Création divine

Création divine

Créationnisme

Le créationnisme est une doctrine apparue en opposition à la théorie de l'évolution. Le débat entre les deux positions (créationnisme et évolution des espèces) est souvent polémique et relève d'enjeux politiques importants : enseignement, liberté d'opinion et de croyances, etc.

Le créationnisme est donc une doctrine fondée sur la croyance selon laquelle la Terre, et par extension l'Univers, a été créée par Dieu, selon des modalités conformes à une lecture littérale de la Bible.

La lecture des textes bibliques est alors de type fondamentaliste, courant chrétien né à la fin du XIXe siècle en Amérique du Nord dans les milieux protestants. La lecture littérale est refusée par la majorité des Églises chrétiennes actuelles, qui rejettent d'ailleurs le créationnisme pour ces raisons, privilégiant une lecture herméneutique, c'est-à-dire interprétative. La plupart des traditions religieuses monothéistes (judaïsme, christianisme et islam), postulent tout de même, de manières diverses, la création du monde par Dieu. Cette croyance est compatible avec les théories de l'évolution, car située dans un autre registre que la démarche scientifique au sens strict[1].

Sommaire

Les deux livres

Livre de la Genèse

Article détaillé : Résumé du Livre de la Genèse.

Le Livre de la Genèse (du grec Γένεσις, « naissance », « commencement », « source », « origine », « cause ») est le premier livre de la Torah (Pentateuque), donc du Tanakh (la bible hébraïque) et de la bible chrétienne. La tradition juive considère qu'il a été écrit par Moïse.

Le livre de la Genèse explique l'origine de l'homme et du peuple hébreu jusqu'à son arrivée en Égypte. Il contient les présupposés et bases historiques aux idées et institutions nationales et religieuses d'Israël, et sert de préface à son histoire, ses lois et coutumes. Le récit originel décrit la création du monde en six jours par Dieu.

Le créationnisme actuel se basant sur une lecture littérale de la bible est d'origine récente, et l'interprétation symbolique est plus ancienne. Lucien Febvre cite ainsi Origène[2] :

« Quel est l'homme de sens qui croira jamais que, le premier, le second et le troisième jours, le soir et le matin purent avoir lieu sans soleil, sans lune et sans étoiles, et que le jour, qui est nommé le premier, ait pu se produire lorsque le ciel n'était pas encore ? Qui serait assez stupide pour s'imaginer que Dieu a planté, à la manière d'un agriculteur, un jardin à Eden, dans un certain pays de l'Orient, et qu'il a placé là un arbre de vie tombant sous le sens, tel que celui qui en goûterait avec les dents du corps recevrait la vie ?
À quoi bon en dire davantage lorsque chacun, s'il n'est dénué de sens, peut facilement relever une multitude de choses semblables que l'Écriture raconte comme si elles étaient réellement arrivées et qui, à les prendre textuellement, n'ont guère eu de réalité.
 »

— Origène, cité par Lucien Febvre, Le Problème de l'incroyance au XVIe siècle

L'interprétation symbolique, fréquente chez saint Augustin, était admise au Moyen Âge et au début de la Renaissance, ainsi que dans l'exégèse juive. La contre-réforme catholique du Concile de Trente a conduit au développement de la croyance en l'exactitude littérale de la Bible, en affirmant que la traduction particulière proposée par la Vulgate ne contenait pas d'erreur par rapport au dogme, ce qui justifiait de s'en servir comme référence dans un but d'exégèse et d'enseignement. La grande diversité des interprétations de la Bible dans les différents courants protestants découlent d'un des fondements de la réforme protestante luthérienne : sola scriptura ( « l'écriture seule » ), promouvant une relation directe entre le chrétien et la Bible, ouverte à l'interprétation de chaque lecteur.

L'Origine des espèces

En 1859, Charles Darwin publie l'Origine des espèces (On the Origin of Species by Means of Natural Selection, or the Preservation of Favoured Races in the Struggle for Life). L'essai introduit une rupture dans la connaissance scientifique des origines de la vie en général et des origines de l'Homme en conséquence, bien que Darwin évite de parler de l'homme dans l'ouvrage. La théorie déjà avancée en 1809 par Jean-Baptiste de Lamarck dans sa Philosophie zoologique, puis développée par Darwin en 1859 dans l'Origine des espéces, soutient que les êtres vivants voient leurs caractéristiques biologiques évoluer dans le temps et que le milieu dans lequel vit un groupe d'individus opère une sélection naturelle qui, par la reproduction et la transmission de certains caractères héréditaires, étend l'évolution de ces caractéristiques biologiques à l'ensemble du groupe. Selon cette théorie, il n'y a pas d'entité créatrice qui donne subitement vie à une espèce complètement et définitivement formée.

