Jésus-Christ

Jésus-Christ
Page d'aide sur l'homonymie Cet article traite de Jésus en tant que Christ pour les chrétiens, pour l'aspect historique de Jésus de Nazareth, voir Jésus de Nazareth.
Le Christ au globe céleste de Jacques Du Brœucq.

Jésus-Christ ([ʒezykri] chez les catholiques ou [ʒezykrist] chez les protestants[1]), le Christ ou simplement Christ est le nom donné à Jésus de Nazareth par les chrétiens, qui le reconnaissent comme le Messie (χριστός / Christos en grec ancien), « l’oint du Seigneur » annoncé par l'Ancien Testament du judaïsme, mort et ressuscité pour le salut des Hommes.

Du fait de l'influence du christianisme dans la culture occidentale, Jésus-Christ est devenu un synonyme de Jésus de Nazareth dans le langage courant.

Il est considéré par les chrétiens comme le Messie et le Fils unique de Dieu. Il tient des rôles divers dans plusieurs courants chrétiens aux croyances diverses.

Représentation du Christ en croix, Église de Beaune, France

Sommaire

Jésus dans l'histoire

Article détaillé : Jésus de Nazareth.

La croyance en Jésus-Christ se réfère à l'histoire de Jésus le Nazaréen, Juif de Galilée, qui apparaît au Ier siècle dans le cercle de Jean le Baptiste avant de s'engager, entouré de quelques disciples, dans une courte carrière de prédication itinérante d'un à deux ans et demi[2], essentiellement en Galilée, en pratiquant guérisons et exorcismes. Il suscite engouement et ferveur, s'attirant la méfiance des autorités politiques et religieuses, avant d'être arrêté, condamné et crucifié vers l'an 30 à Jérusalem pendant la fête juive de la Pâque, sous l'administration du préfet Ponce Pilate[3].

Dans les premières décennies qui suivent la mort de Jésus de Nazareth vers 30, ses disciples vont se constituer en petites communautés autour de deux idées : celle que Jésus était le messie attendu par les juifs, et celle qu'il était ressuscité et était apparu à un certain nombre de témoins. Ce « mouvement des disciples de Jésus », par sa croyance en la messianité et la résurrection de Jésus, constitue alors une secte particulière au sein du judaïsme dit du second Temple, beaucoup plus diversifié que ce qu'il deviendra après 70 sous l'impulsion du judaïsme pharisien, qui donnera le judaïsme rabbinique.

La croyance en Jésus-Christ est marquée dès ses débuts par la prédication de Paul de Tarse, l'« apôtre des gentils » qui ne connut pas le Jésus historique, mais à qui celui-ci serait apparu après sa résurrection.

La problématique du « Jésus terrestre » et des traditions qui en relèvent concerne les représentations théologiques du Jésus telles que conservées dans la littérature évangélique. Sans qu'il faille autant opposer symétriquement sur ce sujet recherche et tradition, les recherches sur le Jésus historique — qui relèvent, elles, de la modernité — ne sont accessibles qu'à travers les traditions du « Jésus terrestre »[4].

Néanmoins, « la question du Jésus historique s'efforce de discerner à travers les premières traditions sur le Jésus terrestre, les traces qui permettent d'approcher le Jésus de l'histoire. En revanche, interpréter les traditions du Jésus terrestre pour elles-mêmes, c'est rechercher comment les premières communautés chrétiennes ont formulé leur témoignage de foi au Jésus qui a vécu et qui est mort à Jérusalem  »[5].

La construction des dogmes chrétiens

Les plus anciens textes chrétiens sont les lettres de Paul de Tarse, dont sept sur les quatorze du Nouveau Testament sont aujourd'hui considérées comme authentiques et écrites entre 50 et 55[N 1]. Jésus y est présenté comme « Seigneur » investi de la puissance et du salut divins. Paul cependant ne discute pas de la nature divine ou humaine de Jésus. L'essentiel de la profession de foi de Paul, (on parle aussi de kérygme), est exprimée dans la Première épître aux Corinthiens. Elle repose sur l’affirmation du salut par un rédempteur divin, le Messie envoyé par Dieu pour racheter les péchés des hommes[6],[7].

