République de Weimar

République de Weimar

52°31′N 13°24′E / 52.517, 13.4

République de Weimar
Weimarer Republik de

1919 – 1933

Drapeau
Blason

Drapeau et armoiries

Hymne : Das Lied der Deutschen

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Länder allemands pendant la République de Weimar

Informations générales
Statut République
Capitale Berlin
Langue Allemand
Monnaie Papiermark (1919-1923)
Reichsmark (1924-1933)
Démographie
Population 62 411 000 hab. (est. 1925)
Superficie
Superficie 468 787 km2 (1919)
Histoire et évènements
11 août 1919 Création
23 mars 1933 Loi des pleins pouvoirs

Entités précédentes :

La République de Weimar est le nom donné par les historiens au régime allemand en place de 1919 à 1933. Elle a été fondée à l'issue de la Première Guerre mondiale, consécutivement à la défaite de l'Empire allemand et de la Révolution de 1918, prenant le nom de la ville (Weimar) où l’Assemblée nationale constituante allemande rédigea la Constitution, adoptée le 31 juillet 1919.

Elle était une démocratie parlementaire dirigée par le président du Reich, et gouvernée par le chancelier du Reich, élu par et responsable devant le Reichstag ; elle est marquée par de nombreuses tensions et des conflits internes. Suite à la nomination d'Adolf Hitler comme chancelier en 1933, la politique autoritaire mise en place, la confiscation progressive du pouvoir politique au profit du NSDAP et la modification des structures politiques entraîne la fin de facto de la République de Weimar et l'avènement du Troisième Reich. Le régime de Weimar ne fut abrogé officiellement qu'en 1945, mais la période hitlérienne l'a vidé de toute substance.

Sommaire

Révolution contrôlée : établissement de la république (1918-1919)

Article détaillé : Révolution allemande de novembre 1918.

Depuis 1916, l'Empire allemand de 1871 est gouverné par les militaires de Oberste Heeresleitung (OHL, commandement suprême de l'armée), avec comme chef d'État-major Paul von Hindenburg. Lorsqu'il apparut que la guerre était perdue, l'OHL demanda qu'un gouvernement civil soit formé (le gouvernement civil existait déjà puisqu'au début de la guerre ce fut Bethmann-Hollweg, le chancelier au « chiffon de papier » il fut remplacé par Maichaelis et ce dernier par Hertling. En octobre 1918, lorsque Ludendorff demanda que des contacts soient pris pour un armistice et qu'il demandait de parlementariser le régime, Hertling démissionna et fut remplacé par le prince Max de Bade[1].

Le 28 octobre 1918, la constitution de 1871 fut amendée pour faire du Reich une démocratie parlementaire, ce qui avait été refusé depuis un demi-siècle. Le chancelier serait désormais responsable devant le Reichstag et non plus devant l'empereur. Le plan originel de transformer l'Allemagne en une monarchie constitutionnelle devint rapidement obsolète alors que le pays grondait de révolte. L’Allemagne croulait sous les soldats et les blessés revenant du front. La violence était omniprésente, des combats se produisaient entre groupes rivaux de gauche et de droite.

Le 29 octobre, une rébellion éclata lorsque le commandement militaire, sans consultation du gouvernement, ordonna une ultime sortie à la flotte allemande. Cette manœuvre était sans espoir d'un point de vue militaire et risquait de mettre fin aux négociations de paix. Les équipages de deux navires de Wilhelmshaven se mutinèrent. Lorsque les militaires arrêtèrent environ 1 000 marins, et les transportèrent à Kiel, cette révolte locale se transforma rapidement en une rébellion généralisée qui s'étendit rapidement à toute l'Allemagne. Des marins, des soldats ainsi que des ouvriers se solidarisèrent avec les mutins. Ceux-ci commencèrent à élire des « conseils ouvriers » qui regroupaient ouvriers et soldats sur le modèle des soviets de la Révolution russe. Ceux-ci prirent alors le pouvoir civil et militaire dans de nombreuses villes. Le 7 novembre, la révolution atteignit Munich, provoquant la fuite du dernier souverain allemand, Louis III de Bavière.

À l'origine, la demande des conseils d'ouvriers était modeste, ils voulaient obtenir la libération des marins détenus. À l'opposé de la Russie une année auparavant, ces conseils n'étaient pas contrôlés par le Parti communiste d'Allemagne, qui n'était pas encore fondé. Toutefois, avec l'émergence du régime bolchévique lors de la Révolution russe, cette rébellion provoqua une grande inquiétude dans les classes supérieures et moyennes. Le pays semblait à la veille de devenir une république socialiste.

