Histoire de la bande dessinée

Histoire de la bande dessinée

L’histoire de la bande dessinée pour être générale doit au moins être décrite aux regards des trois principaux pôles de la création artistique de la bande dessinée, l’Europe qui a vu sa création, les États-Unis à qui nous devons sa popularité et l’Asie qui représente aujourd’hui la plus grosse production de bandes dessinées avec le Japon et la Corée, et remettre la création de la bande dessinée dans le contexte qui l'a vu naître.

Sommaire

Contexte culturel

En Europe

Avant l’invention de la lithographie par l’Allemand Aloys Senefelder en 1796, les artistes graphistes n'étaient pas uniquement des dessinateurs, c'était à l'image d'Albrecht Dürer des graveurs. Ils devaient passer soit par l’intermédiaire de la sculpture d’une plaque de bois, la xylographie, soit de la gravure d’une feuille de cuivre, la taille-douce ou l’eau-forte, pour produire et reproduire leurs œuvres. Ces techniques avaient parfois pour effet de retirer toute spontanéité au trait. Avec la lithographie, en permettant le dessin direct au crayon gras ou à l’encre grasse, A. Senefelder libère la main de l’artiste qui peut ainsi se passer de l’étape de la gravure pour obtenir une estampe.

Marthe, la bonne petite ménagère (2e version), Imagerie d'Épinal Pellerin no 922, XIXe siècle.

Dans toute l'Europe existe une littérature populaire par estampes qui présentent souvent un début de structure narrative. En Catalogne, à partir du XVIIe siècle, se développe la publication des auques. L'auca, en catalan « oie », vient du jeu de l'oie dont elle reprend le principe de dessins successifs sur une feuille imprimée : rapidement elle se codifie en une suite de 48 dessins accompagnés de textes rimés, qui racontent une histoire sur des thèmes extrêmement variés. Le tradition des auques s'est perpétuée jusqu'à nos jours en Catalogne.

En France, dès 1796, la même année que l'invention de la lithographie, les premières images sont imprimées en série par L'Imagerie d'Épinal. D’abord imprimées avec des planches de bois gravées et coloriées au pochoir, elles se présentent généralement sous la forme de dessin pleine page et reprennent des sujets populaires (images pieuses, chanson, comptines, devinettes, histoire de France, etc.) mais rapidement apparaissent des planches de vignettes comportant un texte explicatif disposé sous la vignette. En 1820, le fondateur Jean-Charles Pellerin adopte la lithographie et 10 ans plus tard la technique de la chromolithographie de Godefroy Engelmann. Les images « pleine page » prennent rapidement le nom de « chromos », synonyme de couleurs vives, pour nous conter les hauts faits de l'histoire de France. Les pages de vignettes sont les traditionnelles images d'Épinal. Dès qu'elles deviennent des planches composées d'images ayant un enchaînement logique, ce sont enfin des « histoires en images ».

Des dessinateurs célèbres tels que Caran d'Ache et Benjamin Rabier travaillent pour l’Imagerie d’Épinal. Ces planches, souvent reliées sous forme de livres ou d'albums cartonnés, sont commercialisées par des colporteurs qui assurent leur succès, entre 1870 et 1914 plus de 500 millions de planches sont vendues[1]. Jean-Charles Pellerin fut sans nul doute le créateur des « histoires en images » et un précurseur des maisons d'édition de bande dessinée.

John Bull par James Gillray (6 oct 1801) : le premier personnage récurrent.

En Angleterre à la fin du XVIIIe siècle, se développent les dessins satiriques et les caricatures. Les clients et les sujets (la Révolution française, l’opposition de la France et de l’Angleterre, la bourgeoisie, etc.) ne manquent pas. L'utilisation de la lithographie permet l’explosion de l’estampe politique et/ou sociale dans laquelle excellent Thomas Rowlandson, George Cruikshank et principalement James Gillray qui connaît un grand succès populaire avec la critique de la politique française[2]. Gillray est l'un des premiers dessinateurs à utiliser des personnages récurrents, comme John Bull (représentant le peuple anglais créé par John Arbuthnot en 1712) ou Britannia (symbolisant la nation anglaise) et le phylactère moderne comme support à la parole de ses personnages caricaturés[3].

À la fin du XIXe siècle, à la différence des États-Unis où la presse est d’information et familiale, la presse française est une presse d’opinion à destination d’un lectorat adulte et politisé, certains journaux se spécialisent dans le genre satirique faisant largement appel à la caricature à l'exemple de Honoré Daumier dans Le Charivari ou le genre roman populaire avec ses feuilletons souvent illustrés tel Mon Journal dans lequel débute en 1887 Christophe comme illustrateur.

Aux États-Unis au XIXe siècle

New York World de Joseph Pulitzer datant de Noël 1899.

Aux États-Unis, on trouve l’origine de la bande dessinée dans la concurrence acharnée que se livre les titres de presse à la fin du XIXe siècle. La presse à plat, utilisée à l’origine par Johannes Gutenberg, ne permettait d’imprimer qu’une centaine de cahiers de huit pages par heure. L’invention, dès la fin de la guerre de Sécession en 1865, par l’américain William A. Bullock de la presse rotative, utilisée par le Philadelphian Inquirer autorise à imprimer jusqu’à 8000 journaux à l’heure.

Ce développement est conforté par l’invention de la linotype. Avant l’invention de la linotypie par l’américain d’origine allemande Ottmar Mergenthaler en 1886, l’impression des journaux pouvait difficilement dépasser huit pages du fait de la lenteur de la composition caractère par caractère (1000 à 1500 signes par heure). La linotype, grâce à la composition au clavier et à la fonte automatique ligne par ligne (8000 à 15000 signes par heure), libère la composition des textes de presse en alignant sa productivité sur les nouvelles presses rotatives.

L’utilisation des presses rotatives interdit l’utilisation de la xylographie pour reproduire un dessin au trait. C’est la généralisation de la phototypogravure inventée en 1850 sous le nom de « pané iconographie » par un lithographe français Firmin Gillot qui permet de reproduire sur les presses rotatives les dessins au trait et même assez rapidement des demi-teintes couleurs dès 1876, grâce à la similigravure mise au point par son fils Charles Gillot qui autorise aussi la reproduction photographique.

Ces progrès techniques font rentrer la presse américaine dans l’ère industrielle. Un essor économique important, soutenu par une forte immigration, transforme la presse en véritable industrie aux mains de quelques magnats et principalement de William Randolph Hearst et de Joseph Pulitzer.

Au Japon

Au Japon, l'époque d'Edo (vers 1600, jusqu'en 1868) se caractérise notamment par une fermeture du pays sur lui-même, le Japon ne conserve que quelques liens avec la Corée. Les étrangers ne sont pas admis sur le sol japonais, sous peine de mort, exceptés certains contacts restreints avec des marchands chinois et hollandais sur l'île de Dejima.

couverture et planche du huitième volume de la manga de « Gakyōjin » Hokusai 1817

Pendant cette période, la culture artistique japonaise ne subit aucune influence occidentale. L'art graphique japonais est alors riche avec les emakimono d’origine chinoise (XIIe siècle) et, avec la montée de la culture populaire pendant l'ère Edo, un type d'estampes nommé ukiyo-e devint un art majeur. Initialement, ces estampes sont exclusivement réalisées à l’encre de Chine puis certaines épreuves sont colorées au pinceau. Au XVIIIe siècle Suzuki Harunobu développe la technique d’impression polychrome pour produire des nishiki-e. C'est en 1814 que « Gakyōjin » Hokusai, « le Fou de dessin », présente certaines pages de ses croquis, comportant aussi des caricatures (au sens occidental du terme), dans des cases accompagnés de texte sous le nom de Manga.

L'isolement de l'ère Edo dure 200 ans, jusqu'à ce que le Commodore Matthew Perry force le Japon à s'ouvrir au commerce avec la convention de Kanagawa, obtenue par la corruption en 1854, et finit par aboutir en 1867 à l'ère Meiji. La restauration Meiji initie de nombreuses réformes économiques, sociales et militaires. Elles transforment le Japon en l'ouvrant à l'influence occidentale.

En 1876, l'École d'Art Technologique ouvre ses portes en appelant des professeurs italiens pour enseigner les méthodes européennes, même si un mouvement inverse mené par Okakura Kakuzo et l'américain Ernest Fenollosa encourageait les artistes japonais à conserver les thèmes et les techniques traditionnels tout en créant des œuvres plus en accord avec les goûts contemporains. À l'heure actuelle, cette opposition entre les deux volontés artistiques, Yôga (peinture de style occidental) et Nihonga (peinture japonaise), sont encore d'actualité.

L'invention de la bande dessinée et son internationalisation (de 1827 aux années 1880)

Née en Suisse avec les histoires de Rodolphe Töpffer (voir l'Histoire de monsieur Jabot), la première forme de bande dessinée se diffuse très rapidement dans de nombreux pays d'Europe et d'Amérique. Publiée d'abord en albums, elle se développe ensuite, sur le modèle allemand, essentiellement dans des journaux satiriques, ou plusieurs bandes sont alors présentes à chaque page. Ces histoires, satiriques ou humoristiques, restent peu éloignée, jusqu'à la fin des années 1880, des types d'histoires publiées par Töpffer. Toujours en noir et blanc, parfois muettes, les bandes dessinées d'alors sont quasi-exclusivement accompagnées de textes présents sous les cases, allant de la simple indication de dialogue (elles ont alors un rôle similaire au phylactère) à des explications plus développées. Cependant, ces textes, très courts (une phrase en général), n'ont qu'un rôle utilitaire, ce qui permet de les différencier de ceux des textes illustrés. L'Asie, et particulièrement le Japon, commencent à s'ouvrir à l'Occident sans développer la bande dessinée. En Afrique, celle-ci reste inexistante.