Christ pantocrator, mosaïque de la Basilique Saint-Apollinaire-le-Neuf à Ravenne.
Les trois doigts joints symbolisent la Trinité, les deux doigts levés la double nature humaine et divine[8].

Dans les trois évangiles synoptiques, Jésus est désigné alternativement comme messie, Fils de l'homme ou Fils de Dieu. Il s'agit de dénominations juives qui seront réinterprétées par la tradition chrétienne. Le terme de messie, que le Jésus historique semble avoir rejeté désigne dans les prophéties d'Isaïe le serviteur souffrant annonçant le Royaume de Dieu. Le Fils de l'homme, dans le Livre de Daniel, était la personnification du peuple élu dans sa pureté initiale exempte de péchés. L'appellation « Fils de Dieu », qui sera le fondement de la doctrine de la Trinité chrétienne, était un titre des souverains hellénistiques, et pour les juifs celui du messie en tant que roi d'Israël.

L'idée de la divinité de Jésus apparaît clairement à la fin du Ier siècle, dans les textes que la tradition chrétienne attribuera à l'apôtre Jean (écrits dits johanniques : l'évangile de Jean qui fait de Jésus le « Verbe de Dieu », les trois Épîtres de Jean et l'Apocalypse), ainsi que dans des lettres attribuées à Paul de Tarse, et qui sont aujourd'hui considérées comme des pseudépigraphies plus tardives : épître aux Colossiens et épître aux Éphésiens, qui affirment la préexistence du Christ, « image du Dieu invisible », en faisant l'incarnation de Dieu.

Les différents rédacteurs du dogme d'une lente orthodoxie qui se construira au fil de différents conciles fondent leurs réflexions sur les textes de l'Ancien Testament et de certains évangiles, présentés dans une articulation cohérente, dont les différentes parties se complètent. Ce sera durant plusieurs siècles l'émergence et l'alternance d'opinions diverses qui se confronteront à travers les différents conciles convoqués par les empereurs romains[N 2] en vue de formuler la foi de l'Église avec une précision de plus en plus rigoureuse.

Les premiers conciles de Nicée en 325 et de Constantinople en 381 aboutiront au « Symbole de Nicée », credo qui définit ainsi la croyance orthodoxe en Jésus-Christ :

« Nous croyons en un seul Seigneur, Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles, Lumière issue de la Lumière, vrai Dieu issu du vrai Dieu, engendré et non créé, consubstantiel au Père et par qui tout a été fait ; qui pour nous les hommes et pour notre salut, est descendu des cieux et s'est incarné du Saint-Esprit et de la vierge Marie et s'est fait homme. Il a été crucifié pour nous sous Ponce-Pilate, il a souffert et il a été mis au tombeau ; il est ressuscité des morts le troisième jour, conformément aux Écritures ; il est monté au Ciel où il siège à la droite du Père. De là, il reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts, et son règne n'aura pas de fin. »

Ce credo s'opposait en particulier à l'arianisme, qui professait une absence de consubstantialité[9] ; mais il rappelait plus généralement ce qui était considéré comme hérésies, par rapport aux différentes conceptions de la divinité du Christ.

Le Messie Rédempteur

Articles détaillés : Messie et Christologie de Paul.
Statue du Christ Rédempteur de Rio de Janeiro

Le Messie (de l'hébreu מָשִׁיחַmashia'h) désigne dans le judaïsme l'oint, c'est-à-dire la personne consacrée par le rituel de l'onction, réalisée par un prophète de Dieu. Christ est une traduction littérale de mashia'h utilisée dans la Septante.

La croyance chrétienne en Christ s'écarte cependant de la compréhension du Messie dans le judaïsme.

