- Karabbas
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Karabbas ou Carabas est un personnage qui selon Philon d'Alexandrie est atteint de folie « douce et tranquille ». Il est l'acteur principal d'une parodie visant à humilier les juifs à Alexandrie en été 38, alors qu'Hérode Agrippa, le nouveau roi des Juifs fait étape dans cette ville, avant de se rendre dans les territoires de son nouveau royaume. Cette parodie qui se déroule dans le gymnase en présence, semble-t-il du roi Agrippa et du gouverneur Flachus (qui avait le rang de vice-roi d'Egypte), pourrait selon Philon avoir été suscité par lui pour humilier son visiteur. La scène racontée a attiré l'attention de plusieurs auteurs, car elle ressemble par bien des points à ce qui est fait subir à un des deux Jésus (Jésus Barabbas ou Jésus le roi des Juifs) dans les récits de la Passion contenus dans les Évangiles. Par ailleurs, le nom même par lequel les acteurs de cette parodie appellent leur victime (Karabbas) fait penser à Barabbas, l'alter ego de Jésus Christ dans ces récits. De plus, cette parodie se déroule à peine 14 mois après que Ponce Pilate a été renvoyé à Rome par le légat de Syrie « pour qu'il s'explique auprès de l'empereur », après avoir commis une grosse faute.
Le texte de Philon d'Alexandrie
Ces discours irritèrent Flaccus; néanmoins, en public, il se montrait affable et prévenant pour Agrippa, dans la crainte d’offenser celui qui l’envoyait, mais en secret sa jalousie et sa haine se faisaient jour. N’osant pas agir en face, il outragea indirectement le roi. [33] Il souffrit que la canaille de la ville, ramas d’oisifs et de fainéants, dont la seule occupation est de médire d’autrui et de faire sur chacun des lazzis, poursuivit Agrippa de ses quolibets et de ses injures. Peut-être en avait-il donné lui-même l’exemple, peut-être y poussa-t-il la foule par l’entremise des gens qui font métier de ces basses intrigues. [34] L’occasion parut bonne; le roi devint tout le jour, dans le gymnase, l’objet des bouffonneries et des sarcasmes; on se servit des compositeurs de pantomimes et d’autres faiseurs de farces qui lançaient contre lui des traits satiriques et produisaient ainsi la bassesse de leur esprit, plus docile et plus porté à ces obscénités qu’aux conceptions nobles et sérieuses. [35] J’accuse à faux, dira-t-on? Mais alors pourquoi le président indigné ne blâma-t-il point, ne réprima-t-il pas ces insolences envers un si haut personnage? Ne se fussent-elles point adressées à un roi, elles s’attaquaient du moins à un familier de César, qui avait bien droit d’être honoré de quelque privilège. Ce sont là des preuves évidentes que Flaccus autorisa ces farces malséantes. Celui qui, pouvant châtier ou empêcher quelqu’un de mal faire, ne l’empêche même pas, montre clairement qu’il l’excite. Quand une plèbe désordonnée a trouvé l’occasion de mal faire, elle ne lâche point prise aisément et se porte d’excès en excès. [36] Il y avait à Alexandrie un fou, nommé Carabas, non pas de ceux dont la folie sauvage et furieuse se tourne contre eux-mêmes ou contre ceux qui les approchent; il était d’humeur douce et tranquille. [37] Ce fou, bravant le froid et le chaud, errait jour et nuit dans les rues, servant de jouet aux jeunes gens et aux enfants désœuvrés. On traîna ce misérable au gymnase, là on l’établit sur un lieu élevé afin qu’il fût aperçu de tous. On lui plaça sur la tête une large feuille de papier en guise de diadème, sur le corps une natte grossière en guise de manteau; quelqu’un ayant vu sur le chemin un roseau, le ramassa et le lui mit dans la main en place de sceptre. [38] Après l’avoir orné ainsi des insignes de la royauté et transformé en roi de théâtre, des jeunes gens, portant des bâtons sur leurs épaules, formèrent autour de sa personne comme une garde; puis les uns vinrent le saluer, d’autres lui demander justice, d’autres lui donner conseil sur les affaires publiques. [39] La foule environnante l’acclama à grande voix, le saluant du titre de Marin, mot qui en syriaque signifie, dit-on, prince[1]. Or ils savaient bien qu’Agrippa était d’origine syrienne[2], et que la plus grande partie de son royaume était en Syrie.
Notes et références
Liens externes
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