Compagnie du chemin de fer de Lyon à Genève

Compagnie du chemin de fer de Lyon à Genève
Compagnie du chemin de fer
de Lyon à Genève
Création 1853
Disparition 1855
Forme juridique société anonyme
Siège social Drapeau de la France Paris (France)

La Compagnie du chemin de fer de Lyon à Genève[1] est une société anonyme créée en 1853, pour construire et exploiter une ligne entre les villes de Lyon et de Genève.

Sommaire

L'origine de la ligne

La ligne de Lyon à Genève est une exemple des conflits dintérêts et du jeu dacteur divergent entre les représentants des intérêts locaux (en lespèce la batellerie lyonnaise) et les représentants des intérêts nationaux (la Haute banque parisienne et le gouvernement)[2].

Lyon était de longue date un lieu dentrepôt et de transit des marchandises entre le nord et le sud par la vallée du Rhône, et plus encore entre la Suisse et lItalie, plus particulièrement le royaume sarde.

Le développement du trafic fluvial sur le Rhône, notamment depuis lessor de la navigation à vapeur à lorée des années 1830, a accentué limportance économique de Lyon. Aussi, lapparition du chemin de fer a-t-elle fait craindre aux intérêts lyonnais, et aux entreprises de navigation notamment, la perte de leur influence. Déjà, la construction de la ligne dAvignon à Marseille remis en cause leurs intérêts dans le bas Rhône détournant le trafic fluvial entre Avignon et Beaucaire au bénéfice du chemin de fer. Vint ensuite une menace au nord par la construction du chemin de fer de Dijon à Lyon. Malgré leur lutte à limiter le chemin de fer de Dijon à Villefranche-sur-Saône le trafic aurait été repris par la voie fluviale, les lyonnais perdit ce combat en raison de la réalisation complète de la voie ferrée entre Dijon et Lyon. Ils purent espérer limiter les conséquences de la ligne nord-sud en escomptant une rupture de charge dans la ville même de Lyon entre les deux lignes Paris-Lyon et Lyon-Marseille. Mais la construction de la gare de Perrache, qui devint finalement le lieu de jonction entre les deux lignes, mis fin à leurs espoirs.

À ce combat perdu du transit nord-sud Paris-Méditerranée, sajouta celui du transit entre le nord et lItalie. Certes, il existait des voies de communication soit par le Jura (Lons-le-Sauniercol de la FaucilleLausanne) soit par le bas Jura (MâconBourg-en-BresseBellegarde-sur-ValserineGenève) mais ils étaient utilisés principalement pour le trafic des voyageurs surtout à la belle saison et le passage routier par le col du Simplon était très difficile. Le trafic entre le nord et lItalie, comme entre la Suisse et lItalie, était donc tributaire des grandes entreprises de roulage et de navigation de Lyon, le transit seffectuant principalement par lest lyonnais (MorestelLes AvenièresSaint-Genix-sur-GuiersPont-de-Beauvoisin) et secondairement par Ambérieu-en-Bugey et la cluse des Hôpitaux[3]. Les intérêts lyonnais pouvaient donc se satisfaire a priori de la ligne Lyon-Genève par Ambérieula cluse des HôpitauxCulozSeysselBellegarde bien que, pour ôter tout risque dun détournement du transit venant du nord délaissant Lyon, ils auraient préféré une liaison LyonSaint-Genis-dAosteChambéryGenève. Cette ligne avait de surcroît lavantage damorcer une liaison avec Grenoble qui revendiquait une liaison avec Valence faisant courir le risque, pour les lyonnais, de perdre une part du trafic fluvial en amont de Valence. Cette ligne avait également les préférences du royaume sarde en lui garantissait un rôle dintermédiaire du trafic franco-italien. Cependant dautres intérêts, parisiens ceux- alliés aux banques protestantes de Genève, se manifestaient pour un transit du nord vers lItalie direct via MâconBourgChambéry et la vallée de la Maurienne ainsi que pour un Paris-Genève direct sans passer par Lyon. Mais dans un premier temps, ce projet ne pouvait se concrétiser faute daccord avec la partie sarde privilégiant à partir de Chambéry, nœud du réseau futur sarde, la liaison vers Genève par Aix-les-Bains et Annecy confiée à la Compagnie du chemin de fer Victor-Emmanuel lon retrouvait la même combinaison de capitaux parisiens et genevois[4]. Pourtant, les lyonnais étaient sur leur garde car la concession du Lyon-Genève avait été accordé sous réserve dun embranchement à Ambérieu vers Bourg et Mâcon. Il semble que le baron Girod de lAin (18191906) ait joué un rôle décisif pour cet embranchement expliquant ainsi sa présence, comme celle de ses descendants, au conseil dadministration du PLM[5].

