Jean-Baptiste-Antoine Nourrisson

Jean-Baptiste-Antoine Nourrisson
Jean-Baptiste-Antoine Nourrisson
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Naissance 21 novembre 1768
Lyon
Décès 28 juillet 1855 (à 87 ans)
Besançon
Nationalité Drapeau de France France
Profession Magistrat
Autres activités Député de la Haute-Saône :
- Corps législatif (Consulat et Premier Empire),
- Chambre des Cent-Jours,
- Chambre des députés (Restauration)
Distinctions Chevalier de l'Empire
Ordre de la Réunion
(Chevalier)

Jean-Baptiste-Antoine Nourrisson (21 novembre 1768 - Lyon 28 juillet 1855 - Besançon), était un magistrat et homme politique français des XVIIIe et XIXe siècles.

Sommaire

Biographie

Environnement familial

Jean-Baptiste Antoine Nourrisson naquit à Lyon de Antoine Nourrisson et Marguerite Jeanne Guelfe, le 21 novembre 1768 à Lyon. Il fut baptisé le lendemain en léglise Saint-Paul de Lyon, paroisse traditionnelle de la famille Nourrisson, et recevait pour parrain son grand-père paternel, Jean-Baptiste Nourrisson, maître marchand horloger et pour marraine Catherine Vial, sa grand-mère maternelle, veuve de Joseph Guelfe. Un passeport pour la France du début du XIXe siècle nous renseigne sur son aspect physique. Sa taille était dun mètre 46, ses cheveux et sourcils châtain brun, son front étroit, son nez gros, des yeux bruns, une bouche grande, un menton rond et un visage ovale[1]

La famille de son père[2] était lyonnaise depuis quatre générations au moins, et fixée dans lhorlogerie elle avait acquis une solide réputation puisque son bisaïeul, Guillaume Nourrisson, avait complètement transformé lhorloge astronomique de la Primatiale Saint-Jean de Lyon[3], à la moitié du XVIIe siècle. Quant à la famille de sa mère, les Guelfe, ils exerçaient dans cette même ville le métier de parfumeurs et vendeurs dagrumes. Daprès quelques actes, ils seraient génois de nation ou dorigine corse.

Une carrière dhomme de loi interrompue par la Révolution

Avec Jean-Baptiste Antoine Nourrisson devait cependant sarrêter cette belle lignée de maîtres horlogers. En effet, après avoir fait de fortes études classiques, il alla suivre à Paris les leçons de la Faculté de Droit et de retour dans sa ville natale, il ne tarda pas à y conquérir une place au barreau[4]. Enrôlé dans les armées de la République, il fit campagne doctobre 1793 à octobre 1795, dabord dans les dragons (cavalerie légère) de la Légion Allobroge, puis par incorporation, au 15° régiment de dragons.

Libéré de ses contraintes militaires, il revint à Lyon exercer encore un temps le métier des lois puisquon le retrouve à la date du 17 thermidor an IV dans cet état. Plus particulièrement, il était choisi par le citoyen Antoine Varenard, propriétaire à Fontaine sur Saône, comme procureur général et spécial afin de recueillir une portion dhéritage qui lui revenait[5].

Contre-révolutionnaire

Une hostilité certaine à la Convention

Cependant, la Révolution nallait pas être très tendre avec lui et les tribunaux révolutionnaires conservent encore quelques notices révélant son état desprit. Le 15 octobre de lan II, comparaissait le citoyen Berger, domicilié au 82 rue de la Loge, qui rapportait que «le citoyen Nourrisson fils, place du Change 8, était un des plus échauffés pour opérer la contre-révolution dans Lyon et lors de lacceptation de la constitution, il avait dit quon ne devait pas laccepter parce quelle était faite par un tas de brigands, de scélérats, dont on ferait bientôt justice et que Crancé [6] était un scélérat et que ceux qui voulaient le soutenir, il fallait les mettre en prison pour les faire guillotiner. Il a dit aussi quil fallait au plus tôt former une armée départementale pour aller écraser la Convention.» [7]. Plus loin, Berger ajoutait que Nourrisson avait été de tout temps un contre-révolutionnaire.

