Invasion de la Tchécoslovaquie par le Pacte de Varsovie

Invasion de la Tchécoslovaquie par le Pacte de Varsovie
Invasion de la Tchécoslovaquie par le Pacte de Varsovie
Unité d'artillerie du pacte de Varsovie en Tchécoslovaquie, 1968.

Unité d'artillerie du pacte de Varsovie en Tchécoslovaquie, 1968.
Informations générales
Date 20 au 21 août 1968
Lieu Tchécoslovaquie
Casus belli Printemps de Prague : libéralisation politique
Issue Protocole de Moscou : présence militaire soviétique jusqu'en 1991
Belligérants
Pacte de Varsovie :
Flag of the Soviet Union (1955-1980).svg Union soviétique
Drapeau : République populaire de Bulgarie Bulgarie
Drapeau d'Allemagne de l'Est République démocratique allemande
République populaire de Hongrie Hongrie
Flag of Poland.svg Pologne
Drapeau : Tchécoslovaquie Tchécoslovaquie
Commandants
Flag of the Soviet Union (1955-1980).svg Léonid Brejnev
Flag of the Soviet Union (1955-1980).svg Ivan Pavlovsky
Drapeau : Tchécoslovaquie Ludvík Svoboda
Drapeau : Tchécoslovaquie Martin Dzúr
Forces en présence
De 200 000 à 500 000 hommes Inconnues
Pertes
Flag of the Soviet Union (1955-1980).svg 12 morts, 25 blessés
Flag of Hungary (1957-1989; unofficial).svg 4 morts
Flag of Bulgaria (1967-1971).svg 2 morts
Drapeau : Tchécoslovaquie Entre 72 et 108 morts, plus de 500 blessés
Principalement des civils
Guerre froide

L’invasion de la Tchécoslovaquie par le Pacte de Varsovie débuta dans la nuit du 20 au 21 août 1968 ; les troupes du Pacte de Varsovie ayant envahi la République socialiste tchécoslovaque pour mettre fin aux réformes de libéralisation politique engagées par Alexander Dubček et connues sous le nom du Printemps de Prague. Pendant l'intervention, entre 175 000 et 500 000 soldats[1] auraient attaqué la Tchécoslovaquie. Une centaine de Tchèques et de Slovaques furent tués et environ 500 blessés pendant l'invasion[2],[3].

L'invasion stoppa net les réformes et renforça l'autorité du Parti communiste tchécoslovaque. La politique étrangère de l'Union soviétique qui énonça la doctrine de la Souveraineté limitée pendant cette période resta connue sous le nom de doctrine Brejnev[4].

Sommaire

Contexte international

Craintes de l'Union soviétique

Léonid Brejnev et les leaders du Pacte de Varsovie qui réunissait autour de l'Union des républiques socialistes soviétiques, la Bulgarie, la République démocratique allemande, la Hongrie et la Pologne, craignaient que les libéralisations engagées dans le pays, à partir d'avril 1968, y compris la cessation de la censure et de la surveillance politique par la police secrète, aillent à l'encontre de leurs intérêts.

La première de leurs préoccupations était que la défection de la Tchécoslovaquie du bloc soviétique affaiblirait les positions de l'Union soviétique dans une guerre possible avec l'OTAN. Non seulement, cet affaiblissement conduirait à une perte de profondeur stratégique pour l'URSS[5], mais en plus cela impliquerait qu'elle ne pourrait plus disposer de la puissance industrielle de ce pays pour soutenir son effort de guerre[6]. Les dirigeants tchécoslovaques n'avaient aucune intention de quitter le Pacte, mais Moscou pensait ne pas pouvoir être certain des intentions réelles de Prague, et lança ainsi l'opération Danube (nom de code de l'invasion).

Les deux Blocs pendant la guerre froide.

Les autres craintes portaient sur les risques de contagion d'un communisme libéral et d'agitations en Europe de l'Est. Les pays du bloc soviétique s'inquiétaient des risques de déstabilisation de la Pologne et de la RDA, mettant à mal le statu quo. En Union soviétique, les tensions nationales en Estonie, Lettonie, Lituanie, et en Ukraine posaient déjà problème, et beaucoup craignaient que les évènements de Prague ne les exacerbent[7].

En plus, la Tchécoslovaquie ayant une frontière commune avec l'Autriche, de l'autre côté du rideau de fer, des agents étrangers pouvaient potentiellement traverser puis se rendre de là dans n'importe quel pays communiste. À l'inverse, les dissidents pourraient facilement s'enfuir vers l'Ouest[8]. La dernière préoccupation était la disparition de la censure ; les écrivains et journalistes pourraient se rendre à Prague ou Bratislava et faire état de leurs doléances, contournant la censure existant en Union soviétique.

