- Histoire du Tour de France
-
Le Tour de France est créé en 1903 par le journal L'Auto, dirigé par Henri Desgrange, afin d'affaiblir le journal sportif concurrent, Le Vélo.
Contexte : développement du sport cycliste et des compétitions à la fin du 19e siècle
Les premières courses cyclistes naissent en France à la fin des années 1860, alors que s'y développe la « vélocipèdie ». Après les courses du parc de Saint-Cloud en 1868, la première course d'endurance de ville à ville est organisée en 1869 entre Paris et Rouen.
Les compétitions sportives se développent en France dans un contexte « revanchard ». Afin de corriger les erreurs ayant à leurs yeux causé la défaite de 1870 face au Royaume de Prusse, les gouvernements de la Troisième République exaltent le sentiment patriotique à travers l'instruction publique et des manifestations nationales, occasions de démonstrations sportives et gymniques. La fin du XIXe siècle voit également se développer une presse de masse qui base son succès sur la relation de faits divers puis la narration de spectacles sportifs et notamment de courses cyclistes[1].
Enthousiasmé par la première édition du Bordeaux-Paris, organisée en 1891 par Le Véloce-Sport, et par l'augmentation des ventes de journaux qu'elle a suscité, Pierre Giffard, chef de l'information du Petit Journal et fervent promoteur de la bicyclette, organise Paris-Brest-Paris. Cette course connaît un retentissement international et constitue le premier « spectacle sportif de grande ampleur et de longue durée ». En 1892, Giffard lance son journal, Le Vélo[2].
L'affaire Dreyfus qui divise la France à la fin des années 1890, touche également le cyclisme. En juin 1899, le comte de Dion, un industriel, pionnier de l'automobile et l'un des principaux annonceurs du Vélo, est condamné à 15 jours de prison pour son implication dans une bagarre provoquée par des antidreyfusards lors d'une réunion publique du Président de la République Émile Loubet, au lendemain du cassement de la condamnation de Dreyfus. Une opposition naît alors entre Giffard et De Dion. Ce dernier doit renoncer à la vice présidence de l'Automobile Club de France afin que celui-ci ne soit pas dissout et en veut à Giffard, dreyfusard et également membre de l'Auto club, d'avoir publiquement critiqué son engagement politique et demandé sa démission. De Dion fait échouer la candidature de Giffard à une élection législative en 1900. En réaction, et afin de promouvoir le « moteur pour tous » face à la mainmise de l'aristocratie et des grands industriels, Giffard provoque une scission de l'Automobile club et crée le Moto club de France. Il « [boycotte] les évènements patronnés par le comte de Dion » et Le Vélo ne fait plus mention des voitures De Dion-Bouton[3]. De Dion se donne alors pour mission de couler le journal de Giffard. Il crée pour cela un concurrent, L'Auto-Vélo, qui paraît en octobre 1900 et se veut apolitique[4]. Il est appuyé par d'autres industriels du cycle et de l'automobile, dont Adolphe Clément, également anti-dreyfusards, et qui jugent prohibitifs les tarifs publicitaires pratiqués par Giffard[5].
Création du Tour de France
De Dion confie les rênes de l’Auto-Vélo à Henri Desgranges. Ancien cycliste, directeur de vélodromes et auteur de l'ouvrage de référence La tête et les jambes, il a ensuite travaillé chez Adolphe Clément comme chef de la publicité. Il reproche par ailleurs à Giffard de boycotter dans les pages du Vélo le Parc des Princes qu'il a créé en 1897 avec Victor Goddet, ce qui le rapproche des intentions des création de l’Auto-Vélo, de même que sa proximité avec Maurice Barrès. Victor Goddet est nommé gestionnaire du journal[6]. L’Auto Vélo connaît des débuts difficiles. Ses ventes stagnent et ne représentent que le quart de celle du Vélo, malgré le rachat de Paris-Brest-Paris et l'organisation d'un Paris-Marseille en 1902.
À la fin de l'année 1902, pressé par de Dion de trouver un moyen d'achever le Vélo, Desgranges souhaite créer une course plus spectaculaire que Paris-Brest-Paris. Le journaliste Géo Lefèvre émet l'idée d'un « tour de la France ». Desgranges, d'abord peu enthousiaste, est convaincu par Goddet. Alors qu'il n'apparaît plus aussi primordial de couler le Vélo, que Giffard vient de quitter, l'Auto annonce l'organisation d'un Tour de France le 19 janvier 1903. Cette annonce permet à la rédaction de réaffirmer sa vocation cycliste, trois jours après être devenu l’Auto suite à un procès intenté par Giffard pour plagiat de titre[7].
1903-1914
Ce premier Tour de France part de Paris et s'y termine. Il fait étape dans les grandes villes (Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Nantes) et emprunte les principales routes. Il longe ainsi les axes ferroviaires, la course étant suivie en train. Le public, estimé de 200 à 500 000 personnes, est faiblement présent sur l'ensemble du parcours. Le Tour est toutefois un succès à Paris, où l'on se presse à Ville-d'Avray et au parc des Princes pour accueillir les premiers héros du Tour, dont le vainqueur Maurice Garin. Les journaux battent des records de ventes. Le Tour de France suscite un véritable engouement dans les milieux sportifs, qui suivent la compétition au quotidien grâce à la presse et en discutent[8].
L'année suivante, le Tour est victime de son succès. Les actes de chauvinisme local déjà constatés en 1903 sont amplifiés : des cyclistes sont agressés, des lettres dénonçant des tricheries envoyées à la direction, des clous semés sur la chaussée. Le public va à l'encontre de l'idéal d'unité nationale véhiculé par le Tour et soutient ses coureurs régionaux. Grâce au Tour, Paris annexe la France à cette époque. La course part de Paris, s'y termine et la majorité des coureurs en sont originaires, et le Tour diffuse dans les provinces françaises les valeurs parisiennes[9]. Un dernier « incident » intervient plusieurs mois après l'arrivée : l'Union vélocipédique de France décide en novembre de déclasser les quatre premiers, accusés de diverses infractions au règlement de course (ravitaillements et entraînements irréguliers). Le jeune Henri Cornet est déclaré vainqueur. Cette décision est probablement due à la rivalité de l'Auto et de l'UVF, cette dernière jalousant le succès du Tour.
Après avoir un temps envisagé de renoncer à organiser une nouvelle édition[10], Desgranges apporte en 1905 des modifications au déroulement et à l'organisation de la course afin d'éviter les irrégularités constatées l'année précédente. Les étapes sont plus courtes, de sorte que les coureurs ne roulent plus la nuit, et évitent les centres-villes. Le classement général au temps est remplacé par un classement par points. C'est également à partir de cette année qu'à l'initiative d'Alphonse Steinès, un collaborateur de Desgranges, le Tour se rapproche de ses frontières, jusqu'à former un « chemin de ronde », un « encerclement processionnel du pays qui manifeste ostentatoirement les valeurs de la France moderne et industrielle, le dynamisme et la santé éclatante de la jeunesse »[11]. Le parcours s'allonge par conséquent : il passe progressivement de 2 500 km en 1904 à 5 300 km en 1911, année à partir de laquelle il se stabilise et longe au maximum les frontières naturelles et politiques de la France.