L'énorme succès de Max und Moritz de Wilhelm Busch, publié en Allemagne en 1865, montre le fort potentiel de la bande dessinée auprès du public enfantin. Les dessins de cette œuvre majeure sont accompagnés d'un texte en vers apposé après-coup, assez redondant, qui annonce un retour vers la prédominance du texte dans les littératures dessinées européennes enfantines, majoritaires sur ce continent après la fin des années 1880. Busch et d'autres illustrateurs allemands annoncent un style plus rond, moins marqué par l'héritage des caricaturistes du siècle précédent, très marqué chez les töpffériens. Ceci est un des faits majeurs de la période, annonciateur du futur de la bande dessinée en Europe, avec une inféodation au texte qui conduit à rendre la bande dessinée moins vive et à la dévaloriser au yeux de ceux qui aiment la littérature.

Rodolphe Töpffer, premier auteur de bande dessinée en 1827

Une planche d'Histoire d'Albert d'apparence très moderne

Rodolphe Töpffer, célèbre écrivain et pédagogue suisse du début du XIXe siècle, dessine en 1827 le brouillon des Amours de Monsieur Vieux Boix puis réalise en 1831 l’Histoire de M. Jabot, histoires qu'il fait circuler dans son pensionnat et dans les milieux littéraires européens[4]. Ces histoires se présentent sous une forme inédite : le dessin, en noir et blanc, très inspiré par la caricature anglaise du XVIIIe siècle (William Hogarth, Thomas Rowlandson, James Gillray, etc.), est disposée en bandes, une par page ; les cases, non uniformes, sont séparées par un trait vertical ; le texte est disposé sous la forme d’un récitatif en dessous du dessin. Ni séquence de caricatures politiques, ni texte illustré, M. Jabot est une nouveauté, que Töpffer propose de nommer « littérature en estampes ». Cette conscience par l'auteur d'une originalité de son mode d'expression, la présence d'un héros, puis la publication du récit en album en 1833[5], ainsi que du caractère indissociable des images et du texte dans la narration[6] font de cette œuvre la première bande dessinée.

Avant même la parution du premier album, les éloges fusent. Goethe, auquel Frédéric Soret avait transmis fin 1830 deux brouillons de Töpffer, en dit, selon Eckermann[7] : « C'est vraiment trop drôle ! C'est étincelant de verve et d'esprit ! Quelques-unes de ces pages sont incomparables. S'il choisissait, à l'avenir, un sujet un peu moins frivole et devenait encore plus concis, il ferait des choses qui dépasseraient l'imagination[8]. » Ces encouragements[Note 1] conduisent Töpffer à créer six[Note 2] autres bandes dessinées de 1827 à 1845.

Töpffer double également ses créations d'un premier corpus théorique. On trouve des réflexions concernant la « littérature en estampes » dans Réflexions à propos d'un programme (1836), ses textes de présentation de L'Histoire de Monsieur Jabot ou sa correspondance (particulièrement avec Cham)[4]. La parution en 1845 de l'Essai de physiognomonie, rétrospectivement le premier essai consacré à la bande dessinée, montre que Töpffer « a (…) perçu l'essentiel de sa spécificité » : interdépendance des dessins et du texte, importance du personnage, dessin narratif, art[Note 3] aux possibilités identiques à celles de tous les autres, etc.[9].

Cependant, c'est avec la parution en livre des histoires de Töpffer, selon le procédé autographique, qui permet de garder la spontanéité du trait, que la « littérature en estampes » se diffuse[10]. Le premier album, Monsieur Vieux Bois, tiré à 500 exemplaires en 1833[Note 4], à un prix relativement cher, est épuisé en un an. Les albums sont rapidement diffusés en France, redessinés, pour des raisons techniques, par Cham « dans un style plus raide et laborieux » lors de leur parution dans le journal L'Illustration. En 1846, les six premières histoires sont publiées en allemand en un volume, précédées d'une introduction du réputé professeur d'esthétique Friedrich Vischer. Avant la fin des années 1840 étaient également parues des traductions néerlandaises, anglaises (en 1842 en supplément de la revue américaine Brother Jonathan[Note 5], puis en album en 1845 en Grande-Bretagne), danoises (1847), etc.[4]. En 1860, les éditions Aubert, éditeur du Charivari, publient les œuvres originales de Töpffer en France. Cette diffusion internationale des histoires du fondateur de la bande dessinée suscite la création de nouvelles œuvres dans nombre de pays.

Le développement international (années 1840 – années 1880)

Dès les années 1840, de nombreux auteurs publient des bandes dessinées, très influencées par Töpffer[11] : albums d'histoires satiriques, fustigeant généralement la petite-bourgeoisie, dans un style nerveux. Histoire de M. Lajaunisse, du français Cham en 1839, Robinson, du suisse Charles DuBois-Melley en 1842, Le Déluge à Bruxelles, du belge Richard de Querelles en 1843, Les Travaux d'Hercule du français Gustave Doré en 1847 (suivi de Dés-agréments d'un voyage d'agrément en 1851), La Vie publique et privée de Monsieur Réac de Nadar en 1848. Les éditions américaines de Töpffer, plus ou moins pirates, suscitent également des émules : Journey to the Gold Diggins of Jeremiah Saddlabags des frères James A. et Donald F. Read en 1849, The Adventures of Mr. Tom Plump de Philip J. Cozans et l'anonyme The Wonderful and Amusing Doing by Sea and Land of Oscar Shangai l'année suivante[12].

La bande dessinée se diffuse également très rapidement en Allemagne, autour de Munich avec l'hebdomadaire satiriques le Fliegende Blätter (à partir de 1844) et les Müncherner Bilderbogen (sorte d'équivalent munichois des images d'Épinal)[11]. Cette insertion des bandes dessinées dans la presse amène deux innovations : un nouveau format, avec l'apparition des histoires en une page ; et la bande dessinée muette, dont le maître est Wilhelm Busch. Les mises en pages oscillent entre le gaufrier classique (le plus pratique pour les revues) et le type illustratif qui dominait alors l'illustration populaire : des compositions « gothiques » très chargées[13]. Busch innove en 1865 avec Max und Moritz, où les habituels portraits en pieds laissent parfois place à des gros plans, et où le dessin, plus rond, se détache des modèles du XVIIIe siècle suivis par Töpffer. Ce récit, au sein duquel chaque case est accompagnée de quatre vers, non nécessaires à la compréhension de l'histoire, est la première « Bildergeschichte » (histoire en images) à remporter un grand succès auprès des enfants (bien qu'elle soit publiée dans le Fliegende Blätter), et le premier très gros succès de librairie du genre.

Bande dessinée d'Arthur Burdett Frost parue en 1881.

Ce modèle allemand de la publication de bandes dessinées très courtes, ou en feuilleton, au milieu de caricatures et de textes humoristiques, beaucoup plus nombreux, dans des périodiques généralement satiriques lus par les adultes, se répand dans le monde entier. À partir de 1867, Charles Henry Ross et Marie Duval animent en Grande-Bretagne dans Judy les aventures du prolétaire Ally Sloper, préfigurant, « sous certains aspects », les Pieds Nickelés[11]. Une première revue consacrée au strip cartoon, Funny Folks, naît en décembre 1874[14]. Aux Pays-Bas, c'est Jan Linse qui lance en 1874 la bande dessinée dans l'Humoristisch Album[15]. En France, une deuxième génération d'auteurs se met, sur le modèle allemand, à publier des histoires de type töpfférien dans des journaux satiriques (comme Le Chat noir à partir de 1882) destinés à des lecteurs adultes : Gabriel Liquier (Voyage d'un âne dans la planète Mars, 1867), Léonce Petit, Stop, Henri Émy, Albert Humbert, etc.

Aux États-Unis, après Töpffer, Busch est traduit à partir 1862. Le Harper's New Monthly publie à partir du milieu des années 1860 des auteurs locaux comme John McLenan (et ses aventures de Mr Slim, « gags » en une page très töpffériens) et Frank Bellew[16]. La parution de Max und Moritz, en 1870, marque le public, comme le montrent vingt-sept ans plus tard les Katzenjammer Kids. Puck, hebdomadaire satirique fondé en 1873 publie quelques histoires de Busch. À partir de 1879, le Harper's New Monthly publie les premiers récits d'Arthur Burdett Frost. Ceux-ci « introduisent d'entrée de jeu une nouvelle façon de raconter en images, qui insiste sur la répétition exacte des cadrages de chaque image et s'intéresse à l'intervalle de temps entre les vignettes, (…) aux transformations dynamiques qui s'opèrent entre deux images au cadre identique[17]. » Frost, en insistant sur le mouvement entre les images annonce la bande dessinée kinétoscopique pratiquée par Frederick Burr Opper ou McCay (Petit Sammy éternue) mais également toute la bande dessinée moderne, où l'art de l'ellipse occupe une part importante.

Après quelques premiers essais, comme des adaptations d'histoires francophones dans les années 1850, la bande dessinée apparaît au Portugal en 1872 Apontamentos sobre a Picaresca Viagem do Imperador de Rasilb pela Europa de Rafael Bordalo Pinheiro. En Espagne, après quelques rares pages en 1859 ou 1866, la bande dessinée s'impose à partir de 1873 avec les premières histoires publiées dans l'hebdomadaire madrilène El Mundo cómico, où s'affirme José Luis Pellicer, puis plus tard dans les périodiques humoristiques Granizada ou La Caricatura, avec Mecachis (El Día de la boda, 1885) ou Apeles Mestres[18].

La diffusion de la bande dessinée dans le nouveau monde ne se limite pas aux États-Unis, et là aussi, des périodiques satiriques publient de temps à autres, des histoires en image, comme en 1859 The Great Moral History of Port Curtis, in twelve Chapter dans le Melbourne Punch Almanack, histoire qui reste cependant encore très dépendante du texte[19]. Dans les années 1880, le Melbourne Punch et Table Talks publient plus régulièrement des bandes dessinées, tout comme les argentins El Mosquito (fondé en 1863) ou Don Quijote (fondé en 1863)[20]. Au Brésil, c'est Angelo Agostini qui publie les premières bandes dessinées locales, As Aventures de Nhô Quim ou Impressoes de uma Viagem à Corte (1869), As Aventuras de Zé Caipora (1883), etc.[21]. Dans ces pays, l'influence européenne reste forte, la production de bande dessinée sporadique, et la lecture réservée aux adultes.

