Roman Polański

Roman Polański

Roman Polanski

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Roman Polański
Roman Polański en 2004, prenant le globe de Cristal du Festival international du film de Karlovy Vary pour l'ensemble de sa carrière
Roman Polański en 2004, prenant le globe de Cristal du Festival international du film de Karlovy Vary pour l'ensemble de sa carrière

Nom de naissance Raymond Roman Liebling
Surnom Romek
Naissance 18 août 1933 (76 ans)
Paris, France
Nationalité(s) Pologne Polonais
Drapeau de la France Français
Profession(s) Réalisateur
Scénariste
Producteur
metteur en scène
Comédien
Film(s) notable(s) Répulsion
Cul-de-sac
Rosemary's Baby
Chinatown
Tess
Le Pianiste
Conjoint(e) Barbara Lass (1959-1962)
Sharon Tate (1968-1969)
Emmanuelle Seigner (1989-présent)
Enfant(s) Morgane Polanski
Elvis Polanski
Site officiel www.roman-polanski.com
Distinction(s) Ours d'Or de la Berlinale
pour Répulsion (1966)

Palme d'or du Festival de Cannes
pour Le Pianiste (2002)

Oscar du meilleur réalisateur
pour Le Pianiste (2003)

César du meilleur film et du meilleur réalisateur
pour Tess (1980)
pour Le Pianiste (2003)

Roman Polański (né Raymond Roman Liebling le 18 août 1933 à Paris) est un comédien, metteur en scène de théâtre et d'opéra, producteur, scénariste, réalisateur de cinéma puis un auteur franco-polonais[1]. Il a notamment réalisé Répulsion, Cul de sac, Le Bal des vampires, Rosemary's Baby, Chinatown, Le Locataire et Le Pianiste.

Sommaire

Biographie

Enfance : de Paris au ghetto de Cracovie

Roman Polanski est né Raymond Roman Liebling le 18 août 1933 à Paris. Son père, Ryszard Liebling, était un juif polonais peintre et fabricant en matières plastiques. Sa mère, Bula Liebling (née Katz-Przedborska), était d'origine russe et judéo-catholique. Roman Polanski vit à Paris jusqu'à l'âge de quatre ans. Il passe ensuite son enfance en Pologne avec sa demi-sœur Anette.

Après l'invasion du territoire ouest-polonais par les troupes allemandes en septembre 1939, il vit dans le ghetto de Cracovie et évite la déportation, contrairement à ses parents et à sa sœur (Sa mère meurt à Auschwitz). Échappé du ghetto, il se réfugie à la campagne chez des fermiers avant de revenir à Cracovie où, devenu vagabond, il détourne la vigilance allemande et arrive à survivre grâce à l'entraide souterraine avec des habitants et d'autres enfants, et grâce au marché noir. Il n'a alors que 10 ans. Il ne revoit son père qu'après la guerre mais la relation est conflictuelle après son retour du camp de Mauthausen.

Débuts artistiques

C'est après la guerre dans les camps de scouts puis avec son ami d’enfance Piotr Winowski, qu'adolescent, il découvre sa vocation d'artiste et de comédien, prise peu au sérieux par son père. Avec son ami, il fréquente plus assidûment les salles de cinéma que les cours d'école. En 1946, il intègre la troupe de la Joyeuse Bande, destinée à enregistrer des spectacles radiophoniques à coloration communiste pour les enfants. Deux ans plus tard, après une audition, il est choisi pour le rôle principal du Fils du régiment, mis en scène par Josef Karbowski. Il s'agit d'un personnage de jeune paysan, coqueluche de l'Armée rouge, fait prisonnier par les Allemands durant la guerre. La pièce devient, au fil des représentations, un véritable triomphe national[2].

Ce succès lui ouvre les portes d'une carrière de comédien qu'il débute en jouant dans les films de jeunes auteurs encore peu connus mais futures pierres angulaires du cinéma polonais. Andrzej Wajda, son ami, le dirige notamment dans Génération, œuvre rompant avec l'académisme et le ton exalté, lié à l'exercice de propagande, des productions de l'époque. En 1949, il rate sa matura (bac polonais) mais grâce à ses talents de dessinateur entre à l’École des Beaux-Arts dont il est renvoyé un an plus tard[3].

