Histoire De La Colombie

Histoire De La Colombie

Histoire de la Colombie

Sommaire

Civilisations pré-colombiennes

On trouve les premières traces d'établissements sédentaires sur le territoire colombien datant du Ve siècle av. J.-C.. Ces reliques, d'une civilisation quasiment inconnue, ont été découvertes à San Augustín dans les Andes colombiennes. Avant l'arrivée de Christophe Colomb en Amérique, l'actuelle Colombie était occupée principalement par des chasseurs et des agriculteurs nomades. Les Chibchas, qui vivaient dans la région de Bogotá, dominaient les différents groupes autochtones.

La colonisation espagnole

Christophe Colomb découvrit les côtes colombiennes en 1502, dans son sillage arrivèrent des aventuriers espagnols (conquistadores) qui avaient vendu leur bien en Espagne afin de financer leur expédition. Ils étaient à la recherche d´or. Rapidement les espagnols fondèrent des villes : Darien (1510), Santa Marta (1525), Santa Fe de Bogota (1538).

Les Amérindiens furent réduit en esclavage pour extraire de l´or et des émeraudes échangés ensuite contre des produits manufacturés et des céréales venus d´Espagne. Les tribus indiennes qui résistèrent militairement furent massacrées. Les Amérindiens furent diminués par les maladies importées d´Europe (rougeole) et l´esclavage. Les colons espagnols eurent recours à la traite négrière dès 1511. Les Noirs, échangés en Afrique contre fusils, poudre à canon, verroterie ou habits furent rebaptisés et christianisés. Leur taux de fécondité sera le plus bas à cause des conditions de vie, le nombre d´esclave n´augmenta que par l´importation de nouveaux esclaves. Les maîtres surveillent leurs mines par le moyen d´armées privées. Le viol systématique des femmes indiennes ou africaines donne lieu à un intense métissage. Les métis de Blancs et d´Amérindiens constituent la majorité de la population.

Bogotá devint la capitale de la vice-royauté de Nouvelle-Grenade, qui comprenait aussi les actuels Venezuela, Équateur et Panama. Bogotá, tout comme Lima et Mexico, devint l'une de principales villes sur le continent américain pour l'administration espagnole.

Le 10 juillet 1810, les habitants de Bogotá instaurèrent la première assemblée représentative à défier l'autorité espagnole. L'indépendance ne fut proclamée qu'en 1813 et le 17 décembre 1819, la République de la Grande Colombie fut créée.

La République

La République de la Grande Colombie regroupait les territoires de la vice-royauté. Simón Bolívar fut élu président et Francisco de Paula Santander, vice-président. Chacun de ces deux hommes est à l'origine d'un parti politique. Ainsi les partisans de Bolívar formeront le parti conservateur tandis que ceux de Santander constitueront le libéraux. Ces deux partis dominent l'histoire de la Colombie. Les conservateurs désiraient un État très centralisé, et l'appui de l'Église catholique tandis que les libéraux voulaient un État décentralisé et la prééminence de l'État dans le domaine de l'enseignement et des affaires civiles, et désiraient aussi un suffrage plus élargi.

Les deux partis alternèrent au pouvoir tout au long des XIXe et XXe siècles. Ils occupèrent le pouvoir durant à peu près la même durée. Contrairement, à la plupart des pays d'Amérique latine, en Colombie, il y eut relativement peu de dictatures militaires et les élections étaient organisées régulièrement et étaient libres. Les militaires s'emparèrent du pouvoir en 1830 - lorsque l'Équateur et le Venezuela quittèrent la République -, en 1853 et 1854. La dictature militaire dura moins d'un an en 1830 et 1854, dans le dernier cas, elle se maintint durant 4 ans entre 1853 et 1857. L´esclavage fut aboli en 1851.