Une attention particulière est portée à l'Alsace-Lorraine, annexée par l'Empire allemand en 1871. En 1905, le Tour escalade le Ballon d'Alsace puis, de 1907 à 1910, fait étape à Metz, avec l'assentiment des autorités allemandes et en collaboration avec des associations patriotiques. Ces escales sont l'occasion pour la population locale d'exprimer son sentiment français. Inquiet des manifestations de patriotisme auxquelles ces étapes donnent lieu, et dans un contexte de dégradation des relations franco-allemandes, Guillaume II empêche l'incursion du Tour en territoire allemand à partir de 1911. Ainsi le Tour ne promeut plus seulement les valeurs de l'effort physique, de l'énergie, du courage et du progrès technique. Il délimite le territoire français, rappelle les prétentions françaises sur l'Alsace-Lorraine et passe ainsi dans « l'arsenal de la revanche »[12]. Cette tendance s'accentue à partir de 1912 dans les pages de l'Auto, où les articles de Desgranges se font plus offensifs et décrivent le Tour comme une « croisade de la régénération physique en France »[13].
En s'étendant aux frontières, le Tour prend aussi de l'altitude. La montagne est présente dès la première édition du Tour, avec deux cols du Massif central. Après un passage réussi dans les contreforts des Alpes lors de l'étape entre Grenoble et Gap en 1905, le col de Porte est franchit en 1907. Alors que Desgranges pense avoir atteint les limites de l'effort humain avec cette difficulté, Steinès le convainc de répondre à l'appétit du public et de passer par les Pyrénées. Ainsi en 1910, à titre d'essai, le Portet-d'Aspet puis les cols de Peyresourde, Aspin, Tourmalet et Aubisque sont franchis. Ces quatre cols sont au programme d'une étape remportée par le vainqueur final Octave Lapize, qui qualifie à cette occasion les organisateurs de « criminels » [14]. Cette étape marque le début de la recherche de démesure du Tour de France. Le remplacement en 1911 du col de Porte par le Galibier, qui marque les esprits du public et des organisateurs, achève sa conquête de la haute montagne[15].
La popularité du Tour s'accroît rapidement durant cette période. Malgré une présence modeste du public, faible aux départs d'étape et sur la route, plus nombreux aux arrivées et aux contrôles, le Tour devient une « grande fête populaire du cycle et des frontières »[16]. Il est en effet particulièrement accueilli près des frontières comme à Bayonne, Roubaix ou Longwy, où certaines usines ferment pour permettre à leurs employés d'assister au passage des coureurs[17]. Trois types de publics peuvent être distingués à cette époque : un public sportif, composé d'une part d'aristocrates et de bourgeois mécanisés qui suivent une partie la course et d'autre part de passionnés présents au bord de la route, et le public populaire pour lequel le passage du Tour est l'occasion d'une fête estivale[18]. La course devient en effet « prétexte à un prolongement des fêtes du 14 juillet » et « un bon mobile pour célébrer les valeurs républicaines ». À ce titre, l'État soutient l'organisation du Tour. Ainsi une circulaire ministérielle de 1912, qui reste en vigueur jusqu'aux années 1950, enjoint les maires de ne pas entraver l'organisation des courses cyclistes qui « sont une mise en valeur de la jeunesse française, pour le plus grand profit de l'Armée et du Pays »[19].
Dès les premières éditions, les exploits des coureurs du Tour de France sont mis en valeur par l'Auto et Desgranges, qui voit en eux « l'aristocratie du muscle »[20]. Ils sont considérés par le public comme des héros « car ils ont su triompher de tous les obstacles de la route, et cela grâce à une simple bicyclette »[21], des « soldats du sport » qui « fascinent les milieux populaires »[22]. Leur héroisme s'accroit à partir de 1910 lorsqu'ils franchissent la haute montagne, qui donne à leurs exploits « une dimension mythologique »[23]. Si en 1903 quelques « géants de la route » (Maurice Garin, Jean Fisher, Hippolyte Aucouturier, Édouard Wattelier) côtoient une majorité d'inconnus[24], le nombre de coureurs professionnels va croissant[25].
Première Guerre mondiale
Le Tour de France 1914 s'achève quelques jours avant que débute la Première Guerre mondiale. L'Auto donne régulièrement des nouvelles des sportifs mobilisés sur le front et annonce la mort de plusieurs coureurs du Tour. Le Luxembourgeois François Faber, vainqueur en 1909, meurt lors de la bataille de l'Artois de mai 1915. Octave Lapize, qui s'est engagé dans l'aviation, est abattu le 14 juillet 1917 au-dessus de Verdun. Enfin Lucien Petit-Breton, premier double lauréat du Tour (en 1907 et 1908) meurt le 20 décembre 1917 dans un accident automobile à l'arrière du front. Henri Desgranges, qui a espéré organiser le Tour en 1915, s'engage volontairement en 1917 et continue de rédiger des articles pour L'Auto depuis le front. L'armistice est signé le 11 novembre 1918. Dès le 20 novembre, L'Auto publie le parcours du Tour 1919[26].
1919-1939
Après cinq ans d'interruption, le Tour reprend en 1919. À cette occasion, il finit d'épouser les frontières de la France et de former le « chemin de ronde » commencé avant-guerre, en faisant étape à Metz et Strasbourg[27]. La plupart des coureurs, manquant de matériel, abandonnent dès les premières étapes, rendues difficiles sur des routes peu entretenues durant le conflit mondial. Seuls onze coureurs arrivent à Paris[28] et la course est remportée par le Belge Firmin Lambot. Au départ de la onzième étape à Grenoble, Eugène Christophe devient le premier coureur à revêtir le maillot jaune. L'idée de faire porter une maillot jaune au leader du classement général est attribuée par certains à des journalistes[29], par d'autres à Alphonse Baugé, depuis peu collaborateur de l'organisation du Tour, qui aurait suggéré à Henri Desgranges de faire porter au leader du classement général un maillot distinctif, de couleur jaune comme le maillot qu'il portait lorsqu'il était coureur, ou celui qu'il faisait porter à ses ravitailleurs dans les équipes Alcyon et Peugeot qu'il dirigeait avant-guerre. Le choix de la couleur jaune pourrait également être le fait de Desgranges, optant ainsi pour la couleur des pages du journal L'Auto qui organise la course[30],[31].
Les premières éditions d'après-guerre ne rencontrent pas le même succès qu'auparavant. Les quatre succès des Belges de 1919 à 1922, dont Philippe Thys qui devient le premier coureur à gagner trois Tours en 1920, sont certes bien accueillis dans leur pays. L'image du Tour pâtit cependant de ces « champions peu charismatiques » et des entorses au règlement de courses. Bien que Desgrange soit resté intransigeant sur le caractère individuel de la compétition, les victoires doivent beaucoup aux ententes entre coureurs du consortium La Sportive, puis Peugeot en 1922. Le Tour connaît un éphémère regain d'enthousiasme en 1923 avec la victoire d'Henri Pélissier, l'un des coureurs français les plus populaires de l'époque[32].
Après la guerre, le comte de Dion cède ses actions de L'Auto à Victor Goddet. À la mort de celui-ci en 1926, son fils aîné Maurice Goddet se voit léguer la majorité des actions du journal. Desgrange reste cependant le patron du Tour. Il prend sous son aile le deuxième fils de Victor Goddet, Jacques, qui suit son premier Tour en 1928 après être entré au journal L'Auto, afin de l'amener à prendre sa succession[33].