Désintérêt de l'OTAN

Les États-Unis et l'OTAN restèrent largement sourds face à l'évolution de la situation en Tchécoslovaquie. Alors que l'URSS avait la crainte de perdre un allié, les États-Unis n'avaient pas de souhait particulier d'en gagner un. Le président Lyndon Johnson avait engagé profondément son pays dans la guerre du Viêt Nam et était incapable de solliciter un support du Congrès pour un conflit potentiel en Tchécoslovaquie.

Par ailleurs, il voulait lancer les négociations sur un traité de contrôle des armes stratégique avec les Soviétiques, nommé SALT. Il avait besoin d'un partenaire de bonne volonté à Moscou pour obtenir un accord, et ne voulait pas le mettre en risque en raison d'un conflit sur la Tchécoslovaquie[9]. À cette fin, les États-Unis dirent clairement ne pas vouloir appuyer concrètement le mouvement du Printemps de Prague, donnant à l'URSS les mains libres pour agir.

Montée de la tension

Préparatifs militaires

Les archives tchécoslovaques, d'après Eduard Stehlik (cs), historien de l'Institut d'histoire militaire tchèque, montrent que dès le mois de janvier 1968, la direction soviétique suivait avec inquiétude l'évolution de la situation en Tchécoslovaquie. Des avertissements d'abord indirects apparurent à partir du mois d'avril 1968 dans les déclarations des généraux de l'armée soviétique. Ainsi, le 8 avril, le maréchal de l’armée rouge, Alexandre Gretchko, a ordonné le commencement de l’« opération Danube », une possible préparation à une intervention armée contre la Tchécoslovaquie.

Les documents d'archives fournissent aussi des témoignages sur la décision de Moscou d'occuper la Tchécoslovaquie[10]. L'invasion avait été envisagée dès le mois de mai, un ordre a même été donné pour le 9 mai 1968. Une division blindée de l'armée soviétique devait profiter des célébrations de la fin de la Seconde Guerre mondiale, pénétrer dans le Nord de la Moravie et avancer, sous prétexte d'une opération défensive commune face aux puissances occidentales. Au dernier moment, l'ordre fut annulé.

Du 20 au 30 juin 1968, la Tchécoslovaquie fut le théâtre des manœuvres militaires appelées « Sumava », du nom de la région du sud-ouest de la Bohême, près de la frontière avec l’Allemagne, pendant lesquelles 30 000 soldats du bloc soviétiques engagèrent des exercices conjoints sur plusieurs théâtres d'opérations[11]. Les armées soviétiques profitèrent des manœuvres pour approfondir leurs connaissances des axes routiers et ferroviaires, des aéroports, et du déploiement des armées tchécoslovaques. Des réseaux de liaison furent mis en place et, sous couvert des mouvements de troupes, des experts militaires qui n'étaient pas subordonnés à la direction tchécoslovaque, purent intervenir.

Entretiens du 29 juillet

Alexander Dubček (1921-1992).

Les dirigeants soviétiques cherchèrent en même temps à interrompre ou limiter l'impact des initiatives de Dubček par la négociation. Les Tchèques et les Russes se mirent d'accord pour tenir des entretiens bilatéraux le 29 juillet 1968 à Čierna nad Tisou, près de la frontière entre la Slovaquie et l'URSS.

Lors de ce meeting, Dubček argumenta en faveur du programme de l'aile réformatrice du PC tchécoslovaque (KSČ) tout en renouvelant ses engagements vis-à-vis du Pacte de Varsovie et du Conseil d'assistance économique mutuelle (Comecon). Les dirigeants du PCT étaient cependant divisés entre des réformateurs vigoureux (Josef Smrkovský, Oldřich Černík ou František Kriegel) qui soutenaient Dubček, et des conservateurs (Vasil Biľak, Drahomír Kolder et Oldřich Švestka) qui adoptaient une attitude hostile aux réformes.

Brejnev se décida au compromis. Les délégués du PCT réaffirmèrent leur loyauté envers le Pacte de Varsovie et promirent de mettre au pas les tendances « anti-socialistes », d'empêcher la résurrection du parti Social-démocrate tchécoslovaque, et de contrôler la presse de façon plus stricte. L'URSS accepta de retirer ses troupes (encore stationnée en Tchécoslovaquie depuis les manœuvres de juin 1968) et autorisa la réunion du XIVe Congrès du parti le 9 septembre.