Malgré le faible nombre de coups militaires, par rapport aux autres pays d'Amérique latine, la Colombie reste un pays dont l'histoire est jalonnée d'épisodes violents. En effet, de nombreuses guerres civiles opposèrent Libéraux et Conservateurs, dont deux se révélèrent particulièrement violentes. La première, surnommée « Guerre des Mille Jours » (1899-1902), coûta la vie à environ 100 000 personnes, la seconde, connue sous le nom de « La Violencia » (fin des années 1940 et années 50) aurait causé la mort de 300 000 personnes.

Le 1er janvier 1880, le Français Ferdinand de Lesseps, commence les travaux du canal de Panama, encore partie intégrante de la Colombie.

Panama est séparé de la Colombie en 1903, cédant à perpétuité cette région aux États-Unis, suite à une rébellion par le groupe indépendantiste Amador Guerrero appuyé par des navires de guerres des États-Unis.

En 1953, le général Gustavo Rojas Pinilla organisa un coup d'État. Il bénéficia au début d'un important soutien populaire, en raison de son succès à apaiser dans une certaine mesure « La Violencia ». En 1957, les militaires soutenus par les deux partis le renversèrent car il n'avait pas restauré la démocratie. Un gouvernement provisoire fut mis en place

Le front national

La Violencia

Article détaillé : La Violencia.

L'apparition des guérillas modernes

C’est dans ce contexte particulièrement hostile que se sont développées les guérillas marxistes qui furent les seules à ne pas déposer les armes après les élections de 1958 et qui comptaient à cette époque 912 membres. La Colombie, fidèle alliée des États-Unis d’Amérique, s’engage dans la guerre de Corée et combat autant que possible l’influence soviétique, chinoise puis cubaine qui sévit sur son territoire. La victoire des communistes en Chine en 1949, la montée en puissance sur la scène internationale de l’Union Soviétique ainsi que la victoire castriste à Cuba en 1959 favorisent la transformation d’un certain nombre de guérillas libérales en mouvements ouvertement communistes qui n’ont plus comme objectif de seulement combattre les conservateurs mais qui sont porteurs d’une idéologie radicale de changement de la société et de la politique colombienne. La première phase d’insurrection des années cinquante demeure limitée et ne concerne que des éléments épars, isolés et mal armés qui ne sévissent que dans les zones les plus reculées de la Cordillère centrale. Les années soixante au contraire voient le rapide développement de guérillas d’origine communiste, comme conséquence de la révolution cubaine et de la conversion de Fidel Castro au marxisme-léninisme qui décide dès lors de promouvoir dans le sous-continent latino-américain sa politique d’extension de la révolution mondiale.

En 1957 est créé le mouvement agraire de Marquetalia (Huila) qui se transforme progressivement en une république indépendante. Les années soixante voient se multiplier ce genre de petites « enclaves de colonisation paysanne, contrôlée par la guérilla et orientées par le parti communiste », perdues dans les montagnes au sud du Tolima peuplées et défendues par des paysans armés qui refusent toute ingérence d’un État qu’ils jugent prédateur et à la botte de l’oligarchie capitaliste. L’État colombien met alors tout en œuvre pour combattre la subversion et s’attaque violemment aux guérillas communistes. Les forces armées détruisent d’ailleurs en 1964 l’éphémère République de Marquetalia sans pour autant parvenir à éliminer les rebelles qui la défendaient. Les combats de Marquetalia, qui durent plusieurs mois, donnent une visibilité exceptionnelle à un groupe guérillero pourtant insignifiant : les FARC, emmenée par Manuel Marulanda Velez, alias Tirofijo (tire précis), sont nées. Alors que les FARC se réclament d’une ligne soviétique (et se veulent d’ailleurs le bras armé du PCC), l’Armée de libération nationale (Ejercito de Liberación Nacional, ou ELN) suit une ligne castriste. Fondé en 1964 dans le département de Santander par Fabio Vasquez Castano, l’ELN est également une guérilla paysanne profondément marquée par la théologie de la libération. Le père Camilo Torres, grand orateur et homme d’Église radical, fut la figure majeure et charismatique de l’ELN à ses débuts et orienta largement le mouvement dans ses orientations anti-oligarchiques et de dénonciation des inégalités sociales. Il ne fut cependant pas d’une aide majeure au point de vue militaire puisqu’il mourut dans son tout premier combat en février 1966, à peine six mois après son ralliement.

