du Nord, le secrétariat général revient à un pays du Sud (actuellement Youssef Amrani, diplomate marocain. Le secrétaire général sera aidé de cinq adjoints : trois Européens et deux du Sud, dont un pour Israël, afin que la Ligue arabe soit membre à part entière de l'UPM[8].

Réseau Innovation Euromed

En janvier 2009, Nicolas Sarkozy investit Pierre Laffitte d'une mission pour la création d'un réseau spécifique de développement de l'innovation en Euroméditerranée[9].

D'une durée de deux ans, la mission est de favoriser cette coopération avec les membres de l'Union pour la Méditerranée, d'aider à la création de nouveaux pôles en Méditerranée autour des axes prioritaires, comme les autoroutes de la mer, la dépollution de la Méditerranée, le plan solaire méditerranéen, impliquer plus fortement tous les acteurs financiers, renforcer les liens internationaux déjà existants entre les clusters et les pôles du bassin méditerranéen et développer de nouveaux partenariats ainsi que des échanges de bonne pratiques entre pôles, clusters et PME.

Les débuts du projet

Aux origines du processus de Barcelone

Article détaillé : Partenariat Euromed.
Le président français Jacques Chirac, l'un des fondateurs du Processus de Barcelone.

Lancé, à l'initiative du président français Jacques Chirac, à la suite de la déclaration de Barcelone — déclaration adoptée lors de la conférence ministérielle euro-méditerranéenne qui s'est tenue du 27 au 28 novembre 1995 — le processus de Barcelone établit un partenariat euro-méditerranéen dans le domaine de la sécurité, du développement et de la culture entre l'Union européenne et dix autres États riverains de la mer Méditerranée[10] : l'Algérie, l'Égypte, Israël, la Jordanie, le Liban, le Maroc, la Syrie, la Tunisie, la Turquie et l'Autorité palestinienne ; la Libye et l'Irak ont eux le statut d'observateurs.

Ces États profitant d'intérêts communs ainsi qu'un long passé d'échanges mutuels, le Processus de Barcelone définit notamment un programme de travail conjoint destiné à construire ensemble un espace de paix, de sécurité et de prospérité partagée — respectant notamment la déclaration universelle des droits de l'homme — mais également à développer les ressources humaines, à améliorer la compréhension entre les cultures et à favoriser les échanges entre les sociétés civiles au moyen d'une zone de libre-échange[10].

En 2005, ces objectifs ont été réaffirmés lors du sommet de Barcelone tout en s'attardant sur des enjeux concernant l'immigration et la lutte contre le terrorisme, domaines devenus prioritaires du partenariat. Le sommet a également été l'occasion de souligner les réussites du partenariat, mais également les « importantes » limites du Processus de Barcelone[10].

L'Union méditerranéenne, un projet français

Le 22 octobre 2005, à quelques semaines du sommet marquant les dix ans d'existence du processus de Barcelone, Jacques Graindorge, président de l'association Finances Méditerranée censé aider au développement des pays du pourtour méditerranéen, Panagiotis Roumenotis, ancien ministre des Finances de la Grèce et président de l'association Calame (Centre d'analyse et de liaison des acteurs de la Méditerranée), et Jean-Louis Guigou, ancien directeur de la Datar et président de l'Institut de prospective du Calame, prennent acte de l'enlisement du partenariat et lancent un appel pour une Communauté du monde méditerranéen[11].

Nicolas Sarkozy lance, lors de de sa campagne présidentielle, l'idée d'une union méditerranéenne.

Si pendant le conflit Israël-Liban de l'été 2006, cette idée refait surface chez des universitaires et des intellectuels français pour amener Israël et pays arabes à coopérer dans un cadre international sur des sujets consensuels[réf. nécessaire], c'est le président français Nicolas Sarkozy — alors seulement candidat à l'élection présidentielle —, conscient des limites du partenariat, qui émit l'idée, lors d'un meeting à Toulon le 6 mai 2007, de créer une union méditerranéenne visant à donner un nouveau souffle au partenariat ; ce projet a pour but à la fois d'établir une dynamique politique[réf. nécessaire] hors Union européenne et d'offrir une alternative sérieuse à l'adhésion de la Turquie dans l'UE[réf. nécessaire].