Conférence de Bratislava

Le 3 août 1968, les représentants de l'Union soviétique, de l'Allemagne de l'Est, de la République populaire de Pologne, de la Hongrie, de la Bulgarie, et de la Tchécoslovaquie se rencontrèrent à Bratislava et signèrent la Déclaration de Bratislava. Elle affirmait la fidélité inébranlable au marxisme-léninisme et à l'internationalisme prolétarien et déclarait une lutte implacable contre l'idéologie bourgeoise et toutes les forces « anti-socialistes ». L'Union soviétique exprima son intention d'intervenir dans un pays membre du Pacte si un système bourgeois — un système pluraliste avec plusieurs partis politiques représentant différentes factions de la classe capitaliste — était instauré.

Cette politique soviétique de subordination des gouvernements socialistes de ses satellites aux intérêts du bloc (par la force si besoin est), véritable théorie de la souveraineté internationale limitée, fut ensuite connue sous le nom de doctrine Brejnev.

Comme tous ces entretiens lui paraissant insatisfaisants, l'URSS accéléra l'étude des alternatives militaires. Après la conférence de Bratislava, les troupes soviétiques quittèrent le territoire tchécoslovaque mais restèrent massées le long des frontières du pays.

Déstabilisation du pouvoir tchécoslovaque

Tentative de coup de force interne

Longtemps avant l'invasion, un coup de force interne fut préparé par Indra, Kolder et Biľak, parmi d'autres, qui se réunirent fréquemment dans les locaux de l'ambassade soviétique ou bien au centre de repos du Parti au barrage d'Orlík Dam[12]. Leur projet consistait à convaincre une majorité du Présidium (six des onze membres votants) de s'associer avec eux contre les réformistes de Dubček, puis de demander à l'URSS de lancer une action militaire. Les dirigeants de l'URSS considéraient pouvoir attendre le congrès du parti slovaque prévu le 26 août, mais les conspirateurs tchécoslovaques « requirent spécifiquement une intervention pour la nuit du 20 août »[12].

Le plan devait se dérouler ainsi. Un débat aurait lieu à la suite d'un rapport de Kašpar sur l'état du pays, au cours duquel les conservateurs insisteraient pour que Dubček présentent les deux lettres qu'il avait reçues de l'Union soviétique, lettres qui mentionneraient les promesses qu'il avait faites lors des entretiens de Cierná nad Tisou mais qu'il n'avait pas tenues. La dissimulation de ces lettres par Dubček, et sa mauvaise volonté à honorer ses promesses conduirait à demander un vote de confiance que les conservateurs, alors majoritaires, gagneraient, leur permettant de s'emparer du pouvoir et de réclamer l'assistance des Soviétiques pour prévenir la contre révolution[N 1]. Tout ce que l'URSS devait faire était d'éliminer la résistance des militaires tchécoslovaques[13].

Ayant ce plan en tête, la réunion du Politburo du PCUS les 16 et 17 août vota la résolution de « fournir l'aide au Parti communiste et au peuple tchécoslovaque par l'emploi de forces militaires »[13]. Lors de la réunion du 18 août du Pacte de Varsovie, Brejnev annonça que l'intervention se déroulerait dans la nuit du 20 août, et demanda le « support fraternel », que les dirigeants de la Bulgarie, de la RDA, de la Hongrie et de la Pologne acceptèrent d'accorder.

Cependant, le coup de force ne put se dérouler comme prévu. Kolder voulait revoir le rapport de Kašpar au début du meeting, mais Dubček et Špaček, suspicieux envers Kolder, ajustèrent l'agenda pour que l'organisation du prochain 14e congrès du Parti soit discutée avant tout débat sur les réformes ou sur le rapport de Kašpar. Les discussions traînèrent en longueur, et avant que les conspirateurs aient eu une chance de demander le vote, les premières informations sur l'invasion arrivèrent au Présidium[14]. Un message d'alerte anonyme fut en effet transmis par l'ambassadeur en Hongrie, Jozef Púčik, approximativement six heures avant que les troupes soviétiques ne passent la frontière[14]. Quand les nouvelles se confirmèrent, la solidarité entre les conservateurs disparut. Lorsque le Présidium proposa une déclaration condamnant l'invasion, deux membres clés de la conspiration, Jan Pillar et Frantíšek Barbírek, changèrent de camp pour soutenir Dubček. Avec leur aide la déclaration s'opposant à l'invasion passa avec une majorité de sept voix contre quatre[12].

