- MicroARN
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Les microARN (ou miARN) sont des ARN simple-brin, longs d'environ 21 à 24 nucléotides, impliqués dans la régulation de l'expression des gènes.
Il existe plusieurs centaines de gènes de microARN dans les génomes de la plupart des organismes pluricellulaires. Les miARN contrôlent l'expression des gènes ; ce sont des répresseurs post-transcriptionnels : en s'appariant à des ARN messagers, ils guident leur dégradation ou la répression de leur traduction en protéine.
Sommaire
Historique
L'existence des microARN a été rapportée pour la première fois en 1993[1] chez le nématode C. elegans et ils ont été décrits plus précisément en 2001[2].
Biosynthèse
Les gènes de miARN sont transcrits sous la forme de longs précurseurs appelés « pri-miARN »[réf. nécessaire]. Ces précurseurs sont clivés dans le noyau par un complexe nommé Microprocesseur, et formé par les enzymes Drosha et DGCR8 (Di George Critical Region 8 ou Pasha) (chez les animaux) ; par une enzyme de la famille Dicer (chez les plantes); en un produit intermédiaire appelé « pré-miARN ». Le pré-miARN est un ARN long d'environ 70 nucléotides, replié en tige-boucle imparfaite par complémentarité de bases entre la première moitié et la deuxième moitié de sa séquence.
Ce pré-miARN est transporté du noyau au cytosol par transport actif GTP-dépendant grâce à une interaction avec l'exportine 5 (chez les animaux).
Le pré-miARN est ensuite clivé par une enzyme de la famille Dicer qui permet l'hydrolyse de la structure boucle (chez les animaux, cette réaction se déroule dans le cytoplasme ; elle est nucléaire chez les plantes), pour libérer un petit ARN double-brin appelé « miARN ».
Mode d'action
Ce miARNdb (db=double brin) interagit alors avec une protéine de la famille Argonaute (Ago1 ou Ago2) pour former le complexe RISC (RNA-induced silencing complex). Ce complexe d'environ 160kDa a été décrit comme étant suffisant à l'activité de Gene silencing des miARN, cependant d'autres protéines tel la Geminine peuvent s'y ajouter pour former des complexes allant jusqu'à 550kDa. Au cours de la formation du RISC il y a passage d'un miARNdb à un miARN sb (sb=simple brin). Seul le brin spécifique de l'ARN messager (ARNm) cible du miARN est gardé (réaction thermodynamique)au sein du complexe.
L'ARNm cible est alors chargé au sein du complexe RISC. Deux voies de « silencing » sont alors possibles, soit la dégradation de l'ARNm cible si le complexe contient la protéine Ago2, soit la répression de la traduction de ce dernier si le complexe contient la protéine Ago1.
Les enzymes Dicer sont également responsables de la production de petits ARN interférents (pARNi) à partir de longs ARN double-brin, au cours du processus d'interférence à ARN. Ce processus a été décrit chez la plante comme pouvant être une défense antivirale.
Des miARN pourraient même directement se coller sur des gènes et les « éteindre », via une méthylation des séquences ARN codant les cibles des miARN[3]. Il n'est pas exclus qu'un tel processus puisse aussi exister chez l'animal.
Fonction
Elles sont encore mal connues, mais les microARN ont été montrés comme étant impliqués dans un grand nombre de fonctions physiologiques essentielles telles
Des microARN dérégulés semblent être à l'origine, directement ou indirectement d'un grand nombre de tumeurs. Ceux qui induisent directement un mécanisme cancers sont dits « oncomiR » (ref). Certains microARN circulants, c'est-à-dire dosés dans le sang du patient, pourraient également être de bons biomarqueurs de la leucémie[8],[9]. De même, de nombreux miARNs sont retrouvés dérégulés dans les tumeurs solides de façon récurrente. Par exemple, dans les tumeurs du foie, on retrouve souvent une surexpression de miR-21 et une sous expression de miR-122[10]. De plus, il existe des dérégulations d'expression de miARN associées à des facteurs de risques d'apparition des carcinomes hépatocellulaires[11].
Il semble donc exister des voies de carcinogenèse spécifiques à des facteurs de risques et ceci montrent tout l'intérêt des miARNs comme marqueurs de diagnostique et pronostique.
Fixés aux ARNs messagers, ils influent sur la stabilité et le mécanisme de traduction de l'ARN. Chez l'Homme, les microARN réguleraient l'expression d'au moins un tiers des gènes. Un même microARN semble pouvoir être tantôt oncogène, tantôt au contraire contribuer à la suppression tumorale. Certains types de miARN sont également présents dans le plasma sanguin.