L'emprise de Desgrange sur la course n'est pas appréciée de tous, et est même une cause de la dégradation de l'image du Tour de France à la fin des années 1920. En 1924, les frères Francis et Henri Pélissier ont abandonné après qu'un commissaire de course a relevé le maillot d'Henri Pélissier afin de s'assurer qu'il n'en ait pas un deuxième. Il est en effet reproché à Pélissier de s'être débarrassé d'un de ses deux maillots en cours d'étape, ce qui est contraire au réglement. Après avoir ainsi quitté la course par protestation, les frères Pélissier se livrent au journaliste Albert Londres, qui couvre le Tour pour Le Petit Journal. Il lui décrivent les difficultés et la souffrance des coureurs du Tour de France, « en accentuant le côté dramatique de l'épreuve ». En titrant son article « Les forçats de la route », Londres rend cette expression et l'image qu'elle véhicule durablement populaires et fait découvrir au public une réalité peu connue[34]. Henri Pélissier poursuit dans sa protestation contre Desgrange et son réglement trop strict en envoyant un courrier à différents journaux. L'Humanité s'en saisit et suit pour la première fois le Tour de France[35].
Le Tour de France s'élance pour la première fois hors de la région parisienne en 1926. Il part d'Évian, effectue une boucle similaire à celle des éditions précédentes pour revenir à Évian et rallier Paris en deux étapes. Desgrange souhaite ainsi « réduire le temps entre la sortie des Alpes et l'arrivée à Paris. Les promenades en groupe ne signifient rien et finissent par lasser le public ». Ce nouveau parcours, le plus long de l'histoire du Tour (5 745 km), n'a pas l'effet escompté. Au contraire, ce Tour s'avère ennuyeux car un grand nombre d'étapes se terminent par un sprint massif du peloton. Afin d'y remédier, Desgrange invente l'année suivante une nouvelle formule : lors des étapes de plaine, soit 16 des 24 étapes, les équipes partent séparément, de quart d'heure en quart d'heure, et les touristes-routiers partent les derniers. Desgrange invite le public à se munir d'une montre pour suivre la course, mais les spectateurs n'en comprennent pas l'enjeu et le déroulement. En 1928, il met en œuvre une nouvelle idée : le recomplètement des équipes, qu'il considère désorganisées après les Pyrénées, afin de leur permettre de concurrencer l'équipe Alcyon qui domine la course. Chaque équipe est autorisée à faire appel à trois remplaçants. Six coureurs entrent ainsi en course à Marseille, et font l'objet d'un classement général séparé[36]. En d'autres occasions, Desgrange renonce à son idéal sportif pour maintenir l'intérêt de la course. Il paie par exemple des coureurs pour qu'ils accélèrent lorsqu'il estime que le peloton est trop lent[37]. En 1929, le Belge Maurice De Waele, malade, s'impose grâce à l'aide de ses coéquipiers de l'équipe Alcyon. Pour Desgrange, « on fait gagner un cadavre ». Le Tour et son réglement, qui interdit l'entraide, sont définitivement discrédités[38].
Henri Desgrange doit repenser le déroulement de sa course. Il bouleverse le mode de participation au Tour de France. Les marques de cycles sont supprimées. Désormais, les coureurs contractent directement avec le Tour et sont regroupés par équipes nationales, L'Auto paye leurs frais et leur fourni un vélo jaune sans marque. Pour cette édition de 1930, cinq équipes nationales sont présentes, regroupant 40 coureurs : l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne, la France et l'Italie. Depuis 1928, une partie des touristes-routiers sont groupés en équipes régionales. Contrairement aux professionnels, tous courent à leurs frais. Desgrange semble favoriser une victoire française. Il parvient certes à convaincre le campionissimo Alfredo Binda, peu enthousiaste, de participer, moyennant une prime de départ, mais refuse la participation de Maurice De Waele et de Costante Girardengo qui, associé à Binda, aurait formé un duo invincible[39]. L'adhésion à cette formule est générale. Elle suscite un regain d'intérêt du public, enthousiasmé par les victoires de l'équipe de France. Celle-ci projette l'image d'une France unie et s'impose cinq fois de 1930 à 1934, alors qu'Henri Pélissier avait été le seul vainqueur français depuis 1919. De nouvelles sources de revenus sont nécessaires pour organiser ce Tour. C'est dans ce contexte qu'est créée la caravane publicitaire. Son idée originale est attribuée à Marc Thevenin, directeur de la publicité des chocolats Menier, qui lance un véhicule de la marque sur les routes du Tour de France 1928. Accompagné de véhicules du cirage Lion Noir et des réveils Bayard, il suit le peloton et distribue des produits au public. La caravane lancée en 1930 est composée de six véhicules qui précèdent la course. Les entreprises y participant payent L'Auto, notamment via des prix et des primes. C'est ainsi qu'est créé un « embryon » de grand prix de la montagne : les chocolats Menier attribuent 5 000 francs au coureur passant le premier au sommet des sept grands cols. En 1931, Desgranges décide d'organiser lui-même cette caravane publicitaire[40]. Elle s'intègre rapidement dans le Tour de France et se développe. Elle « préfigure […] l'idéal social de la consommation de masse » et transforme de le Tour des années 1930 en « un véritable défilé de véhicules »[41].
Les équipes nationales sont créées dans un contexte de montée des nationalismes en Europe et accroissent les enjeux nationaux et le chauvinisme dans le Tour de France[39]. Après les cinq victoires françaises de 1930 à 1934, les Belges Romain Maes et Sylvère Maes s'imposent en 1935 et 1936. Afin de contrer l'équipe belge, jugée supérieure aux autres lors des contre-la-montre par équipes, les étapes disputées sous cette forme sont moins nombreuses en 1937. La rivalité entre Belges et Français lors de cette édition se conclut par le retrait de l'équipe belge à la suite de son agression par le public à Bordeaux. Le Belge Sylvère Maes, porteur du maillot jaune, a été pénalisé dans la journée car il a été attendu et aidé par des individuels belges lors d'un crevaison[42]. En Italie, Mussolini suit avec intérêt les succès des champions italiens. Sa participation à un cadeau offert à Ottavio Bottecchia, premier vainqueur italien du Tour en 1924 et 1925, suscite des manifestations antifascistes durant la course. Par crainte de représailles, Bottecchia ne porte pas le maillot jaune lors d'une étapes entre Toulon et Nice. En 1937, Mussolini pousse Gino Bartali à participer au Tour de France, à des fins de propagande pour son régime. Bartali, qui gagne l'épreuve en 1938, n'est cependant pas fasciste et se fait cependant plus connaître pour sa foi catholique, au point d'être surnommé « Gino le pieux » ou « le mystique »[43]. Alors que les journaux de la SFIO et du Parti communiste, Le Populaire et L'Humanité, étaient jusque là « peu favorables » au Tour, ils s'y intéressent à partir de 1936, tandis que des grévistes du Front populaire saluent le passage de la course[44]. La guerre d'Espagne rejaillit également sur le déroulement du Tour. En 1937 et 1938, six coureurs espagnols s'engagent dans la compétition afin d'y représenter la République espagnole, dont Julian Berrendero et Mariano Canardo, vainqueurs d'étapes dans les Pyrénées en 1937. Après la défaite des républicains en 1939, Berrendero est arrêté et passe un an en camp de concentration[45].