Dans son discours de Tanger[12], le 23 octobre 2007, Nicolas Sarkozy invite tous les dirigeants des pays riverains de la Méditerranée à participer « sur un pied d'égalité » à une conférence au sommet à Paris en juin 2008 — à l'aube de la présidence française de l'Union européenne — qui doit marquer la naissance politique de cette union. Le projet français préconise la coopération entre les pays des deux rives sur des domaines consensuels comme l'eau, l'environnement, l'énergie ou encore les transports[12]. Israël est invité à y prendre part aux côtés des pays arabes.

« La Méditerranée est au cœur de toutes les grandes problématiques de ce début de siècle. Développement, migrations, paix, dialogue des civilisations, accès à l'eau et à l'énergie, environnement, changement climatique : c'est au sud de l'Europe que notre avenir se joue. »

— Bernard Kouchner, ministre français des Affaires étrangères, Le Monde, 10 juillet 2008

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Entre approbation et dissensions

Tensions franco-allemandes et dissensions françaises

Le quotidien français Le Monde rapporte au lendemain du discours de Tanger le scepticisme ambiant des capitales européennes face à un projet français jugé « peu clair »[13][réf. incomplète]. La Commission européenne et le Parlement européen sont très irrités par ce projet français qui consacre l'échec du processus de Barcelone et qui marginalise les institutions européennes incapables de donner une impulsion crédible[réf. nécessaire].

Très rapidement, face au « souverainiste » Henri Guaino[14] chargée de superviser le projet, et face aux multiples voyages du président Sarkozy dans les pays riverains qui éclaircissent peu à peu le projet — projet excluant les membres de l'UE non-riverains de la Méditerranée[réf. nécessaire] à l’exception du Portugal, de la Jordanie et de la Mauritanie —, l'Allemagne fait savoir ses fortes réticences. De plus, mené sans aucune concertation avec les pays de l'UE[réf. nécessaire], ce projet brouille la politique européenne de Nicolas Sarkozy. Certains États européens « bénéficiaires nets » recevant plus de fonds européens qu’ils ne cotisent au budget de l'UE, craignent une baisse des subventions au bénéfice du Sud[réf. nécessaire]. Certains haut fonctionnaires de la Commission européenne déclarent que les Français veulent « siphonner » les fonds européens au bénéfice de leur zone d'influence au Sud[réf. nécessaire].

La diplomatie française rejoindrait progressivement les thèses de Jean-Pierre Jouyet.

La tension franco-allemande est alors très vive, et lors d’une visite d'Henri Guaino à Berlin en janvier 2007 pour éclaircir le projet français, un incident diplomatique avec Reinhard Silberberg, le secrétaire d'État allemand aux affaires européennes, est évité de justesse comme le rapporte Les Coulisses de Bruxelles[15].

Les dissensions françaises mettent également en cause la clarté du projet[réf. nécessaire]. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État à l'UE, qui prépare activement la présidence française de l'UE du deuxième semestre 2008, exprime de forte réserves sur le projet original qui, selon lui, brouillerait la politique européenne de la France[16]. Ces réserves se font dans le cadre d'une lutte d'influence auprès du Président entre les pro-européens et le conseiller eurosceptique Henri Guaino[réf. nécessaire].

La révision du projet français sous la pression allemande

Les 13 et 14 mars 2008, Nicolas Sarkozy défend son projet au Conseil des chefs d'État et de gouvernement de l'UE. Il tente tout d'abord de faire accepter son projet en le présentant à ses partenaires européens comme le double méridional du Conseil des États de la mer Baltique, dont seuls les pays riverains peuvent être membres à part entière, les autres États européens ayant le statut d'observateur. La chancelière allemande Angela Merkel refuse toujours cette idée et exige que l'ensemble des États membres de l'UE soient membres à part entière de l’Union méditerranéenne, et que la Commission européenne soit au cœur du dispositif.

