Jean de Ligne

Jean de Ligne
Jean de Ligne
Jean de Ligne en tenue de chevalier de l'ordre de la Toison d'Or
Jean de Ligne en tenue de chevalier de l'ordre de la Toison d'Or

Pays LuikVlag.gif  Principauté de Liège
Flag - Low Countries - XVth Century.png  Pays-Bas espagnols
Titre Baron de Barbançon
Seigneur de Zuid-Polsbroek
Autre titre Comte d'Arenberg
Distinctions Chevalier de la Toison d'Or
Autres fonctions Stadhouder de Frise (1549-1568)
Stadhouder de Lingen (1551-1568)
Biographie
Dynastie 3e Maison d'Arenberg
(Maison de Ligne)
Naissance 1525
Décès 3 août 1568
Bataille de Heiligerlee
Père Louis de Ligne ( † vers 1559)
Mère Marie de Berghes (van Glymes (nl))
Conjoint Marguerite de La Marck-Arenberg
Enfants Charles (15501616)
Marguerite (15521611),
Robert (15641614),
Antonia Wilhelmine (15571626),

Jean de Ligne ( vers 1525, mort le 23 mai 1568 à la bataille de Heiligerlee), baron de Barbançon, comte d'Arenberg est un militaire et diplomate, au service de la Couronne d'Espagne, du XVIe siècle.

Sommaire

Biographie

Issu de l'ancienne Maison de Ligne (fief de la région de Tournai), famille d'ancienne noblesse du Saint-Empire, il fut armé chevalier de l'ordre de la Toison d'or en 1546 à Utrecht.

Jean de Ligne naquit, en 1525, de Louis, baron de Barbançon, et de Marie de Berghes, dame de Zevenberghe.

Sous Charles Quint

Il débuta dans la carrière des armes, en 1543, par le commandement dune compagnie de cavalerie (16 mai).

Au mois de janvier 1546, le chapitre de la Toison d'Or, tenu par Charles Quint à Utrecht, lélut chevalier de cet ordre illustre.

LEmpereur, résolu à faire la guerre aux protestants dAllemagne, ordonna, la même année, à Maximilien d'Egmont, comte de Buren et de Leerdam (nl), de lui amener en ce pays douze mille gens de pied et cinq mille chevaux ; dEgmont choisit Jean de Ligne pour lun de ses lieutenants. Le corps belge eut à surmonter bien des obstacles, à triompher de bien des périls, pour arriver à Ingolstadt, lEmpereur lattendait. Il y réussit, grâce à lhabileté de ses chefs et à la valeur des régiments dont il était composé. Il ne contribua pas peu aux succès de larmée impériale. Ce fut à lissue de cette expédition que Jean de Ligne sunit à Marguerite de La Marck (les deux familles détenaient des fiefs aux Pays-Bas espagnols et dans la principauté de Liège).

Il épousa le 18 octobre 1547 Marguerite de La Marck-Arenberg, sœur de Robert III de La Marck-Arenberg mort sans descendance en 1541. Il devint ainsi le curateur de la maison de La Marck-Arenberg. L'empereur l'éleva en 1549 au rang de comte du Saint-Empire, en tant que chef de la maison d'Arenberg.

Le 23 septembre 1548, Maximilien dEgmont mourut à Bruxelles. Charles Quint donna à Jean de Ligne les gouvernements de Frise, dOveryssel, de Groningue et de Drenthe que le défunt occupait (1er janvier 1549), ainsi que sa compagnie de cinquante hommes darmes et de cent archers dordonnances. Cétait remplir le vœu du grand capitaine quil venait de perdre: le comte de Buren faisait un cas particulier de Jean de Ligne ; il lappelait habituellement son frère darmes ; il lavait choisi pour être lun de ses exécuteurs testamentaires.

Cette année-, le prince Philippe, fils unique de lEmpereur, vint aux Pays-Bas, pour y être reçu des États et leur prêter serment comme leur futur souverain. Il se transporta, afin daccomplir ces formalités, dans les différentes provinces. Arrivé à Deventer, il fut inauguré par les états dOveryssel, la saison se trouva trop avancée pour quil poursuivît son voyage ; il chargea le comte dArenberg de le représenter dans les provinces de Frise, de Groningue et de Drenthe, et le revêtit à cet effet de ses pleins pouvoirs (31 octobre 1549).