Durant cette période, le Tour de France voit sa popularité croitre. Avec le développement de sa couverture médiatique, le Tour de France devient le « pain quotidien médiatique au mois de juillet pour les Français »[46]. Alors que dans la décennie précédente, le public se concentre dans les villes et les sommets, le Tour dans les années 1930 attire sur l'ensemble de son parcours une foule importante, qui pourrait représenter la quart de la population d'alors, soit 10 millions de spectateurs[47]. Ce regain de popularité profite en premier lieu à l'Auto, dont les ventes augmentent et atteignent un maximum en 1933[48]. Durant les années 1930, L'Auto n'est cependant plus seul à profiter du succès du Tour. Après les niveaux records de 1933, les ventes du journal baissent. Toute la presse consacre une ou plusieurs pages au Tour. Le principal concurrent de L'Auto est Paris-Soir, qui s'est développé en publiant des reportages photographiques. Il porte une attention particulière au Tour, traité comme feuilleton, avec moyens techniques importants. Grâce à sa vitesse de parution, Paris-Soir paraît le soir et relate la course avant L'Auto, qui ne paraît que le lendemain matin. Cet aspect de la concurrence des journaux est à l'origine en 1933 du décalage des arrivées d'étapes, du début à la fin d'après-midi[49]. En 1929, le journaliste de L'Intransigeant Jean Antoine, avec le soutien de la revue de sport Match, est le premier à réaliser des reportages radiodiffusés en dehors des studios. Accompagné du caricaturiste Alex Virot, il suit le Tour de France dans une camionnette équipée d'un micro-émetteur et réalise trois émissions par jours. Les auditeurs peuvent pour la première fois entendre la voix des coureur, notamment celle de Victor Fontan dont Antoine « capture » l'abandon. En 1930, l'ensemble des réseaux de radiodiffusion français retransmettent les quatre émissions quotidiennes. En 1932, une technique d'enregistrement sur disque permet de diffuser le reportage enregistré lors du passage des coureurs au col d'Aubisque. « Radio-course » apparaît en 1936, grâce au développement de la technologie sans fil : une voiture émettrice à l'arrière de la course annonce la position de la course aux spectateurs[50]. Le Tour de France fait également l'objet de premiers reportages d'actualité filmés en 1931. Leur projection quotidienne à Paris commence en 1932[51].
La Seconde guerre mondiale
Comme en 1914, la plupart des coureurs du Tour sont mobilisés à l'automne 1939. Jacques Goddet l'est également. Desgranges envisage toujours l'organisation du Tour 1940, d'autant que s'installe la « drôle de guerre ». Il doit cependant renoncer en raison des zones militaires, inaccessibles à la course et qui en réduisent le parcours à une « vessie dégonflée », et de la mise au service de l'effort de guerre de l'industrie. Desgranges donne rendez-vous à l'éte 1941, mais malade, il meurt le 16 août 1940.
Le 10 mai, l'armée allemande lance son offensive. Le 22 juin, le gouvernement du maréchal Pétain, nommé une semaine plus tôt, signe l'armistice à Rethondes. La direction de l'Auto fuit à Lyon dans l'exode, puis Albert Lejeune obtient des occupants de pouvoir revenir à Paris une fois l'armistice signé, malgré l'opposition initiale de Goddet. Par l'intermédiaire de Lejeune, collaborationniste convaincu, qui mène les tractations, le journal est vendu à Gerhard Hibbelen, un proche de l'ambassade allemande à Paris, propriétaire de nombreux journaux parisiens.
Les Allemands souhaitent que le Tour de France soit de nouveau organisé, afin de « rallier tout le peuple français » et de « légitimer leur pouvoir en autorisant à nouveau une grande manifestation publique ». Ce projet est confié au journal collaborationniste La France socialiste et à son chef des sports, Jean Leulliot, ancien journaliste de l'Auto et directeur de l'équipe de France pendant le Tour 1937. Jacques Goddet ayant interdit l'usage du nom « Tour de France », une course appelée « Circuit de France » est disputée du 28 septembre au 4 octobre 1942, en sept étapes. Le Belge François Neuville sort vainqueur de ce « fiasco sportif », récupéré par le gouvernement de Vichy. En 1943, les industriels, déjà réticents en 1942, n'apportent pas leur soutient à la France socialiste et le Circuit de France n'est plus organisé.
À la Libération, Lejeune est jugé, condamné à mort et fusillé pour ses actes de collaboration. Jean Leulliot est également jugé. Soutenu par la presse sportive, il n'est pas condamné. Comme les autres journaux ayant paru pendant l'occupation, l'Auto voit ses biens confisqués et n'est plus publié à partir du 17 août 1944[52].
Reprise du Tour à la Libération
Les restrictions sur la consommation de papier, l'interdiction de parution des journaux sportifs et l'état des routes de France rendent inenvisageable l'organisation du Tour dès l'été 1945. Les journaux sportifs sont de nouveaux autorisés à paraître en février 1946. L'Auto est interdit de parution, comme tous les journaux publiés durant l'Occupation, et ses biens, dont le Tour de France, sont sous séquestre. Jacques Goddet lance alors L'Équipe. La question de la future organisation du Tour se pose, et il convient pour les organes de presse de se présenter en refondateur. Deux « mini-Tours de France » ont ainsi lieu en juillet 1946.
Le quotidien Sports, journal sportif lancé à la même période que L'Équipe et soutenu par le Parti communiste, organise au début du mois avec Ce Soir et Miroir Sprint une Ronde de France, course de 5 étapes – les courses cyclistes en France ne pouvant alors pas en comporter davantage. Cette épreuve, remportée par Giulio Bresci, un Italien inconnu du public, n'enthousiasme pas les foules. À la fin du mois, c'est au tour de la société du Parc des Princes, avec le soutien du Parisien libéré d'organiser une Course du Tour. Celle-ci contrairement à la Ronde de France, est un franc succès. Elle est disputée par équipes nationales, tandis que sa rivale a fait participer des équipes commerciales, et son calendrier correspondant davantage à celui du Tour de France, en s'achevant fin juillet. Surtout, la Course du Tour jouit d'un meilleur plateau. Elle rassemble une grande partie des meilleurs coureurs d'alors, à l'exception des Italiens Gino Bartali et Fausto Coppi. La participation de René Vietto, favori du public et sympathisant communiste, et notamment remarquée. Il termine deuxième de la course, en aidant son coéquipier Apo Lazaridès à s'imposer.
Émilien Amaury, cofondateur du Parisien libéré à la Libération après avoir notamment participé à la diffusion de publications clandestines pendant la guerre, s'associe à Jacques Goddet pour obtenir de la Fédération nationale de la presse l'organisation du Tour de France. Celle-ci est attribuée en juin 1947 à la Société du Parc des Princes, dont Goddet et Amaury sont les principaux actionnaires, et avec une garantie financière du Parisien libéré et de L'Équipe. Outre la meilleure réussite du Circuit du Tour, la situation politique du moment à pu jouer : les communistes sont en effet exclus du gouvernement Ramadier en mai, après des désaccords sur les politiques coloniales et économique. Jacques Goddet devient directeur de course du Tour, avec pour adjoint Félix Lévitan, directeur du service des sports du Parisien libéré[53],[54].
Le Tour renaît en juillet 1947 avec un nouvel état d'esprit et « véhicule un message de paix et de fraternité, en même temps qu'il doit aider à la remise en marche de l'économie ». Le soin apporté par les pouvoirs publics à la bonne organisation de la course crée une « impression de nationalisation »[55]. Cette édition est un grand succès populaire. Des millions de spectateurs viennent applaudir un peloton composé comme en 1939 d'équipes nationales et régionales, et précédé de sa caravane publicitaire. Le déroulement de la course contribue à son succès, avec la lutte pour le maillot jaune de René Vietto et la victoire finale de Jean Robic, obtenue aux dépens de l'Italien Pierre Brambilla grâce à une échappée lors de la dernière étape.