Une lettre d'invitation

Bien que la nuit de l'invasion, le Présidium du PCT déclara que les troupes du Pacte de Varsovie avaient franchi les frontières sans que le gouvernement tchécoslovaque ne le sache, la Pravda publia la requête non signée, attribuée à des dirigeants du parti tchécoslovaque et de l'État, en faveur d'une « assistance immédiate, incluant assistance des forces armées »[14]. Lors du 14e Congrès du PCT, réuni clandestinement aux lendemains de l'intervention, il fut souligné qu'aucun membre de la direction n'avait sollicité d'intervention. À cette époque, la plupart des commentateurs croyaient que cette lettre n'existait pas ou était un faux.

Pourtant, au début des années 1990, le gouvernement soviétique donna au nouveau président tchécoslovaque, Václav Havel, une copie de la lettre d'invitation adressée aux autorités soviétiques et signée par les membres du PCT : Biľak, Švestka, Kolder, Indra et Kapek. Ils proclamaient que les médias « droitistes » « fomentaient une vague de nationalisme et chauvinisme, et provoquaient une psychose anti-communiste et anti-soviétique ». Elle demandait formellement aux Soviétiques de « prêter support et assistance avec tous les moyens à leur disposition » pour sauver la République socialiste tchécoslovaque « du danger imminent de contre-révolution »[12].

Un article des Izvestia en 1992 précisa que le candidat membre du Présidium Antonin Kapek donna lui aussi une lettre à Léonid Brejnev lors des entretiens soviéto-tchécoslovaques de Čierna nad Tisou fin juillet 1968 qui demandait une « aide fraternelle ». Une seconde lettre fut sensément remise par Biľak au leader du parti bulgare Petro Shelest pendant la conférence de Bratislava début août « dans un rendez-vous arrangé par le chef de station du KGB dans les toilettes du Centre »[12]. Cette lettre était signée par les mêmes cinq noms que dans la lettre de Kapek, mentionnée ci-dessus.

Intervention

La plaque commémorative de Košice, en Slovaquie.

Vers 23 heures le 20 août 1968[15], les armées de cinq pays du Pacte de Varsovie (Union soviétique, Bulgarie[16], Pologne, Hongrie, et RDA) envahirent la Tchécoslovaquie. Cette nuit là, 200 000 soldats et 2 000 blindés pénétrèrent dans le pays[17].

Impréparation tchécoslovaque

Le régime Dubček n'avait pris aucune mesure pour parer une invasion potentielle, en dépit de mouvements alarmants des troupes du Pacte. Les dirigeants tchécoslovaques estimaient que l'Union soviétique et ses alliés ne lanceraient pas une invasion, et croyaient que le sommet de Čierna nad Tisou avait aplani les différents entre les deux parties[18].

Ils croyaient aussi qu'une invasion serait politiquement trop coûteuse, en raison d'un large soutien aux réformes et du fait que l'ampleur des réactions internationales serait trop importante, particulièrement avec l'approche de la Conférence mondiale communiste de novembre 1968. La Tchécoslovaquie aurait pu accroître le coût de l'invasion en battant le rappel du support international ou en réalisant des préparations militaires comme en bloquant routes et aéroports, mais ils décidèrent de s'abstenir, ouvrant la voie à une invasion facile[19].

Offensive du 21 août

L'invasion était bien préparée et coordonnée. Dès le lendemain de l'attaque terrestre, une division aéroportée soviétique (VDV) s'emparait de l'aéroport international de Prague Ruzyne dans les premières heures du lendemain. Ensuite, un vol spécial de Moscou débarqua une centaine d'agents en civil qui sécurisèrent rapidement l'aéroport et ouvrirent le chemin pour les transports massifs des Antonov An-12 débarquant des troupes équipées d'artillerie et de blindés légers.

Pendant que les opérations sur l'aéroport continuaient, des colonnes de chars et de troupes motorisées se dirigeaient vers Prague et les principales villes sans rencontrer de résistance. La très grande majorité des forces d'invasion étaient russes. Les autres participants comprenaient 28 000 soldats[20] de la 2e armée polonaise, provenant du district militaire de Silésie, commandée par le général Florian Siwicki ; quant aux troupes hongroises, peu nombreuses, elles furent retirées avant le 31 octobre[21]. Les troupes roumaines ne prirent pas part à l'invasion[22], pas plus que celles d'Albanie, qui par ailleurs se retira du Pacte de Varsovie à cette occasion[23]. Le degré réel de participation de l'armée est-allemande (NVA) fut sans doute très faible : soit ses unités furent retirées en quelques jours[24], soit elles franchirent à peine les frontières[25].

