Torturés

Torturés

Torture

La torture est l'imposition volontaire de sévices d'ordre physique ou psychologique qui visent à faire souffrir un individu. Lorsque la torture accompagne l'exécution d'une condamnation à mort on parle plutôt de supplice, qui rend la mort longue et douloureuse sous forme de châtiment.

La torture est aussi un moyen employé pour obtenir des aveux ou terroriser des populations ou des organisations, en ciblant des membres d'un groupe de personnes particulier, afin que les autres restent passifs de peur d'être victimes à leur tour. Les actes de torture produisent le plus souvent des séquelles physiques (ex : mutilations) et psychologiques (ex : traumatismes). Du point de vue du tortionnaire (ou bourreau), qui tient sa victime à sa merci, torturer peut répondre à des pulsions sadiques ou simplement s'inscrire dans la soumission à l'autorité (Expérience de Milgram).

La Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée le 10 décembre 1948 par l'ONU, est le premier texte international à déclarer illégale la torture, dans son article 5 : « Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ». Les quatre Conventions de Genève adoptées en 1949 et leurs Protocoles additionnels (1977) prohibent la torture (qui ne s'identifie pas, malgré les ressemblances et les zones d'indiscernabilité, à la notion de « peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant »). D'autres textes internationaux ou régionaux l'ont, dans les années suivantes, interdite également. Le premier est la Convention européenne des droits de l'homme, adoptée en 1950 par le Conseil de l'Europe, qui est le premier traité interdisant la torture (article 3).


Supplice du satyre Marsyas, écorché vif; œuvre romaine de l'époque impériale

Sommaire

Luttes contre la torture

Anton Praetorius édita en 1598 le livre «Von Zauberey und Zauberern Gründlicher Bericht» (de l’étude approfondie de la sorcellerie et des sorciers) manifeste contre la persécution des sorcières et contre la torture. En 1602, lors d’une réédition de ce livre il trouva le courage de le signer de son propre nom. Nouvelle réédition en 1613 et en 1629.

Droit international

La torture est proscrite par le droit international depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Outre la Convention européenne des droits de l’homme, les conventions et traités suivant concernent la torture :

  • le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP, 1966, dans son article 7) ;
  • les Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels de 1977 ;
  • la Convention relative aux droits de l'enfant (1989) ;
  • la Convention américaine relative aux droits de l'homme (1969) ;
  • la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (1981) ;
  • la Charte arabe des droits de l'homme (1994), qui n'est pas encore entrée en vigueur.

La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1984 et entrée en vigueur le 26 juin 1987, présente l'intérêt de la définir pour la première fois et de l'interdire avec précision: voir paragraphe ci-dessous.

En matière de droit international coutumier, des éléments clés de la définition de la torture ont fait l'objet de références officielles : en résumé, elle implique « une douleur ou souffrance aiguës, physique ou mentale », infligées « intentionnellement » par des agents de l'État. La convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture en étend la définition aux cas d'« applications de méthodes visant à annuler la personnalité de la victime ou à diminuer sa capacité physique ou mentale, même si ces méthodes et procédés ne causent aucune douleur physique ou angoisse psychique »[1].

Dans sa jurisprudence, la Cour européenne des droits de l'homme énumère un certain nombre de cas concrets où « torture » et « peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant » se confondent ou se distinguent, développe la notion de « gravité », et précise que « certains actes autrefois qualifiés de "traitements inhumains et dégradants", et non de "torture", pourraient recevoir une qualification différente à l'avenir »[1].

Convention contre la torture de 1984

« La Convention contre la torture autres peines et traitements cruels ou dégradants » définit la torture dans son article 1, comme « tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne. » Elle exige de tout Etat partie qu'il prenne « des mesures législatives, administratives,judiciaires et autres mesures efficaces pour empêcher que des actes de torture soient commis dans tout territoire sous sa juridiction », indiquant « qu'aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit ne justifie la torture », écartant toute invocation d'ordres supérieurs (art.2).

L'article 3 interdit le transfert de toute personne vers un lieu où elle risque la torture et l'article 4 stipule que tous les actes de torture sont définis comme un crime.

Les Etats ont obligation d'enquête lorsqu'une personne soupçonnée de torture se trouve sur leur territoire (art.6), ils doivent exercer leur compétence universelle sur ces personnes et si ces suspects ne sont pas extradés, les Etats doivent soumettre l'affaire à leur ministère public (art.7). Ils doivent ouvrir une enquête prompte et impartiale dès qu'il est soupçonné qu'un acte de torture s'est ou se serait produit sur un territoire relevant de leur compétence.