Les représentants de la classe ouvrière étaient eux-mêmes divisés. Les sociaux-démocrates indépendants (USPD) qui tendaient à l'instauration d'un système socialiste se séparèrent des sociaux-démocrates majoritaires (M)SPD. Le reste des sociaux-démocrates (« (M)SPD »), qui soutenaient un système parlementaire, décidèrent de prendre la tête du mouvement et demandèrent le 7 novembre à l'empereur Guillaume II d'abdiquer.

Le 9 novembre 1918, la République était proclamée par Philipp Scheidemann au palais du Reichstag à Berlin, deux heures avant la république socialiste de Karl Liebknecht. Toujours le 9 novembre, dans un acte litigieux, le chancelier du Reich, le prince Max von Baden, transféra tous ses pouvoirs à Friedrich Ebert, le dirigeant du MSPD. Il était clair que cet acte ne suffirait pas en lui-même à satisfaire les masses.

Le lendemain, un gouvernement révolutionnaire appelé Conseil des commissaires du peuple (Rat der Volksbeauftragten) fut créé. Il comprenait trois membres du MSPD et trois membres de l'USPD, et était co-dirigé par Ebert pour le MSPD et Hugo Haase pour le USPD. Bien que ce gouvernement fût confirmé par le conseil ouvrier des travailleurs de Berlin, les spartakistes, qui composaient l'aile gauche de l'USPD et étaient dirigés par Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht, s'y opposèrent.

Ebert appela alors à un Congrès des conseils d’ouvriers et de soldats du Reich, qui eut lieu du 16 au 20 décembre 1918, et dans lequel le MSPD obtint la majorité. Ebert réussit à faire tenir rapidement des élections pour former l’Assemblée nationale constituante afin de mettre en place au plus vite une constitution parlementaire, marginalisant ainsi le mouvement pour l'instauration d'une république socialiste.

Afin de s'assurer un nouveau gouvernement capable de conserver le contrôle du pays, Ebert s'allia avec l'OHL, dirigé par le successeur de Ludendorff, le général Wilhelm Groener. Ce pacte Ebert-Groener stipulait que le gouvernement ne réformerait pas l'armée tant que celle-ci jurerait de protéger le gouvernement. D'un côté, cet arrangement symbolisait l'acceptation de ce gouvernement par l'armée et rassurait les classes moyennes, et d'un autre côté, l'aile gauche considérait cet accord comme une trahison des intérêts des travailleurs, et faisait de l'armée un groupe conservateur qui aura une grande influence sur le destin de la république de Weimar. Le 11 novembre 1918 l'armistice mettant fin à la Première Guerre mondiale est signée.

L'accord entre les militaires et le nouveau gouvernement marqua aussi une des étapes du partage de la classe ouvrière entre le SPD et le Parti communiste (KPD). La rupture devient définitive le 23 novembre 1918 lorsqu'Ebert fait appel à l'OHL pour mater une mutinerie à Berlin lors de laquelle des soldats avaient pris le contrôle de la ville et bloqué la Chancellerie du Reich. L'intervention brutale fit de nombreux morts et blessés, provoquant l'appel de l'aile gauche à la sécession avec le MSPD, qui de leur point de vue avait pactisé avec les militaires contre-révolutionnaires afin de supprimer la révolution. L'USPD quitte alors le Conseil des commissaires du peuple après seulement quelques semaines. La scission devient encore plus profonde lorsqu'en décembre, le Parti communiste d'Allemagne (KPD) est fondé par le mouvement spartakiste et d'autres groupes se réclamant du marxisme révolutionnaire.

La délégation allemande lors des négociations du traité de Versailles

En janvier, une nouvelle tentative d'établir un régime socialiste par les travailleurs dans les rues de Berlin est réprimée par les unités d'un Freikorps, un groupe paramilitaire composé de volontaires. Le point de non retour est atteint le 15 janvier avec l'assassinat de Rosa Luxemburg et de Karl Liebknecht. À la demande d'Ebert, les meurtriers ne sont pas jugés par une cour civile, mais par un tribunal militaire, qui rend des sentences très légères. Le général Walther von Lüttwitz réprima avec ses hommes le soulèvement spartakiste.

Les élections à l’Assemblée nationale constituante eurent lieu le 19 janvier 1919. À ce moment-là, les partis de gauche, y compris l'USPD, n'étaient pas vraiment organisés, et le KPD avait refusé de se présenter aux élections, ce qui mena à une solide majorité en sièges pour les mouvements modérés. À lui seul, le SPD obtient 45 % des suffrages exprimés ce qui permet à Ebert de devenir le premier Reichspräsident de la République de Weimar. Pour éviter les émeutes en cours à Berlin, l’Assemblée nationale constituante se réunit dans la ville de Weimar, lui donnant ainsi son nom non officiel.