LEmpereur, ayant acquis la terre et seigneurie de Lingen, qui appartenait à la succession du comte de Buren, en ajouta le gouvernement à ceux que Jean de Ligne avait déjà (septembre 1551).

Bientôt après, les Pays-Bas se virent assaillis par les Français : Henri II de France en personne entra dans le duché de Luxembourg. Le gouverneur de cette province, le comte de Mansfeld, en était éloigné en ce moment ; la reine Marie y envoya le comte dArenberg, pour en défendre le quartier allemand, en même temps quelle commettait au comte de Lalaing la défense du quartier wallon (mai 1552) ; mais, sur ces entrefaites, Mansfeld ayant pu revenir dans son gouvernement, elle donna à Jean de Ligne une autre destination. Elle soccupait de rassembler un corps de troupes pour renforcer larmée avec laquelle lEmpereur savançait vers le Rhin ; elle len nomma maréchal (4 août 1552), eu plaçant directement sous ses ordres une division de sept cents chevaux. Charles Quint, ayant mis le siège devant Metz, voulut avoir auprès de lui le comte dArenberg, à qui il confia un commandement important, et, jusquà la fin de la campagne, Jean de Ligne ne quitta point lEmpereur. Il prit part, à la tête dun régiment de « gens de pied », aux campagnes de 1553, 1554 et 1555.

Sous Philippe II

Lors de labdication de Charles Quint, les provinces de Frise, dOveryssel, de Groningue et de Lingen, alléguant leurs priviléges, ne voulurent pas députer aux États généraux en présence desquels eut lieu cette imposante cérémonie ; Charles commit le comte dArenberg pour faire, en son nom, la cession à son fils de ces quatre pays dans une assemblée solennelle des états de chacun deux (25 octobre 1555), et Philippe le délégua à leffet de recevoir le serment de fidélité des États de Lingen, qui ne le lui avaient pas prêté en 1549 (30 novembre 1555). Le nouveau souverain confirma Jean de Ligne dans les gouvernements dont son père lavait investi (30 novembre 1555 et 20 juillet 1556). Au mois de novembre 1556, il le chargea daller remettre au duc Henri de Brunswick le collier de lordre de la Toison d'Or, qui avait été conféré à ce prince, au chapitre dAnvers, le 28 janvier précédent.

Jean de Ligne fit les campagnes de 1557 et 1558 (11e Guerre d'Italie (1556-1559)) contre la France, ayant sous ses ordres, dans la première, mille chevaux, et un régiment de gens de pied bas allemands de trois mille têtes dans la seconde. Il assista à la bataille de Saint-Quentin, il donna de nouvelles marques de sa bravoure : il y commandait l'aile gauche de l'infanterie avec le duc de Brunswick lors de l'assaut final contre le connétable de Montmorency.

Au commencement de 1559, une diète impériale ayant été convoquée à Augsbourg, le roi le désigna pour y représenter le cercle de Bourgogne ; le 9 août de la même année, il lappela à remplir la charge considérable de « maréchal de lost », qui était vacante depuis la mort dAdrien de Croÿ, comte du Rœulx. Au moment il se disposait à quitter les Pays-Bas, Philippe, voulant reconnaître les services que les seigneurs belges lui avaient rendus dans les dernières guerres, accorda aux principaux dentre eux des gratifications qui devaient leur être payées après son retour en Espagne : le comte dArenberg fut compris dans cet acte de libéralité pour six mille écus.

Stathoudérat et Révolte des gueux

Le traité de Cateau-Cambrésis avait rendu la paix aux Pays-Bas ; Jean de Ligne en profita pour vouer tous ses soins aux provinces dont le gouvernement lui était confié. Il ne sen absenta plus guère que dans de rares occasions, comme au mois de février 1563, la duchesse de Parme lenvoya à Liège. Robert de Berghes avait annoncé lintention de résigner le siège épiscopal de cette ville ; la duchesse, désirant que le chapitre élût, à sa place, quelquun qui fût agréable au roi, jugea que le comte dArenberg serait plus propre que tout autre à y disposer les membres de ce corps. Lélection quils firent de Gérard de Groesbeek répondit à son attente.