Lors de l'offensive des armées du Pacte, 72 Tchèques et 19 Slovaques furent tués[26] et des centaines de soldats furent blessés.

Alexandre Dubček demanda à son peuple de ne pas résister.

Protocole de Moscou

Article détaillé : Protocole de Moscou.

Le 21 août au matin, Dubček et les autres réformateurs furent arrêtés, et mis dans un avion pour Moscou. Ils furent mis au secret et interrogés pendant plusieurs jours[27].

Les conservateurs demandèrent au président Ludvík Svoboda de créer un « gouvernement d'urgence » mais puisqu'ils n'avaient pas obtenu une claire majorité pour les supporter, celui-ci refusa. De plus, lui et Gustáv Husák se rendirent à Moscou le 23 août insistant pour que la libération de Dubček et Černík soit incluse dans une solution au conflit. Après des jours de négociations, la délégation tchécoslovaque accepta le « Protocole de Moscou », et signa le 16 octobre son engagement à appliquer ses quinze points[28]. Le Protocole demandait la suppression des groupes d'opposition, le total rétablissement de la censure, et la mise à l'écart des cadres ouvertement réformistes[13]. Il ne caractérisa cependant pas la situation en Tchécoslovaquie comme « contre révolutionnaire » ni ne demanda un retour en arrière sur tous les évènements qui s'étaient produits depuis janvier[13].

Réactions

En Tchécoslovaquie

L'opposition du peuple à l'intervention soviétique s'exprima dans de très nombreux actes spontanés de résistance non violente. À Prague comme dans d'autres villes dans le pays, Tchèques et Slovaques accueillirent les soldats du Pacte avec de nombreux quolibets et des reproches véhéments. Toute forme d'assistance, y compris la fourniture d'eau ou de provisions, fut refusée aux envahisseurs. Des signes, affiches, et graffiti peints ou posés sur les murs et les chaussées les dénonçaient, ainsi que les dirigeants soviétiques et les collaborateurs. Des photographies de Dubček et Svoboda apparurent dans les rues. Les citoyens tchécoslovaques donnaient de fausses directions aux soldats, et les panneaux de rues furent enlevés[29].

Au début, des civils essayèrent de discuter avec les troupes d'invasion, mais ne rencontrèrent que peu de succès. Après que les autorités soviétiques se servirent de photographies de ces discussions comme preuve que les envahisseurs étaient bien accueillis, des stations de radio clandestines découragèrent ces pratiques, rappelant à la population que les « images sont silencieuses »[30]. Les protestations en réaction à l'invasion durèrent seulement environ sept jours. Les explications sur la disparition progressive de ces manifestations publiques furent principalement mises sur le compte de la démoralisation de la population, soit en raison de la présence massive et intimidante des troupes et des blindés, soit à cause du sentiment d'abandon par leurs dirigeants. Beaucoup de Tchécoslovaques virent dans la signature du protocole de Moscou une trahison[31]. Une autre explication fréquente vient du fait qu'une grande part de la société étant formée de gens de la classe moyenne, le coût de la résistance continue aurait impliqué la fin d'un style de vie correct, un prix à payer jugé trop élevé[32].

Mémorial à Jan Palach et Jan Zajíc sur la place Venceslas à Prague.

Cependant, la résistance généralisée poussa l'Union soviétique a abandonner son plan initial de chasser le premier Secrétaire. Après la signature du Protocole de Moscou, la plupart des réformateurs retournèrent à Prague le 27 août, et Dubček garda son poste de premier secrétaire du Parti jusqu'à ce qu'il soit poussé à la démission l'année suivante.

Le 19 janvier 1969, un étudiant, Jan Palach, s'immola sur la place Venceslas à Prague pour protester contre la suppression de la liberté de parole.

Finalement, le 17 avril 1969, Dubček fut remplacé comme Premier Secrétaire par Gustáv Husák, et la période dite de « Normalisation » débuta. Les pressions de l'URSS s'exercèrent pour contraindre les hommes politiques à confirmer leur loyauté ou à s'écarter du pouvoir. En fait, le même groupe qui élut Dubček et mit les réformes en place fut à peu près le même qui annula le programme et remplacèrent Dubček par Husák. Husák mis un terme aux reformes, purgea le parti des éléments libéraux et renvoya les élites professionnelles et intellectuelles qui s'exprimaient de façon ouverte contre le nouveau cours politique des fonctions publiques et des emplois.

