- Guerre civile
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Une guerre civile est la situation qui existe lorsqu'au sein d'un État, une lutte armée oppose les forces armées régulières à des groupes armés identifiables, ou des groupes armés entre eux, dans des combats dont l'importance et l'extension dépasse la simple révolte ou l'insurrection[1].
Du point de vue du droit de la guerre, on utilise l'expression « conflit armé non international », le mot « guerre » étant réservé au conflit armé international.
Pour être considérées comme « guerre », les hostilités doivent atteindre un certain degré d’intensité et se prolonger un certain temps. Ces deux critères permettent de distinguer la guerre civile des « troubles intérieurs » qui peuvent se caractériser par des actes de violence similaires mais qui ne présentent pas les particularités d’un conflit armé (émeute, insurrection, répressions, luttes de factions entre elles ou contre le pouvoir en place, par exemple).
La localisation du conflit au sein d'un État distingue la guerre civile du conflit armé international, qui oppose les forces armées d’au moins deux États. Toutefois, il est courant que les groupes armés soient soutenus, plus ou moins ouvertement, par d'autres États (la guerre d'Espagne est un exemple célèbre).
L'origine d'une guerre civile peut être de toute nature : ethnique, religieuse, communautaire, sociale, économique, une autre guerre, politique, idéologique ou encore territoriale. Particulièrement dans ce dernier cas, une guerre civile pourra être considérée comme une guerre d'indépendance si elle a pour objectif la lutte contre une domination coloniale ou une occupation étrangère.
Sommaire
Concept moderne de la guerre civile
Comme la définition l'indique, le concept même de guerre civile participe de la notion d'État ; on conçoit dès lors que ce soit particulièrement à partir du développement moderne de l'État-nation que les guerres civiles se sont développées, même si des guerres civiles ont existé dans l'Antiquité.
Les premières guerres civiles modernes datent de la fin du XVIIIe siècle et du XIXe siècle : il s'agit surtout de guerres d'indépendance qui consacrent le principe de l'État-nation : États-Unis d'Amérique, Mexique, Grèce ou encore Cuba.
Après une pause apparente marquée par les deux conflagrations mondiales, au début du XXe siècle, et alors que les conflits internationaux semblent se raréfier, les guerres civiles se sont multipliées, particulièrement après la fin de la Seconde Guerre mondiale :
- guerres d'indépendance ou de décolonisation : Indonésie (1945-1949), Algérie (1954-1962)…
- guerres civile ou d'indépendance supportées ou fomentées par les États-Unis ou l'Union soviétique (les proxy wars de la guerre froide qui permettaient aux deux blocs d'assurer ou étendre leurs zones d'influence respectives) : Grèce (1946-1949), Indochine (1946-1954), Angola (1975-1992), Mozambique (1979-1992)...
- guerres civiles à caractère ethnique ou religieux : certains aspects des guerres de Yougoslavie, Rwanda, Première et seconde guerre de Tchétchénie…
Cette dernière catégorie de conflit est particulièrement apparue dans la fin du XXe siècle, et semble être concomitante avec l'apparition d'une nouvelle forme de guerre civile qui ne serait plus une guerre « entre voisins » typiquement populaire (quoique l'engagement populaire n'y soit pas toujours aussi volontaire qu'on voudrait le croire ou que la geste révolutionnaire le voudrait) mais des "guerres contre les civils" où ces derniers deviennent en définitive la cible du conflit[2].
Statut de la guerre civile
Jusqu'en 1949
Jusqu'au début du XXe siècle, la guerre civile est considérée comme une affaire strictement intérieure qui ressort du domaine réservé de l'État concerné, qui a de fait et de droit toute latitude pour traiter comme bon lui semble les factieux, en considérant par exemple les rebelles en armes comme de simples criminels et leur appliquer son droit pénal.
La guerre civile pouvait cependant s'internationaliser (et se voir donc appliqué le droit de la guerre) par une « déclaration de belligérance ». Une telle déclaration de belligérance pouvait être faite :
- par le gouvernement de l'État concerné. Cette procédure rarissime avait pour but, pour ledit État, de se dégager de sa responsabilité internationale pour les actes des rebelles, et n'avait lieu d'être que lorsque la rébellion était devenue trop forte. On relève cinq cas où ce type de déclaration a été fait[3].
- par le gouvernement d'un État tiers. Cette procédure impliquait l'application du droit de la guerre dans les relations des rebelles avec l'État leur ayant reconnu la qualité de belligérant, et permettait donc une neutralité de l'État-tiers ainsi que l'établissement de relations diplomatiques et commerciales[4].
En dehors de la reconnaissance de belligérance, existait la possibilité de reconnaitre les rebelles comme des « insurgés », ce qui leur assurait de ne pas être traités comme des criminels par les États tiers leur ayant reconnu cette qualité.
Après les Conventions de Genève de 1949
La guerre d'Espagne notamment avait démontré l'insuffisance des outils juridiques internationaux s'appliquant aux guerres civiles. En 1949, on s'oriente donc, avec les Conventions de Genève, vers une définition objective du concept de guerre civile et des conséquences qui s'y attachent. L'article 3 vise à imposer l'application de garanties humanitaires minimales aux conflits armés non internationaux.
Cet effort a été poursuivi par l'adoption, en 1977, du Protocole additionnel II aux Conventions de Genève, relatif aux conflits armés non internationaux. Le Protocole II a pour objectif l’application des règles principales du droit des conflits armés aux conflits non internationaux, opposant les forces armées d’un État à des groupes d’opposition armés, sans pour autant reconnaître un statut particulier à ces derniers. Il protège les personnes ne participant pas au conflit, interdit les attaques dirigées contre la population civile ou les biens indispensables à sa survie, donne des droits aux détenus en relation avec le conflit et interdit les déplacements forcés de populations[5].
