Peine de mort au japon

Peine de mort au japon

Peine de mort au Japon

Peine de mort
Généralités
Mort · Crime capital · Couloir de la mort · Exécution sommaire
Détails
Application de la peine de mort (par pays)


Méthodes d'exécution
(les plus courantes)
Injection létale · Pendaison · Arme à feu
Alternatives et militants
Alternatives
Emprisonnement à perpétuité · Exil
Militants et actions abolitionnistes
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La peine de mort au Japon constitue le châtiment suprême dans ce pays qui l'exécute régulièrement par pendaison. La peine capitale est dans la pratique utilisée essentiellement contre les auteurs de multiples meurtres commis avec circonstances aggravantes.[1] Bien que l'âge de la majorité soit de vingt ans, la peine de mort est applicable à partir de dix-huit ans au moment du crime (il n'y a donc pas violation de la Convention internationale des droits de l'enfant).

Sommaire

Histoire

Le Japon a une longue tradition de la peine de mort, principalement en temps de guerre. Dans certains cas, se donner la mort est vue comme une façon noble de mourir dans la société japonaise.

Depuis que le code pénal japonais s'est occidentalisé sous l'ère Meiji, il autorise la peine de mort pour les crimes "les plus odieux". Les États-Unis d'Amérique du Nord ont très peu réformé le code pénal en 1945, lorsqu'ils ont occupé le pays et la peine de mort fut maintenue.

Le pays n'a connu aucune exécution de 1989 à 1993, cela est dû aux ministrex de la justice de l'époque, un abolitionniste, qui refusa de signer les ordres d'exécution des condamnés. Mais elles reprennent avec l'arrivée de Masaharu Gotoda, qui en tant que légaliste considère que pour la crédibilité du système juridique japonais, il faut appliquer les sentences prononcées par les tribunaux.

De 1990 à 1995, l'opinion publique fut sensibilisée, principalement par les médias, sur la question de l'abolition de la peine de mort. Un débat public commença même à être institué. L'attentat au gaz sarin dans le métro de Tokyo en 1995 fit basculer l'opinion.

En 2007, 81,4 % des japonais déclaraient « la peine de mort est indispensable et ne peut être évitée dans certains cas » et 50,2 % qu'elle « ne devrait pas être abolie dans un avenir proche »[2]. La Fédération internationale des droits de l'homme estime que ce chiffre est à nuancer, car des 81,4% des personnes favorable à la peine de mort, 31,8% sont pour son abolition dans le cas où la situation du pays était amenée à changer[2].

En juin 2007, l'avocate Maiko Tagusari déclarait que « le sujet est tellement tabou que la plupart des Japonais ne savent pas comment les condamnés sont exécutés »[3]. Récemment le gouvernement japonais a modifié certaines pratiques, il a par exemple decidé de dévoiler l'identité des condamnés exécutés [4] et d'annoncer leur exécution au sein du parlement[5]. Le Parti démocrate du Japon (PDJ) a promis d'« encourager un débat national » sur cette question en cas de victoire aux législatives du 30 août. Aprés avoir gagné les élections, Keiko Chiba, une femme politique ancienne secrétaire générale des parlementaires d'Amnesty International a été nommée ministre de la justice, cinq autres membres du gouvernement sont connus comme opposés à la peine de mort. Beaucoup pensent qu'aucune exécution n'aura lieu durant sa mandature. [6] Dans une interview, elle a déclaré qu'en tant que ministre elle allait se détacher de la ligue des parlementaires pour l'abolition et qu'elle souhaitait un débat public, incluant la publication des informations sur l'application de la peine de mort, notamment les photographies des lieux d'exécution. [7]

Jurisprudence

Selon la jurisprudence de la cour suprême Japon :

« La peine capitale ne peut être appliquée que lorsque la responsabilité de l'auteur du crime est extrêmement grave et que la peine maximale est inévitable du point de vue de l'équilibre entre le crime et le châtiment ainsi que du point de vue général de la prévention, en tenant compte des circonstances, notamment la nature, le motif et les modalités du crime, en particulier la persistance et la cruauté du moyen de mise à mort, la gravité des conséquences, en particulier le nombre de victimes tuées, les sentiments des proches en deuil, les effets sociaux, l'âge et les antécédents de l'auteur du crime et les circonstances qui suivent la commission de celui-ci[1]. »

Procédure pénale

Après avoir été condamné par la juridiction de premier ressort l'accusé peut faire se pourvoir devant la juridiction d'appel et être jugé de nouveau, et même voir sa peine aggravée en appel si il n'a pas déjà été condamné à mort. Ensuite il peut formuler un recours devant la Cour suprême du Japon, l'équivalent français du pourvoi en cassation. La Cour suprême n'entend du fond mais de la forme et peut ordonner que l'affaire soit rejugée devant une autre Cour d'appel. Même si après cela il est toujours possible d'obtenir la grâce ou la révision du procès, ces recours n'ont pas vocation à être accordés car ils peuvent être formulés autant de fois que voulu). Le ministre peut ordonner l'exécution après la confirmation de la condamnation par la Cour suprême.