L'invasion fut suivie d'une vague d'émigration, essentiellement de personnes très qualifiées, à une échelle jamais vue auparavant et interrompue peu de temps après (estimation : 70 000 sur le champ et 300 000 au total[33]). Les pays occidentaux permirent à ces personnes d'immigrer sans complications.

Dans les autres pays de l'Est

Une des banderoles de protestation « pour votre Liberté et la nôtre ».

Le premier pays à réagir contre l'invasion était l'Albanie qui se retira à cette occasion du Pacte de Varsovie.

De nombreuses personnes en Union soviétique désapprouvèrent l'invasion. Le 25 août, sur la place Rouge, huit protestataires déployèrent des banderoles avec des slogans anti-invasion. Les manifestants furent arrêtés et ensuite réprimés ; leur protestation fut caractérisée comme « anti-soviétique »[34],[35].

Ryszard Siwiec s'immole en Pologne.

Dans la République populaire de Pologne, le 8 septembre 1968, Ryszard Siwiec s'immola lors d'un festival des moissons au Stade du 10e-Anniversaire de Varsovie en protestation contre l'intervention en Tchécoslovaquie et le totalitarisme communiste[36],[37]. Siwiec ne survécut pas[36].

L'impact de l'invasion sembla plus important dans la Roumanie communiste, qui ne prit pas part à l'attaque militaire. Nicolae Ceaușescu, déjà un opposant déterminé à l'influence soviétique et l'un des seuls à s'être déclaré favorable à Dubček, critiqua durement les politiques soviétiques en termes violents dans un discours public à Bucarest le jour de l'invasion.

Alors que la Roumanie s'engagea brièvement du même côté que le dirigeant de la Yougoslavie, Josip Broz Tito, l'alliance était purement conjoncturelle (Ceauşescu était depuis longtemps au principe du « Socialisme à visage humain »). Cela renforce la voie indépendante de la Roumanie dans la décennie qui suit, particulièrement lorsque Ceauşescu encouragea la population à prendre les armes pour s'opposer à toute manœuvre de ce genre dans le pays : il reçut une réponse enthousiaste, beaucoup de gens, même non-communistes, se portèrent volontaires pour s'enrôler dans les Gardes patriotiques.

En RDA, l'invasion souleva un vrai mécontentement parmi ceux qui avaient pensé que la Tchécoslovaquie aurait ouvert la voie vers un socialisme plus libéral. Cependant, les protestations – isolées – furent rapidement réprimées par la police est-allemande et par la Stasi[38].

À l'ONU

La nuit de l'invasion, le Canada, le Danemark, la France, le Paraguay, le Royaume-Uni et les États-Unis demandèrent la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies[39]. Le 21 août après-midi, le conseil se réunit pour entendre l'ambassadeur tchécoslovaque Jan Muzik dénoncer l'invasion. L'ambassadeur soviétique Jacob Malik insista pour dire que les actions du Pacte de Varsovie étaient une « assistance fraternelle » contre les « forces antisociales »[39].

Le jour suivant, plusieurs pays proposèrent une résolution condamnant l'intervention et appelant au retrait immédiat des troupes. L'ambassadeur américain George Ball, expliqua que « la sorte d'assistance fraternelle que l'Union soviétique apportait ressemblait à l'aide que Caïn donnait à Abel »[39].

Manifestation à Helsinki contre l'invasion.

Ball accusa les délégués russes d'obstruction parlementaire pour reporter le vote jusqu'à ce que l'invasion soit terminée. Malik continua à parler, usant d'arguments sur l'exploitation par les Américains des matières premières d'Amérique latine ou des statistiques sur le négoce des marchandises tchèques[39]. Finalement un vote intervint. Dix membres supportèrent la motion ; l'Algérie, l'Inde et le Pakistan s'abstinrent ; l'URSS (usant de son droit de veto) et la Hongrie s'y opposèrent. Les délégués canadiens introduisirent immédiatement une autre motion demandant qu'un représentant de l'ONU se rende à Prague et travaille à la libération des dirigeants tchécoslovaques emprisonnés[39]. Malik accusa les pays occidentaux d'hypocrisie, demandant « qui noie les champs, les villages et les villes du Viêt Nam dans le sang ? »[39]. Au 26 août, un autre vote n'avait toujours pas eu lieu, mais un nouveau représentant tchécoslovaque demanda que le sujet soit retiré de l'ordre du jour.

