- Léopold III de Belgique
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Léopold III Léopold et son épouse Astrid de SuèdeTitre 4e roi des Belges 23 février 1934 – 16 juillet 1951
17 ans, 4 mois et 23 joursRégent Charles de Belgique (1944-1950) Premier ministre Georges Theunis
Paul van Zeeland
Paul-Émile Janson
Paul-Henri Spaak
Hubert Pierlot
Jean DuvieusartPrédécesseur Albert Ier Successeur Baudouin Biographie Dynastie Maison de Saxe-Cobourg Nom de naissance Léopold Philippe Charles Albert Meinrad Hubertus Marie Miguel de Saxe-Cobourg Date de naissance 3 novembre 1901 Lieu de naissance Bruxelles-ville (Belgique) Date de décès 25 septembre 1983 (à 81 ans) Lieu de décès Woluwe-Saint-Lambert (Belgique) Père Albert Ier de Belgique Mère Élisabeth de Bavière Conjoint Astrid de Suède (1926-1935)
Lilian Baels (1941-1983)Enfants Princesse Josephine-Charlotte
Baudouin
Albert II
Prince Alexandre
Princesse Marie-Christine
Princesse Marie-EsméraldaRésidence Palais royal de Bruxelles
Rois des Belges modifier Léopold III (Léopold Philippe Charles Albert Meinrad Hubertus Marie Miguel) (3 novembre 1901, 25 septembre 1983) est le quatrième roi des Belges; il a régné du 23 février 1934 au 16 juillet 1951. Il était le fils d'Albert Ier et d'Élisabeth de Bavière. Léopold III a abdiqué au terme de la longue polémique et de la crise nationale suscitée par son comportement controversé lors de la Seconde Guerre mondiale.
Jeunesse et mariage
Fichier:Leopold III.JPGCelui que l'histoire retient sous le nom de Léopold III de Belgique, roi des Belges, fut incorporé, encore adolescent, comme simple soldat durant la Première Guerre mondiale dans le 12e Régiment de Ligne. Après la guerre, il fut inscrit au St. Anthony Seminary à Santa Barbara, Californie.
Du 23 septembre au 13 novembre 1919, à l'âge de dix-huit ans il se rend en visite officielle aux États-Unis avec ses parents[1]. Lors d'une visite dans le pueblo indien d'Isleta au Nouveau-Mexique, le roi décore de l'ordre de Léopold le père Anton Docher[2], qui lui offre une croix d'argent et de turquoise faite par les Indiens Tiwas[3]. 10 000 personnes prirent part à ces cérémonies.
En 1926, il rencontra à Stockholm la princesse Astrid de Suède, née le 17 novembre 1905, fille du prince Charles de Suède et nièce du roi Gustave V. Le mariage eut lieu le 10 novembre de la même année et ils eurent trois enfants :
- Joséphine-Charlotte de Belgique, future grande-duchesse de Luxembourg, épouse du grand-duc Jean ;
- Baudouin, roi des Belges (1951-1993) ;
- Albert, prince de Liège, futur Albert II, l'actuel roi des Belges (1993).
En 1935, un accident de voiture à Küssnacht (Suisse) causa la mort de la reine Astrid et blessa le roi, qui était au volant. La disparition de cette reine très populaire fut ressentie comme un deuil national particulièrement douloureux.
Le 11 Septembre 1941 il épousa Lilian Baels dont il eut trois enfants :
- Alexandre, prince de Belgique, né le 18 juillet 1942 et décédé le 29 novembre 2009. Il épousa le 14 mars 1991 Léa Wolman (née le 2 décembre 1951).
- Marie-Christine, princesse de Belgique, née le 6 février 1951. Elle épousa le 23 mai 1981 Paul Druker (dont elle divorça le 9 juillet 1981) et Jean-Paul Gourgues le 28 septembre 1989.
- Marie-Esmeralda, princesse de Belgique, née le 30 septembre 1956. Elle épousa le 4 avril 1998 Salvador Moncada. Elle est maintenant journaliste sous le nom d'Esmeralda de Réthy (titre de sa mère). Descendance : Alexandra, née le 4 août 1998, et Léopoldo, né le 21 mai 2001.
Si les enfants du roi et de Lilian Baels portent bien le titre de prince(sse) de Belgique, ils n'entrent toutefois pas dans l'ordre de succession au trône.
Prémices de la Seconde Guerre mondiale
Face à la menace hitlérienne, en 1936, le Gouvernement belge proclama la neutralité de la Belgique, alors qu'elle avait été l'alliée de la France et du Royaume-Uni pendant la Première Guerre mondiale. Le roi des Belges, Léopold III, appuyait pleinement cette politique dite des « mains libres ». Celle-ci signifiait le retour à la neutralité qui, jusqu'en 1914, avait été une obligation depuis le traité international de 1831 garantissant l'existence de la Belgique. La raison de la décision belge résidait dans la faiblesse des démocraties face aux coups de force successifs des Allemands au mépris du traité de Versailles (réoccupation de la Rhénanie, démantèlement de la Tchécoslovaquie avec la complicité résignée de la France et de l'Angleterre). La Belgique, croyant donc pouvoir se défendre seule, entreprit un effort de réarmement sans précédent. Vingt-deux divisions furent mises sur pied par l'armée belge. À comparer aux cinquante divisions que la France allait parvenir à mettre sur pieds, alors que ce pays était cinq fois plus peuplé que la Belgique. La comparaison était encore plus étonnante par rapport à la Grande-Bretagne avec deux divisions quand l'Angleterre déclara la guerre à l'Allemagne, en septembre 1939, plus deux qui allaient suivre. L'Allemagne, elle, se constituait une armée de cent divisions.
La première conséquence de la neutralité belge fut, dès 1936, de supprimer tout contact officiel entre les états-majors militaires français et belges. En réalité, dès le 28 mars 1939, le général Laurent, attaché militaire français à Bruxelles commença des contacts secrets avec le général van Overstraeten, conseiller militaire particulier du roi et avec l'accord de celui-ci. Il en retira de quoi communiquer de précieux renseignements sur les plans militaires belges au « Deuxième bureau » du service de renseignements français du Ministère de la Défense, à Paris[4],[5]. En plus de cela, en octobre 1939, après la déclaration de guerre de la France et de l'Angleterre à l'Allemagne, le roi convint avec le général en chef français Maurice Gamelin d'une concertation renforcée. Vu la nécessité de parachever le réarmement, vu l'attentisme des Franco-Anglais sur le front, il était nécessaire pour la Belgique d'éviter toute provocation vis-à-vis de l'Allemagne, l'armée n'étant pas encore prête à résister à une attaque allemande que l'on sentait venir. Ces contacts franco-belges furent révélés par le général français lui-même dans ses mémoires[6] et aussi par la parution, après la guerre, d'une publication officielle française[7]. Connaissant l'existence en Belgique d'une « cinquième colonne » d'espions pro-nazis, on avait voulu protéger le secret en organisant la transmission des informations par la liaison la plus courte, assurée par le lieutenant-colonel Hautcoeur, attaché militaire français à Bruxelles qui avait succédé au général Laurent et qui communiquait personnellement avec le généralissime français. Parfois même, la liaison entre le roi Léopold III et le général en chef français Gamelin se faisait directement, ou alors par l'intermédiaire du général van Overstraeten, conseiller militaire du roi, qui avait des contacts suivis avec Hautcoeur qu'il connaissait personnellement pour l'avoir eu comme élève à l’École royale militaire de Bruxelles. Avec l'accord du gouvernement dont le premier ministre était le très catholique Hubert Pierlot et le ministre des Affaires étrangères Paul Henri Spaak représentant le Parti socialiste (qui s'appelait alors Parti ouvrier), ces échanges continuèrent jusqu'à l'attaque allemande[8].
