- Alain Resnais
-
Alain Resnais
Juliette Binoche, Alain Resnais et Agnès Jaoui à la cérémonie des César de 1998
Données clés Naissance 3 juin 1922
Vannes (Morbihan)
FranceNationalité Français Profession Réalisateur et scénariste Films notables Nuit et brouillard
Hiroshima mon amour
L'Année dernière à Marienbad
Muriel
L'Amour à mort
Mélo
Smoking / No Smoking
On connaît la chansonAlain Resnais est un réalisateur français, également scénariste et monteur, né le 3 juin 1922 à Vannes (Morbihan).
Sommaire
Biographie
Apprentissage
Alain Resnais naît en 1922 à Vannes. À l'âge de quatorze ans, il tourne ses premiers courts métrages, dont une adaptation de Fantomas. Outre le cinéma, il se passionne pour la photographie, la peinture, la bande dessinée et la littérature, il affectionne particulièrement les œuvres de Jean Ray, Marcel Proust et André Breton. En 1942, il tient un petit rôle dans Les Visiteurs du soir. Il imagine un moment devenir libraire mais passe finalement le concours de l'IDHEC (aujourd'hui La Fémis) où il est admis en 1943 dans la section montage. En 1946, en Allemagne, il participe au Théâtre aux Armées sous la direction d'André Voisin. La même année il est assistant-réalisateur et monteur sur le long métrage documentaire Paris 1900.
Sa carrière de réalisateur commence avec Van Gogh, en 1948, un court métrage documentaire produit par Pierre Braunberger, puis, il tourne des documentaires pendant une dizaine d'années. Les thèmes abordés sont très variés : la guerre d'Espagne vue par Picasso dans le court-métrage Guernica en 1950, ou l'usine Pechiney. En 1956, il obtient le prix Jean-Vigo pour Nuit et brouillard, devenu depuis, grâce à Henri Michel, qui en avait pris l'initiative et en était le conseiller historique, un film de référence sur les camps de déportation.
Les longs métrages
En 1959, Alain Resnais réalise son premier long métrage de fiction, écrit par Marguerite Duras : Hiroshima mon amour. Le film a un retentissement mondial : il est apprécié à la fois par la critique et le public. Selon Louis Malle, « ce film a fait faire un bond dans l'histoire du cinéma ».
Resnais enchaîne avec L'Année dernière à Marienbad, en 1961, cinéroman créé en compagnie d'Alain Robbe-Grillet. Il commence à définir son style, teinté de surréalisme, d'onirisme et de distanciation brechtienne. La volonté de détruire la narration linéaire est également perceptible. Dans ses films, on retrouve souvent un engagement social et politique (en 1960, il est d'ailleurs l'un des signataires du Manifeste des 121). Outre Hiroshima mon amour qui évoque la bombe atomique et la collaboration puis L'Année dernière à Marienbad, d'une facture plus abstraite, on peut citer Muriel, ou le Temps d'un retour en 1963, qui traite de la torture pendant la guerre d'Algérie, La guerre est finie (dont le scénario est écrit par Jorge Semprún), en 1966, qui raconte l'histoire d'un militant communiste sur fond de guerre d'Espagne et d'anti-franquisme ou encore Stavisky en 1974, qui évoque un scandale financier de la Troisième République. Les thèmes abordés même s'ils sont variés tournent toujours autour des mécanismes psychologiques, de la question du libre arbitre, du déterminisme et du conditionnement socio-culturel. Avec Mon oncle d'Amérique, Resnais va même jusqu'à mettre en application les thèses anthropologiques du scientifique Henri Laborit. Dans les années 1990, Alain Resnais s'ouvre à de nouvelles collaborations, avec le duo de scénaristes-acteurs Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui puis touche un plus large public, développant l'aspect ludique et fantaisiste de son cinéma. Il explore entre autres le théâtre filmé avec Smoking / No Smoking en 1993, diptyque sur les possibles de l'existence, où les comédiens Sabine Azéma et Pierre Arditi jouent chacun cinq rôles, la comédie musicale avec On connaît la chanson en 1997, qui fait intervenir dans les dialogues et les situations quotidiennes le répertoire de la chanson populaire ou encore l'opérette, le burlesque et le vaudeville en 2003, avec Pas sur la bouche. Trois fois lauréat du Prix Louis-Delluc (en 1966, 1993 et 1997), Alain Resnais est le metteur en scène le plus souvent nommé au César du meilleur réalisateur : huit fois au total. Il a d'ailleurs obtenu la récompense à deux reprises : en 1978 et en 1994. Il est également le seul cinéaste à avoir vu trois de ses œuvres couronnées par le César du meilleur film : Providence en 1978, Smoking / No Smoking en 1994 et On connaît la chanson en 1998.
