Juifs de Salonique

Juifs de Salonique

Histoire des Juifs à Salonique

Famille juive de Salonique en 1917.
Évolution de la population de Salonique rapportée à ses trois principales communautés juive, turque et grecque (1500–1950).

La ville de Thessalonique, anciennement Salonique, a abrité jusqu'à la Seconde Guerre mondiale une très importante communauté juive d'origine sépharade. C'est le seul exemple connu d'une ville de diaspora de cette taille ayant conservé une majorité juive pendant plusieurs siècles. Arrivés pour la plupart à la suite de l'expulsion des Juifs d'Espagne de 1492, les Juifs sont indissociablement liés à l'histoire de Thessalonique et le rayonnement de cette communauté tant au plan culturel qu'économique s'est fait sentir sur tout le monde sépharade. La communauté a connu un âge d'or au XVIe siècle puis un déclin relatif jusqu'au milieu du XIXe siècle, époque à partir de laquelle elle a entrepris une importante modernisation aussi bien économique que cultuelle. L'histoire des Juifs à Salonique a ensuite pris un cours tragique suite à l'application de la Solution finale par le régime nazi qui s'est traduite par l'élimination physique de l'immense majorité des membres de la communauté.

Sommaire

Histoire

Les premiers Juifs

On sait qu'il y eut une présence juive à Thessalonique dès l'Antiquité comme l'atteste l'épître aux Thessaloniciens de Paul de Tarse destinée aux Juifs hellénisés de cette cité. En 1170, Benjamin de Tudèle dénombre 500 Juifs à Salonique. Dans les siècles suivants vinrent s'ajouter à cette communauté romaniote (c'est-à-dire de langue grecque) quelques italiotes et ashkénazes. Il y a donc eu une présence juive durant la période byzantine mais celle-ci est restée minimale et n'a pratiquement laissé aucune trace[1]. Le lieu d'établissement des premiers Juifs dans la ville n'est d'ailleurs pas connu avec certitude[2].

Au début de la domination ottomane sur Salonique à partir de 1430, les Juifs restèrent très peu nombreux. Les Ottomans avaient pour habitude d'effectuer des transferts de populations à l'intérieur de l'empire au gré des conquêtes militaires par la méthode dite du Sürgün et, suite à la prise de Constantinople en 1453, le pouvoir ottoman obligea les Juifs des communautés des Balkans et d'Anatolie à venir repeupler la nouvelle capitale de l'Empire rebaptisée Istanbul[3]. En conséquence de ces mesures, Salonique fut vidée de sa population juive comme en témoigne le recensement ottoman de 1478 qui n'y dénombre aucun Juif[1].

Arrivée des Juifs sépharades

Article détaillé : diaspora juive.
Les flux de la diaspora juive convergeant vers Salonique.

Ce n'est qu'après l'expulsion des Juifs d'Espagne en 1492 suite au décret d'Alhambra que Salonique devint progressivement un foyer d'accueil pour de nombreux Juifs en provenance d'Espagne soit directement, soit après un passage par le Portugal ou par l'Italie du Sud, pays qui adoptèrent aussi ultérieurement des arrêts d'expulsion. En effet, l'Empire ottoman se référant à la législation musulmane sur les gens du livre (en arabe ahl al-kitâb) qui accordait une protection aux chrétiens et Juifs soumis au statut de dhimmi accepta et même encouragea l'installation sur son territoire des Juifs touchés par les décrets d'expulsion.

Les premiers Sépharades arrivèrent dès 1492 en provenance de Majorque. Ils étaient des « repentants » revenus au judaïsme après leur conversion forcée au catholicisme. En 1493, des Castillans et des Siciliens les rejoignirent puis, les années suivantes, d'autres Juifs issus de ses contrées vinrent mais aussi des Aragonais, des Valenciens, des Calabrais, des Vénitiens, des Apuliens, des Provençaux et des Napolitains. Plus tard, entre 1540 et 1560, ce fut au tour des Portugais de chercher refuge à Salonique suite à la politique de persécution des marranes de ce pays. En plus de ces sépharades arrivèrent quelques ashkénazes originaires d'Autriche, de Transylvanie et de Hongrie parfois transférés de force lors de sürgün, suite de la conquête de ces terres par Soliman le magnifique à partir de 1526. Ainsi les registres de Salonique indiquent la présence de « Juifs de Buda » après la conquête de cette ville par les Turcs en 1541[3],[1].

Tant et si bien qu'en 1519, les Juifs représentaient déjà 56 % des habitants et en 1613, 68%[1].

La Jérusalem des Balkans

Organisation religieuse

Chaque groupe d'arrivants fonda sa propre communauté (aljama en castillan) dont les rites (minhaggim) différaient de ceux des autres communautés. La synagogue formait le ciment de chaque groupe et leur nom rappelait le plus souvent l'origine des arrivants. Les communautés n'étaient pas exemptes de scissions, ceci explique par exemple l'existence d'une Katallan Yachan (ancienne Catalogne) fondée en 1492 puis de l'apparition d'une Katallan Hadach (nouvelle Catalogne) à la fin du XVIe siècle[3] :

Nom de la synagogue Date de construction Nom de la synagogue Date de construction Nom de la Synagogue Date de construction
Ets ha Haim Ier s. av. J.-C. Apulia 1502 Yahia 1560
Achkenaz ou Varnak 1376 Lisbon Yachan 1510 Sicilia Hadach 1562
Mayorka 1391 Talmud Torah Hagadol 1520 Beit Aron 1575
Provincia 1394 Portugal 1525 Italia Hadach 1582
Italia Yashan 1423 Evora 1535 Mayorka Cheni Fin XVIe s.
Gueruch Sfarad 1492 Estrug 1535 Katallan Hadach Fin XVIe s
Kastilla 1492-3 Lisbon Hadach 1536 Italia Cheni 1606
Aragon 1492-3 Otranto 1537 Shalom 1606
Katallan Yachan 1492 Ichmael 1537 Har Gavoa 1663
Kalabria Yachan 1497 Tcina 1545 Mograbis XVIIe s.[4]
Sicilia Yachan 1497 Nevei Tsedek 1550

Une institution fédérale nommée talmud torah hagadol fut mise en place en 1520 pour chapeauter l'ensemble des congrégations et prendre des décisions (ascamot) s'appliquant à tous. Elle était administrée par sept membres au mandat annuel. Cette institution pourvoyait à l'éducation des jeunes garçons et constituait un cours préparatoire d'entrée aux yechivot. De très grande renommée, elle accueillait des centaines d'élèves[5]. En plus des études juives, on y enseignait les humanités latines et arabes ainsi que la médecine, les sciences naturelles et l'astronomie[6]. Les yechivot de Salonique étaient quant à elles fréquentées par les Juifs de tout l'Empire ottoman et même de plus loin ; on y comptait des élèves venus d'Italie comme d'Europe de l’Est. Après avoir terminé leurs études, certains élèves étaient nommés rabbins dans les communautés juives de l'Empire voire à Amsterdam ou à Venise[5]. La réussite des institutions éducatives était telle qu'il n'y avait aucun analphabète parmi les Juifs de Salonique[6].

Activités économiques

Au XVIe siècle, Salonique est située au cœur de l'empire ottoman et sa communauté rayonne sur tout le monde juif oriental.

