- Aubrac
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Pour les articles homonymes, voir Aubrac (homonymie).
Aubrac
Carte de localisation de l'Aubrac.Géographie Altitude 1 469 m, Signal de Mailhebiau Massif Massif central Superficie 1 300 km2 Administration Pays France Régions Auvergne, Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon Départements Lozère, Cantal, Aveyron Géologie Âge 6 à 9 millions d'années Roches Roches volcaniques et granites modifier L'Aubrac est un haut plateau volcanique et granitique situé au centre-sud du Massif central et aux confins de trois régions administratives françaises : Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon et Auvergne. Il présente un air de famille avec son cousin le Cézallier et on peut le rattacher comme lui aux hautes terres d'Auvergne. Il est bordé au nord-ouest par les monts du Cantal, à l'est par la Margeride et au sud par les plateaux calcaires des Grands Causses.
Sommaire
Géographie
Topographie, géologie
La région de l'Aubrac ou monts d'Aubrac ou aussi plateau de l'Aubrac est une zone située à cheval sur les départements de la Lozère, du Cantal et de l'Aveyron. Elle est délimitée au sud par le Lot, au nord par la Truyère et à l'est par la Colagne. Le massif culmine au sud à 1 469 m au signal de Mailhebiau. C'est un massif volcanique relativement ancien (6 à 9 millions d'années[1]) par rapport aux volcans de la chaîne des Puys qui eux, n'ont que quelques milliers d'années. Il prend la forme d'une échine basaltique allongée (30 km de long), de direction nord-ouest/sud-est, surmontant un socle granitique (batholite de la Margeride), et issue soit d'un volcanisme de type fissural (rift) soit, selon les auteurs les plus récents, de plusieurs volcans de type hawaïen (volcan rouge) très rapprochés les uns des autres[2]. Les laves émises sont basaltiques ou de composition proche (basanite, trachy-basalte, téphrite...). On peut toutefois trouver localement des traces d'éruptions plus violentes, comme des pyroclastites sous forme de tufs ou de brèches[2], en particulier sur les sommets autour d'Aubrac et à Mailhebiau.
Malgré ces éruptions, les sommets de l'Aubrac sont en général peu marqués car les coulées volcaniques ont été fluides et ont semble-t-il construit peu de volcans bien individualisés (ou alors ceux-ci ont peut-être été érodés lors des phases chaudes de la fin du tertiaire). En fait, les rares sommets notables ont plutôt été dégagés par l'érosion glaciaire au quaternaire.
Sommets principaux :
De 1 469 à 1 380 mètres Inférieurs à 1 380 mètres - Signal de Mailhebiau (1 469 mètres)
- Puy[3] d'Alteteste (la « haute tête ») (1 448 mètres)
- Les Truques d'Aubrac (1 440 mètres)
- Puy de Gudette (1 427 mètres)
- Puy du Roussillon (1 407 mètres)
- Mountasset (1 407 mètres)
- Suc de Born (1 388 mètres)
- Montagne du Faltre (1 380 mètres)
- Montagne de Rabios (1 353 mètres)
- Le Drellier (1 342 mètres)
- Pic de Mus (1 324 mètres)
- Roc du Cayla (1 298 mètres)
- Mont Redorte (1 291 mètres)
- Puy de la Tuile (1 290 mètres)
- Truc des Coucuts (1 286 mètres)
- La Sentinelle (1 270 mètres)
La crête basaltique domine au nord-est un haut plateau granitique (altitude moyenne : 1 200 m) qui a la particularité d'avoir été recouvert d'une grande calotte glaciaire (500 km2 et 200 m d'épaisseur) à l'ère quaternaire (pléistocène) et à 3 reprises (glaciation de Mindel, de Riss et de Würm). Les glaciers ont laissé des marques visibles un peu partout (vallées en auge en périphérie - comme celle du Bès au nord ou de la Biourière au sud -, moraines, drumlins, blocs erratiques, roches moutonnées) ainsi que des dépôts étendus d'alluvions (sandur, dépôts nivo-éoliens). Ces dépôts sont parfois exploités (sablières d'Usanges). Quant aux zones de surcreusement glaciaire (ombilic), elles sont souvent occupées par des zones humides, dont un grand nombre de tourbières, et parfois des lacs. Ces derniers ont pu aussi se former en amont de barrages morainiques.