L'EPL (Ejército Popular de Liberacion, Armée populaire de libération) est quant à lui issu d'une rupture idéologique au sein du parti communiste en 1963 (suite à la rupture de l'axe Moscou-Pékin) et se constitue comme une guérilla foquiste (issue du modèle cubain de guérilla qui cherche à créer des "focos", des foyers d'insurrection dans les zones les plus reculées du pays où l'État est le plus faible) d'influence maoïste. L'EPL débute ses opérations militaires en 1967 et s'implante dans le nord du département d'Antioquia, dans le Cordoba et le Cauca. En dépit de la volonté de l'EPL de trouver en la Chine de Mao un allié puissant et généreux, seule l'Albanie d'Enver Hoxha cherchera à soutenir effectivement une guérilla trop souvent victime de luttes intestines et de rivalités avec les FARC pour pouvoir prétendre à cette époque à devenir autre chose qu'un mouvement ultra minoritaire.

Les années soixante-dix

Quoi qu’il en soit, les guérillas paysannes n’ont jamais et à aucun moment eu la possibilité de menacer le pouvoir en place et de se trouver en position de force. Au contraire, les années soixante-dix sont une époque de très net recul de leur influence et de leurs capacités offensives. L’armée colombienne se trouve parfaitement capable de réduire au maximum le pouvoir de nuisance des guérillas et de les cantonner à des zones totalement marginales du territoire. Du propre aveu des FARC, la fin des années soixante et le début des années soixante-dix est une époque de grave crise où l’organisation perd 70% de ses effectifs, suite aux combats avec l’armée régulière. Les estimations du nombre de combattants au milieu des années soixante-dix sont assez révélatrices des difficultés de ces guérillas rurales : Une trentaine de soldats pour l'EPL, une centaine pour l'ELN et 400 pour les FARC. D’autre part, les guérillas se trouvent rapidement engluées dans de nombreuses querelles internes qui paralysent leur action et font exploser le peu d’organisation qu’elles avaient développée depuis le début des années cinquante.

Si les années soixante-dix ne sont pas une époque faste pour les FARC, l’ELN ou l’EPL, elles ont vu la naissance de l’un des mouvements guérilleros les plus puissants d’Amérique latine : Le M-19. Dans un contexte international qui voit le Viêt Nam parvenir après trois décennies de guérilla à vaincre l'impérialisme occidental, le Moyen-Orient et l'Europe subir la nouveauté que sont les attentats terroristes, et le Cône sud latino-américain en proie aux dictatures conservatrices et anti-communistes. La guérilla urbaine qui cherche à frapper, avec peu d'hommes et des moyens limités, des lieux ou personnes sensibles obtient une visibilité beaucoup plus importante que les mouvements ruraux souvent jugés comme rétrogrades. Le M-19 colombien, à l'image du MIR chilien ou des Montoneros argentins, est représentatif de ce changement de tactique.