La population sépharade s'installa principalement dans les grands centres urbains de l'Empire ottoman, Istanbul, Salonique et plus tard Izmir. Contrairement aux autres grandes villes de l'Empire où le négoce était principalement aux mains des chrétiens, Grecs et Arméniens, à Salonique ce sont les Juifs qui le contrôlaient. Leur puissance économique y devint si grande que le port et les commerces ne fonctionnaient pas le samedi, le jour du chabbat chômé dans le judaïsme. L'activité économique se déroulait en lien avec le reste de l'Empire ottoman mais aussi avec les États latins de Venise et de Gênes, ainsi que bien entendu avec toutes les communautés juives dispersées dans le bassin méditerranéen. Un signe de l'influence des Juifs saloniciens sur le négoce de cette zone est le boycott en 1556 du port d'Ancône situé dans les États pontificaux suite à l'autodafé de 25 marranes décidé par le pape Paul IV[7].

La particularité des Juifs saloniciens était qu'ils occupaient toutes les niches économiques n'étant pas cantonnés à quelques secteurs comme c'était le cas là où les Juifs étaient minoritaires. On les retrouvait donc à tous les niveaux de l'échelle sociale, du portefaix jusqu'au grand négociant. Chose exceptionnelle, Salonique comptait un grand nombre de pêcheurs juifs, cas pratiquement unique que l'on ne retrouvait qu'en Eretz Israel (Terre d'Israël)[8].

Mais la grande affaire des Juifs était la filature de la laine. Ils importèrent les techniques d'Espagne où cet artisanat était très développé. Seule la laine, plus grossière, différait à Salonique. La communauté prit très vite des décisions (ascamot) s'appliquant à toutes les congrégations pour règlementer cette industrie, ainsi il était interdit sous peine d'excommunication (kherem) d'exporter la laine et l'indigo à moins de trois jours de route de la ville[9]. Les draps, couvertures et tapis saloniciens acquirent très vite une grande notoriété et étaient exportés dans tout l'Empire, d'Istanbul à Alexandrie en passant par Smyrne et l'industrie se diffusa dans toutes les localités proches du golfe Thermaïque. Cette activité devint même une affaire d'État quand le sultan décida de vêtir les troupes de janissaires de lainages saloniciens chauds et imperméables. Des dispositions furent alors prises pour protéger l'approvisionnement. Ainsi un firman de 1576 obligeait les éleveurs de moutons à fournir en exclusivité leur laine aux Juifs tant que ceux-ci n'avaient pas acquis la quantité de laine nécessaire au filage des commandes de la Sublime Porte. D'autres dispositions règlementaient strictement les types de lainage à produire, les normes de production et les délais[9]. Des tonnes de lainages étaient transportées à Istanbul par bateau, à dos de chameau et de cheval puis étaient solennellement distribuées aux corps de janissaires à l'approche de l'hiver. Vers 1578, il fut décidé par les deux parties que l'approvisionnement en drap servirait de redevance au trésor de l'État et remplacerait le paiement en espèces, choix qui allait par la suite se révéler très néfaste pour les Juifs[9].

Déclin

Déclin économique

L'accroissement du nombre de janissaires, l'inflation de la monnaie et la crise financière de l'État contribuèrent à l'augmentation continue des commandes de la Sublime Porte ce qui mit les Juifs dans une situation très difficile. De 1 200 pièces à l'origine, ils étaient passés à plus de 4 000 vers 1620[10]. Ceci conduisit à une réduction de la qualité des pièces fournies en raison de tricheries sur les normes établies. Le rabbin Juda Covo à la tête d'une délégation salonicienne fut sommé de venir s'expliquer sur cette dégradation à Istanbul et fut condamné à la pendaison, ce qui marqua durablement les esprits[10]. Par la suite, les demandes de l'Empire furent partiellement réduites et la production réorganisée[10].

Ces déboires étaient annonciateurs d'une période sombre pour les Juifs saloniciens. Le flux de migrants venant de la péninsule ibérique s'était peu à peu tari, ces derniers préfèrant à Salonique les villes d'Europe occidentale telles Londres, Amsterdam ou Bordeaux[10]. Ce phénomène entraîna un éloignement progressif des Juifs sépharades ottomans de l'occident. Alors qu'ils avaient à leur arrivée introduit de nombreuses technologies européennes, y compris l'imprimerie, ils devinrent de moins en moins compétitifs face aux autres groupes ethnico-religieux. Les médecins et traducteurs juifs autrefois réputés furent peu à peu supplantés par leurs homologues chrétiens, principalement Grecs et Arméniens. Dans le monde du négoce, les chrétiens occidentaux prirent le dessus sur les Juifs, bénéficiant de la protection des puissances occidentales par le truchement des instances consulaires[10] et Salonique perdit sa place de premier plan suite à l'effacement progressif de Venise, sa partenaire commerciale, et à la montée en puissance du port de Smyrne[10]. De plus, les Juifs comme le reste des dhimmis eurent à subir le contrecoup des défaites successives de l'Empire face à l'Occident. La ville stratégiquement placée sur la route des armées eût à subir à plusieurs reprises les représailles des janissaires contre les infidèles[10]. Il y eut durant tout le XVIIe siècle siècle une migration des Juifs de Salonique vers Istanbul, Eretz Israel et surtout Smyrne qui commençait à se développer à cette époque. La communauté de cette ville étant principalement issue de celle de Salonique[10]. La peste, ainsi que d'autres épidémies telles le choléra qui toucha Salonique à partir de 1823, contribuèrent aussi à l'affaiblissement de Salonique et de sa communauté juive[10].

Les produits occidentaux, qui commencèrent à toucher massivement l'Orient à partir du milieu du XIXe siècle, portèrent un rude coup à l'économie salonicienne et notamment à la draperie juive. Les janissaires finirent par préférer aux lainages de Salonique, dont la qualité n'avait cessé de se détériorer, les « londrins » provençaux, revendant à bas prix les lots qui leurs étaient attribués par l'État[10]. Ceci conduisit le grand vizir à ne plus faire acquitter par les Juifs qu'une moitié de leurs impôts sous forme de draps, le reste étant perçu en espèces. La production déclina alors rapidement et cessa complètement lors de l'abolition du corps des janissaires en 1826[10].

Sclérose du judaïsme et arrivée de Sabbataï Tsevi

Article détaillé : Sabbataï Tsevi.
Sabbataï Tsevi – Portrait par un témoin oculaire, Smyrne, 1666.

Le judaïsme salonicien avait longtemps bénéficié de l'apport successif des idées et des connaissances des différentes vagues d'immigration sépharade mais cet apport humain s'étant peu ou prou tari au XVIIe siècle, il s'enfonça dans une routine l'appauvrissant considérablement[11]. Les yéchivot étaient toujours aussi fréquentées mais l'enseignement qu'on y prodiguait était très formaliste. L'édition d'ouvrages religieux se poursuivit mais sans renouvellement. Un témoin extérieur rapporte que « ce sont toujours les sempiternelles questions de culte et de jurisprudence commerciale qui absorbent leur attention et font les frais de leurs études et de leurs recherches. Leurs œuvres constituent en général, une répétition des écrits de leurs prédécesseurs »[11].

Dés le XVe siècle, un courant messianiste s'était développé dans le monde sépharade ; la rédemption marquant la fin du monde, en hébreu la guéoulah, paraissait imminente. Cette idée alimentée par le dépérissement économique de Salonique était entretenue par le développement croissant des études cabalistiques s'appuyant sur le Zohar en pleine expansion dans les yechivot de Salonique. On annonça la fin des temps successivement en 1540 puis 1568 et de nouveau en 1648 et 1666.