Plus fédéraliste que contre-révolutionnaire

Une autre source affine nos connaissances. Clerc de procureur, Nourrisson fils a été caserné pendant le siège de Lyon en 1793. Une notice précise certains éléments : «Nourrisson fils est royaliste. Après la journée du 29 mai 1793, il a été un des plus acharnés à conduire lui-même les clubistes dans les prisons[8] Nourrisson était-il véritablement royaliste ? Cest difficile à préciser dans la mesure linsurrection lyonnaise contre la Convention fut taxée de royalisme alors quelle provenait surtout dune volonté fédéraliste. Dans ces conditions, tout opposant à la Convention devenait contre-révolutionnaire et donc royaliste.

Un mariage avantageux

Une épouse richement dotée

À trente ans, Nourrisson se décidait au mariage. Le 19 floréal an VI il épousait Marie-Jeanne Roche, fille mineure de Pierre Virginie Roche et de Marie-Louise Jeanne Pradin. À cette occasion avait été établi un contrat de mariage au domicile du père de la future, quai de Marseille. Ce contrat témoigne dune réelle ascension sociale de notre homme de loi qui, à cette date, logeait au 6 de la rue Saint-Jean. Pour ce mariage, Roche avait constitué en dot et avancement dhoirie une série de bâtiments situés sur le territoire de la commune de Corneux, non loin de Gray, en Haute-Saône. Parmi ces bâtiments et biens immobiliers figuraient la ferme de La Bergerie et ses dépendances, un étang et quelques prés alentour. De plus, Roche donnait à sa fille dix mille livres, dont six mille en espèces métalliques. Par ce contrat, les époux convenaient encore dhabiter dans le domicile du citoyen Roche qui promettait de les y nourrir, chauffer, blanchir et éclairer pendant tout le temps quils demeureraient avec lui[9]. Notons encore au passage la grande présence des Bruyzet, célèbres imprimeurs lyonnais du XVIIIe siècle, dont lun de ses membres, Pierre Bruyzet-Ponthus, fut le 8 décembre 1757 parrain de Pierre Virginie Roche[10].

Une installation définitive en Haute-Saône

Cest donc par son mariage que Nourrisson devint comtois et quil alla se fixer non loin de Gray, au le sud du département de la Haute-Saône, dans une ancienne abbaye de lordre des Prémontrés dont Roche, son beau-père, avait fait lacquisition comme bien national le 20 avril 1791, au prix de 316.000 livres, ce qui, daprès les historiens haut-saônois, équivalait au revenu dune année des terres de cette abbaye[11]. Pour éviter que le domaine ne soit partagé entre Marie-Jeanne Roche et sa sœur Antoinette Julie (épouse Frin de Cormeret, puis Duchemin-Decepeaux), Roche vendit à son gendre une partie du domaine par un acte ultérieur au contrat de mariage[12]. Cest que la famille Nourrisson allait vivre plusieurs décennies jusquà la vente de 1882.

Alternativement Commissaire du gouvernement et législateur

du Consulat à lEmpire un bonapartiste convaincu

Ayant de bonnes connaissances de jurisconsulte, Nourrisson ne pouvait cependant pas rester dans cette retraite. Nommé commissaire du gouvernement près le tribunal de Gray, Nourrisson aurait été aussi conseiller municipal de Gray du 24 juillet 1800 au 21 mars 1802[13]. Il fut ensuite lun des trois députés que le département de la Haute-Saône dut envoyer au Corps Législatif (22 mars 1802-31 décembre 1806). Son élection, par le Sénat conservateur, date précisément du 6 germinal an X. Le Corps Législatif était une assemblée créée par la constitution de lan VIII (Consulat) comprenant 300 membres choisis sur la liste nationale des notabilités. Ses membres étaient nommés pour cinq ans et renouvelables par cinquième chaque année. Siégeant au Palais Bourbon, le Corps Législatif fut souvent taxé dassemblée de muets : il acceptait ou rejetait sans pouvoir les discuter lui-même les projets de loi sur lesquels le Tribunat avait formulé son avis. Dans les procès-verbaux du Corps Législatif figurent quelques actions de Jean-Baptiste Nourrisson :

