François Mazzuoli

François Mazzuoli

Parmigianino

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Autoportrait, 1524, Vienne, Kunsthisthorisches Museum

Girolamo Francesco Maria Mazzola ou Mazzuoli dit il Parmigianino surnommé le Parmesan en français (Parme, 11 janvier 1503 - Casalmaggiore, 24 août 1540), est un peintre italien de la Renaissance.

«  Pour explorer les subtilités de lart, il entreprit un jour de faire son autoportrait, en se regardant dans un de ces miroirs de coiffeur, de ceux en boule convexe. Ce faisant, voyant les effets bizarres que provoque la convexité du miroiril lui prit lenvie de contrefaire toute chose selon son caprice. Donc, après avoir fait faire au tour une boule de bois, et lavoir divisée en demi-boule de taille semblable à celle du miroir, il entreprit avec grand art dy reproduire tout ce quil voyait dans le miroir et en particulier lui-mêmeEt puisque tous les objets qui sapprochent du miroir grossissent et que ceux qui sen éloignent rapetissent, il y fit une main qui dessinait un peu grande, comme la montrait le miroir, et si belle quelle paraissait très vraie ; et comme Francesco avait belle apparence et le visage gracieux, plus celui dun ange que dun homme, son effigie sur cette boule avait quelque chose de divin. »

— Giorgio Vasari, Vita di Francesco Mazzuoli pittore parmigiano

Sommaire

Biographie

La formation

D'après les archives du Baptistère de Parme, Parmigianino est le 11 janvier 1503. Son père est le peintre Filippo Mazzola et sa mère - comme le confirment d'autres documents - Maria di ser Guglielmo. Il est le huitième d'une famille de neuf enfants et fut baptisé deux jours après sa naissance au Baptistère.

Les Mazzola, originaires de Pontremoli, s'étaient établis à Parme dès 1305. Ses oncles paternels, Pier Ilario et Michele, étaient également peintres. À la mort de Filippo, qui survint selon Vasari en 1505, ils prennent soin de Francesco et le dirigent vers l'étude du dessin et de la peinture. « Vieux et peintres de peu de renom » d'après Vasari, ses oncles sont en effet de modestes artistes, répétant une peinture provinciale d'origine ferraroise. Ils savent lui enseigner le bagage technique indispensable à un apprenti. Il doit son éducation artistique à ses oncles même s'il est guidé par de nombreux exemples dans sa formation artistique avec les artistes de Parme, tels que les fresques du Corrège et de Michelangelo Anselmi. Grâce à un sens inné de l'observation, le Parmesan est capable danalyser les œuvres des Lombards opérants à Crémone, tels que Altobello Melone, Giovanni Francesco Bembo et surtout Le Pordenone. En observant les artistes de la région, qui n'auront peu ou pas d'incidences dans sa peinture, il a su trouver ses sources dinspiration.

Vasari le considère déjà comme un peintre autonome quand il est encore adolescent, en soutenant que « à l'âge de seize ans, après avoir fait des miracles en dessin, il fit un tableau de son invention, un Saint Jean baptisant le Christ, qu'il mena d'une façon telle, qu'encore qui le voit reste étonné qu'un garçon eût conduit si bien une telle chose. Ce tableau fut placé à Parme, à la Nunziata, sont les moines des Zoccoli ».

Les vicissitudes de ce Baptême de Christ, daté à peu près de 1519, sont chaotiques. Lors de la destruction de l'église de la Nunziata, le tableau est sauvé et déplacé vers une autre église appartenant à la même Confrérie des Zoccolanti qui le vendent en 1706 - quand la tradition l'attribue encore à Parmigianino âgé de quatorze ans - au comte Carlo Sanvitale. Par la suite, il est volé et passe en Angleterre, il fut acquis par le Bode Museum de Berlin en 1821.

Il lui est encore attribué par l'Allemand Voss en 1923, mais aujourd'hui sa paternité est contestée par la plupart des spécialistes, dont certains n'y voient même pas la main d'un peintre italien. Pourtant dans les formes archaïsantes du tableau, on a voulu voir un écho corrégien avec une référence aux figures de son retable de la Madone se trouvant dans l'église de San Francesco à Correggio et maintenant à Dresde. On peut également y voir l'influence de la peinture de Francesco Francia, exprimée avec les moyens pas encore mûrs du très jeune artiste. Beaucoup de biographes, de Vasari aux plus modernes, voient le Parmesan comme un élève du Corrège, et, en tout cas, il fut fortement influencé par ce maître, comme on va le voir dans tout ce qui suit.

La guerre entre les armées de l'empereur Charles V et celle de François Ier dévaste le nord de l'Italie et s'approche de Parme en 1521 ; les oncles envoient Francesco, avec leur apprenti Girolamo Bedoli, qui en 1529 épouse Caterina Elena Mazzola fille de Pier Ilario à Viadana, Parmigianino, écrit Vasari, peignit « deux bois à détrempe, un Saint François qui reçoit les stigmates et Sainte Claire », à l'église des moines des Zoccoli, et l'autre, un Mariage de sainte Catherine , comportant beaucoup de figures, à San Pietro. Et personne ne doit croire que celles-ci sont des œuvres d'un jeune débutant mais bien celles d'un vieux maître ».

Chateaux des Landi à Bardi

Le panneau du Saint François est perdu, tandis que le Mariage mystique de sainte Catherine et les saints Jean-Baptiste et Jean l'Évangéliste, volé dans l'église de San Pietro di Viadana en 1630, a été reconnu et se trouve conservé encore à Bardi, près de Parme, dans l'église de Santa Maria. Le tableau, qui montre les origines corrégiennes de la formation du peintre, avec les références particulières au retable du Corrège à Dresde, introduit dans la figure de la Madone intronisée d'un mouvement circulaire, une torsion suggérée par le piédestal cylindrique, sur lequel elle est assise, et confirmée par les drapés de la Vierge et du Baptiste, gonflés et enveloppés autour des corps, par le demi-cercle de l'abside et par les colonnes en l'arrière-plan.

La très corrégienne Santa Barbara de profil à Madrid (Prado) doit être de cette année, car elle est proche, d'un point de vue stylistique du Mariage mystique de Bardi dont le dessin est conservé au Musée Bonnat de Bayonne.