C'est dans ce contexte qu'arriva un jeune et brillant rabbin chassé de la voisine Smyrne : Sabbataï Tsevi. Expulsé de cette ville vers 1651, après avoir proclamé être le messie[12], il gagna Salonique où sa réputation de savant et de cabaliste grandit très vite[11]. Les plus nombreux à le suivre étaient des membres de la synagogue Shalom, souvent d'anciens marranes[11]. Après plusieurs années de prudence, il fit de nouveau scandale en prononçant lors d'un banquet solennel dans la cour de la synagogue Shalom le tétragramme ineffable dans la tradition juive et se présenta comme le machia'h ben David, c'est-à-dire comme le messie fils du roi David[11]. Le conseil rabbinique fédéral le chassa alors de la ville et Sabbataï Tsevi partit diffuser sa doctrine dans d'autres villes du monde sépharade. Son passage divisa à Salonique comme ailleurs la communauté juive et cette situation causa tant de remous que Sabbataï Tsevi fut emprisonné puis convoqué par le sultan. Là, sommé de démontrer ses pouvoirs surnaturels en résistant aux flèches dont on le menaçait, il finit par abjurer sa foi, se convertissant à l'islam. Ce coup de théâtre fut diversement interprété par ses adeptes, les sabbatéens. Certains y virent un signe et se convertirent, d'autres rejetèrent sa doctrine et retournèrent pleinement au judaïsme, les derniers restèrent formellement fidèles au judaïsme tout en continuant secrètement à suivre les enseignements de Sabbataï Tsevi[11]. À Salonique, ce sont 300 familles parmi les plus riches qui décidèrent en 1686 d'embrasser l'islam sans que les autorités rabbiniques puissent réagir, la conversion étant vue d'un bon œil par les autorités ottomanes[11]. Dès lors, ceux que les Turcs surnommèrent Dönme, c'est-à-dire renégats eux-mêmes divisés en trois groupes : les Izmirlis, les Kuniosos et les Yacoubi[13], formèrent une nouvelle composante de la mosaïque ethno-religieuse salonicienne. Bien qu'ils aient choisi la conversion, ils ne se mêlèrent pas aux Turcs, pratiquant une stricte endogamie, vivant dans des quartiers séparés, édifiant leurs propres mosquées et conservant une liturgie spécifique en judéo-espagnol[12]. Ils participèrent grandement au XIXe siècle à la propagation des idées modernistes[13]. Puis, comme les Turcs, ils émigrèrent de Salonique suite à la prise de pouvoir par les Grecs[13].

Renouveau

Les Juifs de Salonique connurent à partir de la seconde moitié du XIXe siècle une véritable renaissance. La régénération vint des Juifs francs, les Frankos, c'est-à-dire les Juifs venus à cette époque des pays catholiques et plus particulièrement les Juifs de Livourne en Italie. Elle s'inscrivit dans un contexte général d'ouverture des Balkans au modernisme occidental qui draina vers le monde ottoman techniques et idées nouvelles.

Industrialisation

À Salonique, les Juifs occupaient toute l'échelle sociale, du riche entrepreneur à l'humble vendeur de limonade.

Salonique connut à partir des années 1880 un important processus d'industrialisation qui en fit le poumon économique d'un Empire sur le déclin. Les entrepreneurs à l'origine de ce processus étaient majoritairement juifs, cas unique dans le monde ottoman puisque dans les autres grandes villes, l'industrialisation fut principalement le fait d'autres groupes ethnico-religieux. Les Allatini formaient le fer de lance de l'entreprenariat juif, ils mirent en place plusieurs industries, établissant minoteries et autres industries alimentaires, briqueteries, usines de transformation du tabac. Plusieurs négociants soutinrent l'introduction d'une grande industrie du drap, activité auparavant pratiquée au sein d'un système de production artisanal.

Cette industrialisation conduisit à la prolétarisation d'un grand nombre de Saloniciens toutes confessions confondues ce qui se traduisit par l'apparition d'une importante classe ouvrière juive. Les entrepreneurs employaient la main d'œuvre sans distinction de religion ou d'ethnie contrairement à ce qui se faisait ailleurs dans l'Empire ottoman, ce qui contribua à l'émergence de mouvements ouvriers non ethniques bien que marqués par la suite par les questions nationales.

Haskala

Deux rabbins de Salonique à la fin du XIXe siècle. Avec l'avènement de la Haskala, le pouvoir religieux perd de son emprise sur la population.

La Haskala, mouvement de pensée juif inspiré du Siècle des Lumières, toucha le monde ottoman à la fin du XIXe siècle après s'être propagé parmi les populations juives d'Europe occidentale et orientale. Ce sont les mêmes qui parachevaient le renouveau économique de Salonique qui s'en firent les messagers.

Le premier champ d'action de ces maskilim et en premier lieu de l'entrepreneur livournais Moïse Allatini fut l'éducation. En 1856, avec l'aide des Rothschild, il fonda dans les annexes du talmud torah et donc avec l'assentiment des rabbins qu'il avait gagnés à son objectif par ses importantes donations aux œuvres de bienfaisance l'école Lippman une institution modèle dirigée par le professeur Lippman, un rabbin progressiste de Strasbourg[14]. Après cinq années d'existence, l'établissement ferma ses portes et Lippman repartit sous la pression du rabbinat en désaccord avec ses méthodes d'éducation innovantes. Cependant, il avait eu le temps de former bon nombre d'élèves qui prirent la relève par la suite[14].

Le docteur Allatini poussa en 1862 son beau-frère Salomon Fernandez à fonder une école italienne grâce à une donation du royaume d'Italie[14]. Plusieurs tentatives pour implanter le réseau éducatif de l'alliance israélite universelle échouèrent sous la pression des rabbins qui n'admettaient pas qu'une école juive puisse être placée sous le patronage de l'ambassade de France. Mais le besoin de structures éducatives devint si pressant que les partisans de son implantation eurent finalement gain de cause en 1874 grâce au mécénat d'Allatini devenu membre du comité central de l'AIU à Paris[14]. Le réseau de cette institution s'étendit alors rapidement : en 1912, on comptait neuf nouvelles écoles de l'AIU pourvoyant à l'éducation des garçons comme des filles de la maternelle au secondaire tandis que les écoles rabbiniques étaient en plein déclin. Ceci eut pour effet d'implanter durablement la langue française au sein de la communauté juive de Salonique comme d'ailleurs dans tout le monde juif oriental[14]. Ces écoles s'occupaient de la formation intellectuelle mais aussi manuelle de ses élèves permettant la formation d'une génération en phase avec les évolutions du monde moderne et apte à intégrer le marché du travail d'une société en voie d'industrialisation.