Les Etats doivent former tous les responsables de l'application des lois à ne pas torturer (art.10); ils doivent fournir des réparations aux victimes (art.14) et exclure de toute procédure judiciaire toute déclaration obtenue sous la torture, sauf pour prouver que la torture a été pratiquée (art.15).

Outils internationaux de prévention de la torture

En décembre 1984 est créé au sein de l'ONU le Comité contre la torture [2]. Le Comité est constitué de 10 experts élus par les Etats parties. Les rapports présentés par les Etats parties sont examinés par le Comité en présence des représentants des Etats intéressés. Le Comité accepte de recevoir des informations pertinentes émises par les organisations non gouvernementales. Après avoir examiné le rapport d'un Etat partie, le Comité établit ses conclusions et recommandations publiées sous la forme d'une déclaration publique à la suite de sa session annuelle se déroulant au mois de novembre.[3]

L'ONU a peu à peu élaboré des outils concernant la prévention de la torture et la nécessité d'assurer aux détenus des conditions de vie humaines, intitulés Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention et d'emprisonnement (1988).

En 1985, un système de compétence universelle à l'échelle du continent américain est mis en place par la Convention américaine pour la prévention et la répression de la torture.

En 1987, le Conseil de l'Europe met en place d'un Comité chargé d'effectuer des inspections dans les lieux de détention situés en Europe.

Des tribunaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda ont été mis en place. En 1998, le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, est adopté. Toutes ces instances sont destinées à juger dans un cadre international les individus accusés de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité ou des faits de génocide, y compris des actes de torture.

Organisations non gouvernementales contre la torture

Il existe une Coalition des ONG internationales contre la Torture (CINAT), qui regroupe Amnesty international, l'Association pour la Prévention de la torture (APT), la Commission Internationale des Juristes (ICJ), la Fédération Internationale de l'Action des Chrétiens pour l'abolition de la Torture (FIACAT), le Conseil International pour la Réhabilitation des victimes de la Torture (IRCT), Redress et l'Organisation Mondiale contre la Torture (OMCT) qui regroupe elle même 200 ONG membres. Human Rights Watch est aussi très connue. Public Committee Against Torture in Israel (PCATI, Comité Public contre la Torture en Israël), est aussi connue, ayant été l'une des parties civiles au procès tenu devant la Cour suprême d'Israël, en 1999 [4]..

En France, la lutte contre la torture est menée par plusieurs associations : les plus notables étant la branche française d'Amnesty international et la ligue des droits de l'homme ; se manifestent aussi l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT), les associations Forum Réfugiés[5] (Centre ESSOR), Parcours d'Exil[6] et l'Association Primo Levi[7] qui proposent « des soins médicaux et psychologiques aux personnes victimes de la torture et de la violence politique et à leurs familles ».

Toutefois, la torture est encore pratiquée de par le monde que ce soit en secret ou sous couvert de législations entretenant un certain flou sur la question. Sur les 153 États et territoires étudiés dans le rapport de 2007 d'Amnesty international au moins 102 avaient eu recours à la torture ou à d'autres mauvais traitements [réf. nécessaire].

Tortures privées

Les malfrats, y compris les organisations terroristes et le crime organisé, utilisent parfois la torture. Les chauffeurs, brûlant les pieds de leurs victimes pour en obtenir le magot, étaient célèbres. Voir par exemple les chauffeurs d'Orgères. Ces actes sont souvent classés parmi les faits divers.

La torture par les institutions

La torture jusqu’au XVIIIe siècle

Au Moyen Âge et jusqu'au XVIIIe siècle en Europe, on considérait la torture comme un moyen légitime d'obtenir des aveux ou des informations de la part des suspects, informations utilisées au cours du procès.

On la considérait aussi comme faisant légitimement partie d'une condamnation à mort, sous le nom de supplice. Par exemple, en France, les frères Gauthier et Philippe d’Aunay furent suppliciés et executés le 12 avril 1314, en place publique à Paris, pour avoir été les amants des épouses des fils du roi de France, Philippe IV le Bel.

L'Inquisition est célèbre pour avoir fait largement usage de la torture ; cette autorité publia même un manuel des inquisiteurs officialisant ces pratiques.