En janvier 1940, le général belge van Overstraeten prévint les Français que l'attaque allemande était prévue en Ardenne, comme le prouvaient des documents stratégiques saisis par les Belges dans un avion allemand qui avait fait un atterrissage forcé en Belgique[9]. Encore, dès le 8 mars, puis le 14 avril 1940, sur la foi de renseignements de l'attaché militaire à Berlin recoupés par des sources provenant d'espions alliés en Allemagne, le roi en personne avertit le général Gamelin, chef suprême de l'armée française, que le plan allemand prévoyait une attaque par l'Ardenne[10]. Et l'attaché militaire français à Berne envoyait, le 1er mai, un message radio à son état-major disant que l'attaque aurait lieu entre le 8 et le 10 mai avec Sedan comme but de l'effort principal[11]. Mais l'état-major français se rangeait à l'avis du maréchal Pétain, personnalité prestigieuse et Président du Conseil supérieur de la Guerre de France, selon qui l'Ardenne était impénétrable pour une armée moderne[12]. Aussi, les avertissements belges restèrent-ils sans suite.
La campagne des dix-huit jours
Le 10 mai 1940 eut lieu l'attaque allemande redoutée. Ce sera ce que l'on appellera la campagne des 18 jours. L'armée belge fut bousculée sur le canal Albert et tournée sur sa gauche par la défaite éclair de l'armée hollandaise, tandis que, comme les Belges en avaient prévenu les Français longtemps à l'avance, la Wehrmacht perçait à Sedan, en Ardenne française. C'est le 12 mai que commença la percée, soit après deux jours de résistance d'éléments avancés belges, les Chasseurs ardennais. Les troupes de Sedan, qui avaient eu 48 heures pour se préparer, mais qui étaient composées de réservistes de série B, mal équipés et installés dans des défenses embryonnaires[13] étaient bousculées et faisaient retraite (la « panique de Bulson »). L'armée belge, également en recul devant la percée de la Meuse, et aussi menacée sur son flanc gauche par le vide laissé par les Hollandais, liait ses mouvements à ceux des Français. Le roi avait accueilli, dès le 10 mai, un nouvel officier supérieur français de liaison, le général Champon arrivé au Grand quartier général belge de Breendonck, porteur des plans alliés et d'une délégation de commandement que le roi acceptait pour lui-même, comme elle avait déjà été faite par le général en chef français Gamelin au général Georges[14]. Mais les tentatives de ressouder un front franco-belgo anglais n'aboutirent pas, la stratégie alliée du front continu, inspirée de 1914-1918, se révélant inadaptée à la stratégie allemande faite de puissantes percées étroites menées par des chars rapides sous le parapluie d'une aviation en surclassement. Après des reculs successifs en liaison avec les alliés franco-anglais auxquels elle ne pouvait que lier son sort, l'armée belge se trouva acculée sur la Lys après deux semaines de combats. Mais, dès le 15 mai, le mot défaite avait été prononcé par le Président du Conseil français Paul Reynaud dans un appel téléphonique angoissé au Premier ministre britannique Winston Churchill[15]. Des bruits pessimistes commençaient à courir dans les états-majors et dans le personnel politique des pays attaqués par l'Allemagne. Ils parvenaient jusqu'au roi par des amis qui avaient des relais dans les milieux politiques français et anglais et, notamment, dans l'aristocratie anglaise.
Après la dure et coûteuse bataille de la Lys livrée par l'armée belge pendant cinq jours, la seule bataille d'arrêt de toute la campagne de mai 1940, le roi Léopold III décida la reddition des forces belges combattant sur le front des Flandres. Il n'y eut pas de signature du roi, ce qui aurait été nécessaire s'il se fut agit d'une capitulation générale de toutes les forces. Or, si la constitution déclare que le roi déclare la guerre, ce qui est une acte autant civil que militaire, cela entraîne la co-signature d'un ministre, comme pour tout acte du roi. Aussi, le premier ministre Pierlot et le ministre des affaires étrangères Spaak, restés en Belgique, entendaient-ils être associés à toute décision royale de cesser les hostilités. Mais, selon le roi, il ne s'agissait pas d'une capitulation de la Belgique, mais de la cessation des combats dans une zone donnée, ne concernant pas les forts de l'est ni les forces du Congo belge. Ces dernières purent ainsi combattre aux côtés des anglais en Afrique orientale et remporter les victoires qui permettraient à la Belgique de de se ranger aux côtés des alliés durant toute la guerre, de même que la reconstitution de forces belges de terre et de l'air en Grande Bretagne. La reddition du 28 mai était donc d'une décision strictement militaire du ressort exclusif du commandement sur le terrain et il n'y avait pas lieu d'y associer le gouvernement, l'état de guerre entre la Belgique et l'Allemagne n'étant en rien remis en cause. Et, pour que les choses soient claires, c'est le sous-chef d'état-major, le général Derousseau, qui, en sa qualité de responsable de la situation des troupes sur le terrain, fut chargé de se rendre auprès des Allemands et de signer avec eux une reddition au sens le plus étroit, celle-ci ne concernant que l'armée de campagne. Il fallut d'ailleurs un ordre séparé de reddition adressé par radio aux derniers forts de l'Est encore tenus par l'armée de forteresse — dont le commandement était distinct de celui de l'armée de campagne — pour qu'ils acceptent de se rendre. De même, l'armée du Congo n'était en rien comprise dans la reddition, au contraire de ce qui se passa lors de l'armistice franco-allemand qui incluait un contrôle germano-italien des troupes françaises d'Afrique. On ne peut donc parler de capitulation, comme on le fait en général, et encore moins d'armistice qui est un acte politique entre gouvernements, mais d'une reddition limitée à la seule zone où combat l'armée belge de campagne. Le roi a estimé nécessaire d'arrêter les combats là où ceux-ci devenaient impossibles et menaçaient de tourner au massacre, surtout pour les réfugiés, deux millions de civils belges, hollandais et français acculés dans un espace restreint exposé à l'aviation ennemie toute puissante.
Dès qu'il eut pris sa décision, le roi l'écrivit dans une lettre au roi d'Angleterre en précisant qu'il s'agirait d'une reddition militaire et que, en aucun cas, il ne serait question de traiter politiquement avec l'Allemagne. Le roi fit part de sa décision en s'adressant personnellement au général français Blanchard, commandant de l'armée du Nord, dès le 26 mai. Il décrivait la situation de l'armée belge, ne donnant plus que peu de temps à celle-ci, pour s'effondrer, ce qui se produisit le 28. Au moment de la reddition, des troupes lâchaient prises, tant pour des raisons morales que parce que l'on arrivait au bout des stocks de munitions. La communication de la décision royale fut enregistrée par le colonel Thierry des services français d'écoute, comme le précise un auteur français, le colonel Rémy. On ne sait si cette communication arriva jusqu'à l'état-major français[16]. Avant même de prendre sa décision, le roi avait constaté que son armée épuisée était abandonnée, à sa droite, par l'armée britannique qui préparait son rembarquement à Dunkerque, aussi informa-t-il l'officier de liaison anglais, Keyes en personne, des conséquences qui allaient en résulter. Cet officier anglais avoue dans ses mémoires : « J'ai l'intention de ne pas dire encore aux Belges que le corps expéditionnaire britannique a l'intention de les abandonner[17]. » Mais le roi Léopold et l'État-major belge, avant même d'être avertis officiellement par Keyes, avaient été mis au courant par leurs propres soldats qui avaient constaté le vide laissé à leur droite par l'abandon anglais. À ce moment, une parole qui mérite d'être qualifiée d'historique est prononcée par le général en chef anglais Gort. Forcé, sur ordre exprès de Londres, d'abandonner l'armée belge, il dit à l'officier de liaison anglais Keyes : « les Belges nous considèrent-ils comme de vrais salauds ? » [18]
Le général Raoul Van Overstraeten, conseiller personnel du roi et héros de 1914-1918, en Belgique et en Afrique, était d'avis de continuer les combats pour qu'il soit clair que les Belges ne laissaient pas tomber les bras. Les quelques ministres belges restés au pays, exposés à tomber aux mains de l'ennemi, étaient opposés non à la reddition, mais à la date de celle-ci qu'ils voulaient au moins repousser, en tout cas pour permettre au roi de les accompagner en France en vue d'y continuer la lutte. Mais le roi leur signifia qu'il pensait, au contraire, qu'il devait rester au pays pour continuer la lutte à sa façon, comptant que sa position royale, qu'il croyait propre à en imposer à Hitler, pourrait lui permettre de s'opposer à toute entreprise allemande envers l'intégrité nationale. Après de dramatiques confrontations avec les principaux ministres, dont Hubert Pierlot, Premier ministre, et Paul-Henri Spaak, ministre des Affaires étrangères, qui voulaient le convaincre de se soustraire à l'ennemi, le roi, renonçant à les révoquer comme il en avait pourtant le droit constitutionnel, les laissa partir en France, porteurs du pouvoir légal[19].