Au moins cinq des meurtriers exécutés de 2006 à 2009 avaient été condamnés à perpétuité en premier ressort, le parquet ayant fait appel de leur condamnation. Il est plus rarement possible que la cour suprême rejette une condamnation à perpétuité prononcée en appel l'estimant trop laxiste, et ordonne que l'accusé soit rejugé et condamné à mort.

En tout le Japon comptait 166 condamnés à mort en juillet 2009, dont 103 ayant eu leur sentence confirmée par la cour suprême (dont six femmes) et 50 ayant passé l'étape de l'appel. Sur les 13 condamnés restants, 10 ont au moins deux meurtres à leur actif. Les trois restants sont Tetsuya Shiroo, un membre de la mafia ayant tué le maire de Nagasaki[8] et deux autres hommes accusés d'avoir enlevé, violé puis tué Rie Isogai (une jeune femme de 31 ans) durant un cambriolage. Le père de la victime avait réuni une pétition de 318 000 signatures en faveur de leur condamnation à mort, ce fut la première fois durant tout l'ère Heisei que plusieurs personnes écopent de la peine capitale pour un même meurtre. Un troisième participant, qui s'était rendu volontairement, a lui été condamné à la prison à vie.[9] L'assassin du maire de Nagasaki a finalement eu sa peine ramenée à la prison à vie en 2009 notamment en raison du fait qu'il s'agissait d'un meurtre unique. [10]

Depuis mai 2009 les tribunaux criminels ne se composent plus seulement de trois magistrats mais aussi de six jurés populaires. Une majorité de 5 voix incluant au moins un magistrat est requise pour voter la mort. [11] Après l'affaire Rie Isogai, de nombreux quotidiens nationaux se sont explicitement exprimés en faveur de la peine de mort, mais ont émis des sérieuses réserves quant aux difficultés que devront rencontrer les futurs japonais qui auront été sélectionnés dans ce genre d'affaires.[12]

Au Japon, le taux de criminalité, y compris en matière d'homicide est réputé pour être l'un des plus bas du monde. Le système judiciaire est pourtant l'un des moins répressifs : 74 % des personnes reconnues coupables de meurtre écopent de peines inférieures à 11 ans de prison.

Le Japon permet théoriquement la libération d'un condamné à perpétuité à partir de 10 ans de détention. Dans la pratique les prisonniers ne sont libérés en moyenne qu'après 31 ans. [13] Appliquant la stratégie abolitionniste issue des États-Unis, des parlementaires ont réclamé l'institution d'une perpétuité réelle dans l'objectif d'obtenir ainsi une réduction des condamnations à mort. Le ministre de la Justice et le barreau se sont opposés à cette proposition, rappelant qu'il serait périlleux voire inhumain de conserver des gens en prison jusqu'à leur mort, et qu'il est déjà très difficile d'être libéré pour un condamné à perpétuité.

Dans le couloir de la mort

Dans la vie au sein de la prison, à part avec les gardiens, les condamnés vivent isolés, dans une cellule de quatre Tatamis soit deux mètres sur quatre, avec un WC, un évier et une fenêtre obscurcie l'empêchant de contempler le ciel. Quand il n'a pas d'activité, il doit se tenir assis sur le plancher. Il est filmé vingt-quatre heures sur vingt-quatre, la lumière restant allumée de 21 heures à 6 h 30 du matin pour éviter les suicides. Les condamnés disposent de la télévision et ont droit à trois livres.

Amnesty International critique le fait que les détenus restent pendant des années, parfois des décennies dans les quartiers des condamnés à mort sans connaître la date de leur exécution, chaque jour étant potentiellement le dernier. Selon elle un stress intense et prolongé expliquerait que beaucoup de détenus dans ces quartiers souffriraient mentalement du phénomène du couloir de la mort. La question du manque de communication quant à la date de l'exécution, a été considérée par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies comme étant incompatible avec les articles 7 et 10 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques[14]. Les détenus ne prennent connaissance de leur exécution que quelques heures avant et leurs famille ne sont prévenues que le lendemain par voie de presse[15]. Le ministère japonais invoque lui le fait qu'aucune règlementation japonaise ne le contraint à communiquer plus qu'il ne le fait déjà ainsi que les efforts pour éviter les suicides et que l'exécution se déroule paisiblement[1]. Le ministre Kunio Hatoyama avait proposé que l'exécution ait lieu obligatoirement dans un délai de six mois suivant le rejet du pourvoi devant la cour suprême, ce qui suscita un tollé dans les rangs des abolitionnistes.