La torture a longtemps été pratiquée dans un cadre juridique.

En France, elle a été abolie par Louis XVI en deux étapes: abolition de la question préparatoire par ordonnance royale du 24 août 1780[8], puis de la question préalable[9], en 1788[10].

Époques moderne et contemporaine

La torture reste une méthode de répression commune dans les dictatures et régimes totalitaires, mais aussi dans des démocraties. L'historien britannique Eric Hobsbawm relève qu'« à l'aube du XXe siècle, la torture avait été officiellement supprimée à travers l'Europe occidentale. Depuis 1945, nous nous sommes de nouveau habitués, sans grande répulsion, à la voir utilisée dans au moins un tiers des États membres de Nations unies, y compris dans quelques uns des plus anciens et des plus civilisés »[11].

Tout au long du XXe siècle siècle, la torture a été pratiquée, que ce soit lors de conflits armés – Seconde Guerre mondiale, guerres de décolonisation (torture pendant la guerre d'Algérie, Opération Phoenix) – ou comme élément d'un système policier répressif à l'échelle nationale ou internationale (Opération Condor, Guerre sale). C'est avec l'émergence des stratégies dites « contre-insurrectionnelles », du concept de « sécurité intérieure », et la création de la figure de l'« ennemi intérieur » – dont il s'agit de contenir les visées subversives – que la torture s'est institutionnalisée dans plusieurs pays au point de l'intégrer dans les cursus de formation des forces de sécurité[12]. En Uruguay dans les années 1960 et 1970, un manuel distribué aux policiers portait comme titre « Comment tenir en vie les torturés »[13].

Au début du XXIe siècle, la torture est une pratique utilisée par nombre de pays.

L'armée russe utilise la torture en Tchétchénie afin d'obtenir les aveux des prisonniers : ils sont battus, brûlés avec des mégots de cigarette et torturés à l'électricité[14].

La torture est pratiquée par la Chine, notamment au Tibet. Wang Zhenchuan, procureur adjoint du parquet suprême de la République populaire de Chine, a admis publiquement en 2006 que « la plupart des erreurs judiciaires en Chine sont la conséquence d'aveux extorqués sous la torture »[15].

En Algérie, la torture est utilisée contre des personnes soupçonnées de détenir des informations concernant des activités terroristes[16].

Torture dans la prison d'Abou Ghraib en 2004.

Etats-Unis

Article détaillé : Etats-Unis et torture.

Enfin, une démocratie comme les États-Unis a légalisé la torture dans le cadre de sa « guerre contre le terrorisme »[17] et a généralisé son utilisation par les services secrets. Les procédés varient : ils usent du procédé appelé extraordinary rendition. Il s'agit d'enlever une personne dont on veut extirper des renseignements et de la débarquer dans un pays où elle pourra être torturé par les agents du pays où elle se trouve. De plus, devant une commission parlementaire américaine, la CIA a reconnu, mardi 5 février 2008, avoir eu recours à la simulation de noyade[18]. Quatre-vingt-douze vidéos d'interrogatoires effectués par la CIA sur des membres présumés d'Al Qaida ont été détruites en 2005, ce qui a suscité, début 2008, une enquête criminelle effectuée par le Département de la Justice [19]. L'administration Obama devrait mettre sur place une commission d'enquête du Sénat sur les interrogatoires et les détentions de la CIA, qui devrait se concentrer sur la question de savoir si ces méthodes dures ont effectivement, ou non, permis d'obtenir des informations, comme l'affirmait l'administration Bush[20].

Méthodes et appareils

Parmi divers instruments de torture, une vierge de fer se trouve sur la droite.

Au Moyen Âge, différentes méthodes de tortures furent utilisées par les bourreaux. Citons entre autres le chevalet, la poire d'angoisse, les brodequins, la torture par l'eau, le supplice de la roue, celui du pal, ou encore celui de la vierge de fer.

Supplice de la chaîne ou par privation de sommeil

La privation de sommeil est très fréquemment employée dans le monde. Elle a été utilisée, entre autres, par la Stasi en RDA, en URSS à partir des années 1930 (période des Grandes Purges)[21] et à Cuba sous Fidel Castro[22], ainsi qu'à la prison de Guantanamo.