Jean de Ligne avait été lun des tuteurs dAnne d'Egmont, fille du comte de Buren et de Leerdam (nl), première femme de Guillaume le Taciturne, prince d'Orange. Ses relations avec ce prince, sans avoir un caractère dintimité, étaient amicales ; il était intervenu, en 1557, au mariage de sa sœur Anne d'Egmont (1533-1558) avec le comte Guillaume IV van den Berghe (nl), il lui écrivait, en 1559, en France, il était allé en otage : « Je vous prie me faire part quelques fois de ce quy passe , et ne faudray de faire le mesme dissy[1]. » Cependant, lorsque Guillaume, Egmont et Hornes formèrent une ligue contre le cardinal de Granvelle, Jean de Ligne refusa dy entrer ; il déclara quil serait injuste à lui de se plaindre du gouvernement, dont il navait reçu que des faveurs, et, quant au cardinal, quil ne pouvait lui en vouloir, car il lui avait toujours fait plaisir dans les choses raisonnables quil avait demandées. Il en résulta une mésintelligence ouverte entre lui et les chefs de la ligue. Avec le prince d'Orange les choses en vinrent au point que ce prince réclama de lui plusieurs milliers de florins, prétendant quil en était resté redevable au comte de Buren pour des gageures perdues : à quoi il riposta en réclamant, à son tour, le remboursement des dépenses quil avait faites au temps de la tutelle de la première femme du prince. Il répondit aussi au comte dEgmont, qui lui faisait des reproches sur ce que leurs projets sétaient ébruités, que, si leurs plans étaient connus, ils ne devaient sen prendre quà eux-mêmes, qui ne parlaient jamais dautre chose.

Un des objets que Philippe II avait le plus à cœur était lérection des nouveaux évêchés quil avait obtenue du pape Paul IV. Trois de ces évêchés (évêché de Leeuwarden (nl), évêché de Deventer (nl), évêché de Groningue (nl)) avaient leur siège dans les provinces placées sous lautorité du comte dArenberg. Il employa tous les moyens qui étaient en son pouvoir afin de persuader les états de recevoir les prélats que le roi y avait nommés, mais il ny put parvenir. Le tableau fait à la duchesse de Parme, dans un écrit du mois de juillet 1565, de la situation des choses dans ses gouvernements explique cette opposition des états, lesquels y étaient encouragés, dailleurs, par lexemple de ce qui se passait en Brabant et en Gueldre : « Le faict de la saincte foy et religiony est-il ditne va pas trop bien aux pays de Frise, Overyssel et Groningue, ains y croît le mal de plus en plus, en pluralité et diversité de sectes et hérésies, principalement en la ville du Dam et de Groeningue, aussy ès villes et plat pays dOveryssel, et ce à loccasion des voisins, des alliances, escolles et conversations que les estrangers, à cause du commerce, ont nécessairement audict pays, et réciproquement ceulx du mesme pays avec lesdicts estrangers, aussy pour ce que les curez y preschent aujourdhui plus librement que à laccostumée, etc., etc. »

Appelé à Bruxelles par la duchesse de Parme, avec les autres gouverneurs et chevaliers de lordre, quand elle apprit que les confédérés sy étaient donné rendez-vous pour lui présenter des remontrances, Jean de Ligne assista aux délibérations qui eurent lieu dans les derniers jours de mars 1566 et le mois suivant, sous la présidence de la gouvernante. Il sy prononça pour labolition de linquisition et la modération des placards ; mais il ne fut pas de lavis du prince dOrange, des comtes dEgmont et de Hornes et de leurs adhérents quant à lassemblée des États généraux et à la suprématie à attribuer au conseil d'État sur les conseils privé et des finances : il trouva que la réunion des états produirait plus de mal que de bien, et la concentration des affaires dans les mains du conseil dÉtat lui parut de nature à les embarrasser, au lieu den accélérer lexpédition. Il vota, du reste, pour lenvoi du marquis de Berghes et du baron de Montigny au roi, afin de lui faire connaître létat du pays et le solliciter dy venir. Après les saccagements du mois daoût, qui avaient glacé de terreur la gouvernante, il lassura quelle pouvait compter sur lui, quil ferait tout ce quelle lui commanderait.

