Pierre-simon laplace

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Pierre-Simon Laplace

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Pierre-Simon Laplace
Pierre-Simon Laplace.jpg
Naissance 23 mars 1749
Beaumont-en-Auge
Décès 5 mars 1827 (à 77 ans)
Paris
Nationalité France France
Activité(s) principale(s) Mathématicien, astronome, physicien
Formation Université de Caen
Distinctions Académie des sciences, Académie française

Pierre-Simon Laplace, le 23 mars 1749 à Beaumont-en-Auge et mort le 5 mars 1827 à Paris, est un mathématicien, astronome et physicien français.

Laplace est lun des principaux scientifiques de la période napoléonienne ; en effet, il a apporté des contributions fondamentales dans différents champs des mathématiques, de lastronomie et de la théorie des probabilités ; il a été l'un des scientifiques les plus influents de son temps, notamment par son affirmation du déterminisme ; il a contribué de façon décisive à l'émergence de lastronomie mathématique reprenant et étendant le travail de ses prédécesseurs dans son traité intitulé Mécanique Céleste (1799-1825). Ce chef-dœuvre, en cinq volumes, a transformé lapproche géométrique de la mécanique développée par Newton en une approche fondée sur lanalyse mathématique. En 1799 il est nommé ministre de lintérieur sous le Consulat. Napoléon Ier, en 1806 lui confère le titre de comte de lEmpire. Il est nommé marquis en 1817, après la restauration des Bourbons[1].

Sommaire

Biographie

Enfance

Normand et fils d'un petit propriétaire terrien ou dun ouvrier agricole, Simon Laplace doit son éducation à lintérêt de quelques riches voisins pour ses capacités et pour sa belle prestance. On ne sait pas grand chose de ses premières années car il coupa les ponts, aussi bien avec ses parents quavec ses bienfaiteurs. Il semblerait que tout jeune, il devient lassistant de lécole de Beaumont puis, après avoir terminé ses études à luniversité de Caen, il a comme professeur Christophe Gadbled, il rencontre dAlembert, qui reconnaît son talent, lencourage dans ses recherches et lui procure une lettre de recommandation grâce à laquelle il est nommé professeur de mathématiques à lÉcole militaire, poste peu exigeant qui lui laisse le temps de poursuivre ses études personnelles.

Lascension

Statue de Laplace à Beaumont-en-Auge, lieu de naissance du scientifique

Confiant dans ses capacités, Laplace se voue à une recherche originale et durant dix-sept ans de 1771 à 1787, il produit une grande partie de sa contribution à lastronomie. Son travail débute par un mémoire lu devant lAcadémie française en 1773, dans lequel il montre que les mouvements planétaires sont restés voisins de ceux prévus par la théorie de Newton pour des longs intervalles de temps et il vérifie la relation jusquaux cubes de lexcentricité et de linclinaison des orbites. Plusieurs articles suivent sur certains points du calcul intégral, des différences finies, des équations différentielles et dastronomie. Cependant certaines découvertes importantes proposées dans ces articles, comme les correspondances des harmoniques sphériques dans lespace bidimensionnel ont déjà été publiées par Adrien-Marie Legendre dans un article envoyé à lAcadémie en 1783.

En 1785, il devient pensionnaire de la chaire de mécanique de lAcadémie royale des sciences, puis, en 1795, membre de la chaire de mathématiques du nouvel Institut des sciences et des arts, dont il est président en 1812. En 1816, il est élu à lAcadémie française. En 1821, il devient lors de sa fondation le premier président de la Société de géographie. En outre, il devient membre de toutes les principales académies scientifiques dEurope.

