Paul-Henri Spaak

Paul-Henri Spaak
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Paul-Henri Spaak
Bundesarchiv Bild 183-39998-0427, Paul-Henri Spaak.jpg
Paul-Henri Spaak en 1957

Mandats
12e, 15e et 18e Premier ministre belge
(40e, 43e et 46e chef du gouvernement)
20 mars 194711 août 1949
Monarque Charles de Belgique (Régent)
Léopold III (Roi)
Gouvernement Spaak III, Spaak IV
Majorité PSC-CVP - PSB
Prédécesseur Camille Huysmans
Successeur Gaston Eyskens
13 mars 194631 mars 1946
Monarque Charles de Belgique (Régent)
Léopold III (Roi)
Gouvernement Spaak II
Majorité PSB
Prédécesseur Achille van Acker
Successeur Achille van Acker
15 mai 193822 février 1939
Monarque Léopold III
Gouvernement Spaak I
Majorité Catholique-libéral-PSB-PCB
Prédécesseur Paul-Émile Janson
Successeur Hubert Pierlot
Biographie
Date de naissance 25 janvier 1899
Lieu de naissance Flag of Belgium.svg Schaerbeek, (Belgique)
Date de décès 31 juillet 1972
Lieu de décès Flag of Belgium.svg Bruxelles, (Belgique)
Nationalité belge
Parti politique PSB (puis) FDF
Diplômé de ULB
Profession Avocat au barreau de Bruxelles
Résidence 16, rue de la Loi

State coat of arms of Belgium.svg
Premiers ministres belges

Paul-Henri Spaak Prononciation du titre dans sa version originale, né dans la commune bruxelloise de Schaerbeek le 25 janvier 1899[1] et mort à Bruxelles le 31 juillet 1972, est un homme d'État belge. Il est aussi considéré comme l'un des Pères de l'Europe[2].

Il occupe d'importantes fonctions sur le plan international :

Sommaire

Biographie

Enfance

Paul-Henri Spaak naquit, dans la commune bruxelloise de Schaerbeek, le 25 janvier 1899, dans une famille d'artistes et d'hommes politiques. Son père, Paul Spaak, grand admirateur de la civilisation italienne[3] fut un professeur dans plusieurs institutions universitaires. Il laissa une œuvre littéraire importante dont la pièce de théâtre Kaatje qui connut le succès d'abord en Belgique, puis à Paris[4]. Sa mère, Marie Janson, fut la première femme parlementaire belge, de 1921 à 1958, d'abord pour le parti ouvrier, puis, après l'interruption de la guerre, pour le parti socialiste[5]. Son frère, Charles Spaak (1903-1975) fut un scénariste réputé du cinéma français à qui l'on doit, entre autres, "La Kermesse Héroïque" du cinéaste belge Jacques Feyder, "La Grande Illusion" de Jean Renoir, "Le Banquet des Fraudeurs" du cinéaste belge Henry Storck[6]. Sa nièce, Catherine Spaak, fille de Charles Spaak, fut actrice à Paris et en Italie durant les années soixante. Son grand-père maternel, Paul Janson, fut le grand tribun du parti libéral et ministre d'état, représentant de la tendance libérale de gauche dite radicale[7]. Son oncle, Paul-Émile Janson[4], chef du parti libéral, fut plusieurs fois ministre avant de mourir dans un camp de concentration nazi.

Pendant son enfance, Paul Henri Spaak baigna dans une milieu aisé, agnostique, où la politique avait une place centrale. En 1916, Paul-Henry Spaak se porta volontaire de guerre, mais il fut arrêté par les allemands en tentant de passer en territoire libre et finit la guerre dans un camp de prisonniers. Ne parlant pas l'allemand qu'il avait pourtant commencé à apprendre avec des nurses allemandes, pendant sa petite enfance[8], il s'occupa en jouant dans des pièces de théâtre, dont "Kaatje", une des œuvres de son père[9].