En 1955, Polanski est reçu au concours de l'école de cinéma de Łódź où il réalise huit courts-métrages remarqués à l'international pour leur inventivité, leur anticonformisme et leur causticité étonnante. En 1958, il gagne plusieurs récompenses pour Deux hommes et une armoire et épouse en parallèle l'actrice principale de la majorité de ses films courts : Barbara Kwiatkowska dont il divorce quatre ans plus tard.

Le Couteau dans l'eau : naissance, découverte et succès d’un jeune réalisateur venu de Pologne

En 1962, il réalise son premier long-métrage, Le Couteau dans l'eau, co-écrit avec Jerzy Skolimowski et dont la musique est composée par Krzysztof Komeda (mort en 1969). Il y met en scène les rapports de forces entre un journaliste sportif brutal et un étudiant arrogant sur un voilier. Le film est mal accueilli en Pologne bien qu'il ne soit pas un réquisitoire explicite du mode de vie socialiste. Mais il fait planer un climat d'insécurité et laisse en suspens l'idée de tension sociale et de lutte de classes que les régimes communistes prétendent avoir abolie. Après un succès international et un prix obtenu à la Mostra de Venise, Le Couteau dans l'eau est projeté officiellement au Festival de New York et se voit choisi pour faire la couverture du Time magazine. Il reçoit également une nomination à l'Oscar du meilleur film étranger, qui lui échappe au profit de 8 1/2 de Federico Fellini.

Sollicité de toute part, Polanski part s'installer à Londres où il réalise un thriller ayant pour thème central la schizophrénie : Répulsion, avec Catherine Deneuve dans le rôle principal. L'année suivante, il se rend en Irlande afin d'y tourner une comédie proche du théâtre de l'absurde : Cul-de-sac, interprétée notamment par Donald Pleasence et Françoise Dorléac. Ces deux œuvres lui permettent de remporter respectivement un Ours d’Argent et un Ours d’Or au festival de Berlin en 1964 et en 1965. Produites toutes deux par Gene Gutowski, elles marquent par ailleurs le début de la longue collaboration du cinéaste avec le scénariste Gérard Brach. En 1966, il retrouve ses deux collaborateurs et Krzysztof Komeda pour écrire, produire et mettre en scène la comédie horrifique Le Bal des vampires, qui se veut une parodie des productions de la Hammer[4]. Il y tient le haut de l'affiche avec celle qui sera bientôt sa nouvelle femme, la comédienne américaine Sharon Tate, qu'il épouse le 25 janvier 1968.

Rosemary's Baby

Après ces succès critiques et commerciaux, Roman Polanski réalise son premier film hollywoodien en 1968, le thriller fantastique Rosemary's Baby adapté du best-seller éponyme d'Ira Levin. Mia Farrow y interprète, au côté de John Cassavetes une jeune femme victime d'une conjuration menée à son endroit par une société secrète de sorciers octogénaires adorateurs de Satan et qui fait d'elle la mère de l’Antéchrist en personne. Produit avec deux millions de dollars, ce film d'épouvante en rapporte plus de seize et se hisse au sommet du box-office de 1968. Ce succès est en large partie dû à la rencontre du cinéaste avec le producteur Robert Evans[5]. Reconnu comme l'un des meilleurs films fantastiques de tous les temps par sa manière de refuser l'effet et de jouer de la suggestion puis de l'angoisse procurée par l'univers quotidien[6], Rosemary's Baby glane deux nominations aux Oscars 1968. Ruth Gordon, figure tutélaire du film, sera d'ailleurs récompensée par la statuette du meilleur second rôle.

Au faîte de sa gloire, Polanski est néanmoins ébranlé par un nouveau drame dans sa vie : alors qu'il est en pleine préparation d'un film au Royaume-Uni, sa femme, Sharon Tate, enceinte de huit mois, est assassinée ainsi que quatre de leurs amis dans leur demeure californienne à Cielo Drive par des proches de Charles Manson, gourou de la secte « la Famille ».

Les années noires puis l’embellie grâce à Chinatown

Malgré la grave dépression qu'il traverse après l'assassinat de son épouse[7], il décide de se plonger dans le travail et part en Grande-Bretagne pour tourner une adaptation grandiloquente et violente de William Shakespeare : Macbeth, produite en partie par Hugh Hefner et la filiale de production du groupe Playboy. Le film sera mal compris et se soldera par un échec. En 1972, il part un temps pour l'Italie afin d'y tourner une comédie grinçante à l'humour absurde avec Marcello Mastroianni : Quoi ?. Malgré le plébiscite de la presse, le film peine à remplir les salles.