La guerre prend fin en 1521 et Vasari écrit que « la guerre finie, il retourna avec son cousin à Parme […] il fit dans un bois à l'huile la Vierge avec l'Enfant au cou, saint Jérôme d'un côté et le bienheureux Bernard de Feltre de l'autre » - mais l'œuvre est perdue ensuite - et le 21 novembre Parmigianino collabore avec Le Corrège, Rondani et Michelangelo Anselmi aux décorations de l'église de Saint-Jean-l'Évangéliste.

Les fresques de Saint-Jean-lÉvangéliste à Parme

Il est établi maintenant que les interventions du Parmesan se trouvent dans la première, la seconde et la quatrième chapelle de la nef gauche de l'église.

  • Dans la première chapelle, il a peint la Sainte Agathe et le bourreau qui semblent jaillir vers lobservateur, à la différence des Saintes Lucie et Apollonia qui restent serties dans une niche ; elles appellent l'attention à la manière de Michelangelo Anselmi, un corrégien formé à Sienne dans latelier du Sodoma et de Domenico Beccafumi. Lui sont également attribués la frise et en-dessous, le Père Eternel avec anges, aujourd'hui très abîmé.
  • Dans la seconde chapelle, il a peint Deux diacres en lecture, le présumé San Vitale ou peut-être San Seconde, les Angelots et animaux et une fresque monochrome dans lintrados de la chapelle. Le cheval cabré à coté du San Secondo est en relation directe avec un détail de la fresque exécutée deux années auparavant par Le Pordenone dans la cathédrale de Crémone, dont Le Parmesan atténue toutefois la gestuelle violente en lestompant par un mouvement plus fluide des figures.
  • La décoration de la quatrième chapelle a été confiée le 27 février 1515 à ses oncles paternels Michele et Pier Ilario, mais l'insolvabilité du propriétaire de la chapelle, Nicolò Zangrandi, a retardé les travaux qui n'ont commencé qu'en 1522 et qui furent confiés, cette fois-ci, au Parmesan, comme le montre un examen stylistique. La fresque de la coupole de l'église de Saint-Jean-l'Évangéliste terminé, on peut y voir une imitation du modèle corrégien. Les deux figures représentées, Saint Nicolas de Bari et Saint Hilaire de Poitiers, ont un modelé ample et monumental, mais plus sobre en comparaison des figures de l'église de Bardi qui montrent un léger mouvement de rotation.

Dans la même coupole peinte par Le Corrège on a reconnu dans un Putto porte-feston la main du Parmesan.

Les fresques de Fontanellato

La Rocca Sanvitale à Fontanellato

En 1523 ou, au plus tard dans la première moitié de 1524, avant son départ pour Rome, Parmigianino peint sur le plafond d'une chambre de la forteresse Sanvitale de Fontanellato, près de Parme, quatorze médaillons des épisodes de la fable ovidienne, Diane et Actéon, entremêlés de pendants sont peints douze angelots. Le fond est celui d'une tonnelle suivie, plus en haut, d'une haie de roses et du ciel. Au centre du ciel, un miroir rond apporte l'inscription « RESPICE FINEM » (observe la fin).

Les fresques se composent de quatre scènes, la Nymphe poursuivie des chasseurs, l'Actéon déchiré par ses chiens, l'Actéon transformé en cerf et la Nymphe à l'épi - l'on représente Paola Gonzaga, la femme de son client Galeazzo Sanvitale - surmontées de la voûte avec les Putti. C'est à l'évidence au Corrège sur sa dette à la Chambre de Saint Paul. Toutefois la plasticité naturaliste du Corrège sadoucit en une solution dune stylisation enlevée et fluide.

Rodolfo Pallucchini (Lineamenti di Manierismo europeo) écrit qu'en ces fresques « il y a une prise de position linguistique plus précieuse et maniérée comparée à l'art corrégien, bien plus naturel et expansif [...] une méditation plus subtile et élégante de l'image, qui se constitue avec une préciosité d'accents absente dans la sensuelle plénitude du goût corrégien. Ceci débute pourtant un processus d'idéalisation de la forme subtilement intellectualiste ».

Au naturel expressif de la lumière et de la couleur, à la profondeur atmosphérique du Corrège qui, dans la Chambre de Saint Paul, à Parme, se libère des limites du plafond, Parmigianino choisit de bloquer l'espace en décorant la voûte de la chambre avec une sorte de ciselures précieuses et détaillées qui exaspèrent la représentation du réel jusqu'à en anéantir la vérité au moyen d'un artifice archaïsant.

Le mythe d'Actéon qui, ayant surpris la déesse Diane prenant son bain, fut transformé en cerf et ensuite déchiré par ses propres chiens, a été interprété comme une métaphore du procédé alchimique : l'union des principes masculin et féminin, le chasseur Actéon, pourvu qu'il puisse s'approprier le principe divin - la déesse Diane - est disposé à se transformer de prédateur à proie, jusqu'à en mourir.

Appartenant à la collection parmesane de Ranuccio Farnese et transféré ensuite à Naples en 1734, le tableau du Portrait de collectionneur , daté de 1523, se trouve en Angleterre au XIXe siècle et est acquis par la National Gallery de Londres en 1977. Cest son premier exemple de portrait mais on ne connaît pas le nom de lhomme, reconnu comme collectionneur par les objets d'art représentés sur la table. Il s'impose par la force expressive de sa pose et par son regard tranchant et arrogant. La pièce, close et étroite, s'ouvre artificiellement vers l'extérieur par le paysage représenté dans le tableau adossé au mur. On en conserve des copies dans la Galerie des Offices à Florence et dans le Walker Art Center de Minneapolis.

Si la petite Sainte Catherine et deux anges de Francfort est parfois considérée comme une copie, le Portrait de Galeazzo Sanvitale à Capodimonte est l'original peint en 1524.

Galeazzo Sanvitale affiche dans sa main une médaille avec les chiffres 7 et 2, interprétés respectivement comme les symboles alchimiques de la Lune et de Jupiter. La médaille sur le chapeau, sur laquelle sont figurées les colonnes dHercule, serait aussi une référence alchimique au mythique héros grec. Dautres exemples de la force représentative du jeune artiste, la rigueur descriptive du détail précieux, le relief donné à la singularité du personnage et, à droite, la seule ouverture apparente à la végétationsi touffue quelle bloque lespace et assume la fonction de variation de couleur d'un environnement clos - confirment l'intellectualisme fondamental de l'œuvre.