  • Serment de fidélité à la constitution le 15 germinal an X ;
  • Membre dune députation au gouvernement le 17 floréal an X ;
  • Membre dune autre députation au gouvernement le 3 prairial an XI ;
  • Discussion au Tribunat le 2 vendémiaire an XI.

Nourrisson nentra donc dans la vie politique quavec le Consulat. Franc-comtois dadoption, il fait exception parmi les notables de la Haute-Saône. Cependant sa notoriété est attestée par son inscription à toutes les listes des notables. Le 28 thermidor an XIII (16 août 1805), sous le prénom erroné de Jean-Baptiste François, il est septième des trente plus imposés et figure parmi les vingt plus gros propriétaires dont une grande partie de leur fortune est composée de biens nationaux. Son cens sélève alors à 3.545 francs et il est considéré comme lun des soixante propriétaires les plus distingués. Enfin, en 1811, il est au quatorzième rang des six cents plus imposés de la Haute-Saône[14], ce qui lui permet, lors des suffrages censitaires du premier XIXe siècle, dêtre non seulement électeur, mais en plus Eligible. À la fin de son mandat, il revint à Gray il occupa jusquau 14 juin 1811 les mêmes fonctions de commissaire du gouvernement. Lors de la réorganisation de lordre judiciaire, il fut nommé procureur impérial près le tribunal criminel de Vesoul (15 juin 1811-13 juillet 1814). Daprès Louis Suchaux, il «montra dans ses fonctions les qualités dun vrai magistrat, sachant concilier avec les égards dus à la faiblesse humaine la fermeté nécessaire au maintien de lordre et à la répression des délits.» [15]

sous la Restauration du bonapartisme au partisan de la Charte

Malheureusement, si Nourrisson sétait peu à peu hissé vers les honneurs judiciaires, sa réputation de bonapartiste allait déranger la première restauration de Louis XVIII. Destitué de ses fonctions en 1814, les électeurs de la Haute-Saône devaient cependant lui prouver leur fidélité en lenvoyant lannée suivante siéger à la Chambre des Représentants des Cent-Jours. En fait, il était lélu du Grand Collège de la Haute-Saône et avait triomphé de son adversaire par 117 voix sur 151 votants et 244 inscrits[16]. Dans la foulée, il fut nommé procureur impérial à Besançon le 29 mars 1815 et ce jusquà sa nouvelle destitution, le 19 novembre suivant, pour cause de retour du roi.

Sous la restauration, son aura avait décliné et même, on sen méfiait, comme en témoigne une lettre émanant de la préfecture de la Haute-Saône au secrétaire dÉtat en date du 22 septembre 1815 : «Je vais devoir en même temps proposer à Votre Excellence de faire pourvoir au remplacement de Monsieur Nourrisson, membre du Conseil Général, et lui présenter à cet effet trois candidatures. Monsieur Nourrisson était procureur du roi près la Cour dAssises. Il fut destitué de ses fonctions bientôt après le retour du roi en 1814 ; il y a été réintégré après le 20 mars, a été député à la Chambre des Représentants jusquau 8 juillet et depuis est rentré dans son domicile de Corneux, près Gray. Il paraît que la conduite et les opinions de Monsieur Nourrisson donnèrent lieu à sa destitution des fonctions de procureur du roi et il semble que les mêmes motifs auraient le faire écarter du Conseil Général du département. Je nai pas connaissance que depuis quil est rentré dans son domicile il se soit rendu coupable de quelque action répréhensible, mais il excite la défiance des personnes attachées au roi ; il a été considéré pendant les trois mois dusurpation comme lun des chefs les plus actifs et les plus prononcés du parti de la rébellion et comme étant particulièrement dévoué à Bonaparte. On conserve encore la même opinion sur son compte et lon massure même que quelques jours avant son départ de Paris, après la dissolution de la Chambre des Représentants, il avait excité les soupçons de la police qui crut devoir faire visiter ses papiers»[17]. La réponse du pouvoir royal ne tarda pas et le 8 octobre 1815 Nourrisson était remplacé par le comte de Marmier au Conseil Général de la Haute-Saône dont il était membre depuis lorigine et quil avait présidé à deux reprises sous lEmpire[18].