Elle donne une place centrale à la Résurrection ; Paul de Tarse affirme ainsi dans l'épître aux Corinthiens : « Si Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est vide et vide aussi votre foi »[N 3].

Le Christ est pour le christianisme le Rédempteur divin, le Messie envoyé par Dieu dont la mort sacrificielle doit racheter les péchés des hommes[7].

Il existe cependant d'autres interprétations de la mission rédemptrice du Christ, comme celle du philosophe René Girard dans son ouvrage Des choses cachées depuis la fondation du monde. Selon cet auteur, Jésus n'était nullement obligé de se faire tuer ou crucifier pour racheter les péchés des hommes. Jésus ne s'est pas incarné pour racheter l'humanité sur une croix mais pour annoncer une parole évangélique non-violente destinée à transformer, transfigurer le monde. Que Jésus se soit laissé condamner et crucifier résulte du fait qu'il a respecté lui-même jusqu'au bout l'impératif de non-violence qu'il s'est fixé, alors que ses adversaires ne l'ont pas respecté et se sont laissés influencer par Satan, principe violent. Mais par sa résurrection, Jésus a tout de même vaincu Satan et la mort, et cela toujours de manière non-violente.

Nature humaine et nature divine

Article détaillé : Logos (Christianisme).

L'un des principes les plus importants de la foi juive, est l'affirmation d'un et un seul Dieu, sans aucun intermédiaire, ni associé (shoutaf)[10], et la croyance en Jésus en tant que Divinité, partie de Divinité ou fils de Dieu est incompatible avec le judaïsme, de même que sa messianité ou sa prophétie[11],[12]. Les Juifs ayant partagé l'une ou plusieurs de ces croyances, dont naturellement l'Église primitive (les notsrim) puis les Ebionites et les Elkasaïtes, furent ostracisés par les Sages avec les Minéens (Voir le point de vue du judaïsme sur Jésus de Nazareth), encore que, sur ce sujet, il est loin d'être sûr que le judaïsme babylonien ait eu la même attitude que le judaïsme palestinien[13].

Souvent, dans les communautés chrétiennes des deux premiers siècles, la croyance en la divinité de Jésus ne s'est pas développée comme dans l'église de Rome, en particulier dans les communautés orientales et encore plus dans celles de l'espace perse. Certaines (ébionites et elkasaïtes), vont rester attachées à la transcendance du Dieu du judaïsme traditionnel, et à l'humanité de Jésus. D'autres au contraire comme les marcionites, montanistes vont exalter la divinité de Jésus, et rejeter le corps et la matière. Certaines communautés inspirées par la démarche gnostique suivront la même voie, ce que ne feront pas notamment, les Judéo-chrétiens.

Ignace d'Antioche (35-107) insiste sur la réalité de la vie terrestre de Jésus. Justin de Naplouse (105-135) recourt au terme logos, emprunté à la philosophie grecque, qui signifie la raison divine qui pénètre et gouverne le monde. Origène (185-254) essaie de comprendre comment la nature humaine s'unit à la nature divine en Jésus. Pour lui, Jésus ne peut être vraiment homme sans âme humaine; la nature divine ne pouvait s'unir directement avec le corps.

Enfin, ce qui deviendra le christianisme majoritaire de la « Grande Église » va tenir une sorte de voie moyenne, qui débouchera sur le concept de Trinité chrétienne.