Tout devait finalement se dévoiler dès lors que Cavour, soucieux de se ménager la bienveillance de lEmpereur pour lavenir du royaume sarde de lautre côté des Alpes (entrevue de Plombières en juillet 1858, mariage de Napoléon Jérôme avec Clotilde de Savoie en 1859), accepta de joindre le Chambéry-Genève au Lyon-Genève par Aix et Culoz[6] (convention avec le chemin de fer sarde Victor Emmanuel du 8 décembre 1855[7]).

Ainsi, une nouvelle fois, les intérêts lyonnais avaient été sacrifiés et le percement du tunnel ferroviaire du Mont-Cenis en 1871 devait concrétiser les efforts entrepris pour une liaison directe entre le nord, ainsi que la Suisse, et lItalie délaissant la ville de Lyon.

La constitution du réseau ferré autour de Lyon et dans la vallée du Rhône consacra la fin du monopole de Lyon sur le commerce avec la Suisse et lItalie ainsi que le déclin définitif de la batellerie lyonnaise.

La compagnie et ses réalisations

La ligne Lyon-Genève est concédée par décret du 30 avril 1853[8] à un groupe de financier conduit par François Bartholoni, et dautres administrateurs du PO, du Nord et du Lyon-Méditerranée, représentant la haute banque calviniste à Paris et resté en relation avec Genève en particulier le général Dufour, « sous les ordres duquel Louis-Napoléon Bonaparte avait servi dans l'armée suisse »[9], et le banquier Charles Kohler[2].

Fort dun capital de 40 MF (80 000 actions de 500 F), la compagnie doit construire la ligne dans un délai de six ans. LÉtat apporte une subvention de 15 MF une garantie dintérêt de 3 % sur 50 ans. La Suisse apporte une subvention de 2 MF[7],[10].

Le conseil d'administration est composé de MM. Bartholoni[11], président, Hély d'Oisel, vice-président, Louis Ador (résident à Genève), Edward Blount[11] (d'origine britannique, banquier à Paris), Comte de la Panouze, de Monicault, général Dufour (suisse), Oscar Galine, Girod de l'Ain, William Gladstone (britannique), Jayr, Charles Kohler (suisse), Abel Laurent et Rivet[12]

Pour la construction de la ligne, la compagnie a fait appel à la maison Fox et Anderson pour la section de Lyon à Bourg et à Basile Parent, Pierre Schaken, Thomas Brassey et William Buddicom pour le percement du tunnel du Crédo près de Bellegarde.

Pour léquipement de la ligne, la compagnie a contracté avec les usines de Fourchambault, du Creusot, de Terre-Noire, de L'Horme et de Vienne pour la fourniture de rails et de coussinets.

Pour le matériel, elle a commandé 12 locomotives aux ateliers de Mulhouse, 12 tenders aux ateliers dOullins ainsi que 32 voitures et 92 wagons aux ateliers Frosssard à Lyon[12].

Les premiers travaux ont été inaugurés le lundi 23 janvier 1854 à Satigny dans le canton de Genève[12]. La ligne complète est inaugurée le 16 mars 1858 par une cérémonie à Bourg qui se poursuivra sur les bords du lac Léman. Le raccordement à Culoz avec la Cie du chemin de fer Victor-Emmanuel est achevé le 2 septembre de la même année.

L'épilogue

Faute d'une assise financière suffisante[13], la compagnie du Lyon-Genève fusionna avec la compagnie Lyon-Méditerranée en 1855. Lincorporation de Lyon-Genève au Lyon-Méditerranée était avant tout une combinaison financière qui anticipait la fusion du Paris-Lyon et du Lyon-Méditerranée pour former la Compagnie des chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée[14]. La fusion entre le Lyon-Genève et le Lyon-Méditerranée ne devant intervenir quen 1860, à la deuxième année dexploitation de la ligne pour permettre den estimer la réelle valeur[7].

Résumé

La concession de la ligne de Lyon à Genève est attribuée, le 30 avril 1853, à la compagnie éponyme avec embranchement depuis la gare d'Ambérieu vers Bourg-en-Bresse et Mâcon. Les travaux ont débuté en 1854.