Par son intense activité académique, il exerce une grande influence sur les scientifiques de son temps, en particulier sur Lambert Adolphe Jacques Quételet et Siméon-Denis Poisson. Il est comparé à un Newton français pour son aptitude naturelle et extraordinaire pour les mathématiques. Il ne semble pas que Laplace ait été modeste et n'ait pas mesuré l'effet de son comportement. Anders Johan Lexell en visite à lAcadémie des Sciences à Paris en 1780-1781 rapporte que Laplace laisse vraiment transparaître le fait quil se considère le meilleur mathématicien de son temps en France. [réfnécessaire]

Laplace est lun des premiers savants à sintéresser de près à la question de la stabilité à long terme du système solaire. La complexité des interactions gravitationnelles entre le Soleil et les planètes connues à lépoque ne semblait pas admettre une solution analytique simple. Newton avait dailleurs déjà pressenti ce problème après avoir remarqué des irrégularités dans le mouvement de certaines planètes ; il en déduisait dailleurs quune intervention divine était nécessaire de manière à éviter la dislocation du système solaire.

Après ses travaux sur la mécanique céleste, Laplace se propose décrire un ouvrage qui aurait « offrir une solution complète au grand problème de la mécanique représenté par le système solaire et porter la théorie à coïncider aussi étroitement avec lobservation que les équations empiriques nauraient plus trouver place dans les tables astronomiques. » Le résultat est contenu dans ses ouvrages Exposition du système du monde et Mécanique céleste.

Sa Mécanique céleste est publiée en cinq volumes. Les deux premiers, publiés en 1799, contiennent les méthodes pour calculer les mouvements des planètes, pour déterminer leurs formes et pour résoudre les problèmes liés aux marées. Le troisième et le quatrième, publiés respectivement en 1802 et en 1805, contiennent les applications de ces méthodes et diverses tables astronomiques. Le cinquième volume publié en 1825 est principalement historique mais il fournit en appendice les résultats des dernières recherches de Laplace. Celles-ci sont très nombreuses mais il sapproprie beaucoup de résultats dautres scientifiques avec peu ou pas de reconnaissance et les conclusions sont souvent mentionnées comme si elles étaient les siennes. Daprès Jean-Baptiste Biot, qui aide lauteur dans la relecture avant impression, Laplace est fréquemment incapable de retrouver les détails des démonstrations et est ainsi souvent conduit à réétudier ses résultats pendant plusieurs jours.

Mécanique céleste nest pas seulement la traduction des Principia Mathematica dans le calcul différentiel, mais complète certaines parties que Newton navait pas été en mesure de détailler.

Dans cet ouvrage, Laplace expose lhypothèse de la nébuleuse selon lequel le système solaire se serait formé suite à la condensation dune nébuleuse. Lidée de la nébuleuse avait déjà été énoncée par Kant en 1755, mais il est probable que Laplace nen fut pas informé.

Laplace, qui avait effectué ses premiers travaux sur les probabilités entre 1771 et 1774, en redécouvrant notamment après Thomas Bayes les probabilités inverses, dites loi de Bayes-Laplace, ancêtre des statistiques inférentielles, publie en 1812 sa Théorie analytique des probabilités. Dans cet ouvrage, Laplace donne des éléments déterminants à la théorie des probabilités dont il est considéré comme un des pères. En 1814 il publie son Essai philosophique sur les probabilités. Il est le premier à publier la valeur de lintégrale de Gauss. Il étudie la transformée de Laplace, étude plus tard complétée par Oliver Heaviside. Il adhère à la théorie dAntoine Lavoisier, avec qui il détermine les températures spécifiques de plusieurs substances à laide dun calorimètre de sa propre fabrication. En 1819, Laplace publie un simple résumé de son travail sur les probabilités.

