- Hubert Pierlot
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Hubert Pierlot Mandats 13e Premier ministre belge
(41e chef du gouvernement)22 février 1939 – 12 février 1945 Monarque Charles de Belgique (Régent)
Léopold III (Roi)Gouvernement Pierlot I, II, III, IV, V VI Majorité Libéral (II à VI) - POB (I, III à VI) - PCB (V) - Catholique Prédécesseur Paul-Henri Spaak Successeur Achille van Acker Biographie Date de naissance 23 décembre 1883 Lieu de naissance Cugnon, (Belgique) Date de décès 13 décembre 1963 Lieu de décès Uccle, (Belgique) Nationalité belge Parti politique Catholique Diplômé de UCL Résidence 16, rue de la Loi
Premiers ministres belges modifier Le comte Hubert Pierlot, homme politique belge du Parti catholique, professeur de droit, président de l'Union catholique belge, est né à Cugnon le 23 décembre 1883 et mort à Uccle le 13 décembre 1963. Il était premier ministre au moment où la Belgique fut entraînée dans la Seconde Guerre mondiale et, à ce titre, fut amené a diriger durant toute la guerre le gouvernement en exil à Londres.
Sommaire
Biographie
Après des études secondaires à l’école abbatiale de Maredsous puis au collège Saint-Michel des jésuites à Bruxelles, Hubert Pierlot obtient son diplôme de docteur en droit et une licence en sciences politiques de l’Université de Louvain. En 1910, il a achevé son travail de fin d'études par un séjour d'un mois au Canada et aux Etats-Unis (dans le cadre du Congrès eucharistique de Montréal).
Le 4 août 1914 Hubert Pierlot s’engage comme volontaire. Il fait la guerre dans l’infanterie et la termine comme lieutenant au 20e Régiment de Ligne.
De février 1919 à décembre 1920, il occupait les fonctions de chef de cabinet du Premier ministre belge Léon Delacroix.
Il devint député catholique (plus tard social-chrétien) de Neufchâteau en 1925. Il fut sénateur provincial du Luxembourg de 1926 à 1936 et sénateur d'Arlon de 1936 à 1946. Sous le règne de Léopold III de Belgique, Hubert Pierlot est ministre de l'Intérieur (1934-1935) et de l'Agriculture (1934-1935 et 1936-1939), il devint Premier ministre et ministre de l'Agriculture (1939).
Premier ministre et ministre des affaires étrangères(1939) à la tête d'une coalition catholique-socialiste, puis catholique-libérale, Hubert Pierlot dirige un gouvernement tripartite d'union nationale à partir du début de la Seconde Guerre mondiale (3 septembre 1939) jusqu'au début de l'occupation allemande (1940) dans des circonstances très difficiles. Il rencontra avec Paul-Henri Spaak, ministre des Affaires étrangères, le président du conseil français Paul Reynaud, le maréchal Pétain et le général Weygand le 27 mai 1940. Ensuite, c'est une véritable odyssée que celle de Spaak et Pierlot. Tous deux étaient restés en France, découragés, prêts à abandonner la partie à la suite de la défaite de leur pays d'accueil et cherchant à contacter l'Allemagne nazie en vue de négocier un armistice[1]. Les Allemands refusent cependant de reconnaître le gouvernement Pierlot[2]. Début août 1940, sous la pression du Roi et d'Albert de Vleeschauwer, l'un et l'autre gagnent l'Angleterre où ce dernier les attendaient déjà avec que Camille Gutt[3]. Pour ce faire, Pierlot et Spaak ont dû traverser l'Espagne cachés dans une camionnette à double fond pour échapper au gouvernement du général Franco, partisan des Nazis. Finalement récupérés au Portugal par les Anglais, les deux ministres arrivent à Londres le 22 octobre 1940. Pierlot dirigea le gouvernement belge en exil à Londres de 1940 à 1944.
Sous ce gouvernement, la Belgique fut représentée au combat de diverses façons : par trois escadrilles belges dans la Royal Air Force, la flotte marchande belge mise au service des alliés, la reconstitution d'une unité militaire belge en Grande Bretagne, la brigade Piron, la campagne victorieuse des troupes du Congo Belge contre les Italiens en Abyssinie, qui se termina par les victoires de Bortaï et de Saïo, ainsi que par la mise à la disposition de l'effort de guerre allié des richesses agricoles et minérales du Congo Belge (or, étain, uranium). En définitive, les Belges mobilisèrent près de 100 000 hommes sous les drapeaux entre le moment de la capitulation et le jour de la victoire finale sur l’Allemagne.