À Rome

Le Vite de Vasari

À la fin de l'année 1524, au terme d'une épidémie de peste, Parmigianino est à Rome. Vasari écrit que « désirant voir Rome […] il fit part de son souhait à ses vieux oncles qui, même s'il leur semblait peu digne de louanges, exprimèrent cependant leur contentement mais qu'il ferait bien d'apporter avec lui quelque chose qu'il aurait réalisé de ses propres mains pour faciliter ses entrées auprès des nobles et des artisans de sa profession. Cela ne déplut pas à Francesco qui peignit trois tableaux, deux petits et un autre très grand, représentant la Madone avec son fils à son cou qui prend quelques fruits à un ange, et un vieillard aux bras poilus, réalisés avec art et intelligence et aux couleurs gracieuses […] Une fois ces œuvres terminées […], il partit pour Rome accompagné dun de ses oncles ».

Des trois tableaux cités par Vasari, on a reconnu la Sainte Famille, aujourd'hui au Prado de Madrid, qui montre, également en référence au Corrège, ce choix aristocratique déjà manifesté dans les portraits, et son célèbre Autoportrait au miroir convexe de Vienne qui, selon Vasari, lequel semble avoir été très impressionné par l'« invention » du jeune artiste, fut donné à Pietro Aretino : « je me souviens de l'avoir vu quand jétais très jeune, écrit-il, à Arezzo, chez Pietro Aretino il était considéré comme un objet rare par les étrangers de passage. Il tomba, je ne sais comment, entre les mains de Valerio Vicentino, tailleur de cristal et aujourdhui, il est chez Alessandro Vittoria, sculpteur à Venise ».

On a également vu dans ce tableau, outre langélique beauté du peintre, citée par Vasari, et la nouveauté suggestive de linvention, une manifestation de la nouvelle sensibilité maniériste ainsi qu'une référence alchimique, en ce sens que la rotondité du tableau correspondrait à la « première matière », le miroir à la méthode expérimentale alchimique et la mélancolie, qui transparaît sur le visage de Parmigianino, à un trait caractéristique de ceux qui s'adonnent à l'alchimie.

Même le Portrait de Lorenzo Cybo, daté au 1525 et cité par Vasari - « Francesco fit le portrait de Lorenzo Cybo, capitaine de la garde du pape et très bel homme, et on peut dire que, plutôt qu'un portrait, il fit un être de chair et de sang » – confirme le choix intellectuel et sa grande acuité d'identification psychologique. Giulio Carlo Argan (Storia dell'arte italiana) écrit que Parmigianino « est conscient de la vacuité absolue de ses œuvres, de leur absurde réalité prenant la place de la réalité de la conscience. Il sent que dans la « haute » société de son temps, dans cette aristocratie à laquelle il sadresse, l'artifice du cérémonial est en train de supplanter le comportement éthique, la vie morale ».

Clément VII, détail

À Rome, il ne travaille pas sur les fresques des palais du Vatican, comme le lui avait promis initialement le pape Clément VII, mais il étudie surtout Raphaël, mort trois ans plus tôt : « on disait que lesprit de Raphaël était passé dans le corps de Francesco, à voir ce jeune doué d'un sens artistique exceptionnel et aux manières policées et gracieuses, exactement comme Raphaël et, surtout, comment il sévertuait à l'imiter en toutes choses mais, avant tout, dans la peinture. Cette étude ne fut pas vaine puisque les nombreux petits tableaux qu'il fit à Rome, pour la plupart recueillis par le cardinal Ippolito de' Medici, étaient vraiment merveilleux ».

Lartiste entre en contact avec les disciples de Raphaël,- Perin del Vaga, Baldassarre Peruzzi, Polidoro da Caravaggioet avec Sebastiano del Piombo et Rosso Fiorentino. Les aspirations de ce groupe satisfont ses exigences d'élégance raffinée et de décoration sophistiquée : son rapport avec Rossotous deux travaillent pour Baverio dei Caroccile, le même graveur à qui l'on doit les estampes tirées de leurs dessinsest le plus fécond pour la peinture du Parmesan : l'allongement exaspéré des visages du Florentin sera toujours présent dans les œuvres ultérieures de Parmigianino.

Les tableaux de son bref passage à Rome, encore existants, sont les suivants :

  • Le Mariage mystique de sainte Catherine
  • les tableaux qui lui sont attribués, Homme avec livre à la City Art Gallery de York
  • Vierge à lEnfant et saint Jean-Baptiste à Naplesson tableau le plus classique et le plus raphaélesque, faisant référence à la Vierge au diadème de latelier de Raphaël au Louvre, pose, comme élément constitutif prédominant, le rapport entre les personnages et le paysage -
  • Visions de saint Jérôme à Londres.

Le tableau Mariage mystique de sainte Catherine, vendu en 1800 par les Borghese au collectionneur anglais William Ottley et acquis par la National Gallery de Londres en 1974, traduit déjà lapport raphaëlesque dans son langage personnel maniériste, entre l'élégance aristocratique des attitudes et des gestes et une relation subtilement psychologique entre les personnages. Le cadrage inhabituel et la perspective anti-classique donnent une sensation denfermement, accentuée par lenfilade des pièces éclairées par des sources de lumières successives jusquà la fenêtre de larrière-plan.

De la Vision de saint Jérôme Vasari écrit qu’« une commande dune Sainte vierge lui ayant été passée par Mariia Bufolina de Città di Castello, un tableau destiné à une chapelle proche de la porte de léglise San Salvatore del Lauro, Francesco réalisa une Madone aérienne lisant avec un Enfant entre les jambes et au sol il plaça, agenouillé dans une extraordinaire et belle attitude, un saint Jean qui par le mouvement de rotation du buste montre le Christ enfant, et il a représenté, couché par terre, à demi visible, un saint Jérôme en pénitence en train de dormir ». Mais le tableau ne sera jamais placé dans léglise romaine de San Salvatore in Lauro : de léglise Santa Maria della Pace à Rome, il ira au palais Buffalini à Città di Castello, et ensuite en Angleterre, après son acquisition par la National Gallery de Londres en 1826.

Le tableau, peint en 1527, fut précédé d'un intense travail préparatoire : une vingtaine de dessins font état de la recherche dune composition satisfaisante. Un de ces dessins, conservé dans la Galleria Nazionale de Parme, même sil sagit dune simple esquisse, sapproche de la version définitive inversant complètement la composition initialement prévue à lhorizontale. Le personnage dominant du Baptiste qui tourne son puissant thorax michelangelesque, en indiquant de manière appuyée le groupe de la Vierge et de lEnfant qui, debout, - plus adulte que dans les représentations traditionnelles - semble vouloir se détacher de sa mèreenfermée dans une pensée mélancoliquepour suivre le destin auquel il est appelé, tout en noubliant pas de prendre une attitude affectée empreinte délégance aristocratique.