Les héros du Tour
Durant les années 1930, les coureurs du Tour deviennent des héros dont on admire les exploits et le courage, auxquels le public s'identifie[56], et que la presse, voire des partis s'approprient. Cette héroïsation est essentiellement le fait de la narration du Tour, notamment à la TSF et dans les pages de l’Auto puis de l’Équipe, qui glorifie les exploits des coureurs, et divinise ces derniers[57],[58]. Roland Barthes dans ses Mythologies voit dans le Tour de France la narration d'une « grande épopée », qui s'opère par la diminution du nom des coureurs : « Bobet devient Louison, Lauredi, Nello et Raphaël Géminiani, héros comblé puisqu'il est à la fois bon et valeureux , est appelé tantôt Raph, tentôt Gem. Ces nom […] rendent compte sous une même syllabe d'une valeur surhumaine et d'une intimité toute humaine. »[59]. Les coureurs sont également désignés par des surnoms « liés à leurs origines et/ou à leurs traits de caractère » : l'« Aigle de Tolède » pour Bahamontes, « Gino le Pieux » pour Bartali, ou le « Landais bondissant » pour André Darrigade[60]. La « géographique homérique » du Tour participe de cette épopée. « Les éléments et les terrains sont personnifiés, car c'est avec eux que l'homme se mesure et comme dans toute épopée il importe que la lutte oppose des mesures égales »[61]. C'est particulièrement le cas du mont Ventoux, « dieu du Mal auquel il faut se sacrifier. Véritable Moloch, despote des cyclistes, il ne pardonne jamais aux faibles »[62],[63],[64].
Parmi les héros du Tour de France, l'un d'entre eux « peut faire figure de héros emblématique du Front populaire »[65]. Il s'agit du Français René Vietto, qui s'est rendu populaire par son sacrifice en 1934, en donnant sa roue à Antonin Magne. L'Humanité ne manque pas de rappeler ses sympathies communistes, et l'appelle « notre camarade »[66]. Deux duels sont particulièrement « évocateurs non pas seulement d'une compétition sportive mais des mouvements de fond d'une société »[67]. La rivalité entre les champions italiens Gino Bartali (vainqueur du Tour en 1938 et 1948) et Fausto Coppi (vainqueur en 1949 et 1952), est emblématique de la « dualité italienne ». Déjà à l'œuvre sur le Giro durant les années 1940, cette rivalité anime le Tour de France 1949, alors qu'ils y courent associés au sein de l'équipe d'Italie. Leur rivalité illustre la situation politique et sociale de l'Italie. Tandis que l'Italie du Nord s'identifie à Coppi, le Sud adopte Bartali. Les deux piliers de la vie politique italienne se disputent, en vain, les deux champions : le parti communiste contacte Coppi pour qu'il soit des leurs aux élections législatives de 1948 et la démocratie chrétienne tente d'attirer aussi bien Bartali « le pieux » que Coppi, engagé dans une relation adultérine et soutenu par une frange plus libérale de la population. Leur triomphe dans l'après-guerre, en 1948 et 1949, en font également des « icônes [de la] reconstruction » italienne[68],[69].
En France, c'est le duel entre Jacques Anquetil et Raymond Poulidor qui illustre un contexte social dans les années 1960. Le pays est divisé entre « Anquetiliens » et « Poulidoristes ». Anquetil, quintuple lauréat du Tour entre 1957 et 1964, est « l'image de la France qui gagne et prend des risques ». Poulidor, « l'éternel second », est le symbole d'une « France qui perd » - l'historien Michel Winock parlera de « contexte Poulidor ». Il est le coureur « des humbles, attachés à la terre, aux vertus du labeur, au travail sans repos et répit »[70],[71]. Leur lutte atteint son paroxysme lors de l'ascension du Puy de Dôme pendant le Tour de France 1964, qui tourne à l'avantage d'Anquetil.
Le Tour de France pendant les 30 glorieuses
Durant les années 1950, sous l'impulsion de Félix Lévitan, le parcours du Tour « s'affranchit du chemin de ronde », ce que Desgrange n'avait pas osé faire, et explore le centre de la France, le Massif central, et y conquiert un nouveau public qui ne voyait pas passer la course auparavant. La découverte de nouvelles ascensions, notamment le mont Ventoux en 1951 relance l'attrait sportif de la course. Les premières arrivées en altitude se font l'année suivante, à l'Alpe d'Huez, à Sestrières et au Puy de Dôme[72]. Dans une Europe divisée en deux blocs, le Tour de France se développe à l'ouest en visitant régulièrement ses voisins italiens, suisses et belges[73]. L'élargissement du territoire du Tour de France est un choix des organisateurs en partie contraint par la concurrence d'autres courses. Celle de la Course de la Paix, épreuve phare en Europe de l'Est et créée en 1948, est crainte par Jacques Goddet. Réservée aux amateurs, elle accueille un peloton plus large que le Tour de France. En 1961, une pendant occidental à la Course de la Paix est créé : le Tour de l'Avenir, réservé aux amateurs et couru par équipes nationales quelques heures avant les professionnels sur le même parcours que le Tour de France. La concurrence de la Course de la Paix poussera le Tour à adopter une formule « open » dans les années 1980. En 1954, un Tour d'Europe est organisé par Jean Leulliot. L'annonce de l'évènement incite le Tour de France prend pour la première fois son départ de l'étranger, à Amsterdam, en 1954. Il n'a cependant pas le succès escompté, en l'absence des meilleurs coureurs. Jean Leulliot ne parvient par à organiser de Tour d'Europe l'année suivante, en raison de la concurrence du Tour de Catalogne et du Tour de Grande-Bretagne. L'Équipe, Le Parisien Libéré, La Gazzetta dello Sport et Les Sports rachètent les droits de la course et organisent une deuxième et dernière édition en 1956. Les Tours de France et d'Italie « englobent » le Tour d'Europe et prennent le nom officiel de « Tour de France et d'Europe » et « Tour d'Italie et d'Europe »[74],[75],[76].
Les années 1950 voient le développement de la télévision. Elle arrive sur le Tour de France en 1948. L'arrivée au Parc des Princes est l'occasion du premier reportage en direct hertzien de la télévision française. L'année suivante, des résumés d'étapes sont diffusés lors des premiers journaux télévisés, puis à partir de 1955, le résumé de l'étape du jour est proposé en soirée. Avec la progression de l'équipement des ménages, la télévision prend le relai de la presse écrite. Lorsqu'ils ne possèdent pas de récepteur, le public « se [rassemble] devant les vitrines des magasins ou [fréquente] les cafés »[77]. La progression de ce nouveau média ne se fait pas sans accroc. Enthousiaste à son arrivée, Goddet craint l'emprise grandissante de la télévision sur son spectacle. En 1957, l'intervention de l'État est nécessaire pour assurer la présence de la télévision sur la course, après le refus de la RTF de payer une redevance 8 millions de francs, soit 3 millions de plus que l'année précédente[78]. En 1960, les arrivées de certaines étapes sont retransmises en direct, puis en 1962 les dix derniers kilomètres[77]. La diffusion du duel entre Anquetil et Poulidor sur les pentes du Puy de Dôme ne 1964 marque le début de la passion des Français pour le Tour de France télévisé[79].