La thèse d'une nature purement divine : des gnosticismes au monophysisme

Les gnosticismes chrétiens considèrent qu'il existe une nature bonne (divine ou créée par Dieu) et une mauvaise (terrestre, et/ou créée par un démiurge), non miscibles et en conflit. Ils se distinguent en cela du christianisme majoritaire qui estime que Dieu est l'unique créateur, et que tout ce qu'il a créé est d'une nature bonne ; et qu'il n'y a pas de distinction à faire entre une nature divine et une nature charnelle.
Pour les gnostiques, la réalité de l'existence de Jésus parait secondaire par rapport à la signification qu'on lui prête. Il y existe une réflexion profonde sur la personnalité de celui qu'ils nomment le Sauveur qui reste fondamentalement étranger au monde. On retrouve ainsi ce thème : Le Sauveur descend sur terre pour le salut des hommes et à son tour, il assume, pour un temps leur destinée. Non dans le but de donner un sens au monde, à la souffrance ici-bas, mais pour délivrer les parcelles lumineuses qui s'y sont dévoyées[14]. Parmi ces courants gnostiques, on trouve le docétisme aux IIe et IIIe siècles qui considère que l'humanité de Jésus n'est qu'une apparence, ce qui implique notamment que la mort sur la croix était une illusion. Sa postérité se retrouvera, plus tard, dans la pensée de Eutychès (378-453) dont se réclameront plusieurs églises monophysites.

Pour Marcion également, Jésus-Christ est la manifestation visible de Dieu avec un corps qui n'est pas fait de chair et de sang, un corps subtil, à travers lequel Dieu, pure transcendance, se manifeste à l'improviste sur le Jourdain. Marcion s'inscrit ainsi dans une radicalisation de la pensée paulinienne, en rupture totale avec le judaïsme, et ne dit mot de tout ce qui a trait à l'enfance de Jésus, de son baptême ou de ses racines juives[15]. Le marcionisme, issu de la rupture de Marcion en 144 d'avec le presbyterium de Rome, verra des Églises fleurir un peu partout en Orient pendant tout le IIIe siècle, prônant une forte exigence morale, l'ascèse et le mépris du corps. Ce sera contre lui que s'élabora la réflexion théologique des Pères de l'Église, le nombre considérable de traités antimarcionniques en témoigne.

Le monophysisme, apparu au Ve siècle dans les écoles théologiques de l'empire byzantin, considère que la nature divine du Christ éclipse de fait sa nature humaine. Contre la reconnaissance de la consubstantialité du Père et du Fils, et de la nature humaine du Christ, les monophysites affirment que le Fils n'a qu'une seule nature et qu'elle est divine, cette dernière ayant absorbé sa nature humaine. Les monophysites s'opposent en cela également au nestorianisme. Le christianisme majoritaire souligne que l'union de ces natures n'a pas supprimé leur différence, et donc que Jésus est véritablement et pleinement un homme. Le monophysisme est encore professé aujourd'hui, dans sa variante miaphysite. Ce sont les Églises préchalcédoniennes (arménienne, syro-jacobite, copte, etc.).

Une nature différente de celle de Dieu  : arianisme et unitariens

Article détaillé : Unitarisme (théologie).

L'arianisme est issu des prêches d'Arius à partir de 312. Son point central est la nature de la relation entre Jésus et son Père du ciel et des positions respectives des concepts de « Dieu le père et de son fils Jésus ». L'arianisme, tentant de résoudre le problème entre éternel et contingent, défend la position que la divinité du Très-Haut est supérieure à celle de son fils fait homme. Les ariens adoptent le subordinatianisme, selon lequel Jésus-Christ est créé mais n'est pas de la même substance que Dieu, lequel est incréé et intemporel. Les ariens professent donc une absence de consubstantialité[9] : si le Fils témoigne de Dieu, il n'est pas Dieu, si le Fils a une position divine, elle est de moindre importance que celle de Dieu Lui-même. Le christianisme majoritaire soulignera en réponse, dans le Symbole de Nicée, que « Jésus-Christ [est] de même nature que le Père », c'est-à-dire qu'en la personne de Jésus, c'est bien un nouvel aspect de la réalité divine qui a été révélé : que « Dieu se fait homme pour que l'homme se fasse dieu ».

Le baptême du Christ

Pour l'adoptianisme, Dieu adopte l'homme Jésus comme Fils, seulement lors de son baptême. Cette christologie s'appuie sur une version de Luc 3, 22, présente dans certains manuscrits, qui cite le psaume 2, 7 : « Tu es mon Fils, moi aujourd'hui, je t'ai engendré », au lieu de « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi j'ai mis toute mon affection ».