Durant les débats à Weimar, les combats continuaient. Une « république soviétique », la République des Conseils (Räterrépublik) de Bavière fut même déclarée à Munich, mais elle fut arrêtée en mai 1919 par le Freikorps et des unités de l'armée régulière, provoquant la poursuite des combats dans le pays. Des combats eurent aussi lieu dans les provinces orientales qui restaient fidèles à l'empereur et ne voulaient pas d'une république.

Pendant ce temps, la délégation aux pourparlers de paix signa le traité de Versailles, acceptant d'importantes réductions dans l'armée allemande, le paiement d'importants dommages de guerre, et une clause de responsabilité de la guerre. Ainsi naquit le mythe du coup de poignard dans le dos qui connut un grand succès. Adolf Hitler (parmi de nombreux autres) reprochera plus tard à la République la signature de ce traité.

Le traité de Versailles est un élément important de l’histoire de la République de Weimar. Avant d’en énumérer les composantes, il est important de remettre la situation en contexte. L'Allemagne est en pleine révolution et le pouvoir politique reste encore très instable, mais le pays fonctionne démocratiquement, plus précisément par vote de l’Assemblée nationale. Elle se bat encore sur le front, mais sa défaite n’est qu’une question de temps. Les alliés préparent seuls les conditions de paix, et tentent de les imposer dès le 7 mai 1918 à l’Allemagne.

La clause la plus dérangeante du traité se trouve être l’article 231, soit l’imposition du problème de responsabilité de la guerre à l’Allemagne. Les réactions sont alors unanimes ; cette clause est tout simplement irrecevable. Le président de l’Assemblée, Philipp Scheidemann, posa une question qui résume bien l’opinion des Allemands sur le traité : « Comment une main qui s’imposerait et nous imposerait ces chaînes pourrait-elle ne pas se dessécher ? » Les gens de l’administration politique ont tendance à défendre la politique impériale, et défendent l’idée que l’Allemagne a le droit à un traitement juste et de ne pas être obligée de signer un traité sous la contrainte. L’Allemagne espérait également une paix honorable avec ses adversaires. Finalement, sous l’intransigeance des vainqueurs, l’Assemblée nationale vote le 28 juin à 237 voix contre 138 pour la signature du traité, grâce à une coalition du parti Social-démocrate et du Zentrum.

L’historiographie nous mentionne que le gouvernement a accepté de signer le traité parce qu’il n’avait pas le choix. L’armée allemande étant faible, ils voulaient éviter l’occupation du territoire ainsi que l’éclatement du Reich. Aussi, les documents d’affaires étrangères confirmaient bel et bien la culpabilité allemande, ce qui fut toutefois caché à la population. Pour ce qui en est des clauses du traité, les historiens sont unanimes ; les conditions de paix dépassaient les pires craintes des plus pessimistes. La pire est bien entendu celle de la responsabilité de la guerre, qui mentionne également que l’Allemagne doit payer la plus grande partie des réparations des alliés (les montants ne sont toutefois pas immédiatement fixés).

En plus de cela, le pays doit donner 5 000 camions et locomotives, 15 000 wagons ainsi qu’une partie de sa flotte commerciale. De plus elle perd une partie de son territoire ; l’Alsace-Lorraine, annexée à la France lors de sa défaite de 1870 lui est restituée, le territoire entourant la ville de Posnan fut remis à la Pologne pour ainsi couper le territoire de la Prusse orientale ; le canton d’Eupen-Malmedy appartient désormais à la Belgique. Weimar doit également renoncer à toutes ses colonies d’Afrique. En tout, l’Allemagne perd environ 14 % de son territoire, de même que 10 % de sa population. Ces condamnations territoriales font en sorte que la république perd 1 million de tonnes de charbon, une baisse de sa production de minerai de 50 %, de 25 % pour le coke et de 13 % pour le blé. De plus, l’armée allemande est réduite à 100 000 hommes et 15 000 marins, et les chars de combats, les sous-marins, les avions et les gaz sont désormais interdits. L’adhésion à la SDN reste également temporairement interdite au Reich.