En 1974, Polanski s'attelle à la mise en scène de l'opéra d'Alban Berg, Lulu, pour le festival de Spolète en Italie. La même année, revenu à Hollywood, il goûte à la plus belle réussite critique et publique de sa carrière grâce à Chinatown, hommage teinté d'ironie et de pessimisme au film noir américain. Le film marque ses retrouvailles avec son ami producteur Bob Evans qui réalise lui aussi l'un de ses plus beaux succès professionnels. Chinatown qui a coûté six millions de dollars en rapporte trente rien qu'aux États-Unis. Le visage au nez pansé de Jack Nicholson, interprétant J.J. Gittes, un détective privé fanfaron, entre dans l'histoire du cinéma. Le rôle de la femme fatale est, lui, attribué à Faye Dunaway (dont les relations avec le metteur en scène ont été plus que désastreuses durant le tournage). Les deux stars principales se font cependant voler la vedette par le rôle secondaire de Noah Cross accordé au grand cinéaste John Huston. Grand vainqueur des Golden Globes en 1975, le film reçoit également onze nominations pour les Oscar du cinéma, devenant le grand favori dans la course aux statuettes. Mais seul le trophée du meilleur scénario original (signé Robert Towne) lui échoit, les votants ayant préféré cette année-là se tourner vers le deuxième opus de la série des Parrain réalisée par Francis Ford Coppola.

Polanski revient ensuite un temps en France, à Paris pour concrétiser un vieux projet d'adaptation du roman de Roland Topor, Le Locataire chimérique. Le Locataire, qu'il fait éclairer par Sven Nykvist puis qu'il réalise et joue aux côtés d'Isabelle Adjani et de Shelley Winters, voit le jour en 1976. Cependant, même si l'étrangeté paranoïaque et cauchemardesque du récit séduit une fois de plus les critiques qui considèrent encore aujourd'hui cette œuvre comme l'une de ses plus abouties, cette fable sur l'aliénation urbaine et l'anomie sociale, d'une fantaisie noire proche du délire hallucinatoire, effraie de nouveau les spectateurs. Polanski, encore auréolé du succès de Chinatown, reste toutefois l'un des cinéastes les plus en vogue, ce qui ne l'empêche pas de s'en retourner à des activités extra-cinématographiques puisqu'il assure la même année la direction scénique du Rigoletto de Giuseppe Verdi pour l'Opéra de Munich.

Poursuites judiciaires

Roman Polanski est poursuivi en 1977 pour une affaire de crime sexuel où il est accusé de viol sur une mineure de 13 ans. L'adolescente affirme à l'époque avoir eu un rapport sexuel forcé sous l'emprise de l'alcool et de drogue. La victime, Samantha Geimer (née Gailey), avait été sélectionnée pour une séance photos commandée par l'édition française du magazine Vogue. Durant la séance, aux abords de la propriété californienne de Jack Nicholson, la jeune fille affirme avoir bu du champagne et consommé un sédatif, le méthaqualone, fournis par le cinéaste avant d'avoir des rapports contraints avec lui[8].

Polanski est incarcéré 47 jours pour passer des expertises psychiatriques, puis il est libéré sous caution. Il a plaidé coupable pour la relation sexuelle avec un mineur[9] en échange de l'abandon des charges plus graves de viol et de fourniture d'alcool et de drogue à mineur, en accord avec le juge. Mais avant l'audience devant fixer la peine, alors qu'il est libre sous caution, Polanski part pour la France dont il possède la nationalité depuis plus d'un an[10] . Comme d'autres États, la France refuse généralement l'extradition de ses citoyens[11]. Sous le coup d'un mandat d'arrêt américain lancé en 1978, il ne revient jamais sur le sol américain. Certains ont estimé qu'il aurait pu être jugé en France[12],[13], mais la porte-parole du procureur de Los Angeles fait observer que ce n'est pas possible dans la mesure ou Polanski a déjà été reconnu coupable des faits par la justice californienne, se heurtant ainsi au principe non bis in idem.

La justice américaine va alors tenter de mettre la main sur Polanski lors de ses déplacements à l'étranger. Des demandes d'extraditions sont adressées aux pays avec lesquels les États-Unis ont signé une convention d'extradition : en mai 1978 au Royaume-Uni, en décembre 1986 au Canada, en 1988 en Allemagne, au Brésil, au Danemark et en Suède, en octobre 2005 en Thaïlande et en 2007 en Israël. Cependant toutes ces tentatives ont été vaines[14].