Mais derrière l'apparence de l'autorité, le roi Léopold III de Belgique montrait alors, selon certains témoins, les signes d'un effondrement psychologique. Le premier ministre Hubert Pierlot décrit le roi : « Échevelé, l'œil fixe et, pour tout dire, hagard… Sous l'influence des émotions des derniers jours[20]. » Les faiblesses que les démocraties avaient montrées avant la guerre, l'insuffisance militaire alliée, y compris belge, devant l'armée allemande, venant s'ajouter au lâchage anglais constituèrent, pour le roi, une somme qui, soudain, le laissa seul et nu devant l'évidence d'une défaite qui lui parut un abîme dans lequel la Belgique risquait de disparaître. Se fondant sur une conception aristocratique de sa fonction royale, il crut alors qu'il pourrait, à lui tout seul, faire obstacle à des menées allemandes contre la survie du pays.
Mais, quand il prend sa décision, il ne s'agit pas, pour Léopold III, de conclure un armistice entre la Belgique et l'Allemagne. Le roi fait savoir à l'officier de liaison britannique, l'amiral Keyes, « qu'il n'est pas question de faire quoi que ce soit qui ressemble à une paix séparée ». L'armée à bout s'effondra, mais la Belgique restait, de fait, en état de guerre. Au contraire de ce que répètent des ouvrages étrangers, Léopold III ne signa aucune capitulation, il faut le rappeler, ni les ministres partis en exil porteurs de tous leurs pouvoirs. L'acte de reddition ne comporta aucune clause politique, au contraire de l'armistice que les Français négocieront trois semaines plus tard, engageant la France dans la voie de la collaboration[21].
La controverse : le début de « l'Affaire royale »
De cette reddition a découlé toute « l'Affaire royale » qui mina la vie politique belge pendant les dix années qui l'ont suivie et n'a pas fini, au début du 21e siècle, de faire sentir les lames de fond d'un « tsunami » qui produit encore ses ultimes effets dans certains esprits. Le roi fut tout d'abord accusé d'avoir trahi la cause alliée. Cependant, Winston Churchill, dans ses mémoires d'après la guerre, lavera l'armée belge de tout soupçon d'avoir compromis le rembarquement de Dunkerque (après l'avoir condamnée en mai-juin 1940)[22]. La décision du roi de se constituer prisonnier, prise contre l'avis du gouvernement, fut d'ailleurs blâmée, plus tard, par une partie du parlement belge replié en France, soit 143 présents sur 369 qui condamnérent la décision du roi. La légalité de ce vote n'était pas atteinte, vu l'insuffisance de l'effectif réuni, ce qui s'explique par l'impossibilité de convoquer tous les parlementaires, beaucoup ayant rejoint l'armée, les autres étant soit restés en Belgique, soit injoignables au sein de la masse des réfugiés. D'ailleurs, le roi avait signifié aux ministres qu'étant légalement le commandant en chef de l'armée, il n'avait pas de comptes à rendre aux autorités civiles pour décider une reddition, cela de par la loi martiale qui, en temps de guerre, donne au roi tous les pouvoirs militaires[23]. C'est donc comme chef d'armée qu'il entend rester avec les soldats, à faute de quoi il serait, selon sa conception, un déserteur. Il s'y croit encouragé par l'attaché militaire anglais Keyes, comme le constate le ministre des affaires étrangères Spaak resté auprès du roi avec le premier ministre Pierlot et le ministre des finances Camille Gutt. Selon Keyes, Churchill, interrogé sur le sort de la famille royale, a répondu : « La place d'un chef est au milieu de son armée[24]. » Et c'est toujours Keyes, le 24 mai, qui transmet au ministre Gutt un mémorandum anglais qui signale que « l'évacuation de la famille royale et des ministres est possible, mais qu'il n'est pas souhaitable, selon les meilleurs avis militaires, qu'il faille presser le roi de quitter son armée dans la nuit[25]. » L'opinion anglaise eut-elle été différente le 28 ? On ne pouvait le savoir car les communications avec Londres cessèrent dès le 27. Et, de toute façon, on croit pouvoir estimer que, dans la conception rigide que Léopold III a toujours eue de sa fonction royale, il devait penser qu'un roi ne se plie pas aux décisions étrangères, même alliées.
Que l'on conteste la décision du roi ou non, il n'en est pas moins vrai que les armées allemandes venaient de battre les Alliés. Dès lors se posait une question : le roi allait-il fuir ? Celui-ci estimait qu'il ne pouvait quitter ses soldats au risque d'être considéré comme déserteur, cela d'un point de vue strictement militaire. D'autre part, d'un point de vue politique, il s'agissait, selon ses dires et ceux de ses partisans, d'utiliser sa présence dans le pays pour se dresser, face à l'Allemagne, en incarnant à lui tout seul la légitimité belge comme obstacle à la division de la Belgique que l'occupant avait déjà entreprise en 1914-1918. Léopold III voulait ainsi respecter son serment constitutionnel de défendre l'intégrité du territoire. Mais par sa seule présence, sans aucune collaboration active, conception qui parut porter ses fruits, au début, l'Allemagne étant obligée de gérer le pays en y installant un gouverneur militaire sans intention, apparemment, de le diviser.
Les ministres, eux, ne croyant pas que les Nazis auraient des scrupules à liquider la nationalité belge, quittèrent le pays, décidés à incarner la légitimité nationale face à l'étranger, croyant que la France où ils s'étaient réfugiés allait continuer la guerre.
Ce que l'on appela de suite la capitulation belge provoqua la stupeur du président du Conseil français Paul Reynaud, qui la dénonça. Le plus grave, d'après Paul Reynaud — qui le déclara publiquement dans une allocution à la radio française —, c'est que le roi n'aurait prévenu personne. Mais il a été prouvé, après la guerre, que Léopold III, voyant venir le rembarquement anglais, alors que rien n'était prévu pour l'armée belge, avait prévenu le roi d'Angleterre en personne, par une lettre du 25 mai, de l'effondrement de l'armée belge qu'il estimait proche[26]. D'autre part, le colonel français Thierry, chef du central de téléphonie par radio de l'armée française, avait capté, dès le 26 mai, les messages du roi au général français Blanchard avertissant celui-ci qu'il serait dans la nécessité de se rendre dans les deux jours[27]. On peut ajouter que l'on sait que la présence, face à la Wehrmacht, d'une masse vaincue de soldats belges qu'il ne fallait plus combattre mais qu'il fallait désarmer, en l'obligeant à dégager un champ de bataille encombré d'épaves avec des routes coupées, suffit à retarder les Allemands plus de 24 heures après le 28 mai.. Et ce, d'autant plus que, dans la seule zone encore contrôlée par l'armée belge, il y avait plus de 800 000 réfugiés (et certains auteurs vont jusqu'à citer 2 000 000 de réfugiés pour la totalité de la zone encore tenue par l'ensemble des forces alliées). Ces masses de civils opposaient passivement leur foule terrorisée à la progression des troupes sans que les généraux allemands osent encore les faire massacrer, comme quelques jours auparavant, lorsque leurs soldats utilisaient des masses d'otages en les faisant avancer devant eux sous le feu des troupes belges, à Vinkt, pendant la bataille de la Lys. D'autre part, avant le cessez-le-feu, le roi fit transporter des troupes françaises par des camions de l'armée belge pour leur permettre d'échapper aux Allemands.
Mais on peut excuser Paul Reynaud pour sa condamnation sans nuances de Léopold III. Il était sans doute sincère en clamant sa stupeur car il a été prouvé qu'on lui avait caché la situation dramatique des Alliés sur tous les fronts, et notamment de celle des Belges. Il avait déjà dû reconnaître son ignorance de la tragique réalité, dès le 16 mai, lorsqu'il découvrit, avec la même stupeur, que l'état-major français lui avait caché que l'armée française n'avait plus de réserves, comme le général en chef français Gamelin dut l'avouer devant lui et Churchill, venu assister à une réunion de guerre[28],[29].