Enfin, l'article 8 des statuts de la Cour pénale internationale assimile aux crimes de guerre les violations des règles essentielles de conduite des conflits non internationaux.
Exemples
- La tyrannie et la chute des Trente à Athènes entre -404 et -403
- Guerre des Mercenaires (241-238 av. J.-C.)
- La liste des Guerres civiles romaines (-88 au IIIe siècle)
- La fitna, entre Muawiya et ‘Alî, en 656-657, avec les batailles du Chameau et de Siffin
- Guerre civile anglaise (1135-1154)
- Guerre de Gempei au Japon (1180-1185)
- Croisade des Albigeois, de 1209 à 1229, à l'encontre des Cathares, en France.
- Guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons, entre l'assassinat de Louis Ier d'Orléans (1407) et le traité d'Arras (1435)
- Guerre des Deux-Roses, du XVe siècle en Angleterre
- Guerre de succession de l'empire inca, entre Atahualpa et Huascar
- Guerres de religion du XVIe siècle en France
- Guerre de Trente Ans, opposant catholiques et luthériens du Saint-Empire romain germanique entre 1618 et 1648
- Guerre civile anglaise (1642-1649)
- La Fronde, de 1648 à 1653
- Guerres de Vendée, de l'an I à IV (1793 à 1796) en France.
- Les trois guerres carlistes en Espagne, au cours du XIXe siècle
- Guerre du Sonderbund en Suisse en 1847
- Révolte des Taiping en Chine de 1851 à 1864. L'une des plus meurtrières de l'Histoire
- Guerre de Sécession, de 1861 à 1865 aux États-Unis
- Semaine sanglante à la fin de la Commune de Paris en 1871.
- Guerre civile mexicaine, de 1910 à 1930
- Guerre civile russe de 1918 à 1921.
- Guerre civile irlandaise de 1922 à 1923
- Guerre civile chinoise, de 1928 à 1937, puis de 1945 à 1949
- Guerre civile autrichienne de 1934
- Guerre civile espagnole, de 1936 à 1939
- Guerre civile grecque de 1946 à 1949
- Guerre civile de 1947-1948 en Palestine mandataire entre le 30 novembre 1947 et le 14 mai 1948
- Guerre civile de 1954-1962 en Algérie colonisée entre le 1er novembre 1954 et le 18 mars 1962
- Guerre civile congolaise de 1960 à 1965 qui mena à la prise du pouvoir par Mobutu Sese Seko
- Guerre civile du Guatemala de 1960 à 1996 après la chute du président Jacobo Arbenz Guzmán en 1954
- Guerre du Liban, de 1975 à 1991
- Guerres civiles au Rwanda de 1959 à 1996
- Guerre civile algérienne, de 1991 à 1997
- Guerre civile du Tadjikistan, de 1992 à 1997
- Guerre civile de Sierra Leone, de 1991 à 2002
- Dislocation de la Yougoslavie de 1991 à 2002
- Guerre civile en Afghanistan sous le gouvernement des moudjahidins et au temps des Taliban, de 1992 à 2001
- Guerre civile au Yémen en 1994
- Guerre civile congolaise (Congo-Kinshasa) de 1996 à 1997 qui vit le remplacement de Mobutu par Laurent-Désiré Kabila
- Guerre civile congolaise (Congo-Brazzaville) de 1993 à 1999
- Guerre civile congolaise (Congo-Kinshasa) de 1998 à 2002, impliquant neuf pays.
- Guerre civile de Côte d'Ivoire (2002-2005)
- Guerre civile du Sri Lanka (1983-2009)
- Guerre civile de Libye du 15 Février 2011 au 20 Octobre 2011.
Articles connexes
- Guerres de religion
- Groupes paramilitaires insurgés
- Guerre civile (roman)
- Civil War de Marvel Comics (fiction)
- Guerre d'indépendance croate (Yougoslavie, 1990-1995)
Notes et références
- extrait en ligne Jules Basdevant (dir.), Dictionnaire de la terminologie du droit international, éd. Sirey, 1960, p. 308, cité par Olivier Revah, Quelles chances de survie pour l'État post-conflit ?, éd. L'Harmattan, 2010, p. 51,
- 515-538 Éric Lair, « Colombie : une guerre privée de sens », Bulletin de l'Institut français des études andines, 2000, 29 (3):
- guerre d'indépendance des États-Unis par l'Angleterre, pendant les guerres d'indépendance en Amérique du Sud (Mexique, Colombie…) (1810-1824) par l'Espagne, pendant la guerre de Sécession américaine, pour les États confédérés (1861-1865) par les États-Unis, pendant la guerre « des Mille Jours » en Colombie (1899-1902) par le pouvoir légal Notamment lors de la
- Outre un aspect « reconnaissance » de la rébellion. La reconnaissance de belligérance supposait essentiellement que les rebelles contrôlent un territoire et y exercent une autorité d'apparence souveraine, et se soumettent aux lois de la guerre
- "Les Protocoles additionnels aux Conventions de Genève"¨
Sources
- Robert Kolb, « Le droit international public et le concept de guerre civile depuis 1945 », Relations internationales, n°105, printemps 2001, pp. 9-29
- FAQ du Droit international humanitaire sur le site du CICR consacré aux Conventions de Genève
- Marie-Danielle DEMÉLAS-BOHY, « La notion de guerre civile en question », Clio, numéro 5/1997, Guerres civiles, Consulté le 26 juin 2007.
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