L'entrée en politique

Après 1918, Paul-Henri Spaak accomplit, à l'Université libre de Bruxelles, des études de droit qu'il acheva en deux ans et devint avocat au barreau de Bruxelles. Il y défend Léo Campion, objecteur de conscience et franc maçon, plus tard chansonnier et acteur à Paris, traduit en justice en 1935 pour avoir renvoyé son livret militaire[10]. C'est en 1932 que commence sa carrière politique. Il est élu député de Bruxelles[4] sur la liste du parti socialiste, devenant l'adversaire politique de son oncle, le libéral Paul Janson.

Chef-adjoint du cabinet du ministre du Travail du parti ouvrier Joseph Wauters en 1925, Paul-Henri Spaak est élu député dans l'arrondissement électoral de Bruxelles à la Chambre des Représentants en 1932. Il devient ministre des Transports et des PTT dans le cabinet de Paul van Zeeland de 1935 à 1936[11], ministre des affaires étrangères du 13 juin 1936 au 9 février 1939 dans le gouvernement van Zeeland II et Premier ministre du 15 mai 1938 au 9 février 1939. Il retrouve le portefeuille des Affaires étrangères dans le gouvernement de Hubert Pierlot le 3 septembre 1939.

A l'époque, il est svelte et sportif et devient champion de tennis de Belgique de série b, puis champion de Belgique Interclubs[12] et, dans le cadre des fonctions ministérielles qu'il occupera à partir de 1935, il disputera une partie contre le roi de Suède[13]. Paul-Henri Spaak était aussi un joueur de bridge.

Le parcours politique de Paul-Henri Spaak est d'abord marqué par l'anti-militarisme de son parti, le parti ouvrier et son leader Emile Vandervelde, malgré la politique du roi Léopold III vers le réarmement de la Belgique dans le cadre du retour à la neutralité d'avant 1914 (qui avait été garantie, à l'époque, par le traité de 1831). Cette politique se manifeste, en 1936, par la dénonciation de l'accord franco-belge de 1922 avec le soutien du ministre des Affaires Etrangères Paul-Henri Spaak. La conséquence en est que, en 1938-1939, certaines garnisons protégeant la Belgique de l'Allemagne sont dégarnies pour porter des troupes le long de la frontière franco-belge. Mais sans que des travaux de défense fussent entrepris, ce qui démontre le caractère symbolique de cette décision purement politique qui était destinée à honorer, en apparence, la neutralité proclamée en 1936.

La guerre

Le 28 mai 1940 est une date cruciale dans la vie de Paul-Henri Spaak. Ce jour-là commence une série de tribulations pour les ministres belges en grand danger de perdre toute importance du fait de la défaite. Après la campagne de 18 jours de l'armée belge refoulée jusqu'à la côte, comme les armées franco-anglaises, Paul-Henri Spaak et le premier ministre Hubert Pierlot quittent la Belgique après la dramatique entrevue de Wijnendaele avec le roi[14]. Celui-ci croit qu'en restant au pays, il protègera l'intégrité nationale, par le seul prestige de sa personne, contre les abus de l'occupant allemand. Paul-Henri Spaak n'y croit pas, alors que, pour le roi, il s'agit surtout de se poser en obstacle, au moins passif, à la tentation des Allemands de diviser la Belgique au profit de la Flandre, comme ils l'avaient fait en 1914-18. Mais, comme les ministres du gouvernement Pierlot conservent toute leur légitimité constitutionnelle, le roi n'ayant pas demandé leur démission, ils peuvent vouloir représenter la Belgique en exil dans le but de sauvegarder la survie du pays vis-à-vis des alliés. Projet identique à celui des autres gouvernements des pays occupés. Une décision à laquelle Paul-Henri Spaak adhère pleinement en vertu de la constitution que le gouvernement belge invoque pour proclamer que " en vertu de l'article 82 de la constitution, dorénavant le gouvernement exerce seul le pouvoir exécutif, le roi étant dans l'impossibilité de règner étant prisonnier de l'ennemi".

