Jean-Baptiste De Lamarck

Jean-Baptiste De Lamarck

Jean-Baptiste de Lamarck

Jean-Baptiste de Lamarck
Portrait de Jean-Baptiste Lamarck, dans la Galerie des naturalistes de Jules Pizzetta, 1893
Portrait de Jean-Baptiste Lamarck, dans la Galerie des naturalistes de Jules Pizzetta, 1893
Naissance 1er aout 1744
Bazentin (France France)
Décès 18 décembre 1829
Paris (France France)
Nationalité France France
Champs naturaliste
Diplômé études chez les Jésuites d'Amiens
Distinctions 1778 - élu à l'Académie des Sciences

Jean-Baptiste Pierre Antoine de Monet, chevalier de Lamarck (1er août 1744, Bazentin, Somme18 décembre 1829, Paris) est un naturaliste français connu pour avoir proposé le premier une théorie matérialiste et mécaniste de la vie et de l'évolution des êtres vivants. Il est également un des rares évolutionnistes à avoir compris la nécessité théorique de l'évolution des êtres vivants. Sa théorie transformiste est fondée sur deux principes :

  1. la complexification croissante de l'organisation des êtres vivants sous l'effet de la dynamique interne propre à leur métabolisme ;
  2. la diversification, ou spécialisation, des êtres vivants en de multiples espèces, sous l'effet des circonstances variées auxquelles ils sont confrontés dans des milieux variés et auxquelles ils sont contraints de s'adapter en modifiant leur comportement ou leurs organes pour répondre à leurs besoins (cette modification n'étant pas le produit de leur volonté ou de leur désir, mais toujours de cette dynamique interne propre à la vie conçue ici comme un processus où les flux de matière nécessaires à la vie structurent la matière vivante et, par suite, les organismes).

Il est également un de ceux qui ont pour la première fois utilisé le terme de biologie pour désigner la science qui étudie les êtres vivants.

Sommaire

Biographie

Enfance et formation

Il est né dans le village de Bazentin-le-Petit d'une vieille famille noble, comptant de nombreux militaires[1].

Il poursuit des études chez les Jésuites d'Amiens, de 1755 à 1759, avant d'entamer une carrière militaire en 1761, sous le nom de Chevalier de Saint-Martin. Il devient officier sur le champ de bataille de Villinghausen, le 16 juillet de la même année.

Obligé de quitter l'armée en 1765, à la suite d'un accident, il travaille pendant quelque temps pour un comptable, puis il se consacre à des études de médecine et se passionne pour la botanique. En 1778, l'Imprimerie royale publie sa Flore française, où il donne des clefs dichotomiques permettant à chacun d'identifier les plantes. Cet ouvrage lui apporte une notoriété immédiate, et lui vaut d'être élu à l'Académie des sciences l'année suivante, avec l'appui de Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon. D'abord membre adjoint, il en devient titulaire en 1783 puis, enfin, pensionnaire en 1790, année où, spécialiste de botanique, il n'hésite pas, à cinquante ans, à se reconvertir avec succès, en étant nommé professeur d'Histoire naturelle des Insectes et des Vers au Jardin du Roi.

Il participe, en 1793, à la transformation du Jardin du Roi en Muséum national d'histoire naturelle, sous l'impulsion de Lakanal. Il y devient professeur de zoologie, chargé d'enseigner la zoologie des invertébrés : c'est lui qui invente le mot « biologie » pour désigner la science des êtres vivants ; il fonde également la paléontologie des invertébrés.

Il passera plusieurs années à établir une classification raisonnée des animaux invertébrés, qui représentent environ 80% du règne animal.

Deux ouvrages lui valent d'être considéré comme le fondateur du transformisme : Philosophie zoologique (1809) et l'introduction de l' Histoire naturelle des animaux sans vertèbres (1815-1822).