Les historiens notent un mécontentement général de l’adoption du traité de Versailles chez le peuple allemand. L’atmosphère politique devient complètement empoisonnée par la signature du traité. Les représentants de l’extrême gauche ont même qualifié les sociaux-démocrates (ceux qui ont signé le traité) de « criminels de novembre ». L’extrême droite a également mené une propagande mentionnant que la culpabilité de guerre n’était qu’un grand mensonge. L’opinion publique, menée entre autres par les partis extrémistes, a mené une action violente dirigée contre le gouvernement, et ce jusqu’en 1923. Les dirigeants sont accusés d’avoir trahi l’empire, et Versailles a donné naissance à deux problèmes politiques. Premièrement, l’adoption de la responsabilité de guerre posa problème, car l’Empire, selon la majorité des Allemands, n’était pas responsable du déclenchement de la guerre, du moins pas plus que les autres pays impliqués. Deuxièmement, cette adoption fut considérée comme un coup de poignard dans le dos de l’armée allemande, qui se battait encore sur le front. En d’autres mots, l’armée était invaincue sur le champ de bataille, mais fut assassinée par ses propres dirigeants politiques. Pourtant, l’Allemagne, selon les historiens, n’était pas condamnée à un avenir noir ; au contraire, Weimar avait de bonnes chances de redevenir une grande puissance européenne. Cependant, le mécontentement était si intense qu’il paralysa gravement la nouvelle république et l’empêchait de rompre avec l’ancienne mentalité impérialiste. Bref, l’historiographie mentionne qu’il y a toujours existé un consensus chez tous les partis politiques de l’histoire de Weimar ; il était inadmissible d’accepter le traité de Versailles, et il devait absolument être révisé. Le nouveau régime n’a pu montrer son utilité que quelques années plus tard, afin de trouver des solutions temporaires à la crise de 1923.

Le président du Reich, Friedrich Ebert du MSPD, promulgua la nouvelle nouvelle constitution le 11 août 1919.

Les Länder membres

Länder Capitale
Flagge Herzogtum Anhalt.svg État libre d'Anhalt (Freistaat Anhalt) Dessau-Roßlau
Flagge Großherzogtum Baden (1891-1918).svg République de Bade (Freistaat Baden) Karlsruhe
Flag of Bavaria (striped).svg Bavière (Freistaat Bayern) Munich
Flagge Herzogtum Braunschweig.svg État libre de Brunswick (Freistaat Braunschweig) Brunswick
Flagge Großherzogtum Hessen ohne Wappen.svg État populaire de Hesse (Volksstaat Hessen) Darmstadt
Flagge Fürstentum Lippe.svg État libre de Lippe (Freistaat Lippe) Detmold
Flagge Großherzogtümer Mecklenburg.svg État libre de Mecklembourg-Schwerin (Freistaat Mecklenburg-Schwerin) Schwerin
Flagge Großherzogtümer Mecklenburg.svg État libre de Mecklembourg-Strelitz (Freistaat Mecklenburg-Strelitz) Neustrelitz
Flag of Oldenburg.svg État libre d'Oldenbourg (Freistaat Oldenburg) Oldenburg
Flag of Preussen 1919-1935.jpg État libre de Prusse (Freistaat Preußen) Berlin
Flagge Herzogtum Sachsen-Coburg-Gotha (1911-1920).svg Saxe-Cobourg (Sachsen-Coburg) - intégré à la Bavière en 1920 Cobourg
Flag of Saxony.svg État libre de Saxe (Freistaat Sachsen) Dresde
Flagge Fürstentum Schaumburg-Lippe.svg État libre de Schaumbourg-Lippe (Freistaat Schaumburg-Lippe) Bückeburg
Flag of Thuringia.svg Thuringe (Thüringen) - Depuis 1920 Weimar
Flag of Germany (3-2 aspect ratio).svg Waldeck-Pyrmont - Intègre la Prusse en 1921/1929 Arolsen
Flagge Königreich Württemberg.svg État libre populaire de Wurtemberg (Freier Volksstaat Württemberg) Stuttgart
Villes-États
Flag of Bremen.svg Brême
Flag of Hamburg.svg Hambourg
Flag of the Free City of Lübeck.svg Lübeck
États constituant la Thuringe en 1920
Flagge Fürstentum Reuß ältere Linie.svg État populaire de Reuss (Volksstaat Reuß) Gera
Flagge Herzogtum Sachsen-Coburg-Gotha (1826-1911).svg Saxe-Altenbourg (Sachsen-Altenburg) Altenburg
Flagge Herzogtum Sachsen-Coburg-Gotha (1911-1920).svg Saxe-Gotha (Sachsen-Gotha) Gotha
Flagge Herzogtum Sachsen-Coburg-Gotha (1826-1911).svg Saxe-Meiningen (Sachsen-Meiningen) Meiningen
Flagge Großherzogtum Sachsen-Weimar-Eisenach (1813-1897).svg Saxe-Weimar-Eisenach (Sachsen-Weimar-Eisenach) Weimar
Flagge Fürstentümer Schwarzburg.svg Schwarzbourg-Rudolstadt Rudolstadt
Flagge Fürstentümer Schwarzburg.svg Schwarzbourg-Sondershausen Sondershausen

Les premières années : Conflits internes et difficultés économiques (1919-1923)

L'agitation politique

Des troupes du gouvernement Kapp dans les rues de Berlin lors du putsch de 1920

Dès le début, la République fut sous la pression des extrémistes de tous bords. L'extrême-gauche accusait les sociaux-démocrates de trahir l'idéal du mouvement ouvrier en s'alliant aux forces de l'ancien régime, au lieu de poursuivre une révolution communiste. La droite conservatrice était opposée au système démocratique et préférait conserver la monarchie ou l'État autoritaire qu'était l'empire de 1871.