Certains microARN sont specifiques du muscle, en particulier cardiaque. La survenue d'un infarctus du myocarde entraîne un relargage de ceux-ci dans la circulation et leur dosage pourrait être un marqueur biologique d'infarctus[12].
miARN et virus
Quelques équipes ont étudié les interactions entre miARN et virus. En effet certains miARN des cellules hôtes seraient capables de cibler des ARN viraux et confèrent un rôle antiviral à ces molécules (ref) ou au contraire permettant au virus de s'accumuler dans la cellule. Cette situation a été décrite pour le miARN miR-122a spécifiquement exprimé dans le foie et favorisant la réplication de l'ARN du virus de l'hépatite B par une interaction dans sa séquence 5' non codante (Ref).
De plus, il semblerait que certains virus possèdent aussi des gènes codant des miARN au sein de leur génome. Ces derniers pourraient participer à une régulation des ARN viraux ou alors participeraient à une déstabilisation des miARN de l'hôte.
Un des gros challenges actuel est de pouvoir mieux identifier les gènes ciblés par ces miARN afin de mieux comprendre leur rôle et les conséquences de leur dérégulation dans les pathologies.
Notes et références
- (en) RC Lee, RL Feinbaum et V Ambros, « The C. elegans heterochronic gene lin-4 encodes small RNAs with antisense complementarity to lin-14 », dans Cell, vol. 75, 1993, p. 843-854 [lien PMID]
- (en) M Lagos-Quintana, RL Rauhut et W Tuschl, « Identification of novel genes coding for small expressed RNAs », dans Science, vol. 294, 2001, p. 853–858 [lien PMID]
- Khraiwesh B et al. Cell, 2010, 140-11-22
- gènes codant des ARN. Victor Ambros, Bonnie Bartel, David P. Bartel, Christopher B. Burge, James C. Carrington, Xuemei Chen, Gideon Dreyfuss, Sean R. Eddy, Sam Griffiths-Jones, Mhairi Marshall, Marjori Matzke, Gary Ruvkun and Thomas Tuschl (2003) "A uniform system for microRNA annotation", RNA, 9: 277-279. [1] Cette publication (en anglais) définit les microARN et propose des voies à suivre pour classer comme microARN, des
- MicroRNAs as regulators of differentiation and cell fate decisions, Cell Stem Cell, 2010;7:36–41 Ivey KN, Srivastava D,
- Science. David Baulcombe (2002) "An RNA Microcosm", Science, 297: 2002-2003. [2] Cette publication (en anglais) discute des processus où sont impliqués les siRNAs et les microARN, dans le contexte de deux articles publiés dans le journal
- C.elegans. Lee, R.C., Feinbaum, R.L. and Ambros, V. (1993) "The C. elegans heterochronic gene lin-4 encodes small RNAs with antisense complementarity to lin-14", Cell, 75: 843–854. [3] Cette publication (en anglais) décrit la découverte de "lin-4", le premier miRNA découvert chez
- PLoS ONE (2009/05/14) TANAKA M., OIKAWA K., TAKANASHI M., KUDO M., OHYASHIKI J., et al. ; "Down-Regulation of miR-92 in Human Plasma Is a Novel Marker for Acute Leukemia Patients" ;
- JOHNSON Alexander, LEWIS Julian, RAFF Martin, ROBERTS Keith et WALTER Peter ; The molecular biology of the cell. 5th edition. Editeurs : ALBERTS Bruce, . Pp 493-495
- [miRNAs in cancer: the case of liver tumors]Ladeiro Y, Zucman-Rossi J.Med Sci (Paris). 2009 May;25(5):467-72. French.PMID: 19480827
- MicroRNA profiling in hepatocellular tumors is associated with clinical features and oncogene/tumor suppressor gene mutations. Ladeiro Y, Couchy G, Balabaud C, Bioulac-Sage P, Pelletier L, Rebouissou S, Zucman-Rossi J.Hepatology. 2008 Jun;47(6):1955-6.3PMID: 18433021
- Circulating microRNA: a novel potential biomarker for early diagnosis of acute myocardial infarction in humans, Eur Heart J, 2010;31:659-666 Wang GK, Zhu JQ, Zhang JT, Li Q et Als.
Voir aussi
Articles connexes
- ARN
- ARN interférent
- Petit ARN interférent
- Une liste des différents types d'ARN
- Liste d'abréviations de biologie cellulaire et moléculaire
- Génomique
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