En Asie, l'introduction de la culture occidentale dans le dernier tiers du XIXe siècle, et l'arrivée quasi-simultanée du modèle des revues satiriques ou laissant place à des dessins satiriques (comme Hanseongsunbo en Corée, 1883)[22] ne marquent pas pour autant d'apparition de bandes dessinées, ni importées, ni locales.

Un développement intimement lié aux progrès techniques

La bande dessinée devient un medium de masse (années 1890 aux années 1930)

À la différence des États-Unis qui n’a jamais connu d’encadrement et qui développe une presse, majoritairement pour ne pas dire exclusivement, d’information, beaucoup d’autres pays, suite aux combats politiques et aux agitations ouvrières, développent une presse d’opinion faisant une place importante à la satire et à la caricature politique. Le Japon pour des raisons différentes, l’ouverture à l’influence occidentale, voit aussi le développement d’une presse d’opinion et satirique.

Les dernières années du XIXe siècle vont voir l’explosion du document imprimé sous toutes ses formes grâce à l’amélioration des moyens techniques d’impression. La presse quotidienne multiplie ses pages et baisse ses prix de vente. D'une façon générale la presse se diversifie mais en France, au milieu d'une presse pour adulte, naît une presse pour la jeunesse.

Aux États-Unis de 1879 à 1930

Les funnies

William Randolph Hearst et de Joseph Pulitzer tentent de fidéliser leur lectorat en publiant dans l'édition dominicale des pages d’humour, les funnies (dessins humoristiques). Ces pages portaient le nom de comic supplément. Les dessinateurs, au fil des années, vont créer des personnages récurrents puis développer les dessins en deux ou trois cases disposées horizontalement : c’est le début des strips (bandes comiques). Devant le succès, les patrons de presse font paraître des strips chaque jour de la semaine, l'édition du dimanche reprenant les strips de la semaine avec un « bonus » : le top qui consistait en un strip original qui reprend souvent un personnage secondaire.

C'est en 1892 que W. Hearst fait paraître le premier strip dans son premier journal, que son père vient de récupérer en paiement d'une dette de jeu, le San Francisco Examiner. James Swinnerton crée à cette occasion les premiers dessins d’animaux humanisés Little Bears and Tykes[23].

The yellow journalism

the Yellow journalism
The Yellow Kid dans le New York Journal du 8 novembre 1896

Joseph Pulitzer, le mentor de W. Hearst, publie en 1894, dans le New York World, le premier strip en couleurs dessinée par Walter McDougall[24]. C’est à la même date et dans le même journal que Richard F. Outcault dessine Hogan’s Alley, créée quelque temps avant dans le journal Truth, dans lequel un gamin des rues est habillé d’une chemise de nuit bleu qui deviendra en 1895, compte-tenu des impératif de fabrication, jaune. Rapidement le petit personnage devient la coqueluche des lecteurs qui le nomme Yellow Kid[25].

Le succès de Yellow Kid dope la vente du New York World attisant la convoitise de W. Hearst. La concurrence féroce que se livre W. Hearst et J. Pulitzer aboutit en 1896 au débauchage de R. Outcault par W. Hearst pour travailler au New York Journal. Une âpre bataille judiciaire autorise J. Pulitzer à continuer la parution de Hogan’s Alley qu’il confie à Georges B. Luks et W. Heart à publier la série sous un autre nom et R. Outcault choisit The Yellow Kid qui dès le 25 octobre 1896 prononcera ses premières paroles dans un balloon ; R. Oucault avait déjà fait parler d'autres personnages de son strip dans des balloons. En 1902 R. Outcault retourne au New York World et dessine l’antithèse de Yellow Kid avec Buster Brown, un enfant issu de la bourgeoisie new yorkaise[26].

C’est dans American Humorist, supplément hebdomadaire du New York Journal et en 1897 que Rudolph Dirks dessine The Katzenjammer Kids (Pim, Pam et Poum) sous forme d’« histoire en images » mais très vite R. Dirks utilise des balloons. C’est la première bande dessinée à utiliser la narration linéaire. Mais R. Dirks se brouille avec W. Hearst et quitte son journal pour aller dessiner dans le New York World de J. Pulitzer les Kids sous le nom de Hans and Fritz tandis que W. Hearst confie les Katzenjammer Kids à Harold Knerr[25].

Les lecteurs de ces journaux spectateurs de tous ces débauchages qui donnent lieu à des procès surnomment cette presse de Yellow journalism, expression qui désigne un journalisme fondé sur le sensationnel et les «coups», fait référence à ces épisodes.

Les comic strips

En 1903 Gustave Verbeck dessine dans le New York Herald les strips en palindrome: Upside-downs of little lady Lovekins and old man Muffaroo. Le strip de quatre cases se lit dans le sens normal de lecture de gauche à droite puis l’histoire se continue en retournant tête-bêche le journal et en relisant les cases dans le sens inverse, lady Lovekins se transforme alors en old man Muffaroo, le chapeau de l’une devenant la barbe de l’autre[27].

Les puristes[Qui ?] considèrent que la première bande dessinée n’utilisant que des phylactères pour faire parler les personnages date de 1905. Il s’agit de Little Nemo in Slumberland dessinée par Winsor McCay pour le New York Herald de J. Pulitzer. Cette bande dessinée est moderne à plus d’un titre, hormis le fait de l’utilisation systématique des phylactères, W. McCay déstructure la mise en page des strips en utilisant au maximum la surface de la planche pour créer des cases de dimensions adaptées au déroulement du récit. Il fait aussi une utilisation hardie des couleurs entre tons pastels et couleurs pures dans un style Art Nouveau[28]. W. McCay s’adresse à un public adulte comme déjà en 1904 avec Little Sammy sneeze qui détruit le cadre de sa case en éternuant le 24 septembre 1905 dans le New York Herald.

Le succès des sunday-strips est tel que le San Francisco Chronicle est le premier journal à faire paraître en 1907 des daily-strips dans ses pages sportives quotidiennes avec la serie Mister Mutt start in to play the races de Bud Fisher et qui devient Mutt and Jeff dans les pages du San Francisco Examiner[29]. Les sunday-strips se généralisent rapidement dans l’ensemble de la presse américaine.

En 1910 George Herriman dessine The Dingbat Family dans le New York Journal de W. Hearst. Au départ le strip n’a pas beaucoup de succès mais elle plait au boss qui la soutient. C’est dans ce strip qu’apparaissent progressivement Offissa Pupp, Ignatz Mouse et Krazy Kat. La bande s’appelle Krazy Kat en 1913. Elle est aujourd’hui considérée comme une œuvre majeur de la bande dessinée internationale compte tenu du nombre important de dessinateurs qui se déclarent influencés par le dessin de G. Herriman ainsi que par sa maîtrise de l’absurde et le surréalisme de ses dialogues[30].

C’est en 1912, que W. Hearst crée International News Service qui prend le nom de King Features Syndicate en 1914. Cette agence a pour objectif la vente à la presse mondiale des bandes dessinées dont elle détient les droits[29]. Suivent United Feature Syndicate, New York News Syndicate, Field Newspaper Syndicate, McNaught Syndicate, etc.

Le dessinateur n’est qu’un employé du syndicat qui peut être remplacé à tous moments par un autre dessinateur qui reprendra ses personnages[31]. Les dessinateurs abandonnent tous leurs droits aux profits des patrons de presse et cela durera jusqu'en 1950. Ainsi apparaît le principe du héros de bande dessinée passant de dessinateur en dessinateur[29].

Depuis la création des daily strips en 1907 et des syndicates à partir de 1912, c'est l'explosion des comics. Pratiquement toute la presse américaine publie des strips donnant leurs chances à des auteurs et des dessinateurs que la presse nationale ne reconnaît pas.

Les family strips

C'est à ce moment que les comics vont prendre un premier tournant. Si en Europe la bande dessinée est d'abord et avant tout enfantine, aux États-Unis le comic est adulte et familiale ; c'est ainsi que va se développer ce qui sera appelé plus tard les family strips, des bandes racontant l'american way of life naissante. Cela durera jusqu'à un certain 24 octobre 1929, le Jeudi noir de la Grande Dépression. La crise change la vie des américains et influence aussi les comics en annonçant la fin des funnies.

Une bande ouvre en 1912 le chemin Polly and her Pals (Poupette et sa famille) dans le New York Evening. Cliff Sterrett dessine les peines de cœur de Polly sans oublier de s’intéresser à toute la famille. Il dresse ainsi un portrait de famille américaine particulièrement réussi[32]. En 1918 le dessin de C. Sterrett évolue vers le cubisme et le surréalisme en faisant de lui un des pionniers du graphisme moderne[33].

Un autre dessinateur s’engouffre dans la brèche du futur family strip avec succès en 1913 en racontant l’histoire d’un couple de nouveaux riches. Geo McManus dessine Bringing up Father (La Famille Illico) avec un trait particulièrement épuré. G. McManus raconte la vie d'un couple de nouveaux riches G partagé entre la reconnaissance sociale pour Maggie et les copains de bar pour Jiggs[34].

En 1918, Franck King fait rentrer la vraie vie dans sa série Gasoline Alley. Ses personnages vont vivre comme dans la vie réelle, se marier, avoir des enfants, vieillir, etc. sous sa plume jusqu’en 1951, suivront quatre autres dessinateurs pour faire exister encore aujourd’hui cette série[35].