Au sud-ouest (côté aveyronnais), le paysage est caractérisé par de fortes pentes boisées (hêtres) qui contrastent avec les immenses pâturages nus de l'Aubrac lozérien. La crête de l'Aubrac domine ici la vallée du Lot par un abrupt de 1 000 m de dénivelé. C'est le pays des Boraldes, rivières courtes et rapides coulant dans des vallées très encaissées et se jetant dans le Lot. Ces vallées ont entaillé le socle de l'Aubrac qui a la particularité d'être ici métamorphique (micaschiste, gneiss) alors qu'il est partout ailleurs granitique.
Climat
Le climat sur l'Aubrac est rude et le plateau est souvent très enneigé l'hiver. Le massif compte plusieurs petites stations de ski (Laguiole, Brameloup, Nasbinals, Saint-Urcize). Il peut neiger en altitude d'octobre à mai et il peut y geler la nuit presque tous les mois de l'année. Le vent[4] ne rencontre aucun obstacle sur le plateau et balaye la neige, formant des congères parfois énormes qui peuvent rester tard dans la saison (jusqu'en mai-juin). Les précipitations sont abondantes toute l'année et avoisinent les 2 mètres sur les versants exposés. Le vent dominant est celui d'ouest mais le vent de sud apporte parfois aussi brouillard et mauvais temps sur le sud de l'Aubrac (en particulier lors des épisodes cévenols). Les étés peuvent être chauds mais ils sont souvent orageux, les orages pouvant être violents comme dans toutes les zones de montagne.
Milieu naturel, flore, zones Natura 2000
Article connexe : Flore du Massif central.Sur le plan de la végétation, l’Aubrac constitue un milieu varié : grande forêt de hêtres au sud-ouest, petites forêts de résineux au nord et à l'est (essentiellement du pin sylvestre) et au centre de grands pâturages où domine le nard raide (Nardus stricta) et où les arbres sont peu nombreux. Les pâturages les plus riches se situent dans la zone volcanique ; en zone granitique on trouve aussi de bonnes terres mais le sol est en général moins profond et plus pauvre : on trouve fréquemment sur ce type de sol des landes à genêt purgatif (Cytisus purgans), à fougère ou à bruyère callune (Calluna vulgaris) quand le sol est très peu épais. Il faut également noter la présence de nombreuses tourbières, milieux naturels exceptionnels.
Du fait de la grande variété de ces milieux et de leur préservation relativement bonne, la flore est très diversifiée. Les pratiques pastorales traditionnelles accentuent cette richesse en entretenant naturellement les pâturages (fumure, gestion par rotation des pelouses d'estives), ce qui contribue à une plus grande biodiversité. Toutefois, l' intensification de l'agriculture observée depuis quelques années pourrait conduire à une diminution de cette biodiversité (usage d'engrais chimiques dans les prés de fauche et parfois aussi dans certaines pâtures). Malgré tout, à la belle saison, on trouve un large éventail de fleurs caractéristiques de la moyenne montagne ainsi que quelques raretés. Quelques exemples :
- Dans les bois de hêtres : lis Martagon, calament à grandes fleurs (le fameux « thé d’Aubrac »), prénanthe pourpre, doronic d’Autriche, centaurée des montagnes, bois joli, maïanthème à deux feuilles, scille à deux feuilles, etc.
- Dans les zones humides : droséra (plante carnivore), canneberge, gentiane pneumonanthe, comaret des marais, trèfle d'eau, trèfle en spadices, parnassie des marais, etc.