La période bolonaise

La conversion de saint Paul, vers 1528, Vienne, Kunsthistorisches Museum

Les lansquenets de Charles Quint assiègent Rome et y pénètrent, en la livrant au pillage. Vasari écrit que Parmigianino « au début du sac de la ville était si absorbé par son travail que, lorsque les soldats entrèrent dans les maisons et que déjà quelques Allemands se trouvaient dans la sienne, il ne se détourna pas de son travail malgré le bruit. Si bien, qu'en le voyant ainsi travailler, ils furent si étonnés de son travail quils le laissèrent continuer, agissant en gentilshommes, ce quils devaient être ». Mais, par la suite, emprisonné par dautres soldats, « il dut payer une rançon des quelques écus quil possédait. Cest ainsi que son oncle [...] décida, en voyant Rome presque en ruine et le pape prisonnier des Espagnols, de le reconduire à Parme ».

Il arrive en juin 1527 à Bologne et y reste quatre ans. Sa première œuvre est, selon Vasari, le Saint Roch et son chien de la basilique de San Petronio, « auquel il donna une très belle allure […] en le représentant quelque peu soulagé de sa douleur à la cuisse occasionnée par la peste. Il le montre regardant vers le ciel, remerciant Dieu comme le font encore les gens pieux face à ladversité. Il fit cette œuvre pour un certain Fabrizio da Milano dont il a fait le portrait les mains jointes et qui semble vivant. Le chien lui aussi semble tout naturel comme les paysages qui sont très beaux. Francesco excellait en toutes ces choses ».

Comme pour La Vision de saint Jérôme, il y ajoute un élément sentimentalles yeux au ciel du saint, le regard lourdement interrogatif du donateur, jusquà la participation sensible du chienqui reste comme en suspens et irrésolu de lemphase recherché de la posture de saint Rocco. Cétait encore rare de trouver dans la tradition italienne qui a précédé la Contre-Réforme, la représentation dun saint qui exprimât, seul, la médiation de lexigence dun dévôt avec le Ciel.

À partir du commentaire de Vasari, « il fit pour Albio, un médecin parmesan, une Conversion de saint Paul avec beaucoup de personnages et un paysage, ce que fut une chose très rare », on a pensé attribuer à Parmigianino la toile de la Conversion de saint Paul à Vienne, toile anciennement attribuée par certains spécialistes à Nicolò dell'Abbate. Il existe toutefois un dessin qui reproduit avec peu de variantes cette toile et, si la référence à Héliodore chassé du Temple de Raphaël de Raphaël dans les Chambres vaticanes est bien évidente, la représentation non naturaliste du cheval, au cou gonflé et à la tête petite et effilée, aux brides réduites à des filaments bizarres, le caparaçon en soie, les vêtements légers du saint, les rehauts dorés de la surface, donnent au tableau la marque dune invention décorative, dune abstraction déformée.

Vierge à l'Enfant et saints, 1528, Bologne, Pinacoteca Nazionale

Vers 1528 il réalise la composition de lAdoration des Mages de Taggia. On attribua la paternité de ce tableau dabord Perin del Vaga, puis à Luca Cambiaso et à Girolamo da Treviso, jusquà ce que Roberto Longhi la rende enfin à Parmigianino, en reconnaissant les analogies avec la Vierge à lEnfant du Courtauld Institute de Londres (collection Seilern et du grand retable de à la Vierge à lEnfant et les saints à Bologne.

Ce dernier tableau est exécuté pour les religieuses de Santa Margherita à Bologne, « une Vierge, une sainte Marguerite, un saint Petronio, un saint Jérôme et un saint Michel en grande vénération ». Terminé vers le 8 avril 1530, il est transféré dans la chapelle Giusti de léglise et est déposé ensuite au palais Guidi. Saisi par les Français en 1796, il retourne, de Paris à Bologne, en 1815.

Le tableau est lexpressionécrit Paola Rossi (L'opera completa di Parmigianino) - dune « rare élégance formelle, même les sentiments semblent distillés et comme suspendus dans une atmosphère froide et irréelle dun début de nuit éclairé par la lumière de la lune : de lintensité dans le détachement de la Vierge et des deux saints en passant par la douceur alanguie des regards réciproques entre lEnfant et Marguerite, jusquau sourire léger et ambigu de lange ».

Cest encore Vasari qui donne linformation suivante : « quand lempereur Charles Quint vint à Bologne pour être couronné par Clément VII, François, en le voyant à loccasion de ses repas, réalisa, sans linterrompre, un très grand tableau la Renommée le couronne de lauriers et Hercule, sous la forme dun petit enfant, lui tend le monde comme sil voulait lui en donner la domination. Lœuvre, une fois terminée, fut présentée au pape Clément auquel elle plut tant quil envoya François, accompagné par lévêque de Vasona, alors dataire, auprès de lempereur pour la lui montrer. Sa Majesté lapprécia beaucoup et exprima le désir quon la lui laissât, mais François, mal conseillé par un ami, ou peu fidèle ou peu avisé, dit quelle nétait pas encore terminée et quil ne voulait la laisser. Lempereur, qui laurait sans doute récompensé, ne la pas fait. Ce tableau, venu aux mains du cardinal Hippolyte de Médicis, fut donné au cardinal de Mantoue et aujourdhui au Duc, ainsi que dautres belles et très nobles œuvres ».

Longtemps considéré comme disparu, le Portrait allégorique de Charles Quint, était connu par s acopie de Rubens. Un tableau réapparut en Angleterre en 1883, pour appartenir ensuite à un collectionneur romain, puis passé dans une collection privée des États-Unis [1] a parfois été reconnu et exposé comme l'original (mais celà est contesté par de nombreux spècialistes qui y voient une copie d'atelier). La Renommée, que lon peut mieux interpréter comme la Gloire tient une palme - symbole des conquêtes spirituellesau-dessus de la tête de lempereur et, dans l'autre main, un rameau de laurier - symbole des conquêtes matériellesau-dessus du globe soutenu par un angelot.