Le 13 mars 1920 a lieu le putsch de Kapp. Des troupes du Freikorps occupèrent Berlin avec la complicité du commandant militaire de la ville, le général Walther von Lüttwitz et installèrent Wolfgang Kapp, un journaliste de droite, au poste de chancelier du nouveau gouvernement. Ebert se retira avec le parlement de Berlin et s'installa à Dresde. La riposte fut immédiate, un appel à la grève générale fut lancé. Celle-ci fut totale et dura quatre jours, bloquant toute l'économie, ce qui obligea Kapp et le Freikorps à se retirer dès le 17 mars. Toutefois, cet épisode illustre la faiblesse du nouveau régime puisque l'armée régulière refusa d'intervenir pour mater le putsch malgré les ordres d'Ebert.

Inspiré par le succès de la grève générale, une révolte communiste se produisit dans la Ruhr en 1920 lorsque 50 000 personnes formèrent une armée rouge et prirent le contrôle de la province. L'armée régulière et le Freikorps mirent fin à celle-ci sans avoir reçu d'ordre du gouvernement. D'autre rébellions communistes furent aussi arrêtées en mars 1921 dans la Saxe et à Hambourg. On donna à ces rébellions le nom d'Action de mars.

Le 24 juin 1922, le ministre des Affaires étrangères Walter Rathenau est assassiné par l'Organisation Consul, un groupe terroriste d'extrême-droite qui lui reproche sa volonté de se rapprocher avec les Alliés ainsi que ses origines israélites. Des centaines d'attentats perpétrés par l'extrême droite à l'encontre des personnalités politiques des mouvances modérées ensanglantent les premières années de la république de Weimar et déstabilisent le régime.

En 1923, la poussée inflationniste provoque de nouveaux troubles. Une armée clandestine, la « Reichswehr noire », qui rassemble en tout 20 000 hommes, tente un putsch, mais est matée en octobre par l'armée régulière. Des vagues révolutionnaires se développent en Thuringe, à Hambourg et en Saxe, mais sont là encore écrasées par l'armée. Le 8 novembre 1923 a lieu une nouvelle attaque contre la république : le Putsch de la brasserie fomenté par Adolf Hitler à Munich. Malgré l'échec du putsch et son interdiction temporaire, le NSDAP (Parti nazi) fondé en 1920 deviendra l'une des forces principales qui mèneront à l'effondrement de la république.

La crise monétaire

L'Allemagne de l'après guerre connut une crise économique sans précédent dont l'hyperinflation fut la caractéristique principale.

En 1923, la république n'avait plus les moyens de payer les réparations fixées par le traité de Versailles, et le nouveau gouvernement cessa les paiements. En réponse, la France sous la direction de Raymond Poincaré et la Belgique occupent la Ruhr, la région la plus industrialisée de l'Allemagne. Ils prirent le contrôle des mines et des usines le 11 janvier 1923. L'appel à la grève générale et à la résistance passive pendant 8 mois amena l'économie allemande vers l'effondrement.

Timbre surchargé en millions de marks pour suivre l'inflation des tarifs postaux

Bien qu'en grève, les ouvriers devaient être payés par l'État, pour ce faire, de la monnaie fut imprimée en masse, ce qui ouvrit une période d'hyperinflation. La valeur du mark décline de 4,2 mark par dollar à 1 000 000 de marks par dollar en août 1923 et passe à 4 200 000 000 000 de marks par dollar le 20 novembre de la même année. L'inflation est telle que les prix changent d'heure en heure et que les ouvriers se font payer une voire deux fois par jour pour s'assurer que leur salaire aura encore de la valeur à la sortie du travail. L'administration des Postes émet des timbres sans valeur faciale, une surcharge avec la valeur du timbre est apposée lors de la mise en circulation de la planche, le coût de l'envoi d'une lettre de 30 grammes est multiplié par 6 entre le 1er janvier et le 1er Juillet 1923 (de 10 marks à 60 marks), puis par 1500 jusqu'au 20 septembre (l'envoi d'une lettre de 30 grammes revient alors à 100 000 marks), puis par 400 jusqu'au 12 novembre, soit 40 millions de marks ; Le 30 novembre, l'envoi de cette même lettre est payé 30 milliards de marks[2]. L'apparition du troc (notamment pour se procurer des produits alimentaires) témoigne de la perte de confiance dans la monnaie.