Voulant montrer son indépendance, le gouvernement belge de Londres écrivit, le 3 octobre 1941, au général de Gaulle : « Le gouvernement belge a résolu de vous reconnaître en qualité de chef des Français libres qui ont rallié la cause des Alliés... » La Belgique officielle fut ainsi le premier des belligérants à reconnaître les "Français Libres" malgré des pressions anglaises en sens opposé. Après la guerre, de retour en Belgique, Hubert Pierlot dirigea un gouvernement quadripartite comprenant catholiques, socialistes, libéraux et communistes puis un gouvernement sans ces derniers de décembre 1944 à février 1945. Hubert Pierlot fut nommé ministre d'État le 3 septembre 1945.
Au sujet d'Hubert Pierlot, Paul-Henri Spaak devait écrire : « Sérieux jusqu'à la sévérité, honnête jusqu'au scrupule, travailleur infatigable, chrétien fervent, patriote, modèle des vertus civiques, professionnelles et familiales, il était un homme de bien[4]. »
Les propos du Roi Léopold III, dans ses mémoires[5], sont nettement moins tendres: "Il était susceptible, méfiant, sans souplesse et, de surcroît, borné et incapable d'un geste simplement humain."
Au-delà d'une querelle entre deux personnes, l'opposition entre Léopold III et Pierlot révèle l'existence de deux politiques antagonistes. D'un côté, celle défendue par "Laeken" (lieu de résidence du Roi), de l'autre celle des Ministres. Depuis le début de la Drôle de guerre, Léopold III et son entourage (chef de cabinet, secrétaire...) désiraient en effet avoir la main sur deux matières essentielles : la politique étrangère et la politique militaire. A plusieurs reprises, ils prirent des initiatives sans en référer aux Ministres. Hubert Pierlot et ses collègues durent s'opposer sans cesse à ces initiatives. De leur point de vue, le Roi était certes chef de l'Etat mais "irresponsable" et, à ce titre, devait toujours être "couvert" par un Ministre avant de poser un acte. Léopold III prônait une politique de stricte neutralité en cas de conflit laquelle devait circonscrire l'action de l'armée belge dans les limites du territoire national. Pour Pierlot et ses Ministres, en revanche, une invasion du territoire belge amenait d'office les Belges à gagner le camp franco-anglais. Voici pourquoi Léopold III ne suivit pas ses Ministres en France au soir du 25 mai. Ainsi il existait une "question royale" avant la guerre.
La capitulation de l'armée belge "en Flandre" était inévitable. Mais le Roi a voulu un arrêt total des hostilités, étendu au Congo belge, aux troupes qui poursuivaient le combat en France. Dans sa perspective, fin mai 1940, la durée de la guerre n'était plus qu'une question de semaines. Il n'avait pas tort pour ce qui concernait la France. Mais il espérait aussi que la Grande-Bretagne et l'Allemagne signent une paix de compromis. C'est pourquoi Léopold III a cherché à entrer en contact avec Hitler dès le 31 mai[réf. nécessaire]. Il avait l'intention de former un gouvernement belge sous l'occupation, lequel aurait eu une souveraineté limitée aux questions nationales. Il tenta d'ailleurs vainement d'obtenir la démission du Gouvernement dès le 26 mai 1940.
Le 28 mai 1940, Paul Reynaud accuse les Belges de traitrise et de lâcheté et les rends responsables de la situation de l'armée française[6]. Dans le discours qui suit, Pierlot dénonce son Souverain[7] alors que, la veille encore, dans son discours du 27 mai, il louait ses efforts[8]. Le Roi n'en continue pas moins à mener une politique, dite de Laeken, discordante de celle menée par les Ministres à Londres, et ce jusqu'à son remariage avec Liliane Baels, fin 1941. Il refuse aussi de renouer avec les Ministres, se considérant que son état de prisonnier de guerre le met dans l'impossibilité de régner et ne pouvant donc pas exercer de rôle politique[9]. Ceux-ci ont pourtant essayé sans cesse de reprendre le contact durant le conflit. Ils le faisaient d'ailleurs dans l'intérêt de la Monarchie et, par conséquence, de Léopold III lui-même. Car celui-ci s'était enferré dans une politique de plus en plus critiquée à l'étranger (en particulier par les Alliés) et en Belgique même. En décembre 1943, Pierlot se résolut même à envoyer son beau-frère et ami François De Kinder dans une mission de la dernière chance, dite Mission Xavier. Celui-ci fut arrêté et puis fusillé par les Allemands au terme de sa mission. Ainsi Pierlot perdait celui qu'il considérait comme un ami, après avoir perdu son frère Jean, également arrêté par les Allemands, et, en avril 1941, deux de ses enfants, brulés dans l'incendie d'un train qui les ramenait dans un collège anglais où ils poursuivaient leur scolarité.