C'est un tournant majeur dans la vie de Paul-Henri Spaak et qui mérite d'être considéré en détail. Il s'exile loin de sa famille qui va vivre sous l'occupant ennemi, ce qui peut créer une situation dangereuse pour elle alors que lui-même appartient à un gouvernement qui incarne la résistance à cet occupant. Et il est loin du parti socialiste qui est désormais destiné à devenir clandestin, loin de tout ce qui a fait sa vie privée et politique. La situation est la même pour les autres ministres, Pierlot, qui accompagne Spaak, Gutt et de Vleeshauwer qui gagnent Londres, quelques autres isolés au milieu de la cohue des réfugiés. Mais, dans leur exil, les rescapés du gouvernement belge se trouvent dans une situation inédite pour un gouvernement belge depuis 1830, ils peuvent exercer le pouvoir exécutif en se passant de la signature royale en vertu de l'article 82 de la constitution qui considère le cas où le roi des Belges est dans l'impossibilité de règner. Mais c'est à la condition de prendre leurs décisions collégialement dans l'attente de soumettre, dès que possible, leurs actes aux chambres réunies. C'est ce qu'ils décident. Cela ne peut signifier qu'une chose, c'est que le gouvernement veut croire à la victoire finale qui permettra de convoquer le parlement belge dans un pays libéré[15]. En attendant, le gouvernement part en exil. C'est une décision qui n'est pas seulement politique, mais qui engage la vie privée. Certains ministres ont évacué leur famille, mais Paul-Henri Spaak, lui, part seul. Quel sort sera réservé à sa famille restée à la merci de l'ennemi ? Plus tard, il écrira : "Les mois les plus cruels de ma vie,… le goût de la défaite totale, le bord du renoncement et le réveil en pleine lutte …".

Après avoir résidé en France dans des conditions difficiles au milieu de la débâcle[16], les quelques ministres belges gagnent l'Angleterre. Paul-Henri Spaak et Hubert Pierlot, qui avaient cru pouvoir faire confiance à la résistance militaire de la France en installant dans ce pays le gouvernemnt belge en exil, avaient été privés de toute protection diplomatique dès l'armistice et menacés d'être livrés à l'Allemagne. Pierlot et Spaak entreprennent alors une vaine tentative d'entrer en rapport avec le gouvernement allemand dans l'espoir fou de maintenir une autorité belge (ce qui, à ce moment-là, n'est pas sans rapport avec l'attitude du roi Léopold III) en organisant le retour des réfugiés. Le silence nazi et la perte de la protection française convainquent alors les deux ministres de fuir. Ils arrivent finalement au Portugal après avoir traversé clandestinement l'Espagne cachés dans une camionnette à double fond pour échapper au gouvernement de ce pays acquis aux intérêts allemands[17],[18]. "Une évasion digne d'être reproduite à Hollywood et dont votre frère écrira le scénario" (il s'agit de Charles Spaak, scénariste à Paris), écrit le journaliste américain Akivisson[19].

Les deux ministres parviennent enfin à Londres où se reconstitue le gouvernement belge en exil. Grâce aux ressources financières du gouvernement et avec le concours de volontaires, la Belgique est présente dans la bataille d'Angleterre avec 28 pilotes, ensuite, durant toute la guerre, avec trois escadrilles. Après la participation belge aux victoires d'Afrique contre les Italiens, c'est une troupe belge qui libére la côte française du nord en 1944. Au début de 1945, une armée belge reconstituée de 100.000 hommes entre en jeu au sein des forces alliées. Avant cela, des troupes spéciales de commando étaient intervenues en Yougoslavie en accord avec les Anglais et sous leurs ordres. Les mêmes commandos belges feront du renseignement dans le sud des Pays-Bas, lors de l'opération "market garden" menée par Montgomery.