L'hyperinflation n'a pas été endiguée pour plusieurs raisons. Tout d'abord, les grandes compagnies industrielles allemandes voyaient d'un bon œil ce phénomène qui permettait d'alléger leur dettes auprès des banques et d'exporter plus facilement leur production (le Papiermark perdant de la valeur auprès des autres monnaies internationales, les produits allemands devenaient moins chers). Mais l'État allemand porte également une part de responsabilité puisque l'hyperinflation lui permettait de combler lui aussi ses dettes et de restaurer ainsi l'équilibre budgétaire.

Le 1er décembre 1923, une nouvelle devise, le Rentenmark, est créé au taux de 4 200 000 000 000 de marks par dollar. Cette nouvelle monnaie est échangée contre les marks mis en circulation à la période précédente au taux de 1 pfennig pour 10 milliards de marks).

Après l'adoption du plan Dawes, pour le rééchelonnement des dommages, le paiement des réparations put reprendre et le 17 août 1924 les troupes françaises commencèrent à quitter la Ruhr.

La stabilisation du régime (1924-1929)

Le redressement économique

Gustav Stresemann en 1925.

La première action du nouveau chancelier, Gustav Stresemann, fut d'introduire une nouvelle monnaie, le Rentenmark, pour arrêter l'hyperinflation qui rongeait l'économie et la société allemande. Il fut assisté dans son action par le docteur Schacht, directeur de la Reichsbank ainsi que par le ministre des Finances, Hans Luther qui mirent tous les deux en place une banque chargée d'émettre cette nouvelle monnaie, la Rentenbank. Le gouvernement réussit son opération en refusant à plusieurs reprises d'augmenter la masse monétaire, première cause de la spirale inflationniste. Afin de poursuivre la stabilisation de l'économie, il diminua les dépenses de l'État et augmenta les taxes et les impôts.

Durant cette période, fut introduit le plan Dawes qui visait à associer le remboursement des réparations de guerre avec la capacité économique de l'Allemagne. Simultanément, l'Allemagne est admise à la société des Nations, trouve des arrangements pour sa frontière ouest, signe un pacte de neutralité avec la Russie, et arrête le désarmement. Toutefois, ces progrès sont financés par des prêts étrangers, augmentant la dette du pays, pendant que le commerce diminue et que le chômage augmente. Les réformes que Stresemann met en place ne modifient pas en profondeur les faiblesses de la République de Weimar, mais elles lui donnent l'apparence d'une démocratie.

En 1929, la mort de Stresemann coïncide avec la fin de l'âge d'or de la République de Weimar.

L'effondrement de la république de Weimar et l'ascension d'Hitler (1929-1933)

Les nouvelles difficultés économiques

À la fin des années 1920, malgré une relative prospérité, l'Allemagne se trouve dans une situation peu stable. Elle est en effet dépendante de l'extérieur sur deux niveaux :

  • premièrement, elle a un déficit budgétaire impressionnant (6,5 milliards de dollars) ce qui rend indispensable l'importation de capitaux étrangers pour l'investissement dans l'industrie nationale. De plus, environ 40 % de ces capitaux sont des prêts à court terme aux banques allemandes alors que ces dernières les investissent ensuite dans l'industrie nationale sous forme de crédits à long terme. Si le prêt des capitaux étrangers n'est pas renouvelé, les banques se trouvent donc dans l'impossibilité de rembourser leur dettes ;
  • deuxièmement, même si la balance commerciale est déficitaire, l'Allemagne exporte, ce qui la rend dépendante de la conjoncture internationale. Si le commerce mondial diminue, l'économie allemande en souffre.

Or, la crise de 1929 va porter au grand jour les faiblesses de l'économie allemande des années 1920. Dès la fin de 1928, les capitaux provenant de l'étranger, notamment ceux des États-Unis, diminuent. Puis, à partir de 1929, l'affaiblissement du commerce international (provoqué par le ralentissement du commerce américain) se répercute sur le niveau des exportations allemandes qui baissent de 25 % en volume de 1929 à 1932. La Bourse allemande s'effondre, la production industrielle chute de 20 % et le 11 mai 1931, la plus importante banque autrichienne, le Kredit Anstalt, fait faillite.

Échec des politiques économiques et mécontentement général

Le gouvernement allemand doit donc faire face à une situation de panique bancaire, car les Allemands, n'ayant plus confiance dans les institutions bancaires qui sont au bord de la faillite, se ruent vers les banques pour opérer des retraits massifs. La Danatbank, importante institution de crédits, annonce le 12 juillet 1931 l'impossibilité de régler ses paiements. Le lendemain, le gouvernement de Brüning (« Zentrum ») annonce la fermeture temporaire des banques et des caisses d'épargne pour tenter de calmer les esprits.