La diffusion du Tour à la télévision offre un nouveau support publicitaire pour les produits dont la consommation se développe à cette époque. Alors que la publicité est encore interdite à la télévision, les courses cyclistes permettent aux marques de s'offrir une présence à l'écran[80]. D'autant que la situation économique de l'industrie de cycle leur est propice. Concurrencées par l'automobile et le cyclomoteur, des firmes disparaissent, et avec elles les équipes qu'elles financent. Le champion italien Fiorenzo Magni est en 1954 le premier à recourir à une marque « extra-sportive », les produits de beauté Nivéa, pour remplacer les cycles Ganna qui finançaient jusqu'alors son équipe. Il est rapidement imité par l'ensemble des équipes en 1955 et 1956. Les sponsors « extra-sportifs » restent cependant absent du Tour. Jacques Goddet s'affirme encore en 1961 « résolument opposé aux équipes de marques dans l'état anarchique actuel des choses ». Il se résigne pourtant à les accueillir à partir de 1962 pour relancer l'intérêt sportif de la course, après une édition 1961 écrasée par l'équipe de France et Jacques Anquetil, et auquel Poulidor a refusé de participer pour ne pas avoir à se mettre au service de se dernier. Les équipes nationales font un bref retour en 1967 et 1968, sans succès. Adoptée « à titre expérimental », la formule des équipes de marques est maintenue[81],[82].
Les marques qui s'affichent sur les maillots sont représentatives de la société de consommation. Les secteurs alimentaire (Leroux, Ghigi), de l'électroménager (Philco, Grammont, Grundig, Fagor), de l'automobile (Peugeot, Ford, Michelin, BP) sont très représentés, ainsi que les boissons alcoolisées (Saint-Raphaël, Margnat, Pelforth, Wiel's)[83]. Le « cannibale » Eddy Merckx, quintuple vainqueur du Tour entre 1969 et 1974, obtient son premier succès sous les couleurs des machines à café Faema, puis en remporte trois avec celles du boucher italien Molteni.
Le journal L'Équipe est en difficulté au milieu des années 1960 et est racheté en 1965 par Émilien Amaury. L'organisation du Tour, devenue trop lourde pour L'Équipe et Le Parisien libéré, est confiée à une société créée ad hoc en 1973, la Société d'exploitation du Tour de France, filiale du groupe Amaury. Goddet et Lévitant restent à la tête de la course, bien que leur direction et leur vision archaïque soit critiquée. Durant les années 1960 et jusqu'au années 1970, la situation économique du Tour se dégrade. Son organisation est déficitaire. Une relative désaffection du public est observée et la caravane se restreint considérablement. Les prix attribués aux coureurs demeurent inchangés de sorte que leur valeur réelle diminue, ce qui mécontente le peloton. Le Tour de France semble subir les conséquences de la place croissante de l'automobile dans la société, aux dépens de la bicyclette. « Les loisirs faciles, les vacances, la société de consommation éloignent de plus en plus le public des courses cyclistes, pour lui synonymes d'un passé tourné vers l'effort et désormais révolu »[84]. Le peloton cycliste français est également en difficulté. Des sponsors se retirent, au point qu'il ne reste plus que 4 équipes professionnelles françaises en 1974 et que l'Union nationale des cyclistes professionnels crée une équipe de cyclistes chômeurs, afin que ceux-ci puissent continuer de courir[85].
Le Tour de France parvient tout de même à se relancer au milieu des années 1970. Alors que les industries subissent la crise pétrolière, celle du cycle connaît un nouvel essor, grâce à une nouvelle mode partie de Californie au milieu des années 1960, et à l'émergence du mouvement écologique[86]. En s'éloignant des grands axes de circulation pour aller à la rencontre de la France paysanne, le Tour de France suscite l'intérêt du secteur agricole en 1974. Enfin, le Tour, spectacle gratuit et fête populaire, attire de nouveau la foule sur le bord des routes, probablement grâce à son « aspect fédérateur [...] face à la crise économique et au changement de société »[87]. En 1975, les organisateurs opèrent une relance sportive, commerciale et touristique du Tour, grâce à une nouvelle stratégie s'adressant aux spectateurs comme consommateurs et qui l'amène à devenir « promoteur de la France des loisirs et du tourisme ». Le classement du meilleur jeune, récompensé par un maillot blanc, et le maillot à pois de meilleur grimpeur sont introduits, et le Tour s'achève pour la première fois aux Champs-Élysées, où le Président de la République Valéry Giscard d'Estaing remet son maillot jaune à Bernard Thévenet, qui met fin au règne d'Eddy Merckx. Félix Lévitan décrit les nouvelles priorités du Tour : « Nous voulons par les Alpes, par les Pyrénées, par le Massif central et terminer à Paris ». La course offre une promotion aux stations balnéaires et de sports d'hiver du pays. Neuf stations de sports d'hiver sont ainsi visitées en 1975. Le promoteur immobilier Guy Merlin devient un partenaire important. Jusqu'en 1982, le Tour fait régulièrement étape dans des stations où il mène des projets immobiliers et signe même un contrat d'exclusivité en 1978. Avec le retour des sponsors, la caravane reprend de l'ampleur, et le Tour de France est bénéficiaire à partir de 1976[88].
Le tournant commercial pris par le Tour de France est toutefois critiqué. L'importance prise par la télévision bouleverse le déroulement de la course : l'intérêt d'un passage à l'écran pour un sponsor d'équipe pousse des coureurs à chercher avant tout à passer à la télévision. Un retour aux équipes nationales est évoqué. Les nouvelles priorités du parcours multiplient les transferts entre étapes, et entre les arrivées et les hôtels lorsque le Tour fait étape dans des petites communes, au point que les coureurs improvisent une grève à Valence d'Agen en 1978. Quelques aménagements sont décidés en 1979, notamment sur l'horaire de départ des étapes, mais les priorités restent les mêmes et le Tour est amené à prendre encore davantage d'ampleur dans les années qui suivent[89].
L'« extension mondialisée » du Tour de France[90]
Les années 1980 et 1990 sont une période d'internationalisation et de croissance du Tour de France.
Au début des années 1980, l'organisation du Tour de France cherche à élargir son audience et à trouver de nouveaux adversaires aux coureurs d'Europe de l'Ouest (les vainqueurs du Tour de France ne sont alors tous issus que de sept pays de cette région), et particulièrement à Bernard Hinault qui domine la compétition. L'idée d'un Tour « open », c'est-à-dire ouvert aux amateurs, est lancée par Félix Lévitan en 1982. Elle se réalise l'année suivante, moins ambitieuse toutefois que ce qu'imaginait ce dernier : il imaginait un Tour disputé pour moitié par des équipes professionnelles et une autre moitié d'équipes nationales amateurs, une proposition refusée par les groupes professionnels. Alors que le but de ce projet est de faire participer les coureurs d'Europe de l'Est, ceux-ci en sont empêchés par leurs dirigeants politiques. Une seule équipe amateur participe finalement au Tour de France 1983 : l'équipe de Colombie. Le bilan de cette première participation est mitigé, mais les éditions suivantes permettent à des coureurs colombiens d'émerger, tel que le grimpeur Luis Herrera, deux fois vainqueur du classement de la montagne, et de devenir professionnels dès 1985. Au lieu de s'ouvrir à l'Est, le Tour élargit son horizon à l'ouest, avec en 1986, outre la présence de deux équipes colombiennes, la première participation d'une équipe américaine, 7 Eleven et la première victoire d'un coureur non-européen, l'Américain Greg Lemond. Si aucun coureur amateur d'Europe de l'Est ne participe au Tour, l'ouverture progressive de certains pays permet à des athlètes de devenir professionnel en Europe de l'Ouest : ainsi le Yougoslave Primož Čerin est le premier « coureur de l'Est » à participer au Tour en 1986, et le Polonais Lech Piasecki le premier à porter le maillot jaune, en 1987[91]. Cette année-là, le Tour fait un pas vers l'Est en partant de Berlin-Ouest. La proposition de rallier ensuite la France en traversant la République démocratique allemande a été repoussée par la fédération cycliste est-allemande, mais cette édition marque tout de même la volonté d'internationaliser le Tour. Il faut attendre la chute du mur de Berlin puis la fin du pacte de Varsovie pour voir participer en nombre des coureurs d'Europe de l'Est. Ce sont d'abord les coureurs est-allemands qui intègrent des équipes professionnelles, dont Olaf Ludwig, vainqueur du classement par points en 1990. Lors de cette édition, l'équipe soviétique Alfa Lum participe, avec dans ses rangs Dimitri Konyshev, premier vainqueur d'étape russe. Des coureurs formés à l'Est brillent régulièrement sur le Tour durant les années 1990, comme le sprinteur ouzbek Djamolidine Abdoujaparov, le Letton Piotr Ugrumov, deuxième en Tour de France 1994, et l'Allemand Jan Ullrich, vainqueur en 1997[92].