Depuis Londres, Spaak et le gouvernement belge tirent parti des importants moyens économiques et militaires de la Belgique pour mener un jeu diplomatique ambitieux qui vise à inscrire la Belgique, d'abord vaincue, parmi les futurs vainqueurs de l'Allemagne. Dans le cadre de ses fonctions de ministre des Affaires étrangères, Paul-Henri Spaak développe une politique de présence auprès du gouvernement anglais et des gouvernements européens en exil. Ces contacts entraînent cette appréciation du chef des Français libres, le général de Gaulle, qui, dans ses Mémoires de Guerre, écrit : "Messieurs Pierlot, Gutt et Spaak formant ensemble, au service de la Belgique, l'équipe de la sagesse, de l'ardeur et de l'habileté".[20] L'action du gouvernement se traduit par une politique combattive qui permet à Paul-Henri Spaak d'acquérir une rélle influence dans le monde libre. Cette politique se traduit par la mise à la disposition des alliés des richesses du Congo, dont notamment les minerais, surtout le cuivre, l'étain et l'uranium, par l'engagement de toute la flotte de commerce dans les convois alliés de fournitures américaines qui affrontent les sous-marins allemands, par la participation de 28 aviateurs belges à la bataille d'Angleterre[21] et la constitution de trois escadrilles belges intégrées à la Royal Air Force, cependant qu'une force terrestre se reconstitue en Angleterre et que les troupes d'Afrique remportent des victoires contre les Italiens en Abyssinie[22],[23].

Paul-Henri Spaak entretient des contacts avec tous les gouvernements en exil et plaide la reconnaissance officielle par la Belgique du général de Gaulle et des Français libres, quoi que ceux-ci ne fussent pas porteur d'une légitimité politique comme les autres gouvernements en exil qui, eux, ont quitté leurs pays porteurs des pouvoirs qu'ils tenaient des institutions légales. Malgré des oppositions étrangères, le premier ministre Hubert Pierlot et le ministre des affaires étrangères Paul-Henri Spaak écrivent au général de Gaulle, le 3 octobre 1941, que le gouvernement belge a décidé de le reconnaître comme représentant les Français Libres. C'est chose faite par échange de pièces diplomatiques le 13 mai 1942[24]. Même des Français en exil opposés au général de Gaulle ont tenté d'empêcher cette reconnaissance de la France Libre, ainsi que le gouvernement britannique qui a fait pression dans ce sens. Mais l'annonce de l'envoi d'un diplomate pour représenter le gouvernement belge à Alger, siège du Comité national des Français libres, est notifiée officiellement à tous les gouvernements alliés le 17 juin 1943[25]. La Belgique est donc la première puissance à accorder sa reconnaissance officielle au général de Gaulle et à ses partisans.

Pendant ce temps-là, en Belgique, la famille Spaak doit se cacher pour échapper aux représailles allemandes et la belle sœur du ministre, Suzanne Spaak, est arrêtée et meurt en prison[26].

Après la guerre

En 1945, Paul-Henri Spaak est élu président de la première assemblée générale de l'O.N.U., à New York, tandis que la Belgique entre au Conseil de sécurité[27]. Il prononce notamment un "discours de la peur" à l'Assemblée générale des Nations-Unies en 1947 dans lequel il attaque violemment la politique étrangère de l'Union soviétique. Il est à nouveau chef du gouvernement belge en mars 1946 puis du 20 mars 1947 au 11 août 1949, il cumule ce poste avec celui de chef de la diplomatie belge. C'est à cette époque qu'est conclu le traité économique du Benelux auquel Spaak avait travaillé pendant la guerre avec les gouvernements en exil des Pays-Bas et du Grand Duché de Luxembourg dans le but de conclure une alliance économique de la Belgique avec ces deux pays.

Durant la Question Royale, des mouvements de foule pour ou contre le roi conduisent à des affrontements dans la population et à de vifs débats dans les milieux politiques, non pas tant à propos de la reddition militaire que sur la question de savoir si le roi devait ou non quitter le pays pour se soustraire à l'emprise allemande. Lors de la consultation populaire de 1950, le choix de Paul-Henri Spaak en faveur de l'abdication du roi est suivi à 53 % dans la partie francophone du pays. Une majorité inverse se révèle dans la partie flamande. A cette occasion, Paul-Henri Spaak prononce à la Chambre des Députés de Bruxelles un discours qui rappelle ceux de sa jeunesse, quand il était à la gauche du parti ouvrier: "Je suis avec Danton contre Louis XVI, avec Louis Blanc contre Thiers, avec les Belges de 1830 contre les Hollandais. La révolution ne me fait pas peur. Je sais qu'elle doit éclater quand les gens au pouvoir s'obstinent à ne pas reconnaître les faits[28]". Finalement, le roi abdique en faveur de son fils, nommé Prince royal à l'âge de 20 ans pour devenir, en 1951, le roi Baudouin 1er. Le secrétaire d'Etat américain Henry Cabot-Lodge déclare devant le sénat américain à propos de Paul-Henri Spaak :"C'est certainement un des plus habiles, si pas le plus habile leader politique en Europe aujourd'hui[29]."

