Otton Ier du Saint-Empire

Otton Ier du Saint-Empire
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Otton ou Othon Ier le Grand
Sceau impérial d'Otton Ier (968)
Sceau impérial d'Otton Ier (968)

Pays Germanie
Titre roi de la Francie Orientale (Germanie)
(936 - 973)
Couronnement 7 août 936, à Aix-la-Chapelle
Sacre 962 à Rome
Prédécesseur Henri l'Oiseleur
Successeur Otton II du Saint-Empire
Autres fonctions Roi des Romains
Biographie
Dynastie Ottoniens ou othonides
Naissance 23 novembre 912
Wallhausen
Décès 7 mai 973
Père Henri Ier de Germanie
Mère Mathilde de Ringelheim
Enfants Otton II du Saint-Empire, Ludolphe ou Ludolf, duc de Souabe...

Otton Ier, surnommé en français Othon le Grand, est né le 23 novembre 912 à Wallhausen en Saxe et mort au palais familial de Memleben en Thuringe le 7 mai 973[1]. Fils d'Henri Ier l'Oiseleur et de Mathilde de Ringelheim, il doit son prénom à son grand-père Otton Ier, duc de Saxe qui, agonisant, décède huit jours après sa venue au monde, le 30 novembre 912[2]. Le jeune Otton succède à son père Henri Ier, roi de Francie orientale ou de Germanie mort le 2 juillet 936 et s'impose en souverain politique de plus en plus incontesté malgré les premières révoltes. Il finit par accaparer petit à petit la fonction puis la dignité impériale jusqu'à sa mort en 973. Son corps est enterré dans la cathédrale de Magdebourg.

Durant un long règne, il donne à la royauté germanique rayonnement et prestige, tant par le sens de la gestion politique que par les victoires militaires. Il se proclame roi d'Italie après avoir épousé en 951 la reine Adelaïde, veuve du roi Lothaire. Il parvient à s'impliquer dans la délicate politique italienne et à restaurer la dignité impériale à son profit. Il est élu par ses troupes et couronné empereur des Romains par le pape Jean XII en 962. Par ses réformes administratives privilégiant le clergé épiscopal et la collégialité des prélats et princes au détriment des monastères, il est le véritable fondateur du Saint Empire romain germanique même si cette dénomination n'apparaît qu'au XVe siècle[3]. Cette première entité politique dénommée en allemand moderne Reich perdure jusqu'en 1806.

Sommaire

Le monde franc, le duché saxon et l'Europe occidentale avant le règne d'Otton Ier

L'Europe après le traité de Verdun

L’empire carolingien, divisé en trois bandes territoriales du septentrion au midi, dans le sens méridien, lors du fameux partage de Verdun de 843 n'en finit plus de s’effondrer après les vicissitudes des guerres civiles enclenchées dès 855 puis les troubles et innombrables conflits régionalisés. En 887, l'empereur Charles le Gros atteint de trouble mental est destitué lors de la diète de Tribur[N 1]. Le mode électif est rétabli de facto par les princes, soucieux d'accroître leurs domaines et surtout de conserver leurs autorités régionales en évitant de s'accabler eux-mêmes sous un imperium.

La Lotharingie impériale est déjà démantelée, ayant subi les ambitions de princes qui ne sont que d'anciens serviteurs ou courtisans des puissants Carolingiens ou même de guerriers opportunistes prompts à tenter l'aventure régalienne. Après avoir perdu le contrôle sur l'Italie, ce cœur de l'empire carolingien laisse la dissidence se généraliser : Rodolphe se proclame roi en Bourgogne en 888, puis Boson fait de même en Provence en 890.

S'enclenche dans le monde franc une course à la royauté[4]. Suivant le modèle lotharingien, les royautés traditionnelles carolingiennes de Francie occidentale (France) et de Francie orientale (Germanie) sont sous la menace d'être déchirées par des tensions internes et rivales. Accaparées par les luttes intestines des palais, elles voient surgir de multiples autres entités autonomes contestant leur unique prétention régalienne. Le titre impérial vacant saisi une dernière fois au terme d'une lutte politique sanguinaire par le roi de Francie orientale ou de Germanie, Arnulf de Carinthie en 896 ne change nullement l'évolution politique chaotique. Le souverain carolingien trépasse d'ailleurs rapidement, ne laissant qu'un héritier légitime Louis l'Enfant sur le trône de Germanie. Le règne de Louis IV frappé du sceau de l'impuissance est éphémère de 899 à 911. Un bâtard royal Zwentibold qui a obtenu les derniers lambeaux obéissants de la Lotharingie en 895 est tué par ses sujets en 900. La maison carolingienne cumulant pourtant une foule de privilèges ne peut se redresser, ses membres agités et divisés perdent le trône de Germanie après la mort de Louis IV en 911.

Le duché saxon conserve un puissant particularisme préservé par les besoins de défense des marches slaves et scandinaves menacées. Le duc n'est qu'un puissant chef de guerre, cette structure archaïque du monde germanique a été tolérée par l'autorité carolingienne par nécessité pratique tout en la contrôlant avec sévérité. Alors que les troubles ravagent l'Europe occidentale et que le pouvoir carolingien se désagrège, un simple comte Othon le Pacifique parvient à saisir l'ancienne fonction à compétence élective. Il mêle alors son administration comtale, legs carolingien, à la fonction ducale archaïque. Il ne reste plus qu'à son fils Henri qu'à fonder sur cette insolite assise de gestion et de commandement une dynastie royale, d'autant plus puissante qu'elle sait résorber le chaos. Patient, Henri n'a même pas besoin de glaner la couronne, elle vient à lui en reconnaissance de la force saxonne.

Un temps d'insécurité, de corruption et d'incertitudes

Des menaces extérieures pénètrent au cœur du monde franc qui a thésaurisé les richesses dans les églises et les palais. Les Normanni ou autres Vikings qui depuis plus d'un siècle à l'ouest terrorisent les côtes, s'enhardissent à remonter les rivières et à saccager les rives. Leurs armées prennent maintenant pied pour assiéger les villes ou imposer de lourds tributs. Encore plus incisifs et plus féroces, les hordes magyars, ancêtres des cavaliers Hongrois, déferlent sur l’est de l’Europe à partir de 900 et parfois installent une armée de pillage.

Le délitement et la vacance du pouvoir impérial entraînent la décadence de l'Église et des monastères qui sont sous l’emprise ou la commende des pouvoirs politiques laïcs, puis des guerriers rivaux. Dans les différentes principautés et royaumes émergents d’Occident, les rois et les princes respectant les principes carolingiens nomment les évêques et les abbés choisis parmi leur proche famille. Les clans familiaux apparentés s'empressent d'accaparer tous les postes de dignitaires et ainsi de cumuler les revenus. Un bon évêque ou abbé est un enfant ou un laïc dont la famille fortunée se revendique de la lignée noble princière ou aristocratique régalienne, mais l’esprit de solidarité familiale ou à défaut vassale est exigé en retour de l'autorité régalienne. Toute récompense, jouissance ou fœdum, attribution d'un titre ou d'un bien exige en retour ministerium, c'est-à-dire un service approprié à des règles d'équivalence honorables, calibrées. Les dignités ecclésiastiques accaparées suivent ce modèle qui commence à s'appliquer à toutes les fonctions de commandement militaire ou administratives. Il est fréquent que les évêques aient femmes et enfants malgré l’interdiction qui leur est faite de se marier après leur consécration. Ils cumulent souvent diverses charges épiscopales et ne résident pas dans leur paroisse ou diocèse, comme l'unique charge épiscopale l'imposait aux temps mérovingiens[N 2]. Aussi la vie dissolue des prêtres et la simonie c'est-à-dire le vol et le trafic des objets de cultes par les servants, se répandent en absence d'exemplarité dirigeante. Une église presbytérale ou un monastère, dépourvus de ressources après un pillage ou un accaparement des biens fiscaux, peuvent sombrer dans la misère ou souvent laisser la vie commune entrer en décadence s'ils conservent l'usufruit de dîmes et de richesses temporelles.

La papauté, dignité prestigieuse de la chrétienté d'Occident, est l'objet de féroces rivalités politiques entre les grandes familles aristocratiques romaines. Le pouvoir religieux du métropolite romain en sort émoussé alors que les invasions païennes ou musulmanes menacent. Des papes souvent médiocres et immoraux se succèdent durant une grande partie du Xe siècle. En 954, Jean XII devient pape à l'âge de 18 ans. Il ne pense qu’à faire la cour aux femmes, à festoyer et à participer aux parties de chasse.

Pourtant, si les misérables victimes survivantes des abus et des exactions, des pillages et des vols, des famines et épidémies fuient apeurée ou s'affligent devant leurs morts et en quête de leurs disparus, la population paysanne ne cesse de s'accroître à un rythme lent inexorable. Avec de nouvelles terres, elle recherche d'efficaces protections et au besoin, improvise une défense hargneuse ou pérennise une agressivité vengeresse. Et ce menu peuple, à la fois dominé s'il n'est complètement asservi en communauté entière et à l'avis ignoré ou apparemment inconsistant, oriente pleinement les enjeux locaux qui, à terme d'une lente maturation, définissent les puissantes formes politiques.

La Francie orientale

Au Xe siècle, la Francie orientale est limitée à l'Ouest par le Rhin, au Nord par la mer du Nord, le Jutland et en théorie par la mer Baltique même si elle ne contrôle plus ses côtes, à l'Est par l'Elbe, la Saale et la Bohême jusqu'à l'Inn, et se termine au Sud par le lac de Constance environnée des Alpes[5]. La population est inégalement répartie en quatre noyaux denses de population : Franconie, Souabe, Saxe, Bavière. Elle tend à se concentrer à proximité des vallées du Rhin, de la Weser et du Danube à l'Ouest et dans une moindre mesure celles de l'Elbe et de la Saale à l'Est dont les bordures orientales à reconquérir sous forme de marches militaires échappent partiellement au contrôle[6]. Rivières et fleuves sont des voies navigables importantes pour le commerce et le négoce. À partir du Xe siècle, partout, le nombre des hommes commencent à augmenter et la superficie des forêts en plaine et en montagne diminue au profit d'une expansion agricole sur les bons sols de plaine et surtout des Börde entre plaine et montagne. L'exploitation de massifs argentifères dans le massif du Harz en Saxe apparaît fondamentale pour la stabilité monétaire saxonne[7]. Le développement des techniques métallurgiques ultérieures explique aussi l'hégémonie saxonne
À côté des grands axes à la fois fluviaux et terrestres menant vers les cols de Rhétie, la Francie orientale est parcourue par des routes commerciales reliant l'Occident et l'Est. La plus ancienne et prestigieuse est la Helweg longeant en ses nombreux diverticules les premiers reliefs des massifs hercyniens surplombant la plaine germano-polonaise et qui au-delà du Rhin gagne Aix-la-Chapelle, voire Liège, Saint-Quentin ou Paris. Vouées principalement au commerce des esclaves et des grains, des métaux et des fourrures, les autres routes rejoignent l'axe Nord-Sud formé par la succession de la vallée du Rhin ou de la Meuse à l'occident ou par l'Elbe à l'orient, elles coupent la vallée de la Weser, les multiples affluents méridionaux du Danube ou renforcent l'axe fluvial du Danube ou du Main. De riches villes prospèrent au bord de ces fleuves, comme Mayence, Augsbourg ou Ratisbonne[8].