En 1993, Roman Polanski se serait engagé à indemniser Samantha Geimer à hauteur de 500 000 dollars dans un délai de deux ans. Polanski ne tiendra pas cet engagement dans le délai convenu[15] et la somme qu'il a finalement versée à Samantha Geimer (qui a souhaité revenir dans l'anonymat et a exprimé depuis son désir d'abandonner les poursuites contre le cinéaste, ce qui semble indiquer que le différend portant sur l'indemnisation ait été résolu[16],[17]) demeure inconnue. Celle-ci est sortie du silence à deux reprises : en 2003 pour écrire à l'Académie des Oscars et dire aux votants qu'il fallait juger l'artiste et non l'homme en lui-même à propos du film Le Pianiste et en 2008 en apparaissant à la première du documentaire de Maria Zenovich, Roman Polanski: Wanted and Desired (en), réitérant pour l'occasion son souhait de délaisser toute procédure à l'encontre du réalisateur pour éviter de revivre ce traumatisme et pour protéger ses enfants[18]. Polanski ne lui a jamais adressé aucun message en retour[18].

Le 27 septembre 2009, alors qu'il se rendait à un festival de cinéma en Suisse afin d'y recevoir un prix pour l'ensemble de sa carrière, il est arrêté par la police à Zurich sous le coup d'un mandat d'arrêt international émis en 2005[19],[20]. Très rapidement, celui-ci reçoit le soutien de personnalités politiques[21] et artistiques[22],[23] en Europe (notamment en France et en Pologne, les deux pays dont il a la nationalité), puis aux États-Unis[22].

La plupart des grands journaux américains approuvent cette arrestation[24], s'étonnant du soutien manifesté au réalisateur, étonnement partagé par la population américaine[25]. Ces soutiens soulèvent également oppositions et indignation dans une partie de la presse régionale française ainsi que dans une partie de l'opinion publique de ce pays[26],[27],[28]. Quelques journaux américains nuancent la pertinence de cette arrestation. Ainsi, dans son édition du 28 septembre 2009, le Los Angeles Times juge-t-il curieux que le district attorney du comté de Los Angeles, alors que l'État de Californie est en proie à d'immenses difficultés financières et à une surpopulation carcérale « scandaleuse », cherche à boucler Polanski pour une affaire vieille de 32 ans et alors même que la victime a exprimé le souhait que les poursuites cessent[29]. Néanmoins, dans l'ensemble, les journaux américains rappellent que la pédophilie est un crime grave et que Polanski a fui la justice[30]. La conseillère fédérale suisse en charge du département de Justice et Police Eveline Widmer-Schlumpf défend quant à elle l'arrestation comme conforme au traité d'extradition helvético-américain et comme manifestation de l'égalité devant la loi. Elle affirme par ailleurs que l'arrestation ne résulte d'aucune pression politique américaine[31]. Dans l'ensemble, la classe politique suisse approuve l'arrestation de Polanski[32].

Les États-Unis et la Suisse ont signé ensemble une convention d'extradition en 1990 qui est entrée en vigueur en 1997[33]. Roman Polanski s'oppose à son extradition. L'article 22 du traité d'extradition prévoit qu'il « s'applique pour tous les faits commis avant ou après son entrée en vigueur » sauf lorsque la procédure d'extradition a été lancée avant son entrée en vigueur, auquel cas un traité de 1900 doit être appliqué[34].

1979-1999

Revenu à Paris après sa fuite des États-Unis, le metteur en scène s'attelle à une entreprise de grande ampleur dont Claude Berri est le principal producteur : en mémoire de sa défunte épouse Sharon Tate, il réalise un mélodrame rural et romantique, Tess. Il s'agit en réalité de l'adaptation du roman de Thomas Hardy, Tess d'Urberville, qui évoque les malheurs d'une jeune paysanne sous l'ère victorienne. Auréolé d'un beau succès en salles au cours de l'année 1979, le film croule bientôt sous une avalanche de prix dont trois Césars en 1980 (ceux du meilleur film, du meilleur réalisateur et de la meilleure photographie pour Ghislain Cloquet et Geoffrey Unsworth) et trois Oscar du cinéma en 1981. La presse se fera largement l'écho de l'idylle, très controversée, entre le cinéaste et la juvénile star du film âgée de dix-huit ans : Nastassja Kinski. Polanski passe ensuite par le théâtre avec Amadeus de Peter Shaffer, qu'il met en scène et interprète au côté de François Périer. Il publie en 1984, aux éditions Robert Laffont, son autobiographie très remarquée : Roman par Polanski.