- Bord des ruisseaux et mégaphorbiaies : aconit tue-loup et napel (très toxique), renoncule à feuilles d’aconit, pigamon à feuilles d'ancolie, benoîte des ruisseaux, adénostyle à feuilles d’alliaire (relativement rare en Aubrac, seulement au-dessus de 1 200 m), etc.
- Dans les prés et les landes : gentiane jaune, gentiane champêtre, vératre blanc (toxique), arnica des montagnes, narcisse des poètes, narcisse jaune, trolle d'Europe, fenouil des Alpes (cistre), renouée bistorte, raiponce en épi (variété bleue), diverses orchidées (orchis sureau, orchis tacheté, orchis moucheron...), etc.
- Les plantes rares (au niveau national mais présentes dans la région) : dent de chien (localement abondante dans les prés, les landes et les pâturages d'altitude), pulsatille rouge (endémique du Massif central ; répartition en Aubrac : landes et pâturages sur le versant lozérien uniquement), dentaires à cinq ou sept folioles (bois de hêtres d'altitude), ail victorial (plante de haute montagne qui peut descendre localement jusqu'à 1 100 m dans la région), cirse erisithalès (bois rocailleux en zone volcanique), séneçon cacaliaster (bois d'altitude ; en France, ne pousse que dans le Massif central), etc.
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Crocus vernus (dans les pâturages et les prés en avril)
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Brunelle à grandes fleurs (dans les landes au mois de juillet)
Il n'existe pour le moment que peu de mesures de protection de la flore et de la faune sur l'Aubrac. En particulier, il n'existe aucune réserve naturelle alors que plusieurs sites, en particulier des zones humides, mériteraient une telle protection[5]. Le projet de parc naturel régional permettra peut-être de faire évoluer la situation dans le sens d'une meilleure protection de l'environnement. Pour l'heure, n'existent que les zones natura 2000 détaillées ci-dessous :
- Aveyron[6],[7].
- Cantal[8]
- Lozère[9] (une extension de cette zone à tout l'Aubrac lozérien est actuellement à l'étude)
Les zones natura 2000 de l'Aubrac lozérien et cantalien sont situées sur le plateau et comprennent de nombreuses zones humides d'un grand intérêt écologique. La zone natura 2000 de l'Aubrac aveyronnais recouvre la forêt domaniale d'Aubrac qui constitue l'une des plus belles hêtraies d'altitude de France.
Agriculture
L'essentiel de l'agriculture en Aubrac se concentre sur l'élevage bovin (les anciennes cultures comme celle du seigle par exemple ont presque totalement disparu). La race locale Aubrac est prédominante mais elle revient de loin : elle a été sauvée de l'extinction à la fin des années 1970 par une poignée d'agriculteurs courageux et attachés à la race qui refusaient de la voir mourir. En effet, la race Aubrac est une race « mixte » qu'on élevait à la fois pour le lait et la viande mais qui n'excellait dans aucun de ces deux domaines (en quantité), ce qui constituait un handicap lourd à l'époque. On lui avait donc préféré d'autres races plus rentables ou on la croisait pour améliorer les rendements tant du point de vue laitier que de la viande. À la fin des années 1970, le point de vue sur la race changea et l'on s'aperçut que la vache Aubrac disposait de qualités irremplaçables (rusticité, fécondité, longévité) et que sa viande était d'une très grande qualité. Un programme de sélection efficace visant à produire des animaux de pure race et de qualité fut donc mis en place et perdure encore aujourd'hui (vente de génisses pleines de race pure par des éleveurs spécialisés aux autres agriculteurs).
Les troupeaux occupent les pâturages d'altitude (qu'on appelle aussi « montagnes »[10]) du 25 mai (saint Urbain) au 13 octobre (saint Géraud). Ceux-ci viennent des pourtours du plateau et en particulier du nord-Aveyron qui est la principale zone d'origine des troupeaux de bovins transhumants dans le Massif central [11]. Les « montagnes » peuvent être occupées par leur propriétaire ou louées au plus offrant, la concurrence dans ce cas étant rude pour obtenir les meilleures d'entre elles.