Asphyxie par absorption d'eau
Article détaillé : Torture par l'eau.
Torture à l'aide de produits chimiques

Les victimes peuvent être forcées d'ingérer des produits, chimiques ou non (verre pilé...) pour infliger la douleur et des dégâts internes. Des produits irritants peuvent être introduits dans le rectum ou le vagin, ou appliqués sur les parties génitales.

Torture chimique à l'aide de drogues ou de médicaments

La torture chimique peut consister à administrer à une personne une drogue pendant une longue période, provoquant ainsi une forte dépendance, puis un sevrage pénible pouvant durer plusieurs années. L'administration forcée de médicaments est également utilisée, souvent à des doses toxiques, pour punir des dissidents politiques et ou religieux[23]. Des agents chimiques psychotropes donnent la possibilité d’induire à volonté panique, dépression, psychose, délire et douleur extrême[24].

Torture à l'aide de l'électricité
Article détaillé : Gégène.

L’usage du pistolet à impulsion électronique distribué par l'entreprise Taser est mis en cause pour la douleur qu’il cause et le risque mortel qu'il fait courir à ceux qui en sont victimes par des ONG internationales et nationales comme Amnesty international, Human Rights Watch, la Ligue des droits de l’homme ou encore Raid-H. Le « Comité de l’ONU contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » est arrivé à la conclusion, dans sa 39e session (novembre 2007), que l’utilisation de ce pistolet à impulsion électrique « provoque une douleur aigüe constituant une forme de torture »[25]. Une commission d’enquête parlementaire a été créée en France afin de juger des inconvénients de l’outil, parmi lesquels son utilisation comme instrument de torture[26].

Évolution de la notion depuis 1948

Les organes et mécanismes internationaux relatifs aux droits humains, les commissions et les tribunaux régionaux en la matière, les tribunaux pénaux internationaux mis en place pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, ont estimé que certains cas d’atteintes aux droits humains qu’ils examinaient constituaient des actes de torture ou des mauvais traitements venant s’ajouter à l’utilisation ordinaire de la torture en tant que méthode d’interrogatoire[27].

Ces cas concernaient les domaines suivants : actes d’intimidation, privation sensorielle, certaines conditions de détention telles que le surpeuplement excessif, les disparitions (torture pour les victimes et pour leurs familles), destruction délibérée de la maison, expériences médicales ou scientifiques non consenties, expériences biologiques non consenties, châtiments corporels, usage excessif de la force dans les tâches de maintien de l’ordre, discrimination raciale, atteintes aux droits humains commises lors des conflits armés, formes de torture liées au sexe : viols, pratiques culturelles telles que les mutilations génitales féminines, meurtres « d’honneur », avortements forcés, stérilisation forcée.

Les violences faites aux femmes, quelles que soient les circonstances, sont ainsi visées par les textes et les instances de défense des droits humains (TPIY et TPI). Les violences faites aux enfants restent presque toujours impunies [28]. L’application de la peine de mort fait question.

Effets et efficacité

Robert Bonnaud a écrit dans la revue Les Inrockuptibles des 19-25 décembre 2000 :

« Les souffrances infligées par la torture sont morales encore plus que physiques. Elles produisent un formidable réservoir de haine, d'ignobles émulations. »

En 1949, un colonel de l'armée française en poste en Indochine dit au journaliste Jacques Chégaray envoyé sur place par la revue Témoignage chrétien :

« [...] Et puis vous savez, dans les combats de guérilla, l'importance des renseignements. Un prisonnier qui avoue l'endroit précis où est cachée une mine piégée, c'est la vie de dix gars de chez nous qui est sauvée. Il faut y songer. Cette hantise de la mine cachée dans la brousse, c'est terrible. Pouvoir la détecter grâce aux aveux d'un prisonnier, cela nous semble de la bonne guerre. La vie de dix jeunes Français ne vaut-elle pas une heure d'interrogatoire ? »[29]

À propos du « centre de renseignement de la ferme Ameziane à Constantine », Pierre Vidal-Naquet écrit :

« Tous ceux qui y sont passés sont unanimes à dire :
  • que ces tortures font dire tout et n'importe quoi;
  • que les cas de folie sont fréquents;
  • que les traces, cicatrices, suites et conséquences sont durables, certaines même permanentes (troubles nerveux, par exemple) et donc aisément décelables. Plusieurs "suspects" sont morts chez eux le lendemain de leur retour. »[30]