En 1973, le Mouvement du 19 avril est créé suite aux élections supposément frauduleuses du 19 avril 1970 qui voient la défaite du général Rojas Pinilla. Ses partisans du parti de l'Alliance nationale populaire (ANAPO, Alianza NAcional POpular), frustrés par la défaite, alliés à des cercles universitaires marxistes, à des nationalistes de gauche et à un certain nombre d’intellectuels urbains fondent le M-19 sous la houlette de Jaime Bateman. C'est principalement à la fin des années soixante-dix et au début des années quatre-vingt que le M-19 fait parler de lui par une série de coups d'éclat qui le rend populaire et légitime dans sa contestation du pouvoir d'autant plus facilement que le président libéral de l'époque, Julio César Turbay Ayala (1978-1982) se fait le chantre de la doctrine de la Sécurité Nationale et bafoue régulièrement les droits de l'homme dans sa lutte anti-subversive. Que cela soit par le vol de 7000 armes dans un dépôt de l'armée en plein Bogota en 1978, par la prise d'otage d'une cinquantaine de diplomates (dont les ambassadeurs américain et israélien en Colombie) au sein de l'ambassade de République dominicaine pendant 4 mois ou avec la tragique prise du Palais de Justice de Bogota où périrent 95 personnes (dont 9 juges de la cour suprême), le M-19 devient l'acteur rebelle numéro un de Colombie et modifie profondément les méthodes d'insurrection (actions urbaines, terrorisme, organisation plus efficace, financement régulier par les enlèvements, modernisation de l'équipement militaire, union entre groupes rebelles…). C'est au début des années quatre-vingt que les guérillas rurales reprennent de la vigueur grâce notamment à de meilleures sources de financement qui proviennent en grande partie de la production de feuilles de coca, du contrôle de zones de production d'hydrocarbures et d'enlèvements de chefs d'entreprise ou de personnalités politiques. Alors que ces guérillas étaient mal en point durant toute la décennie passée, l'apparition du narcotrafic change totalement la donne.

Les années 1980-1990 et l'apparition des narcos

Article détaillé : Conflit armé colombien.

Carrefour géographique et seul pays d'Amérique du Sud à posséder une double façade maritime, la Colombie dispose en outre de capacités entrepreneuriales fortes, d'une diaspora en réseau et des moyens techniques nécessaires à l'élaboration et à la synthèse de drogues. La diversité de son relief ainsi que l'existence de zones reculées favorise la culture potentielle de marijuana, de coca ou de pavot. De plus, la Violencia a contribué au développement de contrebandes diverses (alcool, tabac, émeraudes, précurseurs chimiques, produits manufacturés, stupéfiants…) desquelles vivent plusieurs millions de Colombiens.

Entre 1974 et 1982, la Colombie est l'un des tous premiers producteurs de marijuana au monde et profite des campagnes d'éradication réussies au Mexique et en Jamaïque pour devenir le fournisseur numéro un des États-Unis d'Amérique [citation nécessaire]. La cocaïne est alors essentiellement produite au Pérou et en Bolivie et ne fait qu'être transformée et convoyée en Colombie pour ensuite prendre la route des Caraïbes ou du Mexique [citation nécessaire]. En dépit de cela, les recettes de cette contrebande sont évaluées à presque 2 000 millions de dollars [citation nécessaire] (soit l'équivalent des gains issus de la production de café [citation nécessaire]).

C'est à cette époque que le cartel de Medellin de Pablo Escobar fait irruption sur la scène politique, en assassinant en 1984 le Ministre de la Justice Rodrigo Lara Bonilla. Les attentats se multiplient alors à Bogota, Medellin et Cali, les narco-trafiquants visant à faire plier le gouvernement, par la corruption, l'intimidation et le terrorisme, pour l'empêcher d'obtempérer aux requêtes d'extradition effectuées par les Etats-Unis. Dans le même temps, les narco-terroristes essaient par ailleurs d'obtenir institutionnellement un statut politique afin de pouvoir négocier avec l'Etat. En 1991, Pablo Escobar est finalement arrêté et, en fuite, abattu deux ans plus tard. Cette mort met un terme à une décennie de conflit ouvert.

Le cartel de Cali reprend alors le contrôle du trafic de drogues. Le président Ernesto Samper se voit en 1994 accusé d'avoir reçu six millions de dollars de la part du cartel de Cali pour financer sa campagne, ce qui provoque une crise politique interne et un grave incident diplomatique avec les États-Unis qui parviennent à faire voter la loi autorisant l'extradition de nationaux colombiens en 1997.