En dehors de la période estivale, le troupeau est à l'étable ou occupe, si le temps le permet, des prés de fauche à proximité de la ferme (c'est le cas en avril-mai ou à l'automne). La nourriture à l'étable est composée en majeure partie de l'herbe récoltée dans les prés de fauche. Les veaux naissent en février-mars, passent l'été dans la montagne avec leur mère puis sont vendus à l'automne : ce sont des broutards (veau de 9 à 12 mois) vendus pour leur viande sur les marchés français et italiens. Les éleveurs peuvent vendre aussi des animaux plus âgés (génisses croisées issues d'une vache Aubrac et d'un taureau Charolais dans le cadre de la filière « Fleur d'Aubrac » ou génisses de race pure (ou vaches de réformes) dans le cadre de la filière « Label rouge - boeuf fermier de l'Aubrac »). Ces ventes constituent l'essentiel du revenu des éleveurs de l'Aubrac.
L'Aubrac est donc aujourd'hui essentiellement une zone d'élevage extensif pour la viande, ce qui n'était pas le cas par le passé (jusque dans les années 1960) où l'on fabriquait la fourme dans les mazucs (burons en français). Dans chaque buron, officiait une équipe fortement hiérarchisée où chacun avait une tâche précise à accomplir (traite des vaches, soin des veaux, ...). C'était « l'âge d'or » de l'Aubrac et son souvenir imprègne encore fortement la mémoire collective. C'est dans les burons que l'aligot, à base de tome fraîche et de pommes de terre, a été inventé. Aujourd'hui, la production de fromage (laguiole AOC) continue pour la majeure partie de sa production sous une autre forme (laiterie industrielle) et l'aire de collecte du lait se concentre dans la région de Laguiole (coopérative « Jeune Montagne » installée dans le bourg) mais trois burons véritables demeurent cependant et produisent du laguiole fermier.
Le territoire de l'Aubrac est inclus également dans l'aire de production du lait et de fabrication du bleu des causses[12].
Pour plus de précisions : site de l'association des éleveurs du bœuf fermier de l'Aubrac[13] (très pédagogique).
Industrie et artisanat
Il y a peu d'industrie sur l'Aubrac à l'exception notable de la coutellerie dans la région de Laguiole. Le couteau de Laguiole, aujourd'hui connu dans le monde entier, est produit par plus de 30 fabricants (industries ou artisans). C'est un couteau inspiré de la navaja espagnole, à l'origine utilisé exclusivement par les paysans de l'Aubrac et des alentours ainsi que par les bougnats et les limonadiers rouergats « montés » à Paris qui utilisaient ce couteau équipé d'un tire-bouchon.
Aujourd'hui, le couteau de Laguiole devient de plus en plus un article de luxe qui peut être personnalisé (nom gravé sur la lame) et dont le manche peut être en divers matériaux, en particulier des bois précieux (bois de rose, d'olivier, d'ébène, etc.) Il peut être pliant ou non (dans ce dernier cas, il est utilisé comme couvert).
Histoire
Antiquité et Moyen Âge
Dans la documentation historique, Aubrac est attesté sous la forme Altobraco, Albracum, Albrac et même Auborac en occitan. Le second élément est peut-être le gaulois braco attesté dans une glose et qui signifie « endroit humide, boueux ». Cf. vieil occitan brac boue. Ce mot existe encore en langue d'oïl (rare) sous la forme brai au sens de « goudron », jadis « boue » et braye « terre grasse », ainsi qu'en toponymie sous la forme Bray. L'Aubrac faisait partie du territoire du peuple celtique des Gabales, le pagus Gabalorum (dont procède le nom Gévaudan) et leur capitale était Anderitum (de ande « sous » ou « devant » et rito- « gué » ) pour prendre, comme c'est courant dans les Gaules au Bas Empire, le nom du peuple Civitas Gabalorum, Javols. Il semble également que l'Aubrac ait abrité une localité appelée Adsilanum, village étape dans un premier temps sur la voie romaine reliant la Narbonnaise à la Gaule du nord et à l'Aquitaine et qui servit aussi plus tard de poste frontière entre la Narbonnaise et le territoire des Arvernes.