La tentative d'explication des mécanismes adaptatifs de transformation et de diversification des espèces dans leur milieu par Charles Darwin connut un succès rapide, poursuivant un débat scientifique, engagé bien avant par Georges Cuvier, principal représentant du Fixisme, qui conduisit à l'élaboration d'une théorie sur l'évolution des espèces. Les idées de Charles Darwin influèrent sur la recherche scientifique postérieure. Les travaux en paléontologie, en biologie moléculaire et en génétique permirent d'étayer et de développer la théorie de l'évolution.

Depuis le milieu du XXe siècle, la théorie darwinienne a obtenu le consensus de la communauté scientifique, mais l'ouvrage de Darwin est diversement reçu par différents courants religieux d'obédience chrétienne ou musulmane. Le débat contradictoire entre créationnisme et évolutionnisme se déplaça rapidement sur le terrain de l'enseignement et dans le domaine législatif. Le débat est toujours actuel dans certains pays, comme aux États-unis, où l'enseignement de l'évolution dans les écoles publiques de plusieurs États était interdite jusqu'en 1968 et une décision de la Cour suprême qui jugea que cette interdiction contrevenait à la première clause du 1er amendement de la constitution américaine.

Christianisme et créationnisme

Réception par l’Église catholique

Dans un premier temps, l'Église catholique est nettement défavorable au transformisme. Elle ne le condamne cependant pas. Le pape Léon XIII affirme en 1893, dans l'encyclique Providentissimus Deus, la doctrine de l'inspiration par l'Esprit Saint de la Bible[3] :

« Les livres de l'Ancien Testament et du Nouveau Testament, avec toutes leurs parties, tels qu'ils ont été reconnus par le Concile de Trente doivent être reconnus comme sacrés et canoniques, non pas en ce sens que, composés par le génie humain, ils ont ensuite reçu son approbation, ni seulement qu'ils contiennent la révélation sans aucune erreur, mais parce qu'ils ont été écrits sous l'inspiration du Saint-Esprit et ont ainsi Dieu pour auteur. »

— Le pape Léon XIII, Providentissimus Deus

Selon cette doctrine, la science ne peut donc se montrer en contradiction avec les Écritures saintes, dès lors que celles-ci sont convenablement interprétées. Cette encyclique invite les catholiques à participer au développement des études bibliques.

Le 22 octobre 1996, le pape Jean-Paul II intervient devant l'Académie pontificale des Sciences et affirme que « de nouvelles connaissances conduisent à reconnaître dans la théorie de l’évolution plus qu’une hypothèse »[4]. Jean Paul II et son successeur Benoît XVI ne s'opposent pas aux théories de l'évolution, qui sont du ressort du monde scientifique, mais ils réfutent toute doctrine matérialiste qui aboutirait à faire de l'Homme « le produit accidentel et dépourvu de sens de l'évolution ». Il ne s'agit pas pour eux de débattre des mécanismes de l'apparition de l'Homme, mais de s'opposer à ce que ces mécanismes définissent la façon dont l'Homme est considéré.

Créationnisme en milieu protestant

Sébastien Fath, sociologue, dans son étude des créationnismes en milieu protestant aux États-Unis souligne qu’il est impossible de dégager une tendance et une motivation unique mais définit pourtant quatre orientations principales :

  • Le créationnisme littéraliste, à partir d’une lecture littérale de la Bible, qu’il estime adopté par 15 millions de personnes.
  • Le créationnisme concordiste, qui cherche un accord entre le texte et la recherche scientifique, qu’il estime à 20 – 25 millions d’adeptes.
  • Le créationnisme finaliste, qui adopte l’approche scientifique sans réserve mais en discute la finalité (voir dessein intelligent), tendance qui serait la plus répandue aux États-Unis et la mieux implantée en Europe également.
  • Le créationnisme théiste, dans lequel Dieu est reconnu comme Créateur mais dont la Création suivrait son cours librement ensuite, avec également environ 20 millions d’adeptes[5].

Le mouvement créationniste

Le mouvement créationniste est né au XIXe siècle, en réaction contre le darwinisme. Ses partisans affirment que le monde a été créé par Dieu en six jours et soutiennent que les théories transformistes s'opposent à la Bible, selon laquelle Dieu aurait créé chaque espèce végétale ou animale de façon individuelle.

Le créationnisme est principalement soutenu par quelques Églises protestantes, comme une conséquence de la doctrine de l'inerrance biblique et de l'autorité de la Bible. Cette mouvance est associée au littéralisme biblique, qui se base sur une lecture littérale de la Genèse et d'autres éléments de la Bible, comme les psaumes, s'opposant ainsi à d'autres courants créationnistes chrétiens.