Au Xe siècle, la Francie orientale, nommée encore Germanie si on inclut les marches orientales, est divisée en quatre grandes entités : la Bavière, la Saxe, la Souabe et la Franconie, qui s'affirment en duchés ethniques. Les familles nobles à leur tête, principalement descendantes des aristocraties carolingiennes ou des anciens leudes mérovingiens possèdent d'immenses domaines. Pour assurer leur hégémonie, elles ont pendant le second IXe siècle dévasté ou laissé dévaster les domaines et contrées hostiles à leur autorité. Ainsi, si elles contrôlent souvent un centre de pouvoir riche et dense, elles ne sont pas obéies aux frontières périodiquement saccagées de leurs territoires, surtout s'ils sont des massifs aux nombreuses vallées, lieux de refuges. Conscients de l'escalade de ce jeu de destruction entre rivaux, les familles princières de Souabe et de Franconie craignent vite les maîtres militaires des marches en partie slavisés, que sont les ducs de Bavière et de Saxe. S'ils sont parvenus au pouvoir, ils ne peuvent être sortis vainqueur que d'un jeu guerrier d'élimination. Le maintien de la royauté de Germanie qui échoit à une maison de Franconie est une stratégie pour garder un contrôle religieux et administratif sur les actions militaires au frontière.

  • Centrée sur la vallée du Main, englobant l'essentiel des collines et montagnes de Hesse, s'étendant du nord du Neckar jusqu'au contrefort de Thuringe et du Jura franconien, la Franconie est âprement disputée par les deux familles franques Bamberg et Conrardin en lutte constante.
  • La Bavière habité par des populations mixtes, à la fois germanique et slave, s'étend des contreforts alpins à la Thuringe, limitée à l'ouest par le Lech et à l'est par les Monts de Bohême et la rivière Enns. La famille carolingienne de Louis le Germanique a réussi à conserver le bénéfice du duché. Son petit-fils Arnoul l'a légué au duc Léopold qui lance des marches entre Bohême et Carinthie et rêve de prendre pied en Italie pour ceindre la couronne impériale.
  • La Souabe rassemble une fraction du duché d'Alemanie entre Franconie et Rhétie, entre vallée rhénane à l'est et du Lech à l'est. Elle est dirigée par une dynastie souabe du lac de Constance. Elle englobe l'Alsace de Bâle à Spire depuis 912 et ne cesse d'affirmer sa souveraineté sur les cols du haut bassin de l'Adige.
  • La Saxe s'étend au nord de la Franconie et de la Bavière. La vallée de la Weser est le cœur du monde saxon résistant encore à l'avancée slave avant sa conquête brutale par Charlemagne. Les familles dirigeantes saxonnes, issus de chefs saxons tués, ou capturés et épargnés, se sont convertis au christianisme sous l'égide de Charlemagne. Elles sont rappelées progressivement au pouvoir sous égide carolingienne car le peuple saxon converti de force, désorienté et récalcitrant, lance de graves révoltes alors que les marches franques en face des Slavonies cèdent. Elles reçoivent une mission de pacification chrétienne et de défense de la marche militaire et s'acquittent en quelques décennies de leur tâche en repoussant lentement et sûrement au delà de l'Elbe et de la Saale les Slaves païens. Se faisant, elles ne font que reprendre et christianiser leurs anciennes terres slavisés en deux siècles. Au nord, la frontière avec le Jutland danois est fixée à l'embouchure de l'Eider et Kiel est le seul poste saxon de surveillance sur la Baltique.

La famille des Luidolfinger qui dirige la Saxe descend du premier duc Ludolphe en 866. Il a transmis la charge à son fils Odon ou Otton qui s'empresse de dévier les assauts vers les Slaves de l'Est pour un temps tranquilles partenaires commerciaux pour prendre le contrôle de la Thuringe.

À la mort du dernier roi franconien de Francie orientale, cette famille est une des plus puissantes du pays, parce que pour des nécessités de défense face à des mondes slaves et danois, périodiquement agressifs, une solidarité cantonale de défense à toute épreuve a bénéficié au groupe dirigeant de Saxe. Le chef de guerre consulte et délègue, écoute et décide. De plus, le duc de Saxe a rassemblé et placé sur le front une foule de réfugiés de Germanie, mercenaires casés sur les terres saxonnes reconquises qui gardent des liens même distendus avec leurs pays d'origine. Défenseur incontesté du monde franc, il s'impose partout en arbitre. C'est pourquoi Conrad l'a désigné pour la sécurité des siens alors qu'il déteste les Saxons et surtout Henri l'insouciant oiseleur qui, humilié, ne répond plus à ses convocations.

La naissance et l'affirmation d'une dynastie impériale de Saxe

Sceau d'Henri l'Oiseleur, père d'Otton Ier

Henri l'Oiseleur, duc de Saxe est nommé roi de Francia orientalis en 919. Simplement désigné par son prédécesseur pourtant ennemi, il refuse longtemps le sacre pour ne pas donner l'impression que la royauté fait de lui un être à part[9]. Il a rencontré par hasard en 912 Mathilde une belle moniale, elle est fille du comte de Westphalie Theodoric de Rheingelheim. Il la sort du couvent et l'épouse. Elle lui donne cinq enfants : Otton né en 912, Gerberge née en 913, Henri né en 916, Edwige ou Hatwige née en 920, Brunon né en 928[N 3].

Ses premiers actes sont en faveur de l'extension de la Francia orientalis au dépens de la Lotharingie, en particulier il s'agit d'englober l'Alsace dans le duché de Souabe et d'autoriser le reconquête des contrées du Rhin inférieure. La partie nord de la Lotharingie qui va de la Frise jusqu'aux bouches de l'Escaut est annexée par le royaume de Germanie et soumise à la protection saxonne pour éviter les ravages des pirates. C'est l'origine du comté de Frise ou de Hollande[N 4]. Aix-la-Chapelle, l'ancienne capitale impériale en Lotharingie est déjà l'objet de convoitises[10].

Mais Henri inaugure une dynastie atypique qui refuse de lier service régalien et récompense régalienne, ministerium et feodum. Le service se fait pour Dieu et les Hommes dans l'intérêt de tous. La récompense n'a pas à être ajustée - le pourrait-elle lorsque l'arbitraire inclut la perte de la vie - comme dans une banale tractation commerciale. Même le chef de guerre et sa famille sont des enfants gambadant sur leurs genoux et leurs mains devant le Dieu Christ Sauveur.

Henri l'Oiseleur acquiert un prestige royal grâce aux victoires remportées sur les Slaves, les Danois et les Magyars[11]. Mais il ne peut enrayer les infiltrations et dévastations et entame, pour ne pas perdre la digne figure du protecteur, une série de négociations, acceptant de payer tributs aux groupes les plus menaçants pour qu'ils épargnent la Francie orientale. Il lui faut trouver des ressources, et le Saxon Henri convoite la Lotharingie morcellée, à la fois riche et en décomposition politique.

En 925, Henri Ier soumet et intègre après une sanglante bataille la Lotharingie. Désormais la vallée de la Meuse puis de l'Escaut fixe la frontière entre France et Germanie, Verdun et Bar-le-Duc font partie du royaume de Germanie. Le duc Gisilbert à la fois sous tutelle et à son service paie tribut et reçoit mission d'éradiquer le morcellement lotharingien. Henri assure son pouvoir régalien en nommant les évêques et les abbés de Lotharingie, de Souabe et de Saxe. Au cours des règnes ottonides, une partie de la Basse-Lotharingie s'intègre progressivement à la Francie orientale. Avec des renforts guerriers lotharingiens, Henri Ier prend Meissen une forteresse en pays slave. La marche dépasse l'Elbe et la Saale, entamant une longue progression vers l'Oder. Le roi de Germanie reçoit l'hommage de Wenceslas, duc de Bohême. Avec cette alliance de sécurité, il songe à faire plier le duché de Bavière qui s'émancipe avec arrogance. Mais il arrête la guerre fratricide en leur concédant le droit de nomination ecclésiastique, ne sont-ils pas des rejetons de l'Empire franc qui reviennent à la négociation et à un modus vivendi?

Avant sa mort, il obtient la promesse des princes germaniques que son fils Otton ou Othon soit choisi en successeur légitime[3]. Après sa mort survenue le 2 juillet 936, la diète d'Erfurt entérine ce choix et désigne Otton comme successeur. La dynastie saxonne repose dès lors sur le double principe héréditaire et électif.

Un début de règne chahuté initiant un labeur décennal pour imposer une organisation régalienne

Otton Ier, âgé de vingt-quatre ans, est couronné le 7 août 936 à Aix-la-Chapelle. La cérémonie montre ainsi qu'il veut renouer avec la tradition carolingienne. Les représentants de toutes les communautés de la Francie orientale sont convoqués mais ce sont les représentants des duchés de la Saxe et de la Franconie qui ont le privilège de lui rendre hommage en premier le 7 août dans l'atrium de la chapelle palatine. Il est ensuite acclamé par le peuple et sacré dans la chapelle par l'archevêque de Mayence Hildebert. Il reçoit ensuite les insignes de son pouvoir : épée, manteau, bracelet, sceptre et bâton de commandement. Au cours du banquet qui suit, les grands honorent le souverain en serviteurs chargés des offices domestiques[12]. Otton entend affirmer sa souveraineté par tous les signes visibles. Il bannit Eberhard, le duc de Bavière après l'avoir battu car celui-ci avait refusé de lui rendre hommage[9].

En 937, les premières décisions du roi Othon suscitent des réactions hostiles de la même façon que son sacre fait naître jalousies et envies. Dans la plus pure tradition carolingienne, il doit faire face à une rébellion familiale menée par son frère Henri Ier de Bavière soutenu par le duc Gislebert de Lotharingie, le duc de Franconie Éberhard, une partie de la noblesse saxonne. Les conjurés qui d'abord ne lui obéissent plus ont l'alliance intéressée du roi carolingien de Francie occidentale, Louis IV d'Outremer qui entend récupérer l'ancienne capitale impériale des ses aïeuls, Aquae ou Aix. Tous les ressorts du pouvoir régalien s'effondrent. Le duché saxon infiltré d'éléments hostiles reste encore obéissant. Toutefois la Souabe méprisée par les conjurés écoute le souverain.