Laplace est connu également pour son « démon de Laplace », lequel a la capacité de connaître, à un instant donné, tous les paramètres de toutes les particules de lunivers. Il formule ainsi le déterminisme généralisé, le mécanisme. Létat présent de lunivers est leffet de son état antérieur, et la cause de ce qui va suivre. « Une intelligence qui, à un instant donné, connaîtrait toutes les forces dont la nature est animée, la position respective des êtres qui la composent, si dailleurs elle était assez vaste pour soumettre ces données à lanalyse, elle embrasserait dans la même formule les mouvements des plus grands corps de lunivers, et ceux du plus léger atome. Rien ne serait incertain pour elle, et lavenir comme le passé seraient présents à ses yeux. » Dans cette perspective, lauteur adopte une position déterministe, soit une position philosophique et scientifique capable dinférer de ce qui est, ce qui sera. Ce concept de démon sera notamment remis en cause par le principe d'incertitude de Heisenberg.

Carrière politique

Laplace

La capacité et la rapidité avec laquelle Laplace réussit à changer dopinion politique est surprenante. Quand le pouvoir de Napoléon augmente, Laplace abandonne ses principes républicains (qui sont fidèlement le reflet des opinions du parti au pouvoir) et il implore le premier consul de lui donner le poste de ministre de lIntérieur. Napoléon, qui désire le soutien des hommes de science, accepte la proposition mais, en moins de six semaines, la carrière politique de Laplace voit sa fin. Le bulletin de Napoléon à sa démission est le suivant : « Géomètre de première catégorie, Laplace na pas tardé à se montrer un administrateur plus que médiocre ; de son premier travail nous avons immédiatement compris que nous nous étions trompés. Laplace ne traitait aucune question dun bon point de vue : il cherchait des subtilités de partout, il avait seulement des idées problématiques et enfin il portait lesprit de linfiniment petit jusque dans ladministration. »

Ainsi Laplace perd sa charge mais il maintient sa fidélité. Il entre au Sénat conservateur et, dans le troisième volume de la Mécanique céleste, il réalise une note dans laquelle il déclare quentre toutes les vérités contenues dans celui-ci, la plus chère à lauteur est la déclaration faite à sa dévotion envers le médiateur de lEurope. Dans le tirage vendu après la Restauration celle-ci est effacée. En 1814, il est évident que lEmpire allait faillir et Laplace se dépêche doffrir ses services aux Bourbons. Durant la restauration, il est récompensé avec un titre de marquis. Le mépris que ses collègues ont à son égard en raison de sa conduite en cette occasion peut être lu dans les pages de Paul-Louis Courier. La connaissance de Laplace est utile pour les nombreuses commissions scientifiques auxquelles il appartient et probablement justifie la manière dont on ferma les yeux sur sa fausseté politique.

Que Laplace soit présomptueux et égoïste nest nié par aucun de ses plus passionnés admirateurs ; sa conduite à légard de ses bienfaiteurs lors de sa jeunesse et envers ses amis politiques est ingrate et, de plus, il sapproprie les résultats de ceux qui sont relativement inconnus. Parmi ceux quil traite de cette manière, trois deviennent très connus : Adrien-Marie Legendre et Jean Baptiste Joseph Fourier en France et Thomas Young en Angleterre. Ceux-ci noublieront jamais linjustice dont ils furent les victimes. Dautre part, sur certaines questions, il fait preuve dun caractère indépendant et ne cache jamais sa manière de voir les questions de religion, de philosophie ou de science même si cela nest pas apprécié des autorités au pouvoir. Vers la fin de sa vie, et spécialement pour les travaux de ses élèves, Laplace est généreux et une fois, il omet un de ses articles de sorte quun élève reçoive le mérite exclusif de la recherche. Initié franc-maçon, il est membre du collège des grands officiers du Grand Orient de France en 1804[2].

Contributions scientifiques

Mécanique céleste

Représentation artistique de lhypothèse de la nébuleuse de Laplace.