Cependant le compromis, la présentation de la requête, les concessions que le gouvernement sétait vu obligé de faire aux confédérés, avaient eu leur contrecoup dans les provinces de son gouvernement[2] : les nouvelles doctrines religieuses sy étaient propagées avec rapidité, grâce surtout aux prédicateurs qui y étaient accourus de Lübeck, de Brême et dautres lieux de lAllemagne ; en beaucoup dendroits lexercice du culte catholique se trouvait suspendu, les églises étaient fermées ou converties en temples protestants, les ministres zwingliens baptisaient et mariaient ; une partie des curés, cédant au torrent, ne disaient plus la messe, et ils chantaient des psaumes en leur langue maternelle ; des églises et des monastères enfin avaient été livrés au pillage. Ces désordres, et limpuissance il était dy remédier, navraient de douleur Jean de Ligne ; il était choqué particulièrement de ce que les bourgeois de Leeuwaerden se montraient chaque jour en armes, avec fifres et tambourins, et tirant des coups darquebuse et de pistolet, jusquauprès du château il tenait sa résidence: « Je puis asseurer V.A.écrivait-il à la duchesse de Parme, que ne pourroy aucunement porter au cœur ces façons de faire tant téméraires et outrecuydées, ni endurer telles approches et dommageables à ladicte maison..... Et nest à dire, Madame, le regret et le desplaisir que ce mest de veoir les choses en ces termes, et que ne me reste aultre moyen de remédier à lung et laultre comme désireroy bien[3]..... » Il avait pourtant, à son retour de Bruxelles à Leeuwaerden, fait preuve dénergie : les bourgmestres lui ayant présenté deux aimes de vin pour sa bienvenue, il les avait refusées, leur disant que, tant quils nauraient pas remis les églises et le service divin en leur premier état, « il ne vouloit estre en leur compaignie, ni avoir hantise et conversation avec eulx[4]. »

Le 16 octobre, il alla trouver au Loo, sur la Veluwe, le comte de Meghem, gouverneur de Gueldre et de Zutphen, pour se concerter avec lui : tous deux furent davis que la faiblesse de ladministration avait été cause du mal qui était arrivé, et ils demandèrent à la duchesse de Parme de les autoriser à lever chacun quinze enseignes dinfanterie et six cents chevaux ; avec ces forces ils se flattaient de rétablir lautorité des lois dans leurs gouvernements. Marguerite dAutriche leur répondit (23 octobre) que largent lui manquait ; elle les engagea à temporiser, à user de remontrances, dexhortations, de prières. Quand le roi eut mis quelques ressources à sa disposition, elle fit savoir à dArenberg quil pouvait lever quatre enseignes de gens de pied de deux cents têtes chacune (19 novembre) ; plus tard, sur les ordres quelle reçut de son frère, elle lautorisa à rassembler quinze cents hommes répartis sous cinq enseignes (22 décembre).

DArenberg avait, au commencement doctobre, quitté Leeuwaerden, ses ordres nétaient plus respectés; il sétait retiré à Hasselt, puis à Lingen : il se disposa à y retourner, dès quil eut réuni des forces suffisantes. Il se rendit dabord à Zwoll (26 décembre): dans cette ville dOveryssel des prêches avaient eu lieu, mais il ny avait été commis aucune violence contre les lieux sacrés; en promettant aux magistrats loubli de ce qui sétait passé, il les détermina à remettre deux-mêmes en son ancien état lexercice du culte catholique. De Zwoll il alla sétablir à Bergum, à une lieue de Leeuwaerden, il commanda à ses capitaines de venir le joindre avec leurs gens (6 janvier 1567). il reçut une députation des bourgmestres de Leeuwaerden, chargée de le supplier dentendre à quelque accord au moyen duquel ils pussent conserver la nouvelle religion en concurrence avec lancienne : il rejeta cette demande, et exigea que les prédicateurs luthériens se retirassent de la ville et de sa juridiction ; que le répositoire du Saint sacrement, ainsi que les autels, images, ornements, joyaux et toutes autres choses appartenant à léglise, qui avaient été ôtées ou rompues, fussent restitués et réparés ; que le service divin fût rétabli en toutes les églises avec les cérémonies pratiquées dancienneté, de manière quil ne subsistât rien des nouveautés qui avaient été introduites en matière de religion ; enfin que les bourgeois déposassent au château leur artillerie et leurs munitions de guerre : moyennant laccomplissement de ces conditions, il leur donna lassurance, par un acte signé de sa main, sous le bon plaisir toutefois de la gouvernante, quil ne chargerait pas les bourgeois de gens de guerre, ne mettrait pas garnison dans la ville, et ne sy ferait accompagner que de sa maison et de sa garde de cinquante chevaux ; il les assura encore que personne ne serait recherché, appréhendé ni endommagé en corps ni en biens, à raison des troubles passés (15 janvier). Le 20 janvier, il entra dans la ville, laissant ses cinq enseignes dinfanterie à Bergum. Quelques jours après, le secrétaire de Brederode, Ylpendam, ne craignit pas de se présenter à Leeuwaerden, pour y ranimer le zèle des partisans de la confédération ; il le fit arrêter (31 janvier) et enfermer au château, il le retint, malgré ses protestations et celles de son maître. La duchesse de Parme navait pas approuvé lacte du 15 janvier : il négocia avec les bourgmestres pour en obtenir la modification, et, sur leur refus, il le révoqua et fit occuper la ville par deux de ses compagnies (3 mars); il en mit deux autres en garnison à Sneeck, et la cinquième à Sloten. Groningue et Deventer furent plus difficiles à réduire ; ce fut seulement après que Noircarmes fut arrivé en Hollande avec plusieurs régiments, que Brederode eut été chassé de Vianen et forcé de senfuir dAmsterdam, que dArenberg les amena à se soumettre aux volontés du roi et de la gouvernante. Le 7 juin, il occupa Groningue avec quatre enseignes de hauts Allemands. Les magistrats de Deventer alléguaient que, sils avaient toléré lexercice de la nouvelle religion, ils ne lavaient fait que pour maintenir la paix publique ; que, dans leur ville, les autels, images et autres choses sacrées étaient restés intacts, que leurs bourgeois navaient pris part à aucune confédération, ligue ou alliance : à la faveur de ces raisons, ils demandaient, avec de vives instances, quon ne les obligeât pas à recevoir des gens de guerre ; il intercéda pour eux, et la gouvernante consentit quils en fussent exemptés, à certaines conditions. Lautorité royale et lancienne religion se trouvèrent ainsi rétablies, sans effusion de sang, dans les provinces de Frise, dOveryssel et de Groningue : car lexemple que les villes capitales avaient donné, les villes secondaires et le plat pays ne tardèrent pas à le suivre.