Par des missions diplomatiques, le roi jauge ses soutiens. Il comprend alors qu'un des foyers de l'intrigue se place en Francie occidentale carolingienne. Or les Robertiens en charge du duché de France, s'y affirment parmi une pléiade d'acteurs hostiles aux Carolingiens. Les Robertiens n'ont pas encore réussi à prendre le commandement de ces forces hostiles. Mais le duché de France assure la défense militaire des côtes et des rivages maritimes au profit du royaume, il garde la marche de Bretagne et surveille les Normands installés par les rois de France. Ils apparaissent en frères des Saxons qui s'opposent et combattent périodiquement Slaves et Danois en Germanie. Othon marie sa jeune sœur Hedwige à Hughes le Grand, prestigieux guerrier du royaume dont il attend qu'il neutralise toute action guerrière du roi à son égard. Promet-il à terme à la descendance d'Hughes le royaume ?

Grâce à l'appui du duc Hermann Ier de Souabe, le grand conseil d'Otton prend l'initiative et parvient à défaire les révoltés lors de la terrible bataille d'Andernach en octobre 939 où les ducs de Lotharingie et de Franconie sont tués. Devant le carnage fratricide qui concerne la plupart des familles dominantes, Othon victorieux est ému. Pris de colère, il ne songe d'abord qu'à faire massacrer les responsables capturés et les fuyards. S'il ne peut que pardonner à la majorité des survivants de sa famille, il reporte son courroux sur les autres et pendant des décennies exerce son inflexible vengeance.

Othon pardonne à son frère Henri et rejette la responsabilité sur son entourage et quelques apparentés ambitieux. Il lui confie des responsabilités et le place même à la tête de la Lotharingie. Mais Henri, jaloux et solidaire des anciens conjurés, continue à ruser et à comploter. Il ne se soumet vraiment qu'en 941[9].

Le roi de France comprend la terrible menace et se sauve par son mariage rapide avec Gerberge, sœur d'Othon et veuve du duc de Lorraine, femme puissante dont il accepte la reprise de la charge de la Lotharingie par son beau-frère Henri. Entrant dans la famille, le roi diplomate s'incline ainsi devant Othon et devient l'égal de son rival Hughes.

Mais Othon n'est nullement satisfait des promesses de Louis IV d'Outremer. Il intervient en France pour assurer la sécurité lotharingienne victime de brigandage et ne s'arrête qu'à Attigny, où la négociation rétablit paix et bonne entente. Otton joue facilement de la rivalité entre ses parents par alliance, les derniers Carolingiens et les Robertiens, les ancêtres des Capétiens pour assurer son emprise sur la Francie occidentale et par contrecoup sur la Lotharingie enclavée. Il s'efforce de maintenir un équilibre entre les deux maisons afin qu'aucune ne soit assez forte pour revendiquer la Lotharingie[13]. Mais le peuvent-elles alors qu'elle sont impuissantes à empêcher les guerres locales ?

La Lotharingie indispensable au prestige royal à cause d'Aix-la-Chapelle n'est pas le mythique point faible du royaume ottonien. Il faut par contre comme en Germanie réformer l'église et fixer efficacement les divisions territoriales mouvantes pour assurer un pouvoir régalien stable. L'archevêque Brunon, le plus jeune frère d'Otton, est promu pour surveiller cette évolution largement amorcée : homme fort de la Lotharingie en 954, il est successivement archevêque de Cologne et duc de Lotharingie, cumulant jusqu'à sa mort les deux responsabilités[14]. En 959, il divise en deux son immense principauté ecclésiastique. Ainsi apparaissent :

  • la Basse-Lorraine qui regroupe les pagi ou pays du Nord-Ouest entre Rhin, Escaut, Meuse et Moselle, incluant la plus grande part du massif des Ardennes.
  • la Haute-Lorraine, pagi méridionaux qui remontent les vallées jusqu'à leurs sources, en particulier celles de la Meuse, de la Saône, de la Moselle et de ses affluents. Ces pays des diocèses de Toul, Metz et Verdun deviennent la Lorraine du XIe siècle.

Pour assurer son besoin de vengeance sur les grandes familles et son pouvoir sur les duchés, Otton aide et suscite un lent réveil de l'affirmation chrétienne sous l'égide des épiscopats. Pour accroître la protection et le relèvement des contrées périodiquement saccagées par les incursions normandes ou hongroises, il incite et tolère une structure cantonale de défense, calquée sur le mode saxon. Les marges des duchés qui perpétuent cet archaïsme saxon bénéficient de la considération du souverain. Toujours émiettées, les hommes autrefois dénigrés des contrées montagneuses ont un crucial besoin de protection et entament une sujétion fidèle à l'autorité régalienne, qui exige paradoxalement beaucoup d'eux-mêmes pour le plus grand profit collectif. L'Église chrétienne de ses zones marginales, souvent dominées par d'anciennes structures abbatiales, est contrainte d'accepter le retour de visites pastorales, puis la légitime surveillance de l'évêque affirmant les droits régaliens. Une inversion des lieux de pouvoir commence à poindre : le cœur des duchés autonomes et souvent récalcitrants aux décisions royales semble désormais sous la menace de marges obéissant aux religieux chrétiens fidèles au pouvoir régalien.

Dans le même but, le roi multiplie les surveillances et les alliances matrimoniales. Son fils aîné épouse ainsi l'héritière du duché de Souabe dont il devient duc après la mort de son beau-père. En mars 953, une révolte éclate au cœur du royaume. Elle est menée par son fils ainé Liudolf, duc de Souabe et son gendre Conrad le Roux, ancien duc de Lotharingie. Si le premier craint d'être évincé de la succession au profit du fils qu'Otton attend de sa seconde épouse Adélaïde, le second trouve qu'il ne participe pas assez aux décisions du royaume alors que les hommes de Souabe lui ont sauvé la mise en début de règne. Beaucoup d'hommes du passé carolingien, évêques et nobles autrefois favorisés et victimes des réformes politiques et administratives se joignent à la rébellion. Mais le roi peut compter sur la Saxe et la Lotharingie de Brunon, sur les marges émergentes des duchés de plus en plus populeuses. La Francie occidentale affaiblie ne peut intervenir et l'église chrétienne en renouveau ne tergiverse pas son soutien. Aussi les rebelles se sentant précaires commettent l'erreur de s'allier aux Slaves et aux Hongrois païens, ce qui leur vaut de perdre une grande partie de leurs soutiens les plus efficaces.

La renaissance d'un empire dans le monde occidental

L'intelligente utilisation des évêchés pour fonder une administration régalienne fait s'effacer lentement le monde carolingien. Les grands monastères trop souvent en décadence rapide qui monopolisaient cette fonction cruciale d'intermédiaire pratique de l'administration régalienne perdent lentement leurs puissances, devenant de simples gestionnaires avisés de leurs temporels dans le meilleur des cas s'ils ne marquent pas suffisamment leur allégeance. Les évêques et leurs chapitres s'enhardissent sous la protection royale : ils reprennent contrôle des campagnes et revalorisent leurs cités, lançant un fantastique essor urbain et laissant s'inventer un art ottonien. Partout, des villes conquérantes commencent à renaître ou à s'accroître même à proximité des marches militaires malgré les dangers de pillage et de destruction.

L'expansion germanique à l'époque d'Otton Ier

Otton le Grand recevant la soumission de Bérenger d'Ivrée

Avant même d'avoir fini de pacifier les marges belliqueuses nordiques ou slaves, de consolider ses positions en Lotharingie et en Germanie, Otton comprend la nécessité de reprendre une judicieuse stratégie de légitimation royale initiée par Pépin le Bref. Le souverain doit être le premier soutien de la dignité papale et bénéficier en retour de la délégation divine du chef de l'église romaine sur les autres évêques et responsables chrétiens. Othon délaisse ses anciennes vengeances et tourne son attention vers l'Italie, surpris des déboires de la couronne franque.

En Italie, la situation est très confuse. L'anarchie règne et attise les appétits des puissants voisins. Elle accroît la menace d'une conquête par les Infidèles. En 950, Bérenger d'Ivrée et la marche slavisée du Frioul dominent l'Italie à la mort de Lothaire d'Arles. Les maîtres de la politique italienne emprisonnent la veuve de Lothaire, Adélaïde de Bourgogne pour empêcher remariage et apparition au monde d'un héritier légal au royaume d'Italie.

En septembre 951, Otton, décidé à une conquête guerrière si besoin, descend en Italie avec une armée complétée par les prélats lombards[15] qui ne rechignent pas lui apporter du soutien. À Pavie, imitant symboliquement son ancien héros Charlemagne, il prend le titre militaire de roi des Francs et des Lombards d'Italie. Quelques semaines plus tard, il obtient la libération d'Adélaïde et, fasciné par sa beauté, l'épouse en secondes noces. Le couple se fait sacrer roi et reine d'Italie. Le pape ayant refusé de les recevoir, Otton qui craint pour sa sécurité, quitte l'Italie en abandonnant son titre militaire de roi des Francs et des Lombards, mais laisse son gendre Conrad le Roux sur place[16]. Bérenger peut reprendre l'initiative et accapare le titre contre un engagement de vassalité. Bérenger, demeuré seul, oublie son serment et s'attaque au pape Jean XII qui appelle Otton à la rescousse[17].

Depuis le début du Xe siècle les Hongrois ou Magyars causent des ravages importants. Mais au milieu du siècle, ces ravages commencent à décroître car la résistance des cantons militaires organisée à la façon saxonne ou nordique s'accroît. De plus, les autorités religieuses, évêques ou abbés, n'hésitent à prendre la tête de fortes troupes mobilisées en renfort. Dans la chaleur d'août 955, une bande magyare dirigés par trois capitaines Lehel, Bultzu et Boton surgit des contreforts alpins et menace Augsbourg. L'évêque d'Augsbourg prend la tête d'une armée de paysan-guerrier souabe après une défense archarnée de la ville et les repoussent avec violence. Les troupes ducales qui accourent les encerclent. Les autorités souabes appellent alors les duchés voisins qui volent à leur secours. Otton Ier dernier venu avec ses Saxons, prend le commandement des opérations et défait le 10 août les Hongrois à la bataille du Lechfeld près d'Augsbourg. Les pillards envahisseurs encerclés sont impitoyablement massacrés un par un, la légende hongroise ne rapportant que sept rescapés dans une fuite éperdue.

Les troupes germaniques unies, fortes de leur maîtrise technique et guerrière à pied et à cheval et animant des concentrations massives d'impitoyables guerriers- paysans prennent désormais l'initiative. Elles massacrent à la Rechnitz le 16 octobre 955 une coalition de Slaves de l'Elbe, sous l'hégémonie des Slaves Obodrites en Mecklembourg[18]. Othon invite les chefs slaves à ne pas entrer pour autre motif que de négociation ou de protection marchande dans les marches et les chefs hongrois à se fixer dans les plaines de Pannonie, s'ils veulent bénéficier de la clémence royale. Au cours des décennies suivantes, les Hongrois renoncent aux pillages, se sédentarisent dans la plaine de Pannonie et se christianisent.