Quoi qu'il en soit et sans s'informer davantage, Paul Reynaud, en proie à une colère impuissante devant les événements, fit radier le roi de l'ordre de la Légion d'honneur. Pendant ce temps, la reine Wilhelmine des Pays-Bas, dont l'armée s'était rendue au bout de cinq jours, était arrivée à Londres amenée par un navire de guerre hollandais qui n'avait pu la débarquer en Zélande où elle aurait voulu s'installer pour incarner la légitimité nationale. La Grande-Duchesse Charlotte de Luxembourg, elle, s'était réfugiée à Londres dès le 10 mai. Le gouvernement belge, quant à lui, réfugié en France, nantis de tous ses pouvoirs, déclara le roi « dans l'impossibilité de régner », comme le prévoit la Constitution belge lorsque le roi est dans une situation qui le met hors d'état d'exercer sa fonction, ce qui était incontestablement le cas puisqu'il était soumis à l'ennemi. Dans ce cas, la Constitution prescrit que le gouvernement doit exercer le pouvoir collégialement, mais avec l'approbation du parlement, lequel doit alors nommer un régent. Devant l'impossibilité de réunir valablement les députés et les sénateurs en nombre suffisant, alors que plusieurs étaient partis à l'armée et que les autres étaient soit restés en Belgique, soit réfugiés on ne savait trop où, le gouvernement décida de se passer de formalités légales et d'exercer son pouvoir de fait et par force majeure jusqu'à la libération de la Belgique. Finalement, en 1944, les chambres réunies à Bruxelles, peu après la libération de la ville, ratifièrent le comportement du gouvernement durant la guerre.
L'occupation allemande. Le roi en Belgique, le gouvernement en exil
Dès lors, il y eut, en Angleterre, un gouvernement belge en exil et, en Belgique, un roi en résidence surveillée au château de Laeken, à Bruxelles. Le 19 novembre 1940, Léopold III fut convoqué par Adolf Hitler pour s'entendre prophétiser le sort d'une future Europe allemande englobée dans le « grand Reich germanique ». Le roi tenta de discuter du sort de la population civile et de la libération des soldats prisonniers, mais sans obtenir de résultats. L'entrevue fut froide. Il n'y eut point d'entente, comme avec Pétain à Montoire, pour une soi-disant collaboration dans l'honneur, selon les mots du maréchal. Au contraire de la France, la Belgique était toujours en guerre, le roi n'ayant pas signé d'armistice, comme les Français, et rien fait qui puisse faire croire à une paix séparée. Le roi passa la guerre, empêché de poser tout acte politique. Cependant, il ne manquait pas de Belges pour rêver de le voir prendre la tête d'un régime plus autoritaire, voire d'une « dictature royale ». Cela aurait pu correspondre à certains de ses penchants connus pour les solutions autoritaires en vogue dans l'Europe d'avant-guerre. Son comportement avec le gouvernement lors de la capitulation pouvait le laisser penser, et des encouragements officieux donnés à des personnalités collaborationnistes comme Robert Poulet sont avérées. Mais la décision d'Hitler, le 4 juin 1940, de considérer le roi Léopold III comme prisonnier de l'armée allemande en lui interdisant toute activité politique, venant après la constatation par le gouvernement belge, en juin, de l'impossibilité de régner pour un roi des Belges prisonnier, mirent de fait Léopold III à l'abri de toute tentation de prise du pouvoir[30].
La seule façon pour le roi d'exercer le pouvoir légalement eût donc été de préserver son pouvoir constitutionnel. Pour cela, il aurait dû négocier un armistice, ce qui est un acte non seulement militaire, mais politique, cela nécessitant un accord gouvernemental. Mais il n'y eut rien de ce genre, contrairement à une opinion encore répandue. Si cela avait été, le roi aurait peut-être obtenu des Allemands de conserver son pouvoir légal, comme ce fut le cas lorsque les Français obtinrent, le 17 juin, que les Allemands reconnaissent le pouvoir légal du maréchal Pétain sur la France. Le maréchal pourrait alors, croyait-on, exercer légitimement son autorité au regard de la loi française, et « dans l'honneur » face à l'Allemagne, comme il le déclara dans un discours aux Français[31] (ce qui allait se révéler illusoire). Or, le 28 mai 1940 — alors que l'on ne pouvait prédire ce que serait le choix des Français en juin — Léopold III, en se limitant à une reddition militaire signée seulement par un sous-chef d'état-major adjoint, avait exclu d'office toute entente politique avec l'Allemagne nazie qui eut pu paraître une collusion. Il avait vu juste car cette situation de complicité serait celle, plus tard, du gouvernement français avec l'Allemagne. Le résultat de l'attitude royale fut que la Belgique allait, d'emblée, être traitée par l'Allemagne comme un pays occupé sans gouvernement. Les collusions avec l'ennemi furent le fait d'individus ou de partis et non de l'État qui n'existait plus que sous la forme d'un gouvernement en exil à qui les alliés reconnaissaient le pouvoir légal sur le Congo et sur les Belges dans le monde. Ce fut l'honneur de ceux qui continuèrent le combat d'incarner une Belgique en guerre au nom du régime légal, ce qui ne fut pas le cas du Danemark dont le roi s'était mis avec son gouvernement sous la « protection de l'Allemagne ». Ce qui ne fut pas non plus le cas de la France qui dut assumer une collaboration avec l'Allemagne qui la mena jusqu'à participer, en tant qu'état souverain, à l'effort de guerre du Reich et aux persécutions exercées par la milice du maréchal Pétain. Rien de tout cela en Belgique. Les actions pro ennemies furent uniquement le cas de membres de l'administration et de sociétés privées qui choisirent de se mettre au service de l'ennemi.
Léopold III, qui n'exerçait plus aucun pouvoir légal, savait qu'il ne pouvait défendre les Belges contre les abus de l'occupant que par l'obstacle purement passif de sa seule présence, notamment, contre des intentions de séparation de la Flandre et de la Wallonie. Aussi, dès 1941, Hitler regrettait-il que le roi des Belges « n'ait pas décampé comme le roi de Norvège et la reine des Pays-Bas ». Prisonnier de l'armée allemande, le roi confortait de fait le pouvoir de celle-ci sur la Belgique en plaçant le pays sous l'autorité du gouverneur militaire Alexander von Falkenhausen (qui se révéla plus tard anti-hitlérien). Selon une conception toute militaire que le haut commandement de la Wehrmacht était parvenu à imposer à Hitler, seul un général commandant en chef de la Wehrmacht, et de surcroît membre de la noblesse comme von Falkenhausen, était habilité à garder un prisonnier de l'envergure d'un roi, qui avait, de plus, lui-même le grade de général commandant en chef, le plus élevé de l'armée belge. Cette situation empêcha Hitler d'appliquer en Belgique une Zivilverwaltung, c'est-à-dire de remplacer le gouverneur von Falkenhausen par une administration civile allemande, autrement dit de mettre une administration SS au pouvoir. De ce fait, la présence royale put retarder les intentions allemandes d'annihilation de la Belgique[32],[33]. Mais les projets nazis finirent tout de même par se réaliser, lorsque le Führer abandonna la retenue légaliste qu'il avait affectée pour ménager les généraux traditionalistes de la Wehrmacht (sous l'influence aussi des diplomates allemands de la vieille école). Hitler déporta le roi et rappela le gouverneur von Falkenhausen qui fut mis en prison. La séparation de la Flandre et de la Wallonie allait suivre, les régions rebaptisées Gaus germaniques étant placées sous l'autorité de traîtres belges entrés dans la SS, trop tard heureusement car la fin de la guerre était proche.
Le choix de Léopold III le rendit très populaire au début de l'occupation allemande, la population en désarroi lui étant reconnaissante d'être resté au milieu d'elle sur le sol national et voyant dans le souverain un repère et même un bouclier contre les occupants. L'Église, par la voix du cardinal Van Roey, approuva son choix et lui apporta son soutien. Une partie de la Résistance active belge, dite « léopoldiste », se réclamera également du roi. L'attitude de celui-ci sera souvent approuvée et défendue comme une forme de « résistance passive », notamment par la partie catholique et flamande de la population[33].