Paul-Henri Spaak retourne dans l'opposition sous un gouvernement homogène social-chrétien dirigé par le premier ministre Jean Van Houtte. Il devient bourgmestre de Saint-Gilles, la commune bruxelloise dans laquelle il a son domicile depuis l'avant-guerre. Il est à nouveau ministre des Affaires étrangères de 1954 à 1958 dans un gouvernement de coalition formé les libéraux et les socialistes avec le socialiste Achille Van Acker pour premier ministre.

Paul-Henri Spaak signe avec le baron Jean-Charles Snoy et d'Oppuers le traité de Rome le 25 mars 1957. Le Daily Telegraph a prouvé, grâce aux archives déclassifiées sur la politique étrangère des États-Unis, qu'il était financé par la CIA (à l'instar de Jean Monnet ou Robert Schuman) pour accélérer la construction Européenne. Cette information a été confirmé par la revue Historia.[réf. nécessaire] Il convient de noter que Spaak a toujours affirmé qu'il relayait les fonds en question vers des associations et des groupes de pression faisant la promotion de l'idée européenne.

Paul-Henri Spaak défend les traités du Benelux, de l'OTAN, du Conseil de l'Europe, de la CECA, de la CED, de la CEE et de l' Euratom. Son rôle dans la relance de l'intégration européenne à la conférence de Messine en 1955 est déterminant. Grâce à son engagement dans la construction européenne, Paul-Henri Spaak est considéré comme l'un des « Pères de l'Europe ». Le bâtiment abritant l'hémicycle principal du Secrétariat Général du Parlement européen à Bruxelles porte d'ailleurs son nom.

Entretemps, Paul-Henri Spaak avait été secrétaire général de l'OTAN de 1957 à 1961[30], et ce malgré les critiques de la frange de gauche de son parti, le parti socialiste, qui considérait qu'il était indigne, pour un ministre socialiste, qui avait été pacifiste avant 1936, de diriger une organisation « militariste ». Mais Paul-Henri Spaak avait acquis, depuis 1946 et son discours à l'ONU dit « discours de la peur », une crainte profonde devant la perspective d'une guerre avec l'Union soviétique et ses satellites dont la puissance militaire paraissait intacte, au contraire de celle des pays occidentaux qui s'étaient empressés de désarmer à la fin de la guerre, alors que les partis communistes entretenaient de l'agitation dans certains pays dont la France et l'Italie. Pour lui, l'OTAN, alliance militaire, était la meilleure garantie que la politique de faiblesse des puissances occidentales devant la menace de conflit, avant 1940, ne se reproduirait plus avec ses tragiques conséquences.

Revenu à la politique belge en 1960, Paul-Henri Spaak est ministre des affaires étrangères et vice-premier ministre dans un gouvernement de coalition groupant les socialistes et les sociaux chrétiens sous la direction du premier ministre social chrétien Théo Lefèvre qui affronte la querelle linguistique et communautaire. En 1964, il obtient du gouvernement belge de lancer, avec l'accord des Américains, une audacieuse opération militaire pour délivrer les otages belges et étrangers retenus par des rebelles congolais en plein cœur du Congo, à Stanleyville. C'est l'opération Dragon Rouge qui réussit, mais non sans provoquer la mort d'un peu plus de vingt otages[31].

Il prononce à cette occasion un vigoureux discours de deux heures à l'ONU en 1964, en réponse à l'accusation virulente de l'URSS qui condamne l'opération aéroportée belge sur Kisangani[32].