Ces victoires spectaculaires permettent à la royauté saxonne de jouer un rôle majeur sur le plan européen alors que les invasions s'éternisent depuis cinq longue décennies. Soldats et dignitaires religieux se doivent d'acclamer Otton comme le sauveur de la Chrétienté, un vainqueur digne d'être empereur[19]. Face aux Slaves, il conduit une véritable politique d'expansion vers l'est. À la suite des victoires face aux Slaves et Hongrois, l'Oder est atteint.

Les marches à l'est de l'Elbe sont solidement rétablies tout en assimilant les chefs slaves christianisés :

  • la vieille marche saxonne autour de l'évêché d'Oldenbourg, autrefois nommée marche suève car elle mène à la mer des Suèves ou baltique. Othon cède le duché de Saxe à son fidèle Henri Billung en 960. Sous le nom du duc Hermann, le vieux margrave Billung s'impose et installe son fils Bernard définitivement dans le duché et sa marche. Leurs héritiers dominent jusqu'en 1106. La famille laisse son nom à la marche des Billung.
  • le Nordmark, ancien nom de la Marche de Brandebourg
  • trois petites marches chez les Sorbes[3].

Otton Ier rétablit les autres marches de l'Est, ou Ostmark, la future Autriche au sud de la Germanie, dont les Babenberg vont devenir les marquis jusqu'au XIIIe siècle[20]. Il reconstitue aussi la marche de Carinthie, et apparaît ainsi comme le défenseur de la Chrétienté[21].

Othon obtient une première allégeance théorique des rois de Bourgogne. La Francie occidentale quoiqu'en proie à de violentes divisions manifeste aussi la reconnaissance diplomatique envers ce grand défenseur de la Chrétienté.

La restauration impériale

Otton Ier et le pape Jean XII, miniature de 1450

Reconnaissant d'avoir été protégé des projets expansionnistes de Bérenger II, le pape fait d'Otton le successeur de l'empereur Charlemagne, qui avait protégé la papauté contre les Lombards. À ce moment, il ne s'agit pas de la fondation d'un nouvel empire mais de la restauration idéale de l'empire carolingien, rêvée au niveau d'une hégémonie territoriale[3].

Le 2 février 962, à Rome, Otton est couronné empereur des Romains par le pape Jean XII. La couronne, de forme octogonale symbolisant les deux cités saintes de Rome et de Jérusalem, est le symbole le plus significatif de cette monarchie sacrale. Le couronnement impérial confère à Otton le surcroît d'autorité qu'il attend. Il se trouve à mi-chemin de la cléricature et du laïcat. Les grands du royaume ne peuvent plus le considérer comme un primus inter pares car il se situe dans la sphère du sacré[22].

Le 13 février 962, il promulgue le Privilegium Ottonianum qui accorde au souverain pontife les mêmes privilèges que ceux que les Carolingiens avaient reconnus à la papauté, à savoir les donations faites par Pépin le Bref et Charlemagne. Mais le Privilegium Ottonianum, reprenant un diplôme de Lothaire Ier, oblige tout nouveau pape à prêter serment auprès de l'empereur ou de son envoyé avant de recevoir la consécration pontificale. Tout en donnant des privilèges au Saint-Siège, le Privilegium Ottonianum place la papauté sous tutelle impériale. Otton se souvient de ses premiers échecs politiques et religieux lors de sa première intervention en Italie.

La mainmise d'Otton gêne cependant Jean XII qui noue des contacts avec Aubert, fils de Bérenger II, ainsi qu'avec Byzance. Il va même jusqu'à reprendre la tradition, abandonnée depuis Adrien Ier (772–795), de dater ses actes à partir des années de règne des empereurs byzantins. Otton revient à Rome et Jean doit s'enfuir. L'empereur convoque un synode qui juge le pape coupable d'apostasie, d'homicide, de parjure et d'inceste. Il le fait déposer le 4 décembre 963. Jean XII est remplacé par un laïc, qui prend le nom de Léon VIII. Otton Ier exige ensuite des Romains un serment. Ils jurent « qu'ils n'éliraient ni n'ordonneraient aucun pape en dehors du consentement du seigneur Otton ou de son fils[23]. »

L’empereur contrôle alors totalement l'élection du pape, et pouvoir compter sur la collaboration du pontife garantit l'autorité impériale sur les Églises locales du Saint-Empire. Comme Charlemagne, Otton reçoit de Rome la mission de défendre l'ordre et la paix de la chrétienté. Cependant, l'empereur est conscient que son emprise réelle sur les Romains est faible : elle n'est réelle que quand il séjourne à Rome avec son armée. Il accepte donc à la mort de Léon VIII en 965 qu'un représentant de la noblesse romaine soit élu sous le nom de Jean XIII[24]. Cependant en 966, Otton Ier doit faire un exemple du préfet Pierre qui s’est rebellé contre le pape Jean XIII : il est pendu par les cheveux à la statue de bronze de Constantin. Cette attitude est payante : Jean XIII est ensuite respecté[25].

En 968, il fonde l'archevêché de Magdebourg avec des évêques suffrageants à Meissen, Mersebourg, et Zeitz dans le but de convertir les peuples slaves de l'Elbe. Mieszko Ier, premier souverain historique de la Pologne, lui rend hommage en 966[26]. En Germanie, il rend la Bohême tributaire et vainc une ultime révolte des ducs de Franconie et de Lotharingie qui veulent défendre leurs prérogatives en face des évêchés conquérants.

Soucieux d'établir des relations avec les grandes puissances de son temps, Otton Ier envoie un ambassadeur à Cordoue dans l'Espagne arabo-musulmane. Celui-ci en revient avec Recemund (Rabi ibn Sid al-Usquf ou Rabi ibn Zaid), représentant du calife Abd al-Rahman III, et évêque mozarabe d'Elvira. Sept ou huit ambassades se succèdent jusqu'en 976.

Otton ne prend que rarement le titre d' Imperator Romanorum et Francorum que lui confère son couronnement impérial à Rome. Il préfère celui d' Imperator Augustus. Cependant il rencontre l'hostilité de l'empereur byzantin Nicéphore Phocas, qui défend le principe d'un seul Empire romain avec Constantinople comme capitale. Pour lui les autres princes ne sont que des simples rois[27]. En 968, Otton Ier envoie Liutprand de Crémone en ambassade à Constantinople dans le but de demander à l'empereur Nicéphore II Phocas la main d'une princesse royale pour son fils[28]. Par ce mariage, Otton Ier espère obtenir la reconnaissance par l'empereur byzantin du titre d'« Empereur et Auguste » que le pape lui a conféré. Mais à la cour byzantine, Otton est simplement appelé « Rex » et sa demande est refusée sans examen. L'empire ottonien, trop septentrional, ne peut incarner un renouveau romain. Tant que Nicéphore Phocas règne, le situation reste tendue.

Le jeune fils d'Otton, conscient d'avoir été méprisé, lâche ses troupes sur la Lucanie grecque qui est pillée et dévastée. Aussi le successeur de Nicéphore Phocas, Jean Ier Tzimiskès en difficulté sur l'ensemble des frontières accepte un compromis pour l'Italie. L'empereur byzantin garde la Calabre et les Pouilles et accepte que les principautés lombardes deviennent vassales d'Otton. Son fils Otton II épouse en 972 une parente de l'empereur, Théophano[29].

La fin du règne d'Otton Ier

À l'automne 972, après six années continûment en Italie, son autorité en Germanie est légèrement amoindrie : quelques conflits locaux renaissent. Tous les empereurs du Saint Empire connaissent ce problème durant leur longue absence : comment maintenir leur autorité des deux côtés des Alpes auprès des dignitaires en rivalité constante pour accaparer pouvoir et place ? Pour restaurer son autorité surtout auprès des peuples qui ne comprennent pas son absence, Otton malade revient participer à des cérémonies publiques. Les dignitaires pressentent sa fin. L'empereur réunit tous les évêques dans un synode à Ingelheim et répartit les diocèses vacants, objets de convoitise. Il réunit pour la fête de Pâques tous les grands laïcs du royaume dans une diète à Quedlinburg, abbaye où sont enterrés ses parents. Il meurt quelques semaines plus tard dans son palais de Memleben. Son corps est placé dans un mausolée à l'ensemble cathédral archiépiscopale de Magdebourg[27].

L'organisation de l'empire

Les réformes d'administrations ottoniennes initiées depuis 919 sont capitales pour comprendre la fondation de ce qui s'appelle bien plus tard le Saint Empire Romain Germanique. L'imperium rêvé, un instant en voie de réalisation pendant la courte dynastie ottonienne de 962 à 1024, n'a pourtant laissé qu'un ancrage durable, la royauté élective où s'affirment progressivement le poids des princes et une collégialité religieuse qui se perpétue après la réforme grégorienne, imposant une séparation du spirituel et de temporel.

Plus qu'un empereur par le titre, Otton est le prototype d'un grand roi d'Occident après l'an mil, sans capitale et en déplacement continuel. Le pouvoir royal se nourrit des contacts et des échanges, sa cour et ses commensaux vivent suivant les saisons et les aléas politiques sur les différents domaines royaux ou usent du droit de gîte auprès de nombreux hostes clients ou honorés. Dans le monde franc, trois niveaux de pouvoir de plus en plus attachés à un territoire précis paraissent obéir aux mêmes archétypes de direction : ils sont représentés par les comtes, les ducs et les rois. Le roi cherche à affaiblir le pouvoir ducale et à rabaisser le duc titulaire au rang de vassal. Pour assurer sa mainmise sur les ducs et les comtes, le roi accroît sa surveillance : outre le comte palatin, premier surveillant des agissements militaires des ducs et de la fiscalité des administrations comtales, le roi demande aux évêques et surtout à leurs administrations épiscopales de prêter leurs concours, récompensées par un enrichissement assuré par les péages, les droits de monnayage et de marché décentralisés. Un contrôle ultime est assuré par la chapelle royale, qui regroupe les religieux conseillers du roi pour sa diplomatie religieuse et ses choix d'hommes, notamment le recrutement des évêques.

Un pouvoir limité

L’empire en l'an mil.     Royaume de Germanie      Royaume d'Italie      États pontificaux      Royaume de Bourgogne (allié indépendant, puis incorporé en 1034, deux ans après le legs du feu roi Rodolphe II) Les marches sont figurées en hachuré

L'autorité d'Otton Ier s'étend sur d'immenses territoires qui vont de la Meuse, voire de l'Escaut à l'Elbe et de la mer du Nord à la Méditerranée. Cependant, des forces intérieures y sont très actives. La Germanie est divisée en duchés qui revendiquent une base ethnique, croyance et vœu politique en grande partie virtuelle : Saxe, Franconie, Souabe et Bavière[30].