Activisme politique et social

L'irruption de la modernité se traduisit aussi par l'influence croissante de nouvelles idées politiques en provenance d'Europe occidentale. Les Juifs ne restèrent pas indifférents à cette agitation politique et en devinrent des acteurs importants. La révolution Jeunes-Turcs de 1908 qui avait ses bases à Salonique proclama la monarchie constitutionnelle et véhicula le concept de l'Ottomanisme, proclamant l'égalité au sein de l'Empire de tous les millets. Quelques Juifs de Salonique étaient influents dans le mouvement Jeune turc majoritairement composé de musulmans mais c'est surtout dans le champ social qu'ils furent actifs. À partir de cette époque, un vent de liberté souffla sur Salonique, permettant aux mouvements ouvriers de se structurer et de s'engager dans des luttes sociales pour l'amélioration des conditions de travail. Une tentative d'union des différentes nationalités au sein d'un seul mouvement ouvrier eut lieu avec la formation de la « Fédération ouvrière socialiste » dirigée par Abraham Benaroya, un Juif de Bulgarie, qui entama la publication d'un organe quadrilingue, le Journal du travailleur, diffusé en grec, turc, bulgare et judéo-espagnol. Cependant, le contexte balkanique, propice aux scissions, affecta le mouvement et après le départ de l'élément bulgare, la Fédération ne fut pratiquement plus constituée que de Juifs.

Le mouvement sioniste devait affronter la concurrence de la Fédération ouvrière socialiste, très antisioniste. Ne pouvant s'implanter dans la classe ouvrière, le sionisme à Salonique se tourna vers les bourgeois et les intellectuels, moins nombreux[15].

Arrivée des Grecs, départ des Juifs

Salonique, ville grecque

Des familles sans logement suite au pogrom de 1931.

En 1912, suite à la Première Guerre balkanique, les Grecs prirent le contrôle de Salonique aux côtés des Bulgares puis finirent par intégrer la ville à leur territoire. Ce changement de souveraineté fut mal vécu par les Juifs qui craignaient que le rattachement ne leur nuise, inquiétude renforcée par les propagandes bulgare, serbe et autrichienne qui souhaitaient rallier les Juifs à leur cause[14]. Certains Juifs militèrent alors pour l'internationalisation de la ville sous la protection des grandes puissances européennes mais leur proposition ne reçut que peu d'échos, l'Europe ayant accepté le fait accompli[16]. Les Grecs prirent néanmoins certaines mesures provisoires visant à favoriser l'intégration des Juifs[14] comme par exemple en les laissant travailler le dimanche et en leur permettant ainsi d'observer le chabbat. L'économie tira bénéfice de l'annexion qui ouvrait à Salonique les portes du marché de la Grèce septentrionale et de la Serbie avec laquelle l'Hellade avait passé une alliance ; l'installation des troupes de l'armée d'Orient, suite au déclenchement de la Première Guerre mondiale, provoqua ensuite un regain de l'activité économique. Le gouvernement grec voyait d'un bon œil le développement du sionisme et l'établissement d'un foyer juif en Palestine, ce qui convergeait avec la volonté grecque de démembrer l'Empire ottoman. La ville reçut la visite de grands leaders sionistes, Ben Gourion, Ben Zvi et Jabotinsky qui voyaient en Salonique la ville juive modèle dont devrait s'inspirer leur futur État[14].

Cependant, on peut constater une nette différence entre l'attitude du gouvernement et l'attitude de la population locale. Un témoin, Jean Leune, correspondant de L'Illustration durant les guerres balkaniques et ensuite officier dans l'armée d'Orient, rapporte :

« Devant les innombrables boutiques et magasins tenus par les Juifs, maîtres jusqu'alors du commerce local, les marchands grecs venaient s'installer sur le trottoir, tout contre les portes qu'il devenait impossible de franchir. La nouvelle police souriait... Et les Juifs, boycottés, les uns après les autres fermèrent boutique.[17] »

Incendie de 1917 et développement de l'antisémitisme

Les quartiers de la ville basse où vivaient une majorité de Juifs furent gravement touchés par l'incendie de 1917

Le grave incendie de 1917 constitua un tournant. La communauté juive concentrée dans la ville basse fut la plus touchée par le sinistre ; le feu détruisit le siège du grand Rabbinat et ses archives ainsi que 16 des 33 synagogues de la cité. Contrairement à la reconstruction qui avait eu lieu après l'incendie de 1890, les Grecs décidèrent de procéder à un nouvel aménagement urbain. De ce fait, ils exproprièrent tous les habitants en leur donnant néanmoins un droit de préemption sur les nouveaux logements reconstruits selon un nouveau plan. Mais ce sont les Grecs qui en majorité peuplèrent les nouveaux quartiers, les Juifs choisissant souvent une situation plus excentrée[18].

Bien que le premier anniversaire de la célébration de la déclaration Balfour ait été célébré en 1918 avec un faste sans égal en Europe, le déclin avait commencé. L'afflux de dizaines de milliers de réfugiés grecs d'Asie Mineure et le départ des Turcs et des Dönme de Salonique suite à la « Grande catastrophe » et à la signature consécutive du traité de Lausanne modifièrent considérablement la composition ethnique de Salonique. Les Juifs cessèrent de constituer la majorité absolue et, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, ils ne représentaient plus que 40 % de la population. À cette hellénisation croissante de la population correspondait aussi une politique moins conciliante envers les Juifs. Ainsi en 1922, le travail fut interdit le dimanche ce qui imposait de facto aux Juifs de travailler le shabbat, les affiches en langue étrangère furent prohibées et les tribunaux rabbiniques cessèrent de pouvoir se prononcer sur les affaires de droit patrimonial[6]. Comme dans d'autres pays d'Europe orientale tels la Hongrie et la Roumanie, un important courant d'antisémitisme se développa dans l'entre-deux-guerres à Salonique mais il n'atteignit jamais le niveau de violence de ces deux pays[19]. Il était surtout le fait des arrivants grecs d'Asie Mineure, le plus souvent démunis et qui étaient en concurrence directe avec les Juifs pour le logement et le travail[19]. Le mouvement était relayé dans la presse par le quotidien Makedonia et par l'organisation ultranationaliste Ethniki Enosis Ellas (Union nationale de Grèce, EEE), tous deux proches du parti libéral (au pouvoir) dirigé par Venizelos[19]. Les Juifs étaient accusés de ne pas vouloir se fondre dans l'ensemble national ; le développement du communisme et du sionisme au sein de la communauté étaient observés avec la plus grande suspicion. Le gouvernement grec adopta une attitude ambivalente, pratiquant une politique de l'apaisement mais refusant de se démarquer nettement de ces deux vecteurs de l'antisémitisme[19]. Ce phénomène se cristallisa en 1931, année où eut lieu le pogrom de camp Campbell : un quartier juif fut entièrement brûlé ce qui laissa 500 familles sans abri mais ne causa cependant que la mort d'un Juif[20]. Plusieurs dizaines de tombes du cimetière juif de Salonique furent profanées en cette occasion.

Prise de pouvoir par Metaxás

La prise de pouvoir par le dictateur d'extrême droite à tendance fascisante [21] Ioánnis Metaxás en 1936 se traduisit paradoxalement par une baisse notable des violences antisémites. Il interdit l'organisation EEE et la parution de propos antisémites dans la presse[19] et noua aussi de bonnes relations avec le grand-rabbin de Salonique, Zvi Koretz[22]. Ceci explique le développement à partir de cette époque d'un important courant nationaliste chez les Juifs de Salonique, qui n’étaient pourtant Grecs que depuis 1913. Dés lors, y compris dans l’enfer des camps, ils ne cessèrent d’affirmer leur appartenance à la nation hellène[21].