Controverse

Le 19 septembre 2000, le journal Daily Telegraph de Londres, par la voix d'Ambrose Evans-Pritchard, annonce que les archives déclassifiée de l'administration américaine pour les années 1950 et 60 montrent que Paul-Henri Spaak, Robert Schuman et d'autres personnalités importantes dans les origines de la construction européenne étaient "employés" par les services américains. Le journaliste explique que les Américains ont camouflé leur action et ont fait transiter des fonds par le biais des fondations Rockefeller et Ford. Spaak a toujours soutenu qu'il n'avait servi que d'intermédiaire en faisant transiter les fonds vers des associations et des groupes de pression qui en avaient besoin pour soutenir l'idée européenne.

Extrait : « The leaders of the European Movement – Retinger, the visionary Robert Schuman and the former Belgian prime minister Paul-Henri Spaak – were all treated as hired hands by their American sponsors. The US role was handled as a covert operation. ACUE’s funding came from the Ford and Rockefeller foundations as well as business groups with close ties to the US government »[33].

Fin de carrière

Paul-Henri Spaak se retire de la politique active. En 1966, il fait un bref "séjour" dans le conseil d'administration de la Bell Telephone Manufacturing, société belge intégrée par la société américaine I T T et qui posséde neuf usines en Belgique[34]. Plus tard, Paul-Henri Spaak se plaira à faire remarquer qu'il avait pu favoriser la passation de nombreux marchés au profit de l'industrie belge et de l'emploi, grâce à sa réputation internationale et à son expérience.

Il publie en 1969 des mémoires aux éditions Fayard sous le titre Combats inachevés. Le premier tome s'intitule De l'Indépendance à l'Alliance et le second De l'espoir aux déceptions.

Paul-Henri Spaak, qui avait été socialiste durant toute sa vie, rompt avec le parti socialiste belge (P.S.B.) en 1971 et annonce son ralliement au Front Démocratique des Francophones (F.D.F.) nouvellement créé. Il invoque, pour se justifier, les reculades de la gauche démocratique en face de l'intolérance de l'extrême droite flamingante[35] en prononçant un retentissant discours sous la tente d'un cirque, la salle de spectacle qui avait été réservée lui ayant été refusée (A revoir : Paul Henry Spaak est intervenu dans la salle du cinéma Marni, Place Flagey).

Alors qu'il passait ses vacances dans l'archipel des Açores, Paul-Henri Spaak fut pris de malaises. Un avion militaire américain le rapatria d'urgence à Bruxelles, à l'Hôpital Brugmann, le 29 juillet 1972. Emporté par une rupture d'anévrisme, Paul-Henri Spaak décède à Bruxelles le lundi 31 juillet 1972 à 0h15 [36]. Paul-Henri Spaak repose dans le cimetière du Foriest à Braine-l'Alleud, commune du Brabant wallon où il a passé la fin de sa vie. Après son décès, une Fondation Paul-Henri Spaak a été créée pour perpétuer sa mémoire.

Il est le père de la femme politique belge Antoinette Spaak, le grand-père paternel de la journaliste et écrivain Isabelle Spaak et le grand-père maternel du peintre Anthony Palliser, ainsi que l'oncle de l'actrice Catherine Spaak.

Ses écrits

  • Combats Inachevés en 2 volumes : De l'indépendance à l'Alliance et De l'espoir aux déceptions, éditeur Fayard, 319 p., 1969, ASIN: B0014P3ETE

Honneurs

  • Distinctions honorifiques : à compléter
  • une Hauté Ecole située à Bruxelles et Nivelles porte son nom.

Bibliographie

  • Paul-Henri Spaak Combats inachevés, Ed. Fayard, Paris 1969.
  • Paul Hymans Mémoires – Publiés par Frans van Kalken et John Bartier – Inst. de Sociologie Solvay (ULB), Bruxelles, 1958, 2 tomes, 1079 pp.
  • Patrick Nothomb: Dans Stanleyville, journal d'une prise d'otage, Duculot, Paris, 1993.
  • Paul-F. Smets, La Pensée européenne et atlantique de Paul-Henri Spaak. 1942-1972, deux vol., J. Goermaere, 1980
  • Jakob Herman Huizinga], Paul-Henri Spaak. De l'émeute à l'OTAN, Bruxelles, Paul Legrain, 1988, 271p.