La position des États-unis aux Nations unies était un peu compromise par sa propre politique en Amérique centrale. Trois auparavant, les délégués américains avaient insisté pour plaider que l'élimination par la force d'un gouvernement de gauche en République dominicaine était un sujet qui relevait du seul ressort de l'Organisation des États américains (OEA) sans interférence de l'ONU, dans le droit fil de la doctrine Monroe. L'OEA accepta de dire que l'adhésion aux thèses du Marxisme-léninisme était assimilée à une attaque armée justifiant l'auto-défense des États-Unis[39]. L'implication croissante des Américains dans la Guerre du Viêt Nam conduisit le Secrétaire général des Nations unies U Thant à tirer d'autres conclusions, suggérant que « si les Russes bombardaient et arrosaient au napalm les villages de Tchécoslovaquie », il pourrait être beaucoup plus virulent dans sa dénonciation[39].

Dans le reste du monde

En fait, les pays occidentaux en restèrent à une critique purement vocale : les dirigeants de l'Ouest étaient convaincus que dans le contexte de la guerre froide, il était impossible de contredire les actions militaires russes en Europe centrale sans courir un risque de guerre nucléaire.

En Finlande, un pays neutre dans la sphère d'influence soviétique à cette période, l'occupation créa un immense scandale. Le parti communiste finlandais dénonça l'occupation. Cependant, le président de la Finlande Urho Kekkonen fut le premier dirigeant occidental à visiter officiellement la Tchécoslovaquie après août 1968 ; il reçut la plus haute distinction du pays des mains du président Ludvík Svoboda, le 4 octobre 1969.

Impact dans les partis communistes

La plupart des partis communistes des pays occidentaux, comme le Parti communiste italien et le Parti communiste français[40], condamnèrent l'intervention. La répression par l'URSS du Printemps de Prague voit le PCF se démarquer pour la première fois officiellement de la politique soviétique. Ce parti désapprouve l'intervention sans pour autant la condamner fermement[N 2]. Cette ambiguïté l'éloigne d'un certain nombre de militants, en particulier des cercles intellectuels qui lui étaient restés favorables. Ainsi, Jean Ferrat, compagnon de route sans jamais avoir été membre du PCF[41], prend ses distances avec Moscou et, en 1969, avec sa chanson Camarade, sur l'album du même nom, dénonce l’intervention[42].

Le secrétaire général du Parti communiste portugais Álvaro Cunhal est sans doute le seul dirigeant politique des pays de l'Ouest à avoir soutenu l'invasion.

Notes et références

Notes

  1. C'est cette requête formelle, rédigée à Moscou, que publia la Pravda le 22 août, sans qu'y figurent les signatures.
  2. « Le Bureau politique du Parti communiste français […] exprime sa surprise et sa réprobation à la suite de l'intervention militaire en Tchécoslovaquie. […] Le Parti communiste français n'a cessé de lutter dans ce sens en faisant connaître son opposition à toute intervention militaire venant de l'extérieur. », communiqué du PCF publié dans L'Humanité du 22 août 1968. Dans : Roland Leroy (dir.), Un siècle d'Humanité, 1904-2004, Le Cherche-Midi, 2004.