En 1920, Winnie Winkle de Martin Branner pour le Chicago Tribune, un journal de Joseph Medill Patterson, autre magnat de la presse rival de William Randolph Hearst, est emblématique de l'évolution des mœurs. La femme américaine vient d'acquérir le droit de vote et Winnie vie comme une jeune femme libérée ses amours en tous genres. C’est la première bande dessinée américaine à être traduite et publiée en France sous le nom de Bicot (Perry son jeune frère dans la version américaine) et non de Winnie (Suzy dans la version française)[36].

En 1922 les salons de l'ancien hôtel Waldorf Astoria de New York, connus pour ses expositions d'art, reçoivent la première exposition de comics[37].

Suit en 1924, en plein développement du capitalisme triomphant qui sait venir en aide aux pauvres dans la misère, Little Orphan Annie H (Annie, la petite orpheline) de Harold Gray pour le New York Daily News, un titre de J. Patterson. Les héros Annie et Oliver "daddy" Warbucks obtiennent tout ce qu'ils veulent par leur volonté et leur sens des affaires. Pour eux, l'audace paie toujours[35].

C’est en 1930, avec Blondie dessinée par Chic Young dans le New York American Journal que l'on a l'archétype du Family strip. Blondie sacrifie sa vie facile et tranquille de jeune aristocrate pour aider Dagwood Bumstead. Surnommée la petite fiancée de l’Amérique par ses admirateurs, elle se marie quand même avec lui en 1933 sans perdre ses lecteurs[35].

La même année Bud Counihan, ancien assistant de C. Young, crée Betty Boop en s’inspirant de la chanteuse Helen Kane. Ce sera la première héroïne de bande dessinée à être censurée au cinéma en 1932 pour obscénité à cause de sa poitrine provocante et de sa jupe trop courte[35].

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O Tico Tico premier journal illustré brésilien

La Grande Dépression plonge l'amérique dans le marasme, heureusement un héros va résoudre tous les problèmes avec une simple boîte d’épinard. Depuis 1919, Elzie Crisler Segar dessine dans les pages du New York Journal la série Thimble Theatre dans laquelle des personnages apparaissent et disparaissent au fil des strips ; il en est un qui va prendre la vedette dès 1929 et imposer son nom à la série, c’est Popeye. E. Segar rebaptise donc sa série Popeye, the sailor en 1931[38].

En 1930, l’ère des funnies prend fin avec la parution en bande dessinée d’un héros de dessin animé de Disney apparu en 1927, Mickey Mouse. C'est King Features Syndicate qui a acheté les droits à Walt Disney. Si le premier strip est scénarisé par Walt Disney et dessiné par Ub Iwerks avec un encrage de Win Smith, c’est Floyd Gottfredson qui assure l’évolution graphique de Mickey et de Dingo. Carl Barks crée Donald Duck et Uncle Scrooge (Oncle Picsou)[39].

Dans le même temps aux Amériques

Albéric Bourgeois, dessinateur québécois, travaille au journal La Patrie à partir de 1903. Bourgeois créé une bulle pour la série Les Aventures de Timothée dès 1904. Selon les spécialistes Michel Viau et Mira Falardeau, ce serait la première fois qu'une bulle est publiée en langue française.

En 1905 parait le premier journal illustré de bande dessinée O Tico Tico

La création d’une presse enfantine en France et en Europe de 1889 à 1931

Nous avons vu l’émergence d’une première diversification en direction du lectorat adulte avec la création d'une presse humoristique tel que Charivari (18xx), Le Chat noir (1882), Le Rire (18xx) ou Punch (1841), Judy (1867) et aussi Funny Folks (1874) ou Humoristisch Album. Parallèlement à cette presse satirique se répand aussi la publication de feuilletons en fascicules bon marché souvent illustrés et de romans populaires, la littérature dite « de gare » sous la poussée de l’éditeur Hachette.

Puisqu’à la suite de Töpffer la littérature peut être en estampes, puisque ses successeurs ont expérimenté ce nouveau mode d’expression avec des succès divers, il ne manquait plus que des éditeurs en fassent un média populaire (un moyen de communication) avant que les auteurs ne l’élèvent au statut de medium (l’objet en lui-même).

Les périodiques illustrés

La France est à l’origine d’une presse spécialisée à l’attention d’une clientèle spécifique, les journaux illustrés pour la jeunesse et dans un premier temps de la jeunesse bourgeoise.

Dès 1881, l'éditeur Louis Hachette fait paraître Mon Journal dans lequel Christophe livre ses premières illustrations en 1887. Tous les éditeurs veulent leur revue illustrée : en 1889 l’éditeur Armand Colin publie Le Journal de la Jeunesse avec une première histoire en images de Christophe Une partie de campagne. En 1898 Taillandier fait paraître L’Illustré national et en 1904 Jeudi Jeunesse. Fayard en 1903 propose Jeunesse illustré où collabore Benjamin Rabier[40]. Restées très marquée par la production des images d'Épinal, tous ces périodiques illustrés pour la jeunesse ne comportent que des textes accompagnés d'illustrations mais rien qui ne s’apparente à la bande dessinée. L’invention de Töpffer est déjà oubliée.

Le Petit Français illustré, le journal des écoliers et des écolières vers 1900

Au milieu de cette production il faut remarquer, en 1889, dans Le Petit Français illustré, le journal des écoliers et des écolières sous le crayon de Christophe La Famille Cornouillet, un roman illustré mais qui annonce la même année la visite de l’Exposition universelle par La Famille Fenouillard, une histoire en images qui paraît jusqu’en 1893 date à laquelle les éditions Armand Collin publient l’histoire en album[41]. Christophe sait jouer avec le cadre, ainsi dans la page du « Premier départ », il n’hésite pas à ne montrer qu’une partie de la scène. Monsieur Fenouillard monté sur une chaise inspecte le tableau des départs de train, mais l’habitude du « gaufrier » ne permet pas de cadrer la scène en hauteur. Christophe dessine le haut de la scène dans la case suivante avec comme récitatif « Les dimensions du dessin précédent nous ayant forcé de couper en deux Monsieur Fenouillard, cette figure est simplement destinée à montrer la suite de l’excellent négociant aux personnes d’une intelligence bornée et d’une imagination faible. » Christophe est bien le prédécesseur de Fred et Gotlib[42].

Christophe, de son vrai nom Georges Colomb (il ne dédaignait pas les jeux de mots et les calembours), qui se réclamait de l’influence de Töpffer, avait su faire la synthèse des innovations de ses prédécesseurs. Il enchaîne les images les unes aux autres comme Töpffer, il utilise le gros plan initié par Busch et il sait faire durer une histoire comme le meilleur feuilletoniste. Pour satisfaire son double public d’adulte et d’enfant, il développe ses histoires sur un double niveau de lecture en utilisant les doubles sens[43].

Et le succès appelant le succès, La Famille Fenouillard sera suivie de 1890 à 1896 par Les facéties du Sapeur Camember qui n'arrive pas faire disparaître la terre d'un trou dans un autre trou, de 1893 à 1899 par Vie et mésaventures du Savant Cosinus et sa merveilleuse invention l'Anémélectroreculpédalicoupeventombrosoparacloucycle et de 1893 à 1904 par Les Malices de Plick et Plock. Il commence en 1899 Haut et Puissant Seigneur, baron de Cramoisy qu’il laisse inachevée pour remplir des fonctions académiques[44]. Toutes ses histoires en images sont publiées en album dans un format à l’italienne par Armand Collin à partir de 1903.

Christophe est considéré par les spécialistes de la bande dessinée comme l'initiateur du genre en France[45], mais surtout celui qui fait du périodique le support privilégié de la bande dessinée et non l’album même si celui-ci continu d’exister[46]. Mais celui qui initie en 1905 une nouvelle façon d’éditer la bande dessinée est l’éditeur Gautier-Langereau avec la Semaine de Suzette.

C’est le premier périodique illustré spécialisé à l’attention de la jeunesse et plus précisément des jeunes filles de bonne famille. C’est dans ce journal que paraît dans le no 1 du 2 février 1905 Bécassine dessinée par Joseph Pinchon sur une histoire (on ne dit pas encore scénario) de Caumery qui n’est autre que Maurice Languereau le neveu de l’éditeur[47]. La légende veut que ce serait la rédactrice du journal qui ait demandé au dernier moment, pour remplir sa pagination, une histoire en image à la mode de Monsieur Christophe. Ces deux auteurs feront vivre 110 aventures à Annaïck Labornez originaire de Clocher-les-Bécasses. Le premier album paraît en 1913, suivi de 26 autres jusqu’en 1939.

Les « illustrés »

Les cinq frères Offenstadt (Charles, Edmond, Georges, Maurice et Nathan) s’associent pour créer une maison d’édition. Leurs premières productions, destinées à un lectorat adulte, sont plutôt grivoises à l’image du Tombeau des vierges. Après divers essais, ils décident a contrario du courant du moment de viser une clientèle populaire et non bourgeoise. Ils lancent d’abord en 1902 L’Illustré, un périodique appelé à un grand succès vingt ans plus tard sous le nom du Petit illustré. Puis en 1908, ils éditent L’Épatant et en 1909 Fillette pour concurrencer la Semaine de Suzette. Rebaptisant leur maison d’édition la SPE – Société parisienne d'édition – ils continuent sur leur lancée avec en 1910 L'Intrépide et en 1911 Cri-Cri, sans oublier en 1909 une clientèle spécifique les militaires avec La Vie de garnison[40]. En dix ans les frères Offendtadt sont devenus les premiers éditeurs de périodiques pour la jeunesse populaire[48]. Devant cette avalanche de titres seuls quelques éditeurs « bien pensants », se lancent dans l’aventure. En 1906, La Bonne Presse lance L’Écho de Noël et Le Petit Parisien édite Nos Loisirs, en 1910 c’est la parution de Ma récréation, tous ces périodiques visant une clientèle bourgeoise, à la différence de la SPE[40].

