- Freikorps
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Corps franc
Les Corps francs sont des unités combattantes formées en dehors ou au sein d'une armée régulière. Il peut également s’agir d’unités paramilitaires organisées par un État, ou d’unités formées spontanément par des civils.
Parfois improvisés et sous-équipés, les Corps francs sont généralement dotés d’un encadrement autonome.
C’est l’Allemagne qui organisa, dès le XVIIIe siècle les premiers corps francs. C’est aussi en Allemagne, où ils sont appelés Freikorps, que les plus connus ont été mis en place, dans les troubles qui ont suivi la fin de la Première Guerre mondiale.
Sommaire
XVIIIe siècle
Les premiers corps francs sont organisés par Frédéric II de Prusse pendant la guerre de Sept Ans (1756-1763). En France, on peut assimiler les chasseurs de Fischer et les volontaires de Saxe, créés durant la guerre de Succession d'Autriche (1740-1748), à des corps francs. Ils donnent naissance aux troupes de chasseurs.
De nombreux corps francs sont créés en France durant les débuts des guerres de la Révolution, sous des noms divers : légion, volontaires, etc.
XIXe siècle
1806-1813
Après les défaites écrasantes d’Iéna et d'Auerstaedt, la Prusse crée des corps francs pour préparer la création d’une nouvelle armée ; Ferdinand von Schill et Ludwig Adolf Wilhelm von Lützow en sont les promoteurs. Cependant, les corps francs sont considérés comme peu fiables par les armées régulières, et cantonnés à des tâches de reconnaissance, de garde et autres tâches mineures.
En 1809, neuf officiers de ces corps francs sont fusillés par l’armée française à Wesel.
Empire ottoman
Les bachi-bouzouks, troupes auxilliaires ottomanes, étaient considérés comme un corps franc de cavalerie.
Les corps francs en Suisse
En Suisse, les corps francs ont une longue histoire. Appelées Freischaren (en allemand bandes libres), elles étaient des troupes constituées spontanément, en-dehors de tout contrôle gouvernemental, parfois à l’occasion d’un carnaval. On peut aussi assimiler aux corps francs les Blutharsten, Freiharsten, Freiheiten, intégrés à l’armée régulière et chargés des opérations de reconnaissance[1]. Déjà existant au début du XIVe siècle, ils deviennent autonomes au siècle suivant[2]. Plusieurs fois, leur action est décisive pour la victoire au XVe siècle[3]. Considérés comme incontrôlables, ils entraînent parfois toute la confédération helvétique dans des guerres extérieures dans la deuxième moitié du XVe siècle[3]. Les corps francs se manifestent en 1477, lors de l’expédition de Folle Vie, où ils se rassemblent sans ordre de mobilisation et assiègent Genève pour obtenir leur part de butin[4]. Cet aspect d’unités libres, où le commandement militaire est collectif[3], fait que le gouvernement a de moins en moins recours à eux : ils disparaissent quasiment des opérations régulières au XVIe siècle, même si la tradition de ces corps se maintient en Suisse au XVIIe siècle, dans les Grisons[2].
Les corps francs menèrent deux tentatives de coup d'État contre le canton de Lucerne, en 1844 et 1845, qui échouèrent toutes les deux[5].
Les motivations des membres des corps francs sont de trois ordres, obtenir ou retrouver le droit de cité, gagner une part de butin, faire triompher des revendications politiques, ou territoriales. Très autonomes, les corps francs ont leur propre drapeau, élisent leurs officiers, et parfois choisissent leurs guerres : outre les expéditions déjà citées, en 1860, des corps francs envahissent la Savoie pour obtenir son rattachement à la Suisse[2].
Première Guerre mondiale
Ce terme était appliqué aux unités spécialisées dans l'assaut des tranchées ennemies durant la Première Guerre mondiale.
Les corps francs sont souvent confondus avec les « nettoyeurs de tranchées ». Roger Vercel dans Capitaine Conan a brossé un portrait saisissant de ces terribles soldats. Cependant, corps francs et nettoyeurs n'ont pas les mêmes objectifs bien qu'ils opèrent parfois avec les mêmes techniques et méthodes de combat.