Émigration

Un phénomène migratoire avait commencé à se mettre en place dès le début du XXe siècle, à partir du moment où le gouvernement Jeune turc établit la conscription pour tous les sujets ottomans, mais c'est surtout après l'annexion de Salonique par les Grecs que le mouvement s'amplifia. Les mauvaises conditions économiques, la montée de l'antisémitisme et, dans une moindre mesure, le développement du sionisme poussèrent les Juifs à partir, principalement en Europe occidentale, en Amérique du Sud et en Palestine. Ainsi, la population juive passa de 93 000 à 53 000 personnes à la veille de la guerre[23]. Il y eut quelques réussites notoires au sein de cette diaspora. Isaac Carasso, établi à Barcelone, fonda l'entreprise Danone, Maurice Abravanel se dirigea vers la Suisse avec sa famille puis aux États-Unis où il devint un célèbre chef d'orchestre. Le grand-père maternel du président français Nicolas Sarkozy émigra en France à cette époque. Dans ce pays, dans l'entre-deux-guerres, la population juive de Salonique était concentrée dans le 9e arrondissement de Paris ; le siège de leur association cultuelle était situé rue La Fayette[24]. En Palestine mandataire, la famille Recanati fonda l'une des banques les plus importantes de l'actuel État d'Israël, la Eretz Yisrael Discount Bank, devenue la Israel Discount Bank[25].

Seconde Guerre mondiale

Bataille de Grèce

Le 28 octobre 1940, les forces italiennes décidèrent d'envahir la Grèce suite au refus du dictateur grec Ioánnis Metaxás d'accepter l'ultimatum lancé par les Italiens. S'ensuivit la bataille de Grèce, à laquelle les Juifs prirent part. 12 898 d'entre eux s'engagèrent dans l'armée grecque[26] ; 4 000 participèrent aux campagnes d'Albanie et de Macédoine ; 513 affrontèrent les Allemands et, au total, 613 Juifs furent tués, dont 174 de Salonique. La brigade 50 de Macédoine était surnommée « bataillon Cohen » en raison du grand nombre de Juifs dont elle était constituée[26]. Après la défaite grecque, beaucoup de soldats juifs eurent les pieds gelés en rentrant chez eux à pied.

Occupation

Le partage de la Grèce entre Allemands, Italiens et Bulgares :      Occupation allemande      Occupation italienne      Occupation bulgare      Îles du Dodécanèse (possession italienne avant la guerre)
Les hommes de la communauté juive forcés à se livrer à des exercises physiques en juillet 1942

La Grèce du Nord, et donc Thessalonique, revint aux Allemands tandis que le sud de la Grèce tomba aux mains des Italiens qui, durant la période où ils occupèrent la région (jusqu'en septembre 1943), n'appliquèrent pas de politique antijuive[26]. À Thessalonique, où les Allemands entrèrent le 9 avril 1941, ils ne mirent en place que très progressivement des mesures antisémites. L'officier allemand Max Merten, en charge de l'administration de la ville, ne cessait de répéter que les lois de Nuremberg ne s'appliqueraient pas à Salonique[22]. La presse juive fut très rapidement interdite, alors que deux quotidiens grecs pro-nazis, Nea Evropi et Apoyevmanti, firent leur apparition. Des maisons et édifices communautaires furent réquisitionnés par l'occupant, y compris l'hôpital construit grâce aux subsides du baron Hirsch. Fin avril, des panneaux interdisant aux Juifs l'entrée des cafés firent leur apparition, puis l'on obligea les Juifs à se séparer de leurs radios. Le grand-rabbin de Salonique, Zvi Koretz, fut arrêté par la Gestapo le 17 mai 1941 et envoyé dans un camp de concentration près de Vienne, d'où il revint fin janvier 1942 pour reprendre son poste de rabbin[27]. En juin 1941, la commission Rosenberg arriva sur place et pilla les archives juives, envoyant des tonnes de documents communautaires à l'Institut nazi de recherche juive à Francfort. Par ailleurs, les Juifs souffraient de la famine comme le reste de leurs concitoyens, le régime nazi n'attachant aucune importance à l'économie grecque. On estime qu'en 1941–1942 soixante Juifs de cette cité moururent chaque jour de faim.[26]

Pendant un an, aucune autre mesure antisémite ne fut prise ce qui donna momentanément aux Juifs un sentiment de sécurité.

Par une chaude journée de juillet 1942, le jour du chabbat, tous les hommes de la communauté âgés de 18 à 45 ans furent rassemblés sur la place de la Liberté. Durant tout l'après midi, on les obligea à faire des exercices physiques humiliants sous la menace des armes. Quatre mille d'entre eux furent envoyés effectuer des travaux de voirie pour l'entreprise allemande Müller sur les routes reliant Salonique à Kateríni et Larissa, zones où sévissait le paludisme[26]. En moins de dix semaines, 12 % d'entre eux moururent d'épuisement et de maladie. La communauté salonicienne, aidée de celle d'Athènes, parvint à réunir deux milliards sur l'énorme somme de 3,5 milliards de drachmes demandée par les Allemands pour que les travailleurs forcés soient rapatriés. Les Allemands acceptèrent de les libérer mais, en contrepartie, exigèrent à la demande des autorités grecques l'abandon du cimetière juif de Salonique qui contenait de 300 000[28] à 500 000[29] tombes ; par sa taille et son emplacement, il avait longtemps gêné la croissance urbaine de Salonique. Les Juifs commencèrent le transfert des tombes vers deux terrains qui leur avaient été alloués en périphérie, mais les autorités municipales, prétextant la lenteur de l'opération, décidèrent de prendre les choses en main. Cinq cents ouvriers grecs payés par la municipalité se lancèrent dans la destruction des tombes[29]. Le cimetière ne tarda pas à être transformé en une vaste carrière où Grecs et Allemands allaient chercher des pierres tombales qui servirent de matériel de construction[29]. Sur ce site s’étend de nos jours, entre autres, l'université Aristote[28].

On estime qu'entre le début de l'occupation et la fin des déportations, 3 000 à 5 000 Juifs parvinrent à s'échapper de Salonique, trouvant un refuge temporaire en zone italienne. Parmi ceux-ci, 800 possédaient la nationalité italienne et furent tout au long de la période d'occupation italienne activement protégés par les autorités consulaires de ce pays. 800 Juifs prirent le maquis dans les montagnes macédoniennes au sein de la Résistance grecque communiste, l'ELAS ; le mouvement royaliste de droite, pour sa part, n'accueillit pratiquement aucun Juif[26].

« Destruction des Juifs de Salonique »[30]

Article détaillé : Shoah.
Le rassemblement des Juifs de Salonique (juillet 1942).

54 000 Sépharades de Salonique furent expédiés dans les camps d'extermination nazis. Près de 98 % de la population juive totale de cette ville connut la mort durant la guerre. Seul le judaïsme polonais connut un taux de destruction plus important[26].

Déportation

Pour mener à bien cette opération, les autorités nazies dépêchèrent sur place deux spécialistes en la matière, Alois Brunner et Dieter Wisliceny, qui arrivèrent le 6 février 1943[22]. Immédiatement, ils firent appliquer les lois de Nuremberg dans toute leur rigueur, imposant le port de l'étoile jaune et restreignant drastiquement la liberté de circulation des Juifs[22]. Ceux-ci furent rassemblés fin février 1943 dans trois ghettos (Kalamaria, Singrou et Vardar/Agia Paraskevi) puis transférés dans un camp de transit du quartier du baron Hirsch jouxtant la gare. Là, les trains de la mort les attendaient. Pour accomplir leur mission, les SS s'appuyèrent sur une police juive créée pour l'occasion, dirigée par Vital Hasson qui se livra avec ses hommes à de nombreuses exactions contre le reste des Juifs[22].