Jusqu'en 1994, la Colombie produisait relativement peu de coca et servait surtout de laboratoire de transformation de la pâte base en cocaïne. La politique états-unienne d'éradication de la coca au Pérou et en Bolivie ayant rencontré un certain succès et la production de marijuana en Colombie ayant chuté, les zones de production de coca se sont déplacées vers le nord du sous continent, d'autant plus facilement qu'un champignon ravage la production péruvienne de coca au début des années quatre-vingt dix et qu'est développée une nouvelle variété de coca poussant dans les basses terres amazoniennes. Dès 1997, la Colombie devient le premier producteur mondial de coca, de pâte base et de cocaïne [citation nécessaire]. D'autre part, la Colombie s'est lancée dans les années 1990 dans la culture du pavot et est aujourd'hui le principal fournisseur d'héroïne des États-Unis [citation nécessaire].

Le réveil des guérillas rurales

La transformation de la Colombie en plaque tournante du trafic international de stupéfiants a donné aux acteurs armés un moyen de financement puissant, régulier et quasi illimité. À cela s'ajoute la patiente et longue construction de zones de forte implantation des guérillas, notamment dans les zones du piémont amazonien (départements du Caqueta, Putumayo, Meta et Guaviare) sans que l'État n'ait réellement cherché à désenclaver (par une politique d'investissement public, de construction de routes ou des programmes sociaux) ces régions isolées et mal contrôlées. C'est d'ailleurs là que les FARC (acteur principal dans cette zone) ont concentré l'essentiel de leur production de drogues et passent à une tactique offensive face à l'armée régulière.

Le mandat de Belisario Betancur (1982-1986) et de Virgilio Barco (1986-1990)

Après le mandat de Turbay Ayala qui avait répondu au M-19 par la militarisation du pays, le président conservateur Belisario Betancur (1982-1986) entame une politique de dialogue avec les guérillas, faisant voter une loi d'amnistie, légalisant un organe politique des FARC, les FARC-UP (Union Populaire), et faisant passer plusieurs réformes sociales. Betancur négocie principalement avec les FARC et le M-19, multipliant les trêves et les cessez-le-feu. Il semble alors en phase de réussir à changer totalement la donne, mais les accords de paix demeurent trop vagues pour empêcher les acteurs armés de reprendre les hostilités.

La faillite des négociations est totale en 1985 quand le M-19 attaque le Palais de Justice de Bogota. Au final, ces trois années de va-et-vient auront aussi permis aux guérillas de s'implanter plus fortement, tandis que sont créés les milices d'autodéfense (notamment le MAS, Muerte a los Secuestradores) et les groupes paramilitaires d'extrême-droite, liés aux services de sécurité de l'Etat (les escadrons de la mort). Lors de cette période de « guerre sale », 165 membres [citation nécessaire] des FARC-UP sont assassinés entre février 1985, date de sa création, et octobre 1985. Cette expérience politique traumatisera les FARC, rétifs dès lors à toute négociation.

L'élection du libéral Virgilio Barco (1986-1990) ne change que peu de choses au conflit qui s'aggrave du fait de la présence des narco-terroristes. Cependant, le M-19, convaincu de l'impasse de l'option militaire dans laquelle il s'englue depuis le massacre du Palais de Justice, entame des pourparlers de paix et finit par se démobiliser massivement le 9 mars 1990 pour entrer en politique sous le nom AD/M-19 (Alliance Démocratique). C'est durant le mandat de Barco qu'est lancée l'idée d'élire une Assemblée constituante comme solution au problème des guérillas. En effet, nombreux sont ceux qui imputent au Front National et à la vieille Constitution de 1886 une part de responsabilité dans l'apparition de mouvements rebelles, en attribuant leur formation à une réaction au bipartisme institutionnalisé, au manque d'ouverture et d'espaces de dialogue du système politique, au clientélisme et à la corruption généralisée.

La Constitution de 1991

Article détaillé : Constitution de la Colombie.