Laplace apporte une importante contribution à la mécanique céleste en utilisant les conceptions lagrangiennes pour mieux expliquer le mouvement des corps. Il passe une grande partie de sa vie à travailler sur lastronomie mathématique et son travail culmine avec la vérification de la stabilité dynamique du système solaire avec lhypothèse que celui-ci consiste en un ensemble de corps rigides qui se meuvent dans le vide. Il établit seul lhypothèse de la nébuleuse et il est un des premiers scientifiques à concevoir lexistence des trous noirs et la notion de collapsus gravitationnel.

Selon lhypothèse de la nébuleuse, le système solaire se serait développé depuis une masse globulaire de gaz incandescent qui tourne autour dun axe passant par son centre de masse. En refroidissant cette masse se serait réduite et quelques anneaux concentriques se seraient détachés de son bord externe. Ces anneaux en se refroidissant se seraient condensés en planètes. Le soleil représenterait le noyau central de la nébuleuse qui, resté encore incandescent, continue à irradier. De ce point de vue, nous devrions nous attendre que les planètes plus distantes soient plus vieilles que celles plus voisines du soleil. Lidée substantielle de la théorie, même avec quelques importantes modifications est acceptée encore aujourdhui.

Laplace en outre conjecture le concept de trou noir. Il montre quil pourrait y avoir des étoiles massives dotées dune gravité si grande que la lumière elle-même n'aurait pas une vitesse suffisante pour sortir de leur intérieur. Laplace suppose que certaines étoiles de la nébuleuse découvertes à laide des télescopes ne font pas partie de la Voie lactée et quelles sont elle-même des galaxies. Donc, Laplace anticipe la grande découverte de Edwin Hubble, un siècle avant que cela se produise.

Dessin dun trou noir; objet astronomique dont lexistence fut conjecturée par Laplace.

Au cours des années 1784 à 1787, il produit plusieurs mémoires contenant des résultats exceptionnels. Parmi ceux-ci, celui de 1784 qui est particulièrement relevé, réimprimé dans le troisième volume de la Mécanique Céleste, à lintérieur duquel il détermine complètement lattraction dun sphéroïde sur une particule externe à lui. Ceci est mémorable pour lintroduction en analyse des harmoniques sphériques ou coefficients de Laplace.

Si les coordonnées de deux points sont (r,μ,ω) et (r',μ',ω'), et si r' r, alors la réciproque de leur distance peut être développée en fonction du rapport de r/r', et les coefficients respectifs sont les coefficients de Laplace. Leur utilité dérive du fait que chaque fonction avec des coordonnées dun point sur la sphère peut être développé en série de cette manière.

Cet article est aussi très important pour le développement de lidée de potentiel, appropriée et utilisée par Joseph-Louis Lagrange dans ses mémoires de 1773, 1777 et 1780. Laplace montre que le potentiel satisfait toujours à léquation différentielle:

\nabla^2V={\partial^2V\over \partial x^2 } +
{\partial^2V\over \partial y^2 } +
{\partial^2V\over \partial z^2 } = 0,

et sur ce résultat, est basé son travail suivant sur lattraction. La quantité \nabla^2V= 0 est définie comme la densité de V\, et sa valeur en chaque point indique lexcès de V\, au regard à sa valeur moyenne autour du point. Léquation de Laplace ou la forme plus générale \nabla^2 V=- 4 \pi \rho, apparaît dans toutes les branches de la physique mathématique.

Entre 1784 et 1786, il publie un mémoire concernant Jupiter et Saturne il vérifie, par lintermédiaire des séries perturbatives, que dans des temps très longs, laction réciproque des deux planètes ne peut jamais influer significativement sur les excentricités et sur les inclinaisons de leurs orbites. Il fait noter que les particularités du système de Jupiter sont dues au fait que les mouvements moyens de Jupiter et Saturne sont très voisins de la commensurabilité. Il découvre aussi la cyclicité du mouvement des deux planètes estimée à peu près à 900 ans, les deux planètes paraissent exécuter des accélérations et des décélérations réciproques. De telles variations étaient déjà notées par Joseph-Louis Lagrange, mais seul Laplace les rattacha à un mouvement cyclique, confirmant lidée que le système solaire présente des mouvements non occasionnels même à grande échelle temporelle. Les développements de ses études sur le mouvement planétaire sont exposés dans ses deux mémoires de 1788 et de 1789.