Toutefois, si la préfecture de la Haute-Saône le taxait de farouche bonapartiste en 1815, il devait appartenir sous le règne de Louis XVIII au parti constitutionnel, celui de Royer-Collard, dont le programme était une application stricte de la Charte. Après avoir échoué comme candidat à la Chambre des Députés le 13 novembre 1820, avec 63 voix contre 68 à lélu, Monsieur Bressand de Raze, puis le 28 janvier 1822 dans le deuxième arrondissement de la Haute-Saône (Vesoul) avec 91 voix contre 115 à lélu, Monsieur Galmiche (il sagissait de remplacer le baron Martin, démissionnaire), il réussit à devenir député de Gray le 20 novembre 1822 par 137 voix sur 259 votants et 310 inscrits, contre 94 à Monsieur Brusset et 25 à Monsieur Garnier, maire de Gray[16]. Il vota alors avec lopposition, contre les ultras, jusquen 1824 et quitta ensuite la vie politique nationale. Cependant il fut encore conseiller municipal de Corneux en 1826 et adjoint au maire de cette commune en 1835[19]. .

Homme lettres et agronome

Devenu libre, il se livra à la culture des lettres, acheva de mettre en vers Lhymne au soleil de labbé de Reyrac[20], travail quil avait commencé dès 1809[21]. Occupé par les soins quexigeait son domaine de Corneux, aimé et estimé de ses voisins qui venaient le consulter dans leurs affaires et profitaient de ses conseils, il sadonnait encore à lagronomie et voyait dun œil paisible sécouler une vie quil se rendait le témoignage de lavoir consacrée au bien public. Daprès Jouy[22], il était totalement absorbé par lagronomie en 1826 et figurait au nombre des agronomes les plus instruits du pays. Dailleurs il était correspondant du Conseil dagriculture et membre quasi fondateur de la société dagriculture de la Haute-Saône[23] dont il aurait été vice-président en 1812[14].

Quant à sa bibliothèque, très fournie et variée, elle se composait denviron huit cents volumes rien que pour le domicile de Corneux, dont une étude minutieuse pourrait facilement éclairer lesprit de Nourrisson. Cependant, sans entrer dans le détail, il est permis de déterminer ses centres dintérêt. Bien sûr, la jurisprudence (Bulletin des lois, Collection des décrets, Œuvres de dAguesseau) figure au premier plan de ses préoccupations, activité professionnelle oblige. , le droit est conçu dans une dimension historique partant des Romains jusquau début du Second Empire. Lhistoire des grands hommes est aussi fort présente : Saint Louis, Néron, Alexandre le Grand. Une multitude de dictionnaires, latin-français, étymologique, historique, forment encore des angles dattaque précieux pour une belle appréhension du monde. Lantiquité est abondamment exploitée avec les œuvres de Thucydide, Xénophon, Polybe,Hérodien ou Zosime, tous historiens et donnant une conception morale de lhistoire ; tandis que quelques volumes sintéressent à lhistoire de lÉglise ou aux deux Testaments.