Madone à la rose, 1530, Dresde, Gemäldegalerie

Vasari écrit encore que Parmigianino fit à Bologne, « un tableau de la Vierge à lEnfant qui tient un globe terrestre. La Vierge est très belle et l'angelot est également très naturel : il faisait toujours en sorte que du visage des angelots se dégage une vivacité enfantine, propre à létat desprit vif et malicieux quont souvent les petits enfants. La Vierge est encore parée datours extraordinaires, dune robe aux manches de voile jaune et presque entièrement ornées d'or. Elle est profondément gracieuse, si bien que, non seulement la chair semble réelle et dune délicatesse extrême mais aussi quon ne peut pas voir des cheveux aussi bien rendus. Ce tableau fut peint pour Pietro lAretino mais, le pape Clément étant venu à Bologne, Francesco le lui donna et puis, je ne sais comment, il vint ensuite aux mains de Dionigi Gianni pour être aujourdhui en la possession de Bartolomeo, son fils, qui la tant arrangé, quen ont été faites cinquante copies (réelles ou supposées) ».

La famille Gianni, ou Zani, le vendit en 1752 à Auguste III de Pologne pour sa collection de Dresde (aujourd'hui à la Gemaldegalerie). Si la rose et le globe tenus par lEnfant devaient représenter le salut du monde opéré par le Christ, selon l'interprétation alchimiste de Fagiolo dell'Arco, la rose, symbole de la rotondité, serait la « métaphore de la réussite de l'opus » et lœuvre entière représenterait l'Immaculée Conception.

La robe transparente de la Vierge, la pose de lEnfant aux cheveux bouclés et le bracelet de corail au poignet, les ondulations du rideau, donnent à la peinture une empreinte essentiellement profane, sensuelle même. Affò en vint à des conclusions identiques, que lœuvrecommissionnée par Pierre LArétinaurait du représenter une Vénus et Cupidon. Cependant, lhypothèse a été démentie par toutes les esquisses de Parmigianino. Les thèmes, quils soient religieux ou profanes, sont soumis à lirréversible adresse du style choisi par Parmigianino : élégance décorative, préciosité formelle et virtuosité recherchée dans la composition.

Le retour à Parme

Portrait de femme, 1530, Parme, Pinacoteca Nazionale

« Après avoir été tant dannées hors de sa patrie et avoir fait de multiples expériences artistiques, seulement auprès damis et non en fréquentant luniversité, il sen retourna finalement à Parme pour répondre à lappel damis et de parents. Dès son arrivée, il se mit tout de suite au travail sur pour une voûte de léglise Santa Maria della Steccata, une fresque assez grande. Parce qu'il y avait devant la voûte une petite arche qui sincurvait comme elle et à hauteur de visage, il se mit à travailler dessus car cétait plus facile et il réalisa six personnages très beaux, deux en couleurs et quatre en clair-obscur et, entre les uns et les autres, quelques très beaux ornements qui mettaient en relief les rosaces au centre. » Perfectioniste, travaillant lentement, introduisant des détails très sophistiqués (étudiés par plusieurs dessins), d'ailleurs invisibles depuis le sol,l'artiste prit du retard sur sa commande.

Le contrat entre les marguilliers de léglise de la Steccata et Parmigianino fut signé le 10 mai 1531 : il prévoyait la décoration de labside et de lintrados de la grande chapelle. Pendant ce temps le peintre avait réalisé son autoportrait et il termina cette année- le Portait de jeune fille, maintenant à la pinacothèque de Parme, appelé Lesclave turque uniquement à cause du balzo, la résille qui retenait les cheveux donnant limpression dun turban oriental.

Cest lun des portraits les plus expressifs, et parmi les plus connus, de lartiste : la sensualité malicieuse du sujet est exaltée par le regard fixé vers lobservateur et par la science de la composition dans lharmonie volontaire, tout en courbes, qui délimite le visage.

Certainement de la même période, lAutoportait présumé des Uffizi, le Portait du gentilhomme de Naples et le Portrait de la comtesse Gozzadini, aujourdhui à Vienne, que, selon Vasari, Parmigianino aurait fait en même temps que celui de son mari Bonifacio, le laissant néanmoins inachevé vers le bas, comme en effet, on peut le voir à Vienne.

Le portrait de Bonifacio Gozzadini, sil fut jamais commencé, est introuvable. Mais Gozzadini est aussi celui qui a commandé La Vierge à lEnfant avec les saints Zaccharie, Madeleine et Jean, des Offices, acquis en 1533[2] et ensuite propriété du comte de Bologne, Giorgio Manzuoli. De , il se retrouva aux Offices en 1605.

Vierge à l'Enfant et saints, vers 1530, Florence, Offices

Décrit dans le document notarial comme pieta imago Beatae Mariae Virginis cum Bambino imaginis domini nostri Jesu Christi in brachio et imago S. Zacariae et imago domine Sancte Mariae Magdalenae, le traitement lumineux auquel Parmigianino soumet la surface, la rendant filamenteuse et iridescente, comme si la dépouille de lenveloppe physique était jetée dans un creuset pour en éliminer les impuretés. La tentative datteindre une suprême élégance formelle passe donc par la transformation de la matière et, tout en maintenant la similitude avec la réalité terrestre, elle la traduit en une matière qui semble lunaire.

Le paysage qui a ici une importance inhabituelle, ne se soustrait pas, lui non plus, à ce processus de transformation et lirréalité des architectures de rêvelarc avec la statue qui, le regard emphatique vers le haut, semble vivante et lénorme colonne isolée de façon insenséeconfirme et accentue la sensation détrangeté et dappartenance à une autre réalité et à un autre temps. Cest peut-être proprement dans ce processus de style lauthentique référence aux intérêts alchimiques de Parmigianino : le processus qui transforme la forme de la matière réelle pour en extraire la quintessence de sa pureté, la forme comme beauté pure.

« A cette même époque, écrit Vasari, il fit à Baiardo, gentilhomme parmesan et un de ses amis très intimes, dans un tableau un Cupidon qui fabrique un arc de ses mains : à ses pieds, il ajouta deux Amours, lun, assis, tient le bras de lautre et, en souriant, veut quil touche Cupidon d'un doigt, lautre, qui ne veut pas le toucher, pleure en montrant sa peur de ne pas brûler des feux de lamour. Cette peinture, qui est banale par ses couleurs, précieuse par son invention et gracieuse par sa manière particulière qui a été et est par ses artifices et par ce qui se fait de lart de limitation et de lobservation, appartient aujourdhui à Marcantonio Cavalca, héritier du chevalier Baiardo, ainsi que de nombreux dessins quil a rassemblés de sa propre main, dessins de toutes sortes, très beaux et biens finis... »

Il sagit de Cupidon qui fabrique son arc, passé à Madrid et de , acquis par lempereur Rodolphe II en 1603, il fut gardé tout dabord à Prague et ensuite à Vienne. Cupidon, de trois-quart dos, est en train de fabriquer son arc en posant un pied sur des livresallusion à la prééminence de lAmour sur la Science -, pendant que les deux enfants, lun un garçon, lautre une fille, seraient Antéros, limpulsion virile qui donne la force à lamour et Liseros, le principe féminin qui léteint. En fait, le premier petit Amour saisit le bras du second qui résiste et pleure, cherchant à lui faire toucher Cupidon.