Il revient au successeur de Barco, le libéral Cesar Gaviria Trujillo (1990-1994), de mener à bien ce nouveau projet de Constitution. Le 4 juillet 1991 est adoptée une nouvelle Constitution particulièrement progressiste et moderne : la Colombie est déclarée « État social de droit, organisée en République unitaire, décentralisée […], démocratique, participative et pluraliste, fondée sur le respect de la dignité humaine ». (art1) Elle supprime la notion d'état de siège, remplacé par celui d'état de commotion interne, beaucoup plus restrictif et protecteur des droits de l'homme. En outre, elle va vers une décentralisation de l'Etat, les départements acquérant une relative autonomie, l'État central leur déléguant les responsabilités administratives et entérinant les élections directes des maires et gouverneurs de départements. D'autre part, elle reconnaît les droits linguistiques, culturels et politiques des minorités amérindiennes et afro-colombiennes. Enfin, elle ouvre le jeu politique à tous les partis.

Ce projet est adopté massivement par plébiscite et permet la démobilisation et l'entrée politique de l'EPL et d'autres mouvements guérilleros minoritaires (Quintin Lame, PRT…). Le parti créé suite à l'entrée en politique du M-19 remporte 26% des suffrages lors de l'élection pour la Constituante (et a donc largement contribué à sa rédaction) et son principal représentant, Antonio Navarro, arrive à la troisième place de l'élection présidentielle de mai 1990 (qui voient la victoire de Gaviria) devant le candidat conservateur.

Les efforts de paix du président Gaviria débouchent sur une série de négociations à Caracas (juin 1991) puis à Tlaxcala, Mexique (mars 1992) avec les FARC et l'ELN mais les guérillas demeurent dans une posture belliqueuse et multiplient les attaques dans le courant de l'année 1992. La situation devient tellement chaotique que Gaviria déclare l'état de commotion interne durant près de neuf mois (90 jours renouvelables deux fois) et renforce les pouvoirs des militaires, tout en re-centralisant le pouvoir.

Le mandat de Samper

Le mandat du nouveau président libéral Ernesto Samper qui débute en 1994 ne modifie pas radicalement le conflit. En effet, comme c'est le cas depuis Betancur, Samper commence par vouloir négocier avec les guérillas dans le but "d'humaniser la guerre" et lance un programme social, voyant en la pauvreté et en le manque d'opportunités sociales et économiques une des racines du conflit. Mais le cycle de violence ne peut être stoppé et la méfiance réciproque entre gouvernement et guérillas ne s'estompe pas.

L'année 1995 est tragique (près de 20 000 morts en 8 mois, 700 enlèvements... [citation nécessaire]) et Samper se radicalise en déclarant l'état de commotion interne et en reprenant la voie militariste. Les FARC sont alors à leur apogée, dopées par les quelques cent cinquante mille hectares de coca [citation nécessaire] produits en Colombie, et passent clairement à une stratégie offensive dans le sud est du pays. Entre 1996 et 1998, elles attaquent toutes les bases militaires des départements amazoniens avec un succès certain. Le 30 août 1996, la base de Las Delicias est prise à l'artillerie lourde par 400 guérilleros; le 2 mars 1998, à El Bilar, les FARC écrasent une unité anti-guérilla de l'armée et tuent 62 soldats (et font prisonnier 43 militaires) : la déroute de l'armée colombienne est lourde et les FARC ne se sont jamais montrées aussi puissantes.

D'un autre côté, c'est sous le gouvernement de Samper que les milices paysannes CONVIVIR, créés par un décret de son prédécesseur et travaillant en étroite coopération avec les forces de l'armée, prennent leur essor. Une décision de la Cour constitutionnelle de novembre 1997 interdit l'usage par les CONVIVIR d'armes de type militaire et restreint leurs attributions, notamment en ce qui concerne le renseignement. Début 1998, des douzaines de groupes CONVIVIR ont eu leurs licences révoquées, parce qu'ils avaient conservé leurs armes et qu'ils conservaient pour eux des informations. A la fin 1997, 237 armes avaient été rendues aux autorités. D'autres membres, qui refusaient d'obtempérer, ont rejoints d'autres organisations paramilitaires [1]

Samper est éclaboussé par un scandale ayant trait au financement de sa campagne électorale: durant le procès 3 000, il est accusé d'avoir financé sa campagne grâce aux fonds venus des AUC, ce qui contraint à la démission plusieurs de ses ministres, tandis que lui-même, jugé par l'Assemblée, est dédouané de toute responsabilité.