Alors que le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker résume le projet à « du Barcelone + »[15], le projet français est révisé sous la pression allemande ; l’Union méditerranéenne devient alors officiellement « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée ». Les médias français décrivent cette révision du projet comme l'échec de la diplomatie sarkozyste vis-à-vis de l'Allemagne : l'UM est une « affaire mal ficelée, mal préparée, mal vendue » pour Jean Quatremer sur son blog les Coulisses de Bruxelles. Le Monde parle lui de la « fermeté inédite de Mme Merkel » à l'égard d'un projet lancé selon le journaliste Henri de Bresson « de façon calamiteuse »[17][réf. incomplète].

De plus, affaibli sur le plan intérieur (baisse spectaculaire dans les sondages, élections municipales et cantonales désastreuses), le président français était clairement sur la défensive face à ses partenaires courroucés.[réf. nécessaire] Le site internet pro-UM et eurosceptique Vox Latina parle quant à lui d'une « Allemagne en relève de l'Empire austro-hongrois ». Alfred Mignot, éditeur-fondateur de Vox Latina critique ce nouveau projet a minima, paneuropéen mettant en avant le potentiel élevé d'inertie résultant du nombre élevé d'États désormais concernés et le rôle important accordé à la Commission européenne comme pour le processus de Barcelone[18].

Un appel de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur est lancé après la révision du projet original, le 28 mars 2008, par le président de l'Eurorégion Alpes-Méditerranée et président du conseil régional de Provence Alpes-Côte d’Azur, Michel Vauzelle ; cet appel demande un véritable « plan Marshall » pour la Méditerranée, afin « d'assurer la paix et la sécurité dans l'espace euro-méditerranéen dont les peuples sont liés par leur communauté de destin »[19].

Tout en se félicitant de voir la Méditerranée retrouver une place sur l'avant-scène géopolitique, de nombreux analystes (Mustapha Benchenane, Mustapha Chérif, Bichara Khader, Charles Saint-Prot, etc.) estiment qu'il serait préférable de relancer le dialogue euro-arabe qui a le mérite d'éviter des ambiguïtés et de permettre une coopération plus équilibrée entre deux grands ensembles : les 27 pays de l'UE et les 22 pays de la ligue arabe[20].

Les incertitudes et l'activisme français avant le sommet de Paris

Les incertitudes sur la présence de certains chefs d'État arabes

La perspective de la présence d'Israël au sommet de Paris agace fortement certains pays arabes : la Libye refuse de participer à l'organisation et organise même un mini-sommet du refus le 10 juin à Tripoli avec certains pays arabes[21]. De plus, le colonel Kadhafi accuse un tel projet de diviser la « nation arabe ». Le président de la République algérienne entretient le doute sur sa présence, malgré la visite pressante de François Fillon à Alger[22].

Les autorités algériennes s'interrogent également sur la place de leur pays dans l'UPM alors que la France a beaucoup mis en avant le Maroc, la Tunisie et l'Égypte ; elles ont vu d'un mauvais œil la visite de Nicolas Sarkozy en Israël en juin 2008. « Ce n'est pas l'Union pour la Méditerranée qui doit faire la normalisation [des relations] entre Israël et les pays arabes », souligne le ministre algérien des Affaires étrangères. La présence du président syrien Bachar el-Assad au sommet marque néanmoins une réconciliation diplomatique franco-syrienne mais provoque une certaine polémique en France[23].

Les conflits sur le fonctionnement de la future organisation

Le fonctionnement de cette organisation doit reposer sur un sommet tous les deux ans, sur une coprésidence, assurant une égalité entre le Nord et le Sud de la Méditerranée, et sur un secrétariat permanent. Nicolas Sarkozy envisage d'être le premier président du nord, et que le premier président du sud soit Mohammed Hosni Moubarak. Il souhaite également que le futur « secrétariat général » permanent soit localisé en Tunisie. Une fois de plus, ces initiatives jettent un froid dans les capitales européennes et à Bruxelles : « il n’y a pas beaucoup de démocratie, en dehors d'Israël, au sud de la Méditerranée », déclare un fonctionnaire européen aux Coulisses de Bruxelles[24]. « Mais pour le secrétariat, on pourrait au moins choisir le Maroc qui est quand même un peu plus présentable ».