A propos de la réception de la Philosophie zoologique par l'empereur Napoléon, Arago[2] relate l'anecdote suivante:

L'Empereur […] passa à un autre membre de l'Institut. Celui-ci n'était pas un nouveau venu : c'était un naturaliste connu par de belles et importantes découvertes, c'était M. Lamarck. Le vieillard présente un livre à Napoléon.
« Qu'est-ce que cela ? dit celui-ci. C'est votre absurde Météorologie, c'est cet ouvrage dans lequel vous faites concurrence à Matthieu Laensberg, cet annuaire qui déshonore vos vieux jours ; faites de l'histoire naturelle, et je recevrai vos productions avec plaisir. Ce volume, je ne le prends que par considération pour vos cheveux blancs. — Tenez ! » Et il passe le livre à un aide de camp.
Le pauvre M. Lamarck, qui, à la fin de chacune des paroles brusques et offensantes de l'Empereur, essayait inutilement de dire : « C'est un ouvrage d'histoire naturelle que je vous présente », eut la faiblesse de fondre en larmes.

Il fut quatre fois veuf et devint aveugle pendant les dix dernières années de sa vie.

La fin de sa vie

Durant plus d'un siècle, la plupart des textes historiques évoquent la misère de la fin de la vie de Lamarck. Pour Jean-Henri Humbert (1887-1967)[3], Lamarck « dénué de ressources » doit céder son herbier au botaniste allemand Johannes August Christian Roeper (1801-1885). Plus près de nous, pour Jaussaud et Brygoo[4], « [Lamarck est] mort pauvre dans son logis du Muséum ». L'étude de Michel Guédès[5] sur les revenus de Lamarck montre que celui-ci cumulait divers revenus (comme son traitement de professeur du Muséum, ses revenus de l'Académie des sciences, de la vente de ses ouvrages, etc.) qui atteignait la somme de 9 500 F de l'époque[6]. Ses revenus n'égalaient certes pas ceux de Cuvier (puisque ceux-ci atteignait 41 200 F), mais lui permirent de vivre de façon tout à fait correcte.

Il meurt le 18 décembre 1829, à l'âge de 85 ans, dans sa maison au Muséum. Ses restes sont jetés à la fosse commune du cimetière Montparnasse. Comme évoqué ci-dessus, c'est pour certains auteurs le signe de sa misère. Pour Laurent[7], il faut mettre cela « sur le manque de piété filiale » de son fils, Auguste.

Travaux scientifiques

L'invention de la biologie

Le terme "biologie" (du grecs bios (βιος), « vie », et logos (λογος), « science ») a été inventé au début du XIXe siècle (en 1802) notamment par Lamarck :

« Tout ce qui est généralement commun aux végétaux et aux animaux comme toutes les facultés qui sont propres à chacun de ces êtres sans exception, doit constituer l'unique et vaste objet d'une science particulière qui n'est pas encore fondée, qui n'a même pas de nom, et à laquelle je donnerai le nom de biologie. » [réf. nécessaire]

La nécessité théorique de l'évolution

L’existence même des êtres vivants atteste le fait de l’évolution parce que leur présence ne peut résulter du seul jeu actuel des phénomènes physico-chimiques. Par exemple, un flocon de neige ou n’importe quel cristal de glace est le produit de circonstances atmosphériques particulières (humidité de l’air, température, etc.) à un instant donné et il disparaîtra avec elles. Le flocon de neige est le produit du seul jeu actuel des conditions atmosphériques, et dès que celles-ci se modifient, il se transforme en conséquence ; éventuellement commence à fondre. Le flocon de neige est tout entier le jouet des circonstances qui l’environnent immédiatement, il ne possède en lui-même aucune activité autonome qui puisse maintenir son organisation, au contraire d’un être vivant.