Le corps franc tente des coups de mains à un endroit précis, pour capturer des prisoniers dans les lignes ennemies, détruire des nids de mitrailleuses, ou aller observer le terrain. Le rôle des nettoyeurs est tout autre: Une fois les vagues d'assaut victorieuses, ils ont 2 objectifs: détruire les poches de résistance ennemie qui continuent à se défendre, puis "nettoyer" avec soin chaque parcelle de terrain de tout présence ennemie. Leur 2e mission est alors d'occuper la tranchée et la garnir de mitrailleuses et fusils-mitrailleurs aux endroits stratégiques afin de sécuriser l'arrière des troupes d'assauts.
Les Italiens constituent les unités arditi ( les « Hardis »). La tactique italienne consistait à s'approcher à portée de grenade d'une tranchée sous le couvert d'un barrage d'artillerie, puis lors de l'arrêt du bombardement, à lancer de nombreuses grenades dans la tranchée pour faire croire aux ennemis que le bombardement n'était pas fini. Profitant de la confusion, ils s'infiltraient alors en groupe dans la tranchée, tuant au couteau et au revolver. Les Italiens mirent aussi au point des techniques d'infiltration avec des nageurs de combat. L'uniforme noir des arditi et les « têtes de mort » devinrent le signe distinctif de ces unités.
Les Allemands, de leur côté, répliquèrent avec les « unités d'assaut », c'est-à-dire des troupes de choc fortement armées avec des mitrailleuses, des lance-flammes et des grenades. La tactique allemande différait de la tactique italienne en ceci qu'ils attaquaient l'ennemi en son point le plus faible en concentrant leur puissance de feu sur une zone réduite afin de s'infiltrer profondément dans le dispositif ennemi. Les troupes d'assauts devaient ainsi « tronçonner » le front en plusieurs endroits, laissant aux troupes régulières le soin de nettoyer les tranchées ennemies isolées. Lors des offensives de 1918, l'armée allemande enfonça les lignes alliées au niveau du chemin des Dames. La supériorité tactique des armées allemandes était néanmoins incapable d'inverser l'issue de la guerre. Ernst Jünger a décrit l'action des troupes d'assaut allemandes dans ses ouvrages de l'après-guerre (notamment Orages d'acier).
Les Polonais patriotes constituèrent au début des années 1910 des sociétés de tir, qui permirent en août 1914 de créer trois bataillons d’infanterie, commandés par Józef Piłsudski. Il occupe Kielce le 6 août et provoque la création de deux légions polonaises, prévues pour compter 17 000 hommes au total, incorporant les chasseurs de Pilsudski[6].
D’autres Polonais désireux de lutter contre l’Allemagne constituèrent la légion Puławy, autorisée le 18 octobre 1914 par le tsar. Commandée par le colonel Gorczynski, elle évolue comme un corps franc, avant d’intégrer l’armée impériale le 12 janvier 1915, sous le nom de 104e brigade territoriale[6].
Les corps francs allemands de 1919 à 1921
Après la Première Guerre mondiale, d’anciens officiers à la retraite entamèrent la formation de milices appelées Freikorps. Ils furent employés afin de défendre la frontière allemande à l’Est, contre une possible invasion russe, comme par exemple la Division de fer. Plus tard, ils furent utilisés afin de contrer et réprimer les tentatives de révolution en Allemagne. Les Freikorps ont notamment assassiné Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht en janvier 1919.
Le général Franz Epp mena 30 000 soldats pour mater la République socialiste bavaroise en mars 1919. Près de 600 socialistes et communistes furent tués durant les semaines qui suivirent.
Herman Ehrardt, un ancien amiral, et Wolfgang Kapp, un journaliste de droite, menèrent un groupe de soldats et prirent le contrôle de Berlin le 13 mars 1920. Ce putsch fut mis en échec par une grève générale organisée par les syndicats, et Kapp fut forcé de s’exiler en Suède.
Les Freikorps furent dissous en 1921, et certains d’entre eux rejoignirent les Sturmabteilung (« sections d’assaut » en allemand), la milice d’Adolf Hitler, la plupart rejoignant plutôt une autre milice de droite, les Stahlhelm.
Dans les pays baltes, les corps francs allemands réussissent à conquérir une partie de la Lituanie et de la Lettonie dans les années 1919-1921, mais sans parvenir à se maintenir (voir Histoire des corps francs de la Baltique).
Seconde Guerre mondiale
Dès octobre 1939, des corps francs sont constitués par l'armée française et mènent une guerre d'embuscade à l'avant de la ligne Maginot. Ils ont face à eux les groupes francs allemands qui protègent la ligne Siegfried.