Un des sommets de l'Aubrac, connu sous le nom de mont-Hélanus, est bordé par un lac, aujourd'hui appelé lac de Saint-Andéol, où, selon Grégoire de Tours les habitants se réunissaient chaque année pendant quelques jours, y faisant ripaille et jetant des offrandes au dieu du lac. Sous Charlemagne, les prêtres, toujours enclins à se reposer sur les pratiques païennes pour propager leur enseignement, perpétuèrent ce culte en substituant un saint au dieu païen. Cette pratique dura jusqu'à la fin du XIXe siècle où cette pratique fut interdite.
Le village d'Aubrac renferme les restes de l'ancienne Dômerie ou Hôpital d'Aubrac créé par le seigneur flamand Adalard en 1120, au retour d'un pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle. Une fois installés dans l'abbaye, les moines reçurent en donation des seigneurs locaux de grandes étendues de terre qu'ils s'employèrent à défricher. C'est ainsi que les pâturages prirent progressivement le dessus sur la forêt. Le paysage actuel de l'Aubrac est donc pour une large part le résultat de l'action de ces moines « défricheurs ».
Lieu incontournable du Camino frances et de la Via Podiensis, l'hôpital d'Aubrac fut une étape importante au Moyen Âge pour les milliers de pèlerins qui allaient vers Saint-Jacques-de-Compostelle. Le pèlerin, après avoir enduré la rudesse du plateau, se retrouvait à la Dômerie pour s'y restaurer et se reposer et repartait pour Saint-Côme-d'Olt en descendant cette vallée abritée et verdoyante qui mène à Saint-Chély-d'Aubrac et passait sur le Pont des pèlerins.
La croix des 3 évêques
Elle commémore un concile tenu en 590 sur l'Aubrac entre les évêques des trois diocèses de Mende, Rodez et Saint Flour. Ce concile est rapporté par saint Grégoire. En 1238, les moines de la dômerie d'Aubrac ont construit la croix en mémoire de ce concile et l'ont placée au point de jonction des trois diocèses. Elle se trouve ainsi à la limite des trois départements de la Lozère, de l'Aveyron et du Cantal. La croix des trois évêques a été volée en 1990, malgré ses 300 kilos, et la croix actuelle est une copie. À son pied, figure l'indication des trois diocèses. Elle est située entre Aubrac et Laguiole.
La contre-révolution
À l'instar de tout l'ouest de la France, l'Aubrac, terre conservatrice, s'est opposée à la Révolution française en la personne de Marc Antoine Charrier, notaire à Nasbinals, qui leva à l'époque une petite armée pour lutter contre les révolutionnaires. Cette armée était composée de paysans de l'Aubrac et de la Lozère très attachés à la religion catholique et qui voyaient en la Révolution une menace. Cette insurrection populaire ne connut guère de succès militaires et ne dura que quelques mois. Marc-Antoine Charrier finit guillotiné à Rodez en août 1793.