Léopold III n'eut aucun signe de solidarité envers le gouvernement belge en exil dont les principaux membres furent, durant toute la guerre, le premier ministre Hubert Pierlot et le ministre des affaires étrangères Paul Henri Spaak qui continuaient la lutte à Londres. Des contacts eurent bien lieu par l'intermédiaire d'agents belges infiltrés depuis l'Angleterre, mais la dernière de ces tentatives se termina par l'arrestation et la mise à mort du messager alors qu'il tentait de rentrer en Angleterre. Ce contact aurait peut-être été décisif car c'est le propre beau-frère du premier ministre Pierlot qui s'était dévoué pour entrer clandestinement en Belgique. Il parvint à rencontrer le roi, mais, du fait de son exécution, on ne saura peut-être jamais si ce contact aurait pu permettre une entente politique en vue d'une conciliation avec le gouvernement en exil. Ce qui est sûr, c'est qu'à la place de cette entente, on assista à la naissance d'une profonde méfiance royale vis-à-vis du monde politique, et même des Alliés, qui s'exprime bien dans le "testament politique" du roi.
Le gouvernement belge en exil continue la guerre sans le roi
Grâce au gouvernement en exil, la Belgique continua à être présente dans la guerre avec 28 pilotes belges engagés dans la bataille d'Angleterre. Plus tard, trois escadrilles belges combattirent dans la Royal Air Force et dans la South African Air Force. La totalité de la flotte marchande belge fut mise à la disposition des alliés et une unité militaire de force terrestre fut reconstituée en Grande-Bretagne, la Brigade Piron qui, en 1944 et 1945, allait participer aux combats de la libération dans le nord de la côte française et en Belgique, tandis que les troupes de la colonie allaient remporter des victoires en Abyssinie jusqu'à contraindre les Italiens à capituler à Saïo. Cependant que le Congo belge participait à l'effort de guerre allié par ses richesses agricoles et minérales, notamment l'uranium.
Le roi avait cependant tenté d'exercer une influence politique en communiquant à l'ambassade de Belgique en Suisse les « instructions de Berne », par lesquelles il recommandait que le Congo soit placé en état de neutralité, ajoutant qu'il souhaitait que le corps diplomatique belge à travers le monde se montre courtois avec les diplomates allemands[34]. Mais tout cela ne pouvait être que platonique, car la perte de tous ses pouvoirs par le roi enlevait toute portée à ses initiatives. De plus, l'Italie ayant déclaré la guerre à la Belgique, le Congo Belge put-il participer à la guerre le plus légitimement du monde en envoyant des troupes attaquer les Italiens en Abyssinie. D'autre part, la Belgique participa à l'effort de guerre allié par les ressources agricoles et minières du Congo (or, étain, uranium). Et, de plus, la campagne victorieuse d'Abyssinie se termina par les victoires de Gambela et de la rivière Bortaï et la prise de Saïo contre les Italiens[35]. Quant au corps diplomatique, à part quelques démissions, il se rangea du côté du gouvernement belge.
Le remariage du roi et ses conséquences dans une Belgique écrasée
Léopold III se remaria secrètement en septembre 1941 et l'annonce en fut faite dans toutes les paroisses le 7 décembre. Il épousait une jeune roturière Lilian Baels, lui refusant le titre de reine et l'élevant au rang de princesse de Réthy. Ce mariage avait été imposé par le cardinal Van Roey pour qui un roi catholique ne pouvait vivre dans le péché avec une maîtresse. Ce souci de moralité entraîna une situation trois fois contraire aux lois belges : d'abord, le roi s'était marié religieusement avant de se marier civilement, ensuite tout mariage royal en Belgique doit être approuvé par le gouvernement pour des raisons d'intérêts nationaux, enfin, croyant plaire à l'opinion publique en excluant les enfants à naître de la succession au trône, le Palais (c'est-à-dire le roi et l'entourage catholique qui le conseillait) anticipait sur une décision normalement dévolue au Parlement. Mais il s'agissait sans doute de montrer que les enfants de la reine Astrid ne risquaient pas d'être évincés de leur apanage, ceci afin de ne pas déplaire à l'opinion publique qui restait très attachée au souvenir de la défunte reine. Mais les Belges furent défavorablement impressionnés par l'annonce machiavélique faite par les autorités allemandes que le Führer Adolf Hitler avait fait envoyer des fleurs et un mot de félicitations à l'occasion du mariage, ce qui parut accréditer l'opinion que la nouvelle épouse avait des sympathies pro allemandes.
Les partisans du roi ont invoqué la disparition du parlement, comme un cas de force majeure, pour justifier le comportement du roi, censé s'en remettre à un parlement futur pour ratifier son mariage après la victoire espérée. Mais, dans la situation dramatique où se trouvait la Belgique, la majorité des citoyens, qui n'oubliaient pas la très populaire reine Astrid morte en 1934, n'apprécièrent donc pas ce remariage. Celui-ci semblait démontrer que Léopold III n'était pas si prisonnier qu'on le croyait, tandis que les soldats prisonniers de guerre, eux, restaient séparés de leurs familles depuis 1940 et que le peuple voyait sa vie de plus en plus précarisée sous l'effet de pénuries diverses (alimentation, chauffage) et des menées de plus en plus dures de la police d'état allemande Gestapo assistée par des traîtres.
La dureté de l'occupation, le roi de plus en plus isolé, le développement de la résistance armée
De nombreux patriotes entrés dans la résistance active et la presse clandestine étaient arrêtés, déportés, torturés et fusillés, tandis que le peuple voyait son sort de plus en plus précarisé malgré le marché noir. C'est que celui-ci était rendu indispensable par la pénurie alimentaire consécutive aux réquisitions opérées par l'occupant au profit de l'armée et de la population allemandes. Dans cette situation, la proclamation du roi, lancée à la population belge lors de la capitulation, disant qu'il partageait le sort de son peuple, se trouvait réduite à rien tant cette situation faisait apparaître son impuissance à soulager la misère de la Belgique. En effet, Léopold III voulut, à deux reprises, montrer son souci du sort de la population en protestant par lettre à Adolf Hitler, contre les déportations et la pénurie de charbon, tout en demandant à nouveau la libération des militaires prisonniers[36]. Pour toute réponse, il fut menacé d'être déporté lui-même, ce qui finit d'ailleurs par arriver.
La Belgique n'avait donc plus, sur son territoire, d'autorité légitimement en droit d'exercer le moindre pouvoir au nom du gouvernement réfugié à l'étranger, et pas davantage au nom du roi. Il faut répéter que celui-ci était dans l'incapacité de régner de par la constitution nationale, ce qui était clairement établi par le gouvernement belge appuyé sur l'avis de jurisconsultes. Avec leurs propres raisons, les nazis avaient renchéri dans le même sens. Le pays était intégralement soumis à l'Allemagne, les hauts fonctionnaires et toutes les administrations, en ce compris les bourgmestres et les commissaires de police, devaient obéir aux autorités d'occupation, une opposition à celles-ci pouvant entraîner la révocation sans traitement et même l'arrestation de ceux qui prétendaient appliquer les lois belges contre la volonté allemande (alors qu'en France, le gouvernement Laval avait gardé l'autorité sur les préfets et les maires, même dans la zone occupée). Dès 1942, de plus en plus de collaborateurs des nazis, V.N.V. et Rexistes, furent nommés à des postes importants en remplacement de Belges patriotes qui osaient défier l'occupant. Des chefs d'entreprises, dans les industries et les banques, étaient arrêtés. Certains furent même assassinés par des traîtres belges au service des S.S. et de la Gestapo, comme le gouverneur général de la Société générale de Belgique, considéré par les Allemands comme jouant double jeu en accord secret avec les alliés et particulièrement les Anglais qui avaient installé en Belgique des réseaux destinés à engager des actions nuisant à l'utilisation des industries, notamment les plus importantes, qui dépendaient du groupe de la Générale. Une autre raison de l'hostilité allemande était la participation, au Congo belge, des sociétés du groupe de la Générale à l'effort de guerre des alliés sous l'égide du gouvernement belge en exil. En Belgique, les mines et les usines mises au service de la production de guerre allemande n'étaient pas seulement celles des grands groupes industriels, mais aussi des P.M.E. et des sociétés publiques comme la Société nationale des chemins de fer belges (SNCB) où des Allemands étaient installés à divers postes, notamment pour surveiller les machinistes de locomotives. A cela s'ajoutait la pénurie alimentaire due aux saisies agricoles, lesquelles étaient accompagnées de rafles d'otages et de juifs ; dans le même temps, la répression de la résistance entraînait emprisonnements, tortures et exécutions capitales. Le fort de Breendonck, une ancienne position de la ceinture fortifiée d'Anvers avait d'ailleurs été transformé en camp de concentration dès 1940. Le pays était écrasé par l'occupant et le roi n'avait qu'un pouvoir imaginaire, celui qu'il s'attribuait d'être un rempart contre la division du pays. Ses deux lettres de protestation à Hitler contre les déportations n'ayant eu aucun effet, les juifs de Belgique - que les Allemands déportaient petit à petit pour un soi-disant regroupement leur offrant un territoire à l'est de l'Europe - décidèrent d'envoyer en Allemagne un belge non juif nommé Victor Martin, membre de la résistance belge (le F.I., Front de l'Indépendance) pour tenter de voir de ses yeux ce qui se passait. Il en revint, après avoir atteint les portes d'Auschwitz, porteur d'une information sans équivoque, le destin des déportés était la mort.