Des corps francs d'Afrique se sont formées au Maroc (alors protectorat français) en 1942, après le débarquement allié en Afrique du Nord, à la demande du général Giraud. Composés de volontaires marocains d'origines et de religions diverses (juifs, musulmans, chrétiens), ils ont combattu Rommel et l'Afrika Korps en Tunisie au sein de la 5e armée américaine, avec de l'équipement anglais. Ils ont participé à la prise de Bizerte en 1943.
Intégrés en grande partie à la 2e division blindée (DB) du général Leclerc, ils sont ensuite déplacés en Angleterre en vue de participer au débarquement de Normandie. Leur histoire se confond avec celle de la 2e DB ensuite : libération de Paris, combats en Allemagne.
Les corps francs d'Afrique furent décorés de la Croix de guerre.
Membres célèbres de corps francs
- Allemands
- Lothar von Arnauld de la Perière
- Hubertus von Aulock
- Rudolf Berthold
- Otto Freiherr von Brandis
- Bruno Ernst Buchrucker
- Wilhelm Canaris
- Nikolaus Graf zu Dohna-Schlodien
- Hermann Ehrhardt
- Joseph von Eichendorff
- Franz von Epp
- Hans Frank
- Rüdiger von der Goltz
- Rudolf Hess
- Heinrich Himmler
- Friedrich Wilhelm Heinz
- Ernst Kantorowicz
- Peter von Heydebreck
- Friedrich Ludwig Jahn
- Hans Jauch
- Leo von Jena
- Manfred von Killinger
- Theodor Körner
- Otto Lichtschlag
- Georg Maercker
- Waldemar Pabst
- Franz Pfeffer von Salomon
- Wilhelm Ramm
- Alfred von Randow
- Wilhelm Reinhard
- Ernst Röhm
- Gerhard Rossbach
- Ernst von Salomon
- Albert Leo Schlageter
- Bogislav von Selchow
- Gregor Strasser
- Otto Strasser
- Joseph Veltjens
- Français
- Fernand Bonnier de La Chapelle
- Henri d'Astier de la Vigerie, deux combattants des Corps Francs
- Jean Garcin, chef des Corps Francs de la région Provence (R2)
- Marcel Bigeard
- Joseph Darnand
- Félix Agnély
- André Pommiès
- Roger Mompezat
Voir aussi
Articles de Wikipédia
Liens externes
Références bibliographiques
- L'Epopée des Corps Francs par Ernst von Salomon, Paris, 2009 (Das Buch vom deutschen Freikorpskämpfer, Berlin 1938).
- Archives de la 2e division blindée, De Giraud à De Gaulle : Les corps francs d'Afrique, par Romain Durand
- Georges Elgozy, La vérité sur mon Corps Franc d'Afrique, Monaco, 1985.
- Général Pierre Daillier, Nous étions alors capitaine... à l'armée d'Afrique, Paris, 1978.
- Patrick de Gmeline, Commandos d'Afrique, Paris, 1980.
- André Fedida, De Casablanca à Berschtesgaden avec les Forces Françaises libres, 2004
- Patrick de Gmeline, Les Corps-Francs 1939-1940, Presses de la Cité, Paris,
- Charles Fremont, Histoire d'un Corps franc 1943-44', Editions Charles Fremont, 204p.
- Le corps franc de la Montagne noire, journal de marche, avril-septembre 1944, 1963.
Notes
- ↑ Hans Stadler, « Corps francs », article du Dictionnaire historique de la Suisse, publié le 17 octobre 2006 [1], consulté le 10 novembre 2008
- ↑ a , b et c Hans Stadler, « Activités des corps francs », Dictionnaire historique de la Suisse, [2], consulté le 10 novembre 2008
- ↑ a , b et c Hans Stadler, « Importance des corps francs », Dictionnaire historique de la Suisse, [3], consulté le 10 novembre 2008
- ↑ Thomas Schibler, « Expédition de Folle Vie », Dictionnaire historique de la Suisse, publié le 28 avril 2005, [4], consulté le 10 novembre 2008
- ↑ Kurt Münger, « Corps francs, expéditions des », article du Dictionnaire historique de la Suisse, publié le 11 août 2005 [5], consulté le 10 novembre 2008
- ↑ a et b Olivier Lowczyk, Les armées polonaises pendant la Première Guerre mondiale, le choix des armes, 2005, [6], consulté le 10 novembre 2008
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