Fascicule des Pieds nickelés de Louis Forton

À Bécassine, petite bonne bretonne aux services de la marquise de Grand’Air pour la jeunesse bourgeoise, les frères Offenstadt[Note 6] vont, dans L’Épatant, opposer Les Pieds Nickelés de Louis Forton pour la clientèle populaire. Le succès de Croquignol, Filochard et Ribouldingue est immédiat, le vocabulaire « populacier », les expressions argotiques, le ton anti-bourgeois et limite anarchisant plaisent à toute la classe populaire adultes et enfants confondus[49]. Il faudra attendre 1965 pour que leurs aventures paraissent en albums. La SPE se contentant de n’éditer leurs aventures complètes qu’en petits fascicules sous couverture papier pendant la Première Guerre entre 1915 et 1917[50].

De la même façon, les frères Offenstadt vont opposer à La Semaine de Suzette leur périodique Fillette. Ils vont faire appel à Jo Valle, pour le texte, et à André Vallet, pour le dessin, qui vont créer L’Espiègle Lili. Là encore le succès va être éclatant puisque Fillette est le premier périodique à paraître deux fois par semaine, le jeudi et le dimanche. Valle crée une héroïne qui vieillit avec ses lecteurs, si au début de l’histoire Lili est une gamine dissipée qu’il faut mettre en pension à la fin de l’aventure en 1923, elle se marie avec un aviateur[51].

Tous ces créateurs vont suivre la même mise en page héritée des images d’Épinal. Par contre Christophe, Forton, Pinchon, Vallet et d’autres savent lier les cases entre elle pour narrer leurs histoires, mais ils choisissent tous, et leurs successeurs pour quelques années encore, de disposer leurs textes, de moins en moins descriptifs, sous les images. C’est un parti-pris clairement assumé car les balloons américains sont bien connus en France. Caran d'Ache les utilise occasionnellement, dès 1886 dans Le Chat noir et l’édition parisienne du New York Herald présente dès 1904 des strips les utilisant abondamment[52]. C’est le périodique familiale Nos Loisirs, publiant habituellement des nouvelles illustrées qui utilise le premier du matériel américain The Newlyweds and their baby’s (Les Jeunes Mariés et leur bébé) de Geo McManus parue en 1905 dans le New York World[37].

La presse illustrée

La première bande dessinée française à utiliser uniquement des bulles, n’est pas, contrairement à un savoir populaire, dessinée par Alain Saint-Ogan, mais par Rose Candide (pseudonyme d'Edmond Tapissier) ; c’est Sam et Sap publiée en 1908 dans le périodique Saint-Nicolas des éditions Delagrave[53]. L’Angleterre connaît en 1919 dans le Daily Mirror sa première bande nationale utilisant uniquement des bulles. Il s’agit de la très célèbre bande dessinée Pip, Squeak and Wilfred de Bertram J. Lamb (texte) et Austin B. Payne (dessin). Elle connaît un grand succès populaire et suscite un des premiers « fans clubs[Note 7] » The Wilfredian league of Gugnuncs[54].

Ce qui va modifier le paysage européen de la bande dessinée n’est pas le fait d’un périodique illustré pour la jeunesse mais celui d’un quotidien de presse. L'Excelsior est à l'origine d'une double évolution pour ne pas dire révolution, la parution de Bicot (Winnie Winkle) et de Zig et Puce, après avoir fait paraître la première vrai bande dessinée française, en mars 1923, Rigobert chasse le papillon de Naurac[55].

L’Excelsior, déjà pionnier du photojournalisme, se révèle aussi un pionnier de le bande dessinée. Le propriétaire du quotidien est Paul Dupuy, fils du directeur du Petit Parisien éditeur de Nos Loisirs. Depuis sa reprise du titre P. Dupuy cherche toutes les formules permettant de développer les ventes. En 1923, il achète les droits de publications de Winnie Winkle de Martin Branner au Chicago Tribune and New York News Syndicate. La bande dessinée paraît dans le supplément dominical L’Excelsior Dimanche sur une page intérieure en noir, blanc et rouge[56]. Elle est adaptée au public français, l’héroïne américaine Winnie est remplacée par son jeune frère Perry sous le nom de Bicot. Le succès est rapide et en 1924 le supplément dominical est rebaptisé Dimanche Illustré[57].

En 1925, c’est Alain Saint-Ogan, illustrateur connu, qui est appelé par Dimanche Illustré. Ainsi nait, en mai 1925 le premier succès de masse de la bande dessinée en Europe, Zig et Puce avec une innovation importante, dans une bande européenne, l’emploi systématique de la bulle[58]. Devant le succès populaire traduit par un abondant courrier des lecteurs la série est pérennisée jusqu’en 1934. Zig et Puce croisent sur leur passage un pingouin[Note 8] du nom d’Alfred qui ne les quitte plus et qui à l’occasion leur ravit la vedette. Le succès d’Alfred est tel qu’il est peut être le premier personnage de bande dessinée à faire l’objet de produits dérivés[Note 9]. Le graphisme de Saint-Ogan se raccroche au style Art déco, son trait précis est clair et lisible, inspirant beaucoup, de son aveu, Hergé[59].

Dès 1922, à l’âge de 15 ans, un jeune belge signant sous le nom de Georges Remi publie ses premiers dessins dans Le Jamais assez, Le Blé qui lève et Le Boy-scout. En 1927, avec les conseils de Saint-Ogan, il dessine, sous le nom d’Hergé, Totor, CP des Hannetons pour le Boy-scout belge. Dès 1925, il entre comme collaborateur dans un quotidien politiquement très à droite, dirigé par un abbé, le Vingtième Siècle. Il y dessine des réclames et des illustrations et à partir de 1927, quelques récits courts. Lors qu’en novembre 1928, il est nommé directeur du Petit Vingtième, un supplément hebdomadaire à destination de la jeunesse, il y dessine l’Extraordinaire Aventure de Flup, Nénesse, Poussette et Cochonnet. L’abbé Wallez, directeur du XXe siècle lui confie un ouvrage Moscou sans voile et lui conseille de s’en inspirer pour dessiner une histoire. C’est à partir du 10 janvier 1929, les Aventures de Tintin, reporter du Petit Vingtième, au pays des soviets. Tintin et Milou entre sans nuance dans l’histoire de la bande dessinée. Les ventes montent en flèche, Hergé dessine Quick et Flupke(1930) avant les Aventures de Tintin, reporter du Petit Vingtième, au Congo (1930), les Aventures de Tintin, reporter du Petit Vingtième, en Amérique (1931)[60]. Selon Dominique Dupuis « Dans ces trois premiers albums, le style d’Hergé n’est pas encore formé. Les influences les plus diverses apparaissent de Geo McManus à Alain Saint-Ogan, et son graphisme se révèle incertain et fluctuant, oscillant entre aplat et trait, hachure et trame. Seul domine le mouvement lié au rythme de l’aventure[61] ».

Les albums de Tintin paraissent dès 1930 en noir et blanc aux éditions du Petit Vingtième puis à partir de 1934 aux éditions Casterman avec des hors-textes couleurs. Par la suite, tous les albums noir et blanc seront redessinés et mis en couleurs par les Studios Hergé de façon à faire disparaître toutes les imperfections des premiers dessins. Le style d’Hergé, très inspiré au départ de celui de Saint-Ogan, est qualifié dans les années 1980 de « ligne claire » : trait précis, absence d’ombre, personnages stylisés dans un décor particulièrement soigné grâce à une documentation abondante[62]. Tintin continuera son aventure jusqu’à la mort de son créateur en 1983 au milieu de la réalisation de Tintin et l'Alph-Art[Note 10].

En Europe

Grande-Bretagne

C'est dans la revue Punch, créé en 1841, qu'est employé pour la première fois en 1843 le terme de cartoon. Il est en légende d'un dessin satirique de John Leech titré Substance and Shadow. Rapidement les cartoons se développent avec des revues comme Comic Cuts ou encore Illustrated Chips publiées par Amalgamated Press. Puck propose la couleur avec son premier numéro du 13 juillet 1904[63].

Le 14 août 1864, la revue Judy Magazine fait paraître un cartoon « Some of the Mysteries of the Loan and Discount » introduisant un héros, dessiné par le britannique Charles Henry Ross sur un scénario de la Française Marie Duval, qui va devenir mythique en Grande-Bretagne, Ally Sloper. Le succès est tel que le 3 mai 1884, les cartoons d'Ally Sloper paraissent dans une revue bon marché sous le nom de Ally Sloper's Half Holiday[63].

Belgique et Pays-Bas

Hergé bénéficie d’une longue culture d’histoires en images et de bandes dessinées en Belgique tant francophone que flamande. Le schéma de développement de la bande dessinée belge et néerlandaise est le même que celui déjà développé avec un précurseur dessinateur-illustrateur en la personne de Jan Linse qui travaille en 1874 pour l’Humoristish Album. En 1921, toujours aux Pays-Bas, il faut noter Nieuwe Oosterche sprookjes que Hans Baker publie dans les pages du quotidien Rotterdamsch Nieuwsblad qui est très certainement la première bande dessinée à paraître régulièrement dans un quotidien. Il dessine une nouvelle histoire en 1930 Adolphus.

En Flandre, c’est dès 1911 que paraissent les deux premières revues illustrées, De Kindervriend et Het Mannekensblad. En 1920, c’est la presse catholique Goede Pers (la Bonne Presse) qui lance un hebdomadaire illustré Zonneland. Les éditions de l’Églantine publient en 1926 un album traduit du néerlandais Fil de Fer et Boule de Gomme (Bulletje en Bonestaak) de A. M. de Jong (texte) et Georges van Raemdonck (dessin) prépublié à partir de 1922 dans le journal Het Volk. Un autre éditeur de langue française est célèbre pour ses publications de bandes dessinées par la qualité de ses dessinateurs, les éditions Gordinne qui font travailler les belges Albert Fromenteau et Al Peclers et les français Étienne Le Rallic et Marijac[64].