Avec les années, les mouvements de résistance se développèrent. Des officiers et soldats qui n'étaient pas prisonniers avaient fondé, dès la fin de 1940, la légion belge qui allait s'appeler plus tard l'Armée Secrète, reconnue comme unité militaire combattante légale par le gouvernement belge en exil et par les gouvernements étrangers en guerre contre l'Allemagne. D'autres mouvements apparurent, de tendances politiques diverses, comme le Front de l'Indépendance, très à gauche, le Mouvement National Belge et le Mouvement National Royaliste qui entretenait des contacts secrets avec le roi (dont les membres furent les soutiens du roi durant l'affaire royale, affirmant que Léopold III les avaient encouragés à combattre dans la résistance). Des groupes autonomes s'organisèrent spontanément un peu partout, dans les villes pour y faire du renseignement et du sauvetage d'aviateurs alliés abattus, dans les forêts d'Ardenne et en Flandre, comme la Brigade Blanche dite Witte Brigade animée par des Flamands patriotes, ainsi que dans des entreprises et dans les universités. Après la fermeture de l'Université de Bruxelles, promise à devenir une université allemande -que l'occupant n'eut pas le temps d'installer- des ingénieurs de cette université fondèrent le « groupe G » voué à organiser des sabotages sophistiqués. Le résultat en fut « la grande panne » provoquée par la destruction simultanée de dizaines de pylônes et de stations et sous-stations du réseau à haute tension alimentant des industries belges réquisitionnées par l'occupant, ainsi que des usines allemandes qui captaient l'électricité belge.
Il convient de signaler que le chef de la Maison militaire de Léopold III, le général Tilkens, resté en contact officieux avec le roi, s'activa à fournir des armes à des groupements de résistance et que, par son intermédiaire, le roi donna son accord à la nomination, par le gouvernement de Londres, du colonel Bastin à la tête des « Forces de l'Intérieur », principal mouvement de résistance armée[37]. Léopold III sut donc manifester, dans le secret, une identité de vues et d'action avec le gouvernement belge en exil par sa sympathie agissante avec la résistance, dans la mesure où le permettait sa situation de résidence surveillée qui le mettait sous la surveillance d'une unité militaire allemande occupant les palais royaux.
Les justifications invoquées par le roi face à l'Allemagne
Le motif qui résiste le mieux à l'examen parmi ceux qui ont été invoqués par Léopold III pour justifier sa décision de rester en Belgique en 1940 est que l'on pouvait craindre que l'Allemagne reprendrait sa politique de division de 1914-1918. Le roi jugea que par sa seule présence il pourrait s'y opposer, étant dans l'obligation, pour être fidèle à son serment constitutionnel, de défendre l'intégrité du territoire, faute de quoi il serait traître à la patrie. L'armée ayant cessé d'exister, en Belgique, et le gouvernement étant à l'étranger d'où il gérait les intérêts de la Belgique libre engagée dans la guerre, il s'était créé une situation dans laquelle Léopold III estimait que c'était à lui, présent en Belgique, d'empêcher l'Allemagne d'y faire ce qu'elle voulait. Ce choix, qui consistait à croire qu'un seul homme pouvait s'opposer à la machine hitlérienne, parut d'abord empêcher les pires projets allemands, grâce d'ailleurs à la complicité au moins tacite du gouverneur allemand von Falkenhausen. Ce dernier, par calcul, ne favorisa pas les collaborateurs de l'Allemagne dans leurs visées séparatistes. Aristocrate prussien secrètement opposé aux nazis et à leurs visées, il finira d'ailleurs par être arrêté sur ordre d'Hitler et remplacé, au début de 1944, par le Gauleiter nazi Grohé. À ce sujet, dans les mémoires du ministre allemand de la propagande Joseph Goebbels, on relève, en date du 4 mars 1944, une plainte contre le roi dont le ministre voudrait se débarrasser en même temps que de von Falkenhausen[38]. C'était la répétition des plaintes formulées, par le même ministre et par Hitler, en 1940, quand ceux-ci voulaient éliminer Léopold III pour que l'Allemagne soit totalement débarrassée de la fiction politique d'une survie de la Belgique à travers son roi. Cette situation contrastait avec celle des Pays-Bas et de la Norvège où les nazis avaient les mains libres, les souverains de ces pays s'étant enfuis après une résistance symbolique. Quant au Danemark, pratiquement dépourvu d'armée, il s'était trouvé occupé d'emblée. Les Allemands purent y compter sur la collaboration officielle par décision royale en accord avec le gouvernement sans qu'il fut nécessaire de procéder à des réquisitions ou des révocations et des arrestations, comme ils durent le faire en Belgique.
L'attitude allemande face au roi
Mais les diplomates allemands traditionalistes, qui avaient gardé une certaine influence malgré les nazis, parvinrent à imposer une réserve inspirée par la vieille école aux dépens, provisoirement, de la conception nazie des relations humaines et protocolaires. Cette dernière s'était étalée après la capitulation, le 31 mai 1940, lorsqu'un médecin allemand nommé Ghebhardt s'invita d'office chez le roi qui venait d'être mis en résidence surveillée à Bruxelles. Ce visiteur tentait d'organiser une rencontre « spontanée » avec Hitler dans le but d'orienter la politique belge vers une collaboration active comme celle de Pétain-Laval. Cette démarche ne produisit aucun résultat. Il y eut bien une rencontre, le 19 novembre 1940, mais sur ordre direct d'Hitler. Le roi, ainsi convoqué, se borna à réclamer la libération de tous les prisonniers belges et le respect de l'indépendance. Mais il n'obtint aucun engagement de la part d'Hitler. Il faut signaler que, lors d'une deuxième visite forcée de Ghebhardt, en 1943, celui-ci alla jusqu'à présenter au roi et à son épouse des fioles de poison qu'il tenta de leur faire accepter, comme s'il avait voulu faire d'eux des complices des dirigeants allemands qui, disait-il, en possédaient tous et ne manqueraient pas de s'en servir[39],[40]. Léopold III et la princesse de Rethy, qui n'avaient aucune raison de se suicider, comme s'ils avaient été les complices des dirigeants nazis, refusèrent ce cadeau empoisonné avec l'impression que leur vie était de plus en plus en danger. Finalement, Hitler ordonna la déportation du roi et de sa famille en juin 1944, comme l'avait voulu Joseph Goebbels depuis 1940. Heinrich Himmler ordonna que la famille soit gardée dans la forteresse de Hirschstein en Saxe depuis l'été jusqu'à la fin de l'hiver 1944-45, puis à Strobl, près de Salzbourg. Pendant ce temps, la Belgique était divisée par les nazis en deux gaus (territoires), comme elle l'avait été en 1917, la Flandre et Bruxelles étant séparées de la Wallonie, celle-ci destinée à être germanisée. La crainte de Léopold III se réalisait donc dès sa déportation. La principale des raisons qui l'avaient décidé à rester en Belgique, à savoir empêcher par sa présence la division du pays, se révéla finalement n'avoir offert qu'un délai de grâce qui venait de prendre fin dès que le roi ne fut plus là.