À l'heure actuelle, des créationnistes essaient d'apporter des éléments pour défendre leur thèse face à la théorie de l'évolution, mais leurs théories sont rejetées par la communauté scientifique : ils sortent en effet du champ de la rationalité en invoquant l'intervention miraculeuse de Dieu durant la « semaine de la création ». La démarche est également qualifiée de non-scientifique car elle est basée sur l'a priori que les faits scientifiques doivent concorder avec les écrits saints[6].

Oppositions au sein du christianisme

Historiquement, comme dans le débat américain et anglo-saxon, les positions qui ont le plus posé de problèmes dès la crise moderniste sont le darwinisme et le littéralisme biblique. La focalisation rhétorique sur cette position l'a progressivement cataloguée de créationnisme tout court, y confondant des positions alternatives pourtant parfois très contradictoires. Il est donc nécessaire de distinguer les arguments divergents au sein même du créationnisme.

Selon le littéralisme biblique, le monde aurait été créé exactement de la façon décrite dans la Genèse lue de manière littérale et surtout primaliste (privilégiant le sens premier, celui évoqué à première vue, des textes), et Dieu aurait créé l'Univers en six jours de vingt-quatre heures. Selon l’archevêque anglican non conformiste James Ussher (mort en 1658), le premier jour de la création est le 23 octobre 4004 av. J.-C., puisque selon lui la chronologie biblique donne ce résultat.

François-René de Chateaubriand la résume ainsi : les dinosaures, fossiles, hommes préhistoriques, etc. n’auraient ─ selon cette thèse ─ pas réellement existé mais seraient des artefacts disposés par Dieu pour troubler l’homme dans le jugement de son histoire, afin qu’il ne puisse pas prouver l’existence de Dieu de manière scientifique. On associe de nos jours cette vision au « Créationnisme Jeune-Terre » (Young-Earth Creationism). Selon le figaro.fr, « Pour la quasi-totalité de la communauté scientifique, ces assertions relèvent de la fable enfantine. »[7]

Dopé par les récentes découvertes depuis les années 1990 en astrophysique et en biochimie principalement, et le progrès très important du christianisme évangélique aux États-Unis s'imposant comme version modérée d'un protestantisme conservateur, un mouvement de plus en plus influent tente de conjuguer orthodoxie scientifique et orthodoxie religieuse. Le mouvement est dénommé « Créationnisme Vieille-Terre » (Old-Earth Creationism). Comme son nom l'indique, sa différence typique est qu'il conçoit que l'origine de l'Univers et de la vie sur Terre remonte à une longue période, des millions, voire des milliards d'années (acceptant l'existence du Big Bang, que refusent les « créationnistes terre jeune », comme étant scientifiquement valide et hautement probable). Dans son ensemble, c'est de nos jours la conception de beaucoup de chrétiens catholiques et protestants (c'est ce qu'indiquent les sondages aux États-Unis, quoique ladite conception jouisse de beaucoup moins d'attention médiatique), et elle est singulièrement plus compatible avec la pensée scientifique la plus répandue, sur les questions de l'âge de l'Univers ou de la Terre, que le créationnisme Terre jeune. Néanmoins, elle prend toujours en compte les récits de création dans la Genèse, de manière plus littérale que les créationnistes évolutionnistes.

Les « créationnistes évolutionnistes », mieux connus comme partisans de l’évolution théiste, adhèrent à la thèse générale selon laquelle certains, voire tous les enseignements classiques sur Dieu et la Création sont compatibles avec tous ou presque tous les enseignements du paradigme évolutionniste. On pourrait la schématiser en calque théiste de ce paradigme, ou encore sa formulation en termes métaphysiques. Avec cette adhésion au paradigme évolutionniste en tant que tel (que pratiquement tous les autres théistes jugent être construit sur un biais naturaliste) plutôt qu'une adhésion à certaines orientations théoriques de l'évolution (sans donc les forcer dans un système paradigmatique), les créationnistes évolutionnistes se positionnent à la limite entre le théisme et le déisme (il s'agit d'ailleurs d'une conception qui convient à de nombreux déistes), à savoir, la continuité ou non de l'action de Dieu dans l'Univers après sa création. En arborant un regard épistémologique, basé notamment sur les enseignements de Thomas Kuhn, on peut critiquer une telle conception en ce qu'elle « dogmatise la science » en posant une croyance dogmatique sur un paradigme qui, lui, est tout à fait sujet au changement.