L'Histoire récente : l'exode rural au XXe siècle et les « Auvergnats de Paris »
Avec l'arrivée du chemin de fer dans le Massif central vers 1880, l'exode rural, qui était resté jusqu'à cette date relativement faible, va considérablement augmenter. Les habitants de l'Aubrac et plus largement du nord-Aveyron (et dans une moindre mesure les habitants du Cantal et du nord de la Lozère) sont nombreux à rejoindre Paris, quittant une vie paysanne bien souvent miséreuse. Dans la capitale, ils se spécialisent dans le commerce du charbon puis dans celui du vin et de la limonade : les Parisiens les appellent les bougnats. Les nouveaux venus sont tout de suite épaulés par ceux qui sont déjà sur place (de la famille le plus souvent). Leur acharnement au travail et leur sens de l'économie légendaire vont contribuer à leur réussite sociale. La majorité des « cafés-bois-charbons » de Paris est tenue par des Aveyronnais dès le début du XXe siècle. Certains connaîtront une réussite exceptionnelle à l'image de Marcellin Cazes (Brasserie Lipp) ou Paul Boubal (Café de Flore).
Vie culturelle
L'Aubrac demeure une terre de folklore vivace. Les bals traditionnels dans les fêtes de village sont nombreux. On y joue de l'accordéon et de la cabrette et les danseurs interprètent une grande variété de danses : bourrée, valse, marche, etc. L'Aubrac a produit des compositeurs talentueux de musique traditionnelle ou de bal musette comme Jean Vaissade (auteur du célèbre Sombreros et mantilles), Jean Perrier ou Jean Pons. Le genre musette découle d'ailleurs de la musique auvergnate jouée au XIXe siècle dans les cafés de la capitale tenus par des Aveyronnais (ces derniers seraient donc les inventeurs de danses aussi populaires que la java[14] par exemple). Aujourd'hui, la région compte encore de nombreux musiciens (accordéonistes et cabretaires (occitan) ) connus localement mais aussi appréciés de la « diaspora » à Paris (amicales auvergnates).
Quant à l'aligot, le plat incontournable de l'Aubrac, il est de toutes les fêtes (voir photo).
Toutefois, le folklore de l'Aubrac n'est pas toujours festif, il peut être aussi mélancolique avec les « regrets », chants tristes, interprétés en occitan, et dont l'origine est très ancienne (certainement issus de la tradition celte). Ils sont souvent accompagnés de la seule cabrette et on les compare parfois aux ballades irlandaises. Le chant lou mazuc[15], très connu en Aubrac, peut se classer dans cette catégorie. Par ailleurs, le compositeur français Joseph Canteloube (1879-1957), passionné par le patrimoine musical de la Haute-Auvergne (Aubrac et Cantal essentiellement), a repris certains de ces chants et les a adaptés au répertoire classique et lyrique dans son recueil Chants d'Auvergne (qui contient le célèbre baïlero[16] mais aussi des adaptations étonnantes de bourrée).
D'autre part, chaque année, le dernier week-end d'août, le bourg d'Aubrac accueille une manifestation littéraire : Les Rencontres d'Aubrac[17].
Tourisme
- L'Aubrac est une étape importante sur la Via Podiensis, l'un des 4 chemins qui mène à Saint-Jacques-de-Compostelle. La via podiensis (ou route du Puy) part de cette localité et passe par Conques après être passée sur l'Aubrac. Cette route coïncide avec le GR 65 et est très fréquentée par les pèlerins à la belle saison.
- Sur une extrémité du plateau, le bourg de Laguiole est célèbre pour ses couteaux et incontournable pour se pourvoir en fromage (fourme et tomme fraîche au lait cru de vache).
- Deux églises remarquables à visiter : celle de Nasbinals, du 12e siècle, de style roman auvergnat et celle de saint-Urcize avec son clocher à peigne et son déambulatoire unique en haute Auvergne.
- La fête du village d'Aubrac est le 15 août. En ce lieu se trouve aussi la « maison de l'Aubrac »[18].
- L'endroit se prête à la cueillette en pleine saison... En particulier celle du thé d'Aubrac (voir photo plus haut), consommé en tisane.
- La région compte deux stations thermales d'importance notable: la Chaldette et Chaudes-Aigues dont les eaux, à la source du Par, atteignent la température record de 82°C (utilisées entre autres pour le chauffage de la ville).