Plus marquante encore est une multitude douvrages dhistoire contemporaine sur la révolution, lEmpire, les Restaurations. Citons pêle-mêle : Lhistoire de la révolution, du Consulat et de lEmpire dAdolphe Thiers, Lhistoire de la révolution de Louis Blanc,les œuvres de Proudhon, sans compter avec le Mémorial de Sainte-Hélène. Ainsi la bibliothèque de cet homme cultivé témoignerait dune belle ouverture desprit dans la mesure nombre douvrages proposent une vision de lhistoire très différente les unes des autres puisque ces différents auteurs se situent entre la droite bonapartiste, lorléanisme modéré et la gauche socialiste, sinon anarchiste. Remarquons encore que la littérature y est fort peu présente ; seul Corneille échappe à cette sanction côtoyant quelques cartes de géographie, dailleurs régionales puisque centrée sur la Franche-Comté[24].

Bibliophile, Jean-Baptiste Antoine Nourrisson sétait confectionné un bel ex-libris. Ce dernier est décrit ainsi par A.Maire en 1907 daprès la collection de Monsieur Ernest André, de Gray : «Cartouche Louis XVI, échancré, penché à senestre, renfermant un écu ovale : dazur au pélican dargent, avec ses petits du même, sur un tertre de sinople, à la bordure dargent ; au-dessous, reposant sur une banquette, les attributs de la magistrature et de larmée : toque, balance, glaive, chapeau à trois plumes des députés au Corps Législatif, casque, sabre et croix ; plus bas, on lit ce distique : Quam foro ego castris unam coluique senatu / Sola colant patriam nunc mea vota domi »– 1815[25].

1829 fut lannée du réveil politique : en décembre, Nourrisson se distingua comme signataire de lacte de lassociation franc-comtoise pour le refus de limpôt. Lannée suivante, la révolution de 1830 allait le replacer dans la vie publique, sur la scène régionale. Nommé le 28 octobre 1830 conseiller à la Cour d'appel de Besançon, il y «occupa sur le champ le rang que lui méritait ses lumières, la droiture de son jugement et la fermeté de son caractère»[26]. Il exerça ses fonctions jusquà un âge très avancé puisquil ne quitta la place que le 19 juin 1852, âgé de 84 ans.

Un riche propriétaire foncier

Sur un plan foncier, Nourrisson, nous lavons dit, était un gros propriétaire. De ses origines lyonnaises, il avait gardé un temps limmeuble sis à Lyon au 8 de la place du Change qui lavait vu naître. Cet immeuble avait été acquis le 4 messidor an IV par six personnes dont sa mère et lui-même sur le bien national de lémigré Pupil de Myons[27]. Peu à peu, Nourrisson avait racheté lensemble des parts et, fixé définitivement à Gray, il vendit cet immeuble le 4 janvier 1813[28] pour la somme de 48.000 francs à deux personnes, dont 12.000 francs à François Xavier Thiaffait, lancien repreneur du commerce dhorlogerie Nourrisson, après que sa sœur et son mari Henry Sandoz, se soient installés en Corse.

Plus étendu était son domaine de Corneux. Comme nous lavons dit, cest dans cette ancienne abbaye de lordre de Prémontré, profondément transformée au XVIIIe siècle, que vécurent au XIXe siècle, outre le couple Nourrisson/Roche et leurs sept enfants, la sœur de Marie Jeanne Roche, ses parents, la mère de Jean-Baptiste Nourrisson (Jeanne Marguerite Guelfe, décéda à Corneux en lan XIII), ainsi quune de ses tantes, Catherine Françoise Guelfe présente à Corneux en 1809 et 1810, sans compter deux domestiques[29].

Cette demeure, construite au début du XVIIIe siècle dans lancien goût cistercien, présentait un quadrilatère fermé au Nord par une église dont le clocher sélevait à plus de quarante mètres. Jusquà la révolution, le bâtiment servit à lordre des Prémontrés ou Norbertins, régi par la règle de Saint Norbert qui tentait de concilier les exigences de la vie monastique avec celles des curés de campagne. Quand Roche acheta lédifice, il lamputa de son église et transforma labbaye en château. La façade Nord, désormais ouverte, fut fermée par une superbe grille, malheureusement emportée par un cyclone au début de ce siècle. Lédifice parfaitement symétrique dans ses trois ailes comportait un étage. Chacune des ailes souvrait sur les environs par onze fenêtres. Quant à lancien cloître, il sarticulait au rez-de-chaussée autour dune galerie tandis que létage était percé de cinq fenêtres par aile.