Des concessions extrêmes à la guerre à outrance

Le conservateur Andres Pastrana Arango est élu de justesse en juin 1998. Ayant rencontré personnellement le leader des FARC, Tirofijo, avant son investiture, il cherche dès le début de son mandat à se concilier les faveurs des FARC [citation nécessaire].

Pastrana concède le 9 octobre 1998 aux FARC une zone démilitarisée dans la région du Caguan (départements de Meta/Caqueta) de 42 000 km². La politique de négociation dure jusqu'en 2001 à un rythme imposé par les FARC et débouche sur la libération de 300 otages de la guérilla. D'un autre côté, le mandat de Pastrana correspond également à une grave période de récession économique et au développement considérable du phénomène paramilitaire. Une étude de la Commission colombienne des juristes montre que sur 31 656 homicides et disparitions forcées commises entre 1996 et 2006, 46% d'entre elles avaient été commises par des escadrons de la mort d'extrême-droite et 14% par les FARC [2]. Les paramilitaires sont aussi responsables, pendant la même période, de la plupart des 3 millions de réfugiés internes [2].

Alors que Samper était l'ennemi juré de Washington (l'affaire des 6 millions de dollars de sa campagne l'avait rendu suspect aux yeux de l'administration Clinton), Pastrana renoue diplomatiquement avec Washington et lance en août 2000 le plan Colombie avec le soutien actif du président Clinton. Il s'agit d'une aide de 1,3 milliard de dollars destinés à la lutte anti-drogue, au renforcement des capacités militaires de l'armée colombienne et à des réformes sociales, dans la droite ligne de la doctrine de sécurité nationale et de la guerre contre-insurrectionnelle qui combine réformes politiques et actions militaires.

La fin du mandat de Pastrana est marquée par l'enlèvement en février 2002 de la candidate écologiste Ingrid Betancourt.

Le premier mandat Uribe (2002-2006)

Article détaillé : Gouvernement d'Álvaro Uribe.

C'est un candidat indépendant, issu du Parti libéral, qui gagne très largement au premier tour (avec 53% des voix) les élections de 2002. Alvaro Uribe Velez, ancien gouverneur du département d'Antioquia (Medellin), ne rentre pas dans le schéma classique de la vie politique colombienne qui consistait à entamer le mandat présidentiel par une période de négociation de paix. Au contraire, convaincu qu'il est d'abord nécessaire d'écraser militairement les guérillas pour ensuite négocier, Uribe se lance dans une politique offensive (« de sécurité démocratique ») dans le but de réduire l'emprise territoriale des guérillas.

Le contrôle du pays et des voies de communication est une priorité qui est de fait obtenu rapidement par un accroissement des effectifs militaires et policiers et par une surveillance accrue dans les provinces. Les méthodes autoritaires et guerrières attribuées au président (militarisation de paysans, encouragement à la délation, violations des droits de l'homme, implication massive de civils dans le conflit…), ses liens supposés avec le cartel de Medellin et Pablo Escobar [3], son appétit de croisade contre la « subversion narco-terroristo-communiste » qui rappellerait celle menée par les paramilitaires avec qui il entretiendrait des relations douteuses, sont autant d'éléments dénoncés par certaines ONG de droits de l'homme et la gauche colombiennes.

Uribe a fait passer la loi de « justice et paix » de juillet 2005, amnistiant les paramilitaires des Autodéfenses unies de Colombie (AUC), qui sont responsables à 70 % des fosses communes où les corps correspondent à autant de disparus en attente d’identification [4]. Cette amnistie a permis la démobilisation de plusieurs milliers de paramilitaires.