L'empire ottonien, qu'il soit appelé regnum theutonicorum en latin ou Reich der Deutschen, intègre des populations germaniques, romanes et slaves. Otton Ier n'est-il pas dénommé suivant les textes rex Saxonum, rex Francorum ou rex Romanorum ? Le roi Otton rappelle ainsi les premières fonctions du parcours familial, son grand-père Otton le pacifique, comte de Thuringe, et son père Henri duc de Saxe : il dispose à la base d'une administration au niveau de l'excellence comtale, d'une armée correspondant à la puissance militaire saxonne, celle du plus fort duché du royaume. Mais il ne peut plus compter sur l'administration de surveillance carolingienne ; les missi dominici surveillants avisés des comtes ont disparu. Pour asseoir son autorité sur les grands, la royauté s'oppose à l'hérédité des fonctions et dignités et parvient à imposer à grand peine un pouvoir de nomination. Parce qu'il est d'abord un redoutable chef de guerre, le roi saxon peut déposer un duc désobéissant sur le territoire du duché concerné, mais l'exercice reste délicat. Il peut par défaut modifier les contours d'un duché. Mais cela n'est pas suffisant pour contrôler vraiment les ducs. Otton Ier crée donc l'institution des ducs palatins dont le rôle est de contrôler les ducs et d'administrer les biens royaux. Mais cette institution ne fonctionne vraiment que dans les régions rhénanes[31].

Les ressources financières royales sont réduites aux revenus du domaine propre du souverain. Les biens d'Otton Ier sont cependant très importants. Ils sont constitués des restes des biens ayant appartenu aux Caroligiens et des biens propres des Ottoniens. Au centre de chaque domaine royal, se trouve une villa. C'est là que vit le provisor, c'est-à-dire le gestionnaire des biens royaux. Il est assisté de ministériaux d'origine modeste qui servent fidèlement les Ottoniens[32]. Mais les biens royaux sont insuffisants pour satisfaire les besoins du souverain. Au cours de ses déplacements, il profite de son droit de gîte pour être reçu par les grands et les prélats. Cette hospitalité coûte très cher aux hôtes[33].

Le caractère électif de la fonction est une source d'affaiblissement du pouvoir impérial. Certes, Otton Ier comme son père demande aux grands d'élire son successeur de son vivant, ce qui lui permet de contrôler cette élection, mais le principe porte en lui un germe d'affaiblissement du pouvoir. Otton II est élu à l'âge de 6 ans puis il est couronné en 961 à Aix-la-Chapelle par la volonté de son père vivant. Sous Otton Ier, ni les règles de procédure, ni la composition du corps électoral ne sont fixées[34]. Toutes les minorités ethniques allemandes à pouvoir politique doivent être représentées. Pour renforcer son pouvoir Otton Ier choisit d'être sacré, ce qui lui confère un certaine « sainteté ». Il est ainsi habité par l'esprit de Dieu, se distinguant par là-même du reste de l'humanité[35]. Le caractère sacral donne à l'empereur les moyens d'obtenir de ses sujets une obéissance absolue[36] (du moins en théorie).

Un gouvernement décentralisé mais efficace dans les grandes lignes

Statue de 1240, le cavalier de Magdebourg. Cette statue équestre est une représentation peut-être fidèle d'Otton Ier

Otton Ier est un souverain itinérant. Il va là où les affaires et les guerres l'entraînent. Il séjourne juste un peu plus longtemps en Thuringe et en Saxe, en particulier à Magdebourg, la ville reconstruite par son père qu'il affectionne et où il choisit de se faire enterrer[37]. Le souverain est entouré dans ses déplacements par des services royaux très réduits. À la cour, les principaux officiers sont le sénéchal, le bouteiller, le maréchal et le chambrier. Ces offices sont remplis par les grands secondés par du personnel d'origine servile. Les diètes sont convoquées dans les villes qui peuvent accueillir de nombreux seigneurs : Grone près de Göttingen, Goslar, Ratisbonne, Mayence[38]. Les décisions de la diète sont enregistrées par la chancellerie. Celle-ci comprend, à l'époque d'Otton Ier, deux sections : l'allemande et l'italienne créé en 962. Le titre d'archichancelier est dévolu à celui qui dirige la première chancellerie, l'archevêque de Mayence. L'archevêque de Cologne dirige la seconde chancellerie. Ces fonctions sont honorifiques. La réalité du travail est effectuée par des notaires, des secrétaires et des scribes en général allemands même pour les affaires italiennes. Ils sont formés dans des écoles spécialisées comme celle de Kaiserswerth. La chancellerie ne possède pas d'archives car la plupart de ses écrits sont des privilèges envoyés à des individus ou à des communautés. On ne trouve pas pour la période ottonienne l'équivalent des capitulaires carolingiens[39]. La justice reste une prérogative royale mais Otton n'a pas de cour suprême pour l'aider dans cette tâche. Elle est rendue par oral.

L'empereur germanique est un chef de guerre. Il dispose du droit de ban (droit de commandement) qui lui permet de lever des troupes. En cas de danger imminent, il utilise le clamor patriae. À ce moment-là, tous les hommes libres de l'Empire doivent se mobiliser. Dans les faits, les paysans sédentaires autrefois libres vont de moins en moins au combat lointain dans une période où leurs libertés diminuent. Mais l'urgence des invasions et le pragmatisme saxon ont modifié les pratiques militaires carolingiennes élitistes, rétribuant seulement l'appel militaire des chevaliers. Un réseau de châteaux construit en quelques décennies par la main d'œuvre paysanne couvre l'Allemagne du Sud et l'Italie du Nord. La population solidaire des modestes burgs rend les incursions hongroises difficiles avant de les empêcher totalement. Les appelés paysans sont organisés sur le modèle des milites agrarii en Saxe, souvent utilisés uniquement pour garder les châteaux. Toutefois, pour les longues expéditions, ce sont surtout les loricati, les chevaliers cuirassés qui sont mobilisés. En 981, peu de temps après la mort d'Otton Ier, il est possible de mobiliser 6000 chevaliers en Allemagne[33]. Les Italiens fournissent aussi des contingents armés.

Les margraves

Les margraves, marquis en français, dirigent les marches. Ils disposent des châteaux et du commandement militaire de leur marche. Ils peuvent au nom de l'empereur donner des biens à l'Église. Ils perçoivent, pour le roi dans un premier temps, puis dans un second temps pour leur propre compte, le Wozot, une redevance en grain due par les paysans. Ils perçoivent aussi les tonlieux, redevance sur les marchés et sur la circulation des marchandises. Pour développer les marches, il est fait appel à des Allemands venus de l'ouest de l'Empire, principalement des communautés de paysans des Pays-Bas, de la Franconie et de Thuringe attirés par des parcelles plus grandes et des droits féodaux plus légers. Les premiers bourgs apparaissent[3].

L'Église, clef de voûte de l'administration ottonienne

Relief en ivoire donné par Otton à la cathédrale de Magdebourg

Sous les Carolingiens, la mise en place progressive de l'hérédité des charges avait fortement contribué à l'affaiblissement de leur autorité. Pour éviter une pareille dérive, Otton, qui sait ne pas pouvoir trop compter sur la fidélité des relations familiales s'appuie sur l'Église germanique et lotharingienne qu'il comble de bienfaits mais qu'il assujettit. Les historiens ont donné au système qu'il a mis en place le nom de Reichskirchensystem[40]. Il faut dire que l'Église avait maintenu vivante l'idée d'Empire. Elle avait soutenu les ambitions impériales d'Otton Ier[41].

Les évêques et les abbés constituent l'armature de l'administration ottonienne. L'empereur s'assure la nomination de tous les membres du haut clergé de l'empire. Une fois désignés, ils reçoivent du souverain l'investiture symbolisée par les insignes de leur fonction, la crosse et l'anneau. En plus de leur mission spirituelle, ils doivent remplir des tâches temporelles que leur délègue l'empereur. Ainsi l'autorité impériale était-elle relayée par des hommes compétents et dévoués[30]. Cette Église d'empire ou Reichskirche, assure la solidité d'un royaume pauvre en ressources propres. Elle permet de contrebalancer le pouvoir des grands ducs de Bavière, Souabe, Franconie, Lotharingie.

Au sein du comté de Frise et de Hollande, créé par Henri Ier, l'évêché d'Utrecht constitue, jusqu'aux environs de 1100, l'entité la plus puissante. À côté de ces Pays-Bas du Nord en devenir, Liège et Cambrai émergent au Sud[42].

La chapelle royale devient une pépinière pour le haut-clergé. Le pouvoir impérial choisit ses hauts dignitaires de préférence dans sa parentèle, proche ou élargie. Celle-ci bénéficie des plus hautes charges épiscopales ou monastiques. Le meilleur exemple en est le frère propre d'Otton, Brunon, évêque de Cologne, qui adopte la règle de l'abbaye de Gorze pour les monastères de son diocèse[43]. On peut citer aussi Thierry Ier, cousin germain d'Otton, évêque de Metz de 965 à 984 ; un parent proche d'Otton, le margrave de Saxe Gero, qui fonde l'abbaye de Gernrode vers 960-961, en Saxe ; Gerberge, nièce de l'empereur, abbesse de Notre-Dame de Gandersheim. Dans chaque diocèse, on peut ainsi trouver un membre de l'entourage royal car Otton a pris soin de retirer aux ducs le droit de nommer les évêques, y compris dans les diocèses situés dans leurs propres duchés[44].

Le monachisme mis en partie à l'écart des relais du pouvoir régalien se rénove et entreprend le redressement des monastères défaillants en fournissant des remplaçants vertueux des moines indignes et chassés. À côté des vieux monastères de Fulda, Corvey, Saint-Gall ou Tegernsee, toujours prestigieux, apparaissent les abbayes de Brogne, de Saint-Vanne-de-Verdun et surtout de Gorze. Fondée en 933, en Haute-Lorraine, cette dernière connaît un prodigieux développement dans les terres de l'Empire, digne de celui de l'ordre de Cluny en France et ailleurs.

Renaissance ottonienne

Article détaillé : Renaissance ottonienne.

La renaissance ottonienne est d'abord un simple retour conservateur à l'ordre et à la justice apporté par une royauté forte après les oppressions, les désarrois et les incertitudes de la déchéance carolingienne. Amplifiée par l'ensemble du monde franc en croissance, elle prend outre sa dimension motrice intrinsèque à la fois administrative et régalienne, trois aspects majeurs :

  • une ouverture indéniable des échanges et surtout un essor marchand déjà en grande partie urbain
  • une forme d'art empruntant à l'Antiquité romaine ses formes et ses principes, l'ensemble mis en fusion dans un modèle germanique original
  • une vie spirituelle puisée dans la rencontre des mondes nordiques, slaves et méditerranéens dans le respect de la tradition chrétienne[45].