Outre cette demeure, la propriété se composait de cinq cents hectares en prés, bois, vignes et étangs, situés majoritairement aux abords immédiats de lancienne abbaye. Sur ce domaine existaient encore une tuilerie et plusieurs fermes, dont celles de la Basse-Cour et de la Bergerie, cette dernière située sur la route reliant Corneux à Beaujeu. La succession de ce domaine fut assez complexe. Sans entrer dans les détails, on peut toutefois remarquer un premier partage en indivision le 30 janvier 1843[30]. Jean Baptiste Nourrisson se trouvait copropriétaire avec ses enfants, suite au décès de Madame Nourrisson, née Roche. Le 10 mars 1849[31]. un second partage était envisagé car lindivision avait cessé dès janvier 1848 dans la mesure Léonce Nourrisson, troisième fils du couple Nourrisson/Roche, avait besoin dargent. Le 23 octobre 1851, Nourrisson père léguait à ses enfants, moins Léonce, lusufruit quil avait sur le domaine[32]. Enfin le 6 février 1853, les quatre enfants Nourrisson, à savoir Firmin, Catherine, Virginie et Gaston, décidaient de sortir totalement de lindivision et constituaient quatre lots. À cette date, lensemble du domaine était évalué à 552.816 francs.

Chevalier de lEmpire

Notons encore que Jean Baptiste Nourrisson fut fait chevalier de lEmpire. Le 11 septembre 1813, il recevait de lempereur des lettres patentes. À cet effet, il reprenait les anciennes armes familiales en les modifiant légèrement. Désormais, il porterait «de gueule au pélican dor soutenu dun tertre de sinople à la bordure dazur, chargé du signe des chevaliers de la Réunion» [33]. Cest donc par sa décoration de chevalier de la Réunion que Nourrisson fut anobli. Cet ordre avait été créé par décret impérial du 18 octobre 1811 et était destiné à récompenser les services rendus dans les fonctions civiles et judiciaires des habitants des départements nouvellement réunis à la France. Il na pas survécu au Premier Empire. Parmi les autres décorations, Nourrisson fut également fait chevalier de la légion dhonneur. En 1853, il sollicitait le ministre de la Justice par lintermédiaire du duc de Bassano afin dêtre promu au grade dofficier de la légion dhonneur. En vain, on lui répondit quil ny avait pas de place pour les conseillers honoraires. Lannée précédente, il avait déjà accompli la même démarche en adressant le 29 avril 1852 une lettre au Garde des Sceaux[34], retrace, de façon humble et très longuement la carrière et les motivations dun homme public qui traversa tant de régimes :

Âgé de 87 ans, Jean-Baptiste Nourrisson décéda à Besançon dans sa maison sise au 1 de la rue des Bains du Pontot, dans la communion des fidèles, le 24 juillet 1855. Le lendemain, son corps était inhumé au cimetière de Saint-Broing dans la même concession[35]. reposait depuis le 11 mai 1841 son épouse, Marie Jeanne Roche, elle aussi décédée à Besançon, dans cette même maison. Tous deux reposent encore au cimetière de St-Broingt (Haute-Saône).