- Quelques sites à visiter :
- Quatre lacs d'origine glaciaire sont accessibles depuis la route D52 qui va de Nasbinals à Saint-Germain-du-Teil (appelée localement la route des lacs) : lac des Salhiens (le ruisseau qui s'en échappe forme la cascade du Déroc), lac de Souverols (le plus petit), lac de Saint-Andéol (le plus grand et le plus chargé d'histoire - voir plus haut), lac de Born (le plus sauvage et le plus haut en altitude).
- Plusieurs sommets peuvent être gravis sans difficulté (voir tableau ci-dessus).
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Aperçu de l'Aubrac non loin du col de Bonnecombe
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Le Pic de Mus vu de la montagne de Rabios
L'Aubrac vu par Julien Gracq
« Une attraction sans violence, mais difficilement résistible me ramène d’année en année, encore et encore, vers les hautes surfaces nues, basaltes ou calcaires du centre et du sud du massif : l’Aubrac, le Cézallier, les planèzes, les causses. Tout ce qui subsiste d’intégralement exotique dans le paysage français me semble toujours se cantonner là : c’est comme un morceau de continent chauve et brusquement exondé qui ferait surface au-dessus des sempiternelles campagnes bocagères qui sont la banalité de notre terroir. Tonsures sacramentelles, austères, dans notre chevelu arborescent si continu, images d’un dépouillement presque spiritualisé du paysage, qui mêlent indissolublement, à l’usage du promeneur, sentiment d’altitude et sentiment d’élévation. »
— Julien Gracq, Aubrac
« Croix de basalte monolithiques de l’Aubrac, grossières, presque informes, à la tête et aux bras très courts, plantées de guingois sur un simple entassement de blocs de lave et qui semblent l’ébauche d’un trait d’union entre le monde mégalithique et le monde chrétien. »
— Julien Gracq, Liberté Grande, José Corti, 1946
« Rarement je pense au Cézallier, à l’Aubrac, sans que s’ébauche en moi un mouvement très singulier qui donne corps à mon souvenir : sur ces hauts plateaux déployés où la pesanteur semble se réduire comme sur une mer de la lune, un vertige horizontal se déclenche en moi qui, comme l’autre à tomber, m’incite à y courir, à perte de vue, à perdre haleine. »
— Julien Gracq, Carnets du Grand Chemin, José Corti, 1992
L'Aubrac au cinéma et à la télévision
- 1994 : le générique de l'émission C'est pas sorcier, sur France 3, montrant le camion, est tourné sur le plateau de l'Aubrac
- 2003 : Nos enfants chéris de Benoît Cohen
- 2005 : Saint-Jacques… La Mecque de Coline Serreau
- 2010 : La Princesse de Montpensier de Bertrand Tavernier (tourné au château de Messilhac)[19]
Galerie photos
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Le truc de l'Agullio dans la commune de Saint-Urcize
Les communes de l'Aubrac
L'ensemble de ces communes totalise une superficie d'environ 1 300 km2 et c'est ce chiffre qui a été retenu dans l'infobox.
Les communes de l'Aubrac A-E Les communes de l'Aubrac F-M Les communes de l'Aubrac M-T Note : Brameloup à Saint-Chély-d'Aubrac est une station de ski qui fonctionne comme celles de Nasbinals, Saint-Urcize et Laguiole, et leurs chalets sont ouverts en période estivale.
Étape précédente
NasbinalsPèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle
Via PodiensisÉtape suivante
Saint-Chély-d'AubracAnnexes
Bibliographie
- Francis Nouyrigat, Fleurs et paysages d'Aubrac, Éditions du Rouergue, 1998 (ISBN 2841560848).