Références

  1. L'invasion Soviétique de la Tchécoslovaquie
  2. L'invasion de 1968, Aktuálně.cz
  3. August 1968 - Les Victimes de l'Occupation - Ústav pro studium totalitních režimů
  4. (en) Glenn Chafetz, Gorbachev, Reform, and the Brezhnev Doctrine: Soviet Policy Toward Eastern Europe, 1985-1990, Westport, Praeger Publishers, 1993, 1re éd. (ISBN 978-0-275-94484-1) (LCCN 92031848) [lire en ligne (page consultée le 2009-10-09)] 
  5. Karen Dawisha, « The 1968 Invasion of Czechoslovakia: Causes, Consequences, and Lessons for the Future », Soviet-East European Dilemmas: Coercion, Competition, and Consent, de Karen Dawisha et Philip Hanson, New York, Homs and Meier Publishers Inc, 1981
  6. Jiri Valenta, Soviet Intervention in Czechoslovakia, 1968: Anatomy of a Decision, Baltimore, MD, Johns Hopkins University Press, 1979
  7. Jiri Valenta, « From Prague to Kabul », International Security 5, 1980, p. 117
  8. Valenta (Fn. 7), p. 17
  9. Dawisha (Fn. 6), p. 10
  10. Émission de Eduard Stehlik sur les manœuvres militaires russes de 1968 sur la radio Tchèque [1]
  11. Article de la radio tchèque
  12. a, b, c, d et e Kieran Williams, The Prague Spring and its aftermath: Czechoslovak politics 1968-1970, Cambridge, Cambridge University Press, 1997.
  13. a, b, c et d Jaromír Navratíl, et al., eds. « The Prague Spring 1968: A National Security Archive Documents Reader », Budapest, Central European University Press, 1998.
  14. a, b et c H. Gordon Skilling, Czechoslovakia’s Interrupted Revolution, Princeton, Princeton University Press, 1976
  15. Russians march into Czechoslovakia, The Times (21 août 1968). Consulté le 27 mai 2010.
  16. Czechoslovakia 1968 "Bulgarian troops" - Google Books
  17. Washington Post (édition finale), 21 août 1998, page A11
  18. Jiri Valenta, « Could the Prague Spring Have Been Saved », Orbis 35, 1991, p. 597
  19. Valenta (Fn. 23), p. 599
  20. Jerzy Lukowski, Hubert Zawadzki: A Concise History of Poland, 2006
  21. Czechoslovakia 1968 "Hungarian troops" - Google Books
  22. Soviet foreign policy since World ... - Google Books
  23. 1955: Communist states sign Warsaw Pact, BBC News (14 mai 1955). Consulté le 27 mai 2010.
  24. Czechoslovakia 1968 "East german troops" - Google Books
  25. (de) Charmian Brinson, Richard Dove, « Stimme Der Wahrheit », BBC, 2003
  26. Springtime for Prague, Prague-Life.com
  27. Vladimir Kusin, From Dubcek to Charter 77, New York, St. Martin’s Press, 1978, p. 21
  28. « Printemps de Prague », V. C. Fisera, in Encyclopédia Universalis, 2009
  29. John Keane, Vaclav Havel: A Political Tragedy in Six Acts, New York, Basic Books, 2000, p. 213
  30. Erich Bertleff, Mit bloßen Händen - der einsame Kampf der Tschechen und Slowaken 1968, Verlag Fritz Molden 
  31. Alexander Dubcek, Hope Dies Last, New York, Kodansha International, 1993, p. 216
  32. Williams (Fn. 25), p. 42
  33. "Day when tanks destroyed Czech dreams of Prague Spring" (Den, kdy tanky zlikvidovaly české sny Pražského jara), Britské Listy (British Letters)
  34. Lettre de Youri Andropov au Comité Central à propos de la manifestation, 5 septembre 1968, dans les archives de Vladimir Boukovski (PDF, facsimile, en russe), JHU.edu
  35. Andropov au Comité Central. La manifestation de la Place rouge contre l'invasion. 20 Septembre 1968, dans les archives d'Andrei Sakharov, en Russe et traduction en anglais, Yale.edu
  36. a et b (en) Hear my cry, www.culture.pl. Consulté le 2008-08-22
  37. (en) Czech Prime Minister Mirek Topolánek honoured the memory of Ryszard Siwiec, www.vlada.cz, Press Department of the Office of Czech Government. Consulté le 2008-08-22
  38. (de) Bundeszentrale für politische Bildung: Die versäumte Revolte: Die DDR und das Jahr 1968 - Ideale sterben langsam
  39. a, b, c, d, e, f, g et h Thomas M. Franck, Nation Against Nation: What Happened to the U.N. Dream and What the U.S. Can Do About It, New York, Oxford University Press, 1985 (ISBN 0-19-503587-9)
  40. Kevin Devlin, Western CPs Condemn Invasion, Hail Prague Spring, Open Society Archives
  41. Jean Ferrat est mort, Le Monde, le 13 mars 2010.
  42. Disparition de Jean Ferrat, par L'Express, avec AFP, le 13 mars 2010.

Annexes

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Bibliographie

  • François Fejtö, Histoire des démocraties populaires, 2. Après Staline, Seuil, 1992, 378 p., Points Histoire, (ISBN 2020144441)
  • Joseph Koudelka, Prague 1968, Cnp Éditeur, coll. « Photo notes », 1999 (ISBN 2067540623) 
  • Günter Bischof, et autres, The Prague Spring and the Warsaw Pact Invasion of Czechoslovakia in 1968, Lexington Books, 2010, 210 pages (ISBN 978-0-7391-4304-9).
  • Kieran Williams, Civil Resistance in Czechoslovakia: From Soviet Invasion to "Velvet Revolution", 1968-89, in Adam Roberts and Timothy Garton Ash (éditeurs), Civil Resistance and Power Politics: The Expereience of Non-violent Action from Gandhi to the Present Oxford University Press, 2009, pp. 110–126 (ISBN 978-0-19-955201-6).
  • Philip Windsor, Adam Roberts, Czechoslovakia 1968: Reform, Repression and Resistance, Londres, Chatto & Windus ; New York, Columbia University Press, 1969, 200 pages.

Articles connexes



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