Principales caractéristiques de son œuvre
L'œuvre de Resnais dénote une profonde unité car elle remet en cause les codes de la narration cinématographique traditionnelle, « trop soumis aux péripéties », selon le cinéaste André Delvaux. Le metteur en scène plonge le cinéma dans la modernité en abolissant, dans ses premiers films de fiction, le récit à intrigue et en explorant une réalité aléatoire, construite sur des hasards, des obsessions, des moments incompréhensibles et des scènes non-linéaires. Ces situations font généralement s'entrecroiser différents personnages ou différentes époques dans un même lieu (comme dans La vie est un roman) ou dans un univers volontairement artificiel et théâtral. Cette fusion du théâtre et du cinéma permet de revendiquer l'artificialité du septième art et sa faculté de condensation puis de produire des « expériences », au sens scientifique du terme (procédé défini explicitement par le biais du témoignage du professeur Laborit dans Mon oncle d'Amérique). Elles révèlent, en ce sens, une vérité indicible sur les êtres humains, enfermés comme des animaux dans une cage. Ceux-ci font de leur mieux pour « se débattre dans cette toile d'araignée qu'est l'existence » selon l'expression du comédien André Dussolier. À cette recherche, s'ajoute le travail minutieux de montage qui juxtapose différents espaces et temps pour sonder la mémoire collective et individuelle. Cette technique permet au réalisateur d'illustrer le chaos de l'existence et le flot d'images contradictoires, de souvenirs, de scènes imaginaires et de fantasmes, plus proche de la réalité de l'esprit, consciente ou non, que l'ordre et la régularité voulus par une fiction classique. Cette construction régit la notion de « temps sensible » que l'on retrouve chez Marcel Proust (auteur fétiche de Resnais), en une composition filmique proprement musicale, voire symphonique (très évidente dans des films tels qu'Hiroshima mon amour, Je t'aime, je t'aime et Providence). La polyphonie est un ressort essentiel du cinéma de Resnais et prend plusieurs tonalités : grotesque, comique et dramatique. Jugé cérébral et austère, le cinéaste prend pourtant plaisir à développer une forme iconoclaste, personnelle et ironique de comédie musicale dans ses œuvres tardives comme On connaît la chanson et Pas sur la bouche. Son film Cœurs (2006), écrit par l'homme de théâtre Jean-Michel Ribes, se veut une sorte de synthèse de ses préoccupations artistiques. Son nouveau film Les Herbes folles souligne son inspiration surréaliste et son goût du décalage absurde, de la légèreté et de la fantaisie débridée.
« Je souhaite approcher par le film la complexité de la pensée, son mécanisme interne. Dès qu'on descend dans l'inconscient, l'émotion naît. Et le cinéma ne devrait être qu'un montage d'émotions. »
Méthodes
Que ce soit dans ses films documentaires ou de fiction, Alain Resnais est réputé pour son travail de documentation méticuleux. « Je commence en général par repérer tout seul les lieux de tournage. Quand je suis arrivé à Hiroshima pour la première fois, j'ai quitté l'hôtel à trois heures du matin et je suis parti au hasard à travers la ville... Dans ces moments-là, le Leica est bien commode. Je m'en sers comme d'un bloc-notes où j'inscris pêle-mêle les images les plus diverses. Elles me serviront ensuite à matérialiser l'histoire, à fabriquer une autre réalité avec des matériaux pris un peu partout. C'est toujours le problème de l'assemblage... ». Resnais colle ensuite ces photos directement sur le découpage pour que décorateurs et producteurs sachent exactement ce qu'il désire[1]. Il exige aussi de ses scénaristes qu'ils établissent une fiche biographique complète de tous les personnages, pour leur donner une certaine profondeur. Il est également réputé pour sa fidélité dans le travail : on retrouve régulièrement dans ses films les acteurs Sabine Azéma, André Dussolier, Pierre Arditi.
Vie privée
Alain Resnais n'accorde pas souvent d'interview aux journaux.
Il a épousé en 1969 son assistante de l'époque, Florence Malraux, la fille d'André Malraux et Clara Malraux, qui travaillait avec lui depuis La guerre est finie et qui l'a accompagné jusqu'à Mélo, en 1986. Depuis la fin des années 1980, il partage la vie de Sabine Azéma, son actrice fétiche, qu'il a épousée en 1998.
