- Abus De Droit
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Abus de droit
L'abus de droit est une notion juridique qui permet de sanctionner tout usage d'un droit qui dépasse les bornes de l'usage raisonnable de ce droit. Elle existe dans la plupart des systèmes juridiques dits de droit civil (droit suisse, français, belge, luxembourgeois, italien, néerlandais, ...).
En France
La jurisprudence a dégagé plusieurs critères pour déterminer quand l'usage d'un droit peut être considéré comme abusif. Ces critères sont variés et non cumulatifs, aussi s'agit-il plus de lignes directices qu'autre chose. Ainsi peut-on dire qu'abuse de son droit toute personne qui, entre plusieurs manières d'exercer son droit qui lui procurent le même bénéfice, choisit l'usage le plus dommageable pour les tiers.
Dégagée au XIXe siècle par la jurisprudence, la théorie de l'abus de droit correspond finalement à deux grandes formes d'abus : l'abus-social et l'abus-intention-de-nuire. L'abus social est l'acte de détourner un droit vers une fin illégitime, contraire à l'objectif poursuivi par ce droit. Est ainsi sanctionnée comme abusive la grève qui n'a pas pour finalité la satisfaction de revendications professionnelles mais la modification d'une politique gouvernementale[1]. En pratique les préavis de grève en France invoquent des intérêts professionnels. Quant à l'abus-intention-de-nuire, il correspond à l'emploi d'un droit dans la seule intention de nuire à autrui. Une illustration typique est la construction de hautes palissades sur un terrain voisinant un espace de décollage de dirigeable, dans le but d'en gêner le fonctionnement et ainsi forcer son voisin à racheter le terrain.
Au fil de la jurisprudence, l'abus-intention-de-nuire a semblé prendre le pas sur l'abus-social, mais ce n'est qu'une apparence. En réalité, l'abus-social est un important outil d'évolution juridique entre les mains des tribunaux qui s'en servent pour faire évoluer des notions de droit en réinterprétant les objectifs des textes législatifs, selon les évolutions sociales qui les entourent.
Par exemple, c'est par le jeu de l'abus-social qu'on a pu dégager le principe alors contra legem de l'indemnisation de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée à la fin du XIXe siècle. Commençant par indemniser les travailleurs en qualifiant certains licenciements d'abusifs, c'est peu à peu que le droit a déterminé les critères qui finissaient par émerger de la jurisprudence.
L'abus de droit est donc tout à la fois un instrument limitant la portée des droits qui peuvent être consentis à une personne juridique, et un important outil d'évolution juridique entre les mains des juges.
Il s'agit aussi d'un concept fiscal utilisé par l'administration fiscale afin de remettre en cause des montages "fictifs" ou dont le but est exclusivement fiscal.
Un ancien arrêt de la Cour de Colmar (au sujet d'une affaire de fausse cheminée destinée à nuire à un voisin) constitue un exemple célèbre de la constation d'un d'abus de droit (Colmar, 2 mai 1855, D.P., 1856, 2, 9).
Voir aussi
- Arrêt fondateur en France : Cass. req., 3 août 1915, pourvoi no00-02378, Clément-Bayard ; extrait :
« [...] il ne peut y avoir abus de droit que si le propriétaire exécute chez lui, sans aucun profit pour lui même, un acte qui apporte un trouble au propriétaire du fonds voisin restant dans les limites de sa propriété [...] »
Notes
- ↑ Chambre sociale 10 mars 1961. Voir Les obligations, Terré, §742c ou cet article de dinersroom
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