La Commission européenne fait savoir finalement qu'elle refuse que Nicolas Sarkozy assure la présidence de l'UPM[25] ; pour Bruxelles, la France peut coprésider l'UPM, mais juste pendant les six mois de la présidence française du Conseil de l'Union européenne.

Les réactions des pays riverains

  • L'Algérie

L'Algérie a, notamment par la voix de son ministre des Affaires étrangères, demandé des « clarifications et des précisions » quant à la présence et au rôle d'Israël dans cette Union, craignant ouvertement que le nouveau cadre ne serve de prétexte à une « normalisation rampante » des relations avec l'État hébreu. Informées par la presse, les autorités algériennes ont aussi mal pris le fait que la coprésidence reviendrait à l'Égypte, le siège du secrétariat à la Tunisie et le secrétariat général à un Marocain[26]. Début mai 2008, lors d'une visite à Alger, la ministre française de l'Intérieur, Michèle Alliot-Marie, a démenti ces informations[26].

  • Le Maroc

Les autorités marocaines accueillent favorablement la proposition française. Lors de la visite d’État au Maroc du président français en octobre 2007, le roi Mohammed VI déclare dans son discours de Marrakech : « Nous sommes déterminés à explorer avec vous toutes les opportunités visant à promouvoir une approche inédite et progressive du partenariat ainsi envisagé et une prise en charge novatrice et solidaire des multiples défis de notre espace méditerranéen ». L’ambassadeur marocain à Paris, Fathallah Sijilmassi, est actif dans la promotion du projet.

  • La Tunisie

La Tunisie accepte le projet dès l’été 2007 et l'ex-président Zine el-Abidine Ben Ali soutient les démarches de Nicolas Sarkozy tout en rappelant, lors de la visite d’État de ce dernier en Tunisie en avril 2008, sa volonté d’« une participation plus large des pays de la rive sud à l’élaboration des plans et à la prise des décisions »[27]. Les chefs d’entreprise tunisiens voient cette union comme un « accélérateur de projets ».

  • La Turquie

Les autorités turques se montrent sceptiques face aux deux buts inavoués de la création de l’UPM, arrêter les flux migratoires des pays du Sud vers l’UE et écarter la Turquie des négociations d’adhésion à l’Union européenne, tout en lui offrant une contrepartie.

  • L’Égypte

L'ex-président égyptien Mohammed Hosni Moubarak est aussi favorable au projet. Les milieux intellectuels et universitaires égyptiens se montrent intéressés, tel le professeur de sciences politiques Mona Makram-Ebeid qui dans Al-Ahram Hebdo soutient fermement la coopération méditerranéenne et considère que l’Égypte pourrait « jouer un énorme rôle pour être la force motrice de cette Union » aux côtés de la France[28]. Cependant, comme le note Antoine Basbous, de l’Observatoire des pays arabes, dans Le Figaro[29] « la principale préoccupation de ces dirigeants n’est pas d’intégrer un club de démocraties méditerranéennes, mais de sanctuariser leurs régimes et de maintenir leurs clans au pouvoir (…) Donner la liberté à leur peuple, instaurer un État de droit ou offrir à leur jeunesse une véritable perspective, cela n’est pas à l’ordre du jour ».

  • La Libye

Le colonel Kadhafi a, de son côté, montré son hostilité au projet français, parlant d’une tentative de diviser les pays arabes[30]. Il ne souhaite pas qu’une Union pour la Méditerranée soit engagée sans l’appui de tous les pays arabes.

  • La Grèce

En octobre 2007, le président grec Károlos Papoúlias, qui effectue une visite d’État en France, affirme son approbation et son soutien au projet d’Union méditerranéenne. « La Grèce se montre particulièrement intéressée », selon le service de presse de l’Élysée.

  • L’Espagne et l’Italie

Les deux pays soutiennent le projet mais restent prudents face à l’enthousiasme français. À Rome lors d’un sommet entre José Luis Rodríguez Zapatero, Romano Prodi et Nicolas Sarkozy le 20 décembre 2007, est lancé un appel en faveur de la coopération méditerranéenne en continuité avec les dispositifs existants[31]. Selon l’appel de Rome, le projet intéresserait en premier lieu 25 pays, les 22 ayant un littoral méditerranéen ainsi que le Portugal, la Jordanie et la Mauritanie, tous trois déjà très impliqués dans divers processus euro-méditerranéens.

