Petit-peuple

Petit-peuple

Fée

Take the Fair Face of Woman… de Sophie Anderson

Une fée (du latin fata, pluriel neutre de fatum, « destin », interprété comme un féminin) est une créature surnaturelle, issue des croyances populaires (folklore), des mythologies anciennes ou de la littérature fantastique.

  • Au pluriel, « les fées » désignent une communauté désignée parfois par Petit Peuple, Bon Peuple, Peuple des Fées ou par d'autres euphémismes[1], rassemblant une multitude de créatures de la mythologie nordique et du folklore païen : les lutins, elfes, trolls, gnomes, korrigans
  • Dans la culture moderne, la fée est généralement décrite comme une créature humanoïde féminine, ayant des pouvoirs surnaturels comme par exemple la capacité de voler, de lancer des sorts ou d'influencer le futur. L'oubli et l'assimilation des folklores ont créé une confusion, et finissent par amalgamer autour d'une vision identique (fée Fata), des créatures aux noms et aux caractéristiques parfois opposées, issues de langues et traditions distinctes.
  • Devenues sujet de la littérature fantastique (puis du cinéma), les fées regroupent également des créatures purement imaginaires : les créatures fantastiques
  • En tant qu'adjectif, fée se définit dans le dictionnaire de Furetière (1694) comme une « chose enchantée par quelque puissance supérieure, des armes fées, qui ne peuvent être percées »[2] (exemple : la clef fée du conte de la Barbe bleue).

Sommaire

Féerie : légendes et croyances

Polysémie et étymologie

Ombre de fée

Le mot fée provient du latin fata, lui-même issu de fatum : la destinée. L'étymologie laisse donc penser que la fée serait liée au destin, dotée d'un don de prédiction ou bien d'une capacité à influencer le destin. Cette racine latine, renvoie donc à une créature tutélaire, celles qui se penchent sur le berceau d'un nouveau-né pour apporter protection et grâces magiques. Cette définition est une référence aux trois Moires, divinités gardiennes du Destin, de la mythologie grecque (les Parques de la mythologie romaine).Avec la fée fata, on retrouve aussi l'archétype classique des fées « matrones », comme dans La Belle au bois dormant.

Le terme moderne « fée », était autrefois utilisé également comme adjectif, tel « fé [3]» ou « faé [4]», en ancien français. On l'utilisait par exemple à propos d'un bois faé ou d'un bijou fé. L'adjectif prenant alors le sens « d'enchanté », touché par une magie. On utilise également le verbe féer, enchanter ou être enchanté[5]. Cet emploi élargissait la signification des fées ; elles avaient le don de lancer des sorts, les enchantements, illusions capable d'altérer les émotions et les perceptions, et étaient dotées ainsi de la capacité d'apparaître impressionnantes, terrifiantes ou invisibles.

Notons qu'en français moderne, outre un usage restrictif comme nom, fée a le genre grammatical féminin, ce qui accentue certainement la caractéristique sexuée féminine, d'une vision moderne de la fée.

Des trolls scandinaves.

Mais dans d'autres cultures occidentales, fée est traduit par un mot sans lien avec la racine latine fata. Par exemple, les cultures irlandaises ou scandinaves, avec les racines sidh ou alf[6], issus du gaëlique ou du norrois. On constate alors, que la définition de la nature et du rôle des fées est beaucoup moins restrictive, autant dans l'étymologie que dans le folklore féerique.

Cette comparaison des traductions, permet d'apporter une définition plus globale en se basant sur les références identiques entre les différents folklores :

  • La fée est une créature surnaturelle et magique, souvent humanoïde et intelligente, liée aux forces de la nature (ou l'Autre Monde), et vivant en marge du monde des humains.

Cette définition élargie des fées, permet alors de rassembler autour du mot "fée" des créatures qui semblent présentes dans toutes les cultures  : Les elfes et trolls scandinaves, les bansheeds celtes, les apsaras indiens, les kitsunes japonais…

Survivance des croyances

Illustration de John Bauer

En Europe, le folklore transmis par voie orale (chants, contes) a laissé subsister d'anciennes croyances païennes, malgré l'influence dominante du christianisme et de la modernité. Voilà pourquoi il est erroné de classer les fées, comme créatures « fantastiques », terme lié à un style littéraire (puis cinématographique) qui réduit les fées à de simples fictions.