Selon la Commission colombienne des juristes ([1]), pendant le premier mandat du président Uribe (2002-2006), onze mille trois cents civils auraient été exécutés pour motif politique dont 14 % par des agents de l’État, 60 % par des paramilitaires « tolérés par l’État » [4]. Elle souligne que, pendant cette période, « la responsabilité directe de l'État dans les exécutions extrajudiciaires ou arbitraires aurait augmenté de 60%. Quand les auteurs d'assassinats ou de disparitions sont démasqués, la responsabilité incomberait à l'État dans 74,5% des cas. » [5]

Il n'en reste pas moins vrai que Uribe est régulièrement crédité de plus de 70% d'opinions favorables [citation nécessaire], grâce à la forte amélioration tant de la sécurité que de la situation économique (qualifiée parfois à l'extérieur de la Colombie de politique populiste). Uribe s'est fait le chantre de la lutte contre la production de drogue (dans le cadre du plan Colombie puis du Plan Patriote), devenant de ce fait le soutien numéro un en Amérique du Sud de l'administration Bush et l'ennemi personnel de Hugo Chavez, le président du Venezuela.

Par l'acte législatif 02 de 2004, l'article 197 de la Constitution de 1991 a été modifié pour permettre la réélection du président sortant. C'est par une victoire écrasante (62% des voix au premier tour) que le 28 mai 2006 le président Uribe a été réélu pour quatre ans.

Le second mandat Uribe (2006-)

Le second mandat Uribe a été marqué par une intensification de la lutte contre les FARC, avec notamment le bombardement, en mars 2008, d'un camp militaire en Equateur, aboutissant à la mort de Raúl Reyes, n°2 de l'organisation. En juillet 2008, quinze otages, dont la franco-colombienne Íngrid Betancourt, ont été libérés lors d'une opération spéciale de l'armée colombienne.

Par ailleurs, la démobilisation des paramilitaires a largement été entachée par le « scandale de la parapolitique », aboutissant en 2006 à la détention de sénateurs proches d'Uribe (Alvaro García, Jairo Merlano et Erick Morris) puis de celle d'un des ex-chef des services de renseignement, le Département administratif de sécurité (DAS), Jorge Noguera [4]. 63 congressistes ont été identifiés par la Cour suprême de justice dans le scandale de la parapolitique, dont 32 étaient en détention en avril 2008 [6]. En avril 2008, l'ex-sénateur Mario Uribe Escobar, cousin germain du président Uribe qui a du démissionner en 2007 de son poste de sénateur en raison de ses liens avec les paramilitaires [7], est détenu à la prison de Bogota [6]. Alvaro Uribe a révélé le 23 avril 2008 à la radio privée Caracol qu'une enquête avait été ouverte contre lui dans le cadre de l’investigation sur le massacre d’Aro de 1997 au cours duquel 15 paysans accusés d’aider les guérilleros des FARC avaient été tués par les paramilitaires avec l’aide de l’armée colombienne [6].

Suite à une grève de plus d'un mois des fonctionnaires de justice, Uribe décrète en octobre 2008 l'état d'urgence [8]. En novembre 2008, des milliers de Colombiens, jusqu'à deux millions selon certains médias, ont été victimes d'une fraude de Ponzi. Le gouvernement a décrété l'état d'urgence économique et social[9]

Notes et références

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • François Buy, Histoire de la Colombie, Paris : Éditions municipales, 1976
  • Jean-Pierre Minaudier, Histoire de la Colombie de la conquête à nos jours, coll. : Horizons Amériques latines, L'Harmattan, Paris, 1997, (ISBN 2-7384-4334-6)
  • Collectif, Manual de historia de Colombia, Procultura S. A. : Tercer Mundo ed., cop. 1992, (ISBN 958-601-362-6)
  • Collectif, Historia de Colombia: Todo Lo Que Hay Que Saber, Taurus, Bogota, 2006
  • (en) Doug Stokes, America's other war: terrorizing Colombia, Zed Books, 2005. Préface de Noam Chomsky.

Liens externes

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