Le développement de l'économie marchande

Avec la généralisation du denier d'argent par les Carolingiens une révolution économique est en cours : les surplus agricoles deviennent facilement commercialisables et on assiste dans tout l'Occident à la multiplication de la productivité et des échanges[46]. En réunissant Italie et Germanie dans le même empire, le royaume d'Otton Ier contrôle les principales voies de commerce entre l’Europe du Nord et la Méditerranée. Le trafic commercial avec Byzance et l'Orient transite en effet par la Méditerranée vers l'Italie du sud et surtout le bassin du Po et rejoint celui du Rhin via les voies romaines traversant les cols alpins. Cette voie pourtant longue et coûteuse est à l'époque plus utilisée que la traditionnelle voie rhodanienne, d'autant que l'Adriatique est plus sûre que la Méditerranée occidentale où sévissent les pirates Sarrasins. Otton sait garder la mainmise sur les péages et développer les marchés nécessaires à l'augmentation de ce trafic. Ainsi contrairement à ce qui se passe en Francie occidentale, Otton garde le monopole du contrôle de la frappe monétaire et fait ouvrir de nombreuses mines d'argent dans le Harz, en particulier près de Goslar[47]. Or, la création d'un atelier monétaire dans une ville épiscopale ou une abbaye entraîne la création d'un marché où peut être prélevé le tonlieu[47]. Cette puissance monétaire et commerciale lui permet de rétribuer la participation administrative des évêchés et des abbayes à qui le souverain rétrocède avec les gains surveillance pacifique des populations et gestion monétaire et mercuriale, mais aussi d'étendre son influence à la périphérie de l'empire: les marchands italiens ou anglais ont besoin de son soutien, les Danois deviennent des relais et des partenaires commerciaux, les Slaves adoptent le denier d'argent[47]...

En 968, Otton octroie à l'évêque de Bergame, les revenus de la foire fréquentée par les marchands de Venise, de Comacchio et de Ferrare. Le but est d'aider cette ville, qui a été dévastée par les Hongrois. La documentation est très riche sur les marchands d'Allemagne : elle indique qu'il existe de nombreux marchands à Worms, Mayence, Passau, Magdebourg, Hambourg et Mersebourg[48]. De nombreux marchands juifs commercent dans les villes allemandes.

Les débuts de l'art ottonien

L'art ottonien recouvre une période allant du milieu du Xe siècle à la fin du XIe siècle à l'intérieur de l'empire germanique. C'est donc sous le règne d'Otton Ier que cet art commence à se développer. La famille impériale et les grands personnages laïcs ou religieux donnent une impulsion déterminante à l'art. L'art ottonien emprunte quelques caractéristiques de la période carolingienne mais il est aussi influencé par l'art de l'Antiquité tardive et l'art byzantin. Il permet l'expression d'une spiritualité en mouvement[49]. L'église Saint-Pierre-aux-Nonnains de Metz en est un bon exemple ainsi que l'église Saint-Cyriaque à Gernrode en Saxe. Cet édifice roman possède un double chœur et des tribunes byzantines. On emploie beaucoup de pierres brutes ou polies du type saphirs, rubis, émeraudes dans la statuaire et les arts décoratifs. De cette époque datent aussi la généralisation de la gravure sur plaques d'ivoire, mentionnons le cadeau d'ivoires d’Otton Ier à l'évêché de Magdebourg composées de carrés de 12 x 12 encadrés, représentant des scènes religieuses.

L'art de l'enluminure, s'il n'est plus que relictuel dans l'entourage royal, l'école du palais ayant disparu, reste présent dans des ateliers monastiques spécialisés, sur l'île de Reichenau, à Fulda et à Echternach. Le haut clergé, enrichi par l'association avec le pouvoir régalien constitue une caste de commanditaires et de mécènes, parmi lesquels sont renommés Egbert de Trèves et Bernward d'Hildesheim.

Les belles lettres ne sont pas oubliées par le mécénat des grands prélats et dignitaires religieux. Le propre frère d'Otton, Brunon de Cologne, cultive les lettres et encourage les études[50]. Le moine Widukind de Corvey écrit une célèbre Histoire des Saxons (Rerum Gestarum Saxonicarum libri III) adressée à Mathilde, fille de l'empereur Otton Ier. Au sud de la Germanie (redevenue Empire, l'école de Saint-Gall demeure un centre incontournable grâce à des maîtres remarquables : un moine anonyme écrit l'ancêtre de la chanson de geste, le Waltharius[3] ; Notker le Physicien (mort en 975) est l'un des premiers à traduire en langue germanique des ouvrages latins aussi bien profanes que religieux[51]. Hrotsvita, moniale au chapitre des dames nobles de l'Abbaye de Gandersheim en Saxe, écrit en latin une œuvre poétique. Il s'agit d'une série de poèmes qui constituent un livre de légendes autour de quelques figures de la sainteté (La vierge Marie), Gengoul, Pélage, Théophile, Denys l'Aréopagite, Agnès, etc.)[52]. Entre 967 et 968[53], elle rédige aussi une épopée sur le règne d’Otton Ier, commandée par l’abbesse de Gandersheim Gerberge, une nièce d'Otton[54].

L'intérêt d'Otton pour les lettres se retrouve dans le choix du précepteur de son fils. Il est impressionné par les connaissances de Gerbert d'Aurillac, futur pape, qui lui a été présenté par Borell II, comte de Barcelone. Il lui confie l'éducation d'Otton II.

Sanctuaires religieux

L'église de Gernrode

Les clercs célèbrent en Otton un nouveau Charlemagne[3]. La vie religieuse connaît un nouvel essor. L'époque ottonienne se caractérise par une période de réforme des monastères dans une grande partie de l'Occident chrétien[43]. Otton Ier fonde l'abbaye Saint-Maurice de Magdebourg en 937. Toute sa vie, il entretient des liens très privilégiés avec les hauts dignitaires de l'Église, travaillant aussi avec eux aux réformes monastiques de son temps. Il n'en est certes pas l'initiateur, mais un acteur dynamique.

La réforme clunisienne, qui commence vers 960-965, peut compter sur l'aide de la seconde épouse d'Otton, l'impératrice Adélaïde, sœur du roi Conrad III de Bourgogne. Un autre important mouvement de réforme monastique se développe à partir de l'abbaye de Gorze, dans le duché de Lorraine. Dans les régions reconquises sont fondées des abbayes prestigieuses comme celles de Melk, et de Saint-Florian en Autriche[55]

Le renouveau religieux se manifeste aussi par la construction d'églises ou de cathédrales comme celle de Magdebourg. En 937, une première église avait été fondée et consacrée à saint Maurice. Les travaux, financés par Otton Ier, respectent la mode romaine. Ce premier édifice, grandiose et équilibré, avait probablement une nef à quatre bas-côtés, une largeur de 41 mètres, une longueur de 80 mètres, et une hauteur estimée à environ 60 mètres. Cette église a été agrandie en 955 lorsqu'elle obtint le statut de cathédrale. Elle fut, à l'époque, décorée par des plaques d'orfèvrerie exécutées à Milan et racontant des scènes du Nouveau Testament[49]. Détruite en 1207 par un incendie, elle fut ensuite reconstruite.

Descendance

Otton Ier et Adélaïde, statues de la cathédrale de Meissen

D'une première épouse dont le nom est resté inconnu :

Avec Edith de Wessex, (° 910 - † 29 janvier 946), fille d’Édouard l'Ancien

Avec Adélaïde de Bourgogne, fille de Rodolphe II de Bourgogne, et veuve de Lothaire d'Arles, roi d'Italie.

Postérité

Othon est un personnage incontournable de l'historiographie médiévale. Alors que ce souverain, un des hommes forts de son temps, est une figure d'un modèle politique de gouvernement stable encore en gestation, la royauté élective, l'histoire réécrite au XIXe siècle ne cesse de l'ériger avec exagération en sauveur d'un pseudo-état ou en rassembleur à l'origine de la puissance anachronique ou mythique du peuple allemand[56]. La récupération politique aiguillonnée par les présupposés nationalistes, la mauvaise foi pangermaniste, voire la délirante mythologie nationale-socialiste ont exploité les profondes divisions engendrées par un débat historique, à la fois controverse libre et non dépourvue de voies erronées ou vraies d'approfondissement par la recherche.[réf. nécessaire]

L'institution royale élective et aristocratique

Le pouvoir politique saxon dont le sommet régalien n'est qu'une forme étendue d'un pouvoir ducal et d'une administration comtale prend appui sur des archaïsmes :

  • la nécessité d'une défense solidaire aux marges du regnum francorum reprise et étendue par les premiers Carolingiens.
  • la lignée matrimoniale qui donne à l'oncle ou au grand-oncle le pouvoir formateur en retour d'une dépendance.

L'aristocratie saxonne, commandée par une lignée de chefs élective, parvient surtout au pouvoir par la délisquescence des formes de pouvoir antérieures. Constats d'impuissance, elle met plusieurs longues décennies à évacuer les puissantes intrusions magyares et nordiques au centre du monde franc et germanique. Là où l'émiettement du pouvoir tend à laisser la place à des régulations locales violentes comme en Francie occidentale ou à des structures politiques déjà complexes comme en Italie, le souverain saxon ne peut dépasser la force brute impuissante que par un contrôle familial légitime et une régulation administrative précaire répartie entre châtellenies. Ainsi les femmes saxonnes de sa famille sont des pièces maîtresses de sa politique de contrôle du Royaume de France, et il escompte de même de l'autorité de son épouse Adélaïde en Italie. L'échec italien de la dynastie ottonienne ne laisse que la tentation aux autres rois prétendus héritiers de recommencer l'aventure. La première lignée capétienne, en partie saxonne par les femmes, ne saisit qu'un pouvoir de justice religieux alors que le duché militaire robertien perd en efficacité. Il faudra attendre les mutations sociales du début du XIIe siècle pour donner une véritable assise à ce pouvoir régalien, longtemps cantonné à une région.

Jugements de l'historiographie médiévale

L'historiographe Widukind de Corvey rédige avec la Rerum Gestarum Saxonicarum une Histoire des Saxons pour Mathilde, la fille d'Otton le Grand. Widukind devait savoir que le contenu de son œuvre serait connu de l'empereur. À plusieurs reprises, il souligne que c'est le dévouement (devotio) qui l'a conduit dans l'écriture et prie pour la clémence (pietas) de son seigneur quand il lira son œuvre. Widukind commence son récit sur l'archevêque Frédéric de Mayence qui s'était opposé à Otton Ier de la manière suivante : « Il ne m'appartient pas de communiquer la raison de la chute et de révéler les secrets royaux. Cependant je crois devoir satisfaire à l'histoire. S'il arrive que l'on dût me reprocher quelque chose, puisse-t-on me le pardonner »[57]. On ne doit cependant pas oublier que le topos de l'humilité fait partie des topoi de l'historiographie.