Il faut néanmoins garder à l'esprit que le créationnisme s'est beaucoup nourri de cette conception des choses, admettant notamment que la lecture des textes sacrés doit être soumise à ce que nous pouvons connaître via la science et la Raison que Dieu a donnée aux hommes (une idée qui remonte à saint Augustin au Ve siècle), ce qui fait qu'on peut aujourd'hui le considérer comme une version plus tempérée et plus « chrétienne » de l'évolution théiste, attirant d'ailleurs dans son giron de plus en plus de chrétiens (surtout évangéliques).

En Belgique, une enquête a montré que 20 % des Flamands adhéraient à la théorie du créationnisme en 2008[8]. L'Atlas de la création qui conteste le darwinisme, s'est diffusé dans les lycées et les universités du pays, notamment parmi les élèves de confession musulmane[8].

En France, l'université interdisciplinaire de Paris (UIP), une association qui regroupe 1 250 adhérents[9], existe depuis 1995 et organise des conférences soupçonnées de défendre le créationnisme. Jean Staune, secrétaire général de l'association, est proche des promoteurs du Dessein Intelligent aux États-Unis. Par ailleurs certains membres du conseil scientifique de l'association, tels que Rémy Chauvin ou Anne Dambricourt Malassé, défendent la théorie de la logique interne, proche du créationnisme.

En juin 2007 un comité spécial du Conseil de l'Europe a préparé un dossier spécial sur les dangers du créationnisme dans l'éducation qui établit une liste d'organismes européens suspectés de faire la promotion du créationnisme.

Le créationnisme dans l’Occident anglophone au XXe siècle

Dans l’Occident anglophone, aux États-Unis surtout, les idées créationnistes chrétiennes littéralistes ont résisté aux idées scientifiques sur l'évolution. Le créationnisme littéraliste américain s'est propagé depuis le sud agricole de la Bible Belt pour atteindre les couches diplômées de la population des États du Nord, et en Australie. Elles ont été à l'origine de plusieurs procès.

Le terrain d'affrontement entre le créationnisme littéraliste et l'« évolutionnisme » se porta principalement sur l'enseignement scolaire, et donc le domaine législatif et judiciaire le contrôlant. Le débat s'étendit à l'opinion publique via les médias en conséquence des affaires judiciaires qui eurent lieu.

La bataille pour l'enseignement du créationnisme aux États-Unis

Article détaillé : Néo-créationnisme.
Voiture d'un créationniste militant aux États-Unis : « L'évolution ? Les fossiles disent non ! / L'évolution est un conte de fées pour adultes. / Que Dieu bénisse l'Amérique ! »

Si en Europe les programmes scolaires enseignent l'évolution comme une théorie scientifique reconnue, il existe aux États-Unis depuis les années 1920 une vive opposition manifestée par les tenants du créationnisme littéraliste, souvent d'obédience religieuse.

À partir de 1920, un mouvement soutenu par William Jennings Bryan milita pour que l’interdiction de l’enseignement de la théorie de l'évolution des espèces fasse l’objet d’un amendement de la Constitution des États-Unis. Le mouvement n’aboutit pas au niveau fédéral, mais en 1925, 15 États américains sur 48 interdirent l'enseignement de la théorie de l'évolution.

Depuis la fin du XXe siècle, le créationnisme littéraliste est délaissé en faveur du Dessein intelligent (Intelligent Design). Il s'agit d'un créationnisme masqué[10].

Cette interdiction d'enseignement fut mise en cause devant la justice lors du procès du singe mais ne fut abolie qu'en 1967 lorsqu’elle fut déclarée anticonstitutionnelle, en opposition au premier amendement de la Constitution des États-Unis garantissant la liberté religieuse et la liberté d'expression.

L'institut de recherche Pew aux États-Unis a réalisé en juillet 2005 un sondage montrant que 64 % des Américains étaient favorables à l'enseignement du dessein intelligent en plus de la théorie de l'évolution et que 38 % ne voulaient pas que la théorie de l'évolution soit enseignée dans les écoles publiques[réf. nécessaire]. Un autre sondage mené fin 2007 par le journal des sociétés de biologie américaines (FASEBJ) affirme que 61 % des Américains sont d'accord avec le concept d'évolution. 29 % des sondés estiment que la vie a été créée sous sa forme actuelle[11].

Toujours en 2005, plusieurs familles de Pennsylvanie ont porté plainte contre un conseil scolaire qui avait décidé que l'on présente le dessein intelligent. Le tribunal fédéral de Harrisburg leur a donné raison dans un arrêt du 20 décembre 2005 rendu par le juge John Jones, qui a estimé que l'enseignement du « dessein intelligent » était inconstitutionnel, parce qu'il se basait sur des convictions religieuses et non sur des preuves scientifiques[11].