La croyance dans l'existence de telles créatures surnaturelles subsiste encore dans certaines contrées d'Europe : par exemple les pays scandinaves, ou bien l'Islande — où le tracé d'une autoroute fut dévié, afin d'éviter un lieu habité par les fées[7].

En France, des études ethnologiques[8] d'après-guerre avaient relevé la subsistance de telles croyances, notamment en campagne auprès de personnes âgées. La Bretagne et l'Alsace, en raison peut-être d'une survivance des langues régionales, ont conservé de nombreuses traces du Petit Peuple, dans leur tradition orale et leur toponymie[9].

On peut aussi relier les fées aux croyances animistes du Japon pour des créatures et esprits de la nature, liées à la mythologie shinto. Dans la culture moderne, on peut également trouver la preuve de la pérennité de ces croyances (ou d'une résurgence) dans les cultes néo-paganistes ou néo-druidiques.

Distinctions

Seelie & Unseelie

Dans le folklore, de nombreuses classifications ont été faites à propos du Petit Peuple des fées. L'une des plus influentes est certainement la division entre la Cour Seelie (ou parfois Cour de l'Eté ou des Lumières) et la Cour Unseelie (ou parfois Cour de l'Hiver, ou des Ténèbres), d'après le folklore écossais[10]. Le therme seelie vient du gaélique et signifie "bénis" (unseelie= "non bénis").

Autres

L'autre est la distinction entre les fées vivant « en troupe », et les fées « solitaires »[11], distinction émise notamment par William Butler Yeats[12].

Ces distinctions sont toutes deux utilisées pour caractériser les « fées », entendues dans le sens de toutes les créatures surnaturelles ; elfes, pixies, ogres, trolls… Elles accentuent l'étrangeté des fées, et se différencient d'une distinction plus manichéenne (plus moderne peut-être), présente dans les folklores scandinave et écossais, qui transposent sur le Petit Peuple les valeurs d'une morale humaine (Bien, Mal), et les différencient entre créatures « bienveillantes » et « malveillantes ».

Katharine Mary Briggs note qu'une troisième distinction peut être envisagée ; celle des fées « domestiques », qui vivent dans les demeures humaines[11].

Folklores du Monde

La définition élargie des fées, permet alors de rassembler autour des créatures surnaturelles issues de diverses mythologies et folklores.

Folklore scandinave

Les fées du folklore scandinave sont issues principalement de la mythologie nordique. On désigne dans le Bon Peuple, notamment : les elfes, les trolls, les gnomes

Folklore germanique

Les fées du folklore germanique sont liées à la mythologie germanique, très semblable à la mythologie nordique. En plus de créatures semblables au folklore scandinave, on trouve spécifiquement : le Kobold et le Gobelin

Folklore celtique

Les fées du folklore écossais, irlandais, anglais et breton semblent issues principalement de la mythologie celte. Voir par exemple : la Banshee (ou Bansidh) qui habite le Sidh, personnage féminin connue en Irlande ayant des pouvoirs magiques. Le korrigan breton (de la racine "korr" = nain) est proche du lutin.

Folklore français

Croisement de plusieurs influences (celtique en Bretagne, germanique à l'Est et romane au Sud), on trouve en France notamment lutins, gobelins et korrigans, en plus de la « dame fée » (fata).

Cependant, quand la France est apparue, la mythologie était déjà bien fixée et les personnages merveilleux spécifiquement français sont des inventions littéraires ou des évolutions de personnages issus d'un folklore plus ancien[13].

Folklore japonais

Article détaillé : kitsune.

Art et littérature

Le conte de fée

Le conte merveilleux, dit aussi conte de fée, est un genre littéraire dans lequel interviennent des éléments surnaturels ou féeriques, des opérations magiques, des événements miraculeux propres à enchanter le lecteur, ou l'auditeur, dans le cas d'une séance de conte.

Vision au Moyen Âge

Dragon Mélusine au-dessus du château

Dans la tradition littéraire, la fée Mélusine, apparaissant par exemple dans le Livre de Mélusine de Jean d'Arras (1392), témoigne de l'existence d'un folklore populaire autour des fées, durant le Moyen-Age, lié peut-être aux anciennes mythologies celtes. Voir aussi la fée Morgane ou la fée Viviane. La geste Huon de Bordeaux, puis le Roman d’Aubéron esquisse le portrait d'Aubéron « roi de Féerie ».