Italie, Espagne et Portugal

En 1908, le journal milanais Corriere della sera fait paraître un supplément illustré le Corriere dei Piccoli avec des récits de Antonio Rubino ou de Tofano qui créé le personnage de Bonaventura[65].

C'est le personnage de Charlot créé par Charlie Chaplin qui sera à l'origine de la bande dessinée en Espagne, en 1916, avec la revue Charlot et les dessins de Rojo[65].

Dès 1870, au Portugal, Pinheiro dessine les premiers récits de Binoculo e Berlinda. La première vraie bande dessinée est l'œuvre de Stuart Carvalhais qui dessine en 1915 dans Seculo Comic le récit de Quim e Manecas[65].

Finlande, Suède, Pologne et Union Soviétique

En Finlande, Fugeli dessine Pekka puupaa et en Suède Oskar Andersson dessine, entre 1902 et 1906, une bande dessinée muette dans la revue Söndags-Nisse : L'Homme qui fait tout ce qui lui passe par la tête. Ce style de bande dessinée est repris dès 1920 par Jacobsson avec Adamson[63].

C'est dès 1859, que les polonais peuvent découvrir dans Tygodnik Ilustrowany des récits dessinés par Kostrzewskir. C'est en 1919 que la propagande bolchevique est à l'origine des premiers récits, avant longtemps, du caricaturiste Geremmych dans La Rosta[63].

Au Japon de 1861 à 1931

Première ouverture vers l'Occident

Pendant la restauration Meiji, à partir de 1868, l’ouverture obligatoire du Japon au commerce extérieur s’accompagne d’une modernisation rapide du pays sous influence occidentale. De nombreux étrangers sont attirés au Japon pour enseigner les sciences et technologies occidentales et de riches japonais voyagent en Europe. Edo rebaptisée Tôkyô voit ses rues, éclairées par des réverbères, se peupler de pousse-pousses sans oublier les bicyclettes d'importation. C'est la création du yen et l'interdiction du chonmage (丁髷?, chignon traditionnel) et du port du shin-shintō (新新刀?, sabre). L'usage du kimono et du hakama (pantalon traditionnel) diminue au profit du costume occidental accompagné du chapeau et du parapluie, pour les hommes, et d'une coiffure européenne pour les femmes.

Les deux seuls quotidiens, existants au début des années 1960, étaient à destination de la colonie étrangère, le Nagasaki Shipping List and Advisor (bihebdomadaire de langue anglaise) et le Kampan Batavia Shinbun (Journal officiel de Batavia). La presse japonaise naît avec le Yokohama Mainichi Shinbun en 1871 et le Tokyo Nichinichi Shinbun en 1872. C'est le Shinbun Nishikie, créée en 1874, qui introduit le premier les estampes dans la presse japonaise.

Création d'une presse satirique

Magazine satirique Japan Punch d'avril 1883 édité par Charles Wirgman.
Magazine satirique Tôbaé, no 6, 1887 édité par Georges Ferdinand Bigot.

La presse japonaise se transforme aussi sur le modèle de la presse anglo-saxonne avec l’apparition des dessins d’humour sur le modèle américain et des caricatures à la mode britannique à partir de 1874 avec le E-Shinbun Nipponchi et surtout avec le Marumaru Shinbun créée par Fumio Nomura (野村 文夫, Nomura Fumio?) qui a fait une partie de ses études en Grande-Bretagne. Imprimé entre 1877 et 1907, il publie des dessins de Kinkichirō Honda (本多 錦吉郎, Honda Kinkichirō?) et de Kiyochika Kobayashi, créateur d'estampes ukiyo-e, qui fût élève de Charles Wirgman[66].

Wirgman fait partie de ces trois européens qui ont une influence certaine sur l'avenir de la bande dessinée et du manga. Ce caricaturiste anglais arrive à Yokohama en 1861 et l'année suivante il crée un journal satirique The Japan Punch dans lequel il publie nombre de ses caricatures dans lesquelles il utilise des balloons jusqu'en 1887[67]. Il enseigne en même temps les techniques occidentales de dessin et de peinture à un grand nombre d'artistes japonais comme Takahashi Yuichi (en)[68].

Autre caricaturiste, le français Georges Ferdinand Bigot arrive à Yokohama en 1882, il enseigne les techniques occidentales du dessin et de l'aquarelle à l'École militaire de la ville[67]. Parallèlement il publie des caricatures dans des journaux locaux et édite des recueils de gravure. En 1887 il crée lui aussi, 25 ans après C. Wirgam, une revue satirique Tôbaé dans laquelle il démontre sa maîtrise de la technique narrative en introduisant la succession des dessins dans des cases au sein d'une même page. Il part en Chine en 1894 pour couvrir pour The Graphic de Londres le conflit sino-japonais. De retour en France en 1899, il collabore comme illustrateur pour l'imagerie d'Épinal[69].

C'est à cette période qu'un fils d'enseignant hollandais dans une mission de Nagasaki quitte le Japon pour suivre des cours d'art à Paris où il tente quelques bandes dessinées dans le Chat noir avant de s'exiler aux États-Unis. C'est là que Gustave Verbeck dessine un des strips les plus originaux de l'histoire de la bande dessinée (cf. ci-dessus).

Création des mangas

C'est le caricaturiste australien Frank Arthur Nankivell (en) qui travaille pour le Box of Curios (ボックス・オブ・キュリオス, Bokkusu obu kyuriosu?), publié à Yokohama par E. B. Thorne, qui initie Yasuji Kitazawa, qui ne s'appelle pas encore Rakuten Kitazawa (en), à la caricature. En 1899, il quitte Box of Curios pour rejoindre le Jiji Shinpō (時事新報?) créée par l'intellectuel Yukichi Fukuzawa désireux de développer le mode satirique au Japon. C’est Kitazawa qui reprend le terme de manga pour désigner ses dessins, il se désigne lui-même comme mangaka (dessinateur de mangas)[70]. Le premier manga considéré comme tel date de 1902. Il s’agit d’une histoire dessinée par Kitazawa dans les pages illustrées du supplément du dimanche du Jiji Shinpō. Kitazawa s’inspire beaucoup de la culture européenne, son premier manga reprend le thème de l’arroseur arrosé[67]. Le supplément du Jiji Shinpō prend rapidement le nom de Jiji Manga (時事漫画?).

En 1905, Kitazawa crée son premier magazine le Tokyo Puck (東京パック?) en s'inspirant de l'américain Puck et du Rire français. Ce magazine en couleurs parait deux à trois fois par mois et contient des textes en japonais, chinois et anglais, des caricatures et un manga en six cases de Kitazawa. Plusieurs fois censuré pour ses caricatures féroces pour le pouvoir, il crée en 1912 deux nouveaux magazines Rakuten Puck (楽天パック?) et Katei Puck (家庭パック?). Mais c'est en 1908 que Kitazawa innove dans la presse japonaise en publiant Furendo (フレンド?, Amis), un magazine en couleurs exclusivement réservé aux enfants. Devant le succès, il renouvelle l'expérience en 1914 en créant la revue Kodomo no tomo (子供之友?) dans laquelle il dessine L'enfance de Toyotomi Hideyoshi[71]. Ce succès allait marquer le marché des mangas pour longtemps[72]. En 1914 paraît Shōnen Kurabu (少年倶楽部?, Le Club des garçons), en 1923 Shōjo Kurabu (少女倶楽部, Le Club des filles?) et en 1926 Yōnen Kurabu (幼年倶楽部?, Le Club des jeunes enfants)[73]. En 1929, Kitazawa entreprend un long voyage en Europe, en Afrique et aux Amériques. De passage à Paris en 1929, il expose en présence de Léonard Foujita et y reçoit la Légion d'honneur[67].

À la fin de l'ère Meiji, à l'ère Taishō (1912-1926), Ippei Okamoto (岡本 一平, Okamoto Ippei?) dessine des mangas pour le quotidien Asahi Shinbun. Il est l'un des inspirateur du mouvement des « Nouveaux représentants progressistes du manga » qui introduit au Japon les comics, entre autres Bringing up Father (La famille Illico) de Geo McManus parait dans Asahi Gurafu (アサヒグラフ?). Si à cette époque tous les mangas utilisent plus ou moins la bulle, il y a encore beaucoup de texte écrit dans les dessins. Le premier à généraliser l'emploi de la bulle est Katsuichi Kabashima (樺島 勝一, Kabashima Katsuichi?) qui dessine Les Aventures de Shōchan (正チヤンの冒険, Shōchan no bōken?) accompagné de son écureuil dans le premier numéro de Asahi Gurafu en 1923[74],[75].

C'est Okamoto qui invente le terme de manga kisha (漫画記者?, journaliste de manga) et qui crée la première association de mangaka appelée Tokyo manga kai (東京漫画会?, Rencontres des mangas de Tokyo) en 1915, qui devient en 1923 le Nihon manga kai (日本漫画会?, Rencontres des mangas du Japon) et en 1942 le Nihon manga hōkōkai (日本漫画奉公会?, Rencontres au service des mangas du Japon) avec pour premier président Kitazawa[76].

La satire et la caricature sont féroces envers le pouvoir en place et, en 1925, le gouvernement établit une censure en promulguant une « Loi de préservation de la paix ». La presse japonaise devient « politiquement correcte » mais la publication de mangas se développe. Des magazines féminins comme Shufu no tomo (主婦の友?, L'ami des ménagères) ou Fujin kurabu (婦人倶楽部?, Le Club des femmes) publient aussi des mangas à destination de leurs lectorats ou pour des mères de familles qui lisent ces mangas à leurs enfants[73].

Corée

C'est en 1883 que paraît le premier journal coréen Hanseong sunbo. Le 2 juin 1909, avec la première parution du Daehan minbo, apparaît le premier manhwa ou caricature. En première page, sous le titre Saphwa, les Coréens peuvent découvrir l'œuvre du caricaturiste Lee Do-yeong. Gravés sur bois, les fonctionnaires pro-japonais y sont représentés sous des traits de singes. Mais le journal est censuré par l'occupant japonais en 1910.