En 2007-2008, l'Institut de médecine (Institute of Medicine) et l'Académie nationale des sciences américaine (United States National Academy of Sciences) s'opposent fermement au créationnisme dans un livre intitulé Science, evolution and creationism[11].

La portée officielle du créationnisme est aujourd'hui délaissée au profit des théories de l'intelligent design. Plus aucun État américain n'a inscrit dans son programme l'enseignement à parité du créationnisme et de l'évolution, mais les écoles privées jouissent encore d'une liberté à ce sujet[réf. nécessaire].

Créationnisme en Europe

Dans les années 2000, l'enseignement du créationnisme progresse dans les établissements d'Allemagne, des Pays-Bas, de Russie, de Suède et de Pologne[12]. Dans plusieurs pays européens, de plus en plus d'étudiants s'opposent à l'enseignement de l'évolution en cours[12]. Letizia Moratti, ministre italien de l'éducation avait signé en février 2004 un décret interdisant l'enseignement de l'évolution au collège[12]. Il fut finalement retiré sur pression des scientifiques du pays. Un sondage effectué au début de 2006 par la chaîne BBC révèle que de 40 % des personnes interrogées veulent que le créationnisme soit enseigné en cours de science au Royaume-Uni[12]. En juin 2007, le Conseil de l'Europe a reçu un Rapport sur les dangers du créationnisme dans l'éducation qui précisait que « Le créationnisme dans aucune de ses formes, telles que l’«intelligent design», n'est pas basé sur des faits, n’utilise pas de raisonnement scientifique et son contenu est désespérément inadapté aux classes scientifiques. »[13] et proposait un projet de résolution. La résolution correspondante a été adopté le 4 octobre 2007[14].

Les procès

Le procès du singe

Article détaillé : Procès du singe.

Le plus connu de ces affrontements judiciaires fut le procès du singe, qui s'est déroulé en 1925, dans le Tennessee. Le 28 janvier 1925, l'État du Tennessee mit en place le Butler act qui déclare qu'« il est illégal pour tout enseignant de toute université, école normale et toutes les autres écoles publiques de l'État [...], d'enseigner toute théorie qui nie l'Histoire de la Création Divine de l'homme comme enseigné dans la Bible, et d'enseigner à la place que l'homme est descendu d'un ordre inférieur des animaux[15]. ».

Le Butler act n'interdisait pas l'enseignement de l'évolution génétique des autres espèces que l'homme, de la géologie, de la création de l'univers selon les connaissance scientifiques de l'époque, et il n'obligeait pas à l'enseignement de la création selon la Bible. L'unique interdit était d'enseigner que l'homme évolue ou toute autre théorie reniant la création de l'homme par Dieu tel qu'exposé par la Bible.

L'Union américaine pour les libertés civiles passe par les petites annonces pour trouver un professeur acceptant d'enfreindre la loi en enseignant que l'homme a évolué selon la théorie de Darwin. Un jeune professeur de sciences naturelles de 24 ans de la ville de Dayton, John Thomas Scopes, se porte volontaire. Avec le soutien de l'ACLU, il a recours à une procédure qui permet à un citoyen condamné de faire appel devant la Cour Suprême de l'État qui examine alors si la loi en vigueur est constitutionnelle ou non. En s'appuyant sur le premier amendement de la Constitution des États-Unis, l'ACLU espère que la Cour Suprême juge ainsi le Butler Act anticonstitutionnel[16]. The Nation parle d'un « retour aux jours de l'Inquisition. » Le journaliste H. L. Mencken publia nombre d'articles sur ce procès dans le Baltimore Sun, dénonçant le puritanisme américain. De son côté, la communauté scientifique s'est peu mobilisée au cours de l'affaire[16].

John Thomas Scopes perdit et fut condamné à une légère amende, mais le procès fut fortement médiatisé. L'UCLA considéra avoir remporté une victoire médiatique car l'opinion publique fut sensibilisée à la question et se montra en grande partie favorable à Scopes. Mais le Butler act fut déclaré conforme à la constitution, et l'interdiction se maintint jusqu'en 1967. De plus, le sujet de l'évolution fut jugé trop politiquement sensible, et les éditeurs de livres scolaires retirèrent la théorie de Darwin et l'évolution de l'homme de leurs ouvrages.

En 1967, un enseignant se plaignit que le Butler act violait son droit à la liberté d'expression et la séparation de l'Église et l'État[réf. nécessaire]. Craignant un nouveau procès médiatique, les progrès scientifiques soutenant la théorie de l'évolution et en conséquence l'évolution des mentalités dans l'opinion publique, l'État du Tennessee abrogea le Butler act.