Vision au XVIIe siècle

Très présentes dans la littérature occidentale à partir du XVIIe siècle, dans les contes de Charles Perrault, de Madame d'Aulnoy ou des frères Grimm, elles sont un héritage du folklore européen dont ces contes sont une talentueuse transcription.

La république mystérieuse : Des elfes, faune, fées et autres semblables, livre écrit Robert Kirk en 1691, présente les fées sous un jour assez inquiétant: ce sont des êtres invisibles et pernicieux. Publié pour la première fois en 1815, cet ouvrage était devenu presque mythique.

Vision au XIXe siècle

Le folklore du Petit Peuple s'accorde avec les élans vers la nature du romantisme littéraire, dans des contes fantastiques. En France, Charles Nodier publie Trilby ou le lutin d’Argail (1822) et La Fée aux miettes (1832). Le danois Hans Christian Andersen devient célèbre pour ses nouvelles et ses nombreux « contes de fées » ; Le vilain petit canard, La Petite Sirène, La Reine des neiges… Le Dictionnaire Bouillet nous les présente au XIXe siècle de la façon suivante :

« comme des êtres fantastiques, jouissaient d'un pouvoir surhumain, mais étaient soumises quelquefois à des lois bizarres et humiliantes. On les représente tantôt sous la figure d'une femme jeune, belle, couverte d'habits magnifiques ; tantôt comme une vieille ridée et couverte de haillons et elles sont parfois armées d'une baguette magique, instrument de leur puissance surnaturelle. Sans être immortelles, elles ont une existence de plusieurs milliers d'années. On a cherché leur origine dans les faunx ou fanie des anciens, qui prédisaient l'avenir et dont la première était Fatua ou Fauna, l'épouse de Faunus; on fait aussi dériver leur nom (en italien fata) de fatum, destin ; mais la croyance aux fées paraît plutôt se rattacher à la religion des Druides et dériver de la vénération que les Gaulois avaient pour les Druidesses. Quoi qu'il en soit, les fées ont joué un très-grand rôle au moyen âge ; elles occupent une grande place dans les romans de chevalerie. »

Vision moderne

Aujourd'hui en Occident, la littérature et le cinéma fantastique semblent la source première d'une vision populaire des fées. Citons notamment :

Voir aussi les catégories Livre sur les fées.

La fée fata

Description

Cette fée est généralement décrite comme une créature humanoïde et féminine. De taille variable, dotée ou non d'ailes (dans le dos), elle semble toujours posséder des pouvoirs surnaturels, comme par exemple :

  • le pouvoir de voler
  • le pouvoir de lancer des sorts
  • le pouvoir de connaître ou influencer le futur

Cette fée renvoie à la créature tutélaire, celles qui se penchent sur le berceau d'un nouveau-né pour apporter protection et grâces magiques, archétype classique des fées « matrones », comme dans La Belle au bois dormant.

Fées célèbres

Statue de Ludwig Michael von Schwanthaler : La fée Mélusine

Au Moyen Âge, de grandes familles, des contrées même avaient leur fée protectrice :

Plusieurs écrivains, Walokenaër, Alfred Maury, en France, Wolf, Schreiber, en Allemagne, se sont livrés à de savantes recherches sur les fées. Le psychanalyste Bruno Bettelheim a proposé une version psychanalytique des contes de fées[14].

Charles Perrault et Madame d'Aulnoy ont écrit pour l'enfance des Contes de Fées qui ont pour base d'antiques traditions.

Dans la langue française

Expressions liées aux fées

  • La fée verte : l'absinthe.
  • La fée électricité : l'électricité, porteuse d'innovation technologique et d'amélioration des conditions de vie (c'est également un tableau monumental de Raoul Dufy).
  • Une bonne fée s'est penchée sur son berceau : il a une bonne étoile, il a de la chance (référence à la fée marraine de la Belle au bois dormant). Une légende dit que les fées se penchent sur tous les berceaux pour leur donner leurs dons pour la vie.
  • fée du logis : experte du ménage.
  • Avoir des doigts de fée : être habile de ses mains.
  • Vivre un conte de fées : voir ses rêves devenir réalité.
  • un travail de fée : un travail minutieux.
  • Le mot provençal fada évoque d'abord quelqu'un qui est possédé par les fées.