La compagnie fusionne le 19 décembre 1855 avec la Compagnie du chemin de fer de Lyon à la Méditerranée.

Cette nouvelle compagnie, fusionnée ultérieurement à la Compagnie du chemin de fer de Paris à Lyon, formera la Compagnie des chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée le 19 juillet 1857.

Dates d'ouverture

L'ouverture des lignes fut effective aux dates suivantes[15] :

Souvenir

À loccasion de linauguration de la dernière section de la ligne, le 16 mars 1858, une médaille commémorative a été éditée[16].

Notes et références

  1. A. Demeur, Les chemins de fer français en 1860 : Statuts des compagniesNotices historiquesSituations financières avec une introduction, Paris, Librairie centrale des chemins de fer de N. Chaix et Cie, 1860, p. 74 
  2. a et b Marcel Blanchard, Essais historiques sur les premiers chemins de fer du midi languedocien et de la vallée du Rhône : Les premières liaisons ferroviaires de Lyon avec la région alpine, Montpellier, imprimerie de la presse, 1935 
  3. Ibid., p. 99
  4. Ibid., p. 104
  5. Joseph Hours, « L'histoire des chemins de fer français et ses enseignements géographiques, à propos d'un livre récent », in Revue de géographie jointe au Bulletin de la Société de géographie de Lyon et de la région lyonnaise, 1949, Lyon, Vol. 24, n°2, pp. 127137 [1]
  6. Marcel Blanchard, opcit., pp. 110111
  7. a, b et c Annuaire Chaix 18551856.
  8. Alfred Picard, Les chemins de fer français. Étude historique sur la constitution et le régime du réseau, vol. 2, J. Rothschild, Paris, 1885, pp. 5256 [lire en ligne]
  9. François Caron, Histoire des chemins de fer en France, vol. 1 (17401883), page 215, Paris, Fayard, 1997 
  10. Jean Chaintreau, Jean Cuynet et Georges Mathieu, Les chemins de fer PLM, Paris, La vie du rail & La Régordane, 1995 , p. 25
  11. a et b Cf. biographies dans Nicolas Stoskopf, Les patrons du Second Empire. Banquiers et financiers parisiens., Paris, Picard et Cenomane, 2002 
  12. a, b et c Annuaire Chaix 18531854.
  13. Chaintreau et autres, op. cit., p. 25
  14. Marcel Blanchard, opcit., p. 106
  15. François Palau et Maguy Palau, Le rail en FranceLe Second empire, vol. 2 (18581863), Paris, Édition à compte d'auteur, 2001 
  16. Description de la médaille sur Numisrail

Bibliographie

  • A. Demeur, Les chemins de fer français en 1860 : Statuts des compagniesNotices historiquesSituations financières avec une introduction, Paris, Librairie centrale des chemins de fer de N. Chaix et Cie, 1860 [lire en ligne] 
  • Annuaires Chaix 1853-1854, 1854-1855, 1855-1856.
  • Marcel Blanchard, Essais historiques sur les premiers chemins de fer du midi languedocien et de la vallée du Rhône, Montpellier, imprimerie de la presse, 1935, 251 p. 
  • François Caron, Histoire des chemins de fer en France, vol. 1 (1740-1883), Paris, Fayard, 1997, 700 p. (ISBN 2-213-02153-8) 
  • Jean Chaintreau, Jean Cuynet et Georges Mathieu, Les chemins de fer PLM, Paris, La vie du rail & La Régordane, 1995, 384 p. (ISBN 2-902808-46) 
  • Joseph Hours, « L'histoire des chemins de fer français et ses enseignements géographiques, à propos d'un livre récent », in Revue de géographie jointe au Bulletin de la Société de géographie de Lyon et de la région lyonnaise, 1949, Lyon, Vol. 24, n°2, pp. 127137 [lire en ligne]
  • François Palau et Maguy Palau, Le rail en FranceLe Second empire, vol. 2 (18581863), Paris, Édition à compte d'auteur, 2001, 224 p. (ISBN 2-950-94212-1) 
  • Alfred Picard, Les chemins de fer français : Étude historique sur la constitution et le régime du réseau, vol. 2, Paris, J. Rothschild, 1885 
  • Nicolas Stoskopf, Les patrons du Second Empire. Banquiers et financiers parisiens., Paris, Picard et Cenomane, 2002, 384 p. (ISBN 9782905596840) 

Voir aussi

Articles connexes



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