Un historien hollandais attribue ces résultats « à la réputation que le comte dArenberg avait dêtre doux et porté à la clémence[5] » ; il faut en faire honneur aussi à son esprit de justice : lorsquil fut entré dans Groningue, la duchesse de Parme lui ordonna de désarmer les habitants dont on avait eu à se plaindre durant les troubles, en laissant les armes aux mains de ceux qui sétaient bien conduits ; il répondit à la gouvernante que désarmer les uns sans désarmer les autres serait causer des dissensions et des haines entre les bourgeois ; que, par ce motif, il ne croyait pas devoir le faire, comme il navait pas fait de différence entre les bons et les mauvais dans la répartition des logements militaires[6].

Prémices de la guerre de Quatre-Vingts Ans

Il partit pour Bruxelles au mois de juin. Le roi avait ordonné quil remplît sa charge de maréchal de lost dans larmée que Fernando Álvarez de Toledo y Pimentel, duc d'Albe, menait aux Pays-Bas ; il alla au-devant du duc jusquà Arlon (8 août 1567), et laccompagna à Namur, à Louvain, à Bruxelles. Il était présent, le 9 septembre, au conseil à lissue duquel les comtes dEgmont et de Hornes furent arrêtés ; il se joignit à Mansfeld et à Berlaymont, pour réclamer contre cette arrestation qui portait atteinte aux immunités des chevaliers de la Toison d'Or. Le mois suivant, Charles IX, que Louis Ier de Bourbon, prince de Condé avait failli surprendre à Meaux, ayant demandé du secours au duc dAlbe et à la duchesse de Parme, ils résolurent de lui envoyer le comte dArenberg avec quinze cents chevaux. Le comte, que le marquis de Villars vint rencontrer entre Cambrai et Beauvais, pour le conduire vers le roi de France, arriva à Paris à la fin de novembre. Dans lintervalle, les huguenots avaient été battus près de Saint-Denis ; la cour navait plus besoin du corps auxiliaire qui lui était venu de Bruxelles. Charles IX, en le renvoyant, témoigna à ceux qui le commandaient, et au comte dArenberg en particulier, sa satisfaction et sa bienveillance.

Jean de Ligne
La bataille de Heiligerlee, où Jean de Ligne trouva la mort.
La bataille de Heiligerlee, Jean de Ligne trouva la mort.