Le 15 mars partit le premier convoi. Chaque train emportait de 1 000 à 4 000 Juifs traversant toute l'Europe centrale principalement vers Birkenau. Un convoi partit pour Treblinka et il est possible que des déportations pour Sobibor aient eu lieu, puisqu'on retrouva des Juifs saloniciens dans ce camp. La population juive de Salonique était tellement nombreuse que la déportation dura plusieurs mois pour s'achever, le 7 août[26], avec la déportation du grand-rabbin Tzvi Koretz avec d'autres notables dans le camp de concentration de Bergen-Belsen, sous un régime relativement bon. Dans ce même convoi se trouvaient 367 Juifs protégés par leur nationalité espagnole qui connurent un destin singulier : transférés depuis Bergen-Belsen jusqu'à Barcelone puis au Maroc, certains parvinrent finalement en Palestine mandataire[26],[31].

Facteurs explicatifs de l'efficacité des déportations

Plusieurs raisons ont été avancées pour expliquer cette hécatombe qui contraste avec le cas d'Athènes, où une grande partie des Juifs parvint à échapper à la mort. D'une part, l'attitude du Judenrat, et en premier lieu de celui qui fut à sa tête durant la période précédant les déportations, le grand rabbin de Salonique Zvi Koretz, a été très critiquée. On lui a reproché d'avoir appliqué les directives nazies avec docilité et d'avoir minimisé les craintes des Juifs concernant leur transfert en Pologne alors même que celui-ci, de nationalité autrichienne et donc de langue maternelle allemande, était supposé être bien renseigné[32]. Des rumeurs ont même couru, l'accusant d'avoir sciemment collaboré avec l'occupant[32]. Une étude récente tend néanmoins à relativiser son rôle dans les déportations[32]. Un autre facteur fut la solidarité dont firent preuve les familles qui refusaient de se séparer dans l'adversité ; cette volonté de faire face ensemble ne facilita pas les initiatives individuelles. On a aussi fait remarquer qu'il était difficile aux Juifs de se cacher du fait de leur méconnaissance de la langue grecque, imposée seulement quand Salonique passa sous souveraineté grecque en 1913. De plus, la taille importante de la communauté limitait les opportunités de se fondre dans la population grecque orthodoxe comme ce fut le cas à Athènes. Il existait par ailleurs un antisémitisme latent dans une partie de la population grecque, notamment parmi ceux qui avaient dû fuir l'Asie mineure lors des transferts de population entre Grèce et Turquie. Arrivés en masse à Salonique, ces immigrants se trouvaient exclus du système économique et, pour certains, regardaient avec hostilité la population juive, parfois plus riche, qu'ils assimilaient à l'ancien pouvoir ottoman[27]. Néanmoins, le Yad Vashem a distingué 265 Grecs (dont la princesse Alice, belle-fille du roi Georges Ier) comme justes parmi les nations, soit la même proportion que parmi la population française[27].

Dans les camps
Entrée d'Auschwitz II - Birkenau, vue depuis l'intérieur du camp.

À Birkenau, environ 37 000 Saloniciens furent gazés immédiatement, surtout les femmes, les enfants et les personnes âgées[26]. Près d'un quart des 400 expérimentations commises sur des Juifs le furent sur des Juifs grecs, en particulier ceux de Salonique. Ces expériences incluaient l'émasculation, l'implantation du cancer du col de l'utérus sur les femmes. La plupart des jumeaux périrent victimes de crimes atroces[26]. Les autres Saloniciens durent travailler dans les camps. Dans les années 1943–1944, ils représentaient une part importante de la main d'œuvre de Birkenau : ils étaient environ 11 000. En raison de leur méconnaissance du yiddish, les Saloniciens furent envoyés en nombre pour nettoyer les décombres du ghetto de Varsovie en août 1943 afin d'y construire un camp. Parmi les 1 000 Saloniciens employés à cette tâche, une petite vingtaine parvint à s'échapper du ghetto par les égouts et à rejoindre la résistance polonaise, l'Armaya Ludova, qui organisait l'insurrection[33],[26].

Beaucoup de Juifs de Salonique furent aussi intégrés dans les sonderkommandos. Le 7 octobre 1944, ils lancèrent avec d'autres Juifs grecs un soulèvement planifié à l'avance, prenant d'assaut les crématoires et tuant une vingtaine de gardes. Une bombe fut lancée dans le fourneau du crématoire III, détruisant le bâtiment. Avant d'être massacrés par les Allemands, les insurgés entonnèrent un chant des partisans grecs et l'hymne national grec[34].

Dans son livre Si c'est un homme, l’un des ouvrages les plus célèbres de la littérature de la Shoah, Primo Levi évoque dans une courte description le groupe des « quelques rescapés de la colonie juive de Salonique », ces « Grecs, immobiles et silencieux comme des sphinx, accroupis sur le sol derrière leurs gamelles de soupe épaisse[35] ». Ces derniers membres de la communauté encore vivants courant 1944 font une forte impression à l’auteur. Il note que « malgré leur faible nombre leur contribution à la physionomie générale du camp et au jargon international qu'on y parle est de première importance. » Selon lui, leur capacité à survivre dans les camps s'explique en partie par le fait qu’ils constituent dans le Lager «le groupe national le plus cohérent et de ce point de vue le plus évolué». Erika Perahia Zemour, directrice du musée de la Présence juive de Salonique analysant ces propos rapporte que ce sentiment patriotique décrit par un observateur extérieur ressort aussi dans le récit des déportés saloniciens et tire ses origines de la politique philosémite de Metaxás avant-guerre[21].

L'après-guerre

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, une violente guerre civile éclata en Grèce. Elle dura jusqu'en 1949, opposant les forces du gouvernement d'Athènes soutenu par les Britanniques à la puissante résistance communiste, l'ELAS. Certains des Juifs de Salonique qui avaient échappé à la déportation y prirent part, soit au sein des forces gouvernementales, soit dans le camp adverse[36]. Parmi ceux qui avaient combattu au sein de l'ELAS, beaucoup furent victimes, comme les autres partisans, de la répression qui s'abattit sur le pays après que le gouvernement eut repris le contrôle de la situation[36].

Des quelques rescapés des camps, certains choisirent de ne pas retourner en Grèce et émigrèrent en Europe occidentale, en Amérique ou en Palestine mandataire et d'autres prirent le chemin du retour[36]. Ils furent tous confrontés à de grandes difficultés pour survivre et mener à bien leur projet tant l'Europe de l'immédiate après guerre était dans un état chaotique. Ils souffrirent par ailleurs de discrimination de la part de certains rescapés ashkénazes qui mettaient en doute leur judéité[36].