Le roi et sa famille furent libérés par l'armée américaine en mai 1945. Des entrevues avec le gouvernement rentré d'exil ne permirent pas de régler à l'amiable le différend né le 28 mai 1940, aucune des deux parties ne voulant faire de concessions. Léopold III et sa famille s'établirent alors en Suisse en attendant qu'une solution intervienne et la Belgique entama sa reconstruction sous le règne du frère du roi, le régent Charles. Celui-ci était doté des mêmes pouvoirs que le roi et d'aucuns suggéraient qu'il devint roi sous le nom de Charles Ier de Belgique. On dit que celui-ci y songea. Mais il ne favorisa pas ouvertement ce projet, ne voulant pas bafouer publiquement son frère aîné et il fallut attendre 1950, après le référendum organisé en Belgique sur la question royale pour qu'intervienne un apaisement avec l'accession au trône du fils aîné de Léopold III, Baudouin sous le nom de Baudouin Ier de Belgique.
La question royale et l'abdication
Article détaillé : Question royale.Le roi n'ayant pu rentrer en Belgique immédiatement après sa libération du fait qu'une partie du personnel politique et de la population belge était opposée à son retour sur le trône, un débat passionné divisa le pays sur la question de savoir si le roi devait ou non quitter le pays en 1940 pour continuer la lutte plutôt que de se constituer prisonnier. Sous la régence de prince Charles, son frère, réputé avoir été plus favorable aux thèses du gouvernement belge de Londres et de ses partisans, des dissensions apparaissaient entre Wallons et Flamands. Les premiers paraissaient majoritairement moins favorables au roi dont ils demandaient, pour le moins, des excuses pour ce que l'on considérait comme son défaitisme, ce que ne pouvait accepter un homme comme Léopold III qui estimait que la royauté a des privilèges. Les Flamands semblaient majoritairement favorables au retour du roi, mais sans que l'on puisse, en 1945, estimer valablement où se situait la majorité de l'opinion publique belge. En cas de fêlure dans le corps de la nation, l'existence de la Belgique aurait-elle pu être menacée à l'époque ? Sans doute pas, mais la couronne chancelait et donc la dynastie risquait de devoir quitter la scène. On aurait vu s'installer, sur la Côte d'Azur ou en Suisse, une de ces familles d'ex-souverains en exil comme d'autres, ce qui, au vu de la situation financière, à ce moment-là, de la famille royale belge, n'aurait pas été un sort enviable. Plus tard, revenu à la vie privée, le Régent Charles eut ce mot, pour justifier la régence qui lui permit de préserver le trône, « J'ai sauvé la baraque ». Le côté simple et familier de l'ex-régent apparaît dans cette apostrophe qui le montre très différent de son frère aîné Léopold dont la mentalité aristocratique l'avait empêché de comprendre que l'Allemagne et son Führer n'avaient rien à voir avec les monarchies des siècles passés avec lesquelles on pouvait s'entendre entre gens de bonne compagnie.
Le caractère aristocratique de Léopold III était clairement apparu dans son « Testament politique » confié par lui à des personnes sûres au moment de sa déportation en Allemagne et destiné à être publié dans le cas de son absence lors de la libération de la Belgique. Ce document, d'abord gardé quelque temps secret par le gouvernement Pierlot à son retour à Bruxelles, fut la cause, dès qu'il fut porté à la connaissance des Belges, d'une controverse qui aggrava le débat au sein de l'opinion. Le gouvernement belge à Londres, qui n'avait jamais mis en cause publiquement le Roi pendant ses années d'exil et avait espéré jusqu'au bout un compromis avec lui, n'apprécia pas de lire que le roi demandait des excuses publiques de la part des ministres l'ayant « diffamé », disait-il, en 1940. Les Alliés n'aimèrent pas davantage la demande du Roi de reconsidérer les traités conclus par le gouvernement en exil que le roi estimaient défavorables aux intérêts belges. Il en naquit une controverse principalement centrée sur les traités économiques avec les États-Unis concernant la livraison de minerais et surtout de l'uranium congolais indispensable pour la construction des bombes atomiques américaines. Pourtant, la participation militaire de la Belgique libre, en Afrique et en Europe, ainsi que les livraisons économiques avaient constitué une somme financière qui, plus tard, lors du payement des dettes alliées, constitua la cause principale du retour rapide du pays à la prospérité. Grâce à la politique du gouvernement en exil, la Belgique était ainsi un cas exceptionnel parmi les pays vaincus en 1940. Ni les Pays-Bas, privés de leur colonie d'Indonésie par les Japonais dès 1941, ni le Danemark, ni la Norvège ne mirent, au service des alliés des ressources humaines et des richesses comparables à celles que la Belgique libre investit dans la lutte contre les forces de l'Axe. On a comptabilisé que 100.000 personnes, environ, travaillèrent et combattirent en comptant les auxiliaires, les marins les aviateurs et les forces terrestres en Angleterre et en Afrique. Le texte du testament politique du roi ne formulait pourtant aucune reconnaissance pour l'action des belges exilés et des ministres belges de Londres, alors qu'en quittant le pays ils avaient exposé leurs familles aux persécutions nazies (ce qui fut le cas, entre autres, de la famille du ministre des affaires étrangères, Paul-Henry Spaak, dont l'épouse et les enfants durent se cacher et dont une belle-sœur fut exécutée). De plus, le testament politique de Léopold III traduisait une vision étroite du monde et se fixait surtout sur les problèmes belgo-belges, ne disant mot de la Résistance, à laquelle il avait pourtant apporté un soutien en autorisant le chef de la maison militaire royale, le général Tilkens à apporter une aide armée au Mouvement national royaliste. Se voyant exclu des événements politiques et militaires, avec pour conséquence son maintien de force en Allemagne par les Américains qui l'avaient libéré avec sa famille, le roi ajoute à son hostilité envers le gouvernement en parlant de la présence des alliés en Belgique libérée comme d'une « occupation ». Winston Churchill, frappé du décalage entre la situation réelle de la Belgique et la vision du monde que révélait le testament politique du roi, remarqua : « Il n'a rien oublié et rien appris. »
En 1946, une commission d'enquête officielle exonéra Léopold III de toute accusation de trahison, au vu de son renoncement à un armistice, acte politique qui lui eut ouvert les voies pour la constitution d'un gouvernement collaborationniste, à l'instar de ce qui se passa en France avec le gouvernement Laval installé par le maréchal Pétain avec l'accord de l'Allemagne. Néanmoins la controverse sur sa loyauté continua. Une consultation populaire eut lieu en 1950 qui autorisa à 57 % le roi à rentrer en Belgique. Cependant, le scrutin révélait un pays coupé en deux. En majorité, les Wallons et certains noyaux industriels ou urbains flamands avaient voté contre son retour, mais celui-ci fut nettement approuvé par les campagnes wallonnes et par une forte majorité des Flamands, ce qui fit taxer le souverain de « roi des Flamands » par certains de ses opposants[41].
À peine le souverain rentré le 22 juillet 1950, des troubles éclatèrent, surtout dans les provinces wallonnes. La grève générale paralysa une bonne partie du pays, le parti communiste se montrant particulièrement actif dans l'action anti-monarchique. On compta plusieurs dizaines de sabotages à l'explosif en Wallonie et quatre morts, abattus par la gendarmerie au cours d'une manifestation: la fusillade de Grâce-Berleur--(commune de la périphérie liégeoise). Le 31 juillet, après une entrevue dramatique avec d'anciens déportés politiques, le Roi Léopold III accepta de confier la lieutenance générale du royaume à son fils aîné le prince Baudouin, afin de préserver l'unité du pays, puis il abdiqua en 1951, la situation n'ayant pas évolué.