Une double nature : nestorianisme et vision trinitaire

Article détaillé : Trinité chrétienne.

Le nestorianisme, né au Ve siècle de la controverse entre le patriarche de Constantinople, Nestorius et celui d'Alexandrie, Cyrille, considère qu'il y a eu une superposition en Jésus de deux personnes distinctes, l'une divine et l'autre humaine.

Le christianisme majoritaire souligne qu'il n'y a pas de distinction, que Jésus est à la fois « vrai homme et vrai Dieu », et donc que c'est bien dans le Jésus de Nazareth historique que le christianisme reconnaît le Fils de la Trinité. Le débat au Concile d'Éphèse a porté sur la désignation de Marie, qui n'a pas seulement donné naissance au Jésus historique, mais peut être qualifiée de « Mère de Dieu » ; au titre de cette maternité spirituelle elle est invoquée par les mystiques chrétiens qui veulent que le « Christ soit complètement formé en eux[N 4]». Le nestorianisme est représenté aujourd'hui au Moyen-Orient dans les Églises des deux conciles.

Dogmes issus des sept conciles

Article détaillé : Concile œcuménique.
Icône représentant le Christ dans une église orthodoxe.

À partir du IVe siècle et jusqu'au VIIIe siècle, sept conciles sont appelés « œcuméniques » parce que tous les évêques y avaient été convoqués, même si peu d'évêques latins ou occidentaux participèrent aux cinq premiers d'entre eux. Tous les conciles œcuméniques n'ont pas la même importance doctrinale ; certains sont à l'origine des premières déchirures de l'Église[non neutre]. Les quatre premiers conciles, qui font la quasi-unanimité parmi les chrétiens[non neutre], sont essentiellement centrés sur la doctrine du Christ[pas clair] [16]. Aucun d'entre eux ne fera toutefois consensus à son époque et au-delà, et la diversité des courants chrétiens restera importante[17].

On peut résumer, de façon schématique, l'évolution dans la formulation des courants dogmatiques dominants de la manière suivante :

  • étant ce Sauveur qui déifie, le Christ est lui-même Dieu, consubstantiel à Dieu : c'est la définition du Concile de Nicée (325), qui s'oppose à la christologie d'Arius ;
  • il est homme total, consubstantiel à chacun de nous, c'est la définition du Concile de Constantinople (381), qui s'oppose à la christologie d' Apollinaire ;
  • homme et Dieu, il est pourtant être un, et non pas divisé, c'est la définition du Concile d'Éphèse (431), qui s'oppose à la christologie de Nestorius ;
  • il reste « deux » tout de même, homme et Dieu, sans confusion ou absorption, c'est la définition du Concile de Chalcédoine (451), s'opposant à la christologie d'Eutychès.

Les catholiques, les orthodoxes des Églises des sept conciles célèbrent Jésus-Christ comme étant à la fois vrai homme et vrai Dieu, deuxième personne de la Trinité.

Pour les christianismes orientaux, la christologie est parfois un peu différente et la situation est assez complexe selon le nombre de conciles que ces Églises reconnaissent :

Toutes ces Églises orientales et l'Église catholique reconnaissent les conciles de Nicée et de Constantinople, et le Credo, ou profession de foi trinitaire, qui en est issu. Les Églises appartenant au Conseil œcuménique des Églises reconnaissent également la Trinité.

Les Églises protestantes européennes le confessent de même, tout en reconnaissant la liberté de conscience à leurs fidèles ; elles présentent donc des conceptions diverses et, même quand la formulation semble identique à celle des christianismes catholique et orthodoxe — qui disposent d’un large corpus dogmatique et d’une structure hiérarchique chargée de le maintenir et de l’enseigner —, il faut tenir compte du fait que le sens donné aux expressions n’exprime pas rigoureusement le même point de vue.