Surnom Jean de Barbançon
Naissance 1525
Décès 3 août 1568 (à 43 ans)
Bataille de Heiligerlee
Mort au combat
Origine LuikVlag.gif  Principauté de Liège
Flag - Low Countries - XVth Century.png  Pays-Bas espagnols
Allégeance Empire espagnol Empire espagnol
Arme Cavalerie
Infanterie
Grade Maréchal (1552)
« Maréchal de lost » (1559)
Années de service 1543 - 1568
Conflits Ligue de Smalkalde
11e Guerre d'Italie
Révolte des gueux
Guerre de Quatre-Vingts Ans
Commandement Compagnie de cinquante hommes darmes et de cent archers dordonnances (1549)
Division de 700 chevaux
(1552)
Régiment de « gens de pied » (1553-1555)
1 000 chevaux (1557)
Régiment de 3 000 gens de pied bas-allemands (1558)
Faits d'armes Siège de Metz (1552)
Bataille de Saint-Quentin (1557)
Bataille de Heiligerlee

Des événements graves devaient bientôt rendre la présence de Jean de Ligne nécessaire dans ses gouvernements. Le 24 avril 1568, le comte Louis de Nassau, frère du prince dOrange, envahit le pays de Groningue, à la tête dun corps denviron 7 000 hommes dinfanterie et de quelques centaines de chevaux, formé, pour la plus grande partie, de fugitifs des Pays-Bas qui sétaient réfugiés à Emden et dans les environs ; le château de Wedde, appartenant au comte dArenberg, sur la frontière de ce pays, fut le premier lieu dont il prit possession ; de il se porta sur le Dam. À cette nouvelle inattendue, le duc dAlbe ordonna à dArenberg, qui se trouvait à Bruxelles, de se rendre « incontinent » en Frise ; il fit diriger vers ce pays le régiment espagnol de don Gonzalo de Bracamonte ; il manda au comte de Meghem de seconder les opérations que dArenberg allait entreprendre contre les ennemis. Arrivé à Vollenhove, dArenberg y eut une attaque de goutte qui lobligea de se mettre au lit : il ne renonça point, pour cela, à commander en personne lexpédition quon lui avait confiée ; il se fit transporter en bateau à Leeuwaerden, et de Leeuwaerden à Groningue sur une civière. Cétait cette dernière ville quil avait assignée pour rendez-vous à ses troupes, composées, outre le régiment espagnol de don Gonzalo de Bracamonte, de quatre compagnies dinfanterie quil avait tirées de Leeuwaerden et de Sneeck et dune compagnie de hauts Allemands venue dOldenzaal. Quoique mal rétabli de sa goutte, le 21 mai il monta à cheval et marcha aux ennemis, qui occupaient Delfzijl, ils sétaient fortifiés. Il logea, ce jour-, à labbaye de Wittewierum, près du Dam. Après quelques escarmouches, lavantage resta à larmée royale, Louis de Nassau, dans la nuit du 22 au 23, battit en retraite. DArenberg se mit aussitôt à sa poursuite : le 23, vers le milieu du jour, il latteignit à Heiligerlee, à trois lieues de Delfzijl. En ce moment le comte de Meghem, avec de la cavalerie, nétait plus quà cinq ou six heures de marche, et son infanterie suivait à quelques lieues de distance : si dArenberg leût attendu, la perte de Louis de Nassau était presque infaillible. Soit, comme plusieurs historiens le rapportent, que les Espagnols le forçassent den venir immédiatement aux mains[7], soit quil fût poussé par son ardeur naturelle et par la crainte de laisser échapper les ennemis, il donna lordre de les attaquer. Laction fut engagée désordonnément par linfanterie espagnole, qui, ayant été repoussée, vint jeter la confusion dans les rangs des compagnies allemandes tandis quelles se formaient en bataille. DArenberg essaya en vain par les plus grands efforts de rétablir le combat ; ayant eu un cheval tué sous lui, il en monta un autre et continua de faire des prodiges de valeur ; on dit même quil tua de sa main Adolphe de Nassau (1540-1568(nl), frère du comte Louis ; mais bientôt il se vit accablé par la multitude des ennemis qui lentouraient, et, après une lutte opiniâtre, Antoine de Zoete, seigneur de Hautain, le frappa mortellement. Sa mort fut le signal de la débandade de ses troupes. Son artillerie, ses bagages, sa vaisselle, largent destiné à la solde des Espagnols, tombèrent au pouvoir des confédérés, qui firent aussi un grand nombre de prisonniers. Le collier de l'ordre de la Toison d'or que Jean de Ligne portait fut envoyée au prince d'Orange, à Strasbourg. Sa dépouille mortelle reçut la sépulture dans léglise du monastère d'Heiligerlee.