Léopold III influença le règne de son fils jusqu'au mariage de ce dernier. En 1959, le gouvernement lui demanda de cesser de vivre sous le même toit que son fils et de quitter le palais de Laeken. L'ancien monarque se retira alors au château d'Argenteuil, proche de Bruxelles, dans la Forêt de Soignes.
Léopold III, un roi voyageur
Durant sa vie, et essentiellement après son abdication, le roi Léopold III se consacra beaucoup à des travaux de recherche scientifique et à des voyages d'exploration au Venezuela, Brésil et Zaïre. De cette manière, il créa en 1972 le Fonds Roi Léopold III pour l'exploration et la conservation de la nature. Et déclare à propos de celui-ci :
« L'idée de créer le Fonds m'est venue, entre autres, de nombreuses demandes d'appui que m'adressent des personnes désireuses soit de monter une expédition, soit de publier les résultats de leurs recherches, soit encore de faire connaître au monde le sort de certaines ethnies déshéritées. Un des buts du Fonds est d'encourager semblables initiatives, à condition qu'elles soient raisonnées, désintéressées et marquées d'un réel intérêt scientifique et humain (...)[42] »
Ainsi il effectua, tout au long de sa vie, essentiellement avant et après son règne, de nombreux voyages.
Du 23 septembre au 13 novembre 1919, il accompagne ses parents en visite officielle aux États-Unis[1]. Lors d'une visite dans le pueblo indien d'Isleta au Nouveau-Mexique, le souverain décore de l'ordre de Léopold le père Anton Docher[43], qui leur offre en retour une croix d'argent et de turquoise faite par les Indiens Tiwas[44].
Il est inhumé, comme tous les rois et reines de Belgique, à l'église de la Crypte Royale de Notre-Dame de Laeken à Bruxelles.
Bibliographie
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- Léopold III, Pour l´Histoire : Sur quelques épisodes de mon règne, Bruxelles, éd. Racine, 2001 (ISBN 978-2-87386-251-0)
- Léopold III, Carnets de voyages, 1919-1983, Bruxelles, éd. Racine, 2004 (ISBN 2-87386-296-3)
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Notes et références
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- Outrageous fortune, Roger Keyes, Éditions Martin Secker & Warburg, London 1984.
- Un règne brisé, pages 149 et suivantes, Éditions Duculot, Paris-gembloux 1985.
- Servir, mémoires du général Gamelin, cité par le colonel Remy dans Le 18e jour, pages 67-68, Éditions France Empire, Paris 1976.
- Relations militaires franco-belges, 1936-1940, Éditions du Centre National de la Recherche Scientifique, Paris 1968.
- France and Belgium, 1939-1940, Brian Bond, Éditions David Poynter, London 1975.
- 1940, La guerre des occasions perdues, Colonel Goutard, Éditions Hachette, Paris.
- Les années de cauchemar, William Shirer, page 331, Éditions Texto-Tallandier, Paris 2009.
- Le mythe de la guerre éclair, Karl-Heinz Frieser, page 155, Éditions Belin, Paris 2003.
- La Seconde Guerre mondiale, Pierre Miquel, page 41, Éditions Fayard, Paris 1986.
- La Seconde Guerre mondiale, Pierre Miquel, cit. le rapport du député français Taittinger du 8 mars 1940, page 41, Éditions Fayard, Paris 1986.
- La défaite française, un désastre évitable, lieutenant-colonel Jacques Belle, page 25, Éditions Economica, Paris 2007.
- The Second World War, mémoires de Churchill, vol. II, livre 1er, divers éditeurs.
- Le 18e jour, colonel Remy, Page 355, Éditions France Empire, Paris 1976.
- Outrageous Fortune, amiral Keyes, Éditions Martin Secker & Warburg, London 1984, trad. fr. Un règne brisé, vol. 1, pages 290 et 328, Éditions Duculot, Paris-Gembloux 1985.
- Outrageous fortune, amiral Keyes, Editions Martin Secker & Warburg, London 1984; trad. fr.Un règne brisé, vol. 1 page 318, Ed. Duculot, Paris-Gembloux 1985.
- Spaak, Michel Dumoulin, pages 169-170, Éditions Racines, Bruxelles 1999.
- Aux sources de la question royale, J. Vanwelkenhuizen, Éditions Duculot, Paris-Gembloux 1988.
- Léopold III en l'An 40, Jean Cleeremans, page 153, Éditions Didier Hatier, Bruxelles 1985.
- Mémoires sur la Deuxième Guerre mondiale, Winston Churchill, cité par le colonel Remy dans Le 18e jour, page 179, Éditions France-Empire, Paris 1976.
- alors que, pour un armistice (à la façon des Français, un mois plus tard), la signature d'au moins un ministre est nécessaire car c'est un acte politique et non plus seulement militaire. Mais, comme le roi l'avait dit à l'attaché militaire anglais, il ne s'agissait pas, pour lui, de signer une paix séparée. En plus de son pouvoir civil, le roi des Belges détenait, et détient toujours, de par la Constitution, et comme beaucoup de chefs d'État, le commandement suprême des forces armées. Mais, au contraire de la plupart des chefs d'État dont le pouvoir militaire est purement symbolique, Léopold III avait une véritable compétence à la tête de son état-major, ce que ne contestaient pas les généraux alliés.
- Spaak, Michel Dumoulin, page 167, Éditions Racine, Bruxelles 1999.
- Fonds Paul-Henri Spaak,35/0359, entrevue du 24 mai 1940 à 16 heures.
- Le 18e jour, Colonel Remy, pages 261-262, Éditions France-Empire, Paris 1976.
- Le 18e jour, Colonel Remy, pages 348-349, op. cit.
- La défaite française, un désastre évitable, lieutenant-colonel Jacques Belle, page 3 (introduction), Éditions Economica, Paris 2007.
- La Seconde Guerre mondiale, Pierre Miquel, op cit., page 110.
- Dictionnaire de la Seconde Guerre mondiale en Belgique, José Gotovitch et Paul Aron, (dir.) Éditions André Versaille, 2008, article « Roi ».
- Discours du maréchal Pétain, le 17 juin 1940.
- Cahiers d'histoire de la Seconde Guerre mondiale, Albert De Jonghe, pp. 101-102, 104, Bruxelles 1970.
- Figaro Magazine, 7 juin 1980.
- Dictionnaire de la Seconde Guerre mondiale en Belgique, op. cit., article « Diplomatie ».
- Bortaï, Philippe Brousmiche, Éditions Gamma, Paris 1987.
- Léopold III prisonnier, Général van Overstraeten, pages 169 et 199, Éditions Didier Hatier, Bruxelles 1986.
- Léopold III en l'An 40, Jean Cleeremans, page 258, Éditions Didier Hatier, Bruxelles 1985.
- Mémoires de Joseph Goebbels, vol. 3, page 427, Éditions Tallandier, Paris 2005.
- Ce scientifique nazi arrêté par les alliés fut pendu pour ses expériences médicales sur les prisonniers des camps de concentration.
- Témoignage de l'ancien ambassadeur allemand von Bülow-Schwante, après la guerre, devant une commission alliée. Réf. R. Keyes op. cit.
- Dictionnaire de la Seconde Guerre mondiale en Belgique, op. cit., article « Question royale ».
- Première expédition scientifique du Fonds Léopold III (livret), préface de Léopold III, Bruxelles 1974.
- Keleher and Chant. The Padre of Isleta. Sunstone Press, 2009, p. 94.
- W.A.Keleher.The Indian sentinel.1920,vol.2. p.23-24
Articles connexes
- Monarques de Belgique
- Belgique
- Histoire de la monarchie belge
- Politique de la Belgique
- Crypte royale
Précédé par Léopold III Suivi par Albert Ier Roi des Belges 1934 – 1951
(en exil de 1944 à 1950)Baudouin Ier
Charles de Belgique
(Régent)Catégories :- Maison de Saxe-Cobourg et Gotha
- Roi des Belges
- Chef d'État ou de gouvernement de la Seconde Guerre mondiale
- Chevalier de la Jarretière
- Chevalier grand-croix de l'ordre royal de Victoria
- Naissance en 1901
- Naissance à Bruxelles
- Décès en 1983
- Chevalier de l'ordre espagnol de la Toison d'or (XXe siècle)
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