Il s’attaque par la suite au projet Pirates (financé par le producteur tunisien Tarak Ben Ammar) en hommage aux films d'aventures hollywoodiens des années 1930 qui ont bercé son enfance : ceux entre autres de Michael Curtiz avec Errol Flynn. En plus d'un tournage cauchemardesque, Pirates est un gouffre financier. Il devient un film qui échappe complètement à son réalisateur et qu'il finit par renier. Ce sera un véritable fiasco commercial. Le film, pour un budget de quarante millions de dollars, en rapportera à peine cinq. Après être revenu sur scène dans une adaptation théâtrale du classique de Franz Kafka, La Métamorphose, il assure la réalisation en 1988 d'un thriller parisien avec Harrison Ford : Frantic qui lui permet de renouer un temps avec le succès, mais Lunes de fiel, La Jeune Fille et la Mort et La Neuvième Porte, par ailleurs globalement peu épargnés par la critique, sont des revers au box-office.

Le 30 août 1989, il épouse en troisièmes noces sa nouvelle actrice fétiche de trente-trois ans sa cadette, Emmanuelle Seigner. Ils ont deux enfants : Morgane (née en 1993) et Elvis (né en 1998). Ils s'étaient rencontrés lors du tournage de Frantic.

En 1998, il est élu membre de l'Académie des Beaux-Arts de l'Institut de France dans la catégorie Création artistique pour le cinéma et l'audiovisuel (créée en 1985).

Durant les années 1990, son travail au théâtre et à l'opéra a été prolifique ; après avoir dirigé pour la scène de l'Opéra Bastille une nouvelle version des Contes d'Hoffmann d'Offenbach en 1992 avec José van Dam et Natalie Dessay, il met en scène quatre ans plus tard la pièce de Terrence McNally : Maria Callas, la leçon de chant qui lui vaut une nomination aux Molières. En 1997, il s'attelle à la mise en scène et à la supervision de la comédie musicale tirée de son classique Le Bal des vampires qui démarre à Vienne et entame une tournée triomphale de Stuttgart à Hambourg.

Le Pianiste, rebond et consécration internationale

Il revient sur le devant de la scène et connaît un triomphe critique et public en 2002 grâce à son film Le Pianiste, une grosse production franco-germano-polonaise (adaptée de l'autobiographie du pianiste et compositeur polonais Władysław Szpilman) dans laquelle il évoque un sujet plus personnel, celui de l’occupation de la Pologne et du ghetto de Varsovie pendant la Seconde Guerre mondiale, sujet qu’il s’était toujours refusé à filmer au point de décliner, dix ans auparavant (en 1993), l’offre de Steven Spielberg de mettre en scène La Liste de Schindler. Le film remporte la Palme d'or du Festival de Cannes 2002, sept Césars dont ceux du meilleur film, du meilleur réalisateur et du meilleur acteur pour Adrien Brody ainsi que trois Oscars en 2003 : ceux de la meilleure mise en scène, du meilleur premier rôle masculin pour Brody et de la meilleure adaptation pour le scénariste Ronald Harwood. Malgré les demandes, Polanski n'a pu se rendre à Los Angeles pour la Cérémonie des Oscars où il reçut une ovation debout d'une grande partie de la salle à l'annonce de son nom. Remettant le prix, Harrison Ford, qu'il dirigea dans Frantic, s'engagea à lui transmettre personnellement le trophée, ce qu'il fit devant la presse en septembre de la même année au Festival du cinéma américain de Deauville.