Toutefois Widukind met en œuvre une étonnante stratégie de légitimation. Il n'évoque pas le couronnement de l'empereur et développe une représentation libre de toute intervention romaine. À la place d'une sacralisation par le pape et un couronnement impérial, Widukind présente une acclamation de l'empereur par l'armée victorieuse. La victoire d'Otton Ier à la Bataille du Lechfeld devient l'acte véritable de la légitimation du pouvoir impérial[58]. Parallèlement à ce couronnement dans le style antique, c'est-à-dire un couronnement par les soldats, se mélangent chez Widukind des conceptions germaniques et chrétiennes du pouvoir et de l'héroïsme. L'empereur n'est pas un seigneur universel mais un rex gentium germanique, un roi au-dessus des peuples. Enfin, Widukind célèbre les conquêtes permises par le long règne d'Otton Ier : « L'empereur a régné avec une grâce paternelle, libéré ses sujets des ennemis, vaincu les Hongrois, les Arabes, les Normands et les Wendes, soumis l'Italie, détruit les idoles des voisins païens et institués des églises et des communautés religieuses »[59].

Othon de Freising

Liutprand de Crémone se trouvait tout d'abord au service de Bérenger d'Ivrée. Après une brouille avec ce dernier, il trouve refuge chez Otton qui le nomme évêque de Crémone. Dans son œuvre principale intitulée Antapodosis (revanche), Liutprand cherche à représenter les faits de tous les souverains d'Europe. Le titre Revanche fait référence à un règlement de compte avec le roi Bérenger II que Liutprand cherche à stigmatiser comme tyran. Selon Liutprand, la suprématie des ottoniens est voulue par Dieu. C'est ainsi que Henri Ier de Germanie est un seigneur humble qui surmonte sa maladie et qui vainc les Hongrois. Otton Ier est son digne successeur qui vainc ses ennemis également avec l'aide de Dieu. Liutprand connait la cour byzantine grâce à plusieurs légations. La représentation ironique qu'il fait de la vie à la cour de Byzance sert la gloire d'Otton et souligne la grandeur de sa puissance.

L'historiographe Dithmar décrit le règne d'Otton Ier environ quarante ans après la mort de ce dernier avec les mots suivants : « De son vivant rayonnait l'ère dorée! »[60]. Il célèbre Otton comme le souverain le plus important depuis Charlemagne[61].

Le trait caractéristique de ces trois représentations est le suivant : Otton est présenté comme l'instrument de Dieu. Otton est un roi puissant car il agit de manière droite et obtient ainsi la protection et l'aide de Dieu. Toute une série d'œuvres sur l'histoire ottonienne parues du vivant du souverain ou peu après sa mort montrent Otton le Grand comme un héros. Ces œuvres célèbrent ses succès, louent la manière avec laquelle il mena l'empire et lui attribuent toutes les qualités qu'un roi doit posséder[62]. Cependant, on peut également noter que pendant le règne ottonien, une critique s'est formulée qui est allée jusqu'à affirmer que la mort du souverain est une vengeance divine[63]. Cette critique a principalement été formulée dans la ville d'Halberstadt où Otton jouissait d'une très mauvaise réputation après avoir considérablement réduit le diocèse au profit de l'archevêché de Magdebourg et de l'évêché de Mersebourg.

Le surnom de Grand a été utilisé au plus tard à partir de la moitié du XIIe siècle grâce à la chronique d'Othon de Freising qui écrit : « Otton a ramené l'empire des Lombards aux Francs germaniques de l'Est et a sans doute ainsi été le premier nommé Roi des Allemands, même si l'empire est resté celui des Francs où seule la dynastie régnante a changé »[64]

À la fin du XIIIe siècle, le chroniqueur dominicain Martin d'Opava décrit Otton Ier comme le premier empereur des Allemands (primus imperator Theutonicum)[65].

Otton le Grand et la recherche historique allemande

Au XIXe siècle, sous le couvert d'intérêts nationaux, on oppose la politique italienne d'Otton et la politique de l'Est de Bismarck. La politique d'Otton est présentée comme funeste à cause de la fixation faite sur l'Italie. Cette question donne lieu à la controverse historique entre les historiens Sybel et Ficker qui sera réglée par Wilhelm von Giesebrecht en 1859. Sur le règne d'Otton, Giesebrecht écrit qu'il est la « période pendant laquelle notre peuple fort de son union connut le plus haut développement de sa puissance, où il ne maîtrisait pas uniquement son propre destin mais commandait d'autres peuples, où l'homme Allemand était le plus important dans le monde et où le nom allemand avait sa résonance la plus complète »[66].

L'historien prussien Heinrich von Sybel provoque une controverse avec Giesebrecht en affirmant qu'Otton n'a pas été un « sauveur de l'Allemagne et de l'Europe de la misère déserte d'une époque sans empereur »[67]. L'expansion à l'Est est selon lui inhérente au peuple Allemand. Charlemagne, Otton le Grand et Frédéric Barberousse ne l'ont pas encouragée mais risquée de manière irréfléchie. Giesebrecht riposte en 1861 que sa vision de monde et du passé ne se différencient de celles de Sybel que par le point cardinal qui les gouverne. Le développement du pouvoir et l'influence dominatrice sont aussi les bases de sa réflexion[68]. Toujours en 1861, Julius Ficker se joint à la controverse historique en reprochant à Sybel de faire des anachronismes : à l'époque d'Otton, il n'existait pas encore de nation allemande. Pour Ficker, ce n'est pas l'empire qui est responsable de sa chute mais plutôt Barberousse et son intervention sans mesure en Sicile[69] Leopold von Ranke s'est quant à lui tenu hors de cette controverse en essayant d'interpréter l'empire ottonien plutôt à travers l'opposition entre le monde romain et le monde germanique, c'est-à-dire entre la politique italienne et la politique à l'Est, l'une étant représentée par l'Église et l'autre par l'empereur en Saxe. La controverse a eu pour heureuse conséquence des approches démarquées comme celles de Karl Lamprecht sur l'histoire culturelle et l'historisation de la pensée et des mentalités. Elle a également ouvert des perspectives européennes du fait de l'alternance des positions des différents participants : partisans d'une grande ou d'une petite Allemagne, prussiens ou autrichiens, protestants ou catholiques.

Cette controverse a divisé durablement le champ de recherche historique, laissant son imprégnation sur les jugements des historiens encore au début du XXe siècle. Pour Heinrich Claß, la politique italienne a été « funeste et mère du malheur »[70]. Longtemps, Otton a été considéré comme le créateur de l'Empire médiéval allemand. À partir des ruines de l'empire carolingien, il a mené à l'unité les Saxons, les Thuringeois, les Francs, les Bavarii, les Souabes et les Lorrains. L'intervention de l'empereur à l'Est, au Sud et l'Ouest et son couronnement impérial a mené le peuple allemand à la première place parmi les peuples européens.

Récupération politique nationaliste et national-socialiste

En 1876, Ernst Dümmler voit le règne d'Otton comme une « expansion pleine de vigueur »[71], un « élan national à travers le cœur du peuple » [72] qui a « commencé seulement à cette époque à s'appeler allemand et à se sentir allemand »[73]. En 1936, Robert Holtzmann dédié sa biographie d'Otton « au peuple allemand » en faisant remarquer que ce dernier a « montré le chemin du Moyen Âge à l'histoire allemande », que ce dernier « n'a pas seulement marqué le début de l'empire allemand mais véritablement régné pour des siècles »[74].

Sous le national-socialisme, on répand la thèse que c'est sous Henri Ier de Germanie que le peuple allemand s'est rassemblé et qu'Otton le Grand a consciemment essayé de le redresser et de le cultiver. Ces thèses sont enseignées dans les centres de formation du parti, jusque dans le journal officiel, le Völkischer Beobachter. À l'inverse, Heinrich Himmler et ses historiens tel Franz Lüdtke voient en Henri Ier le seul fondateur du peuple allemand.

Adolf Hitler se rallie quant à lui aux thèses défendues par Sybel. Dans Mein Kampf, il nomme trois phénomènes capitaux et durables issues de l'histoire allemande : la conquête de l'Ostmark, la conquête du territoire situé à l'Est de l'Elbe et la fondation de l'État prusso-brandebourgeois[75]. C'est ainsi qu'en tant que nouveau commandant de la Wehrmacht, il nomme Unternehmen Otto (entreprise Otton) la directive pour l'invasion de l'Autriche le 11 mars 1938. Le 24 mai 1938, Hitler donne pour consigne supplémentaire de débaptiser l'Autriche en Ostmark. Le nouveau chef d'État-major d'Hitler Franz Halder qui n'avait pas participé à l'Unternehmen Otto, prépare une campagne contre la Russie en 1940 et la baptise Plan Otto. Afin d'éviter toute confusion, Halder la renomme Opération Barbarossa.

Othon, figure annonciatrice de l'état régalien ?

En 1962, à l'occasion du millénaire du couronnement d'Otton, on perçoit toujours ce dernier comme celui qui a porté « en lui une conception ferme d'un État entier allemand fort »[76]. Otton a réussi à « unifier l'empire de l'intérieur, à repousser victorieusement vers l'extérieur les attaques ennemies, à élargir le territoire impérial et à étendre sur pratiquement toute l'Europe la sphère d'influence allemande, si bien que l'on peut qualifier l'Empire d'Otton Ier comme la première tentative d'une unification européenne »[77].

Aujourd'hui, cet enthousiasme par rapport à un accomplissement national au Xe siècle a disparu dans les cercles spécialisés. En 2001, Johannes Laudage considère le changement de structure voulu et imposé par Otton comme l'une de ses plus importantes actions. Ce changement réside essentiellement dans une « accentuation de son pouvoir de décision et de son autorité »[78].