La Vierge au long cou, vers 1535, Florence, Offices

Avec une malice perverse, le peintre a exprimé dans les visages des deux enfantsqui semblent être une réflexion sur les Amours du Corrège (mais aussi de raphaël dans la Vierge Sixtine), dans un esprit, certes désormais éloigné de celui-ci, mais en gardant la même aimable spontanéité - une grande fraîcheur qui réussit à mettre en second plan la tension érotique latente et le corps marmoréen du Cupidon, dont les ses ailes qui semblent faites de métal.

« Pour léglise de Santa Maria dei Servi il fit un tableau de Notre Dame avec son Fils dormant dans ses bras et sur un côté, plusieurs anges dont lun porte au bras une urne de cristal avec, à lintérieur, une croix que regarde Notre Dame. Cette œuvre qui ne le satisfaisait pas beaucoup, resta inachevée. Cependant on ladmire pour sa grâce et sa beauté. ». Cest ainsi que Vasari fait référence à lœuvre peut-être la plus fameuse de Parmigianino, La Vierge au long cou.

Elle fut commandée par Elena Baiardi pour sa chapelle personnelle dans léglise de Santa Maria dei Servi : comme latteste le contrat, en date du 23 décembre 1534, le Parmigianino, après avoir reçu un acompte, sengageait à livrer le tableau à la pentecôte de 1535 et, en dédommagement, à mettre en gage sa propre maison. Et, en effet, la toile ne fut ni achevée ni livrée : inachevée dans sa partie droite et laissée dans latelier du peintre. À sa mort, une inscription fut placée sur le stylobate de la colonnade : FATO PREVENTUS F. MAZZOLI PARMENSIS ABSOLVERE NEQUIVIT. Laissée dans léglise en 1542, elle fut acquise par les Médicis en 1698 (Florence, Offices).

Lanalyse de Hauser de cette peinture est significative : « on retrouve lhéritage des bizarreries de Rosso, les formes les plus allongées, les corps les plus élancés, les jambes et les mains les plus minces, le plus délicat visage de la femme et le cou le plus délicieusement modelé et le rapprochement des motifs les plus irrationnels que lon puisse imaginer, les proportions les plus inconciliables et les formes les plus incohérentes de lespace. Il semble quaucun élément du tableau ne saccorde avec un autre, ni quaucune forme nobéit aux lois naturelles, ni quaucun objet ne respecte la fonction qui lui serait affectée normalement. On ne sait pas si la Vierge est debout ou assise ou si elle prend appui sur quelque chose qui peut-être est un trône. Selon la loi de la gravité, lEnfant devrait, dun moment à lautre, glisser des genoux. On ne sait pas si elle regarde lEnfant ou si elle nest préoccupée que delle-même, de ses propres pensées. On ne sait même pas a lieu vraiment la scène : si cest dans vestibule ou en plein air. Quest-ce quil y a -bas, dans le fond ? Une rangée de colonnes ou un lourd rideau ? Et puis, que sont ces colonnes qui se trouvent , sans chapiteau, complètement inutiles, pareilles à des cheminées dusine ? Et que peuvent bien vouloir représenter les adolescents et les jeunes garçons rassemblés dans langle gauche au premier plan ? Des anges ? Ou plutôt un éphèbe avec ses compagnons en train de présenter une offrande à la Vierge, à cette idole idéalement gracieuse ? On serait ainsi arrivé , devait mener inévitablement ce genre de peinture sacrée : à un culte païen de la beauté ».

Il y a encore Fagiolo dell'Arco pour donner une interprétation fondée sur les principes alchimiques et religieux : le thème du tableau serait lImmaculée conception. Le vase, au premier plan à gauche, sur lequel a été visible, un moment, la croix citée par Vasari, ferait référence au sein de Marie. Il sagirait du Vas Mariae, une allusion à la mort du Christ au moment de sa conception, selon lidée des alchimistes que la naissance correspond à la mort. La colonne symbolise lImmaculée conception et le long cou de la Vierge était déjà, depuis le Moyen Âge, un attribut de la Vierge - collum tuum ut columna.

Portrait de femme (Antea), Naples, G. N. de Capodimonte

Identifiée sans preuve avec une courtisane romaine très connue à lépoque, le « Portrait de femme » de Naples (Capodimonte) est une apparition improvisée et inquiétante, un fantasme qui surgit de lombre. Le naturalisme est en fait, seulement apparent, nié par lallongement « hallucinant de tout le bras et de lépaule droite sur laquelle la fourrure en zibeline a un poids démesuré, par la déformation anormale que celle-ci, effrayée, dun air résigné, affiche comme un pénible fardeau de la nature. (Bologne) »

Pendant ce temps, il continue les fresques de léglise de Santa Maria della Steccata. Il reçoit deux paiements, lun en 1531 et lautre en 1532. En 1534, il reçoit 1 200 feuilles dor nécessaires pour la décoration, dautres encore en 1535 et en 1538 et les dernières le 12 avril 1539. En réalité, le travail devait être terminé en 1532. Dès le 27 septembre 1535, les marguilliers avaient exigé la restitution de 200 écus. Un compromis ayant été trouvé, un délai lui est accordé pour continuer à travailler. Mais, le 3 juin 1538, les marguilliers lui intiment lordre de restituer 225 écus pour défaillance. Il obtient un nouveau délai jusquau 26 août 1539 sans quil ait terminé son travail. La Confraternité fait appel aux voies légales et fait incarcérer Parmigianino quelques jours. À sa libération, le peintre quitte Parme et la Confraternité le congédie : par acte notarié du 19 décembre 1539, on note que « le maître Francesco Mazzolo ne pouvait plus, par aucun moyen, sinterposer ou empêcher de réaliser les peintures de la chapelle de la nouvelle église de la Madonna de la Steccata » et le travail est confié à Giulio Romano, qui exécute avec son atelier les autres murs non réalisés par Parmesan (le projet prévoyait, dans labside, un Couronnement de la Vierge et la décoration du grand arc du presbytère).