- J. Rouire et C. Rousset, Guides géologiques régionaux - Causses, Cévennes, Aubrac, Masson, 1980 (ISBN 2225652740)
- Yves Garric, Paroles de burons, Rodez, Fil d'Ariane, 2001 (ISBN 2-912470-23-4)
Liens externes
- Bibliographie sur Aubrac, auteur Advielle (lien BNF): consultez les pages 368 à 376
- Voir aussi le descriptif géographique par le baron Hulot :(lien BNF) Consultez les pages 61 à 78
- Découvrez la tourbière des Vergnes des Mazes gérée conjointement par la commune de Lieutadès, le CEPA et l'ONF
Notes et références
- Selon les travaux les plus récents (Goër et al, 1991), 90 % des laves de l’Aubrac auraient été émises sur un temps très court, de l’ordre de 250 000 ans, il y a 7,5 Ma.
- http://www2.brgm.fr/volcan/l%27aubrac.htm
- puech ». Le terme « puy » est employé ici par commodité bien qu'il ne soit pas en usage dans l'Aubrac où l'on emploie à la place le mot occitan «
- Le terme "écir" qu'on retrouve quelquefois dans la littérature vient d'un verbe occitan qui signifie "souffler" mais ne désigne pas de vent en particulier. En Aubrac, le vent d'ouest, qui est le plus fréquent, est appelé "la traverse", le vent du nord, "la bise" et le vent du sud, tout simplement "le vent" ("lou ven" en patois).
- agriculteurs et les services de l'Etat (ONF): la tourbière de la Vergne noire dans les bois de Laguiole et la tourbière de la Source du roc, et une autre, la tourbière des Vergnes des Mazes, gérée par la commune de Lieutadès et l'ONF (voir lien plus haut). Il existe cependant trois tourbières aménagées dont deux gérées conjointement par des
- DEVN0650433A
- Natura 2000 : Fiche du site FR7300871 (Plateau central de l'Aubrac aveyronnais)
- Natura 2000 : Fiche du site FR8301069 (AUBRAC)
- Natura 2000 : Fiche du site FR9101352 (PLATEAU DE L'AUBRAC)
- En Aubrac, le mot « montagne » a un sens bien particulier et désigne non pas une élévation mais une propriété foncière située en altitude et utilisée par les éleveurs pour faire pâturer leur troupeau à la belle saison. Le droit d'usage peut se louer (parfois fort cher) ou bien la pâture est occupée par son propriétaire. La majorité des « montagnes » dans l'Aubrac sont occupées par des éleveurs aveyronnais ce qui reflète le dynamisme de l'élevage dans la partie nord de l'Aveyron.
- Eric Bordessoule, Les « montagnes » du Massif central, Presses universitaires Blaise Pascal (Clermont-Ferrand), collection CERAMAC, 2001 (ISBN 2-84516-166-2), p. 277
- http://www.bleu-des-causses.com/aoc.htm
- site de l'association des éleveurs du boeuf fermier de l'Aubrac
- mazurka italienne ou encore d'une danse appelée la Chaloupeuse pratiquée au XIXe siècle dans un dancing de la rue Mouffetard. Quoi qu'il en soit, l'origine parisienne de la java ne fait aucun doute et il est tout aussi certain qu'elle était dansée, entre autres, dans les cafés aveyronnais de Paris, lesquels ont largement contribué à sa popularité. Cela n'est évidemment qu'une hypothèse défendue par certains. D'autres pensent que la java descend d'une
- occitan) décrit la vie simple et rude des burons d'autrefois. Ce titre se chante le plus souvent « a capella » et exclusivement en occitan. Si l'Aubrac était un pays, lo Mazuc en serait certainement l'hymne national. Le silence qui se fait autour de l'interprète de ce chant est toujours impressionnant : on touche là à l'âme de l'Aubrac. Lo Mazuc (
- Baïlero interprété par l'artiste lyrique suédoise Anne Sofie Von Otter
- Le site du festival littéraire des Rencontres d'Aubrac.
- La maison de l'Aubrac sur le site officiel du tourisme en Aveyron.
- Un film tourné dans le Cantal sélectionné à Cannes (photos)
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