Le tumulte des années 2000

Le cinéaste s'attèle ensuite à la mise en scène d’Hedda Gabler, le drame d'Henrik Ibsen, avec Emmanuelle Seigner dans le rôle-titre, au Théâtre Marigny, puis supervise à Stuttgart une nouvelle version de la comédie musicale tirée de son classique : Le Bal des vampires. Il retrouve ensuite les coproducteurs et scénariste du film précédant : Alain Sarde, Robert Benmussa et Ronald Harwood ainsi que tous les chefs techniciens (Paweł Edelman pour la photographie, Allan Starski pour le décor, Anna B. Sheppard pour les costumes ou encore Hervé de Luze pour le montage) afin de produire et de réaliser en 2005 une nouvelle reconstitution historique, cette fois adaptée de l'œuvre de Charles Dickens : Oliver Twist. Mais le film est un échec. En 2006, après avoir gagné un procès en diffamation contre le magazine Vanity Fair, il opère un retour sur les planches pour le Théâtre Hébertot où il met en scène Thierry Frémont dans Doute (écrit par John Patrick Shanley). La même année, il entreprend de financer et de réaliser le péplum Pompeii, d'après un roman de Robert Harris, avec Orlando Bloom et Scarlett Johansson dans les rôles principaux. Mais il abandonne le projet suite à des problèmes d'emploi du temps, de financement et de conséquents retards de production tous dus à la grève des scénaristes à Hollywood entamée dès l'été 2007 et terminé en 2008 (au moment même où le tournage avait été fixé).

En mai 2007, à la conférence de presse pour le soixantenaire du Festival de Cannes (pour lequel il a réalisé un court métrage dans le cadre d'un projet collectif : Chacun son cinéma ou Ce petit coup au cœur quand la lumière s'éteint et que le film commence avec d'autres réalisateurs tels que les frères Coen, les frères Dardenne, David Cronenberg et David Lynch), réuni avec des confrères et consœurs comme Wim Wenders, Pedro Almodóvar, Takeshi Kitano, Jane Campion ou encore Alejandro González Iñárritu, il déclare devant l'assemblée de journalistes présents pour l'occasion, avant de partir brutalement : « Je crois que c'est une occasion unique, vraiment rare, d'avoir une telle assemblée de metteurs en scène importants, assis, faisant face à un public de critiques... et avoir des questions tellement pauvres ! (...) Alors franchement, je n'ai qu'une chose à dire : allons bouffer ! »[35]. Il entame ensuite la réalisation d'une autre adaptation de Robert Harris, pour le film L'Homme de l'ombre avec Ewan McGregor et Pierce Brosnan dans les rôles principaux.

En 2008, il fait l'objet d'un documentaire réalisé par Maria Zenovich, Roman Polanski : wanted and desired, qui tend à démontrer la manière dont il fut privé d'une procédure judiciaire équitable lors de sa mise en accusation pour viol sur mineure 31 ans plus tôt.

Le 27 septembre 2009, alors qu'il se rendait à un festival de cinéma en Suisse afin d'y recevoir un prix pour l'ensemble de sa carrière, il est arrêté par la police suisse à Zurich, rattrapé par l'affaire de 1978.

Thèmes récurrents de ses films

Par son cosmopolitisme, sa maîtrise des langues (il parle couramment le polonais, le français, l'anglais, l'italien, l'espagnol et le russe) et son parcours, Polanski est un réalisateur atypique. La diversité des genres qu'il aborde, la maîtrise technique de ses films, son sens aigü du récit et ses audaces formelles en font une figure majeure de l'histoire du 7e art[36]. Pessimiste et largement reliée aux traumatismes de l'enfance, son œuvre révèle une profonde unité dans la mesure où elle se veut une exploration du mal sous toutes ses facettes et illustre les passions excessives de l'âme humaine puis l'oppression psychologique. L'ancien critique de cinéma et actuel président du Festival de Cannes Gilles Jacob distingue « deux Polanski », « Le réalisateur audacieux des premiers films et des courts métrages. Et l'autre celui des grands films à vocation populaire [..] L'un, inventeur de surprises, de formes cinématographiques, de trouvailles bizarres (les pommes de terre qui germent dans le frigo de Répulsion, les œufs de Cul-de-sac), l'autre, plus accompli peut-être, mais plus attendu aussi. ».[37]

Parmi les thèmes privilégiés du réalisateur, on retrouve [38],[39] :

  • Les intrigues fantastiques
  • Les appartements maléfiques et les huis clos
  • La folie
  • Le cauchemardesque et le délire
  • Le complot
  • La paranoïa
  • L'anomie sociale
  • L'aliénation
  • La barbarie
  • Le point de vue des victimes et des dominés dans l'Histoire
  • La perte de l'innocence
  • L'enfance bafouée
  • La dialectique maître-esclave
  • L'ambiguïté du mal et du rapport entre victime et bourreau
  • La relation au monde extérieur ou à autrui vécue comme une effraction ou une violation
  • L'humour noir
  • Un goût prononcé pour le baroque
  • Le satanisme