Le Forum 90 contre la peine de mort, a énoncé un certain nombre de manquements présumés aux droits humains, les détenus vivent dans des cellules de 6 m2 où il est interdit de se mouvoir. Le détenu est surveillé en permanence pour éviter toute tentative de suicide. Cette surveillance nécessite que la cellule soit toujours éclairée même durant les moments de repos. Il lui est interdit de voir des journalistes. Les prisonniers disposent d'une demi-heure par jour de sortie sur un terrain de 10 m2. La Fédération internationale des droits de l'homme affirme que « toutes les requêtes des prisonniers sont passibles de censure et le simple fait qu’un prisonnier cherche à obtenir réparation peut être considéré comme une atteinte à l’intégrité de l’établissement et du personnel pénitentiaires, ainsi qu’une preuve d’indiscipline, du mauvais comportement ou du manque de remords du détenu, et l’exposer à des représailles[16]. »

En janvier 2006, le Nichibenren prend l'initiative inédite d'envoyer un questionnaire à soixante-dix-neuf condamnés à mort détenus dans sept prisons. Cinquante-huit ont répondu, les résultats ont été publiés dans Asahi Shimbun, Tokyo, 4 avril 2006. À la question Que souhaiteriez-vous ?, les réponses ont été : un besoin d'amélioration immédiate des conditions de vie quotidiennes, comme pouvoir regarder le ciel à travers les fenêtres des cellules, faire plus de sport à l'extérieur, recevoir de la part des familles des légumes ou des fruits, pouvoir éteindre la lumière pendant la nuit, parler avec d'autres détenus, ne plus subir la censure sur les correspondances.

Déroulement des exécutions

L'exécution doit avoir lieu dans un délai de cinq jours suivant la signature de l'ordre d'exécution par le ministre de la Justice. La seule et unique méthode d'exécution utilisée est la pendaison. Les condamnés à mort ne sont pas incarcérés dans des maisons centrales normalement réservées aux condamnés à de longues de peines mais dans des centres de détention, équivalent français des maisons d'arrêt. Sept de ces centres de détention sont équipés d'une salle d'exécution, chacune affecté à l'une des Cours d'appel du Japon (à Sapporo, Sendai, Tokyo, Nagoya, Osaka, Hiroshima et Fukuoka. Il y a aussi une Cour d'appel à Takamatsu, mais pour des raisons obscures, les exécutions de cette juridiction sont mises en oeuvre à Osaka).

Les condamnés sont avertis de leur exécution le jour même, les exécutions se déroulant généralement vers 9-11 h. Auparavant il étaient prévenus des jours à l'avance comme aux États-Unis, mais cela fut supprimé pour éviter les suicides. La famille peut ensuite récupérer le corps ou les cendres. Juste avant son exécution, le condamné rencontre un religieux avec qui il peut parler. Il peut éventuellement prendre un dernier repas, écrire une lettre ou un testament mais le temps est limité. Il est ensuite menotté et ses yeux sont bandés. Un rideau qui cachait l'échafaud est alors ouvert, on l'y lui attache les pieds et passe la corde au cou. L'ouverture de la trappe précipitant le condamné dans le vide est actionnée par trois ou cinq boutons que les surveillants doivent presser en même temps. Un seul de ces boutons fonctionne. Ceci est destiné à déculpabiliser les gardiens, de la même façon lors des pelotons d'exécution, les tireurs tirent avec des balles à blanc et seul un tireur tire à balles réelles tout en l'ignorant.

Un commission parlementaire a recommandé de prévenir les condamnés un jour avant leur exécution, leur laissant le temps de se préparer[17].

Application récente

A partir de 1989 un moratoire sur les exécutions avait été pratiqué au Japon par les ministres successifs de la justice. En 1993, il fut décidé de mettre fin à ce moratoire non-officiel, et le Japon continua à exécuter entre 1 et 6 condamnés par an jusqu'en 2005 ou un nouveau moratoire fut instauré par le ministre Seiken Sugiura. Le 25 décembre 2006, les exécutions ont à nouveau été rétablie par le nouveau ministre Jinen Nagase. Les exécutions sont annoncés par un communiqué du ministère la justice dans la journée après qu'elles aient eu lieu.