La période voit le Tour de France devenir une « gigantesque machine économique »[93]. Son suivi médiatique, ses recettes, son budget croissent, et sa place dans le cyclisme devient hégémonique. Ces évolutions sont pour partie liées à une stratégie des organisateurs du Tour. Ceux-ci changent d'ailleurs à la fin des années 1980. En 1988, Jean-François Naquet-Radiguet remplace Félix Lévitan, avec l'objectif de « moderniser » le Tour. Il signe des contrats avec de nouveaux diffuseurs et insuffle une nouvelle stratégie commerciale, poursuivie par son successeur Jean-Marie Leblanc, qui le remplace dès l'année suivante. Il s'agit de débarrasser le Tour de son image de « foire commerciale », et de s'appuyer sur un nombre restreint de sponsors plus importants, formant un « club des partenaires ». Ces politiques permettent au Tour de tripler son budget entre 1988 et 2003, grâce à une forte augmentation des droits télévisés et des recettes publicitaires. La Société du Tour de France devient en 1993, une filiale d'Amaury Sport Organisation[94].
Le Tour de France, déjà doté d'un prestige plus importants que les autres courses depuis plusieurs décennies, acquiert une position hégémonique. Certains coureurs axent leur saison sur le Tour de France, et délaissent d'autres compétitions majeures du calendrier. Cette stratégie est initiée par Greg Lemond. Il est ensuite imité par Miguel Indurain, quintuple vainqueur entre 1991 et 1995, Lance Armstrong, détenteur du record de victoire avec sept succès de 1999 à 2005, ainsi que d'autres coureurs ayant eu l'objectif de gagner le Tour. Le cyclisme sur route se segmente entre spécialistes de classiques et de courses par étapes[95]. Bernard Hinault est ainsi le dernier lauréat de la « grande boucle » à compter au moins une victoire sur une classique dite « monument »[96]. Les championnats du monde et les Tours d'Italie et d'Espagne souffrent aussi de la concurrence du Tour. Les premiers, en étant déplacés de la fin de l'été au mois d'octobre, voient nombre des meilleurs coureurs s'abstenir d'y participer, et des coureurs de moindre notoriété s'imposer. Le Giro souffre également durant les années 1990 et 2000 d'une participation de moindre qualité que durant les décennies précédentes. La simple participation au Tour devient une motivation essentielle pour les sponsors d'équipe, ne serait-ce parfois que pour « montrer le maillot » en passant à la télévision pendant quelques heures, grâce à des échappées au long cours. Le nombre d'équipes candidates au Tour de France est croissant. En 1989, l'Union cycliste internationale instaure un système de sélection, basé sur le classement mondial par équipes, permettant aux mieux classées d'entre elles de participer automatiquement. Le nombre d'invitations laissées à la discrétion des organisateurs est faible, et les déceptions sont fréquentes, avec des conséquences sur le financement voire la survie des équipes écartées. La société BigMat annonce ainsi en 2003 la fin de son partenariat avec l'équipe portant alors son nom, après avoir essuyé deux non-sélections consécutives[97]. En 2001, l'équipe Mercury perd en cours de saison son second sponsor, Viatel, à la suite de sa non-sélection pour le Tour.
Le Tour de France face au dopage
Le dopage est apparu dans le cyclisme dès la fin du XIXe siècle, notamment lors des courses de six jours et autres compétitions sur piste très populaires à l'époque[98]. Jusqu'aux années 1950, il n'est pas un sujet d'inquiétude majeur et est « traité de façon cursive ou humoristique », bien que Desgrange s'en émeuve. Le célèbre article d'Albert Londres recueillant le témoignage des frères Pélissier en 1924 dévoile les pratiques de l'époque. Les autorités médicales, sportives et politiques commencent à s'en préoccuper durant les années 1950, lorsque plusieurs incidents révèlent la généralisation des pratiques dopantes, tels que le malaise de Jean Malléjac durant l'ascension du mont Ventoux en 1955, l'abandon en 1957 de Federico Bahamontes, souffrant d'une blessure au bras causée par « une piqûre de calcium », la chute de Roger Rivière en 1960, qui restera paralysé, et dans les poches duquel on trouve des cachets de palfium, un puissant analgésique[99],[100]. La découverte des produits détenus par de jeunes coureurs pris de malaise sur le Tour de l'Avenir en 1961 convainc le docteur Dumas à alerter la Fédération française de cyclisme.
Fichier:Provence ventoux simpson1.JPGLa lutte contre le dopage est lancée 1965, avec en France le vote de la loi de juin 1965 tendant à la répression de l'usage des stimulants à l'occasion des compétitions sportives, dite loi Herzog. Aux premiers contrôles lors du Tour de France 1966, les coureurs réagissent par une grève. Après la mort de Tom Simpson sur les pentes du mont Ventoux en 1967, des contrôles systématiques sont effectués à partir de 1968 aux arrivées de chaque étape, sur des coureurs tirés au sort. Deux cas spectaculaires marquent les deux décennies suivantes. Michel Pollentier est exclu du Tour de France 1978 alors qu'il vient de prendre le maillot jaune en remportant l'étape à l'Alpe d'Huez, pour avoir tenté de frauder au contrôle antidopage à l'aide d'une poire remplie d'urine propre. En 1988, le vainqueur Pedro Delgado est contrôlé positif au probénécide, mais n'est pas sanctionné car ce produit ne figure pas sur la liste des produits interdits par l'Union cycliste internationale, alors qu'il figure sur celle du Comité international olympique[101].
L'« affaire Festina » constitue un tournant dans la perception du dopage par le public[102] et dans l'image du Tour de France[103]. Willy Voet, soigneur de l'équipe Festina dont le leader est la vedette française Richard Virenque, est arrêté en possession de produits dopants lors d'un contrôle douanier à quelques jours du départ du Tour. L'enquête et les aveux de l'encadrement de l'équipe puis des coureurs dévoilent l'« ampleur du dopage »[104] et le passage « d'un dopage artisanal à un dopage industriel »[105]. L'enquête qui s'étend d'autres équipes met en péril le déroulement de la course. Les coureurs se plaignent d'être « traités comme du bétail »[106] et plusieurs équipes abandonnent. Le Tour parvient tout de même à son terme et voit la victoire de Marco Pantani.
Chaque année, le Tour est perturbé par un ou plusieurs cas de dopage. En 2006, Floyd Landis est le premier vainqueur du Tour à être déclassé pour dopage. Les exploits de Lance Armstrong, qui remporte sept fois le Tour de 1999 à 2005 en écrasant la concurrence, sont l'objet d'une « suspicion permanente »[107]. Les journalistes se saisissent du sujet et révèlent des témoignages confirmant les pratiques dopantes d'Armstrong, ainsi que des contrôles positifs[108]. En 2011, Alberto Contador prend le départ du Tour alors que le Tribunal arbitral du sport n'a pas encore statué sur le contrôle antidopage positif dont il a fait l'objet lors de l'édition précédente qu'il a remportée.