L'économie allemande plonge dans la récession (baisse de la production et des prix dans l'industrie et dans l'agriculture) et l'État voit donc ses recettes diminuer (baisse de l'activité, donc baisse des prélèvements fiscaux). Face à ces difficultés, le gouvernement opte pour une politique de déflation et de restauration de l'équilibre budgétaire. En mars 1930, le gouvernement de Brüning (« Zentrum ») augmente les impôts sur les entreprises, ce qui déplaît au patronat puis, en septembre 1931, il baisse des salaires, des prix et des loyers (baisse des salaires dans la fonction publique, réduction des allocations chômage et des prestations sociales...). Le gouvernement décide également de limiter les importations afin de limiter l'endettement extérieur.

Cette politique échoue (le chômage atteint six millions de personnes en 1932) et mécontente tous les citoyens. Lors des élections anticipées du 14 septembre 1930, le KPD et surtout le parti nazi réalisent de bons résultats du fait de leur programme qui promettent le plein emploi. Le parti nazi comprend alors 375 000 membres.

Arrivée d'Adolf Hitler au pouvoir

L’historiographie possède plusieurs explications de l’arrivée d’Adolf Hitler au pouvoir. La première thèse est que la crise économique de 1929 est la cause de la prise du pouvoir par le Parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP). Cette théorie repose sur le fait qu’avant 1929, le parti nazi était limité à 2,6 % du corps électoral. De plus, Hitler ne trouvait preneur, au commencement de la république, que dans les groupes farouchement anti-communistes et ultranationalistes. Bref, ce n’est qu’avec l’arrivée de la crise qu’Hitler a pu accéder au pouvoir. La situation n’est guère enviable en Allemagne à cette époque ; possédant une industrie dépendante de l’extérieur, la crise entraîne un taux de chômage élevé qui grimpe brutalement entre 1929 et 1932. Les industries du charbon, de l’automobile et de l’acier sont gravement affectées par une baisse de prix et l'accumulation des stocks. Lors de l’hiver 1931-1932, il y avait quatorze millions de chômeurs permanents et partiels. Aux élections, Hitler aurait ainsi obtenu l’appui de toutes ces victimes de la crise. Le milieu des affaires voyaient en lui le rempart contre la révolution et la progression du parti communiste, et les grands patrons d’industries donnaient leur appui à Hitler pour qu’il puisse mettre fin au désordre.

Le gouvernement en place avait alors tenté d’équilibrer le budget du pays, qui faisait face à un déficit depuis 1926, alors qu’une stimulation économique s’avérait nécessaire. Jusqu’en 1970, on a cru que c’est cette politique économique qui aurait entraîné le nazisme, mais Borchart a confirmé plus tard dans la décennie qu’il n’y avait aucune marge de manœuvre, que la crise serait venue tôt ou tard sous un régime démocratique.

La crise politique interne fournit une deuxième explication à la montée en force du nazisme. Le régime parlementaire en place s’avère incapable d’apporter des solutions à la crise économique, et l’opinion publique aspire à un régime fort. La solution présidentielle ne peut plus exister car il y existe une impossibilité de coalition entre les partis extrémistes, qui représentent 38,4 % des voix lors de l’élection du 14 septembre 1930. Les partis politiques de gauche étaient divisés entre eux par une querelle entre le socialisme et le communisme, représenté par le SPD et le KPD. Le Zentrum ne cherchait pas l’écroulement du régime de Weimar, ce qui lui couta de nombreux votes.

Le NSDAP a toutefois profité de cette situation. Ce dernier se définit par certains historiens comme un mouvement voulant complètement reformer le Reich qui réussit à rassembler tous les mécontents du régime de Weimar. La propagande répondait aux besoins de la population, rejoignit les nationalistes, rejetait la démocratie et prônait l’abolition du plan Young. Dans les années 1950, Lipset écrivait, au travers de sa théorie « Fascisme du centre », que, sous l’influence de la crise politique et économique, les gens ont délaissé les partis libéraux afin de se tourner vers celui qui proposait une solution. En fait, il avait réussit à réunir toute la droite. Bendix a, plus tard, constaté que l’électorat d’Hitler était constitué d’une mobilisation des abstentionnistes ainsi que de l’entrée en scène des jeunes électeurs qui étaient déboussolés et qui n’avaient rien d’autre à faire que de s’occuper dans une mobilisation permanente. En 1980, on avança finalement la thèse que le NSAPD n’était constitué d’aucun profil social d’électeur, qu’il était tout simplement un parti de rassemblement et de protestation du peuple allemand.