Lannée 1787 est rendue mémorable par les analyses de Laplace sur les relations entre laccélération lunaire et les changements séculaires dans lexcentricité de lorbite de la Terre : Cette recherche complète la démonstration de la stabilité du système solaire entier. Il cherche par exemple à expliquer comment le mouvement orbital de la Lune subit une très légère accélération qui fait varier la longueur du mois lunaire dune seconde en trois mille ans en attribuant la cause à une lente variation de lexcentricité terrestre. En vérité, il a été démontré successivement que de telles accélérations sont dues à lattraction réciproque qui tend à synchroniser le mouvement de révolutions et de rotations des corps.

Physique

La théorie de lattraction capillaire est due à Laplace, lequel accepte lidée proposée par Francis Hauksbee dans Philosophical Transactions en 1709, selon laquelle le phénomène est à une force dattraction qui est imperceptible à une distance raisonnable. La part qui soccupe de laction dun solide sur un liquide et de laction réciproque de deux liquides na pas été développée complètement, mais fut complétée en définitive par Carl Friedrich Gauss. En 1862 Lord Kelvin (Sir William Thomson) a démontré que, si nous supposons le caractère moléculaire de la matière, les lois de lattraction peuvent être dotées des lois de Newton de la gravitation.

Laplace en 1816 est le premier à mettre en évidence explicitement le motif pour lequel la théorie de Newton du mouvement oscillatoire fournit une valeur imprécise de la vitesse du son. La vitesse effective est supérieure au regard de celle calculée par Newton à cause de la chaleur développé par la compression imprévue de lair qui augmente lélasticité et donc la vitesse du son transmis. Les recherches de Laplace en physique pratique se sont limitées à celles réalisées avec Antoine Lavoisier dans les années 1782 à 1784 sur la chaleur massique de différents corps.

Théorie des probabilités

Alors quil mène plusieurs recherches en physique, un autre thème auquel il dédie ses forces est la théorie des probabilités. Dans son Essai philosophique sur les probabilités, Laplace formalise la démarche mathématique de la logique par induction basée sur les probabilités, que nous reconnaissons aujourdhui comme celle de Thomas Bayes. En 1774, il déduit le théorème de Bayes sans être probablement au courant du travail (publié en 1763) de Thomas Bayes (mort en 1761). Une formule très connue qui dérive de sa méthode est la règle de succession. Supposons quun évènement ait seulement deux tirages possibles valant « succès » et « insuccès ». Avec lhypothèse que lon sache peu ou rien a priori en rapport aux probabilités relatives aux tirages, Laplace détermine une formule de probabilité pour que le tirage suivant soit un succès :

\Pr(\mathrm{le\ prochain\ tirage\ est\ un\ succ\grave{e}s}) = \frac{s+1}{n+2}

s est le nombre de succès observés précédemment et n est le nombre total des essais observés. Une telle formule est encore aujourdhui utilisée comme une estimation de la probabilité dun évènement si on connait lespace des évènements, dont on dispose dun petit nombre déchantillons.

La règle de succession est sujette à beaucoup de critiques, dues en partie à lexemple que Laplace choisit pour lillustrer. En fait, il calcule la probabilité que le soleil se lèvera demain, considérant le fait quil s'était constamment levé depuis la plus ancienne époque de lhistoire, avec lexpression :

\Pr(\mathrm{le\ soleil\ se\ l\grave{e}vera\ demain}) = \frac{d+1}{d+2}

d est le nombre de fois que le Soleil s'était levé dans le passé. Laplace estimait d à cinq mille ans ou à 1826313 jours. Ce résultat a été retenu comme absurde et certains auteurs ont conclu que toutes les applications des règles de successions sont absurdes par extension. Laplace était pleinement conscient de labsurdité du résultat, immédiatement après lexemple, il écrit Mais ce nombre [cest-à-dire, la probabilité que le Soleil se lève demain] est beaucoup plus grand pour qui, considérant les principes qui règlent les jours et les saisons dans la totalité des évènements, réalise que nul dans linstant actuel peut arrêter son cours.