Dictons

  • « Chaque fois qu'un enfant dit "Je ne crois pas aux fées.", il y a quelque part une petite fée qui meurt », Peter Pan de J. M. Barrie
  • « On a banni les démons et les fées ; Sous la raison les grâces étouffées Livrent nos cœurs à l'insipidité », Ce qui plaît, etc. de Voltaire
  • « En mai les fées ont fort à faire », La teinture des physiciens et des sophistes de Gabriel d’Hervillier
  • « Les dieux et les fées se trompent aussi », proverbe chinois
  • « La vie est un conte de fée qui perd ses pouvoirs magiques lorsque nous grandissons », Le diable en personne de Robert Lalonde
  • « Seule la faiblesse de nos organes et de notre contact avec nous-mêmes nous empêche de nous apercevoir dans un monde de fées », l' Encyclopédie de Novalis
  • « Les contes de fées sont les romans érotiques des enfants », Le Bonheur dans l'esclavage de Jean Paulhan
  • « La bonne grâce est le vrai don des fées ; sans elles on ne peut rien, avec elles on peut tout », Cendrillon de Charles Perrault
  • « Fées répandez partout la rosée sacrée des champs », Le songe d’une nuit d’été de William Shakespeare
  • « Les fées nous échappent. Elles sont radieuses et on ne peut les saisir, et ce qu’on ne peut avoir on l’aime éternellement », Son journal de Jules Renard
  • « Un homme amoureux, qui plaint l’homme raisonnable, me paraît ressembler à un homme qui lit des contes de fées, et qui raille ceux qui lisent l’histoire », Maximes et pensées de Chamfort
  • « Les faveurs des femmes sont dans les romans ce que sont, dans les contes, les souhaits accordés par les fées. Il s’agit de ne pas se tromper », L’ultime faveur de Patrick Wald Lasowski
  • « Les fées font leur lessive dans une bulle de savon et cuisent leur soupe sur un feu follet », A quoi pensez-vous ? de Béatrix Beck
  • « Les fées nous endorment, nous ouvrent les portes de leur royaume, qui se referment sur nous sans qu’elles aient pris la précaution de nous en remettre la clé », Fé de Jean Adrian
  • « Être musicienne ? C’est être fée ! », Le salon vert de Françoise Dumoulin-Tessier

Les fées dans les arts

Les fées au cinéma

Les fées dans la littérature de fiction

Notes et références

  1. Katharine Mary Briggs, An Encyclopedia of Fairies, Euphemistic names for fairies, (Pantheon Books, 1976) p. 127. ISBN 0-394-73467-X
  2. Charles Perrault, Contes (introduction, notices et notes de Catherine Magnien), Editions Le Livre de Poche Classique
  3. Littré : En normand, on dit aussi au masculin fé : le fé amoureux, héros d'une légende populaire. — Dans le Chablais, fighe, fie ; dans le Jura français, fau ou fé ; dans le canton de Vaud, fatha ou fada.
  4. Littré : XIIe s. Atant es vous Auberon le faé, Huon de Bordeaux, v. 3855. XIIIe s. Moult ont Jason entr'eus loé ; Bien dient tous qu'il est faé, DU CANGE, fadus.
  5. Littré : Douer de propriétés magiques. Les vieux contes disent souvent : Je vous fée et refée. Mais qu'au combat où rien ne sert armure, Où rien ne sert qu'on ait féé la peau…, DESHOUL., Rondeau redoublé au duc de St-Aignan.
  6. alf à rapprocher de la racine indo-européenne albh (blancheur, brillance)
  7. Documentaire Enquête sur le monde invisible, Jean-Michel Roux, 2002
  8. Paul-Yves Sébillot, Le Folklore de France, Maisonneuve et Larose, 1968
  9. Gaby Sarazin-Heidet, Légendes d'Alsace et de Franche-Comté, 1982
  10. Brian Froud and Alan Lee, Faeries, Peacock Press/Bantam, 1978 ISBN 0-553-01159-6
  11. a  et b Katharine Mary Briggs, An Encyclopedia of Fairies, Euphemistic names for fairies
  12. William Butler Yeats, Irish Fairy and Folk Tales
  13. Voir par exemple les personnages dans Les Contes de ma mère l'Oie de Charles Perrault
  14. Bruno Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, Robert Laffont éd., Paris, 1976 (1976) rééd 1999: ISBN 2266095781

Annexes

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Voir « fée » sur le Wiktionnaire.

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

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