Marguerite de La Marck-Arenberg, sa veuve, lui survécut pendant trente et un ans ; elle mourut au commencement de 1599. Son fils Charles lui succéda en tant que comte d'Aremberg, la régence étant confiée à son épouse.

Postérité

La cause de la religion et du roi faisait une grande perte, comme le cardinal Granvelle lécrivit à lévêque de Namur Antoine Havet[8], en perdant le comte dArenberg ; aussi fut-il vivement regretté à Rome et à Madrid.

Dans les temps de troubles, les hommes que rien ne peut détourner de la fidélité à leurs serments et à leurs devoirs sont rares; Jean de Ligne était un de ces hommes. Guichardin lappelle « un baron valeureux, signalé et de marque ». Brantôme, qui lavait connu à la cour de Charles IX et avait même été dans sa familiarité, fait de lui ce portrait : « Outre sa valeur, il estoit un très-bon et très-agréable seigneur, surtout de fort grande et haute taille et de très-belle apparence..... Ses propos nestoient nullement communs ny pauvres, mais très-rares et très-riches, car il parloit fort bien et très-bon françois, comme encore quelques autres langues. Bref, il estoit très-vertueux et très-parfait. »

Titres

Fonctions héréditaires

Fonctions

Décorations

Armoiries

Figure Blasonnement
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D'après le portrait ci-dessus :

Écartelé de Ligne et d'argent, à trois lions de gueules, armés, lampassés et couronnés d'or (de Barbançon).

Vie familiale

Fils de Louis de Ligne ( † vers 1559), seigneur de Barbançon, et de Marie van Glymes (nl)[9] ( † vers 1566), héritière de Sevenbergen, Jean épousa, le 18 octobre 1547, Marguerite de La Marck (15 février 1527 - château de Reckheim18 février 1599château de Zevenberghe) comtesse puis princière d'Arenberg, fille de Robert II (15061536), comte de La Marck, seigneur d'Arenberg et de Mirwart et de Walburga d'Egmond[10].

Par une stipulation de leur contrat de mariage, leurs enfants devaient prendre et relever le nom et les armes dArenberg, ce qui a été observé. Ensemble, ils eurent :

  1. Charles (15501616), comte d'Arenberg, marié, le 4 janvier 1587 à Beaumont (Hainaut), avec Anne-Isabelle de Croÿ (15631635), duchesse d'Aerschot, princesse héritière de Chimay, dont postérité ;
  2. Marguerite (24 février 155224 février 1611), mariée, le 7 juin 1569, avec Philippe II (vers 154524 mai 1582), 3e comte de Lalaing (1537-1582), baron d'Escornaix, seigneur de Waurin, grand bailli du Hainaut, chevalier de la Toison d'Or, dont 2 filles ;
  3. Robert (11 novembre 15642 mars 1614), 1er prince de Barbançon (8 février 1614), seigneur de Rotselaar, marié en juin 1588 avec Claudine (12 novembre 1569février 1632), née posthume, fille de Jean Philippe II de Salm-Neuviller (ou Salm-Dhaun) (30 septembre 1545Tué le 3 octobre 1569 - bataille de Moncontour), dont :
    1. Albert François[11] (22 juillet 16008 avril 1674 - Madrid), 2e prince de Barbançon et du Saint-Empire, comte dAigremont et de La Roche-en-Ardenne, seigneur et vicomte de Dåve, baron de La Buissière, seigneur de Harzé, de Melet, de Melin, de Villemont et de Soy, chevalier de la Toison d'Or (1628, brevet n°381), gouverneur de Namur, marié le 8 mai 1616 avec Marie de Barbançon (20 avril 1602après 1675), vicomtesse de Dåve, fille de Evrard de Barbançon ( † 31 décembre 1608), vicomte de Dave, dont :
      1. Marie Dorothée Caroline (1622-1646), mariée en 1636 avec Ottavio Piccolomini d'Aragona (11 novembre 1599 - Florence11 août 1656), 1er prince Piccolomini, 7e duc d'Amalfi (it), seigneur de Nachod, feld-maréchal imperial ;
      2. Isabelle (1623 - Barbançon17 août 1678 - Paris), mariée en première noces, le 4 novembre 1637 à Anvers, avec Albert François de Lalaing ( † 1643), comte de Hoogstraeten, dont une fille, Marie Gabrielle de Lalaing ( † 8 février 1709 - Anvers), comtesse de Hoogstraten ; puis, en secondes noces, le 15 mai 1651 à Bruxelles, avec Ulrich von Württemberg (15 mai 1617 - Stuttgart5 décembre 1671 - Stuttgart), duc de Württemberg-Neuenbürg, dont Marie Anne Ignace (27 décembre 16521693), duchesse de Württemberg-Neuenbürg
      3. Jacques Claude (13 mars 16241644) ;
      4. Octave Ignace (12 mars 1643Tué le 29 juillet 1693 - bataille de Neerwinden (1693)), 3e prince de Barbançon (1674-1693), comte d'Aigremont et de La Roche-en-Ardenne, vicomte d'Aure, seigneur de Villemont, marié, le 17 janvier 1672 avec Teresa María Manrique de Lara (de) (1er août 1696), fille du 1er comte de Frigiliana (es), dont :
        1. María Teresa Joaquina (12 mars 167310 juillet 1738), mariée en 1695 avec Isidoro Folch de Cardona (it) ( † 1699), marquis de Guadameste ; en 1700 avec Gaspar Antonio de Guzmán ( † 1712 - Barbastro), capitaine général de Galice ; le 14 décembre 1714 avec Henri de Wignacourt, comte de Lannoy, dont une fille ;
        2. María Manuela (26 décembre 169328 juin 1742), mariée 28 juin 1696 à Madrid, avec Agustín Hurtado de Mendoza , 7e comte de Orgaz (es), sans postérité ; mariée en 1713 avec Jaime Fernández de Híjar de Portugal y Silva ( en 1695), dont un fils ;
  4. Antonia (ou Antoinette) Wilhelmine (1er mars 155726 février 1626), mariée le 10 décembre 1577 avec Salentin IX von Isenburg-Grenzau (de) (153219 mars 1610), archevêque de Cologne (1567-1577), qui adique l'archevêché électoral de Cologne pour se marier, dont postérité. Antonia, devenue veuve, devient camerera mayor de l'infante d'Espagne.