Australie

L'un de ces procès célèbres voit s'affronter des fondamentalistes protestants australiens, notamment John Mackay et Ian Plimer, professeur de géologie à l'université de Melbourne. Accompagnant le mouvement américain, l'État du Queensland autorise, au début des années 1980, l'enseignement du créationnisme en tant qu'hypothèse scientifique. John Mackay est invité à donner des conférences dans les écoles publiques et les universités du Royaume-Uni[9]

L’intelligent design au procès Kitzmiller v. Dover Area School

Article détaillé : Kitzmiller v. Dover Area School.

Au courant de l'année 2004, le conseil d'éducation de la région de Dover, Pennsylvanie, ajouta un ensemble de déclarations pro-créationnistes au sein du cursus de biologie. Notamment, les professeurs étaient dans l'obligation de lire une mise en garde à saveur créationniste avant d'aborder la théorie de Darwin. Les étudiants devaient obligatoirement être informés de la présence d'un livre à la bibliothèque de l'école, Of Pandas and People. Ces livres, achetés par une église locale et donnés aux écoles de la région, présentaient une version adoucie du créationnisme; les termes "création" et "créationnisme" ayant été systématiquement remplacés par "design" et "partisans du dessein intelligent".

Prévoyant d'éventuelles poursuites judiciaires, la commission scolaire fit appel au soutien juridique Thomas Moore Law Center, organisme qui s'affiche comme "la réponse chrétienne à l'ACLU"[17]. Le conseil scolaire fit également appel au Discovery Institute, lobby créationniste basé à Seattle.

Un consortium s'organisa rapidement afin de contrer ces mesures introduisant le religieux dans le cursus scientifique. En décembre 2005 s'ouvrait le procès opposant la conseil d'éducation de la région de Dover à un groupe de parents d'élèves ayant pour porte-parole Tammy Kitzmiller. Kitzmiller et al. étaient de leur côté appuyés par le National Center for Science Education ainsi que l'ACLU.

Parmi les témoins experts de la défense, on pouvait compter notamment les créationnistes William Dembski, Micheal Behe et Stephen Meyer. Cependant, suite au retrait du Thomas Moore Law Center, la plupart des témoins-expert de la défense ne se présentèrent pas au tribunal.

Les témoins de l'accusation, dont la philosophe des sciences Barbara Forest[18], parvinrent à démontrer que ce "dessein intelligent" était bel et bien du créationnisme et avait des motivations religieuses. La fuite dans Internet du Wedge Document, pamphlet à saveur théocratique publié à l'interne par le Discovery Institute n'aida guère la cause de la défense, qui soutenait de son côté que le Dessein Intelligent est une théorie scientifique non-religieuse et alternative à l'évolutionnisme.

En décembre 2005, le juge conservateur Jones accorda gain de cause à Kitzmiller et al[19].

Judaïsme et créationnisme

Article détaillé : judaïsme et évolution.

Le judaïsme présente un large éventail d'opinions sur la création, l'origine de la vie et le rôle de l'évolution dans celle-ci.

La majorité des courants théologiques du judaïsme contemporain, y compris beaucoup de groupes orthodoxes, acceptent le créationnisme évolutionnaire ou évolution théiste. La tendance actuelle, à l'exception des mouvements les plus orthodoxes, est de ne pas prendre la Torah comme un texte littéral, mais plutôt comme une œuvre symbolique et flexible.

Entre le relativisme et le littéralisme absolu, une voie médiane pourrait se résumer à la formule du Rav Léon Askénazi : Ce qui est écrit dans la Torah est certes schématique, mais non mythique.
Cependant, même pour les scientifiques juifs orthodoxes qui cherchent à concilier les divergences entre Torah et Madda (Science), cette notion que la science et la Bible devraient être réconciliées avec les moyens scientifiques traditionnels est douteuse. Comme le disait le Maharal de Prague à son disciple David Gans, assistant de Tycho Brahe, elles ne se situent pas dans le même domaine, et il n'y a pas de contradiction à affirmer que les deux sont aussi vraies. Toutefois, la vérité de la Torah est immuable et éternelle, alors que la science est mouvante par essence. Si, d'aventure, un point épineux surgit, il est à imputer aux limites épistémologiques de l'époque. Ils insistent sur le fait que les écarts entre ce qui est attendu et ce qui est observé prouvent que les choses ne sont pas toujours ce qu'elles paraissent, et, de façon plus poétique, que la racine même du mot monde en hébreu — עולם (o•lam) — signifie « caché », « insaisissable ». Toutefois, lorsque science et Torah semblent converger, ils ne se fient pas davantage à ces théories de façon totale : celles-ci pourront être remises en doute, ainsi que leur compréhension de la Torah, mais non la Torah elle-même.
Certains croient que, de même qu'ils croient que Dieu créa l'homme, les arbres, la lumière venant des étoiles dans leur état « adulte » (certains interprètent plus allégoriquement, et estiment que la conscience d'être homme et d'avoir une âme ne vient qu'à l'âge « adulte »), de même le Monde fut créé « adulte », mais il n'y a, ni ne peut y avoir de moyen de le vérifier. Cette croyance a été avancée par le Rav Dr. Dovid Gottlieb, ancien professeur de philosophie à l'université Johns-Hopkins.
Gerald Schroeder, physicien à l'université hébraïque de Jérusalem propose quant à lui un comput réconciliant 6 jours et 13 milliards d'années, en se basant sur la relativité d'Einstein, et Nathan Aviezer, de l'université Bar-Ilan, fait de même avec les premiers chapitres de la Genèse et l'évolution.