Shōkō Asahara, le chef de la secte Aum Vérité Suprême, a vu sa condamnation à mort validée par la Cour suprême le 15 septembre 2006 pour avoir planifié les attentats aux gaz sarin.

L'ONU a voté fin 2007 une résolution appelant à un moratoire sur la peine de mort, le Japon a rejeté l'argument de la pression internationale et européenne déclarant dans une note verbale qu'« il n'y a pas de consensus international selon lequel la peine de mort devrait être abolie » et que « aucun camp n'a le droit d'imposer son point de vue à l'autre[18] ».

En novembre 2007, le ministre de la Justice, Kunio Hatoyama, a rencontré des mouvements abolitionnistes, dont des représentants d'Amnesty International, pour entendre leur opinion[19].

En 2009, Masumi Hayashi, une Japonaise de quarante-trois ans, a vu sa condamnation à mort par pendaison validée par la Cour suprême[20]. Elle était accusée d'avoir empoisonné quatre personnes à l'arsenic et intoxiqué soixante-trois autres en 1998[21].

Exécutions

Nombre d'exécutions au Japon depuis 1990[22]
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999
0 0 0 7 2 6 6 4 6 5
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
3 2 2 1 2 1 4 9 15 7

Sur les 35 meurtriers exécutés depuis 2006, 30 ont été condamnés pour le meurtre d'au moins deux personnes et trois des cinq restants avaient déja été condamnés pour meurtre avant celui qui a entraîné leur condamnation à mort. En effet, lorsque les ministres envisagent des exécutions, ils choisissent les condamnés en fonction de la gravité de leur crime, de plus en plus indépendamment de l'ancienneté de leur condamnation. Le temps s'écoulant entre la finalisation de la sentence et l'exécution est très inégal, allant de deux ans à plus d'une vingtaine d'années selon les cas. [23] La plupart de ces exécutions ont eu lieu à Osaka et à Tokyo.

Notes et références

  1. a , b  et c Cinquième rapport présenté par le Japon au Comité des droits de l'Homme le 25 avril 2007 (lire en ligne ; extraits)
  2. a  et b http://www2.ohchr.org/english/bodies/hrc/docs/ngos/FIDHJapan94_fr.pdf
  3. Brien Aurore, « Exécutions en série au Japon », dans Le Monde diplomatique, juin 2007, p. 22-23 [texte intégral (page consultée le 3 août 2009)] 
  4. [1]
  5. [2]
  6. Japan's new justice minister opposes executions
  7. (en)http://mdn.mainichi.jp/mdnnews/news/20090930p2a00m0na004000c.html
  8. Frédéric Charles, « Le meurtrier du maire de Nagasaki condamné à mort », dans Radio France internationale, 26 juin 2008 [texte intégral (page consultée le 3 août 2009)] 
  9. (en) « 2 to hang for gruesome murder », dans The Straits Times, 18 mars 2009 [texte intégral (page consultée le 3 août 2009)] 
  10. http://www.lematin.ch/actu/monde/yakuza-meurtrier-maire-nagasaki-echappe-potence-171870
  11. (en) Natsuko Fukue et Mariko Kato, « Determining sentences seen as lay judges' hardest task », dans The Japan Times, 14 mai 2009 [texte intégral (page consultée le 3 août 2009)] 
  12. (ja) M. Morishima, « 社説ウオッチング:闇サイト殺人判決 死刑制度前提に容認 », dans The Mainichi Shimbun, 22 mars 2009 [texte intégral (page consultée le 10 avril 2009)] 
  13. (en)JDPIC : DP ISSUES: Life Without Parole (LWOP)
  14. (en) « Japan Hanging on to Death Penalty », dans Human Rights Features, 23 avril 2003 [texte intégral (page consultée le 3 août 2009)] 
  15. La peine de mort au Japon sur revoltes.org
  16. À contre-courant de la tendance internationale : D. Plaintes, Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme, , 60 p., p. 38 
  17. (en) Stuart Biggs, « Japan May Provide Notice for Execution of Inmates, Asahi Says », dans bloomberg.com, 1er avril 2009 [texte intégral (page consultée le 3 août 2009)] 
  18. Reproduction de la note verbale sur le site peinedemort.org
  19. [3]
  20. [4]
  21. Le Monde, 28 juin 2005
  22. (ja)Source
  23. RECENT EXECUTIONS

Annexes

Articles connexes

Personnes exécutés

Liens externes

Bibliographie

  • L'autre couloir de la mort, de Philippe Pons, article paru dans le quotidien Le Monde du 28 juin 2003
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