L'arrivée à Salonique fut un choc supplémentaire, les rescapés étaient souvent les seuls survivants de leur famille et ils trouvèrent leurs maisons occupées par des familles grecques qui les avaient rachetées aux Allemands[36]. Ils durent dans un premier temps être hébergés dans les synagogues. Un comité juif (Komite Djudio) fut monté pour recenser le nombre de rescapés et obtint auprès de la Banque de Grèce la liste des 1 800 maisons vendues aux Grecs[36]. Ces derniers se montrèrent très réticents à rendre leurs biens aux Juifs, arguant qu'ils avaient acheté ces maisons et qu'eux aussi avaient souffert de la guerre[36]. Au sortir de la guerre, l'ELAS, qui contrôlait la ville, favorisa le retour des biens juifs à leurs propriétaires[37] mais quatre mois plus tard, lorsque le gouvernement d'Athènes soutenu par les Britanniques prit le pouvoir à Thessalonique, la restitution fut peu à peu gelée. Non seulement le gouvernement composé de Venizelistes devait faire face à une importante crise du logement en raison de l'afflux de réfugiés provoqué par la guerre, mais de surcroît de nombreux collaborateurs qui s'étaient enrichis durant la guerre y étaient influents, le gouvernement dans une optique de lutte anticommuniste s'étant rapproché des anciens sympathisants du régime hitlérien[37]. L'envoyé sur place de l'Agence juive dénonça le climat d'antisémitisme et préconisa l'Aliyah des Juifs[36]. Peu à peu, une aide internationale du Joint se mit en place afin de secourir les Juifs de Salonique. Certains des Juifs sauvés de la déportation par les Grecs choisirent de se convertir à l'orthodoxie. Des rescapés des camps, souvent les plus isolés, firent le même choix[36]. Il y eut aussi nombre de mariages éclair dans l'immédiate après-guerre, les survivants désirant ainsi reformer une famille qu'ils avaient perdu[36]. Un rescapé témoigne :

« Torni a un Saloniko destruido. Esperava topar a mi ermano adoptado ma de rumores entendi ke el murio de malaria en Lublin. Ya savia ke mis djenitores fueron kemados en sus primeros dias en el kampo de eksterminasion de Aushwitz. Estava solo. Los otros prizonieros ke estavan kon mi no tenian mas a dinguno. En akeyos dias me ati a una djovena ke avia konosido en Bruxelles. No mos despartimos el uno del otro. Los dos eramos reskapados de los kampos. Despues de kurto tiempo mos kazimos, dos refujiados ke no tenian nada, no avia mizmo un rabino para ke mos de la bindision. El direktor de una de las eskolas djudias sirvio de rabino i mos kazo i ansina empesi en una mueva vida. »
« Je revins dans Salonique détruite. J'espérais retrouver mon frère adoptif mais des rumeurs m'apprirent qu'il était mort de la malaria à Lublin. Je savais déjà que mes géniteurs avaient été brûlés dès leurs premiers jours au camp d'extermination d'Auschwitz. J'étais seul. Les autres prisonniers qui étaient avec moi n'avaient personne non plus. Ces jours là, je me liai à une jeune que j'avais connue à Bruxelles. Nous ne nous séparions pas l'un de l'autre. Nous étions tous deux rescapés des camps. Peu de temps après nous nous mariâmes, deux réfugiés qui n'avaient rien, il n'y avait pas même un rabbin pour nous donner la bénédiction. Le directeur de l'une des écoles juives servit de rabbin et nous maria et ainsi je commençais une nouvelle vie[36]. »

Au recensement de 1951, on ne dénombrait que 1 783 rescapés. La communauté n'était plus que l'ombre d'elle-même.

L'érection d'un monument symbolisant la déportation des Juifs tarda longtemps à venir, ce n'est qu'en 1997 que la municipalité décida de faire construire un mémorial en lointaine banlieue et non en centre-ville comme cela avait été suggéré[38]. Les administrateurs successifs de l'université Aristote ont quant à eux toujours refusé d'y ériger un quelconque monument pour rappeler la présence de l'ancien cimetière juif sous les fondations de l'université et ce malgré les demandes répétées de nombreux professeurs[38]. En 1998, le roi Juan Carlos Ier d'Espagne s'est rendu à Salonique, où il a rendu hommage aux Juifs sépharades[39]. Cette visite faisait suite à celle qu'il avait entreprise à la synagogue de Madrid en 1992 pour la commémoration de l'expulsion de 1492 à l'occasion de laquelle il avait fait la critique du décret d'expulsion.

Aujourd'hui 1 300 Juifs vivent à Thessalonique[40] ce qui fait de cette communauté la deuxième de Grèce après Athènes.

Culture

Langue

Articles détaillés : judéo-espagnol et ladino (langue).

Généralement, les Juifs qui émigraient adoptaient la langue du pays, mais ce ne fut pourtant pas le cas des Sépharades de l'Empire ottoman qui, arrivés en masse, conservèrent l'usage de leur idiome. Les Juifs de Salonique rapportèrent donc d'Espagne leur langue, le judéo-espagnol (djudezmo), c'est-à-dire ni plus ni moins que l'espagnol du XVe siècle ayant évolué de manière autonome et qu'ils utilisaient dans leurs relations courantes. Ils priaient et étudiaient en hébreu et en araméen et utilisaient comme toutes les autres communautés sépharades ce que Haïm Vidal Séphiha appelle le « judéo-espagnol calque », le ladino qui consistait en une traduction des textes hébraïques en un espagnol respectant l'ordre des mots et la syntaxe hébraïque[41]. Ces deux langues, djudezmo et ladino, s'écrivaient en caractères hébraïques ainsi qu'en caractères latins pour le judéo-espagnol. En sus de ces langues qu'ils avaient apportées d'exil, les Juifs de Salonique parlaient parfois le turc ottoman, la langue de l'Empire écrite en caractères arabes. La haskala propagée par les Juifs francs permit la large diffusion du français enseigné dans les écoles de l'Alliance israélite universelle et dans une moindre mesure de l'italien. Après la prise de Salonique par les Grecs en 1912, le grec fut imposé à l'école et donc appris par plusieurs générations de Juifs saloniciens. De nos jours, c'est cette langue qui domine parmi les quelques Juifs encore présents à Salonique.

Le djudezmo de Salonique, du fait de la venue de nombreux Juifs d'Italie dans la communauté, comportait beaucoup d'italianismes tant du point de vue lexical que syntaxique, l'influence du français du fait de la francophilie galopante des Saloniciens s'y faisait aussi sentir, au point que Séphiha parle de « judéo-fragnol »[41].

Gastronomie

Le sociologue Edgar Morin déclare que le noyau de toute culture est constitué par sa gastronomie et il précise que ceci s'applique tout particulièrement aux Juifs de Salonique, communauté dont il est issu[42].

La gastronomie des Juifs de Salonique était une variante de la gastronomie judéo-espagnole, elle-même appartenant au grand ensemble de la cuisine méditerranéenne. Elle était influencée par les règles alimentaires juives, la cacheroute interdisant notamment la consommation du porc, le mélange produits lactés-viande et les fêtes religieuses nécessitant la préparation de plats spécifiques. Mais son trait marquant était l'influence ibérique. Le poisson, abondant dans cette ville portuaire, était consommé en grandes quantités et sous toutes les formes: frit, au four (al orno), mariné ou bien cuit à l'étouffée (abafado) et était souvent accompagné de sauces très sophistiquées. Considéré comme un symbole de fertilité, le poisson était utilisé pendant les rites du mariage : au dernier jour des cérémonies nuptiales appelé dia del peche (« jour du poisson »), on faisait enjamber à la mariée un grand plat de poisson qui était ensuite consommé par les convives[42]. Les légumes accommodaient tous les plats, tout particulièrement l'oignon; l'ail était à contrario peu utilisé et de ce fait la synagogue des ashkénazes qui en étaient eux de grands consommateurs était surnommée El kal del ajo, « la synagogue de l'ail ». Le yaourt dense, largement consommé dans les Balkans et en Anatolie, était lui aussi très apprécié, ainsi que la crème de lait. En prévision du chabbat était préparé le hamin, variante judéo-espagnole du tcholent ashkénaze et de la dafina nord-africaine. Il s'agissait d'un ragoût de viande accompagné de légumes secs (blé, pois chiches, haricots blancs) que l'on laissait mijoter jusqu'au repas de samedi midi. Avant Pessah, les ménagères emplissaient des bahuts cadenassés de bonbons, figues et dattes farcies aux amandes, de massepain et du mets le plus apprécié, le chape blanche (confiture blanche) composé de sucre d'eau et de citron. Le vin était réservé aux rituels religieux mais les Sépharades, tout comme leurs voisins Grecs et Musulmans, étaient de grands consommateurs de raki. Ils affectionnaient aussi des boissons sucrées à base de sirop de pruneaux, de griotte ou d'abricots qu'ils buvaient à la fin des grands repas de fête[42].