Annexes

Bibliographie

Notes et références

  1. Lettre écrite de Gand, le 14 juillet 1559, conservée en original autographe aux Archives de La Haye.
  2. « À Leeuwarden, cétaient trois gentilhommes nommés Antoine van Egmont, Frédéric van Egmont et Josué dHalverdgen, qui avaient apporté lacte de confédération signé de Brederode, Louis de Nassau, Charles de Mansfeld, et qui, après y avoir eux-mêmes apposé leurs signatures, lavaient présenté à un grand nombre de personnes, pour quelles le souscrivissent aussi. Devant lhôtellerie ils étaient descendus, ils avaient placé les tableaux de leurs armes avec la devise de Vive les Gueux. » (Lettre du comte dArenberg à la duchesse de Parme, du 31 janvier 1567).
  3. Lettre du 17 septembre 1566, écrite de Leeuwaerden.
  4. Autre lettre du 17 septembre.
  5. Van Loon, t. I, p. 96.
  6. Lettre du 9 juin 1567, écrite de Groningue.
  7. Cette version est confirmée par le témoignage de Ferey Duresca, qui était alors résident de France aux Pays-Bas ; le 28 mai 1568, il écrivait à Charles IX : « Les Espagnolz ne voullurent jamais avoir patience dattendre le comte de Mègue, pour prez quil fust deulx. » (Bibl. imp. à Paris, Mss. S. Germ. Harlay 22824, pièce XXIII).
  8. Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays-Bas, t. II, p. 33.
  9. Fille de Corneille de Berghes (1458-1509(de), seigneur de Grevenbroeck
  10. Fille de Florent d'Egmont (nl) (vers 14701539), comte de Buren (nl) et de Marguerite de Glymes (14811551) (voir Maison de Glymes (de))
  11. www.heraldique-europeenne.org, Armorial des Chevaliers de la Toison d'Or. Consulté le 3 décembre 2010

Voir aussi

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Seigneur de Zuid-Polsbroek
vers 1559-1568
Charles d'Arenberg
Robert III de La Marck
Comte d'Arenberg
(Avec son épouse
Marguerite de La Marck)
1547-1568
Maximilien d'Egmont
Stadhouder de Frise, d'Overijssel, de Groningue, de Drenthe
1549-1568
Charles de Brimeu
Anne d'Egmont
Stadhouder de Lingen
1551-1568

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