N’importe quel être vivant, même les plus simples actuellement connus (et ils sont forts différents et certainement déjà beaucoup plus complexes que les tous premiers êtres vivants apparue il y a environ 3,5 milliard d’années), ne peuvent se former spontanément à partir des circonstances actuelles. Non seulement il n’y pas de génération spontanée de mammifères évolués comme des souris ou des rats à partir de vieux chiffons, comme on le pensait encore au XVIIIe siècle, mais il n’y en a pas non plus de bactéries les plus simples, comme Pasteur l’a établi.

Tout être vivant naît à partir d’un être vivant. De là, s’il existe des organismes plus complexes que d’autres (ne serait-ce que des êtres pluricellulaires, qui ont une organisation différente des êtres unicellulaires comme les bactéries), c’est nécessairement qu’il y a eu une histoire pour en arriver là, c’est-à-dire une évolution des espèces.

Autrement dit, l’idée d’évolution est avant tout une nécessité théorique pour comprendre la présence des êtres vivants complexes, c’est-à-dire des êtres vivants qui ne sont pas seulement le produit du jeu actuel des phénomènes physico-chimiques, mais également le produit d’une construction et d’une élaboration historique de ces phénomènes en une organisation de plus en plus complexe et différenciée.

Lamarck avait le premier compris ce point[8] en cherchant à comprendre ce qui différencie les êtres vivants des objets inanimés étudiés par la physique. Darwin ne comprendra pas cette nécessité théorique de l'évolution, lui qui cherchait avant tout à découvrir L'Origine des espèces, c'est à dire à comprendre comment les êtres vivants s'adaptent à leurs conditions d'existence sans faire intervenir les "créations spéciales", les explications créationnistes de William Paley. Et il est curieux de voir qu'encore aujourd'hui, cet argument puissant en faveur de l'évolution n'est toujours pas compris de la plupart des évolutionnistes.

La théorie de la transmission des caractères acquis

Statue par Léon Fagel, sur le monument érigé en 1908 par souscription universelle au Jardin des Plantes de Paris

Une des nombreuses légendes qui émaillent l'histoire de la biologie fait de Lamarck l'auteur d'une « théorie de la transmission des caractères acquis ». La transmission des caractères acquis était admise comme une évidence depuis Aristote et jusqu'à August Weismann qui à la fin du XIXe siècle la rejettera plus pour des raisons théoriques qu'il ne la réfutera expérimentalement. Or il n'en est rien: Lamarck, dans toute son oeuvre, ne propose aucune théorie de l'hérédité, il ne fait que reprendre les idées courantes chez les savants de son époque sur le sujet. Lamarck n'a, pas plus que ces prédécesseurs, théorisé cette transmission, il n'a fait que l'intégrer à sa propre théorie de l'évolution. Par contre, c'est Charles Darwin dans La variation des animaux et des plantes sous l'effet de la domestication (1868) qui théorisera cette transmission des caractères acquis[9].

En examinant des petits mollusques fossiles il constate une modification au cours des âges de leurs caractéristiques physiques. Il est l'un des premiers à s'interroger officiellement sur ce facteur.

Sa thèse sur l'évolution est que les individus s'adaptent pendant leur vie notamment en utilisant plus ou moins certaines fonctions organiques, qui se développent ou s'atténuent en rapport avec l'usage ou le non usage des organes.

Lamarck fut aussi un grand innovateur en affirmant, en 1809, dans Philosophie zoologique, livre où il développe sa théorie transformiste, que les organismes évoluaient. Cependant Charles Darwin a fait peu de cas des idées de Lamarck. Avec d'autres darwiniens qui lui succèderont, il contribuera grandement à déconsidérer Lamarck aux yeux des biologistes et à forger les légendes qui l'entourent. Pourtant, c'est à Lamarck que l'on doit la première véritable Théorie de l'évolution des espèces formalisée et non à Darwin qui proposera seulement un mécanisme, celui de la variation aléatoire et de la sélection naturelle à partir duquel les scientifiques allaient forger la théorie que l'on appliquera ensuite à toute l'évolution du vivant.