  • Les États-Unis

Le journal Le Monde parle d’une « bienveillance américaine à l’égard du projet d’Union méditerranéenne »[32]. Cette « bienveillance » ne suffit néanmoins pas à faire taire les critiques européennes : aucune concertation n’a eu lieu avec les partenaires européens non-méditerranéens de la France.

Conséquences des évènements géopolitiques : opération « Plomb durci » et printemps arabe

Le 23 janvier 2009, le président libyen Mouammar Kadhafi, fervent opposant au projet tel qu'il est, estime que l'offensive israélienne dans la bande à Gaza a « porté un coup à l'Union pour la Méditerranée » : « Nous regrettons ce coup porté à l'UPM alors qu'il était à ses débuts [...] Est-ce que la destruction de Gaza et le meurtre d'enfants sont parmi les projets concrets promis par l'UPM ? [...] Je pense que les partenaires du sud vont réviser leur adhésion à l'UPM » dont fait partie Israël, proposant que cette Union se limite aux pays nord-africains et du sud de l'Europe occidentale.

Le processus piétinait déjà fin 2008. L'invasion de Gaza par Israël a marqué un tournant dans l'histoire de l'UPM et pour la première fois depuis le lancement du processus EuroMed, en novembre 1995, des pays boycottent les réunions. Henri Guaino annonce fin mars le lancement d'une « initiative politique »[33] pour redémarrer le processus et s'en prend aux « esprits étriqués » et aux « bureaucrates » de Bruxelles.

Critiques

Le 28 avril 2010, la commission des affaires étrangères du Parlement européen s'est prononcée pour une relance de l’UPM (Union pour la Méditerranée) à travers le vote du rapport de Vincent Peillon, eurodéputé socialiste. En effet, les socialistes européens considèrent l’UPM comme étant une priorité stratégique pour l’Europe.

Pour les socialistes, les raisons de l'enlisement actuel sont donc identiques à celles qui entravaient le processus de Barcelone, initié en 1995, c'est-à-dire la reprise des négociations israélo-palestiniennes. Ils dénoncent l'absence d'ambition et de vision commune, au niveau européen, dans la résolution des conflits régionaux de la rive sud (Sahara occidental, conflit chypriote, conflit israélo-palestinien) qui obère les possibilités d'avancement de ce projet. Dans un contexte de tensions au Proche-Orient, le Parlement européen, au travers de ce rapport, appelle les Chefs d’Etats et de gouvernement des pays membres de l’UPM à prendre leurs responsabilités. La commission des affaires étrangères du Parlement européen a souligné l’importance de cette « union de projets », en rassemblant un grand nombre de propositions sur les six grands secteurs stratégiques de l’UPM (la protection civile, les autoroutes de la mer et les autoroutes terrestres, la dépollution de la Méditerranée, le plan solaire méditerranéen, l’Initiative pour l’expansion des affaires en Méditerranée et l’université euro-méditerranéenne), tout en soulignant l’importance d’élargir le champ des coopérations au domaine de la culture, de l’agriculture ou encore des migrations[34].

Remarques annexes

  • Unique Paving Materials[35] et Unio Patronal Metalurgica[36] sont les détenteurs des noms de domaine upm sur le net.