Les unitariens n'acceptent pas le dogme de la Trinité. Ils se réclament d'un monothéisme strict, en ce sens qu'ils ne conçoivent pas de trinité. On trouve des unitariens dans diverses Églises protestantes ou issues du protestantisme : libéralisme théologique du protestantisme libéral et Témoins de Jéhovah. Pour les mormons, par contre, Jésus-Christ est Jéhovah[18] et un personnage distinct du Père.

L'envoyé de Dieu

Si pour le christianisme, le Christ est l'unique Messie, d'autres religions, sans le considérer comme tel, le reconnaissent pour un envoyé de Dieu, un prophète ayant comme d'autres avant et après lui reçu une révélation divine.

Islam

Article détaillé : Îsâ.
Mahomet et les prophètes de l'islam, dont Abraham, Moïse et Jésus.

Dans le Coran, Îsâ apparait comme un prophète, annonciateur de Mahomet, qui prêche le monothéisme pur, accomplit des miracles, opère des guérisons, ressuscite les morts et « connaît les secrets du cœur ». Ibn Arabi lui confère le titre de « sceau de la sainteté », « le plus grand témoin par le cœur », tandis que Mahomet est le « sceau des prophètes », « le plus grand témoin par la langue[19] ».

La représentation de Îsâ dans le Coran lui confère également une dimension eschatologique[20],[21] : son retour sur terre, en tant que musulman, est le signe de la fin du monde et du Jugement dernier tandis que beaucoup de hadiths le présentent comme le principal compagnon du Mahdi, Sauveur de la fin des temps[N 5].

On trouve dans le Coran quatre négations catégoriques concernant Îsâ, par crainte d'associationnisme (shirk)[19] : il n'est ni Dieu, ni son fils, ni le troisième d'une triade[22] — la Trinité étant interprétée par les musulmans comme un signe de polythéisme —, pas plus qu'il n'a été crucifié[N 6] car cela aurait été « indigne » d'un prophète de son importance[19].

Manichéisme

Le manichéisme, considérant que d'une part Dieu et le Bien et d'autre part le Monde et le Mal sont radicalement séparés, ne peut admettre un Jésus qui soit à la fois Dieu et homme. Contre cette séparation, Irénée de Lyon (120-140) affirme que Dieu veut partager sa vie avec l'homme et que par conséquent la nature de l'homme n'est pas opposée mais volontairement adaptée à celle de Dieu et que tout cela est récapitulé en Jésus, Dieu et homme.

Le modèle christique

Comme « fondateur » de religion, la figure du Christ fut un modèle pour les chrétiens.

Une œuvre comme L'imitation de Jésus-Christ, recueil d'aphorismes de la fin du XIVe siècle, alimenta la dévotion et la prière de nombreuses générations de chrétiens, surtout des laïcs, qui cherchaient dans leur vie quotidienne à vivre en respectant les préceptes du Christ (d'où son titre)[23]. Elle commence par ces mots :

« “Celui qui me suit ne marche pas dans les ténèbres[N 7]”, dit le Seigneur. Ce sont les paroles de Jésus-Christ, par lesquelles il nous exhorte à imiter sa conduite et sa vie, si nous voulons être vraiment éclairés et délivrés de tout aveuglement du cœur ».

L’Imitation eut un succès qui ne se démentit pas pendant des siècles. En 1450, il en existait plus de deux cent cinquante manuscrits. Il était au XIXe siècle une référence pour les catholiques et eut une grande influence sur Sainte Thérèse de Lisieux[23]. De nouvelles éditions sortent encore régulièrement.