À la suite du soulèvement de 1919 qui suit la répression Samil, le gouverneur japonais Saitô Makoto relâche un peu son emprise. Le shinmunhak (renouveau culturel et littéraire) permet un développement de la presse et à partir de 1920 de nouveaux titres apparaissent favorisant l'essor des manhwas. À partir de 1924, avec Meongteongguri heonmulkyeogi (Les vains efforts d'un idiot) dessiné par Noh Su-hyeong et publié dans le Chosun Ilbo, le manhwa commence à adopter les conventions de la bande dessinée occidentale (cases et bulles).

Les années 1930 et 1940

Aux États-Unis de 1928 à 1949

Des aventuriers à la mode hollywoodienne

« Si le cinéma se développe en Europe d’abord comme une curiosité, puis un peu comme un art, aux États-Unis, il s’oriente dès le départ vers une consommation de masse. » Devant l'incertitude économique les studios hollywoodiens invente, dans un premier temps, le star system. C'est à la fin des années 1920, au moment où la standardisation passe du personnel (les acteurs entre autres) aux genres (western, « polar », science-fiction, comédie, mélodrame, etc.) que les héros d'aventures naissent[77]. La bande dessinée, à commencer par les comics, adoptent très rapidement la nouvelle mode, elle quitte le registre de l'humour pour adopter celui de l'aventure. Dans une société américaine, de plus en plus violente du fait de la crise économique, les comics recherchent une clientèle de plus en plus adulte en proposant du réalisme, de l'aventure, du dépaysement mais aussi de la violence. Les Américains, avec le cinéma et les comics, inventent le héros qui « gagne toujours à la fin[78] ».

Un des pionniers, pour ne pas dire le premier, est Roy Crane qui crée pour le syndicate Newspaper Enterprise Association, dès 1924, Wash Tubbs, aventurier éponyme des mers du sud à la recherche de trésors perdus. Cette aventure prend de l'importance en 1929 avec l'arrivée au côté de Georges Washington Tubbs d'un nouveau personnage particulièrement athlétique Captain Easy. Celui-ci prend de plus en plus de place pour finir par obtenir une sunday page en 1933 sous le nom de Captain Easy, Soldier of Fortune. Wash Tubbs et Captain Easy sont reprises en comic books par plusieurs éditeurs comme Dell, Hawley ou Argo[79].

Les super héros et les comic books

En Europe de 1934 à 1949

Un double mouvement vient d’être initié par Dimanche Illustré : d’abord l’intérêt des jeunes principalement mais aussi du public familiale, c’est toute la famille qui ouvre le journal du dimanche pour lire sur la page de gauche les aventures de Bicot et sur la page de droite Zig et Puce à la recherche de l’Amérique ; ensuite la découverte des bandes dessinées américaines. Et c’est aussi sur la base d’un matériel américain que va se développer l’intérêt de la bande dessinée en Europe.

Le public des jeunes de 7 à 77 ans déjà satisfait par des créateurs belges, découvre les bandes dessinées en provenance des États-Unis.

Le premier âge d'or

La bande dessinée franco-belge

Mickey

Spirou

Une période noire

Au Japon de 1931 à 1950

À partir de la guerre sino-japonaise, et comme plus tard aux États-Unis ou en Italie, la presse, y compris les mangas, se met au service de l'état pour soutenir l'effort de guerre. Cela n'empêche pas le très antimilitariste Norakuro (のらくろ?) de Suihō Tagawa (en), le manga d'un chien paresseux engagé dans l'armée impériale, première série longue[74]. C'est comme cela que les japonais lisent aussi les aventures de Speed Tarō (スピード太郎, Supīdo Tarō?) de Sakō Shishido (宍戸 左行, Shishido Sakō?), qui déjoue toutes sortes de conjurations étrangères, et celles de Dankichi dans Bōken Dankichi (冒険ダン吉?, « Les Aventures de Dankichi ») de Keizō Shimada (島田啓三, Shimada Keizō?). Ce seront les séries les plus populaires au Japon jusqu'au milieu des années quarante pendant lesquelles toute la presse ainsi que toutes les activités culturelles et artistiques subissent la censure du gouvernement militaire, ce dernier n'hésitant pas à mobiliser ces milieux à des fins de propagande.

Les années d'après guerre 1950 à 1980

En Europe

La bande dessinée adulte

Aux États-Unis

Le mouvement underground

En Asie

Le développement des mangas

Sous l'occupation américaine, les mangaka d'après-guerre subissent l'énorme influence des comic strip qui sont alors traduits et diffusés en grand nombre dans la presse quotidienne japonaise. Sazae-san de Machiko Hasegawa sera le premier grand succès d'après-guerre[74]. Cette génération d'auteurs a vu leurs villes rasées, leurs pères vaincus, leur empereur déchu de sa divinité, et ce que leurs idéologies véhiculaient jeté dans les poubelles de l'Histoire par les vainqueurs[80].

L'un d'entre eux, influencé par Walt Disney, révolutionnera le genre et donnera naissance au manga moderne : il s'agit du célèbre Osamu Tezuka. C'est en effet Tezuka qui introduira le mouvement dans la bande dessinée japonaise par des effets graphiques comme des traits ou des onomatopées soulignant toutes les actions comportant un déplacement, mais aussi et surtout par l'alternance des plans et des cadrages comme il est en usage au cinéma, rompant ainsi avec une tradition théâtrale, les personnages étant jusque-là toujours représentés en pied, à égale distance et au centre de l'image. On considère généralement Shin-Takarajima (新宝島?, lit. « La nouvelle île au trésor »), parue en 1947, comme marquant le début du manga moderne.

L'animation étant la véritable passion de Tezuka, il réalisa la première série d'animation japonaise pour la télévision en janvier 1963, d'après l'une de ses œuvres : Tetsuwan Atom (鉄腕アトム, Tetsuwan Atomu?), plus connue en France sous le nom d'Astro, le petit robot. Finalement, le passage du papier au petit écran devint courant et l'aspect commercial du manga prit de l'ampleur. Tezuka bouleversa le mode d'expression du manga, en explora les différents genres – alors principalement infantiles – et en inventa de nouveaux. Il inspira de nombreux artistes tels que le duo Fujiko Fujio (Obake no Q-tarō , Doraemon), Fujio Akatsuka (Tensai bakabon) et Shōtarō Ishinomori (Cyborg 009, Kamen Rider) qui se succédèrent au Tokiwasō, voire Leiji Matsumoto (Galaxy Express 999)[74].

Les années 1960 voient l'émergence de manga plus dramatiques dans lesquels sont abordés des sujets plus « sérieux » et réalistes, appelés gekiga[74]. Initié par Yoshihiro Tatsumi et Takao Saitō (Golgo 13), le style influencera notamment Sampei Shirato (Ninja bugeichō, Kamui den), Shigeru Mizuki (Kitaro le repoussant) et Tetsuya Chiba (Ashita no Joe), la plupart de ces auteurs participant au magazine d'avant-garde Garo[74].

En 1964 nait l'association des mangaka du Japon (日本漫画家協会, Nihon mangaka kyōkai?), qui décerne des prix annuels à partir de 1972.

Dans les années 1970, le manga pour filles, écrit par des femmes (shōjo) se développe à l'initiative du groupe de l'an 24, notamment Moto Hagio (Poe no ichizoku ) et Keiko Takemiya (Kaze to ki no uta), puis de Riyoko Ikeda (La Rose de Versailles), Suzue Miuchi (Glass no Kamen), et Yumiko Igarashi et Kyoko Mizuki (Candy Candy)[74]. Mettant en avant les relations psychologiques des personnages, il se détache des mangas pour garçons (shōnen)[74].

Le XXe siècle depuis 1980

En Europe

L'arrivée des mangas

Aux États-Unis

En Asie

En 1985, Tezuka Osamu reçoit le prix culturel de Tokyo, et en 1990, l'année qui a suivi sa mort, le Musée d'art moderne de Tokyo lui consacre une exposition. Cet événement marque l'introduction du manga dans l'histoire culturelle japonaise.

De la bande dessinée aux animes

Annexes

Documentation

Dictionnaires, encyclopédies et introductions générales à la bande dessinée

  • Marjorie Alessandrini (sous la direction de), Encyclopédie des bandes dessinées, Paris : Albin Michel, 1979. Réédition augmentée 1986.
  • Annie Baron-Carvais, La Bande dessinée, Paris : PUF, coll. « Que sais-je ? », 1994.
  • Michel Béra, Michel Denni et Philippe Mellot, Trésors de la bande dessinée, BDM 2005-2006, Édition de l'Amateur, 2004.
  • Henri Filippini, Dictionnaire de la bande dessinée, Paris : Bordas, 2005. Première édition 1989.
  • Patrick Gaumer, Larousse de la BD, Paris : Éditions Larousse, 2004. Particulièrement le hors-texte consacré à des monographies historiques par pays, et figuré HT dans les références.
  • Claude Moliterni, Philippe Mellot et Michel Denni, Les Aventures de la BD, Paris : Gallimard, coll. « Découverte Littérature », 1996.
  • Jacques Sadoul, 93 ans de BD, Paris : « J'ai lu », 1989.