Toujours en 1774 il explicita lintégrale d'Euler :

\int_{-\infin}^{+\infin}e^{\frac{-u^2}{2}}du = \sqrt{2\pi}

mais il ne peut être considéré comme le père de la loi normale, parce quil ne lassocia pas aux lois sur les erreurs.

En 1779, Laplace indique la méthode pour estimer le rapport des cas favorables ramenés au nombre total de cas possibles. Ceci consiste à considérer les valeurs successives dune quelconque fonction comme les coefficients du développement dune autre fonction avec référencement à une variable différente. Cette seconde fonction est donc appelée la fonction génératrice de la précédente. Laplace démontre comment, par le moyen de linterpolation, ces coefficients peuvent être déterminés à partir de la fonction génératrice. Ensuite, il traite le problème inverse, en trouvant à partir des coefficients la fonction génératrice au moyen de la résolution dune équation aux différences finies. La méthode est peu pratique et, compte tenu des développements successifs des analyses, rarement utilisée aujourdhui.

Son traité Théorie analytique des probabilités inclut un exposé de la méthode des moindres carrés, important témoignage de la paternité de Laplace sur les méthodes analytiques. La méthode des moindres carrés, par lintermédiaire de nombreuses observations, est expliquée empiriquement par Carl Friedrich Gauss et Adrien-Marie Legendre, mais le quatrième chapitre de ce travail contient une démonstration formelle de celui-ci, sur laquelle depuis sest basée toute la théorie des erreurs.

Mathématiques

Parmi les découvertes mineures de Laplace en mathématiques pures, on peut mentionner sa discussion (avant Alexandre-Théophile Vandermonde) de la théorie générale des déterminants en 1772 : sa démonstration que nimporte quelle équation paire doit avoir au moins un facteur quadratique réel, sa réduction de la solution des équations différentielles linéaires à intégrales définies ; et sa solution à léquation différentielle linéaire partielle du second ordre. Il est l'inventeur de la méthode de variation des constantes, permettant de résoudre les équations différentielles linéaires avec second membre, lorsque l'on connaît la solution de l'équation sans second membre. Il est aussi le premier à considérer les difficiles problèmes dans les équations aux différences mixtes, et à démontrer que la solution dune équation aux différences finies de premier grade et du second ordre pourrait être toujours obtenue sous la forme dune fraction continue. En plus de ces découvertes originales, il détermine, dans sa théorie des probabilités, les valeurs des plus communes intégrales définies; et dans le même livre, il donne la démonstration générale du théorème énoncé par Joseph-Louis Lagrange pour le développement en série dune fonction quelconque impliquée au moyen de coefficients différentiels.

La transformée de Laplace, par contre, bien quelle soit appelée ainsi en son honneur parce quil lutilisa dans son travail sur la théorie des probabilités, fut découverte à lorigine par Leonhard Euler. La transformée de Laplace apparaît dans toutes les branches de la physique mathématique - champ détude auquel Laplace contribua de manière importante.

En mathématiques appliquées on lui doit également la Méthode de Laplace qui permet d'estimer des intégrales de la forme:

\int_a^b\! e^{M f(x)}\, dx\,

quand M est grand.