Extrait de la déposition du capitaine Joseph Estoup au procès du lieutenant Daniel Godot, membre de l'OAS et accusé de crime, le 1er août 1962 :

[À propos des soldats tortionnaires] « Lorsque la fin est la seule justification des moyens, cette justification disparaît si la fin n'est pas atteinte. C'est alors le désarroi des souillures tenaces. Et c'est le drame, et ce drame est encore pire lorsque non seulement la fin n'est pas atteinte mais encore, délibérément et subitement, n'est plus recherchée.
Alors deux attitudes sont possibles : ou bien se refaire une lâche vertu dans une garnison paisible ou dans un commandement plein d'honneur, ou dans un complet civil; ou bien, lorsqu'on a du respect humain, chercher jusqu'à la limite à atteindre cette fin qui justifiait les fautes commises.
Si dans les unités d'intervention il s'est trouvé tant de "jusqu'au-boutistes", ce n'est pas parce qu'à force de violence ils seraient devenus violents à la recherche de nouvelles violences. Non. Pour dire cela il faut ne jamais avoir subi de sévices et n'en avoir jamais infligé. Je porte témoignage que, pour une part secrète, tacite, intérieure, tenaillante, mais pour une part importante, c'est parce que ces hommes ne voulaient pas avoir méfait pour rien, et, à la limite, leur attitude est un acte désespéré de damnés qui veulent se venger du démon qui les a menés en enfer. »[30]

Torture et opinion publique

En France

Article détaillé : Droits de l'homme en France.

À travers le monde

Une enquête publiée par un projet de recherche mené par l'université du Maryland[31] auprès de 19 000 ressortissants de 19 pays différents, dans le cadre de la préparation de la journée internationale des Nations unies pour le soutien aux victimes de la torture, a montré que l'usage de la torture était, en 2008, majoritairement rejeté par l'opinion publique internationale[32], sauf en Inde, au Nigeria et en Turquie.

Miguel Benasayag écrivait en 1987 : « la torture constitue un véritable dérapage dans nos sociétés. Car elle est la violation d'un interdit fondamental, celui qui fait l'objet du consensus social fondant la légitimité de l'État de droit : le consensus selon lequel l'État (et ses représentants) ne doit jamais toucher le corps des individus, car l'État occupe précisément la place d'un tiers dont la reconnaissance par les individus-citoyens permet d'éviter la barbarie d'une société fondée sur le rapport duel, celui qui n'est régi que par la loi du plus fort[33]. »

En 2008, la directrice du bureau d’Amnesty International auprès des Nations unies, Yvonne Terlingen, a accusé les États-Unis et l'Europe de ne pas favoriser les opinions opposées à l'usage de la torture à cause de la rhétorique de la guerre contre le terrorisme qu'ils ont employée ou cautionnée[32].