Notes et références

Notes

  1. Dans l'ordre chronologique, la Première épître aux Thessaloniciens, la Première épître aux Corinthiens, l'Épître aux Galates, l'Épître aux Philippiens, l'Épître à Philémon, la Seconde épître aux Corinthiens, l'Épître aux Romains.
  2. Jusqu'à Théodose II.
  3. Première épître aux Corinthiens, 15;14
  4. Ga 4. 19.
  5. « Sur le Mahdi, les traditions sunnites et chiites divergent, les chiites n'attendant que son retour — Imam caché — tandis que pour les sunnites, il ne naîtra que près de la fin des temps ».
  6. La Sourate 4,157 dit : « […] et à cause leur parole : “Nous avons vraiment tué le Christ, Jésus, fils de Marie, le Messager d'Allah”... Or, ils ne l'ont ni tué ni crucifié ; mais ce n'était qu'un faux semblant ! Et ceux qui ont discuté sur son sujet sont vraiment dans l'incertitude : ils n'en ont aucune connaissance certaine, ils ne font que suivre des conjectures et ils ne l'ont certainement pas tué. »
  7. Jn 8, 12.

Références

  1. Jean-Marie Pierret, Phonétique historique du français et notions de phonétique générale, Peeters, Louvain-la-Neuve, 1994, p. 103.
  2. Pierre Geoltrain, « Les origines du Christianisme : comment en écrire l'histoire », in Aux origines du christianisme, éd. Gallimard/Le Monde de la Bible, 2000, p. XVII, et Michel Quesnel, « Jésus et le Témoignage des évangiles », in Aux origines du christianisme, éd. Gallimard/Le Monde de la Bible, 2000, p. 205, article en ligne.
  3. Pierre Geoltrain, « Les origines du Christianisme : comment en écrire l'histoire », in Aux origines du christianisme, éd. Gallimard/Le Monde de la Bible, 2000, p. XVII.
  4. Jean Zumstein, « Jésus terrestre dans l'Évangile de Jean », in Daniel Marguerat et alii, Jésus de Nazareth : nouvelles approches d'une énigme , éd. Labor et Fides, 1998, p. 459 et suiv., extraits en ligne
  5. Jean Zumstein, op. cit., p. 461, extraits en ligne
  6. Hyam Maccoby, Paul et l’invention du christianisme, p. 266 
  7. a et b Mircea Eliade, Histoire des croyances et idées religieuses, Tome II, p. 331-332 
  8. François Vouga et Jean-François Favre, Pâques ou rien : La Résurrection au cœur du Nouveau Testament, p. 297 (lire en ligne).
  9. a et b Annick Martin, « Le fulgurant succès d'Arius », in Les premiers temps de l'Église, éd. Gallimard/Le Monde de la Bible, 2004, p. 690-698
  10. Devarim ; Deutéronome 6:4
  11. « Pour un Juif, toutefois, n'importe quel forme de shitouf (croyance en d'autres dieux en plus du Dieu d'Israël) équivaut à une idolâtrie dans le plein sens du terme. Il n'est pas possible pour un Juif d'accepter Jésus comme une divinité, un médiateur ou un sauveur (messie), ou même comme un prophète, sans trahir le judaïsme. » ((en) Schochet, Rabbi J. Immanuel, « Judaism has no place for those who betray their roots », Canadian Jewish News, 29 juillet 1999).
  12. « Pendant deux mille ans, un vœu central du christianisme a été d'être un objet de désir de la part des Juifs, dont la conversion aurait montré leur acceptation du fait que Jésus remplit leur propre prophétie biblique. » ((en) Susannah Heschel, « Jewish Views of Jesus », in Gregory A. Barker (dir.), Jesus In The World's Faiths: Leading Thinkers From Five Faiths Reflect On His Meaning, Orbis Books, 2005, p. 149 (ISBN 1-57075-573-6).
  13. Simon Claude Mimouni, Les chrétiens d'origine juive dans l'antiquité, Ed. Albin Michel, Paris, 2004, p. 202.
  14. Madeleine Scopello, Les gnostiques, éd. Cerf/Fides, coll. « Bref », 1991, p. 89
  15. Michel Tardieu, « Marcion et la rupture radicale », in Les premiers temps de l'Église, éd. Gallimard/Le Monde de la Bible, 2004, p. 401-407.
  16. Sfeir, Antoine (s. dir.), Atlas des religions p44-45
  17. cf. pour la diversité des courants du christianisme, cf. toute histoire récente du christianisme, par ex. Jean-Robert Armogathe, Histoire générale du christianisme, éd. Quadrige/P.U.F., 2010. On peut se référer également à l'ouvrage classique d'Adolf von Harnak, Histoire des dogmes, rééd. Cerf, 1993, présentation en ligne
  18. Doctrine et Alliances 110:3–4
  19. a, b et c Marie-Thérèse Urvoy, article « Jésus » in M. Ali Amir-Moezzi (dir.) Dictionnaire du Coran, éd. Robert Laffont, 2007, p. 440
  20. « Y aura-t-il ou non un personnage surnommé “al-Mahdî” avant le retour de Jésus fils de Marie ? », La Maison de l'islam, 14 décembre 2008.
  21. Marie-Thérèse Urvoy, article « Jésus » in M. Ali Amir-Moezzi (dir.) Dictionnaire du Coran, éd. Robert Laffont, 2007, p. 439, 441.
  22. « Le Coran dit-il que la Trinité chrétienne est “Père, Mère, Fils” ? », La Maison de l'islam, 5 décembre 2008.
  23. a et b Sr Cécile Rastoin, « Brian McNeil. De “L'Imitation de Jésus-Christ” », Esprit & Vie, no 78, mars 2003, 2e quinzaine, p. 32-33.