Léopold III campa toujours sur sa position. Le "Testament royal" - texte politique de portée générale - est, au final, la réponse du souverain au Gouvernement. Pierlot a pu prendre connaissance des éléments essentiels de cet écrit dès juin 1944. Plusieurs d'entre eux sont très embarrassants pour le souverain qui parle, notamment, d'occupation allemande et... anglo-américaine (à venir), qui n'utilise jamais le terme "Alliés", qui exige le retour à une stricte observance de la politique de neutralité d’avant-guerre (remettant en cause tous les traités signés par le Gouvernement pendant la guerre). Enfin, Léopold III réclamait une réparation solennelle et entière, préalable à toute autre démarche, de la part des Ministres belges. Le même mois de juin 1944 Léopold III était emmené en Allemagne par les Nazis. Pierlot aurait espéré que le souverain renonce à diffuser sa prose. Mais cela ne fut pas possible car Léopold III y tenait absolument. Churchill et Roosevelt purent donc lire ce texte. Du point de vue des Alliés, la cause de Léopold III était dès lors entendue : il devait abdiquer.
De retour en Belgique le 8 septembre 1944, Pierlot est resté à la tête du Gouvernement jusqu'en février 1945. Il occupait désormais la fonction contre son goût. Mais il voulait présenter son action et celle de ses collègues avant de quitter le pouvoir exécutif. A cette date, il croit encore possible un retour du Roi. Mais celui-ci est resté fidèle à ses exigences et à ses positionnements de 1940, malgré sa "déportation" et malgré la victoire alliée. Alors que tous les Ministres, tous les notables belges défilent chez le Roi en exil - de 1944 à 1950... - Pierlot n'est pour sa part jamais convié. À partir de 1945, il s'est en effet rangé dans le camp des partisans de l'abdication. Peu des siens (Parti social chrétien) sont de cet avis. Du moins publiquement... L'ancien Parti catholique est en effet celui le plus proche du souverain, celui dont l'électorat (en majorité flamand) est le plus attaché à la Couronne. Pour Pierlot justement, il ne faut pas confondre la Monarchie avec le destin d'un homme désormais discuté (Léopold III). Il faut, moins encore, confondre les intérêts de cet homme, fût-il Roi, avec ceux très importants (mutuelles, syndicats, écoles...) du PSC. Il a l'occasion de développer son point de vue, en 1947, dans une série d'articles parus dans Le Soir de Bruxelles. Cette prise de position ne lui sera jamais pardonnés au Palais et dans l'opinion catholique (à l'exception des démocrates chrétiens). Elle venait pourtant après une série d'attaques ad hominem d'une rare violence et d'études partiales. Pierlot voulait parler au nom de la "Vérité" qui a "ses droits".
Ainsi, la "Question royale", l'opposition d'une forte minorité des Belges au retour de Léopold III (surtout "la gauche" et une grande part des libéraux), avait des racines profondes. Désormais retiré de la politique, Hubert Pierlot vécut les dernières années de sa vie isolé, soutenu par quelques rares amis. Hubert Pierlot s'éteint à Uccle en 1963.
Fonctions
- Ministre d'État.
- Premier ministre, 1939-1945.
- Ministre de la Défense nationale, 1942-1944.
- Ministre des Travaux publics, 1943-1944.
- Ministre de la Justice, 1937, 1940-1942.
- Ministre de l'Instruction publique, 1940.
- Ministre de l'Agriculture, 1935, 1936-1938, 1939.
- Ministre de l'Intérieur, 1934-1936.
- Membre de la Chambre des représentants.
- Major honoraire de l'infanterie.
Bibliographie
- Roger Keyes, Un règne brisé. Leopold III, 1901-1941, Gembloux, Duculot, 1985, ann., cart., ill., ind., 576 p.