Filmographie

Réalisateur

réalisateurs et réalisatrices

par récompense ou nationalité

Courts métrages

  • 1955 : La Bicyclette (Rower)
  • 1956 : Meurtre (Morderstwo)
  • 1956 : Rire de toutes ses dents (Uśmiech Zębiczny)
  • 1957 : Cassons le bal ! ou Les trouble-fête (Rozbijemy Zabawę)
  • 1957 : Kirk Douglas (documentaire)
  • 1958 : Deux hommes et une armoire (Dwaj Ludzie z Szafą)
  • 1959 : La Lampe (Lampa)
  • 1959 : Quand les anges tombent (Gdy Spadają Anioły)
  • 1960 : Le Gros et le maigre
  • 1962 : Les Mammifères ou Les Bipèdes familiers (Ssaki)

Longs métrages

Acteur

acteurs et actrices

A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Y Z

Scénariste

Scénaristes

A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Y Z

Producteur

Auteur (bibliographie)

  • Trois scripts de films : Le Couteau dans l'eau [scénario original de Jerzy Skolimowski, Jakub Goldberg et Roman Polanski], Repulsion [scénario original de Roman Polanski et de Gérard Brach], Cul-de-sac [scénario original de Roman Polanski et Gérard Brach], introduction et traduction par Boleslaw Sulik, New York : Fitzhenry and Whiteside. 275 pages (ISBN 0-0643-0062-5) (ouvrage en anglais)
  • Roman Polanski, Roman Polanski's What?, Londres : Lorrimer. 106 pages, 1973 (ISBN 0-8564-7033-3) et What?, New York : Third press, 91 pages, 1973 (ISBN 0-8938-8121-X)
  • Le Locataire (scénario adapté par Gérard Brach et Roman Polanski, d'après le roman de Roland Topor : Le Locataire chimérique), Paris : Avant-Scène, 1976
  • Roman par Polanski, éd. Robert Laffont, 496 pages, 1984 (ISBN 2-2210-0803-0)
  • Le Pianiste, Paris : Avant-Scène, 2003 (ISBN 2-8472-5016-6)

Théâtre

Opéra

Récompenses, nominations et distinctions honorifiques

Voir aussi

Bibliographie

  • Jacques Belmans, Roman Polanski, coll. Cinéma d'aujourd'hui, Seghers, 1971
  • Roman Polanski, Roman, Robert Laffont, 1984
  • Pierre-André Boutang, Polanski par Polanski, éditions du Chêne, 1986
  • Stéphane Bonnotte et Frédéric Zamochnikoff, Polanski entre deux mondes, Michel Lafon, 2004

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Moldes, Diego: Roman Polanski. La fantasía del atormentado, Ediciones JC Clementine, Madrid, 2005.

Liens externes

Notes et références

Cet article a été remanié et retravaillé sur la base d'une traduction tirée de l'article anglais Roman Polanski