Notes et références

  1. Passeport pour lintérieur, découvert par Madame Frédéric dans les archives municipales de Saint-Broing.
  2. Cf Sine Dolo 1, p. 32, se voit son ascendance complète
  3. Sine Dolo 1, p. 129-134.
  4. [[Suchaux (L.), Galerie biographique du département de la Haute-Saône, Vesoul, 1864, p. 408.
  5. AD 69, 3E 9528, minutes Fiard, Lyon, an IV.
  6. Dubois-Crancé avait été un membre influent au comité de la guerre sous la Convention, on lui doit lamalgame complété ensuite par Merlino par lembrigadement (BN 8 Le 38/411 8921 067) ; ces deux notions sont souvent confondues : lamalgame consistait à soumettre aux même règles les armées de lignes et les corps de volontaires tandis que lembrigadement, abandonnant la notion de régiment, concept dAncien Régime, avait pour but de lui substituer des demi-brigades formées dun bataillon de ligne et de deux bataillons de volontaire..
  7. AD 69, 42 L 82, Tribunal révolutionnaire|tribunaux révolutionnaires]], registre des dénonciations du Comité de surveillance révolutionnaire de larrondissement de Marat, ci-devant du Change, folio 128.
  8. AD 69, 42 L 97, tribunaux révolutionnaires.
  9. AD 69, minutes Bombes de Villers, Lyon, 19 floréal an VI.
  10. AML, Saint-Nizier, 8 décembre 1757.
  11. Ce qui semble beaucoup ; disons que laffaire était très rentable.
  12. Note de Monsieur Henri Sexe à Sine Dolo.
  13. Cl-Isabelle Brelot, Grands notables du Premier Empire-Jura, Doubs, Haute-Saône, Paris 1979, p. 112. et AN, BB/25/235, dossier de la carrière judiciaire de Nourrisson.
  14. a et b Brelot, Op. cit., p. 112.
  15. L.Suchaux, Op. cit., p. 409.
  16. a et b Dictionnaire des parlementaires français, Paris, 1891.
  17. AD 70, 2M 39, Conseil Général de la Haute-Saône, an XI-1833.
  18. AN, BB/25/235, dossier de magistrature Nourrisson
  19. AD 70, 2M 77, maires adjoints conseillers municipaux de larrondissement de Gray, 1793-1836.
  20. Littérateur français. Membre de lInstitut, il composa son Hymne au Soleil en 1777. Ce poème, écrit en prose poétique avec plus délégance que de chaleur, obtint un très grand succès. Il fut mis en vers latins par Mestivier (Orléans, 1778) et en vers français par Offrir (Paris, 1823).
  21. Suchaux, Op. cit., p. 409.
  22. Jouy (M.E.), Lhermite en province, 1826, p. 255.
  23. Malheureusement, les délibérations de cette société ne nous renseignent pas sur ses préoccupations.
  24. AD 25, minutes Thaler, Besançon, inventaire du mobilier de Corneux, 29-31 octobre 1855.
  25. A.Maire, Documents pour servir à lhistoire et au classement des ex-libris franc-comtois in Bulletin de la société démulation de Gray, 1907, p. 237.
  26. Suchaux (CN), Op. cit., p. 409.
  27. Charlety (S.), Documents relatifs à la vente des biens nationaux-Département du Rhône, Lyon, 1906, notice 2409.
  28. AD 69, 3E 12202, minutes Dugueyt, Lyon, 1er semestre 1813.
  29. Recensement de Corneux-Saint Broing, 1809-1810 et AD 25, minutes Thaler, Besançon, 20 février 1849.
  30. Id.
  31. AD 25, minutes Thaler, Besançon, 20 février 1849.
  32. Acte sous seing privé, Gray, 23 octobre 1851, document transmis par Henri Sexe.
  33. Vicomte A.Révérend, Armorial du Premier Empire, Tome III, Paris 1974, p. 329.
  34. Intégralement publiée par Sine Dolo, op ; cit. Cette lettre est déposée in AN, BB 25/235, lettre du 29 avril 1852.
  35. Concession perpétuelle du 25 juillet 1853, valable pour lui, sa femme, son beau-père et sa mère.

Articles connexes

Liens externes

  • Jean-Baptiste Antoine Nourrisson sur roglo.eu. base de données de Geneweb.
  • site sine dolo Sine Dolo est une société généalogique et historique. Tous les deux ans, lassociation fait paraître un fort volume de mémoires consultables à la BNF, aux Archives de lAin, du Rhône, à la Bibliothèque Municipale de Lyon, aux Archives municipales de Lyon, à la Société généalogique du Lyonnais et au Musée Gadagne à Lyon.

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