Dans l'autre registre, des maîtres en Kabbale du XIIIe siècle et auparavant, calculèrent un âge de l'Univers assez proche des estimations scientifiques actuelles, des siècles avant qu'elles ne soient connues, selon le Rav Aryeh Kaplan. L'un de ces maîtres, Nahmanide, déduisit par exégèse qu'Adam s'accoupla avec un être comparable à l'espèce de Néanderthal, bien avant qu'ils n'aient été ne fût-ce que soupçonnés par le monde scientifique.

Sources

  • L'Âge de l'univers par le Dr Gerald Schroeder.
  • Dr Nathan Aviezer, Au commencement. Création biblique et science, éditions MJR, ISBN 2-88321-016-0.
  • Bill Gladstone, « Let there be plasma soup: Genesis, Chapter 1: Torah and modern physics said to be in agreement », National Post, 7 mars 2001.

Le néocréationnisme musulman

Avec la percée des mouvements islamistes dans les années 1980, les arguments créationnistes d'origine chrétienne sont devenus populaires parmi les musulmans, notamment en Turquie, où ils sont disséminés par le mouvement Nurcu et le prédicateur Harun Yahya en Indonésie, en Malaisie et dans la diaspora musulmane européenne et nord-américaine.

Le créationnisme progresse en Turquie : les thèses créationnistes apparaissent dans les manuels scolaires et 75 % des lycéens turcs ne croient pas à la théorie de l'évolution[20]. Les expositions et les conférences créationnistes sont de plus en plus fréquentes. En 2008, la deuxième Cour Criminelle de Paix turque a fait bloqué l’accès au site RichardDawkins.net du Professeur Richard Dawkins suite à ses critiques concernant l'ouvrage créationniste l'Atlas de la Création publié par Harun Yahya[21]. En mars 2009, un numéro de la revue du conseil de recherche scientifique et technique de Turquie (Tübitak) consacré à Charles Darwin a été censuré et la rédactrice en chef de la revue renvoyée[22].

La diffusion de l'Atlas de la Création en Europe francophone

Contexte d'apparition

Début février 2007, la presse française s'est fait l'écho[23] d'un envoi en grand nombre à différentes instances du ministère de l'Éducation Nationale (rectorats, bibliothèques, centres d'information pédagogiques, enseignants) d'un livre à caractère encyclopédique [24], écrit par Harun Yahya, pseudonyme d'Adnan Oktar, et publié par la maison d'édition Global à Istanbul. Selon différents organes de presse, cet envoi était suffisamment massif pour que le ministère de l'Éducation nationale diffuse un message d'alerte afin de mettre en garde les destinataires envers une action qui présente un fort caractère de propagande et de prosélytisme. Le Figaro s'étonne du fait que les ouvrages aient été envoyés pour certains aux adresses privées d'enseignants[25]. Emre Calikoglu, porte-parole de l'éditeur Global, affirme que 2 000 exemplaires de l'Atlas ont été envoyés en France et en Belgique[23]. Fin mars 2007, la presse de Suisse romande se fait, à son tour, l'écho d'une action similaire à destination, là aussi, du système éducatif public du pays[26]. Adnan Oktar revendique d'avoir vendu 1,5 million d'ouvrages dans le monde en 2007[27].

Le livre en lui-même

La consultation du site présentant cette encyclopédie permet d'obtenir les précisions suivantes :

  • la présentation de l'ouvrage est faite avec une approche qui se veut scientifique (chapitres portants sur la notion de fossiles et sur les spécimens de fossiles découverts sur les différents continents ; schémas et illustrations explicatifs ; photos ; etc.)
  • la conclusion de la présentation commence par « Dieu a créé l'Univers et tout ce qui vit » et comporte 6 citations de versets du Coran.