Filmographie
Réalisateur
Monteur
Année Titre français Titre original (si différent) Remarque 1947 Van Gogh 1947 Transfo transforme l'énergie du pyrium 1947 L'alcool tue 1947 Paris 1900 1948 Van Gogh 1948 Jean Effel 1948 Châteaux de France 1950 Guernica 1950 Gauguin 1952 Saint-Tropez, devoir de vacances (Saint-Tropez) 1953 Aux frontières de l'homme 1955 Une visite 1955 Nuit et brouillard 1956 Toute la mémoire du monde 1956 La Pointe courte 1957 L'Œil du maître 1958 Le Chant du styrène 1958 Broadway by light 1959 Novembre à Paris Scénariste
Année Titre français Titre original (si différent) Remarque 1948 Châteaux de France 1986 Mélo Chef-opérateur
Année Titre français Titre original (si différent) Remarque 1947 Transfo transforme l'énergie du pyrium 1947 L'alcool tue 1948 Jean Effel 1948 Châteaux de France Acteur
Année Titre français Titre original (si différent) Remarque 1942 Les Visiteurs du soir 1997 Quand le chat sourit Producteur
Année Titre français Titre original (si différent) Remarque 1947 Paris 1900 Assistant réalisateur
Année Titre français Titre original (si différent) Remarque 1947 Paris 1900 Récompenses et nominations
César
Film
- 1978 : César du meilleur film - Providence
- 1981 : Nomination au César du meilleur film - Mon oncle d'Amérique
- 1985 : Nomination au César du meilleur film - L'Amour à mort
- 1987 : Nomination au César du meilleur film - Mélo
- 1994 : César du meilleur film - Smoking / No Smoking
- 1998 : César du meilleur film - On connaît la chanson
- 2004 : Nomination au César du meilleur film - Pas sur la bouche
- 2010 : Nomination au César du meilleur film - Les Herbes folles
Réalisateur
- 1978 : César du meilleur réalisateur - Providence
- 1981 : Nomination au César du meilleur réalisateur - Mon oncle d'Amérique
- 1985 : Nomination au César du meilleur réalisateur - L'Amour à mort
- 1987 : Nomination au César du meilleur réalisateur - Mélo
- 1994 : César du meilleur réalisateur - Smoking / No Smoking
- 1998 : Nomination au César du meilleur réalisateur - On connaît la chanson
- 2004 : Nomination au César du meilleur réalisateur - Pas sur la bouche
- 2007 : Nomination au César du meilleur réalisateur - Cœurs
Autres
- Prix Jean-Vigo en 1954 pour Les statues meurent aussi
- Prix Jean-Vigo en 1956 pour Nuit et brouillard
- BAFTA spécial en 1960 pour Hiroshima mon amour
- Mostra de Venise 1961 : Lion d'or pour L'Année dernière à Marienbad
- Mostra de Venise 1963 : Prix de la Critique internationale pour Muriel, ou le Temps d'un retour
- Prix Louis-Delluc 1966 pour La guerre est finie
- Festival de Cannes 1980 : Grand prix du jury et Prix FIPRESCI de la Critique internationale pour Mon oncle d'Amérique
- Prix Louis-Delluc 1993 pour Smoking / No Smoking
- Festival de Berlin 1994 : Ours d'argent (meilleure contribution artistique) pour Smoking / No Smoking
- Prix Louis-Delluc 1997 pour On connaît la chanson
- Festival de Berlin 1998 : Ours d'argent pour la contribution artistique d'On connaît la chanson et pour l'ensemble de sa carrière
- 63e Mostra de Venise, en 2006 : Lion d'argent (meilleure mise en scène) pour Cœurs
- Étoile d'or du réalisateur 2007, pour Cœurs
- Prix Henri-Langlois d'honneur 2007
- Festival de Cannes 2009 : Prix exceptionnel du Jury pour Les Herbes folles et l'ensemble de son œuvre
Notes et références
- Bernard Pingaud in « Jouer avec le temps », L'Arc, n°31, 1967. Les photos de répérages de Resnais ont par ailleurs fait l'objet d'un recueil : Alain Resnais & Jorge Semprun, Repérages, Paris, Chêne, 1974. Dans un entretien avec
Annexes
Bibliographie
- Alain Resnais (3e édition), de Gaston Bounoure. Paris, Editions Seghers, 1974
- Alain Resnais: The Role of Imagination, James Monaco. Londres: Oxford University Press, 1978
- Resnais, arpenteur de l'imaginaire, de Robert Benayoun. Paris: Édition Ramsay, 1986
- L'atelier d'Alain Resnais, de François Thomas. Paris: Édition Flammarion, 1989
- Hiroshima mon amour, de Marguerite Duras (scénario et dialogues). Paris: Gallimard, 1994
- Hiroshima mon amour : étude critique, de Jean-Louis Leutrat. Paris: Nathan, 1994
- Alain Resnais, compositeur de films, de Thierry Jousse. Paris: Édition Mille et une nuits, 1997
- New Novel, New Wave, New Politics: Fiction and the Representation of History in Postwar France, de Lynn A. Higgins. Londres: University of Nebraska Press, 1998
- Alain Resnais, Positif (revue de cinéma), Éditions Gallimard, 2002
- Alain Resnais, Emma Wilson. Manchester: Manchester University Press, 2006
- Alain Resnais Liaisons secrètes, accords vagabonds, de Suzanne Liandrat-Guigues et Jean-Louis Leutrat, éditions Cahiers du Cinéma, 2006
Liens externes
- Alain Resnais sur l’Internet Movie Database - Version plus complète en anglais
- Alain Resnais sur AlloCiné
- (fr) Alain Resnais sur le site d'analyse L'oBservatoire (simple appareil).
- Portail du cinéma français
- Portail de la réalisation audiovisuelle
- Portail de Vannes et de sa région
Catégories :- Réalisateur français
- Scénariste français
- César du meilleur réalisateur
- Prix Lumière du meilleur réalisateur
- Élève du Cours Simon
- Étudiant de l'Institut des hautes études cinématographiques
- Naissance en 1922
- Naissance à Vannes
Wikimedia Foundation. 2010.