Hitler a également exploité des failles de la constitution allemande. En fait, Dyzenhaus mentionne que l’article 48 de celle-ci est à l’origine de la fin du régime, car il permet de se débarrasser légalement d’une opposition démocratique, qui était le parti social-démocrate. Hitler aurait donc réalisé un coup d’État constitutionnel. Cependant, selon Heller, l’interprétation qu’en ont faite les juges fut également remise en question, car ces derniers ne se sont pas basés sur les principes fondamentaux du droit et de la démocratie dans leur interprétation.

Il y eut également une théorie de la « continuité des élites », qui mentionne que l’ancienne noblesse est restée au pouvoir depuis la chute de la monarchie, et n’aurait pas été remplacée par les républicains. Au début, la noblesse fut intégrée au gouvernement par Ebert, car il avait besoin d’eux. Par contre, l’influence de la noblesse a chuté vers la fin de la décennie. Cette dernière s’est donc mise à supporter le nazisme car son pouvoir était menacée par la démocratie parlementaire ; Hitler restait donc le seul espoir au nobles afin qu’ils retrouvent le pouvoir. Cette noblesse n’a pas été un facteur fatal au régime républicain, mais il a toutefois contribué à le fragiliser.

Les historiens mentionnent aussi qu’il y existait au sein du peuple allemand une culture politique imprégnée de principes autoritaires et de tradition anti-démocratique. De toute façon, le nouveau régime n’avait rien fait pour démocratiser l’administration de l’armée et de la justice pour ainsi s’engager dans une vraie démocratie. Il n’y existait aucun sentiment d’appartenance ni de fierté chez les citoyens de la république ; au contraire, le Traité de Versailles était associé à celle-ci. Tout au long de la république, le peuple ouvrier s’était désaffecté face à la démocratie et son régime. Cela est donc une autre raison ayant contribué à la prise du pouvoir par Hitler.

Clemenceau, dans son ouvrage Grandeur et misère d'une victoire (1929) souligne l'esprit revanchard[réf. nécessaire] d'une nation née et éduquée dans l'idée de supériorité militaire. Il démontre que cet esprit de revanche et ce réarmement a commencé dés le lendemain de la défaite de 1918, il souligne la violence des propos des intellectuels allemands qui, après la défaite, continuent de défendre le pangermanisme, l'idée d'une grande Allemagne et de « l'Allemagne au dessus de tout », il pressent une nouvelle guerre encouragée par la pacification du reste des nations européennes.

La fin de la démocratie

Hitler serrant la main d'Hindenburg à Potsdam le 21 mars 1933.

Hitler accepte le poste de chancelier le 30 janvier 1933 à condition de procéder rapidement à de nouvelles élections. Dès le 4 février 1933, certains journaux socialistes et communistes sont interdits. Le 27 février 1933, le bâtiment du Reichstag est incendié par un chômeur communiste néerlandais, peut-être manipulé. Le lendemain, un décret présidentiel, le Reichstagsbrandverordnung, restreint les libertés individuelles.

Hitler accuse les communistes de cet incendie, fait interdire le KPD, suspend la liberté d’opinion (28 février 1933), ce qui permet d’arrêter de nombreux anti-nazis. Malgré le climat de terreur, les élections du 5 mars 1933 ne donnent que 44 % des sièges pour les nazis au Reichstag. Les députés communistes sont arrêtés, ce qui lui donne la majorité absolue (51 % des voix). Le 23 mars 1933, la loi « sur la suppression de la misère du Peuple et du Reich » lui accorde les pleins pouvoirs par 441 voix contre 92.

Le 12 novembre 1933, de nouvelles « élections » au Reichstag sont organisées sur une liste unique ne comportant que des nazis qui sont élus avec 92 % de « oui ». Hitler supprime alors les Assemblées dans les Länder et dote l’Allemagne d’une administration centralisée.

Conformément à sa stratégie, Hitler a accédé au pouvoir par la voie légale, sur un programme démagogique et populiste, avec l’aide des partis politiques de la droite et du « Zentrum », comme « rempart » contre le communisme.

Le 14 juillet 1933, le Parti nazi devient le seul parti légal ; son emblème et son idéologie sont présents partout. Le président Hindenburg meurt le 2 août 1934, mais les élections présidentielles sont supprimées. Hitler cumule alors les deux fonctions : Président de la République et Chancelier sous le nom de Führer. Près de 90 % des électeurs approuvent ce bouleversement constitutionnel par référendum. Par le « Führerprinzip », il affirme n'être responsable devant personne.

Dès lors, on parle de Troisième Reich, même si formellement la République de Weimar n'a jamais été abrogée par les nazis.

Notes et références

  1. Pierre Renouvin, Le 11 novembre, collection Trente journées qui ont fait la France, Gallimard.
  2. Michel Spezial Deutschland, p 187 (édition de 1993) [catalogue de référencement des timbres allemands]

Annexes

Bibliographie

Annexe

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