De 1531 à 1535, Parmigianino aurait produit les esquisses, passant à la fresque elle-même de 1535 à 1539 sur la paroi à droite du grand arc du presbytère, les Trois vierges folles, les monochromes dÈve et dAaron, et sur la gauche, trois autres vierges folles et les monochromes de Moïse et dAdam ainsi que des angelots sur les festons et une frise avec des personnages, des anges, des vases, des livres et des objets de culte.

De facture monumentale, les personnages assument des expressions dune gravité profonde et inquiétante avec « un sens du classicisme, repris mais inédit, qui est le résultat le plus extraordinaire dun contexte sans ambiguïté, fruit dune sensibilité et dun langage délicieusement maniéré » (Rossi). Sur la frise, on note « lhabileté de lorfèvre, la passion pour la fusion des métaux, commune également aux alchimistes, ce feu rouge qui brûle étrangement les coudes des deux hommes qui, indifférents, leffleurent. » (Ghidiglia Quintavalle)

Banni de Parme, l'artiste s'exile hors des portes de la ville à Casalmagiorre, il s'adonne à l'alchimie. Il peint pour l'église de ce bourg un retable, La Vierge avec saint Étienne, saint Jean-Baptiste et un donateur (Dresde, Gemäldegalerie), représentés sous une froide lumière lunaire. Personnage complexe, torturé, il meurt à trente-sept ans. Il est un créateur majeur du courant manièrisme comme en témoignent l'extrême raffinement de sa touche, sa préciosité, l'allongement des figures allant jusqu'à la déformation, les compositions étranges aux contraposto ambigus. Grâce à la gravure, à plusieurs élèves et suiveurs (Mazzola-Bedoli, Niccolo dell'Abate…), son influence se diffuse dans toute l'Europe (École de Fontainebleau, puis Cour de Prague - Spranger-, aux Pays-Bas -Wtewael- et de Nancy -Bellange-).

Œuvres

La Vierge au Long Cou
  • Berlin, Staatliche Museen, Baptême du Christ, h/b, 195 x 137, ca 1519, attribué
  • Bardi, église de Santa Maria, Mariage mystique de sainte Catherine et des saints Jean Baptiste et Jean l'Évangéliste, det/b, 203 x 130, 1521
  • Madrid, Prado, Sainte Barbara, h/b, 48 x 39, ca 1521
  • Parme, église de San Giovanni Evangelista, fresques, 1522 - 1523
  • Fontanellato, forteresse, fresques, 1523 - 1524
  • Londres, National Gallery, Portrait d'un collectionneur, h/b, 89 x 64, ca 1523
  • Naples, Gallerie Nazionali di Capodimonte, Portrait de Galeazzo Sanvitale, h/b, 109 x 81, 1524
  • Madrid, Prado, Sainte Famille, h/b, 110 x 89, 1524
  • Vienne, Kunsthistorisches Museum, Autoportrait, diam. 24,4, 1524
  • Rome, Galleria Doria-Pamphilj, Adoration des bergers, h/b, 59 x 34, 1525
  • Rome, Galleria Doria-Pamphilj, Vierge à l'Enfant, h/b, 60 x 34, 1525
  • Copenhague, Statens Museum for Kunst, Portrait de Lorenzo Cybo, h/b, 126 x 104, 1525
  • Londres, National Gallery, Mariage mystique de sainte Catherine, h/b, 74 x 57, ca 1525
  • Vienne, Kunsthistorisches Museum, Homme qui suspend la lecture, h/b, 67 x 53, ca 1525, attribué
  • York, City Art Gallery, Homme avec un livre, h/b, 70 x 52, ca 1525.
  • Naples, Gallerie Nazionali di Capodimonte, Vierge à l'Enfant et le jeune saint Jean-Baptiste, det/t, 159 x 131, ca 1526
  • Londres, Courtauld Institure (collection Seilern), Vierge à l'Enfant, h/b, 63 x 51, ca 1526
  • Londres, National Gallery, Vision de saint Jérôme, h/b, 343 x 149, 1527
  • Bologne, Dôme de San Petronio, Saint Roch et donateur, h/b, 270 x 197, 1527
  • Vienne, Kunsthistorisches Museum, La conversion de saint Paul, h/t, 177 x 128, ca 1528
  • Taggia, église de San Domenico, Adoration des Mages, h/b, 120 x 94, ca 1528
  • Bologne, Pinacoteca Nazionale, Vierge à l'Enfant et saints, h/b, 222 x 147, ca 1529
  • Hampton Court, Collections royales, Portrait de jeune homme, h/b, 97 x 82, ca 1529
  • Rome, Galleria Borghese, Portrait d'homme, h/b, 52 x 42, ca 1529
  • États-Unis, Collection privée, Portrait allégorique de Charles V, h/t, 182 x 125, ca 1530 attribué ou copie d'atelier
  • Dresde, Gemäldegalerie, La Vierge à la rose, h/b, 109 x 88, ca 1530
  • Parme, Pinacoteca Nazionale, Portrait de jeune femme, h/b, 67 x 53, ca 1530
  • Florence, Uffizi, Vierge à l'Enfant, saint Zacharie, sainte Madeleine et le jeune saint Jean-Baptiste, h/b, 73 x 60, ca 1530
  • Vienne, Kunsthistorisches Museum, Portrait de jeune femme, h/b, 50 x 46, ca 1531, attribué
  • Florence, Uffizi, Autoportrait, h/b, 100 x 70, ca 1531
  • Naples, Gallerie Nazionali di Capodimonte, Portrait d'homme, h/b, 98 x 84, ca 1531
  • Parme, église de San Giovanni Evangelista, Sainte Marguerite et sainte Cécilie, fresques, ca 1531
  • Rome, Galleria Spada, Trois têtes, fragment de fresque, 1530 - 1534, attribué
  • Windsor Castle, Collections royales, Minerve, h/t, 63 x 46, 1530 - 1535
  • Vienne, Kunsthistorisches Museum, Cupidon fabriquant son arc, h/b, 135 x 65, ca 1533
  • Florence, Uffizi, Madone au long cou, h/b, 216 x 132, 1535
  • Naples, Musée Capodimonte de Naples, Portrait de jeune femme dite Antea, h/t, 135 x 88, ca 1536
  • Parme, église de Santa Maria della Steccata, fresques, 1535 - 1539
  • Vienne, Kunsthistorisches Museum, Portrait de gentilhomme, h/b, 117 x 98, ca 1537, attribué
  • Madrid, Prado, Portrait de Pier Maria Rossi di San Secondo, h/b, 133 x 98, ca 1538
  • Madrid, Prado, Portrait de Camilla Gonzaga, h/b, 128 x 97, ca 1538
  • Dresde, Gemäldegalerie, Vierge à l'Enfant et les saints Stéphane et Jean-Baptiste, h/b, 253 x 161, 1540
  • Parme, Pinacoteca Nazionale, Autoportrait, h/pap., 21 x 15, 1540
  • Naples, Gallerie Nazionali di Capodimonte, La Mort de Lucrèce, h/b, 68 x 52, 1540, attribué
  • Paris, Musée du Louvre, Le Mariage mystique de sainte Catherine (petite ébauche inachevée)
  • Foth Worth, Kimbel Art Museum Vierge à l'enfant

