- Codimension
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La codimension est une notion de géométrie, rencontrée en algèbre linéaire, en géométrie différentielle et en géométrie algébrique. C'est une mesure de la différence de tailles entre un espace et un sous-espace.
Sommaire
En algèbre linéaire
Définitions
Un sous-espace vectoriel F d'un espace vectoriel E sur un corps commutatif K est dit de codimension finie dans E si l'espace vectoriel quotient E/F est de dimension finie, ou encore, de manière équivalente, si F admet un sous-espace supplémentaire de dimension finie ; dans ce dernier cas, tous les supplémentaires de F étant isomorphes, ils auront même dimension. On peut alors définir la codimension de F dans E par :
Cette codimension est aussi égale à la dimension de n'importe quel supplémentaire de F dans E[1]. Cela résulte du théorème d'isomorphisme suivant :
Soient F un sous-espace vectoriel de E et u une application linéaire de E dans E'. F est un supplémentaire dans E de ker(u) si et seulement si l'application obtenue par restriction de u au départ à F et à l'arrivée à Im(u) est un isomorphisme de F sur Im(u).
DémonstrationSi l'on note v la restriction de u à F et Im(u), on vérifie que donc l'injectivité de v équivaut au fait que F et Im(u) sont en somme directe ; par ailleurs,
- avec
et la surjectivité de v équivaut à E = F + ker(u).
Si G et H sont deux supplémentaires de F dans E, on en déduit qu'ils sont isomorphes en prenant pour u la projection sur H = Im(u) parallèlement à F = ker(u). Si l'on prend pour u l'application linéaire canonique de E dans l'espace quotient E' = E/F, comme ker(u) = F et Im(u) = E/F, le théorème d'isomorphisme montre que tout supplémentaire de F dans E est isomorphe à E/F.
Il résulte de la définition que F=E si et seulement si codimE(F) = 0.
Cas de la dimension finie
Lorsque E est de dimension finie, si E = FG, alors dim(E) = dim(F) + dim(G) ; en effet :
Théorème — Lorsque l'espace E est de dimension finie, tous les sous-espaces vectoriels de E sont de codimension finie dans E et de dimension finie. Si F est l'un d'entre eux :
.
DémonstrationSi B est une base de F, c'est une famille libre de vecteurs de E. Le théorème de la base incomplète permet de compléter B en une base C de E. Comme E est de dimension finie, , et F est de dimension finie. Les vecteurs de C qui ne sont pas dans B engendrent un sous-espace vectoriel G de E, qui est lui-même de dimension finie, avec dim(G) = card(C) − card(B) = dim(E) − dim(F). On vérifie que G est un supplémentaire de F dans E, et F est ainsi de codimension finie dans E, avec de plus codimE(F) = dim(G) = dim(E) − dim(F).
Théorème du rang
Article détaillé : Théorème du rang.On rappelle qu'une application linéaire est de rang fini si son image est un espace vectoriel de dimension finie. C'est notamment le cas lorsque E ou F de dimension finie[1].
Théorème du rang — Pour que soit de rang fini, il faut et il suffit que le noyau de u soit de codimension finie dans E, et dans ce cas :
DémonstrationEn utilisant la première définition de la codimension, le résultat est immédiat si l'on note que l'espace quotient E / ker(u) est isomorphe à Im(u) par l'application qui à un élément [x] = x + ker(u) de l'espace quotient associe u(x).
En utilisant la deuxième définition de la codimension, on peut raisonner ainsi : Si la codimension de ker(u) dans E est finie, on peut considérer un supplémentaire F de ker(u) de dimension finie p ; en vertu du théorème d'isomorphisme ci-dessus, par restriction u induit un isomorphisme de F sur Im(u), ce qui montre que Im(u) est de dimension finie, égale à p, et notamment
-
- .
Réciproquement, si Im(u) est de dimension finie, à partir d'une base de Im(u), on construit dont est une base, de sorte que par restriction u induit un isomorphisme de G sur Im(u), et le théorème d'isomorphisme donne que G est un supplémentaire (de dimension finie) de ker(u) dans E.
En géométrie différentielle
Une variété de dimension n est un espace topologique M localement homéomorphe à un ouvert de Rn. La définition d'une sous-variété généralise celle de sous-espace vectoriel. La codimension d'une sous-variété N de M est définie comme
N étant elle-même une variété. En géométrie différentielle, la codimension peut aussi être associée aux plongements, aux immersions, aux feuilletages (en), etc. Si M est connexe, alors N=M si et seulement si codimM(N) = 0.
En géométrie algébrique
Article détaillé : Dimension de Krull.En géométrie algébrique, comme une variété algébrique (ou un schéma) peut être la réunion de deux parties fermées strictes de dimensions différentes, la notion de codimension est un peu plus délicate. Une variété non vide qui n'est pas réunion de deux fermés strictement plus petits est dite irréductible.
La codimension d'un fermé irréductible N contenu dans la variété M est par définition la borne supérieure des entiers n tels qu'il existe une suite strictement croissante de fermés irréductibles de M avec F0 = N. Elle est notée codim(N, M) en géométrie algébrique. Si M est irréductible, alors N=M si et seulement si codim(N,M) = 0.
Lorsque M est une variété algébrique irréductible, on a :
- .
Dans une variété algébrique intègre, une hypersurface (le lieu des zéros d'une fonction régulière non-nulle et non-inversible) est de codimension 1.
Un cycle de codimension n est une combinaison linéaire formelle à coefficients entiers de fermés irréductibles de codimension n[2].
Notes et références
- Lucien Chambadal et Jean-Louis Ovaert, « Algèbre linéaire et multilinéaire », dans Dictionnaire des mathématiques, Algèbre, analyse, géométrie, Albin Michel & Encyclopædia Universalis, 2002, 924 p. (ISBN 2-226-09423-7), p. 636-638
- Christian Houzel, « Géométrie algébrique », dans Dictionnaire des mathématiques, Algèbre, analyse, géométrie, Albin Michel & Encyclopædia Universalis, 2002, 924 p. (ISBN 2-226-09423-7), p. 492-493
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