  1. Polanski, Roman - culture.pl
  2. http://www.roman-polanski.net/bio/bio_polanski1933.htm Biographie de Roman Polanski sur son site pédagogique
  3. Biographie de Roman Polanski sur son site pédagogique
  4. Article consacré à Roman Polanski dans Le Dictionnaire du cinéma : les réalisateurs (1895-1995) dirigé par Jean Tulard, éditions Robert Laffont, 1995, Paris, page 694
  5. Robert Evans marque les années triomphales de la Paramount dans les années 1970 grâce au premier opus de la saga des Parrain réalisée par Francis Ford Coppola ou à Love Story d'Arthur Hiller, qu'il a tous deux financés. Un documentaire sorti en salles en 2005 lui a d'ailleurs été consacré : The Kid stays in the picture. Le travail d'Evans consistait à laisser une très grande liberté au metteur en scène, contrairement à l'ensemble des majors américaines. Polanski s'en est expliqué dans plusieurs entretiens, notamment dans celui accordé à la chaîne franco-allemande Arte en décembre 2006. Evans a d'ailleurs supporté ses colères sur le plateau, l'a soutenu dans ses altercations avec Cassavetes et a accepté des prolongations de tournage jusqu'à se brouiller personnellement avec Mia Farrow, engagée sur un autre projet avec son mari de l'époque Frank Sinatra, projet qu'elle abandonne finalement pour finir le film et qui sera l'une des causes de leur divorce (épisode relaté par Evans lui-même dans The Kid stays in the picture)
  6. Claude Beylie dans la fiche consacrée à Rosemary's Baby in Les Films clés du cinéma, éditions Larousse, 1996, Paris
  7. Biographie de Roman Polanski sur son site pédagogique
  8. Affaire Polanski : le témoignage de Samantha Geimer, violée à 13 ans : « Je n'ai pas de rancœur envers lui » - lepoint.fr, publié le 28 septembre 2009, mis à jour le 29 septembre 2009.
  9. (en) engaging in unlawful sexual intercourse with a minor, Roman Polanski Media Reports Archive.
  10. (fr) Nombreuses réactions à l'arrestation de Roman Polanski - L'Express, consulté le 1er octobre 2009
  11. Il existe cependant des exceptions dans le cadre d'accords bilatéraux, voir le bulletin officiel du Ministère de la Justice no 99.
  12. « French judicial authorities could decide to try the case in France », Jura Koncius, A Roman in Paris, Washington Post, 3 février 1978, citant un porte-parole du ministère français de la Justice.
  13. « Il aurait fallu que les États-Unis "dénoncent les faits" » Hervé Témime, avocat français de Polanski, cité par Charlotte Pudlowski, La France ne peut rien pour Roman Polanski Sur le plan juridique Slate.fr, 29 septembre 2009, consulté le 4 octobre 2009
  14. Pour les États-Unis, Polanski, c'est trente ans de cavale… - Le Monde, 29 septembre 2009.
  15. Le cinéaste s'était engagé à payer 500.000 dollars pour éviter une condamnation - Le Point, 3 octobre 2009
  16. (en) Roman Polanski said he'd pay to end victim's lawsuit - Los Angeles Times, 3 octobre 2009
  17. Polanski avait passé un accord secret avec sa victime - Libération, 3 octobre 2009
  18. a  et b L'Affaire Polanski commentée par Marie Colmant sur l'Édition spéciale de Canal+ - YouTube [vidéo]
  19. La procédure qui attend Roman Polanski - Le Temps, 28 septembre 2009
  20. Le cinéaste Roman Polanski arrêté à Zürich - Le Monde, 27 septembre 2009
  21. Mitterrand et Kouchner critiqués à droite pour leur soutien à Polanski - Libération, 29 septembre 2009
  22. a  et b Pétition pour Polanski signée par Allen, Scorsese et Lynch - Le Nouvel Observateur, 3 octobre 2009
  23. Le texte et les signatures de la pétition du monde du cinéma en faveur de Roman Polanski - Site de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), 28 septembre 2009
  24. L'affaire Polanski divise l'Europe et l'Amérique - Le Devoir, 30 septembre 2009
  25. « Pourquoi, en France, vous le soutenez, Polanski ? »
  26. Arrestation de Polanski: des voix discordantes troublent le concert de soutiens - Tribune de Genève, 29 septembre 2009
  27. Quelques mots sur l'affaire Polanski - Blog de Maître Éolas, 29 septembre 2009
  28. Affaire Polanski : dits et non-dits - Blog sur le site du Figaro, 29 septembre 2009
  29. (en) Polanski an odd priority for DA - Los Angeles Times, 28 septembre 2009.
  30. L'affaire Polanski divise l'Europe et l'Amérique - Le Devoir, 30 septembre 2009
  31. (en) Roman Polanski's arrest in Switzerland has some wondering why - swissinfo.ch, 28 septembre 2009
  32. La classe politique suisse approuve l'arrestation de Roman Polanski - AFP
  33. Mobilisation internationale après l'arrestation du cinéaste franco-polonais à Zurich - swissinfo.ch, 28 septembre 2009
  34. Texte intégral du traité d'extradition - admin.ch [pdf]
  35. Propos filmés et recueillis par les médias du monde entier et retransmis complètement en France par le Le Grand Journal de Michel Denisot du 15 mai 2007
  36. Article consacré à Roman Polanski dans Le Dictionnaire du cinéma : les réalisateurs (1895-1995) dirigé par Jean Tulard, éditions Robert Laffont, 1995, Paris, page 694
  37. (fr), Gilles Jacob, La Vie Passera comme un rêve, édition Robert Laffont, 2009, Paris, chapitre 57 « Apprendre (suite) », page 301
  38. Article Encarta sur Roman Polanski
  39. Article consacré à Roman Polanski dans Le Dictionnaire du cinéma : les réalisateurs (1895-1995) dirigé par Jean Tulard, éditions Robert Laffont, 1995, Paris, page 694
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