Dessins

  • Hambourg, Kunsthalle, Mariage d'Alexandre et Roxane
  • Angers, Musée des Beaux Arts, La Guérison des malades
  • Berlin, Kupferstichkabinett Gemäldegalerie, Étude des saintes Lucie et Apollonie ; Étude de Diane et Attéon
  • Chatsworth, Chatsworth Settlement, Le mariage de la Vierge; Jeune homme avec chiens ; Autoportrait
  • Londres, British Museum, Autoportrait avec un chien ; Jeune homme en pieds ; Étude de prophète ; Étude de nus ; Étude pour la décoration de la Steccata ; Étude de philosophe assis ; Étude de canéphore
  • Londres, Collection Seilern, La Conversion de saint Paul
  • Londres, Victoria and Albert Museum, Intérieur d'église avec la "Présentation au temple"
  • Modène, Galleria Estense, Homme en pieds ; Étude pour la décoration à rosaces de la Steccata
  • Naples, Museo Nazionale di Capodimonte, Femme assise; Descente du Saint-Esprit
  • New York, Metropolitan Museum, Études pour le Moïse de la Steccata
  • Paris, Louvre, Saint Jérôme assis chez un arbre ; Madone avec l'Enfant et le jeune saint Jean-Baptiste ; Marsia ; Jupiter et Antiope ; Étude de putti ; Étude de garçon ; Sainte Famille avec un ange; Étude de canéphores pour la Steccata ; Homme assis sur une bateau; Tête de chien ; Étude d'homme nu assis ; Madone et cinq saints; Scène mythologique; Deux putti en vol; Sainte Cécilie qui joue le violon ; Homme assis sur une savonarola
  • Parme, collection privée, Madeleine lave les pieds à Jésus ; La Vierge et l'Enfant
  • Rome, Istituto Nazionale per la Grafica, Nu en pieds de profil
  • Stockholm, Nationalmuseum, Crabec
  • Suisse, collection privée, Madone; Sainte Famille et saints
  • Turin, Biblioteca Reale, Vierge et l'Enfant, saint Joseph et le jeune saint Jean-Baptiste
  • Venise, Gallerie dell'Accademia, Vierge et l'Enfant, saint Jérôme, saint François et d'autres figures

Bibliographie

  • Ludovico Dolce, Dialogo della pittura intitolato l'Aretino (Dialogue de la peinture intitutlé l'Arétin), Venise, 1557
  • Giorgio Vasari, Le Vite, Florence, 1568
  • Francesco Scannelli, Il microcosmo della pittura, Césène, 1657
  • I. Affò, Vita del graziosissimo pittore Francesco Mazzola detto il Parmigianino, Venise, 1783
  • C. Blanc, Histoire des peintres de toutes les écoles - Écoles lombardes, Paris, 1875
  • L. Frölich-Bum, Parmigianino und der Manierismus, Vienne, 1921
  • G. Copertini, Il Parmigianino, Parme, 1932
  • S. J. Freedberg, Parmigianino. His Work in Painting, Cambridge, 1950
  • J. Burckhardt, Il Cicerone, Firenze, 1952 (ed. or. Bâle, 1855)
  • F. Bologna, Il Carlo V del Parmigianino, in "Paragone", 73, 1956
  • G. Briganti, La maniera italiana, Rome, 1961
  • A. Hauser, Il Manierismo, Turin, 1965
  • R. Pallucchini, Lineamenti di Manierismo Europeo, Padoue, 1968
  • A. Ghidiglia Quintavalle, Gli affreschi giovanili del Parmigianino, Milan, 1968
  • Giulio Carlo Argan, Storia dell'arte italiana, Florence, 1968
  • M. Fagiolo Dell'Arco, Il Parmigianino. Un saggio sull'ermetismo del Cinquecento, Rome, 1970
  • Augusta Ghidiglia Quintavalle, Gli ultimi affreschi del Parmigianino, Milan, 1971
  • P. Rossi, L'opera completa di Parmigianino, Milan, 1980
  • M. Di Giampaolo, Quattro studi del Parmigianino per la « Madonna dal collo lungo », in « Prospettiva », 1984
  • K. Oberhuber, Nell'età di Correggio e dei Carracci, catalogo della mostra, Bologne, 1986
  • M. Lucco, Un Parmigianino ritrovato, catalogo della mostra, Parme, 1988
  • M. Di Giampaolo, Parmigianino. Catalogo completo, Florence, 1991
  • A. Coliva, Parmigianino, Florence, 1993
  • C. Gould, Il Parmigianino, Milan, 1994
  • Maria Christina Chiusa, Parmigianino, Milan, 2001
  • Mary Vaccaro, Parmigianino. I dipinti, Turin, 2002
  • S. Ferino-Pagden, F. Del Torre Scheuch, E. Fadda, M. Gabriele, Parmigianino e la pratica dell'alchimia, Milan, 2003
  • Vittorio Sgarbi, Parmigianino, Milan, 2003
  • Mario Di Giampaolo, Elisabetta Fadda, Parmigianino. Il catalogo completo delle opere, Santarcangelo di Romagna, 2003
  • Augusta Ghidiglia Quintavalle, Parmigianino, Milan 2004

Sources

  • (it) Cet article est partiellement ou en totalité issu dune traduction de larticle de Wikipédia en italien intitulé « Parmigianino ».

Notes et références

  1. Collection Stiebel
  2. Document du 27 octobre qui atteste que Parmigianino est encore créditeur dune rémunération qui lui est due

Articles connexes

  • x


Giorgio Vasari le cite et décrit sa biographie dans Le Vite :
Page ?? - édition 1568
119 le vite, francesco mazzuoli.jpg

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