Notes et références

  1. Trente-trois articles, de bonnes intentions et des questions en suspens sur Le Monde.fr. Mis en ligne le 14 juillet 2008
  2. UPM : Les attentes algériennes satisfaites avant le Sommet sur L'Expression.com. Mis en ligne le 14 juillet 2008
  3. Union pour la Méditerranée : mode d'emploi sur Le Figaro.fr. Mis en ligne le 11 juillet 2008
  4. L'Union pour la Méditerranée : le difficile défi sur Le Temps.ch. Mis en ligne le 14 juillet 2008
  5. Merci Madame Merkel sur Le Monde.fr. Mis en ligne le 15 juillet 2008
  6. Rapprochement historique entre Liban et Syrie sur Le Soir.be. Mis en ligne le 12 juillet 2008
  7. Les dépenses somptuaires du sommet de l’Union pour la Méditerranée sur France Info.com. Mis en ligne le 28 octobre 2009
  8. UPM : accord global sur Barcelone, le rôle de la Ligue arabe et d'Israël sur AFP. Mis en ligne le 4 novembre 2008
  9. Jean-Pierre Largillet, « en ligne sur www.competence06.com Pierre Laffitte chargé de la création du Réseau Innovation Euromed » sur WebTimeMedias. Mis en ligne le 13 février 2009
  10. a, b et c Jean-François Jamet, « Intégration régionale : Processus de Barcelone et Union pour la Méditerranée, quels scénarios d'avenir? » sur Fondation Robert Schuman. Mis en ligne le 7 juillet 2008, consulté le 12 juillet 2010
  11. Un appel pour une communauté du monde méditerranéen sur Voxlatina. Mis en ligne le 22 octobre 2005
  12. a et b Discours de Tanger sur Élysée.fr
  13. Le Monde, Paris, 25 octobre 2007
  14. Henri Guaino, le conseiller de l'ombre qui exaspère les européistes sur Le Taurillon. Mis en ligne le 2 mars 2008
  15. a et b Union pour la Méditerranée : Merkel recadre Sarkozy sur Les Coulisses de Bruxelles. Mis en ligne le 15 mars 2008
  16. Vues d'Europe sur Jean-Pierre Jouyet.eu, blog du secrétaire d'État aux Affaires européennes
  17. Le Monde, Paris, 5 mai 2008
  18. L'UPM « au rabais », marqueur de la puissance craintive de l'Allemagne sur Vox Latina. Mis en ligne le 21 mars 2008
  19. Appel de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur à Monsieur le président de la République sur Vox Latina. Mis en ligne le 28 mars 2008
  20. Quelle union pour quelle Méditerranée ?, Observatoire d’études géopolitiques, Études géopolitiques 9-karthala
  21. « Union pour la Méditerranée : les pays arabes demandent des « clarifications » sur la présence d'Israël », dans Libérationjour=6, juin 2008 
  22. Sommet euro-méditerranéen : Bouteflika se fait prier sur Le Figaro.fr. Mis en ligne le 23 juin 2008
  23. Nicolas Sarkozy recevra Bachar el-Assad à Paris le 12 juillet sur Le Monde.fr. Mis en ligne le 2 juillet 2008
  24. L'Union pour la Méditerranée, un rêve démocratique de Nicolas Sarkozy sur Les Coulisses de Bruxelles. Mis en ligne le 29 avril 2008
  25. Bruxelles récuse une coprésidence française de l'Union pour la Méditerranée sur Le Monde.fr. Mis en ligne le 19 mai 2008
  26. a et b AFP, « Mini-sommet arabe à Tripoli pour discuter de l'Union pour la Méditerranée », L'Express, 10.6.2008, p. 1. Consulté le 1.9.2009
  27. Nicolas Sarkozy vante à Tunis l’Union pour la Méditerranée, Le Figaro, Paris, 29 avril 2008
  28. La création de la zone de libre-échange devrait être une priorité, Al-Ahram Hebdo, Le Caire, 20 octobre 2007
  29. L’Union pour la Méditerranée entre rêve et utopie, Le Figaro, Paris, 17 avril 2008
  30. Pour Kadhafi, l’Union pour la Méditerranée est « humiliante », Le Figaro, Paris, 10 juin 2008
  31. Le Monde, Paris, 22 décembre 2007
  32. La fin du gaullisme ?, Le Monde, Paris, 5 mai 2008
  33. Henri Guaino : L’Union pour la Méditerranée est un combat. Nous le mènerons jusqu'au bout ! sur Medafrique. Mis en ligne le 6 mai 2009
  34. Communiqué de la Délégation socialiste française au Parlement européen sur la relance de l'UPM
  35. upm.com
  36. upm.org

Voir aussi

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Bibliographie

Articles connexes

Liens externes


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