Notes et références

  1. a  et b Amnesty : « Combattre la torture : manuel pour l'action », aux éditions Amnesty International, 2004, ISBN 2-87666-148-9, chapitre 3.
  2. (fr)Le Comité contre la torture sur le site de l'ONU.
  3. « Introduction au Comité contre la torture » sur le site de l'ONU.
  4. Décision de la Cour suprême israélienne de 1999 dans l'affaire Public Committee Against Torture in Israel, etc., sur la torture et les interrogatoires du GSS (ou Shin Bet)
  5. Site de Forum réfugiés
  6. Site de Parcours d'Exil
  7. Site internet de l'Association Primo Levi
  8. AA/29 1780
  9. celle devant faire dénoncer les complices, juste avant l'exécution du condamné
  10. Adolphe de Granier de Cassagnac, Histoire des Causes de la Révolution française, vol. Tome 1, Auguste Pagny, Bruxelles, 1850, 370 p. (OCLC 186926562) [présentation en ligne], p. 184 
  11. Eric Hobsbawm, L'Âge des extrêmes. Histoire du court XXe siècle, 1914-1991, Complexe, 2003, p. 79.
  12. Voir notamment le chapitre « L'internationalisation de la torture » dans Armand Mattelart, La globalisation de la surveillance. Aux origines de l'ordre sécuritaire, La Découvert, 2008, p. 120-136.
  13. Armand Mattelart, op. cit., p. 128-129.
  14. (fr)Dans le huis clos tchétchène, article du quotidien Le Monde daté du 10 mai 2006, signé par Marie Jégo
  15. Bruno Philip, « Chine : le pouvoir reconnaît l'usage de la torture par la police », dans Le Monde du 22/11/2006, [lire en ligne]
  16. Algérie. Pratique persistante de la torture par la Sécurité militaire dans des lieux tenus secrets, Amnesty International, 10 juin 2007
  17. Naomi Klein (trad. Lori Saint-Martin et Paul Gagné), La Stratégie du choc : la montée d’un capitalisme du désastre [« The Shock doctrine. The rise of disaster capitalism »], Léméac/Actes Sud, Paris, 2008, 669 p. (ISBN 978-2-7427-7544-6) , p 59
  18. La CIA admet avoir utilisé la simulation de noyade sur trois détenus, Lemonde.fr avec AFP, 5 février 2008
  19. Maria Newman, C.I.A. Interrogation Tapes, New York Times, 2 janvier 2008 (avec liens vers autres articles sur le sujet)
  20. Mark Mazzeti, Senate Panel to Pursue Investigation of C.I.A., New York Times, 27 février 2009
  21. Anne Applebaum, Pierre-Emmanuel Dauzat (trad.), Goulag : Une histoire, Paris, éditions Bernard Grasset, 2003, 2005, ISBN 2-246-66121-8, p.183
  22. C. Ronsac (dir.), Le livre noir du communisme, 2000, p.769-770
  23. The use of drugs in torture and human rights abuses, Kirschner RH. Am J Forensic Med Pathol. 1984 Dec;5(4):313-5.
  24. Mark Wheelis et Malcolm Dando, « Neurobiology: A case study of the imminent militarization of biology », International Review of the Red Cross, Vol. 87, No. 859, septembre 2005, pp. 553-571, p. 11. Consulté le 25 mars 2008
  25. (en)Report of the Committee against Torture (5-23 Novembre 2007) p 32 paragraphe Use of "TaserX26" wapons.
  26. « Proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur la dangerosité des pistolets à impulsions électriques TASER » à la séance du 15 octobre 2008 du Sénat français, document dans lequel il est question du Comité contre la Torture de l'ONU et de sa condamnation du pistolet Taser.
  27. Combattre la torture par Amnesty international, chapitre 3, p 50 à 52.
  28. « Enfants torturés, des victimes trop souvent ignorées » publié par Amnesty international, p 34 et 35.
  29. Texte publié dans cet hebdomadaire le 29 juillet 1949. Citation extraite du livre les crimes de l'armée française de Pierre Vidal-Naquet, réédité aux éditions « La Découverte & Syros », Paris 2001, ISBN 2-7071-3406-6
  30. a  et b Citation extraite du livre les crimes de l'armée française de Pierre Vidal-Naquet
  31. (en) World Publics Reject Torture, 24 juin 2008, WorldPublicOpinion.org. Consulté le 25 juin 2008
  32. a  et b (fr) Conférence de presse conjointe en vue de la journée internationale des Nations unies pour le soutien aux victimes de la torture sur un.org, 24 juin 2008, Organisation des Nations unies. Consulté le 25 juin 2008
  33. Miguel Benasayag, « Utopie et certitude ou le doux-leurre de la certitude », Matériaux pour l’histoire de notre temps, 1987, n° 1, p. 8. [lire en ligne]

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Ouvrages

  • Amnesty international, DUDH: 60 ans après, 2008.
  • Amnesty international, Combattre la torture, éditions Francophones d'Amnesty International (EFAI), 2004. ISBN 2-87666-148-9.
  • Amnesty international, Enfants torturés, Des victimes trop souvent ignorées, EFAI. ISBN 2-87666-118-7.
  • Darius M. Rejali, Torture and democracy, Princeton University Press, 2007.
  • Françoise Sironi, Bourreaux et victimes : psychologie de la torture, Odile Jacob, 1999.
  • Michel Terestchenko, Du bon usage de la torture : Ou comment les démocraties justifient l'injustifiable, La Découverte, 2008.

Articles

  • Pierre Clastres, « De la Torture dans les sociétés primitives », L'Homme, 1973, n° 3, p. 114-120. [lire en ligne]
  • Marc Hecker, "Du bon usage de la terreur", Focus stratégique, Paris, Ifri, avril 2008.
  • Françoise Sironi et Raphaëlle Branche, « La torture aux frontières de l’humain », Revue internationale des sciences sociales, 2002/4, n° 174, p. 591 à 600. [lire en ligne]

Liens externes

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