Ouvrages d'histoire de la bande dessinée

Histoires générales ou concernant plusieurs pays
  • Gérard Blanchard, La Bande dessinée : histoire des histoires en images, de la préhistoire à nos jours, Marabout Université, 1969.
  • Dominique Dupuis, Au début était le jaune…, une histoire subjective de la bande dessinée, Motrouge : PLG, coll. « Mémoire vive », 2005.
  • Pierre Fresnault-Deruelle, La Bande dessinée, Armand Colin, coll. « 128 pages », 2009
  • Thierry Groensteen, La Bande dessinée depuis 1975, MA Éditions, coll. « Le Monde de… », 1985.
  • Thierry Groensteen (dir.), Les Origines de la bande dessinée, Paris : Le Collectionneur de bandes dessinées et Angoulême : CNBDI, 1996.
  • Thierry Groensteen, La Bande dessinée, son histoire et ses maîtres, Paris : Skira/Flammarion, 2009.
  • Claude Moliterni (dir.), Histoire mondiale de la bande dessinée, Paris : Pierre Horay, 1989. Première édition 1980.
  • Tim Pilcher et Brad Brooks, The Essential Guide to World Comics, Collins and Brown, 2005.
Monde francophone
  • Danny De Laet et Yves Varende, Au-delà du septième art : histoire de la bande dessinée belge, Bruxelles : ministère des Affaires étrangères, 1979
  • Michel Falardeau, La Bande dessinée au Québec, Éditions du Boréal, 1994.
  • Henri Filippini, Jacques Glénat, Numa Sadoul et Yves Varende, Histoire de la bande dessinée en France et en Belgique : des origines à nos jours, Grenoble : Glénat, 1984. Première édition 1980.
  • Thierry Groensteen, Astérix, Barbarella et Cie : Histoire de la bande dessinée d'expression française, Somogy et CNBDI, 2000.
  • Bruno Lecigne, Avanies et masacarades : l'évolution de la bande dessinée en France dans les années 70, Futuropolis, 1981.
  • Gilles Ratier, Avant la case : histoire de la bande dessinée francophone du XXe siècle racontée par les scénaristes, Montrouge : PLG, coll. « Mémoire vive », 2002.
Amérique du Nord anglophone
  • Jacques Bisceglia et Sylvie Brod, Underground USA, Corps 9, 1986.
  • Jean-Paul Gabilliet, Des comics et des hommes : histoire culturelle des comic books aux États-Unis, Éditions du Temps, 2004.
  • Jean-Paul Jennequin, Histoire du comic book, Vertige Graphic :
  1. Des origines à 1954, 2002.
  • Daniel Riche et Boris Eizykman, La Bande dessinée de science-fiction américaine, Paris : Albin Michel, coll. « Graffiti », 1976.
Japon
  • Paul Gravett (trad. Frédéric Brument), Manga : soixante ans de bande dessinée japonaise, Éditions du Rocher, 2005. Première édition anglaise 2004.
  • Thierry Groensteen, L'Univers des mangas : une introduction à la bande dessinée japonaise, Casterman, 1996. Première édition 1991.
  • Brigitte Koyama-Richard, Mille ans de manga, Paris : Flammarion, 2007.
Autres
  • (es), (en) et (fr) Collectif, La Historieta mexicana, Circulo de Tlacuilos de Mexico, 1973.
  • Collectif, La Dynamique de la BD coréenne, Korea Culture and Contents Agency, 2003.
  • Collectif, Historieta : regards sur la bande dessinée argentine, Vertige Graphic, 2008.
  • Marcel Bonneff, Les Bande dessinées indonésiennes : une mythologie en images, Puyraimond, 1976.
  • Bernard Millet, Samir, Mickey, Sindbad et les autres : histoire de la presse enfantine en Égypte, CEDEJ, 1987.
  • João Paulo Paiva Boléo, Le Portugal en bulles : un siècle et demi de bandes dessinées, Camara Municipal de Lisboa, 2000.
  • M.-C. Piques (dir.), Bandes dessinée chinoises, Centre de recherche de l'université Paris-VIII et Centre Georges-Pompidou, 1982.

Autres essais

  • François Forcadell, Le Guide du dessin de presse, histoire de la caricature politique française, Paris : Syros alternative, 1989.
  • W. Fuchs et R. Reitberger, Comics : Anatomy of a Mass Medium, Boston, 1971.
  • Thierry Groensteen, La Bande dessinée, une littérature graphique, Toulouse : Milan, 2005.
  • Thierry Groensteen, Un objet culturel non identifié, Angoulême : Éditions de l'An 2, coll. « Essais », 2006.
  • Thierry Groensteen et Benoit Peeters, Töpffer, l'invention de la bande dessinée, Paris : Hermann, coll. Savoirs sur l'art, 1994.
  • Thierry Groensteen (sous la direction de), Maîtres de la bande dessinée européenne, Paris : Bibliothèque nationale de France / Seuil, 2000. Catalogue de l'exposition tenue du 10 octobre 2000 au 7 janvier 2001 à la Bibliothèque nationale de France.
  • Benoît Peeters, Case, Planche, récit, lire la bande dessinée, Paris : Flammarion, coll. « Champs », 2002. Version poche de l'édition augmentée de 1998, première édition 1993.
  • Rodolphe Töpffer, Essai de physiognomonie, Genève, 1845.

Articles

  • Harvey B. Feigenbaum, « Hollywood à l’ère de la production globalisée », dans Le Monde diplomatique, août 2005, p. 22.
  • Lucile Giraudet, « Manga, naissance et évolution d’un genre » dans AsieMUTE no 3 (octobre 2006).
  • Thierry Groensteen, « Au commencement était Töpffer », dans Le Collectionneur de bandes dessinées no 64,( printemps 1990), p. 10-21.
  • Thierry Smolderen, « Trois formes de pages », dans Neuvième Art no 13 (janvier 2007), p. 20-31.

Internet

Notes et références

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Références

  1. Forcadell (1989), p. 30
  2. F. Forcadell (1989), p.29
  3. Exposition sur James Gillray du 1er mars au 31 mai 2006 dans le hall de la bibliothèque McLennan de l'université McGill
  4. a, b et c Collectif (2000), p. 30
  5. Groensteen (2006), p. 104
  6. Groensteen (1990), p. 19
  7. Entretiens avec Goethe, 4 janvier 1831.
  8. pas assez précis T. Groensteen et B. Peeters (1994)
  9. Groensteen (1990), pp. 19-20
  10. Pour ce paragraphe, sauf précisions: Groensteen (1990), pp. 15-16
  11. a, b et c Pour ce paragraphe, sauf précision supplémentaire, Collectif (2001), pp. 32-33
  12. Gaumer (2004), HT p. 19
  13. Smolderen (2007), p. 22
  14. Gaumer (2004), HT p. 50
  15. Gaumer (2004), HT p. 30
  16. Smolderen (2007), pp. 23-24
  17. Smolderen (2007), p. 26
  18. Gaumer (2004), HT p. 13
  19. Gaumer (2004), HT p. 5
  20. Gaumer (2004), HT p. 3
  21. Gaumer (2004), HT p. 8
  22. Gaumer (2004), HT p. 10
  23. A. Barron-Carvais (1985), p.12
  24. D. Dupuis (2005), p.16
  25. a et b A. Barron-Carvais (1985), p.13
  26. D. Dupuis (2005), p.17
  27. B. Peeters (2002), pp.96-100
  28. D. Dupuis (2005), p.23
  29. a, b et c D. Dupuis (2005), p.18
  30. D. Dupuis (2005), pp.25-26
  31. H. Filippini (1990), p. X
  32. D. Dupuis (2005), p.25
  33. H. Filippini (1990), p.503
  34. D. Dupuis (2005), p.24
  35. a, b, c et d A. Barron-Carvais (1985), p.14
  36. D. Dupuis (2005), pp.25 et 32
  37. a et b Quid (2007)
  38. D. Dupuis (2005), p.46
  39. D. Dupuis (2005), p.51
  40. a, b et c Béra, Denni, Mellot (2004)
  41. H. Filippini (2005) p. 231
  42. B. Peeters (1998) p. 26-27
  43. D. Dupuis (2005) p.12
  44. P. Gaumer (2004) p.167
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  46. T. Groensteen (2005) p.7
  47. A. Baron-Carvais (1985), p.20
  48. D. Dupuis (2005), p.30
  49. D. Dupuis (2005), p.31
  50. P. Gaumer (2004) p. 627
  51. H. Filippini (2005) p.225
  52. P. Gaumer (2004) p.625
  53. P. Gaumer (2004) p.625 citant le n°45 du Collectionneur de bandes dessinées de 1985
  54. P. Gaumer (2004) p.634
  55. D. Dupuis (2005) p. 33
  56. P. Gaumer (2004) p.856
  57. D. Dupuis (2005) p. 32
  58. D. Dupuis (2005) pp. 32-33
  59. P. Gaumer (2005) p. 696 et 870
  60. P. Gaumer (2004) pp. 383-384
  61. D. Dupuis (2005) p.36
  62. H. Filippini (2005), p. 626-627
  63. a, b, c et d C. Moliterni, P. Mellot et M. Denni (1996) p.19
  64. P. Gaumer (2004) HT, p. 30 et 38
  65. a, b et c C. Moliterni, P. Mellot et M. Denni (1996) p.18
  66. B. Koyama-Richard (2007), p. 106
  67. a, b, c et d L. Giraudet (2006), pp.24-25
  68. Ellen P. Conant, Challenging past and present: the metamorphosis of nineteenth-century, University of Hawaii Press, 2006, p. 87. (ISBN 9780824829377) [lire en ligne]
  69. B. Koyama-Richard (2007) p.107
  70. B. Koyama-Richard (2007), p. 115
  71. B. Koyama-Richard (2007) p.116
  72. Cette segmentation du marché des mangas par lectorats et classes d'âge est toujours en vigueur au XXIe siècle dans la presse manga.
  73. a et b B. Koyama-Richard (2007) p.122
  74. a, b, c, d, e, f, g et h Takeuchi Osamu, « La genèse du manga », nippon no 4, 2010, p. 10 à 13 (ISSN 1884-0663)
  75. B. Koyama-Richard (2007) p.126
  76. B. Koyama-Richard (2007) p.120
  77. Harvey B. Feigenbaum (août 2005), p. 22
  78. Dupuis (2005), p. 44
  79. Gaumer (2004) p.846
  80. Jean-Marie Bouissou, Pourquoi le manga est-il devenu un produit culturel global ?


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