En outre, l'auteur de l'ouvrage, Harun Yahya, pseudonyme de M. Adnan Oktar, précise [28] que « la réelle source du terrorisme est le matérialisme et le darwinisme ».

La thèse du livre est que la Terre a bien 4,6 milliards d'années, mais que les formes de vie n'ont pas évolué[25]. Il s'agit d'un point de vue proche du fixisme traditionnel, mais bien distinct du dessein intelligent, qui défend l'idée d'une évolution guidée.

« La diffusion mondiale, en 2006, du luxueux « Atlas de la création » de Harun Yahya, naturaliste turc, avec ses 45 000 pages, ses 30 000 illustrations et ses citations du Coran, n'a éveillé qu'effarement devant la débilité de l'argumentation créationniste. »[29]

Notes et références

  1. [réf. incomplète]Jacques Arnould, Dieu versus Darwin : les créationnistes vont-ils triompher de la science? Paris, Albin Michel, 2007
  2. Origène était abondamment lu pendant la Renaissance, et Érasme disait : « En fait de théologie, après les Saintes Écritures, rien de mieux à lire qu'Origène. »
  3. C'est à dire, en conséquence, l'inerrance verbale de la Bible
  4. texte en ligne
  5. Typologie des créationnismes
  6. Guillaume Lecointre, Evolution et créationnismes, Département "Systématique et évolution", Muséum national d'histoire naturelle, Paris.
  7. Avec les pèlerins du Grand Canyon Reportage, le figaro.fr
  8. a  et b Jean-Pierre Stroobants, « En Belgique, le combat contre le créationnisme s'organise », dans Le Monde du 08-02-2008, [lire en ligne]
  9. a  et b Michel Alberganti, Le jeu de masques du néocréationnisme français, Le Monde, 02/09/2006. , [lire en ligne]
  10. Thierry Lodé "La Guerre des sexes chez les animaux" Eds O Jacob, Paris, 2006
  11. a , b  et c Christiane Galus, « L'Académie des sciences américaine part en guerre contre le créationnisme », dans Le Monde du 07-01-2008, [lire en ligne]
  12. a , b , c  et d Catherine Vincent, « Le créationnisme étend son influence en Europe », dans Le Monde du 18-11-2008, [lire en ligne], mis en ligne le 17-11-2008
  13. Rapport sur les dangers du créationnisme dans l'éducation
  14. Conseil de l'Europe, résolution 1580 (2007)
  15. « it shall be unlawful for any teacher in any of the Universities, Normals and all other public schools of the State which are supported in whole or in part by the public school funds of the State, to teach any theory that denies the Story of the Divine Creation of man as taught in the Bible, and to teach instead that man has descended from a lower order of animals. », (en) Butler Act
  16. a  et b Pascal Picq, Lucy et l'obscurantisme, éd. Odile Jacob, avril 2007, p.158-160.
  17. http://www.thomasmore.org/default-sb_thomasmore.html?775653593
  18. http://www.talkorigins.org/faqs/dover/day6am.html
  19. http://en.wikisource.org/wiki/Kitzmiller_v._Dover_Area_School_District_et_al.
  20. D'après un sondage effectué par l'Académie des Sciences turque ; lire Guillaume Perrier, « Les thèses créationnistes gagnent du terrain en Turquie », dans Le Monde du 09/02/2007
  21. Erol ÖNDEROĞLU, « Creationist Adnan Oktar Gets Another Site Banned », dans Info-Türk de nov. 2008
  22. Guillaume Perrier, « Des créationnistes turcs envoient Darwin au pilon », dans Le Monde du 14-03-2009, [lire en ligne], mis en ligne le 13-03-2009
  23. a  et b Guillaume Perrier, « Les thèses créationnistes gagnent du terrain en Turquie », dans Le Monde du 09/02/2007, [lire en ligne]
  24. l'Atlas de la Création
  25. a  et b Le Figaro – Actualité en direct et informations en continu
  26. Rachad Armanios, « La propagande créationniste débarque en Suisse romande », dans Le Courrier du 28/03/2007, [lire en ligne]
  27. Guillaume Perrier « Le leader d'un mouvement créationniste turc condamné à trois ans de prison ferme », dans Le Monde du 14-05-2008, [lire en ligne], mis en ligne le 13-05-2008
  28. Le mensonge de l'évolution
  29. Jacques Debelmas, Créationnisme et Intelligent Design, 02/03/2009

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Sur l'interprétation de la Genèse

Sur la Relation entre science et religion

Sur la théorie de l'évolution

Autres

Lien externe

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