Annexes
Notes et références
- Viollet 2007, p. 17-19
- Viollet 2007, p. 19-23
- Lagrue 2004, p. 29
- Viollet 2007, p. 23-30
- Lagrue 2004, p. 30
- Lagrue 2004, p. 29-30
- Viollet 2007, p. 30-34
- Viollet 2007, p. 35-42
- Gaboriau 1995, p. 23-26
- Viollet 2007, p. 45
- Gaboriau 1995, p. 23
- Viollet 2007, p. 47-51
- Viollet 2007, p. 68
- On lui prête ces paroles adressées à Victor Breyer durant l'ascension de l'Aubisque : « Il y a que vous êtes des criminels ! Vous entendez ? Dites le de ma part à Desgranges. On ne demande pas à des hommes de faire un effort pareil! »
- Viollet 2007, p. 54-58
- Viollet 2007, p. 62-65
- Viollet 2007, p. 51-54
- Viollet 2007, p. 63
- Viollet 2007, p. 60-61
- Viollet 2007, p. 66
- Viollet 2007, p. 35
- Gaboriau 1995, p. 23 et 26
- Viollet 2007, p. 57
- Viollet 2007, p. 36
- Gaboriau 1995, p. 26
- Viollet 2007, p. 70-74
- Lagrue 2004, p. 51
- Paul Duboc est mis hors course à l'issue de la dernière étape pour avoir été aidé par un automobiliste. Seuls dix coureurs figurent cependant au classement général final car
- Chany 1988, p. 250
- Viollet 2007, p. 80
- 1913 ou 1914. Ainsi le vainqueur de ces deux éditions, le Belge Philippe Thys, affirme que Desgranges lui a fait porter un maillot jaune lors du Tour 1913. Le journaliste Roger Frankeur prête à Henri Desgranges ces paroles adressées à Thys en 1914 : « Vous le porterez l'an prochain, mon maillot jaune ! » (de Mondenard 2010, p. 89-93) D'autres sources font toutefois remonter la création du maillot jaune à
- Lagrue 2004, p. 55-57
- Viollet 2007, p. 88
- Viollet 2007, p. 79, 81-84, 87
- Viollet 2007, p. 85-86
- Viollet 2007, p. 88-89
- Viollet 2007, p. 94
- Viollet 2007, p. 95-96
- Lagrue 2004, p. 64-65
- Lagrue 2004, p. 64
- Viollet 2007, p. 105-108
- Lagrue 2004, p. 68
- Viollet 2007, p. 124-125
- Viollet 2007, p. 127-128
- Viollet 2007, p. 130-132
- Viollet 2007, p. 109
- Viollet 2007, p. 117-120
- Lagrue 2004, p. 67
- Viollet 2007, p. 113-115
- Viollet 2007, p. 110-113
- Viollet 2007, p. 115-116
- Viollet 2007, p. 133-150
- Viollet 2007, p. 145-151
- Lagrue 2004, p. 93-99
- Viollet 2007, p. 154
- Bœuf 2003, p. 155
- Lagrue 2004, p. 116-117
- Bœuf 2003, p. 149
- Barthes 1957, p. 111
- Lagrue 2004, p. 110, 114-115
- Barthes 1957, p. 112
- Barthes 1957, p. 113-114
- Bœuf 2003, p. 160-191
- Lagrue 2004, p. 110
- Bœuf 2003, p. 143
- Bœuf 2003, p. 136
- Bœuf 2003, p. 164
- Lagrue 2004, p. 117-127
- Bœuf 2003, p. 144
- Lagrue 2004, p. 138-139
- Bœuf 2003, p. 164-167
- Viollet 2007, p. 162-163
- Viollet 2007, p. 157-158, 163-164
- Le vélo, symbole européen sur cyclismag.com, 19 avril 2007. Consulté le 12 mars 2011
- L'Europe Tour est en panne sur cyclismag.com, 9 mai 2005. Consulté le 12 mars 2011
- Viollet 2007, p. 165-168
- Lagrue 2004, p. 134
- Viollet 2007, p. 174
- Viollet 2007, p. 175
- Lagrue 2004, p. 136
- Lagrue 2003, p. 138-134
- Viollet 2007, p. 190-191
- Lagrue 2004, p. 132-133
- Viollet 2007, p. 191-196
- Viollet 2007, p. 194, 206
- Viollet 2007, p. 202
- Viollet 2007, p. 205
- Viollet 2007, p. 206-209
- Viollet 2007, p. 210-213
- Bœuf 2003, p. 223) L'expression, employée dans le journal l'Équipe en juillet 1982, est de Jacques Goddet (
- Lagrue 2004, p. 166-169
- Viollet 2007, p. 215-222
- Lagrue 2004, p. 178
- Viollet 2007, p. 212-228
- Dorvillé 2002, p. 115
- Milan-San Remo, le Tour des Flandres, Paris-Roubaix, Liège-Bastogne-Liège et le Tour de Lombardie. Sont appelées « Monuments du cyclisme » les classiques
- Lagrue 2004, p. 177-187
- Jean-Pierre de Mondenard, Dopage : L'imposture des performances, Paris, Chiron, juin 2006, 3e éd., 288 p. (ISBN 2702706398), p. 10-12
- Chany 2004, p. 447
- Bœuf 2003, p. 173-179
- Bœuf 2003, p. 180-182
- Viollet 2007, p. 240
- Bœuf 2003, p. 183
- Lagrue 2004, p. 187
- Bœuf 2003, p. 185
- Le Tour de France tient de plus en plus mal la route sur lesoir.be, 25 juillet 1998. Consulté le 6 juillet 2011
- Viollet 2007, p. 241
- Les journalistes Pierre Ballester et David Walsh publient trois ouvrages à ce sujet : L.A. Confidentiel : Les secrets de Lance Armstrong en 2004, L.A. Officiel en 2006, et Le sale tour en 2009
Bibliographie
- Philippe Gaboriau, Le Tour de France et le vélo : Histoire sociale d'une épopée contemporaine, L'Harmattan, 1995, 217 p. (ISBN 2738435076)
- Pierre Lagrue, Le Tour de France : Reflet de l'histoire et de la société, L'Harmattan, 2004, 300 p. (ISBN 2747566757)
- Sandrine Viollet, Le Tour de France cycliste : 1903-2005, L'Harmattan, 2007, 256 p. (ISBN 9782296025059)
- Pierre Chany, La fabuleuse histoire du cyclisme : Des origines à 1955, Nathan, 1988, 539 p. (ISBN 2092864300)
- Pierre Chany, La fabuleuse histoire du Tour de France : livre officiel du centenaire, Minerva, 2004, 959 p. (ISBN 2830707664)
- Jean-Pierre de Mondenard, 36 histoires du Tour de France, Hugo & Cie, 2010, 308 p. (ISBN 9782755605792)
- Jean-Luc Bœuf et Yves Léonard, La République du Tour de France, Seuil, 2003 (ISBN 202058073X)
- Roland Barthes, Mythologies, Seuil, 1957 (ISBN 2020005859)
- Christian Dorvillé et Sébastien Fleuriel (dir.), 100 Paris-Roubaix : Parimoine d'un siècle, Septentrion, 2002 (ISBN 2859397582)
Wikimedia Foundation. 2010.