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Michel Dumoulin. "Spaak". Bruxelles. Racine. 1999. 735p
  • Lucien Outers, Paul-Henri Spaak : son dernier combat, Rénovation, Bruxelles, 1972.
  • Paul Werrie, Paul-Henri Spaak : ses mémoires, son amnésie, Editions Nationales, Liège, 1971.

Notes et références

  1. État Civil de la commune de Schaerbeek
  2. (fr)Biographie de Paul-Henri Spaak sur www.touteleurope.eu. Consulté le 26 septembre 2010.
  3. Bulletin de l'Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises, t. LXXIIO, 1994, R.Van Nuffel "Paul Spaak et l'Italie"
  4. a, b et c (fr)biographie sur www.aede-france.org. Consulté le 26 septembre 2010.
  5. "Spaak", Michel Dumoulin, Editions Racine, Bruxelles (1999)
  6. Dictionnaire du Cinéma, éditions Robert Laffont
  7. Fondation Paul Henry Spaak
  8. De Standaard, 19 mars 1965
  9. archives du musée de la littérature, Bruxelles "Journal de Paul Spaak"
  10. Ministère de la Justice, Bruxelles, archives
  11. archives de la presse belge, Spaak, Michel Dumoulin, éditions Racine, Bruxelles 1999, Fondation Paul-Henry Spaak
  12. Fondation Paul-Henri Spaak
  13. La Nation Belge, 1937, Charles d'Ydewalle
  14. Léopold III ou le choix impossible, Robert Aron, Ed. Plon, Paris 1977
  15. Spaak, Michel Dumoulin, page 176, note 73, Ed. Racine, Bruxelles 1999.
  16. Spaak, Michel Dumoulin, pages 201 à 206, Ed. Racine, Bruxelles 1999.
  17. Spaak, Michel Dumoulin, page 210, 211, Ed. Racine, Bruxelles 1999
  18. Archives du journaliste américain Akivisson, Washington, 23 novembre 1940
  19. Fonds Paul-Henri Spaak, 362/6893
  20. Mémoires de Guerre, 1er Tome, l'Appel, Général de Gaulle, page 265, livre de poche, Ed. Plon, Paris 1954.
  21. Les As de l'Aviation Belge, Hervé Gérard, pages 187 et suivantes, Ed. J.M. Collet, Bruxelles 1985
  22. Bortaï, Philippe Brousmiche, Ed. Gamma, Paris-Tournai 1987
  23. Bortaï, Réédition, Ed. Lharmattan, Paris 2011.
  24. archives du gouvernement belge, conseils des ministres du gouvernement en exil, 13 mai 1942
  25. archives du gouvernement belge, archives du conseil des ministres en exil, Fonds Paul-Henri Spaak, Circulaire n° 19 du 31 juillet 1943
  26. L'Orchestre rouge, Gilles Perrault, Librairie Arthème Fayard, Paris 1967.
  27. archives de la presse, internationale, actualités Belgavox
  28. Annales parlementaires, 27 juillet 1950, page 13.
  29. Congressional record. Prooceeding and debates of the 81th Congress, Second Cession, 1950, vol. 96, ,pages 1542, 1543.
  30. Spaak, Michel Dumoulin, éditions Racine, Bruxelles
  31. "Le Mal Zaïrois", Eloge Boissonade, Editions Hermé, 1990, Paris
  32. Spaak, Michel Dumoulin, page 617, Ed. Racine, Bruxelles 1999.
  33. (fr)Euro-federalists financed by US Spy Chief sur le site du Daily Telegraph
  34. Bell Telephone Cy, communiqué n°372, Antwerpen, 19/09/1966
  35. F.D.F. Contact, 1er octobre 1976
  36. archives de l'hôpital Brugman et archives de l'état civil Bruxelles

Liens externes

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