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • (fr) Le Monde sépharade (sous la direction de Shmuel Trigano), éditions du Seuil, Paris, 2006. (ISBN 9782020904391)
  • (fr) Salonique 1850-1918, la "ville des Juifs" et le réveil des Balkans, (sous la direction de Gilles Veinstein), éditions Autrement- série Mémoires, Paris, 1992. (ISBN 9782862603568)
  • (en) Mark Mazower, Salonica city of ghosts, Vintage books, New York, 2005. (ISBN 9780375412981)

Liens externes

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Notes et références

  1. a , b , c  et d (fr) Gilles Veinstein, Salonique 1850-1918, la "ville des Juifs" et le réveil des Balkans, p.42-45.
  2. (en) A. Vacalopoulos, A History of Thessaloniki, p.9
  3. a , b  et c (fr) Bernard Lewis, Islam, Gallimard, 2005, p.563-567.
  4. (fr) Liste extraite de : Rena Molho, Salonique 1850-1918, la "ville des Juifs" et le réveil des Balkans, p.67.
  5. a  et b Moshe Amar, Le monde sépharade, tome II, le Seuil, 2006, p.284
  6. a , b  et c (fr) Jacob Barnaï, Les Juifs d'Espagne : histoire d'une diaspora, 1492-1992, Liana Levi, 1998, p.394-408.
  7. (fr) Gilles Veinstein, Salonique 1850-1918, la « ville des Juifs » et le réveil des Balkans, p.51.
  8. (fr) Haïm Bentov, Le Monde sépharade, p.720.
  9. a , b  et c (fr) Gilles Veinstein, Salonique 1850-1918, la "ville des Juifs" et le réveil des Balkans, p.52-54.
  10. a , b , c , d , e , f , g , h , i , j  et k (fr) Gilles Veinstein, Salonique 1850-1918, la "ville des Juifs" et le réveil des Balkans, p.54-58.
  11. a , b , c , d , e , f  et g (fr) Gilles Veinstein, Salonique 1850-1918, la "ville des Juifs" et le réveil des Balkans, p.58-62.
  12. a  et b (fr) Dictionnaire encyclopédique du judaïsme, Éditions du Cerf, Paris, 1993, article Sabbataï Tsevi
  13. a , b  et c (fr) François Georgeon, Salonique 1850-1918, la "ville des Juifs" et le réveil des Balkans, p.115-118.
  14. a , b , c , d , e , f , g  et h (fr) Rena Molho, Salonique 1850-1918, la "ville des Juifs" et le réveil des Balkans, p.68-78.
  15. (fr) Esther Benbassa, « Le Sionisme dans l'Empire ottoman à l'aube du XXe siècle. », in XXe Siècle., n°24, oct. 1989, p. 74.
  16. (en) Mark Mazower, Salonica city of ghosts, p.281.
  17. (fr) J. Leune, L'Éternel Ulysse., Plon, 1923, p. 77-78 in Sophie Basch, Le Mirage grec., Hatier, 1995, p.333. (ISBN 22180622698)
  18. (fr) Régis Darques, Salonique au XXe siècle, de la cité ottomane à la métropole grecque, p.150.
  19. a , b , c , d  et e (en)Aristotle A. Kallis, The Jewish Community of Salonica under Siege: The Antisemitic Violence of the Summer of 1931, Oxford University Press, 2006
  20. (en) Voir la légende de la photo ci-contre telle que publiée par le United States Holocaust Memorial Museum
  21. a , b  et c Erika Perahia Zemour, Le judaïsme perdu et retrouvé de Salonique, Pardès n°28, Paris, 2000, pp.153-154
  22. a , b , c , d  et e Rena Molho, La politique de l'Allemagne contre les juifs de Grèce : l'extermination de la communauté juive de Salonique (1941-1944), revue d'histoire de la Shoah éditée par le Centre de Documentation Juive Contemporaine, Paris, 2006; n° 185, p. 355-378
  23. Régis Darques, Salonique au XXe siècle, de la cité ottomane à la métropole grecque, p.78-79.
  24. (fr) Annie Benveniste, Le Bosphore à la Roquette : la communauté judéo-espagnole à Paris, 1914-1940, L'Harmattan, Paris, 2000, p.81.
  25. Biographie de Leon Recanati sur le site de l'université de Tel-Aviv
  26. a , b , c , d , e , f , g , h , i , j , k  et l (fr) Yitschak Kerem, Le Monde sépharade, Tome I, p.924-933
  27. a , b  et c (fr) Le contexte historique et culturel. La cohabitation entre Juifs et Grecs. - conférence par Jean Carasso
  28. a  et b (en) Document du Musée juif de Thessalonique
  29. a , b  et c (es) Michael Molho, « El cementerio judío de Salónica », Sefarad, 9:1 (1949) p.124-128
  30. Expression faisant référence à l'ouvrage de Raoul Hilberg, La destruction des Juifs d'Europe, Fayard, 1988
  31. (lad)Refujiados de Gresia i Rodes en Maroko durante la II Gerra Mundiala par Yitshak Gershon, Aki Yerushalayim, 1995, pp.42-45.
  32. a , b  et c (en) Minna Rozen, Jews and Greeks Remember Their Past: The Political Career of Tzevi Koretz (193343), Jewish Social Studies - Volume 12, Numéro 1, Fall 2005 (New Series), pp. 111-166
  33. (es) Témoignage d'un survivant salonicien de la Shoah sur le site Fundacion Memoria del holocausto
  34. (fr) Yitschak Kerem, Forgotten heroes : Greek Jewry in the holocaust, in M.Mor (éd), Crisis and Reaction : The Hero in Jewish History, Omaha, Creighton University Press, 1995, p.229-238.
  35. Primo Levi, Si c'est un homme, Julliard, 2007, pp.121-122 (chapitre : En deçà du bien et du mal)
  36. a , b , c , d , e , f , g , h , i , j  et k (lad) Retorno del Inferno de Braha Rivlin, Aki Yerushalayim, No. 49-50, 1995.
  37. a  et b (en) Mark Mazower, Salonica city of ghosts, p.422-425.
  38. a  et b (en) Mark Mazower, Salonica city of ghosts, p.437-438.
  39. (es) Article d'El Mundo du 29 mai 1998.
  40. (fr) Régis Darques, Salonique au XXe siècle, de la cité ottomane à la métropole grecque, p.63.
  41. a  et b (fr) Haïm Vidal Séphiha, Salonique 1850-1918, la "ville des Juifs" et le réveil des Balkans, p.79-95.
  42. a , b  et c (fr) Méri Badi, Salonique 1850-1918, la "ville des Juifs" et le réveil des Balkans, p.96-101.
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