Un des clichés les plus rebattus sur les idées de Lamarck est certainement celui sur la Girafe : une girafe qui étirait son cou toute sa vie pour atteindre les branches d'un arbre aurait une descendance avec un cou plus long. Darwin et d'autres auteurs anglo-saxons semblent en avoir déduit que c'était la volonté de l'animal qui était à l'origine de la formation de certains organes. Cette interprétation malveillante de ses idées, inspirée par L'Eloge funèbre écrit par Cuvier, semble venir d'une erreur dans la traduction anglaise de la Philosophie zoologique, où l'idée d'effort résultant des besoins de l'être vivant a été improprement traduit par le terme désir.

Voici en effet tout ce qu'écrit Lamarck à propos de la Girafe :

« Relativement aux habitudes, il est curieux d'en observer le produit dans la forme particulière et la taille de la girafe (camelo-pardalis) : on sait que cet animal, le plus grand des mammifères, habite l'intérieur de l'Afrique, et qu'il vit dans des lieux où la terre, presque toujours aride et sans herbage, l'oblige de brouter le feuillage des arbres, et de s'efforcer continuellement d' y atteindre. Il est résulté de cette habitude, soutenue, depuis longtemps, dans tous les individus de sa race, que ses jambes de devant sont devenues plus longues que celles de derrière, et que son col s'est tellement allongé, que la girafe, sans se dresser sur les jambes de derrière, élève sa tête et atteint à six mètres de hauteur (près de vingt pieds). »

— Lamarck, [PZ, p. 256]

Les travaux actuels de l'épigénétique pourrait réabiliter partiellement les thèses de Lamarck (voir article transmission des caractères acquis).

Postérité

Annexes

Liste partielle des publications

Voici la liste sélective des œuvres et ouvrages disponibles en ligne au format texte :

Notes

  1. Szyfman (1982) : 4.
  2. Arago, Histoire de ma jeunesse, 1846, chapitre 46.
  3. Humbert (1946) : 21.
  4. Jaussaud et Brygoo (2004) : 324.
  5. Cité par Laurent (2001) : 134-136.
  6. Le salaire moyen de l'ouvrier était de 1000 F, cf. Laurent (2001) : 135.
  7. Laurent (2001) : 136.
  8. Cf. André Pichot, Histoire de la notion de vie, 1993.
  9. Cf. André Pichot, Histoire de la notion de vie, éd. Gallimard, coll. TEL, 1993.
  10. Académie d'Amiens, « Cité Scolaire Lamarck ». Consulté le 27 mai 2009

Sources

  • Michel Guédès (1982). Les revenus de Lamarck, Histoire et Nature, 21 : 49-60. (ISSN 0396-9681)
  • Henri Jean Humbert (1946). L’œuvre botanique de Lamarck dans le cadre de son temps, Bicentenaire de J.-B. de Monet de Lamarck (1744-1829), 7, Muséum national d’histoire naturelle de Paris, collection Publications du Muséum : 17-22.
  • Philippe Jaussaud et Édouard R. Brygoo (2004). Du Jardin au Muséum en 516 biographies, Muséum national d’histoire naturelle de Paris : 630 p. (ISBN 2-85653-565-8)
  • Goulven Laurent (2001). La Naissance du transformisme. Lamarck entre Linné et Darwin, Vuibert (Paris) et ADAPT (Paris) : 151 p. (ISBN 2-7117-5348-4)
  • Léon Szyfman (1982). Jean-Baptiste Lamarck et son époque, Masson (Paris) : xxiii + 448 p. (ISBN 2-225-76087-X)

Orientation bibliographique

  • Pietro Corsi (2001). Lamarck. Genèse et enjeux du transformisme. 1770-1830, CNRS Éditions : 434 p. (ISBN 2-271-05701-9)
  • André Pichot (1997). Histoire de la notion de vie, éd. Gallimard, coll. « TEL » : 980 p. (ISBN 2070731367), chapitre 7 « Lamarck et la biologie ».

Articles connexes

Liens externes


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