- Thierry Grosbois, Pierlot 1930-1950, Éditions Racine, Bruxelles, 2007 (ISBN 978-2-87386-485-9)
- Yves-William Delzenne & Jean Houyoux - Le nouveau Dictionnaire des Belges, Bruxelles, tome 2, p. 162.
- Pierre Van den Dungen, Hubert Pierlot (1883-1963), La Loi, le Roi, la Liberté, Bruxelles, Le Cri, décembre 2010.
Notes
- Roger Keyes, Un règne brisé. Léopold III, 1901-1941, Gembloux, Duculot, 1985, p. 466
- Le 18 juillet, Hitler publie le décret suivant : Le gouvernement Pierlot a fait appel à plusieurs reprises au gouvernement allemand pour entamer des négociations sur le retour des réfugiés et en faveur d'un armistice officiel. Le point de vue du Führer est qu'il n'y a pas de gouvernement belge. Toutes les demandes des autorités belges pour entrer en contact avec nous doivent être ignorées.
- Roger Keyes, op. cit., p. 467 : "[...] le Roi n'était pas favorable à un retour en Belgique de Pierlot et de ses collègues; il estimait en effet que 's'ils voulaient être logiques avec eux-mêmes, ils devaient se rendre en Angleterre'. Spaak lui-même reconnu plus tard que l'attitude du Roi les avait sauvés : 'il nous a évité de commetre une faute très grave'."
- Paul-Henri Spaak, Combats inachevés, Fayard 1969, tome I, p. 59.
- Léopold III, Pour l'Histoire"", Racine 2001, p. 62.
- L'armée belge vient justement de capituler, sans condition, en rase campagne, sur l'ordre de son Roi, sans prévenir ses camarades de combat, français et anglais, ouvrant la route de Dunkerque aux divisions allemandes... Il y a 18 jours, le même Roi qui, jusque là, avait affecté la même valeur à la parole de l'Allemagne qu'à celle des Alliés, nous avait adressé un appel au secours. A cet appel, nous avions répondu suivant un plan arrêté depuis décembre dernier par les états-major alliés. Or, voici qu'en pleine bataille, sans prévenir le général Blanchard, sans un regard, sans un mot pour les soldats français et anglais qui, à son appel angoissé, étaient venus au secours de son pays, le roi Léopold III de Belgique a mis bas les armes. C'est là un fait sans précédent dans l'Histoire...
- "Passant outre à l'avis formel du Gouvernement, le Roi vient d'ouvrir des négociations et de traiter avec l'ennemi. La Belgique sera frappée de stupeur, mais la faute d'un homme ne peut etre imputée à la Nation entière. Notre armée n'a pas mérité le sort qui lui est fait... Le Roi, rompant le lien qui l'unissait à son peuple, s'est placé sous le pouvoir de l'envahisseur. Dès lors, il n'est pas en situation de gouverner..".
- Pour le peuple belge plongé dans les terribles épreuves qui l'assaillent, une figure domine, vers laquelle toutes nos pensées se tournent : celle du Roi. Plus que jamais, il est l'incarnation de la Nation. Nous lui sommes profondément reconnaissant d'avoir tenté tous les efforts possibles pour épargner à son pays les horreurs de la guerre. Nous le voyons à présent dans un autre rôle. Digne successeur du Roi Soldat, il occupe le poste que celui-ci occupa voilà vingt-cinq ans. Pendant de nombreuses années, il a été lui-même préparé à ce role. La dure école de la guerre fut sa première initiation. A seize ans, il se battait dans la boue de l'Yser, comme simple soldat de seconde classe. La vie difficile qu'il a connue depuis, l'effort physique en montagne, ont trempé son coeur et son esprit. Même au temps où la paix semblait assurée, il n'a jamais cessé de prôner le renforcement de l'Armée et de considérer celle-ci comme la seule sauvegarde de l'indépendance nationale. Lorsque vint l'heure, il prit lui-meme la tête des troupes. Tous ceux qui sont revenus du front en ont témoigné: Léopold III est un homme et un chef. Nombreux parmi eux sont des vétérans qui ont connu son père".
- Roger Keyes, op. cit., p. 467 : "[La] réponse, transmise par le chef de cabinet de Léopold, était catégorique. 'La situation du Roi n'a pas changé. Le Roi ne pose pas d'acte politique et ne reçoit pas d'hommes politiques'".
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