Convictions philosophiques

Article détaillé : Déterminisme.
Pierre Simon de Laplace

À la différence de beaucoup dautres mathématiciens, Laplace ne donne pas aux mathématiques un statut particulier, il y voit plutôt un instrument utile pour la recherche scientifique et pour les problèmes pratiques. Par exemple, Laplace a considéré lanalyse comme un outil pour affronter les problèmes physiques, tout en se montrant extrêmement habile pour inventer les concepts dont il a besoin pour atteindre cet objectif. Tant que ses résultats ne sont pas avérés, il ne se préoccupe pas dexpliquer les phases démonstratives ; il ne soigne pas lélégance ; pour lui, n'importe quel moyen est bon s'il permet de résoudre le problème qui le préoccupe.

Il croit fermement au déterminisme causal comme il l'écrit dans l'introduction de son ouvrage sur les probabilités:

« Nous pouvons considérer létat actuel de lunivers comme leffet de son passé et la cause de son futur. Une intelligence qui à un instant déterminé devrait connaitre toutes les forces qui mettent en mouvement la nature, et toutes les positions de tous les objets dont la nature est composée, si cette intelligence fut en outre suffisamment ample pour soumettre ces données à analyse, celle-ci renfermerait dans une unique formule les mouvements des corps plus grands de lunivers et des atomes les plus petits ; pour une telle intelligence nul serait incertain et le propre futur comme le passé serait évident à ses yeux »

— Essai philosophique sur les probabilités, Pierre-Simon Laplace

Il est souvent fait référence à cette intelligence comme au « démon de Laplace » (de manière analogue au démon de Maxwell). La description de lhypothétique intelligence décrite au sujet de Laplace comme un petit diable ne vient pas pourtant de Laplace, mais de biographies excessives : Laplace espérait que lhumanité aurait amélioré sa compréhension scientifique du monde et croyait que, si elle fut complétée, elle aurait encore eu besoin dune extraordinaire capacité de calcul pour la déterminer complètement en tout instant particulier. Cette question de la possibilité d'atteindre par le calcul des prévisions fiables dans les domaines complexes ne sera mise en doute qu'avec les travaux de Henri Poincaré, et ne touchera le grand public qu'avec la théorie du chaos. Entretemps, l'opposition à ce sujet entre Von Neumann et Wiener est restée célèbre.

Il a été récemment[Quand ?] proposé une limite sur lefficacité du calcul de lunivers, cest-à-dire sur lhabileté du petit diable de Laplace à traiter une quantité infinie dinformations. La limite fait référence à l'entropie maximale de lunivers, à la vitesse de la lumière et à la quantité minimum de temps nécessaire pour transporter linformation sur une longueur égale à la longueur de Planck ; celle-ci étant égale à 2130 bit. En conséquence, nimporte quelle chose demandant plus que cette quantité de données ne peut être calculée dans la quantité de temps qui est passée jusquà présent dans lunivers.

Même si Laplace pense à une intelligence supérieure, il ne pense seulement quà une expérience de pensée, une supposition. Il ne croit pas véritablement en lexistence dune telle intelligence, il est le symbôle de athéisme scientifique [3] ou plus ou moins agnostique comme le montre lanecdote suivante :

Laplace vint un jour faire hommage à Napoléon dun exemplaire de son ouvrage, et le récit suivant de lentrevue peint dune façon caractéristique les caractères des deux hommes. On avait dit à Napoléon que louvrage ne faisait nulle part mention du nom de Dieu et, comme Napoléon aimait à poser des questions embarrassantes, il fit, en acceptant louvrage, cette remarque : « M. Laplace, on me dit que vous avez écrit ce volumineux ouvrage sur le système de lUnivers sans faire une seule fois mention de son Créateur ». Laplace, bien que souple courtisan, avait sur tous les points qui touchaient à sa philosophie, lobstination du martyr ; il se redressa aussitôt et répondit brusquement : « Sire, je nai pas eu besoin de cette hypothèse. » Napoléon, grandement amusé, fit part de cette réponse à Lagrange, qui sécria : « Ah ! cest une belle hypothèse ; elle explique beaucoup de choses.[4] » Napoléon répéta cette réponse à Laplace, qui répondit habilement que si cette hypothèse explique tout, elle ne permet de prédire rien et n'entrait donc pas dans son domaine d'étude (cité par Richard Dawkins).