Bibliographie

Article détaillé : Bibliographie de la christologie.
Ouvrages
  • Rudolf Bultmann, Jésus. Mythologie et démythologisation (1926 et 1958), Seuil, 1968
  • René Girard, Des choses cachées depuis la fondation du monde, Paris: Grasset, 1978.
  • Aloys Grillmeier, Le Christ dans la tradition chrétienne traductions françaises de Sœur Pascale-Dominique Nau, OP, Tome I: De l’âge apostolique à Chalcédoine. 2e édition française Paris, Cerf, 2003 [coll. Cogiatio fidei 230]; Tome II-1: Le Concile de Chalcédoine (451). Réception et opposition. Paris, Cerf, 1990 [coll. Cogiatio fidei 154]; Tome II-2: L’Église de Constantinople au VIe siècle. Paris, Cerf, 1993 [coll. Cogitatio fidei 172]; Tome II-4: L'Eglise d'Alexandrie, la Nubie et l'Éthiopie après 451. Paris, Cerf 1996 [coll. Cogitatio fidei 192].
  • Brian McNeil De « L'Imitation de Jésus-Christ » Cerf, 2002 [1]
  • Charles Perrot, Jésus, éd. P.u.f, coll. « Que Sais-je ? » no 3300, 1998
  • Charles Perrot, Jésus, Christ et Seigneur des premiers chrétiens, éd. Desclée de Brouwer, Paris, 1997
  • Joseph Ratzinger, (Benoît XVI), Jésus de Nazareth : De Nazareth à Jérusalem, éd. du Rocher, 2011 (ISBN 978-2-268-07079-7)
  • Guy Tilliette, p.s.s., Jésus en ses mystères, Desclée
  • Xavier Tilliette, sj, Le Christ des philosophes : Du Maître de sagesse au divin Témoin, Culture et Vérité, Namur, 1993
  • Sfeir, Antoine (s. dir.), Atlas des religions, Plon-Mame, 1994 (ISBN 978-2-259-02693-2)
Revues
  • Que sait-on de Jésus ?, Le Monde de la Bible, hors-série printemps 2009, éd. Bayard
  • Christologie et histoire de Jésus, Recherches de science religieuse, tome 97, mars 2009
  • F. Baudin, « La figure de Jésus aujourd'hui », La Revue réformée, 1999, vol. 50, no202, pp. 71-94 [2] [3]

Articles connexes

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