Notes et références

Notes

  1. Le souverain sans héritier est aussi en proie à la folie de la persécution, comme le laisse présager les différentes Vitae Richardi ou Vies de sainte Richarde, son épouse humiliée.
  2. Ce n'est qu'au moment de la réforme grégorienne au XIe siècle que les prêtres ne peuvent plus se marier après leur ordination.
  3. Gerberge épouse Giselbert, duc de Lotharingie puis Louis IV d'Outremer, Edwige qui épouse le capétien Hughes le Grand est la mère de Hugues Capet, de Otton et de Henri de Bourgogne, Bruno devient archevêque de Cologne et administre la Lotharingie, après la mort de son frère Henri également chargé de la Bavière.
  4. L'évêché d'Utrecht devient la capitale administrative de ce comté. Le relêvement de quelques villes bataves et l'essor de nouvelles bourgades hollandaises est spectaculaire à l'époque ottonienne qui arrête pillage et dévastation régulière

Références

  1. Généalogie d'Otton Ier sur le site Medieval Lands
  2. Gerhard Krause, Gerhard Müller, Theologische Realenzyklopädie, Walter de Gruyter, 1995, p. 544
  3. a, b, c, d, e, f et g Encyclopaedia Universalis, article Allemagne médiévale, DVD, 2007
  4. « La société féodale », Université de Toulouse.
  5. Francis Rapp, Le Saint Empire romain germanique, Tallandier, 2000, p. 32
  6. Francis Rapp, op. cit., p. 33. L'assertion selon laquelle « La plupart des massifs sont vides d'hommes. Les forêts sont très étendues et très épaisses » est à discuter. L'archéologie et la toponymie la démentent si la littérature hagiographique et l'historiographie religieuse peuvent la défendre.
  7. Francis Rapp : Les échanges attestés permettent le maintien et même une augmentation sensible de la densité démographique de cette région de refuge op. cit., p. 34.
  8. Francis Rapp, op. cit., p 35
  9. a, b et c Francis Rapp, op. cit., p 49
  10. Francis Rapp, op. cit., p 45
  11. La société féodale Université de Lille
  12. Francis Rapp, op. cit., p 48
  13. Francis Rapp, op. cit., p. 50
  14. Francis Rapp, op. cit., p. 51
  15. Louis Spach, Lettres sur les archives départementales du Bas-Rhin , E. Piton, 1862, p. 307
  16. Francis Rapp, op. cit., p. 52
  17. Gérard Rippe, « Ivrée », Encyclopædia Universalis, DVD, 2007.
  18. Francis Rapp, op. cit., p 53
  19. Joseph Rovan, Histoire de l’Allemagne des origines à nos jours, 3e éd. revue et augmentée, Éditions du Seuil, coll. « Points Histoire » nº 254, Paris, 1999 (1re éd. 1994), 974  (ISBN 2-02-18296-3) [détail des éditions], p. 90
  20. Georges Castellan, « Drang nach Osten », l'expansion germanique en Europe centrale et orientale
  21. Otton I le Grand dans Mémo
  22. Francis Rapp, op. cit., p 56
  23. Otton Ier le Grand (912-973). Roi de Germanie (936-973) et empereur (962-973)
  24. Pierre Riché, Gerbert d'Aurillac, le pape de l'an mil, Fayard 1987, p. 28.
  25. Pierre Riché, op. cit., p. 32.
  26. La Pologne féodale : les Piast
  27. a et b Francis Rapp, op. cit., p 59
  28. Liutprand de Crémone
  29. Francis Rapp, op. cit., p 58
  30. a et b Les relations entre le Saint-Empire et la papauté, d'Otton le Grand à Charles IV de Luxembourg (962-1356) sur http://www.clio.fr. Consulté le 27 octobre 2007
  31. Francis Rapp, op. cit., p 113
  32. Francis Rapp, op. cit., p 114
  33. a et b Francis Rapp, op. cit., p 116
  34. Francis Rapp, op. cit., p 118
  35. Francis Rapp, op. cit., p 120
  36. Francis Rapp, op. cit., p 125
  37. Francis Rapp, op. cit., p. 110
  38. Francis Rapp, op. cit., p. 111
  39. Francis Rapp, op. cit., p 112
  40. Francis Rapp, op. cit., p. 54
  41. francis Rapp, op. cit., p. 125
  42. Guido Peeters, Pays-Bas, Encyclopaedia Universalis, DVD, 2007.
  43. a et b encyclopedie universelle, « Le temps des Ottoniens » sur http://www.encyclopedie-universelle.com. Consulté le 30 octobre 2007
  44. Francis Rapp, op. cit., p. 55
  45. Jean Chélini, Histoire religieuse de l'Occident médiéval, Hachette, 1991, p 259
  46. Jean Dhondt, Les dernières invasions tiré de Histoire de la France des origines à nos jours sous la direction de Georges Duby, Larousse, 2007, page 249.
  47. a, b et c Pierre Riché, Les Carolingiens, une famille qui fit l'Europe, Hachette 1983, p.351.
  48. Renée Doehaerd, Le Haut Moyen Âge occidental, économies et sociétés, PUF, 1971, p 256
  49. a et b Encyclopaedia Universalis, article Art ottonien
  50. Jean Chélini, op. cit., p. 259
  51. Jean Chélini, op. cit., p. 260
  52. Hrotsvita de Gandersheim, consulté le 3 juillet 2008
  53. Monique Goullet, « De Hrotsvita de Gandersheim à Odilon de Cluny, images d’Adélaïde autour de l’An Mil », in Patrick Corbet, Monique Goullet et Dominique Iogna-Prat, Adélaïde de Bourgogne, Genèse et représentations d’une sainteté impériale, Dijon, 2002, p. 43-54, disponible en ligne, consulté le 24 juin 2007, p. 1
  54. Laurence Moulinier, « H comme Histoire : Hrotsvita, Hildegarde et Herrade, trois récits de fondation au féminin ». Clio HFS, 2/1995, disponible en ligne, consulté le 24 juin 2007.
  55. Joseph Rovan, Histoire de l'Allemagne, Le Seuil, 1999, p. 91
  56. L'état et la nation n'apparaissent sous des formes stabilisées qu'au début du XVe siècle. L'adjectif allemand au sens noble est encore plus tardif.
  57. (de)« Den Grund des Abfalls mitzuteilen und die königlichen Geheimnisse (regalia mysteria) zu enthüllen, steht mir nicht zu. Doch glaube ich, der Geschichte genügen zu müssen. Lasse ich mir dabei etwas zuschulden kommen, möge man es mir verzeihen »Dans : Widukind, Sachsengeschichte II, 25.
  58. Widukind, Sachsengeschichte III, 49.
  59. (de)« Der Kaiser hat mit väterlicher Huld regiert, seine Untertanen von den Feinden befreit, die Ungarn, die Araber, die Normannen und die Wenden besiegt, Italien unterworfen, die Götzenbilder der heidnischen Nachbarn zerstört sowie Kirchen und geistliche Gemeinschaften eingerichtet » Dans : Widukind, Sachsengeschichte III, 75.
  60. (de)« In seinen Tagen erstrahlte das goldene Zeitalter! » (Temporibis suis aureum illuxit seculum)Thietmar II, 13.
  61. Thietmar II, 45.
  62. Gerd Althoff, Otto der Grosse in der ottonischen Geschichtsschreibung, p.25. In: Matthias Puhle (Hrsg.): Otto der Grosse, Magdeburg und Europa., 2 volumes, Zabern, Mainz, 2001
  63. Gesta Episcorum Halberstandesium, p.85.
  64. (de)« Otto habe das Kaisertum von den Langobarden zu den „deutschen Ostfranken“ (ad Teutonicos orientales Francos) zurückgebracht und sei vielleicht deshalb als erster König der Deutschen (rex Teutonicorum) genannt worden, obgleich das Reich doch das fränkische geblieben sei, in dem nur die herrschende Dynastie gewechselt habe. » Dans : Otto, Chronica sive Historia de duabus civitatibus 6,17, hg. von Adolf Hofmeister (MGH Scriptores rerum Germanicarum), Hannover/Leipzig 1912, p.277.
  65. Martin, Chronicon pontificum et imperatorum, hg. von Ludwig Weiland, in: MGH Scriptores 22, Hannover 1872, p.465.
  66. (de)« Periode, in der unser Volk, durch Einheit stark, zu seiner höchsten Machtentfaltung gedieh, wo es nicht allein frei über sein eigens Schicksal verfügte, sondern auch anderen Völkern gebot, wo der deutsche Mann am meisten in der Welt galt und der deutsche Name den vollsten Klang hatte » Dans : Wilhelm Giesebrecht, Geschichte der deutschen Kaiserzeit, Bd.1. 5. Auflage, Braunschweig 1881, p.74.
  67. (de)« kein Erretter Deutschlands und Europas aus dem wüsten Elend einer kaiserlosen Zeit. »
  68. Wilhelm Giesebrecht, Deutsche Reden, Leipzig, 1871, p.74.
  69. Johannes Fried, Otto der Große, sein Reich und Europa. Vergangenheitsbilder eines Jahrtausends, p. 548, In: Matthias Puhle (Hrsg.): Otto der Grosse, Magdeburg und Europa. 2 Bände, Zabern, Mainz, 2001.
  70. (de)« verhängnisvoll und unglücksschwanger » Heinrich Class, Deutsche Geschichte von Einhart, Leipzig 1926, p.23.
  71. (de)« jugendkräftigen Aufschwung » Dans : Rudolf Köpke/ Ernst Dümmler, Kaiser Otto der Große, Leipzig 1876, p.553.
  72. (de)« durch die herzen des Volkes » Dans : Rudolf Köpke/ Ernst Dümmler, op. cit., p.553.
  73. (de)« das damals zuerst anfieng, … sich das deutsche zu nennen und deutsch zu fühlen » Dans : Rudolf Köpke/ Ernst Dümmler, op. cit., p.553.
  74. (de)« der deutschen Geschichte des Mittelalters Weg und Ziel gewiesen, die deutsche Kaiserzeit nicht nur eingeleitet, sondern auf Jahrhunderte hinaus wahrhaft beherrscht » Dans : Robert Holtzmann, Kaiser Otto der Große, Berlin, 1936, p.7.
  75. (de)Adolf Hitler, Mein Kampf. Zweiter Band, Die nationalsozialistische Bewegung, München, 1933,p.733–742.
  76. (de)« eine feste Konzeption eines starken deutschen Gesamtstaates in sich » Dans : Leo Santifaller, Otto I. das Imperium und Europa, in: Festschrift zur Jahrtausendfeier der Kaiserkrönung Ottos des Großen. Erster Teil (Mitteilungen des Instituts für Österreichische Geschichtsforschung, Ergänzungsband 20,1), Graz/Köln, 1962, p.21.
  77. (de)« das Reich im Innern zu einigen und nach außen die feindlichen Angriffe erfolgreich abzuwehren, das Reichsgebiet zu erweitern und den deutschen Einflussbereich nahezu über ganz Europa auszudehnen- so zwar, daß man das Imperium Ottos I. als einen Versuch einer europäischen Einigung bezeichnen kann » Dans : Leo Santifaller, op. cit., p.21.
  78. (de)« Akzentuierung seiner Entscheidungsvollmacht und Autorität » Dans : Johannes Laudage, Otto der Große (912–973): eine Biographie, Regensburg, 2001, p.122.

Annexes

Bibliographie

  • Jean-Pierre Cuvillier, L'Allemagne médiévale, Paris, 1979-1982, 2 vol.
  • Robert Folz, La naissance du Saint Empire, Paris, 1967
  • Pierre-Roger Gaussin, article Allemagne médiévale, Encyclopædia Universalis, 1989.
  • Florentine Mütherich, article Art ottonien, Encyclopædia Universalis, 1989.
  • Michel Parisse, Allemagne et Empire au Moyen Âge, Hachette Livre, 2002.
  • (de) Matthias Puhle (éd.), Otto der Große, Magdeburg und Europa, Mayence, Éditions Philipp von Zabern, 2001
  • Pierre Riché, Les Carolingiens. Une famille qui fit l'Europe, Paris, Hachette, 1983
  • Joseph Rovan, Histoire de l'Allemagne, Éditions du Seuil, 1999
  • Francis Rapp, Le Saint Empire romain germanique, Éditions du Seuil, coll. « Points Histoire », Lonrai, 2003 (ISBN 978-2020555272).
  • (de) Harald Zimmermann (éd.), « Otto der Große », Wege der Forschung, no 450, 1976

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