Hommages

Notes et références

  1. Biographie de lAcadémie française
  2. Dictionnaire de la Franc-Maçonnerie, PUF, 1987
  3. Science de la nature et théologie
  4. Walter William Rouse Ball, Histoire des mathématiques, Paris, Librairie Scientifique A . Hermann, 1906 p.104-105.
  5. (en) L. D. Schmadel, Dictionary of Minor Planet Names, 5th rev. ed., Springer-Verlag, Berlin, 2003 (ISBN 3-540-00238-3) 

Voir aussi

Ouvrages

Textes de vulgarisation
  • Exposition du système du monde, Bachelier, Paris, 1836. Texte en ligne Réédité dans la collection Corpus des œuvres de philosophie en langue française, Fayard, Paris, 1984. (ISBN 2213014779)
Textes techniques

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Œuvres complètes de Laplace, publiées sous les auspices de lAcadémie des sciences par MM. les secrétaires perpétuels, Gauthier-Villars, Paris, 14 volumes, 1878-1912. Comprend : I-V. Traité de mécanique céleste ; VI. Exposition du système du monde ; VII. 1-2. Théorie analytique des probabilités ; VIII-XII. Mémoires extraits des recueils de lAcadémie des sciences de Paris et de la classe des sciences mathématiques et physiques de lInstitut de France ; XIII-XIV. Mémoires divers. Tables. Texte en ligne.
  • Théorie analytique des probabilités, Tome VII des œuvres complètes, Paris, 3e édition, 1820. Texte en ligne Réédition : Jacques Gabay, 1995. (ISBN 2-87647-161-2).

Bibliographie

  • (en) E.T. Bell Men of Mathematics: The Lives and Achievements of the Great Mathematicians from Zeno to Poincaré New York, Simon and Schuster, 1986, Ch. 11
  • (it) Carl Boyer, Storia della matematica, Milano: Mondadori, 2004. (ISBN 88-04-33431-2)
  • (en) Charles Coulston Gillispie, avec la collaboration de Robert Fox et Ivor Grattan-Guinnsess, Pierre-Simon Laplace, 1749-1827: A Life in Exact Science, Princeton University Press, 1997. (ISBN 0-691-05027-9)
  • (fr) Roger Hahn, Le Système du monde - Pierre Simon Laplace, un itinéraire dans la science, Collection « Bibliothèque des histoires », Gallimard, Paris, 2004. (ISBN 2-07-072936-2)
  • (it) Mirella Fortino (a cura di) Il caso. Da Pierre-Simon Laplace a Emile Borel (1814-1914)
  • (fr) Alphonse Rebière, Mathématiques et mathématiciens, 3e Paris, Nony & Cie, 1898
  • (it) Paolo Rossi (diretta da) Storia della scienza vol. 2
De Laplace
  • (it)Saggio filosofico sulle probabilità Theoria - Editori Associati, 1987 (ISBN 88-241-0040-6)
  • (it)Storia dellastronomia Cuen, 1997 (ISBN 88-7146-368-4)

Œuvres en ligne

Articles connexes

Liens et documents externes

Sources

  • (it) Cet article est partiellement ou en totalité issu dune traduction de larticle de Wikipédia en italien intitulé « Pierre Simon Laplace ». AdQ du 18.08.2007


Précédé par Pierre-Simon Laplace Suivi par
Nicolas-Marie Quinette
Ministre français de l'Intérieur (1799)
Lucien Bonaparte


Précédé par
Michel Regnaud de Saint-Jean d'Angély
Fauteuil 8 de lAcadémie française
1816-1827
Suivi par
Pierre-Paul Royer-Collard

casse toi sale puteeeee

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